La Gravette de Mayolas, lettre du 11 août 1669
Mardi, j’allais d’un pas fort prompt
Dans le Collège de Clermont123
Y voir Jonatas, Tragédie
Plus belle qu’une Comédie,
Qui fait paraître que l’Auteur
Est un bon Versificateur,
Et son esprit scientifique
Fait dignement la Rhétorique.
Le Fils d’un Duc et Maréchal
La Ferté, d’un air sans égal,
Fut un des premiers Personnages
Avec de très grands avantages.
Dans la fleur de ses jeunes ans,
Il a de si rares talents,
Que chacun justement espère
Qu’il suivra les traces du père.
Cet aimable et charmant Marquis
L’admiration s’est acquis,
Paraissant encore à la danse,
Faisant tous ses pas en cadence.
Le Marquis de Gesvres aussi
Dansa mieux qu’on ne voit ici,
Et de Pianais, Comte ilustre,
Augmenta la grâce et le lustre
De ce Ballet, fait par Beauchamp,
Un des Maîtres des plus savants.
La Ferté, qu’encore je nomme,
Finit le divertissement
Et conclut agréablement ;
Récitant une Ode admirable,
D’une façon incomparable,
À l’honneur de mon POTENTAT
Qui, tous les ans, avec éclat,
Par un effet de sa largesse,
Donne les prix à la jeunesse.
Ledit Marquis que j’ai cité
Qui brille de chaque côté,
Qui sort d’un très illustre lieu,
L’Abbé Molé, très noble et sage,
Eurent tous quatre un bon partage,
Les trompettes, les violons,
Touchant d’agréables chansons,
Divertirent cette Assemblée,
Qui ne fut nullement troublée,
Et les glorieux Spectateurs,
De cet Ouvrage admirateurs,
Sortirent de la Compagnie
Remplis d’une joie infinie.