(1820) Traité élémentaire, théorique et pratique de l’art de la danse « Chapitre septième. Des pirouettes ; » pp. 79-87
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(1820) Traité élémentaire, théorique et pratique de l’art de la danse « Chapitre septième. Des pirouettes ; » pp. 79-87

Chapitre septième.
Des pirouettes ;

De la manière de les prendre ou préparer, de celle de les faire et de les filer ; des diverses positions ou attitudes que l’on peut avoir en tournant, et des différentes manières de les arrêter et de les terminer

[1] C’est aux progrès étonnants de la danse moderne58 que nous devons les pirouettes ; nos anciens danseurs, ainsi que Noverre 59, ne les connaissaient point, et ils pensaient qu’il était impossible de surpasser les trois tours sur le cou-de-pied. Les meilleurs danseurs d’à présent prouvent le contraire. L’exécution actuelle des diverses pirouettes est vraiment extraordinaire, en ce qu’on est parvenu à faire l’aplomb le mieux conservé, et à maintenir le corps dans l’équilibre le plus parfait. L’on devrait peut-être regarder MM. Gardel et Vestris comme les inventeurs des pirouettes ; ce dernier est celui qui, en les perfectionnant, les a multipliées et les a mises plus à la mode. D’autres excellents danseurs ont encore enchéri sur lui, et en ont fait de surprenantes, presque dans toutes les manières.

[2] Une pirouette de trois à quatre tours, filée à la seconde et arrêtée dans la même position, ou en attitude, est la preuve du plus grand aplomb que le danseur puisse avoir. Rien dans la danse ne surpasse cette difficulté.

[3] La pirouette demande un grand travail. L’homme que la nature aura favorisé dans sa construction, parviendra à les exécuter avec grâce ; mais celui qui sera serré des hanches et qui se trouvera gêné dans le développement des jambes, ne réussira que faiblement et ne pourra bien tourner que sur le cou-de-pied ; il faut qu’il abandonne les grandes pirouettes. Le danseur d’une construction trop vigoureuse ou arquée, éprouvera le même sort ; la force musculaire lui enlèvera la souplesse, le moelleux des jambes, et la tranquillité que doit avoir le corps, pour conserver un parfait équilibre. Les jarretés et les constructions délicates l’emportent sur ces derniers ; ils auront plus de douceur, plus de facilité dans les membres et seront beaucoup plus tournés. Il faut être très en dehors pour devenir un bon Pirouetteur (qu’on nous permette ces expressions d’école).

[4] * Dans vos pirouettes, observez l’équilibre le plus parfait60, et soyez toujours bien placé en les commençant61, en les tournant62 et en les terminant. Arrêtez-les avec aplomb et assurance ; que le dessin de la position de votre corps, de vos bras, de vos jambes soit correct, et prononcé avec grâce. On ne saurait trop vous recommander de filer délicatement la pirouette sur la pointe ; ce qui présente la plus agréable exécution, et en même temps la plus parfaite ; car rien n’est plus rebutant à voir qu’un mauvais danseur, qui tournaille tantôt sur la pointe, et tantôt sur le talon, et qui sautille par secousses à chacun des tours de la pirouette. *

N.-B. Les pieds doivent être placés entre la seconde et la quatrième position.