(1671) Témoignages des gazettes en vers sur les spectacles dansés entre 1660 et 1671 «  1668 — 17 janvier : Mascarade — Lettres en vers à Madame de Robinet — Robinet, lettre du 21 janvier 1668 »
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(1671) Témoignages des gazettes en vers sur les spectacles dansés entre 1660 et 1671 «  1668 — 17 janvier : Mascarade — Lettres en vers à Madame de Robinet — Robinet, lettre du 21 janvier 1668 »

Robinet, lettre du 21 janvier 1668

Le lendemain, se fit un Bal
Dedans le beau Palais Royal,
Non à Huis clos, mais Porte ouverte,
Où mainte et mainte Troupe alerte,
Vint en Masque, en tant de façons,
Que Callot, dans ses Visions,
Gravant, de son Burin idoine,
La Tentation de Saint Antoine,
A moins fait de divers Portraits
De tous les Diables les plus laids,
Qui furent, d’une humeur fantasque,
Dans son Désert lui faire frasque.
Or, entre ces divers Fredons,
Dont peu portaient des Espadons,
On en vit un, de tous le Maître,
Et qu’on put aisément connaître,
Malgré tout vain Déguisement,
Fredon tout Royal et charmant,
Que nos TÊTES à DIADÈMES
Composaient vraiment Elles-mêmes,
Avecque plusieurs de leur Cour,
Tant en riche que simple Atour.
Le ROI, comme maint le proteste,
En Persan, avait une Veste
De qui les enrichissements
N’étaient que de purs Diamants.
La REINE, en Sarmate charmante,
En avait une autre éclatante,
Avec des Parements exquis
De Martres d’élite et de prix :
Et six Paysannes gentilles,
Toutes des meilleures Familles,88
Avec des Habits de brocart,
La suivaient d’un pas frétillard.
L’Amazone, MADEMOISELLE,
Aussi grande qu’une Immortelle,
Parut là, dans un Port plus qu’humain,
Sous un Accoutrement Romain.
Cet autre aimable et jeune Altesse,
Savoir Madame la DUCHESSE,
De Palatine Extraction,
Attirait les Yeux, ce dit-on,
D’un chacun dessus sa Personne,
Aussi brillante que pouponne.
Un jeune AVOCAT la suivait,89
Que fort versé l’on tient au Droit,
Et qui, par un très digne zèle,
Ne le pratique que pour Elle.
La DUCHESSE, aussi, de BOUILLON,
D’Âme et de Corps Objet mignon,
Et qui fut, dès son plus bas âge,
Si spirituelle et si sage,
S’y fit admirer, sans mentir,
Sachant des mieux se travestir ;
Et le vaillant PRINCE, son Homme,
Pour vous dire la chose en somme,
Avec le Comte et Chevalier,90
Faisait un Momon singulier.
Notre DUCHESSE de CHEVREUSE,
EN Père et Mari bienheureuse,
Et qui, d’ailleurs, ne manque pas
D’Écus, de Vertus et d’Appas,
Et son ÉPOUX, lequel l’adore,
Furent de l’Assemblée encore :
Mais j’ignore certainement
Quel était leur Déguisement.
La noble et charmante SOUBISE,
À qui mainte et mainte Franchise
Est, je pense, offerte en Tribut,
Beaucoup à tout le monde y plût ;
Et point menteurs ne sont mes Carmes,
Car elle a pour plaire maints charmes.
La sage INFANTE de TOUSSI
Ne ravit pas coussi coussi,
Et, dès qu’elle eut levé le Casque
(Non, je voulais dire le Masque),
Chacun, et de loin et de près,
Se recréa sur ses Attraits.
La brune COMTESSE de GUICHE,
À qui Nature fut peu chiche
De ce qui des Cœurs est l’Aimant,
Y parut fort, pareillement.
Mais cette Liste il faut conclure,
Pour abréger mon Écriture,
Sans oublier, nenni, nenni,
Ou que de tous je sois honni,
Cette BRESSIENNE admirable,
Qu’on trouva là presque adorable,
Ayant jusques par sus les yeux
Des aimables Présents des Cieux,
Avec une charmante Gorge,
Où des mieux l’Amour fait son orge.
Et SÉVIGNY, bref, est le Nom
De cette Beauté de Renom.