Horace ne traite pas l’amour comme un pasteur, ni comme un patriarche, ni comme un dieu de l’Olympe. […] Il ne se piqua jamais d’être fidèle : les dieux le sont-ils avec les simples mortelles qu’ils honorent ou consument en passant ?
Donc, en dépit des imbéciles, vous êtes le dieu du roman. […] il ne reste plus qu’à placer le petit dieu ainsi revu, corrigé et augmenté, derrière la vitrine de la boutique.
Il est le dieu par qui tout recommence ; il est l’honneur, il sera la gloire impérissable de cette minute heureuse de 1820 dans la reconnaissance et dans le respect des nations ! […] Bien plus, la poésie grecque aime mieux faire d’un homme un dieu, que de faire de cet homme un objet de dégoût ; de Daphné poursuivie, elle fait un laurier ; la nymphe Écho n’est plus qu’une vaine plainte qui se cache derrière la montagne. […] Achille, Ajax, Ulysse, Agamemnon, Hector et Pâris, toute la guerre des dix années, et tant de héros qui se sont battus contre les dieux à la clarté du jour, notre Athénien les donnerait pour le poème et pour le poète qui les a faits immortels. […] F. de ces croyances inviolables qui se démentent, et qui tombent aussitôt que le dieu est tombé. […] » C’est le mot d’un sage, et notre aîné, en son gîte songeant, en était venu, lui aussi, à ne pas accuser les dieux de son infortune.
Maeterlinck lui-même au sujet du théâtre d’Ibsen (Figaro, 2 avril 1894), on y reconnaît « je ne sais quelle présence, quelle puissance ou quel dieu qui vit avec moi dans ma chambre… quelque chose de la vie rattachée à ses sources et à ses mystères par des liens que je n’ai l’occasion ni la force d’apercevoir tous les jours ».
Les hommes demandent à leurs dieux de prouver leur existence par des miracles ; mais la merveille éternelle c’est qu’il n’y ait pas sans cesse des miracles.
La Fontaine était courtisan quand il disait d’un bâtard né d’un double adultère : Le fils de Jupiter devait, par sa naissance, Avoir un autre esprit et d’autres dons des cieux Que les enfants des autres dieux.
Qu’il croie en Dieu ou aux dieux, à Pluton ou à Satan, à Canidie ou à Morgane, ou à rien, qu’il acquitte le péage du Styx, qu’il soit du sabbat ; qu’il écrive en prose ou en vers, qu’il sculpte en marbre ou coule en bronze ; qu’il prenne pied dans tel siècle ou dans tel climat ; qu’il soit du midi, du nord, de l’occident, de l’orient ; qu’il soit antique ou moderne ; que sa muse soit une muse ou une fée, qu’elle se drape de la colocasia ou s’ajuste la cotte hardie.
« Maudit monstre de scélératesse, puissent tous les dieux, & tous les hommes qui m’écoutent, concourir à t’exterminer, mauvais citoyen, traître détestable, infâme excrément de théâtre !
Je paye mes dettes ; je crois en dieu & dis mes prières. » La langue Angloise est redevable à cet excellent écrivain d’un caractère qu’elle n’avoit pas.
Ce que la fable nous débite de ses heros et de ses dieux s’est acquis le droit de passer pour verité dans les poëmes, et nous ne sommes plus parties capables de contredire ses narrations.
Nous apprenons aussi de Quintilien que les anciens peintres s’étoient assujettis à donner à leurs dieux et à leurs heros la phisionomie et le même caractere que Zeuxis leur avoit donné, ce qui lui attira le nom de legislateur.
Et plus loin encore : Îles, séjour des dieux ! […] emportez-nous vers des Dieux inconnus. […] Enfin, nous pouvons ajouter que, lorsque Israël eut des rois, la nécessité politique, en donnant à Intolérance des « faux dieux » une justification ou une excuse, contribua pour sa part à faire évanouir la notion du Dieu universel dans les fumées de l’encens qu’on offrait à Baal. […] qu’il n’est pas de vices qu’elles n’aient mis sous l’invocation d’un dieu de leur Olympe ? […] Renan, est établi pour l’éternité… Le progrès de la raison n’a été funeste qu’aux faux dieux… C’est la conviction que mon livre sera utile au progrès religieux qui me l’a fait aimer. » Et je voudrais le croire, ou même je le crois, puisque M.
Je sens si bien qu’à la place de Scarron je me serais caché aux yeux de tous les hommes et que je n’aurais jamais pardonné aux dieux ! […] Les Grecs primitifs se figuraient que les dieux pouvaient être jaloux, réellement jaloux des hommes, et qu’ils haïssaient toute créature dont l’élévation semblait menacer leur suprématie. […] Au temps d’Eschyle, par exemple, on disait simplement que les dieux réprouvaient toute tentative faite par l’homme pour franchir les limites que lui prescrivait sa condition ou son devoir. […] Virgile et Horace anathématisent encore la navigation ; Pline l’Ancien (XXXIII, 1) attribue les tremblements de terre aux fouilles des mineurs, qui irritent les dieux. […] Le messager, qui apporte à la reine Atossa la nouvelle de Sala-mine, le dit à plusieurs reprises : « C’est une divinité… c’est un dieu vengeur… c’est la jalousie des dieux qui a tout conduit. » L’ombre de Darius exprime la même pensée : « Dans trois générations, des monceaux de morts diront encore aux yeux des hommes, silencieusement, qu’il ne faut pas qu’un mortel conçoive de trop hautes pensées. » Toute la tragédie des Perses a moins été écrite pour célébrer le triomphe des Grecs que pour leur conseiller d’être modestes dans la victoire et de ne point provoquer la « jalousie » des dieux.
Tel est l’homme qui, d’après Guettée et Bausset, « a de justes droits à la reconnaissance des protestants. » Qu’aurait-il donc pu faire, dieux justes ! […] Bien plus, les rois sont eux-mêmes des espèces de dieux sur la terre. Écoutez plutôt : « L’autorité royale est absolue… Les princes sont des espèces de dieux, suivant le langage de l’Écriture, et participent eu quelque façon à l’indépendance divine… Au caractère royal est inhérente une sainteté qui ne peut être effacée par aucun crime, même chez les princes infidèles… » Bossuet en déifiant le prince, quelqu’il soit et de quelque manière qu’il ait été établi, en le marquant d’un caractère de sainteté qu’aucun forfait ne peut effacer, n’est plus qu’un adorateur du fait brutal, de la force pure, et il rétrograde ainsi par-delà le moyen âge et jusqu’aux Césars byzantins… » Je ferai la même observation que pour l’alinéa précédent. […] Si, par-delà le protestantisme, par-delà les Bibles et les formalismes, par-delà toutes les traditions judeo-chrétiennes et spiritualistes, elle parvenait un jour à se créer une foi vraiment moderne, uniquement basée sur la nature et sur la vie, une foi dont tout homme serait le prêtre, le fidèle et le dieu, dont l’Univers serait le temple, avec l’infinie liberté comme dogme, nul rôle plus glorieux ne pourrait être rempli sous le soleil.
Il avait à peine où se loger : il commença par faire des vers à ses Dieux Pénates (1736), comme Gresset en avait fait sur sa Chartreuse. […] À tout jeune homme qui entre dans la carrière, il y a une première chose à demander : « Quels sont tes dieux ?
L’argent, l’argent, on ne saurait dire combien il est vraiment le nerf et le dieu de la littérature d’aujourd’hui. […] Toujours et au fond de tout l’argent, le dieu caché, cæsus.
Un dieu personnel qui saurait tout et pour qui l’univers serait parfaitement clair n’en jouirait que comme d’une machine bien agencée ; il savourerait des rapports de nombre ; il n’aurait qu’un plaisir de mathématicien : il ne rêverait jamais. Un dieu omniscient ignorerait par là même la poésie.
« Vous démolirez les autels des faux dieux. […] c’est qu’il y a là un dieu invisible.
Et voilà qu’on se retourne vers les dieux négligés, et qu’ils vont nous redevenir chers et bienfaisants.
. — Les Dieux antiques, nouvelle mythologie (1880). — Yatuk, roman anglais, précédé d’une préface (1880). — Poésies, édition, photolithographiée (1887). — Les Poèmes d’Edgar Poe (trad.). — Vers et Prose (florilège)
Je voyais là ce Rien que nous appelons Tout ; Les rois, les dieux, la gloire et la loi, les passages Des générations à vau-l’eau dans les âges ; Et devant mon regard se prolongeaient sans fin Les fléaux, les douleurs, l’ignorance, la faim, La superstition, la science, l’histoire, Comme à perte de vue une façade noire.
Il traite tout avec le même enthousiasme ; il est toujours dans la tribune aux harangues, toujours orateur, lors même qu’il ne devroit être que philosophe, qu’écrivain didactique, comme dans ses ouvrages sur la Morale, sur la Nature des dieux, sur les Préceptes de l’éloquence.
Sans le renversement des faux Dieux et l’établissement du vrai culte, l’homme aurait vieilli dans une enfance interminable ; car, étant toujours dans l’erreur, par rapport au premier principe, ses autres notions se fussent plus ou moins ressenties du vice fondamental.
Quand on ne crut plus rien à Athènes et à Rome, les talents disparurent avec les Dieux ; et les Muses livrèrent à la barbarie ceux qui n’avaient plus de foi en elles.
L’ode monte dans les cieux, pour y emprunter ses images et ses comparaisons du tonnerre, des astres et des dieux mêmes.
Renan avait connu une crise de conscience, je crois qu’il faudrait la chercher un peu plus tard, quand il a terminé son essai sur l’Avenir de la Science et qu’après quelques tentatives, il se détermine à se conformer à la conduite dictée par les anciens : « Le philosophe doit sacrifier aux dieux de l’Empire. » Ce que Pascal formulait : « Il faut avoir une pensée de derrière la tête et juger du tout par là, en parlant cependant comme le peuple. » Cet aphorisme constitue le point essentiel du « renanisme » ; c’est à l’adopter que le maître put hésiter, parce qu’il avait l’amour de la vérité et qu’il dut lui en coûter de la taire à demi, comme il fit le plus souvent, dès sa trentième année.
Dans la suite même, quand il ne resta plus d’eux que leur nom et leurs bienfaits, et cet éclat de réputation qui agrandit tout, on en fit des dieux ; alors leur tombe fut un autel, et leurs éloges furent des hymnes.
« Le cygne : Ma vie tranquille se passe dans les ondes, elle n’y trace que de légers sillons qui se perdent au loin, et les flots à peine agités répètent comme un miroir pur mon image sans l’altérer. » « L’aigle : Les rochers escarpés sont ma demeure, je plane dans les airs au milieu de l’orage ; à la chasse, dans les combats, dans les dangers, je me fie à mon vol audacieux. » « Le cygne : L’azur du ciel serein me réjouit, le parfum des plantes m’attire doucement vers le rivage, quand, au coucher du soleil, je balance mes ailes blanches sur les vagues pourprées. » « L’aigle : Je triomphe dans la tempête quand elle déracine les chênes des forêts, et je demande au tonnerre si c’est avec plaisir qu’il anéantit. » « Le cygne : Invité par le regard d’Apollon, j’ose me baigner dans les flots de l’harmonie ; et reposant à ses pieds, j’écoute les chants qui retentissent dans la vallée de Tempé. » « L’aigle : Je réside sur le trône même de Jupiter : il me fait signe et je vais lui chercher la foudre ; et pendant mon sommeil, mes ailes appesanties couvrent le sceptre du souverain de l’univers. » « Le cygne : Mes regards prophétiques contemplent souvent les étoiles et la voûte azurée qui se réfléchit dans les flots, et le regret le plus intime m’appelle vers ma patrie, dans le pays des cieux. » « L’aigle : Dès mes jeunes années, c’est avec délices que dans mon vol j’ai fixé le soleil immortel ; je ne puis m’abaisser à la poussière terrestre, je me sens l’allié des dieux. » « Le cygne : Une douce vie cède volontiers à la mort : quand elle viendra me dégager de mes liens et rendre à ma voix sa mélodie, mes chants jusqu’à mon dernier souffle célébreront l’instant solennel. » « L’aigle : L’âme, comme un phénix brillant, s’élève du bûcher, libre et dévoilée ; elle salue sa destinée future, le flambeau de la mort la rajeunit en la consumant. » XLVIII Mais rien ne surpasse son analyse et sa traduction du drame de Faust, par Gœthe, et cette scène à laquelle ni l’antiquité ni Shakespeare n’ont de scène tragique à opposer. […] Je serais resté confondu et muet, car, pétrifié doublement par la beauté de l’une et par la gloire de l’autre, je ressemblais à un dieu terme qui voit passer sans parole le bruit et l’éclat du temps. […] Elle a fait home aux hommes de leur servitude ; elle a protesté contre la tyrannie ; elle a entretenu ou rallumé dans les âmes le feu presque éteint de la liberté monarchique, représentative ou républicaine ; elle a détesté à haute voix, quand tout se taisait ou applaudissait, le joug soldatesque, le pire de tous, parce qu’il est de fer, et qu’il ne se brise pas même, comme le joug populaire, par ses propres excès ; elle a donné du moins de la dignité au gémissement de l’Europe ; elle a été vaincue, mais elle n’a pas consenti à sa défaite, elle n’a pas loué l’oppression, elle n’a pas chanté l’esclavage, elle n’a pas vendu ou donné un seul mot de ses lèvres, une seule ligne de sa main à celui qui possédait l’univers pour doter ses adulateurs ou pour exiler ses incrédules ; elle a édifié et consolé l’esprit humain ; elle a relevé le diapason trop bas des âmes ; elle a trouvé dans la sienne, elle a communiqué à ceux qui étaient dignes de la lire, un certain accent antique peu entendu jusqu’à elle, dans notre littérature monarchique et efféminée, accent qui ne se définit pas avec précision, mais qui se compose de la sourde indignation de Tacite, de l’angoisse des lettres de Cicéron, du murmure anonyme du Cirque quand Antoine présente la pourpre à César, du reproche de Brutus aux dieux quand il doute de leur providence après la défaite de la cause juste, du gémissement de Caton quand il se perce de son épée pour ne pas voir l’avilissement du genre humain !
Le vrai culte de l’antiquité, c’est de sortir du sanctuaire avec l’esprit du dieu prêt à se répandre dans un monde nouveau. […] Il exprime en beaux vers ce souhait pour les poètes qui viendront et auxquels il fait appel, Que la nature seule, on ses vastes miracles, Soit leur fable et leurs dieux, et ses lois leurs oracles. […] Et qu’enfin Calliope, élève d’Uranie, Montant sa lyre d’or sur un plus noble ton, En langage des dieux fasse parler Newton !
On comprend, après de pareilles exigences, qu’on appelât autrefois la poésie « le langage des Dieux ». […] Du langage des Dieux, il trébuche et tombe (nous sommes moins brave que M. […] Au lieu de parler la langue de son pays dans cette pureté d’accent qui est une patrie qu’on emporte avec soi, comme les Anciens emportaient leurs dieux, il pouvait parler une langue barbare : il était exilé !
Du dieu d’amour ces jardins sont le temple, etc… Il s’agit du jardin des Tuileries. […] Ces pasteurs adorent des dieux particuliers de tribus, des fétiches. […] Lamartine nous peint ce corps de jeune fille, comme il peindrait le corps symbolique d’un dieu, la forme d’Indra ou de Bouddha, représentative de l’Univers lui-même. […] Me croyez-vous semblable aux dieux de vos tribus ? […] deux axes dans les cieux, Deux âmes dans mon sein, dans Jéhovah deux dieux ?
Le mal est que l’Amour est le plus vieux des dieux. […] C’est un dieu. […] J’étais sûr qu’il partageait la table des dieux et le lit des déesses. […] Il croyait hautement aux dieux bons cachés dans la nature. […] L’amitié du grand homme était un présent des dieux.
Respecte les dieux, car Zeus est le protecteur et l’arbitre des suppliants et des hôtes. — Tu es insensé, lui répond l’impitoyable Cyclope, ô étranger, ou tu viens de bien loin, toi qui me parles des dieux et de leur colère. […] Ce fut, sans doute, la volonté d’un dieu, comme nous verrons. […] Et c’était Monselet en dieu Cupidon, About sur des échasses, Théodore de Banville en aède, une lyre à la main, couronné de laurier et faisant des yeux doux au croissant de Phébé. […] Puis il allume sa pipe, et des nuages d’une fumée épaisse l’enveloppent comme un dieu.
Mais sur toutes ses prescriptions, et par-dessus toutes les plaintes qui lui échappent, il plane un certain respect des dieux, de la main desquels il convient que l’homme reçoive tout ce qu’ils envoient, les maux comme les biens : « Il ne faut point jurer que telle chose n’arrivera jamais ; car cela irrite les dieux en qui réside tout accomplissement. » Théognis, courbant la tête sous la puissance mystérieuse qui régit le monde, consent à être quelquefois errant et mendiant comme Homère ; il ne porte point à tout propos dans sa bague le poison de Cabanis.
Rien ne reste de nous, sinon d’avoir aimé. » Elle se plaisait aussi à rappeler ces deux vers qui, s’ils ne sont pas d’elle, sont du moins tout son emblème : En gémissant d’être colombe, Je rends grâces aux dieux de n’être pas vautour. […] Mme Duchambge, que je n’ai connue que déjà passée, qui avait dû être des plus agréables, et qui, toute ridée qu’elle était, rappelait, par les mille petits plis de son fin et mignon visage, certaine jolie vieille de l’Anthologie : De ses rides les petits plis De nids d’amours sont tout remplis ; Mme Duchambge avait eu pour dieu de sa jeunesse l’aimable enchanteur Auber, dont elle adorait toujours l’étoile de plus en plus brillante, inconstante et légère.
« Le dieu qu’on inaugure en pompe au Capitole « Du dieu jeune et vainqueur n’est souvent qu’une idole !
Doux Zéphirs, qui régniez alors dans ces beaux lieux, N’en portâtes-vous rien aux oreilles des Dieux ? […] Sont-ce des Anges ou des Dieux ?
Quel secourable dieu du ténébreux séjour Ramène mon ombre égarée ? […] Guizot pour toute réponse cita ces deux vers de Loyson : C’est pour périr bientôt que le flambeau s’allume, Mais il brûle un moment sur les autels des Dieux !
Joubert était bien autrement platonicien de tendance et idéaliste : « C’est surtout dans la spiritualité des idées que consiste la poésie. » « La lyre est en quelque manière un instrument ailé. » « La poésie à laquelle Socrate disait que les Dieux l’avaient averti de s’appliquer, doit être cultivée dans la captivité, dans les infirmités, dans la vieillesse. […] Notre intelligence est blessée ; il nous pardonnera, si nous lui donnons tout entier ce qui peut nous rester de sain. » Il comprenait la piété, le plus beau et le plus délié de tous les sentiments, comme on a vu qu’il entendait la poésie ; il y voyait des harmonies touchantes avec le dernier âge de la vie : « Il n’y a d’heureux par la vieillesse que le vieux prêtre et ceux qui lui ressemblent. » Il s’élevait et cheminait dans ce bonheur en avançant ; la vieillesse lui apparaissait comme purifiée du corps et voisine des Dieux.
Le dieu poursuivait sa carrière. […] Allez au-devant de lui, vous serez plus vrai et surtout vous serez plus fort ; la Providence vous a doué des magnificences du talent ; consacrez-les aux larmes et aux dieux de la patrie ; soyez le grand prêtre du passé ; le monde vous attend et l’esprit nouveau se tournera vers vous comme le pieux regret qui embrasse passionnément une ombre.
Je n’irai pas jusqu’à dire avec La Bruyère que « les enfants des dieux se tirent des règles de la nature, que le mérite chez eux devance l’âge et qu’ils sont plus tôt des hommes parfaits que le commun des hommes ne sort de l’enfance ». […] Dès la première rencontre, il se bat éperdument. « Après avoir tiré à bout portant ses deux pistolets, il désarme de sa main et fait prisonnier un capitaine de cuirassiers de l’empereur. » Nous savons par les témoignages des contemporains qu’il donnait toujours de sa personne dans la mêlée, que le combat l’enivrait et le transfigurait, et qu’il apparaissait alors, les yeux flamboyants, tout rouge de sang, « pareil au dieu Mars ».
Les Dieux et les Héros demeurent pour eux des personnages du passé, à demi historiques, personnages d’une histoire sans doute merveilleuse qui est celle d’un monde plus beau, plus grand, plus pittoresque par l’éloignement et la distance où il est du nôtre. […] Quillard, Mikhaël et Hérold chantaient les Héros et les Dieux.
De là ce fier caractère d’audace contre les dieux que portent les premiers inventeurs ; de là ce thème développé dans tant de légendes mythologiques : que le désir d’un meilleur état est la source de tout le mal dans le monde. […] L’œuvre universelle de tout ce qui vit étant de faire Dieu parfait, c’est-à-dire de réaliser la grande résultante définitive qui clora le cercle des choses par l’unité, il est indubitable que la raison, qui n’a eu jusqu’ici aucune part à cette œuvre, laquelle s’est opérée aveuglément et par la sourde tendance de tout ce qui est, la raison, dis-je, prendra un jour en main l’intendance de cette grande œuvre 28 et, après avoir organisé l’humanité, ORGANISERA DIEU.
Ce Petit almanach des grands hommes, qui avait pour épigraphe : « Dis ignotis , Aux dieux inconnus », est une de ces plaisanteries qui n’ont de piquant que l’à-propos. […] dieux !
Ce que pensait Attila, le rôle des dieux qui tombaient, celui du Dieu qui s’élevait, la défiance créée entre Rome et Constantinople par l’érection de cette dernière en siège de l’Empire, le travail intérieur du Christianisme parmi ces peuples, à la faveur d’une mission qui courait comme la foudre, soit souterrainement, soit en plein jour, rien de tout cela, qui était l’important dans une telle histoire, ne se trouve dans l’ouvrage de M. […] Thierry suppose ne se fît pas exactement comme il le dit, dans cette tête déformée de kalmouck, ivrogne et superstitieux, dont les hordes ne devaient colporter ni dieux, ni morale, ni gouvernements à l’ancien monde, mais il n’est pas douteux que la bête humaine qui pataugeait au fond d’Attila n’eût flairé la jouissance romaine, et que l’envie d’y toucher ne se fût éveillée !
Celui même qui a dressé dans son cerveau, avec des assises dans l’être entier, un autel au dieu des voluptés secrètes, contemplant sa propre image que des rides précoces lui interdisent seules de comparer à l’éclatante beauté d’un Narcisse, s’adresse à lui-même ces paroles dans la mystérieuse solitude de son être : « Restons de plus en plus en nous-mêmes, d’essence toujours plus rare et sans cesse plus précieuse ; ne troublons pas ce qui doit rester pur, pour dominer les vains fantômes illusoires des réalités et l’immense troupeau des apparences. […] Voici de quelle façon ce docteur de l’infécondité appelle l’attention du public sur son œuvre : « Depuis plus de cinq mille ans, l’humanité cherche en vain la solution des grands problèmes de l’univers, le problème de l’existence d’un dieu personnel, celui de la survivance de l’âme après la mort, celui des causes de la souffrance qui est dans le monde, et de ses remèdes etc.
Les plus ignorants de nos soldats, ceux même qui ne sont jamais entrés dans un théâtre lyrique et dans une salle de concert, ont été visités à leur insu par le dieu du son. […] Je viens incidemment de nommer le dieu qui fit cesser le règne des Titans et inaugura le règne des hommes. […] Goethe est un olympien, il appartient à la race des dieux, c’est une chose convenue depuis longtemps et sur laquelle il n’y a pas à revenir ; mais les dieux, quoique égaux entre eux, ne sont pas tous de même origine et ne siègent pas tous aux mêmes titres dans l’olympe. […] Dante réalise le miracle que le dieu lui-même n’aurait pas songé à faire, et son cœur peut porter en même temps tout ce que la justice naturelle a d’implacable sévérité et tout ce que la loi chrétienne a de mansuétude et d’amour. […] Jamais homme, depuis le philosophe de Pascal, ne s’est montré acteur si docile et n’a joué avec plus de scrupule le personnage que les dieux lui avaient confié dans la vaste comédie dont ils s’amusent.
Car il manque bien de respect aux faux dieux, mais il ne manque pas de respect à celui qui respecte les faux dieux, il ne manque pas de respect à celui qui adore les faux dieux et qui a été nourri de la sagesse antique. […] Il sait que les faux dieux ne sont rien. Mais il sait aussi que les adorateurs des faux dieux ne sont pas rien. Il sait que les faux dieux sont de bois et de pierre. […] Et il bouscule, et un peu vivement, les faux dieux.
Nous vivions un peu au hasard ; or, le hasard est un grand bon dieu, depuis quinze ans jusqu’à cinquante ; passé cet âge, le dieu devient dur et cruel ; à quinze ans nous étions les enfants chéris de ce dieu-là, nous sommes à peine ses bâtards, à soixante. […] Restée seule, Gillette avait été élevée à la cour de la comtesse de Roussillon, dans un beau petit coin de terre aimé des dieux. […] Non, non, le dieu de la philosophie antique, l’homme à la voix intérieure, n’est pas sorti vaincu de la fête licencieuse et avinée des tonneaux, des coupes et des marmites. […] Le Plutus qui a retrouvé la vue, contient, il est vrai, une scène très amusante je parle de ce prêtre d’Esculape qui vole l’offrande faite aux dieux. […] Ô dieux et déesses !
Soumet, sur le ton solennel d’un prône ou d’un ordre du jour : « Les lettres sont aujourd’hui comme la politique et la religion ; elles ont leur profession de foi, et c’est en ne méconnaissant plus l’obligation qui leur est imposée que nos écrivains pourront se réunir, comme les prêtres d’un même culte, autour des autels de la vérité ; ils auront aussi leur sainte alliance ; ils n’useront pas à s’attaquer mutuellement des forces destinées à un plus noble usage ; ils voudront que leurs ouvrages soient jugés comme des actions, avant de l’être comme des écrits ; ils ne reculeront jamais devant les conséquences, devant les dangers d’une parole courageuse, et ils se rappelleront que le dieu qui rendait les oracles du temple de Delphes, avait été représenté sortant d’un combat. » Une fois qu’on en venait à un combat dans les formes avec les idées dominantes, on était certain de ne pas vaincre.
Char de feu qui, vivants, nous porte au rang des dieux !
Il corrige donc les caractères des dieux, des héros, leurs actions brutales, leurs injurieux discours, la prolixité des descriptions, la négligence des redites, tout ce qui choque la morale, la politesse, le goût d’un siècle éclairé.
Peut-être y créons-nous le dieu futur… » De pareilles pages, et elles sont nombreuses chez cet écrivain, peuvent glorieusement figurer parmi les plus belles de notre littérature française.
Ce colossal créateur nous a violemment imposé un monde d’archanges, de géants et de dieux.
Il croyoit avoir été suscité de dieu pour faire le tourment d’un philosophe qui n’a pas moins honoré la Hollande que Descartes, en la choisissant pour le lieu de sa retraite.
Il a oublié que les ermites, dans toutes les religions, placent toujours Dieu, un dieu personnel, — qu’il soit faux ou vrai, mythologique ou chrétien, — dans le fond de leurs ermitages.
Mais quant à lui, le dernier venu, ce n’est pas malgré lui qu’il chante, et le dieu ne le violente pas !
Athènes éleva un autel au dieu inconnu ; on pourrait élever sur la terre une statue avec cette inscription : aux hommes vertueux que l’on ne connaît pas .
Les ordres des dieux sont cruels : ils sont les dieux. […] Non pas aux dieux ; car les dieux, c’est encore la patrie. […] — J’allais te dire aux dieux… Mais c’est donc qu’il y a quelque chose au-dessus des dieux, Néoptolème ? — Au-dessus des dieux ! […] Au-dessus des dieux, qu’y a-t-il ?
Ils ont chanté leurs dieux, leur patrie et eux-mêmes. […] De temps en temps ces Martyrs, si beaux par ailleurs, ont comme l’air de la Guerre des dieux prise au tragique. Ajoutez encore qu’il fallait pour la thèse que les partisans des dieux eussent le dessous. […] La thèse voulait que les dieux fussent vaincus. […] Le marbre des vieux temps jusqu’aux reins nous enchaîne, Et tout homme énergique au dieu Terme est pareil.
Il tend sa main à la main de marbre sans une émotion, sans un tremblement, et il me semble l’entendre murmurer comme un autre Ajax : J’en échapperai malgré les dieux. […] Il est mort, ce Grand Réformateur de tout le genre humain, ce Peintre des Mœurs, cet Introducteur des Plaisirs, des Ris et des Jeux, ce Frondeur des vices, ce redoutable Fléau de tous les turlupins ; et pour tout renfermer en un seul mot, ce Morne de la terre qui a si souvent diverti les dieux. […] Vous voyez, cher Momus, je viens voir les Dieux et j’ai voulu jouer la Mort, afin qu’elle me prit, croyant se venger, et je l’ai trompée par ce stratagème. […] Vous ne me dites pas tout ; vous vous entendez avec la Mort et vous venez voir les défauts des Dieux pour en aller divertir les Mortels. […] J’en suis fâché, car les dieux ne m’estimeront plus et vous les divertirez mieux que moi.
À cet horizon, où le ciel et la terre se confondent, l’homme était dieu et le dieu était homme. […] On ne songe pas que chaque nation, avec ses temples, ses dieux, sa poésie, ses traditions héroïques, ses croyances fantastiques, ses lois et ses institutions, représente une unité, une façon de prendre la vie, un ton dans l’humanité, une faculté de la grande âme.
Les personnages historiques de l’antiquité ne comptent qu’avec leurs dieux, si l’on peut dire qu’ils comptent réellement avec des puissances qui ne leur font jamais obstacle, n’étant que des personnifications de leurs propres volontés. […] Oui, un dieu les remplit et les agite, un dieu qui se change parfois en démon, et qui leur laisse à peine le sentiment du droit et la libre possession d’eux-mêmes.
C’est pendant la Terreur, dans sa maison de Feuil-lancour, entre Saint-Germain et Marly, que Parny écrivait ou préparait la Guerre des dieux. […] (Guerre des dieux, chant vii.) […] C’est, ne vous en déplaise, le petit dieu Pu. […] L’amour est le premier-né des dieux. […] Dans quelle banalité et dans quelle convention glisserions-nous, dieux justes !
Ces sages auront beau se cacher loin de la foule des pervers, ils seront connus des dieux et des hommes qui aiment la vertu. […] — Il n’est plus ; grâces en soient rendues aux dieux, et aux deux hommes courageux qui nous en ont délivrés. […] … Ses amis vont aux temples rendre grâce aux dieux. […] Et tandis que le sang des bons citoyens coule, on continue de remercier les dieux. […] Qui est-ce qui absoudra les dieux de sa vie, et de la mort de ses instituteurs ?
On l’a cru pendant quelque temps ; la comparaison avec les vraies œuvres des lyriques, depuis les chœurs d’Aristophane jusqu’aux stances byroniennes du Don Juan, a guéri les générations nouvelles de ces petites idolâtries, qu’on avait pour ses dieux Lares quand on n’était pas sorti de chez soi. […] Le libertinage de Voltaire est raffiné, délicat, élégant, perfide ; il recouvre et recèle de l’impiété calculée : Parny le disciple est au bout avec sa Guerre des Dieux. […] Ce n’était point le grand Pan, le dieu universel, qu’il avait honoré et cultivé, c’était le dieu des jardins, Priape, ce qui est tout différent.
Que les jeunes acteurs perdent beaucoup à n’avoir pas vu Du… et Préville jouer ensemble ces deux rôles ; l’écolier et le maître disparaissaient ; le premier, sous la malignité d’un dieu qui s’amuse à lutiner un homme ; et le second, sous l’habit d’un esclave obligé de céder à l’ascendant d’un dieu. Quelle différence avec ces représentations où l’on voit journellement l’esclave courir après l’esprit, la gentillesse, pour éclipser le dieu ; et celui-ci oublier son illustre origine, pour ne nous faire voir que la grossièreté du mangeur d’ail ! […] Ou faut-il mettre la direction en frais pour donner des voitures aux dieux ? […] Euclion cache le sien, d’abord dans son foyer, ensuite sous l’autel de la déesse Bonne-Foi, enfin, dans un bois consacré au dieu Sylvain ; la prudente réflexion de l’un indique l’avarice, la peint même, si l’on veut ; mais l’inquiète inconstance de l’autre la caractérise bien mieux. […] La scène brûlante de sentiment dans laquelle le dieu des cœurs et Psyché se déclarent mutuellement leur amour sera toujours regardée comme un chef-d’œuvre ; c’est là que Corneille, ranimé par un nouvel élan de son génie, s’affermit fièrement à la place que ses jaloux tâchaient de lui ravir pour la donner à son jeune rival dont la gloire naissante les fatiguait moins.
B. de Fouquières aura l’honneur d’avoir désormais attaché son nom d’une façon inséparable à la destinée d’un jeune dieu.
… Partout, à toutes les places de son poème, le poète de Mirèio ressemble à quelque beau lutteur qui garderait, comme un jeune dieu, sur ses muscles, lustrés par la lutte, des reflets d’aurore.
Parmi les poètes survivants, il y a Banville qui s’emploie à remettre sur l’épaule des dieux la pourpre insultée.
Rien de plus, car il n’existe pas d’Alexandrin idéal, passant dans les rêves des poètes, dieu suprême de l’Art, orchestre, mot synthétique, geste solennel résumant toutes les phrases et tous les poèmes, sorte de syllabe Om dont certains parlent, les yeux en extase, la voix tremblante, avec des airs de Bouddha contemplant son nombril.
L’un n’a pu s’empêcher de s’écrier au sujet de l’autre(**) : Deux cœurs faits pour s’unir d’un lien éternel, Dieux !
Homère et Platon, qui parlent des dieux avec tant de sublimité, n’ont rien de semblable à cette naïveté imposante : c’est Dieu qui s’abaisse au langage des hommes, pour leur faire comprendre ses merveilles, mais c’est toujours Dieu.
Mais de nos jours combien d’hommes, tristes fanfarons de scepticisme, se font un jeu cruel d’ébranler toutes les convictions, « Ubi soliludinem faciunt sapientiam appellant. » Le mot terrible de Tacite suffit à les définir ces artisans de ruines qui ne s’arrêtant devant aucun objet de croyance se gardent bien de ménager le culte du génie : race éternelle des iconoclastes en qui je reconnais ces soldats d’Alarik qui, violents contemplateurs des Phidias et des Praxitèle, trouvaient leurs plus doux plaisirs à décapiter les marbres des dieux.
C’est le maître des hommes ; c’est le maître des dieux.
Je ne citerai ici que Neron, cet homme de théatre à qui les dieux trouverent bon de donner le monde à gouverner.
Il y a plus : j’estimais que si un homme était capable de mettre de l’agrément dans un livre philosophique, c’était le philosophe qui s’était une fois si joliment moqué des philosophes, et si c’était ainsi pour moi, si raisonnable, comme vous voyez, dans mon amour pour Taine, qu’est-ce que cela devait être pour ses admirateurs, qui le prennent pour le Génie en herbe de la littérature et le considèrent comme un jeune dieu ?
Cependant dans ces murs même et dans ces retraites profondes auxquelles il avait confié sa sûreté, il enferma avec lui un dieu vengeur des crimes27. » Et un moment après il nous peint les statues de Domitien abattues, une foule empressée, le fer et la hache à la main, ardente à mutiler ces images d’or, comme si leurs coups tombaient sur le tyran.
Il est étonné que son héros, avec si peu de forces, ait tenté une guerre si importante : « Assurément, lui dit-il, vous avez quelque intelligence secrète avec l’âme universelle et divine, qui daigne se manifester à vous seul, tandis que nous, ce sont des dieux subalternes et du second ordre qui sont chargés de nous conduire. » Ensuite il ne peut comprendre qu’il se soit trouvé dans l’univers des hommes qui aient eu l’audace de résister à Constantin : « Eux qui auraient dû, lui dit-il, céder, je ne dis pas à la présence de votre divinité, mais en entendant seulement prononcer votre nom. » Bientôt après, ce lâche orateur fait un crime à son héros d’avoir combattu lui-même, et de s’être mêlé au milieu des ennemis, d’avoir par là, dit-il, presque causé la ruine de l’univers.
Mon vigoureux génie, enfant de la licence, S’indigne des liens qu’au langage des dieux Imposa trop longtemps un goût injurieux.
J’ai cueilli encore, dans ce recueil, quelques vers, qui traduisent la plus belle minute de l’amour : la certitude dans l’attente : Mon cœur est comme un bois où les dieux vont venir. […] Marie Dauguet, dans ses Pastorales, a renversé cette valeur sentimentale et a voulu redonner à la nature son véritable aspect : la voici devant elle, comme un jeune dieu plein de vie et de santé. […] Ma lèvre est appuyée à la lèvre des dieux. […] … Quelles larmes, Poète, exaspèrent tes yeux, Quand de toi, tout à coup, un poème veut naître, Fait, de sa face occulte, autour de toi, paraître Ce désordre sacré qui précède les dieux ! […] Et dans son dernier volume [en préparation : les Sept Dieux, je trouve cet aveu qui indique bien sa perpétuelle inquiétude devant l’amour : le Désir déchirant : … Vie infortunée !
Voyez-vous là-dessus la revanche grossière de tous les cultes incompréhensifs et outrés qu’il a voulu, soit ramener à la vraie mesure de leur dieu (mesure que, dans le cas de Victor Hugo, il fait encore, et combien justement, « immense ») soit approprier à la qualité vraie de ce dieu et nuancer selon ses attributs authentiques. Quoi d’étonnant, s’écrient tous ces lourds dévots que la nuance exaspère, qu’il ait insulté, jalousé notre dieu ! […] Quand, sous la baguette du chef d’orchestre, le monument s’ébranle et que les figures qui le composent entrent dans la danse sacrée, c’est l’ivresse d’Apollon, c’est la fête des dieux. […] Ledru-Rollin, Louis Blanc, Albert et autres grands-prêtres de l’idée républicaine, socialiste et humanitaire, telle que l’entendait ou la rêvait solennellement cette époque, étaient ses dieux. […] De fait, à mesure qu’il s’émancipe de l’influence formelle de Franck, ses thèmes trahissent de plus en plus le génie même de son dieu.
C’est d’abord Aristote, le dieu de la philosophie du Moyen Âge, qui tombe sous les coups des réformateurs du XVe et du XVIe siècle, avec son grotesque cortège d’Arabes et de commentateurs ; puis c’est Platon, qui, élevé un instant contre son rival, prêché comme l’Évangile, retrouve sa dignité en retombant du rang de prophète à celui d’homme ; puis c’est l’antiquité tout entière qui reprend son sens véritable et sa valeur, d’abord mal comprise dans l’histoire de l’esprit humain ; puis c’est Homère, l’idole de la philologie antique, qui, un beau jour, a disparu de dessus son piédestal de trois mille ans et est allé noyer sa personnalité dans l’océan sans fond de l’humanité ; puis c’est toute l’histoire primitive, acceptée jusque-là avec une grossière littéralité, qui trouve d’ingénieux interprètes, hiérophantes rationalistes qui lèvent le voile des vieux mystères. […] Pour nous, nous ne plierons pas ; nous tiendrons ferme comme Ajax contre les dieux ; s’ils prétendent nous faire fléchir en nous frappant, ils se trompent. […] Mais que faire quand les dieux s’en sont allés ?
Partout, à chaque page de son histoire, c’est le même langage, c’est la même idée fixe, car l’idée fixe, on peut la retrouver aussi bien dans l’ivresse que dans la folie, c’est la même peur du Dieu personnel et vivant du catholicisme, de ce splendide revenant qui hante la raison de l’historien malgré lui, et qui, aperçu incessamment à travers le pâle fantôme du dieu philosophique, réduit toujours le même visionnaire au même effort et à la même convulsion de raisonnement pour le repousser. […] Jésus-Christ), entre l’injuste Dieu qui sauve les élus, ceux qu’il aime et qu’il préfère, les favoris de la grâce, et le dieu de justice, le dieu de la révolution, duquel dérive une société juste, démocratique, égale (c’est le paradis de la Sociale avec l’abolition de l’enfer) !
La Sainte Alliance des Peuples, composée dès 1818, est en quelque sorte un magnifique pavillon dressé au centre et au sommet de cette chaîne de collines, dont le dieu des Bonnes Gens décore le ciel. […] Mais les chansons cette fois réunies, Vierges essaims, paisibles colonies, Loin des lambeaux dans la lutte expirant, Cherchent l’air libre et l’espace plus grand, L’orme sacré de la Cité future, Des horizons que le dieu d’Épicure Eût ignorés et que t’ouvrit le tien.
César humilie sa gloire devant Cléopâtre : il lui rend grâces-de la victoire qu’il vient de remporter à Pharsale : Car le dieu des combats M’y favorisait moins que vos divins appâts. […] Les chefs des Frondeurs s’appellent souvent de noms empruntés à des héros de roman ; La Rochefoucauld, blessé, en danger d’être aveugle, fait hommage de ses souffrances à Mme de Longueville par ces deux vers. qu’il emprunte, en les remaniant, à une tragédie : Faisant la guerre au roi, j’ai perdu les deux yeux ; Mais pour un tel objet je l’aurais faite aux Dieux.
Sans parler de l'Egypte, qui donna ses Dieux, avec les Arts, aux autres Nations, on fait que les Grecs & les Romains avoient, dans le temps même qu'ils furent le plus tolérans, un Magistrat pour veiller à la conservation de la Religion. […] Sans parler de la barbarie où étoit plongée toute l’Europe avant qu’elle eût abjuré les faux Dieux & la superstition, il suffit de fixer ses regards sur le tableau actuel de la Société, pour sentir les avantages que la Religion lui procure.
Elle semble tracée d’après les peintures des vases funéraires qui représentent un jeune homme descendant aux Enfers couronné de fleurs, et souriant à Perséphone, qui lui tend la main : — « Celui que les dieux aiment meurt jeune. […] La Grèce se laissa faire, comme le dieu, et répandit une odeur d’ambroisie sur sa jeune suppliante.
Marbres vivants, berceaux antiques, Par les dieux et les rois Élysée embelli, À ton aspect dans ma pensée, Comme sur l’herbe aride une fraîche rosée, Coule un peu de calme et d’oubli. […] Ce serait pour toi un chagrin éternel si tu m’égorgeais, moi, le chantre qui ai des chants pour les dieux et pour les hommes. » INTERROGATOIRE D’ANDRÉ CHÉNIER.
Quelques-unes, qui semblaient plus impatientes et plus désespérées que les autres, s’avançaient jusque dans les flots de ce Styx d’oubli, et elles tendaient les bras vers la barque, déjà lointaine, qui emmenait un petit nombre de nobles figures immobiles et sereines sous le rayon ; on aurait dit que les délaissés prenaient tous les hommes et tous les Dieux à témoin d’une injustice criante qu’elles étaient seules, hélas !
Esprits immortels de Rome et surtout de la Grèce, Génies heureux qui avez prélevé comme en une première moisson toute heur humaine, toute grâce simple et toute naturelle grandeur, vous en qui la pensée fatiguée par la civilisation moderne et par notre vie compliquée retrouve jeunesse et force, santé et fraîcheur, et tous les trésors non falsifiés de maturité virile et d’héroïque adolescence, Grands Hommes pareils pour nous à des Dieux et que si peu abordent de près et contemplent, ne dédaignez pas ce cabinet où je vous reçois à mes heures de fête ; d’autres sans doute vous possèdent mieux et vous interprètent plus dignement ; vous êtes ailleurs mieux connus, mais vous ne serez nulle part plus aimés.
Elle fait mon bonheur aujourd’hui, demain elle fera mon bonheur, et après-demain, et après-demain encore et toujours, parce qu’elle ne changera pas, parce que les dieux lui ont donné le bon esprit, la droiture, la sensibilité, la franchise, la vertu, la vérité qui ne change point.
Quand Achille essaye de sauver Iphigénie, Agamemnon lui oppose son propre désir, l’empressement qu’il témoignait pour s’embarquer et pour faire le siège de Troie : c’est lui qui exige, avec tout le monde, la mort d’Iphigénie : AGAMEMNON Plaignez-vous donc aux dieux qui me l’ont demandée : Accusez et Calchas et le camp tout entier, Ulysse et Ménélas, et vous tout le premier.
Je ne sais si c’est pour la punir de son avarice et de cette irrévérence à l’endroit des Muses que les dieux la dévouèrent aux flammes.
La Galilée contenait un grand nombre de païens, mais non à ce qu’il semble, un culte des faux dieux public et organisé 646.
On réputait précieux ce vers de Corneille concernant le crime de Laïus, et la peine que les dieux en ont porter à ses enfants : Et s’il faut après tout qu’un grand crime s’efface Par le sang que Laïus a transmis à sa race… Sans doute il aurait fallu dire : par le châtiment des enfants de Laïus !
de son indétermination au christianisme, du partage de son cœur entre le dieu des chrétiens & le sultan.
Je lui disais : effacez-moi tout cela ; mettez-moi cet amour en l’air ; qu’en emportant sur son dos le voile qui couvre la nymphe, il saisisse le satyre par la corne et le pousse sur elle. étendez-moi le front de ce satyre, raccourcissez ce visage niais, recourbez ce nez, étendez ces joues, qu’à travers les traits qui déguisent le maître des dieux je le reconnaisse.