(1924) La danse au théâtre. Esthétique et actualité mêlées « 3 décembre. Danses du « Grand Mogol ». »
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(1924) La danse au théâtre. Esthétique et actualité mêlées « 3 décembre. Danses du « Grand Mogol ». »

3 décembre. Danses du « Grand Mogol ».

La partition de danse que comporte Le Grand Mogol se déroule selon des rythmes symétriques et carrés qu’aucune préoccupation de couleur locale ne vient agrémenter ou tourmenter. Aussi, Mme Stichel, maîtresse de ballet, a-t-elle pris le parti fort judicieux de ne pas utiliser cette musique parisienne du siècle passé pour en tirer quelque variante de Shéhérazade, ou bien quelque autre plagiat exotique. Elle a disposé les groupes et dirigé le mouvement d’ensemble de son corps de ballet avec simplicité et symétrie.

Si le résultat manque très ostensiblement de caractère et d’inédit, la tenue du petit ballet reste bonne et discrète : groupes bien équilibrés, lignes amples.

L’interprétation est honorable, régulière sans être éclatante ; le corps de ballet, assez bien éduqué, est à la hauteur de sa tâche — qui n’est pas écrasante.

Mlle Vronska, danseuse étoile, a été dans son pays grand sujet du ballet impérial. Je mentionne le fait, car cette simplicité altière, ce grand air étranger à toute minauderie comme à toute outrance me semblent tenir à l’atmosphère même des grands théâtres de Cour. Mlle Vronska a exécuté ses trois entrées consécutives dans une allure graduée qui aboutit au presto, avec l’aisance et l’ampleur que nous lui connaissions ; la technique de ses pointes, de son cou-de-pied est robuste. Quel dommage qu’il n’y ait, à la Gaîté, pour la seconder, de danseur de la même envergure ! Sans la participation de la danse masculine, tout ballet reste incomplet, aucune étoile ne peut donner sa mesure. Cette lacune a été comblée par une deuxième danseuse étoile. Nous nous demandons quel genre de satisfaction peut tirer l’artiste, qui détient ce rôle, de l’interprétation de pas qui, quoique fort simples, outrepassent ses moyens d’une manière trop évidente ?