(1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Seconde partie — Livre premier — Chapitre V. Des Ballets Allégoriques »
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(1754) La danse ancienne et moderne ou Traité historique de la danse « Seconde partie — Livre premier — Chapitre V. Des Ballets Allégoriques »

Chapitre V. Des Ballets Allégoriques

Nous avons vu que les Ballets Poétiques étaient ou Allégoriques, ou Moraux, ou Bouffons. Ce n’est que par des Exemples que je crois pouvoir faire connaître ces trois différentes branches de ce grand genre.

Au Mariage de Madame Chrétienne de France avec le Duc de Savoie, on donna un spectacle de la première espèce. Le Gris de Lin en fut le sujet, parce qu’il était la couleur favorite de la Princesse, à qui on voulait plaire.

Au lever de la toile, l’Amour parut et déchira son bandeau. Libre alors de la contrainte à laquelle ses yeux avaient été assujettis ; il appela la lumière et l’engagea par les plus tendres chants à se répandre sur les Astres, le Ciel, l’Air, la Terre et l’Eau, afin qu’en leur donnant mille beautés différentes, par la variété des couleurs, il lui fut aisé de choisir la plus agréable.

Junon entend les vœux de l’Amour, et les remplit. Iris vole par ses ordres dans les Airs ; elle y étale les couleurs les plus vives : l’Amour frappé de ce brillant spectacle, après en avoir joui, se décide pour le Gris de Lin, comme la couleur la plus douce et la plus parfaite. Il veut qu’à l’avenir, il soit le symbole de l’Amour sans fin. Il ordonne que toutes les campagnes en parent les fleurs, qu’elle brille dans les pierres les plus précieuses, que les oiseaux les plus rares en raniment leurs plumages, qu’elle serve d’ornement aux habits les plus galants des mortels.

Toutes ces choses soutenues par les charmes de la Musique, et par les grâces de la Danse, embellies par les plus éclatantes décorations et par un nombre infini de machines surprenantes, formèrent les parties et l’ensemble de ce Ballet allégorique. [Voir Ballet]