La première chose à considérer, c’est le total approximatif de la population scolaire, c’est la proportion des hommes et des femmes qui ont fréquenté, en une époque donnée, les établissements primaires, secondaires ou supérieurs. […] Mais il ne suffit pas de considérer ce qui a été voulu par ceux qui enseignent et par le pouvoir auquel ils obéissent. […] Il suffit de considérer, pour s’en convaincre, les éditions successives du dictionnaire et surtout les dernières. […] Il en est de même, si l’on considère l’orthographe, la prononciation, la syntaxe.
Haydn était considéré comme le professeur de Beethoven, et celui-ci, ne voulait, absolument, point lui accorder ce titre : souvent, aussi, il se permettait, envers le vieux maître, des sorties de son exubérance juvénile. […] Mais que l’on compare, entre elles, ces œuvres des deux époques ; que l’on mette, par exemple, la huitième symphonie, en fa majeur, devant la deuxième, en ré, et que l’on considère le monde qui de cet ouvrage plus tardif, sous des formes presque identiques, s’avance vers nous, merveilleux, pleinement nouveau ! […] Nous avons vu qu’il nous fallait renoncer à toute rencontre d’une conception théorique propre à Beethoven, et qui eût pu contribuer à nous rendre plus claire cette imagination de son effort artistique ; en revanche, nous pouvons, et nous devons exclusivement, considérer la force virile de son caractère, indiquer, ainsi, l’influence de cette force sur le développement du génie intime du Maître. […] D’abord considéré comme un possédé, on reconnut ensuite la qualité de sa musique grâce à la Marche de Tannhäuser (celle dite « des pélerins ») et on relativisa son inimitié vis-à-vis de la France.
L’organisation des services étant moins précise et moins rigoureuse qu’elle ne l’a été depuis, il put être considéré à un moment comme détaché de l’École et fut nommé secrétaire de l’Observatoire, où il se trouva le collaborateur de M. […] On le considéra comme un espion qui, du haut de sa station nocturne, faisait des signaux à l’ennemi ; il fut, un jour, si bien poursuivi et traqué, que, pour sa propre sûreté, il courut à toutes jambes se mettre en prison.
Deux grands rois qu’on a essayé de séparer de votre amitié sont demeurés fermes et constants en leur première affection, et n’ont eu ensemble qu’un même avis en la conduite de cette affaire… La plus grande prudence aux affaires d’importance est de se servir de l’opportunité, et de considérer qu’en peu de temps les changements arrivent en l’instabilité des choses humaines et des volontés des hommes, qui rendent impossible ce qui était auparavant aisé. […] La popularité du président Jeannin dans les Provinces-Unies était à son comble ; tous les ordres de l’État l’aimaient et le considéraient comme l’auteur de leur bien ; le peuple même le suivait avidement quand il sortait.
Ce que Vico avait dit ingénieusement de Dante considéré par lui comme une sorte d’historien idéal, une étude critique et une élaboration attentive de chaque ordre de faits l’ont vérifié rigoureusement et confirmé. […] De sorte que si Dante avait écrit lui-même le commentaire de son grand poème, comme il l’a fait pour d’autres de ses poèmes moindres, il aurait pu soutenir doublement qu’en effet Béatrix était bien la Béatrix qu’il avait aimée, la fille de Folco de’ Portinari de Florence, et qu’elle n’en était pas moins aussi, en définitive, la Théologie sublime, revêtue de rayons, et dirigeant l’œil humain, qui la considère et qui l’étudie, vers les plus hautes vérités.
Eh bien, toute cette considérable moitié, et plus que moitié, de son tableau, nous a été enviée, elle est détruite ; et nous allons le juger comme si nous possédions le tout et comme si nous considérions l’ensemble ! […] Michelet, sa vie de travail, son effort constant, ses fouilles érudites et ses ingénieuses mises en scène, cette faculté de couleur voulue et acquise où il a l’air de se jouer désormais en maître, mais quand je considère de quelle manière il a jugé et dépeint des événements et des personnages historiques à notre portée, et dont nous possédons tous autant que lui les éléments ; quand je le vois toujours ambitieux de pousser à l’effet, à l’étonnement, j’avoue que je serais bien étonné moi-même qu’il eût deviné et jugé les choses et les hommes de l’histoire romaine plus sûrement que Tite-Live.
Seul, sans mission réelle, jeté avec ce titre de ministre à l’extrême Nord par une royauté qui s’est réfugiée à Cagliari et qui se soucie très peu de lui, n’en recevant ni instructions ni directions, et à peine quelque traitement, n’ayant pas toujours de quoi prendre une voiture, n’ayant pas même de quoi payer un secrétaire, il a su par la noblesse de son attitude, par sa dignité naturelle, par sa probité parfaite, par l’éclat et les lumières de sa parole sitôt qu’il se montre, se faire estimer, considérer au plus haut point, pénétrer dans l’intimité des premiers personnages de l’empire, y compris l’empereur lui-même qui le goûte, qui l’écoute, qui lui demande des mémoires et des notes, et qui certainement a dû penser un moment à se l’acquérir. […] Il estime que ces anciennes souverainetés sont inviolables, immortelles, qu’elles doivent se considérer comme telles par nature, et ne pas trop faire pour se retremper.
disait un des vieux soldats de l’insurrection ; elle est comme une famille dont les membres sont dispersés. » Les Grecs ne se considèrent pas comme définitivement constitués. […] La race grecque est encore, malgré tous ses mélanges et ses altérations, une race d’élite, aisément reconnaissable : « On a beau considérer à Athènes, ou dans une autre ville grecque, toutes les physionomies qui passent et repassent devant les yeux, il n’y en a pas une qui soit vulgaire, niaise, assottie, plate, éteinte, bonasse, moutonnière, badaude, végétative.
Après une année de séjour, nous étions arrivé, comme tant d’autres avant nous, à vénérer les plus humbles pierres de la grande cité, à les considérer avec amour, à trouver à toute chose un parfum d’art, une poésie enfin que nulle autre ville ne possède… » Nuremberg, en effet, ne saurait tenir, ne fût-ce qu’un instant, devant Rome. […] Viollet-Le-Duc, qui démontrera et justifiera dans le détail cette manière de juger et de considérer l’art romain, nous offre, en maint endroit de ses Entretiens, des passages frappants qui font portrait : « Le Romain est avant tout politique et administrateur, il a fondé la civilisation moderne ; est-il artiste comme l’étaient les Grecs ?
Mais le même caractère, qui est admirable pris d’un point de vue élevé, est risible, considéré de la terre… L’on sent déjà pourquoi quelques personnes ont considéré Don Quichotte comme le livre le plus triste qui ait jamais été écrit ; l’idée, fondamentale, la morale du livre, est en effet profondément triste… » Il n’est, on le voit, que manière de prendre les choses.
À cette occasion, son père composa pour lui une Instruction détaillée que de bons juges considèrent comme un chef-d’œuvre en son genre et qui contient tous les préceptes militaires et moraux capables de former un parfait colonel. […] Camille Rousset, muni des papiers d’État et de toutes les correspondances confidentielles, donne un récit qui peut être considéré comme définitif.
Les poètes en général, si l’on excepte le grand Lucrèce, ont considéré le spiritualisme et les idées religieuses comme la région naturelle où respire et se meut à l’aise la poésie. […] Edmond Biré, qui a fait tout un volume pour réfuter les cinq ou six pages de Victor Hugo, et qui les considère comme outrageuses à la Restauration, objet pour lui d’un culte rétrospectif, n’a pas eu de peine à montrer qu’en 1817 Loyson ne passait nullement pour un génie, et que le vers satirique qu’on lui lança ne fut décoché qu’un peu plus tard.
Pendant ces travaux où il faisait preuve d’habileté pratique et de connaissance des détails, il avait l’œil aux grands événements qui se déroulaient et qu’il considérait de haut et d’ensemble comme d’un belvédère, ou mieux encore comme du centre d’une fournaise ; car la Suisse, en ces années d’occupation et de déchirement, devenue un champ de bataille dans toute sa partie orientale, offrait « l’aspect d’une mer enflammée. » Jomini y suivit de près les fluctuations de la lutte, les habiles manœuvres de Masséna pendant les sept mois d’activité de cette campagne couronnée par la victoire de Zurich, les efforts combinés de ses dignes compagnons d’armes, les Dessolle, les Soult, les Loison, les Lecourbe : ce dernier surtout « qui avait porté l’art de la guerre de montagne à un degré de perfection qu’on n’avait point atteint avant lui. » Mais, s’il estimait à leur valeur les opérations militaires, il ne jugeait pas moins les fautes politiques, et ce qu’il y avait de souverainement malhabile et coupable au Directoire à avoir voulu forcer la nature des choses, à avoir prétendu imposer par décret une unité factice à treize républiques fédérées, à s’être aliéné une nation amie, à avoir fait d’un pays neutre, et voué par sa configuration à la neutralité, une place d’armes, une base d’opérations agressives, une grande route ouverte aux invasions. […] Cette ample notice a été évidemment rédigée d’après les conversations du général, et elle peut être considérée comme une sorte d’autobiographie indirecte.
Mais de quelque manière qu’on considère ces réflexions, je reviens aux considérations générales qui s’appliquent à tous les pays et à tous les temps sur les obstacles et les malheurs attachés à la passion de la gloire. […] Les plus grandes découvertes ont été faites dans la retraite de l’homme savant, et les plus belles actions, inspirées par les mouvements spontanés de l’âme, se rencontrent souvent dans l’histoire d’une vie inconnue ; c’est donc seulement dans son rapport avec celui qui l’éprouve, qu’il faut considérer la passion de la gloire.
Weiss considère le théâtre n’a rien d’étroit, de scolaire, de « livresque ». […] Et rien ne nous montrerait mieux que cette critique étincelante et décevante la vanité de la critique, si toutefois nous avions l’ingénuité de la considérer comme une science.
Or, il faut considérer que ce portrait est moitié d’une ennemie, et d’une ennemie qui est servante (Dorine), et moitié d’un imbécile (Orgon) ; que, par conséquent, nous ne le pouvons accueillir que sous bénéfice d’inventaire, que nous en devons contrôler, rectifier ou, mieux, interpréter tous les traits. […] et combien j’ai peur que, tout au contraire, cette inaptitude à considérer les aspects divers des choses n’entraîne l’incapacité de se connaître soi-même et de voir sa pauvre vie comme elle est, et toutes les tristes suites de l’aveuglement sur soi !
Avant même de considérer quel est le sujet de ce roman, qu’il me soit permis de féliciter l’auteur de cette pensée honorable, qui lui a fait demander tout d’abord au travail et à l’étude une consolation. […] Il existe une Histoire, en deux volumes, de la congrégation de l’Enfance, écrite par un avocat d’Avignon, Reboulet : ces volumes, qui ne manquent pas d’intérêt, ni même de quelque agrément de narration, sont malheureusement très peu sûrs, et on y a relevé tant d’inexactitudes et d’impossibilités, l’auteur dans sa Réponse s’est défendu si faiblement et s’est laissé voir, de son propre aveu, si léger, si peu scrupuleux en matière de critique historique, qu’on ne saurait guère les considérer que comme un roman, mais un roman théologique et dressé au profit des ennemis de l’Enfance.
La meilleure définition est l’exemple : depuis que la France posséda son siècle de Louis XIV et qu’elle put le considérer un peu à distance, elle sut ce que c’était qu’être classique, mieux que par tous les raisonnements. […] Si nous considérions le romantique et le classique sous ces deux points de vue, nous serions bientôt tous d’accord.
Mais elle, bien qu’avertie par les généraux, elle ne pouvait croire que cette fidélité fût douteuse, puisque, la veille encore, elle avait reçu de ces hommes, qu’elle considérait comme des braves, des hommages réitérés et des serments. […] Elle aurait considéré comme une profanation et comme un sacrilège l’idée de faire de son malheur et de celui des siens, de sa vertu et de l’intérêt respectueux qu’elle inspirait, un moyen de politique, de succès et d’attrait, même pour ce qu’elle croyait la bonne cause.
Mais, ce qui était fait surtout pour le toucher et ce qui nous intéresse le plus aujourd’hui nous-mêmes, il connut, il vit beaucoup le duc de Reichstadt, le fils de Napoléon, et il fut, dès le premier jour, recherché et considéré par lui. […] Ces événements du 2 Décembre, qu’il jugeait en homme qui considère avant tout le salut de la société européenne et celui de la patrie, et qui croit « que la civilisation ne marche d’une manière utile et prompte que lorsqu’elle est l’effet de la volonté du pouvoir », contribuèrent pourtant à précipiter sa fin.
En effet, le pouvoir, considéré au point de vue moral, et sous sa forme la plus générale, consiste à ne pas s’appartenir un seul moment, à faire de grandes choses peut-être, mais à être envahi aussi par les petites, à n’avoir pas une minute à soi dès le réveil : tel est le plaisir. […] D’Aguesseau, à Fresnes, pas plus que L’Hôpital en sa maison de Vignay, ne doit se considérer comme un ministre en disgrâce ; c’était un magistrat homme d’études, qui retrouvait, un peu mélancoliquement peut-être, mais sans trop d’ennui, les habitudes de la vie de cabinet.
À voir l’ardeur que mit Franklin à cette question qu’il considérait comme nationale, on comprend que quinze ans plus tard, lorsque la rupture éclata entre les colonies et la mère patrie, il ait eu un moment de vive douleur, et que, sans en être ébranlé dans sa détermination, il ait du moins versé quelques larmes ; car il avait, en son âge le plus viril, contribué lui-même à consolider cette grandeur ; et il put dire dans une dernière lettre à lord Howe (juillet 1776) : Longtemps je me suis efforcé, avec un zèle sincère et infatigable, de préserver de tout accident d’éclat ce beau et noble vase de porcelaine, l’empire britannique ; car je savais qu’une fois brisé, les morceaux n’en pourraient garder même la part de force et la valeur qu’ils avaient quand ils ne formaient qu’un seul tout, et qu’une réunion parfaite en serait à peine à espérer désormais. […] Il la considérait comme une navigation dont la traversée est obscure et dont le terme est certain, ou encore comme un sommeil d’une nuit, aussi naturel et aussi nécessaire à la constitution humaine que l’autre sommeil : « Nous nous en lèverons plus frais le matin. » Arrivé en Amérique, salué de ses compatriotes et ressaisi par le courant des affaires publiques, Franklin porte souvent un regard de souvenir vers ces années si bien employées, et où l’amitié et la science avaient tant de part.
Des colères vésaniques le saisissent, dans lesquelles il crie, insulte, serre les poings et grince des dents avec des grondements de dogue ; puis il s’affaisse et se considère ; la misère de tout son pauvre être lui apparaît et il geint encore comme une bête domestique, et cherche avec des yeux lourds une main qui le flatte. […] Et si l’on considère l’étendue et la pénétration de leur enquête, la façon neuve dont ils parlent de l’homme et à l’homme, leur art sincère et haut, la sérieuse ferveur de l’évangile de pitié qu’ils proposent, le plus déterminé partisan de l’art pour l’art peut se sentir hésiter et réfléchir, jusqu’à ce qu’il recomprenne que le problème de la société, de la vie de l’homme ne peut être résolu par le cri de passion des détracteurs d’intelligence, que l’évangile que prêchent les romanciers slaves a précédé de dix-huit cents ans les maux qu’ils dénomment, que l’enseignement fut la marque même de sa fausseté dans son emportement, que la vérité est paisible, persuade en paraissant et n’a nul besoin d’apôtres, que l’erreur seule parle violemment, que les œuvres d’art ne doivent pas tenter de tromper, qu’il leur suffit de contenir les préceptes latents et obéis, ceux-là du monde dont elles sont la lumineuse image.
On arriverait ainsi à comprendre ce que c’est que l’esprit du savant, de quel point de vue il considère les choses, comment il associe les idées, comment il passe du connu à l’inconnu, comment il se trompe, comment il se corrige, comment il invente, et on pourrait tirer de là de grandes conséquences pour l’éducation même de l’esprit humain ; mais laissons là ces vues ambitieuses, et bornons-nous, quant à présent, à bien faire connaître le livre que nous avons sous les yeux, et qui vient enrichir d’une œuvre nouvelle cette histoire de la logique faite par les savants dont nous avons esquissé quelques traits. […] Je citerai, par exemple, un excellent chapitre de Dugald Stewart dans ses Éléments de la philosophie de l’esprit humain, où se trouve rassemblé tout ce que l’on peut dire en faveur de l’hypothèse considérée comme moyen de recherches.
Le principe de la philosophie de Biran peut être formulé ainsi : « Le point de vue d’un être qui se connaît lui-même ne doit pas être assimilé à celui de l’être connu extérieurement. » Toute la philosophie du xviiie siècle avait considéré l’homme comme une chose que l’on aperçoit du dehors. […] En général, pour les métaphysiciens, l’âme était considérée, non comme un sujet, mais comme un objet, objet de raison pure, non des sens, mais toujours conçu et aperçu du dehors, \ non du dedans.
Le genre humain peut être considéré comme un seul tout, ainsi que nous l’avons déjà remarqué ; et c’est dans cette considération élevée que l’on rencontre une des bornes assignées par la Providence à notre liberté. […] Virgile, que l’on peut considérer comme le dernier des poètes antiques, donne à Énée le nom de père.
Considérez maintenant le choix des mots et l’espèce des métaphores. […] A-t-on oublié que si l’on ne considère pas les mots comme des chiffres, on ne peut raisonner pendant six lignes sans commettre six erreurs ?
De nos jours les coups de canne et les coups de poing n’ont pas tout à fait cessé de servir d’arguments ; mais les coups d’épée et de pistolet, considérés comme plus nobles, sont plus souvent de la partie. […] Considérez celui qui se borne à déclarer qu’une chose lui plaît ou lui déplaît ; il a beau taire et peut-être ignorer le pourquoi de son sentiment ; soyez sûrs qu’il en a un ou plusieurs. […] Il vous considérerait avec surprise, avec dédain peut-être, et je ne répondrais pas qu’il voulût vous comprendre. […] S’il considère des faits littéraires, il remonte aussitôt aux facteurs dont ils sont le produit. […] Il y a deux façons principales de la considérer.
On continuera à louer en lui ces images vives et brillantes que sa muse a répandues ; toutefois on ne le considérera plus comme notre seul et premier peintre poétique ; on n’oubliera pas que La Fontaine, Racine, Fénelon, et même Boileau, avaient ouvert, bien avant lui, la pure et vraie source des comparaisons et des images, sans jamais tomber dans la prodigalité ; on n’oubliera pas non plus que Chénier vécut dans un siècle descriptif et que ce don de peindre ou même de colorier les objets, qu’il a perfectionné sans doute, a pourtant été celui de plusieurs de ses contemporains.
Le gendarme y était considéré, comme ailleurs le juif, avec une sorte de répulsion pieuse ; car c’est lui qui arrêta Jésus !
Je considère comme intangibles la forme et la beauté de la langue française, et si je livre à la serpe la plupart des mots grecs et des mots étrangers, c’est précisément pour leur donner la beauté qui leur manque.
D’un autre côté l’individu, que l’on considérait comme isolé, enfermé dans son mécanisme solitaire, est apparu comme essentiellement pénétrable aux influences d’autrui, solidaire des autres consciences, déterminable par des idées et sentiments impersonnels.
Ces premiers hommes, qu’on peut considérer comme représentant l’enfance de l’humanité, durent posséder à un degré merveilleux la faculté de la mémoire, et sans doute il en fut ainsi par une volonté expresse de la Providence ; car, au temps d’Homère, et quelque temps encore après lui, l’écriture vulgaire n’avait pas encore été trouvée (Josèphe, Contre Apion).
Barrès, à la bien considérer, reçoit des événements actuels sa consécration. […] « Lavoisier est considéré à juste titre comme le fondateur de la chimie moderne », dit M. […] Il considère que, dans les relations internationales, « la question de droit est la plupart du temps fort douteuse ». […] … Il considère que ces deux maladies sont des signes de vieillesse et de décrépitude ; il considère que le monde s’est avili et s’est abêti. […] Les philosophes, et avec eux les gens de rien, sont unanimes à considérer l’intelligence comme une faculté créatrice : elle imagine, elle argumente et elle invente.
Mais la proportion de ces deux phénomènes est très variable ; dans certains cas extrêmes, chacun d’eux peut être à peu près seul dans l’âme ; à tout le moins, on ne peut nier qu’ils ne soient spécifiquement distincts, bien qu’ordinairement réunis ; le psychologue a donc le droit de les considérer séparément. […] Qu’elle soit ou non considérée comme un phénomène surnaturel, l’inspiration consiste dans une exaltation de la parole intérieure en même temps que des facultés esthétiques de l’esprit. […] Persuadé que la Providence ne l’abandonnait jamais, qu’elle le retenait toujours par un signal sur la pente de l’erreur, Socrate était amené à considérer toutes ses actions, toutes ses pensées, comme attentivement surveillées par la divinité ; il pouvait donc appeler le demonium un « tuteur » toujours présent, comme Jeanne d’Arc disait « mon conseil » en parlant de ses voix. […] Et si aujourd’hui elle est considérée comme le plus banal des artifices oratoires, est-ce seulement parce qu’elle est usée ? […] Fouillée sont d’accord (sauf des nuances) pour considérer la morale de Socrate comme essentiellement eudémonique (voir La philosophie de Socrate, t.
Considérons leurs traits. […] Nous avons regardé ces dessins comme nous aurions regardé des tableaux, faits pour être considérés à part et formant un tout complet. […] Il y voit trois dessins superposés sur une même surface, qu’il dégage l’un de l’autre pour les considérer isolément. […] Considérez par exemple une eau-forte de Rembrandt. […] Considérées comme des figures composites et perçues d’ensemble, ces compositions seraient d’un effet extravagant.
Ce qui nous paraît regrettable c’est que tout leur artifice ne serve qu’à présenter, à la fraction de la société qui pense comme lui, un miroir où elle se considère avec satisfaction. […] Le point de vue dont on considère les œuvres varie selon le temps, et telle dont on ne voulait à un moment donné apercevoir que les beautés, vingt ans plus tard blesse intolérablement par des défauts sur le compte desquels on s’aveuglait sciemment. […] Hermant, et que nous avions considérées peut-être avec plus de facile indulgence que lui — assurément avec moins de furieux mépris. […] Ce qui nous-même nous surprend davantage au moment de juger d’ensemble cette suite de comédies, c’est de nous sentir enclin à la considérer avec sympathie. […] Quelle que soit la qualité de ses observations, il ne considère jamais qu’une pure notation puisse être sa fin à elle-même.
Renouvier fonde le droit individuel sur la dignité de l’homme considéré comme personne morale. […] Pour toutes ces raisons, l’Individualisme, considéré comme un fait, a la vie dure, et par conséquent, il l’a aussi considéré comme doctrine et surtout comme sentiment. […] Ne souffrons pas trop qu’on s’habitue à considérer chacun de nous comme un simple rouage dans la grande machine. […] Ils ont une vocation et voilà tout, et ils sont très intéressants à considérer. […] Il croit profondément au Contrat social, c’est-à-dire à la société considérée comme un concours de volontés.
Il est vrai que ces places étaient peu considérées dans le monde, parce qu’on n’y voyait que le salaire des services ; elles étaient néanmoins une consolation et un but pour un cœur plébéien avide d’espérance ; et d’ailleurs l’exemple de Fabert n’était-il pas là, attestant que la gloire avait une fois été permise ?
C’étoit peu de se pénétrer de l’esprit des Institutions humaines, de les considérer dans le but qu’elles se proposent, d’en calculer les inconvéniens & l’utilité : il falloit interroger les Législateurs eux-mêmes, se mettre à leur place, développer ce qu’ils ne laissoient qu’entrevoir, analyser les divers rapports que les Loix ont entre elles & avec tout ce qui tient à l’homme, expliquer enfin les motifs de leur établissement.
Renan se fût réjoui des victoires allemandes ou qu’il les trouvât légitimes, mais j’ai dit qu’il considérait la race allemande, comme une race supérieure à la race française, peut-être par le même sentiment que Nefftzer, — parce qu’elle est protestante.
Il le considéra comme une ombre qui releveroit l’éclat de sa grande réputation.
Renan pense même que le philosophe, quand sa dignité n’y est pas trop compromise, doit user d’une extrême complaisance à l’égard de toute personne considérée.
. — Enfin la sagesse parmi les Hébreux et ensuite parmi les Chrétiens a désigné la science des vérités éternelles révélées par Dieu ; science qui, considérée chez les Toscans comme science du vrai bien et du vrai mal, reçut peut-être pour cette cause son premier nom, science de la divinité.
Quoique tout à fait Parisien de mœurs, de ton et d’éducation, Charles Magnin considéra toujours Salins comme le lieu de son origine ; il y possédait quelque bien, des vignes dont le vin lui plaisait et qu’il aimait à faire goûter à ses amis ; il y retournait chaque année passer une partie des vacances ; il accueillait à Paris tous les jeunes Salinois sur le pied de compatriotes, et il a testé finalement, en faveur de la ville de Salins, où il a voulu que ses restes fussent transportés pour y reposer dans le terroir paternel. […] Magnin, pas plus que Fauriel (et, s’il se peut, encore moins que lui), n’était né pour la chaire et l’enseignement oral ; il n’avait rien de ce qui fait l’orateur ni même le professeur, tel que des talents élevés et brillants nous ont appris de nos jours à le considérer. […] Placé au sein de la plus grande bibliothèque du monde, logé dans les bâtiments qui en dépendaient, il pouvait, aux heures ou le public n’y pénétrait pas, ou dans les parties réservées interdites aux profanes, se considérer comme dans le plus vaste et le plus silencieux des cloîtres.
Mais la place est fructueuse : le gouvernement général du Berry vaut 35 000 livres de rente, celui de la Guyenne 120 000, celui du Languedoc 160 000 ; un petit gouvernement particulier, comme celui du Havre, rapporte 35 000 livres, outre les accessoires ; une médiocre lieutenance générale, comme celle du Roussillon, 13 000 à 14 000 livres ; un gouvernement particulier, de 12 000 à 18 000 livres ; et notez que, dans la seule Ile-de-France, il y en a trente-quatre, à Vervins, Senlis, Melun, Fontainebleau, Dourdan, Sens, Limours, Etampes, Dreux, Houdan et autres villes aussi médiocres que pacifiques ; c’est l’état-major des Valois qui depuis Richelieu a cessé de servir, mais que le Trésor paye toujours Considérez ces sinécures dans une seule province, en Languedoc, pays d’États, où il semble que la bourse du contribuable doive être mieux défendue. […] À tous ces titres, ce serait merveille s’il ne considérait pas le revenu public comme son revenu privé, et si, maintes fois, il n’agissait pas en conséquence. […] Quoi d’étonnant, lorsqu’on considère le souverain à la manière du temps, c’est-à-dire comme un châtelain qui jouit de son bien héréditaire ?
Maintenant, sans s’inquiéter des problèmes seconds qui dérivaient du seul problème essentiel, c’est celui-là qu’il considérait, sinon pour le résoudre, du moins pour en éclaircir les termes. […] Prenez, comme par jeu, une poésie de l’époque classique et considérez sa composition : vous y trouverez une vertu analytique, une volonté distributrice, une rigueur si marquées, qu’elles vous paraîtront à peine compatibles avec la notion de poésie. […] L’école lakiste a considéré la vie comme une trame continue, sur laquelle aucun événement ne se détachait d’une façon telle que le poète, l’interprétant, eût à le grossir, ou seulement à le souligner. […] * * * Nous trompons-nous, en disant que, d’une façon générale, nous considérons volontiers la nature comme une projection de notre moi sur l’univers ; tandis que les poètes du Nord lui concèdent une existence à part, une vie objective ? […] Dans le lyrisme, expression plus spontanée de sa conscience profonde, il est resté fidèle à cette forme de l’esprit latin qui répugne au dilettantisme et qui considère qu’aucun citoyen n’a le droit de se soustraire aux devoirs qu’exige la cité, aucun homme aux devoirs qu’impose l’humanité.
Plus on considère attentivement tous ces faits et plus il est difficile de voir dans la formation ou dans le développement de l’esprit encyclopédique une suite naturelle de l’esprit classique ; et plutôt on est tenté de les regarder comme étant le contraire l’un de l’autre. […] Considérons en effet, que, de la manière qu’il opposait la nature, non plus comme autrefois les Rabelais ou les Montaigne, aux vices qui la déshonorent, mais à l’art lui-même, Rousseau décrétait, pour son coup d’essai, non seulement de caducité, mais d’erreur originelle tout ce qu’on avait fait depuis deux cent cinquante ans, pour « artialiser la nature ». […] Mais, avec une méconnaissance entière de la diversité des temps et des conditions de la parole ou de la littérature, on a considéré que l’on pouvait encore emprunter des formes aux générations dont on ne partageait plus les idées, et que les maîtres qui n’étaient plus des « maîtres à penser » pouvaient encore servir de « maîtres à écrire ». […] 2º La royauté de Ferney ; — et que cette expression n’a rien d’exagéré si l’on considère : — la situation même de Ferney [Cf. […] 3º Les Œuvres. — Si nous négligeons les Œuvres scientifiques de Condorcet, ses Œuvres économiques, et ses Œuvres politiques, lesquelles, en raison d’une originalité de fond et d’un mérite de forme qui leur manquent absolument, ne sauraient être considérées comme appartenant à l’histoire de la littérature, nous n’avons à retenir de lui que : 1º Ses Éloges académiques, parmi lesquels il y en a de très intéressants ; 2º Son Éloge de Blaise Pascal ; — sa Vie de M.
Mais longtemps encore il se considéra comme dans son milieu véritable dans le cadre de la nature extérieure. […] Il habitua l’homme à considérer séparément la matière et l’esprit, la vie du corps et celle de l’âme. […] Dans aucun d’eux, l’auteur ne se plaît, comme Homère, à considérer la vie sous tous ses aspects. […] Nous devons donc remonter jusqu’à lui, quelle que soit celle des deux grandes formes du réalisme que nous ayons à considérer. […] S’il daigne la considérer, c’est avec le dédain supérieur d’un monarque honorant d’un regard une fête populaire.
Il ne permettait guère à la critique, même la plus bienveillante et la plus admirative, de prendre ses mesures et encore moins à la biographie de s’orienter autour de son œuvre ou de sa personne ; il a défendu, même au plus pieux et au plus filial des éditeurs, qu’un seul mot de préface fût mis en tête de ses Œuvres posthumes : il considérait volontiers tout appareil de ce genre comme un tréteau au pied d’une statue, comme une baraque au pied d’un temple ; mais lui-même, et ne se confiant qu’à lui seul, il dégageait et dressait amoureusement sur son socle de marbre blanc une figure élevée, pure, une image sereine, chaste, éblouissante, austère et sans tache, sa forme incorporelle, si l’on peut dire. […] Mais le critique, qui croit le moins possible sur parole, et que cet excès même de précaution met sur ses gardes, ne considère que les dates publiques et constatées par l’impression. […] Or M. de Vigny, ayant réfléchi à quelques-unes des objections qu’on lui avait faites devant la Commission sur certains faits graves imputés par lui au premier Empire, avait, tout bien considéré, supprimé au dernier moment une des phrases qu’il devait lire ; il n’en avait point fait part à M. […] Sans doute, si l’on considérait les gens de lettres comme solidaires entre eux et faisant corps ou secte (ainsi que M. de Vigny y inclinait), il faudrait se boucher les yeux et les oreilles et se soutenir les uns les autres quand même, envers et contre tous.
Paul C’est que je ne la considérais pas du même point de vue. […] Paul Pour la bourgeoisie, en partie par les souvenirs de collège ; pour tous, par la propension à considérer l’assassinat comme un des beaux-arts. […] Stendhal, qui n’a suriné personne et n’aurait pas fait de mal à un Clément Vautel, n’en considérait pas moins les drames d’amour comme des preuves d’énergie. […] Laissons cette question préalable, et ne considérons que le résultat.
L’Entretien du 1er janvier prochain, sur la peinture, considérée comme littérature des yeux, et sur le peintre Léopold Robert, ce Werther du pinceau, commencera la quatrième année. […] Ce simple exposé suffirait pour faire porter un jugement sans appel, et sur leur nature, et sur l’objet qu’on se propose en les pratiquant ; mais, comme on a déjà beaucoup écrit sur cette matière, et que le pour et le contre ont eu des partisans outrés, je crois, tout bien considéré, qu’il est inutile de redire ce qui a été dit cent et cent fois. » Il les caractérise néanmoins parfaitement, dans un autre volume de ses Mémoires, comme des rites purement civils et honorifiques, n’impliquant d’autre culte que le culte des souvenirs et de la vénération pour la mémoire de Confucius. […] Seize livres ensuite traitent de politique, du gouvernement des hommes en société, de l’empereur considéré comme premier père de la famille, selon la doctrine de Confucius et des livres sacrés. […] On le conçoit : la guerre, en elle-même, est une barbarie ; les philosophes et les lettrés chinois la réprouvent ; ils la considèrent comme un exercice criminel de la force brutale qui ne prouve rien et qui détruit tout.
Il considérait, en patriarche de Canaan ou en brahmine de l’Inde, la femme comme une créature inférieure en force et en dignité à l’homme ; elle n’était à ses yeux que la plus charmante décoration de la nature, un appât à la perpétuation de l’espèce humaine, une source de plaisir sacré, et surtout une esclave chargée de régner sur son maître par ses charmes supérieurs à ses droits, une servante antique de la tente arabe ou du gynécée grec, dont les fonctions consistaient à gouverner dans un bel ordre intérieur les autres agents inférieurs de la domesticité. […] Considérons gravement ce que produira notre faible pouvoir ; car il faut mépriser l’homme sans intelligence qui ne réfléchit pas aux entreprises qu’il veut accomplir. […] Après l’avoir considérée pendant quelque temps, je ne pus me contenir : j’éclatai en sanglots, je me jetai à son cou, je la forçai à s’asseoir, je m’assis sur ses genoux, je répandis bien des larmes, je l’embrassai pour la première fois, j’ouvris sa robe et je baisai la place où elle avait appris à atteindre le cœur. […] Je considérai la partie de l’arbre qui est restée, condamnée maintenant à traîner l’autre moitié de sa vie par terre, et je pensais qu’elle mourrait cet automne.
Ces rencontres ont amené entre les deux sœurs tantôt restant séparées, tantôt collaborant à la même œuvre, des rapports de voisinage et des tentatives d’union qu’il faut considérer tour à tour. […] C’est celle qui repose sur une mutuelle reconnaissance de leurs droits et de leurs limites, sur une espèce de contrat où, considérées comme équivalentes, elles s’accordent l’une à l’autre un égal respect en se répartissant des fonctions différentes. […] Il suffit de considérer sa fille, la belle Delphine. […] Voir à ce sujet : Les rapports de la musique et de la poésie considérées au point de vue de l’expression, un ouvrage de M.
Le sens de la nature et de la Vie dès lors considérée sous son aspect légendaire, l’émotivité de son premier livre, en 1886, s’en montre soutenue en même temps qu’un court avant-propos revendique la complète liberté du vers pour concourir à des phrases harmoniques. […] Tout en perdant peut-être de sa pantelante horreur, elle s’élargira immensément d’Emotion et de Beauté à mesure que, retrouvant, par la méthode scientifique, le plus possible des rapports qui unissent l’Etre-total du monde, elle devient la déterminante d’une plus ou moins nombreuse Synthèse et, encore, d’une Hypothèse plus ou moins suggestive où se connaisse un peu de l’harmonie universelle… Oui, selon les données scientifiques nous allons considérer l’Instinct comme l’émotion rudimentaire (et pourtant, de quelle énormité, d’être la prime sensation perçue de l’énergie à travers son éternité!) […] Les travaux de Helmholtz et de Krazenstein sur les harmoniques ont démontré que les Voyelles doivent être considérées comme des timbres-vocaux. […] Mais veut-on aussi ne pas prendre pour la loi le résultat ainsi acquis momentanément, l’impossible moment d’arrêt et d’équilibre qu’est ce résultat, tandis que tout évolue autour de l’organisme que nous considérons, qui, immédiatement, devra, en nouvelle instabilité, évoluer lui aussi sous peine de diminution et de mort et retendre son effort, son plus-d’effort.
Et la rampe étant une série de points lumineux, c’est-à-dire une ligne s’étendant indéfiniment, par rapport à l’étroitesse de la face de l’acteur, à droite et à gauche de l’intersection de son plan, on doit la considérer comme un seul point éclairant, situé à une distance indéfinie, comme si elle était derrièrele public. Celui-ci est distant par suite d’un moindre infini, pas assez moindre pour qu’on ne puisse considérer tous les rayons reflétés par l’acteur (soit tous les regards) comme parallèles. […] Elle affecte de considérer littérateurs et artistes comme un petit groupe de bons toqués et il faudrait d’après certains élaguer de l’œuvre d’art tout ce qui est l’accident et la quintessence, l’âme du supérieur, et la châtrer telle que l’eût pu écrire une foule en collaboration. […] N’avons-nous pas le droit de considérer au nôtre la foule — qui nous dit aliénés par surabondance, par ceci que des sens exacerbés nous donnent des sensations à son avis hallucinatoires — comme un aliéné par défaut (un idiot, disent les hommes de science), dont les sens sont restés si rudimentaires qu’elle ne perçoit que des impressions immédiates ?
Qui dit loi suppose un rapport constant, nécessaire, entre deux phénomènes, dont l’un est considéré comme antécédent ou condition essentielle de l’autre. […] Mais si l’on considère la crédulité presque sans mesure de Pline, l’un des plus grands naturalistes de l’antiquité, et la puérilité des récits d’Elien ; si l’on se rappelle Roger Bacon (celui qui eut peut-être, au moyen âge, l’intuition la plus nette de la méthode scientifique), croyant encore que le regard du basilic est mortel, que le loup peut enrouer un homme s’il le voit le premier, que l’ombre de l’hyène empêche les chiens d’aboyer, que l’oie bernache riait des glands d’une espèce de chêne ; quand, en 1680, Pierre Rommel affirme avoir vu à Fribourg un chat qui avait été conçu dans l’estomac d’une femme et avoir connu une autre femme qui avait donné naissance à une oie vivante ; quand, enfin, jusqu’au XVIIIe siècle, on a cru voir dans les fossiles l’effet d’une fécondation des roches par un certaine souffle séminal s’infiltrant sous terre avec les eaux, — il est difficile de ne pas éprouver quelque admiration pour le sens critique dont fait preuve Aristote. […] « A considérer l’ensemble des choses, les unes sont éternelles et divines, tandis que les autres peuvent être ou ne pas être. […] « Les hémiones, dit-il, constituent une espèce distincte (dans le genre des lophures), puisqu’ils s’accouplent entre eux et que leur accouplement est fécond. » Et il ne considère comme appartenant à une même espèce que les individus descendus d’ancêtres communs, car il appelle aussi homophyles (de même souche) les individus qui se ressemblent par la forme.
Le recueil de poésies que nous présentons au public est l’ouvrage d’un jeune homme qui touche à l’âge mûr et qui ne saurait être considéré ni comme un apprenti de lettres, ni comme un débutant. […] Si nous ne considérions que les services qu’elle a rendus et qu’elle continue à rendre, nous devrions déjà estimer la Poésie à un prix infini. […] Il n’admet pas que nous n’écrivions que pour nous seuls, que nous nous considérions comme en dehors de sa sphère. […] * Mais il ne suffit pas de s’efforcer loyalement vers l’expression humaine de la réalité ni de rendre ses droits à l’imagination poétique considérée comme un instrument de connaissance supérieur à l’analyse scientifique.
., je, Jean Froissart, prêtre et chapelain de mon très cher seigneur susnommé, et pour lors trésorier et chanoine de Chimay et de Lille en Flandre, me suis de nouveau réveillé et entré dedans ma forge, pour ouvrer et forger en la haute et noble matière de laquelle dès longtemps je me suis occupé, laquelle traite et propose les faits et les événements des guerres de France et d’Angleterre, et de tous leurs conjoints et leurs adhérents… Or, considérez, entre vous qui me lisez, ou lirez, ou avez lu, ou entendrez lire, comment je puis avoir su ni rassemblé tant de faits desquels je traite avec tant de détail. […] Il s’est laissé aller un peu longuement, dit-il, à raconter les événements et les choses nouvelles qui étaient voisines de lui et qui inclinaient à son plaisir, et pourtant le bruit des exploits qui se passent en pays lointains le préoccupe : il se sent arriéré et veut se remettre au pas de ce côté : Et pour ce, dit-il, je, sire Jean Froissart qui me suis chargé et occupé de dicter et écrire cette histoire, considérai en moi-même que nulle espérance n’étoit qu’aucuns faits d’armes se fissent aux pays de Picardie et de Flandre, puisqu’il y avoit paix ; et point ne voulois être oiseux, car je savois bien qu’encore au temps à venir et quand je serai mort, sera cette haute et noble histoire en grand cours et y prendront tous nobles et vaillants hommes plaisance et exemple de bien faire ; et, tandis que j’avois, Dieu merci !
La Grande Mademoiselle, chez qui le père de Marianne avait l’office d’apothicaire et qui considérait Marianne elle-même comme une de ses domestiques, a parlé d’elle avec hauteur. […] Dans la visite qu’il fait à une charmante villa à Bagnaia près Viterbe, il est évident, à la manière dont il y est accueilli et dont il en parle, qu’il s’y considérait volontiers en passant comme le maître de la maison.
Il n’a donc point prétendu se cantonner dans la Bretagne, la traiter au point de vue local et dans ses oppositions avec la France, mais tout au contraire faire une histoire de la Bretagne considérée dans ses rapports avec la France, la Normandie et par conséquent l’Angleterre. […] Lui-même il a résumé, mieux que je ne pourrais le faire, toute sa vie considérée selon cet ordre littéraire continu, et dans laquelle la politique, vue en arrière, ne lui paraissait presque plus avoir été qu’un accident : J’ai trouvé, disait-il, dans l’étude des lettres, au bout d’une vie déjà longue et traversée par bien des événements, un grand charme, une grande utilité, souvent de grandes consolations.
Une lettre souvent citée qui commence ainsi : « Enfant de saint Louis, imitez votre père… », indique en termes généraux quelle largeur de piété et quelle ouverture de cœur il lui souhaitait pour se faire aimer des bons, craindre des méchants, estimer et considérer de tous. […] Il faut avouer que je vous ai toujours vu, dans votre enfance, aimant à être en particulier, et ne vous accommodant pas des visages nouveaux. » Il voudrait le voir accessible, ouvert à tous, sachant s’entourer mieux qu’il ne fait et de personnes plus considérées, sachant un peu proportionner ses témoignages de confiance à la réputation publique de ceux à qui il les accorde ; il voudrait surtout le mettre en garde contre tout ce qui semble dénoter une dévotion sombre, timide, scrupuleuse : Pour votre piété, si vous voulez lui faire honneur, vous ne sauriez être trop attentif à la rendre douce, simple, commode, sociable… (Et dans une autre lettre, à quelques jours de là) : Vous devez faire honneur à la piété, et la rendre respectable dans votre personne.
Je considérais l’autre jour, au musée du Louvre, le buste de Buffon, par Augustin Pajou : il y est représenté déjà vieux ; le contour de l’œil, les tempes ridées et un peu amaigries le disent : mais c’est une belle tête, digne, haute, noblement portée. […] Les idées de Buffon sur la dégénération des animaux et sur les limites que les climats, les montagnes et les mers assignent à chaque espèce, peuvent encore être considérées comme de véritables découvertes qui se confirment chaque jour, et qui ont donné aux recherches des voyageurs une base fixe dont elles manquaient absolument.
Tout ce qu’il a fait prouve tant de fond, un sentiment si réfléchi que l’on ne peut voir ses tableaux sans s’arrêter longtemps à les considérer. […] Navez ces paroles tout empreintes d’affection amicale et d’esprit de famille : Il est vrai que tu as tout pour te trouver heureux d’être au monde : tu te trouves dans ta patrie, honoré et considéré pour ton talent brillant ; estimé, aimé par toutes les personnes qui te connaissent ; regardé par la Fortune de son œil le plus favorable ; heureux époux, heureux père.
De même que nous avons vu quelques-uns de ceux qui l’avaient observée avant l’explosion, et quand elle ne faisait que de naître, se flatter de saisir et d’assigner l’instant précis où il eût été possible de la régler, ou mieux de l’anticiper et de la prévenir, de même lui, qui l’avait connue de près en plein cours, il la considérait et la jugeait comme il eût fait un grand soulèvement physique et une révolution de régime dans les montagnes. Il n’avait que dédain pour ceux qui rapportaient l’origine d’une si grande secousse à tel objet particulier de leur dépit ou de leur aversion : L’heure des révolutions sonne, messieurs, disait-il (et c’est dans un discours qu’il eut à prononcer comme préfet à l’ouverture du lycée de Clermont sous l’Empire), — l’heure des révolutions sonne quand la succession des temps a changé la valeur des forces qui concourent au maintien de l’ordre social, quand les modifications que ces forces ont subies sont de telle nature qu’elles portent atteinte à l’équilibre des pouvoirs ; quand les changements, imperceptiblement survenus dans les mœurs des peuples et la direction des esprits, sont arrivés à tel point qu’il y a contradiction inconciliable et manifeste entre le but et les moyens de la société, entre les institutions et les habitudes, entre la loi et l’opinion, entre les intérêts de chacun et les intérêts de tous ; quand enfin tous les éléments sont parvenus à un tel état de discorde qu’il n’y a plus qu’un conflit général qui, en les soumettant à une nouvelle épreuve, puisse assigner à chaque force sa mesure, à chaque puissance sa place, à chaque prétention ses bornes… Cette manière élevée de considérer les choses contemporaines comme si elles étaient déjà de l’histoire, dispense de bien des regrets dans le passé et de bien des récriminations en arrière.
Or, dans la peinture générale qu’il fait de l’homme, il commence par étaler, sans compensation et sans contre-poids, toutes les causes de misère, d’incertitude et d’erreur ; il humilie l’homme tant qu’il peut, et, à ne considérer même les choses qu’au point de vue purement naturel, il ne tient point compte de cette force sacrée qui est en lui, de cette lumière d’invention qui lui est propre et qui éclate surtout dans certaines races, de ce coup d’œil royal et conquérant qu’il lui est si aisé, à l’âge des espérances et dans l’essor du génie, de jeter hardiment sur l’univers. […] tout ce qui s’accorde si bien avec la destinée terrestre et sociale de l’homme ne doit-il pas être considéré bien moins comme une illusion que comme une harmonie ?
Jung, qui l’a aussi fort bien étudié et considéré par tous ses aspects, s’est trop préoccupé pourtant de certaines restrictions et de je ne sais quels reproches faits à ce restaurateur de la France, lorsqu’il a dit en concluant l’un de ses principaux chapitres : « Henri IV n’est pas sans reproche. Il a poussé ses qualités jusqu’aux défauts mais, considéré tout entier par les côtés qu’admire la raison et par ceux que condamne la morale ; regardé, en un mot, des hauteurs de l’histoire, et non par les dessous d’une chronique méticuleuse, Henri IV ne sera jamais haïssable. » — Ainsi Henri IV, somme toute, n’est pas haïssable !
Que s’il se mêle à cette question de liturgie une part de dogme, on trouvera tout naturel que je la néglige ici pour ne considérer que ce qui est du ressort du goût, ce dernier ordre de considérations étant très suffisant pour nous permettre de bien juger du caractère, du rôle et de toute la destinée de Santeul ; car il ne fut jamais qu’un homme de verve, et nullement un homme de doctrine. […] Le Tourneux, qui vise à réformer en lui le cœur, est attentif à poursuivre en lui ce déguisement nouveau de l’amour-propreb : « Considérez, lui écrit-il, mon cher frère, qu’on peut bien, dans l’Église visible et militante, chanter et composer les louanges de Dieu avec un cœur impur et des lèvres souillées, mais qu’on ne chantera pas les louanges de Dieu dans le ciel avec un cœur impur et des lèvres souillées… Vous avez donné de l’encens dans vos vers, mais c’était un feu étranger qui était dans l’encensoir.
Un peu d’application et d’étude suffit pourtant bientôt pour dissiper ou pour réduire la plupart de ces fausses vues et de ces objections exagérées à distance : à le considérer de près, dans ses actes et dans ses Œuvres, on reconnaît qu’avec ses défauts et ses taches Frédéric est de la race des plus grands hommes, héroïque par le caractère, par la volonté, supérieur au sort, infatigable de travail, donnant à chaque chose sa proportion, ferme, pratique, sensé, ardent jusqu’à sa dernière heure, et sachant entremêler à son soin jaloux pour les intérêts de l’État un véritable et très sincère esprit de philosophie, des intervalles charmants de conversation, de culture grave et d’humanité ornée. […] Il l’avertit plus d’une fois combien il importe, en cas d’événement imprévu, qu’il soit au fait de toutes les choses qui concernent l’État, il ne cesse enfin de considérer en lui son héritier présomptif ; car un des caractères philosophiques de Frédéric, c’est de penser habituellement à la mort, mais d’y penser en homme-roi et en vue de pourvoir à la sûreté de l’État après lui.
Bernardin de Saint-Pierre s’ennuya fort à l’Île-de-France tant qu’il y vécut, mais revenu de là, et de loin, il ne considéra plus que la beauté des sites, la douceur et la paix des vallons ; il y plaça des êtres de son choix, il fit Paul et Virginie. […] ce pauvre Charles qui l’aime, et que par moments elle voudrait tâcher d’aimer, n’a pas l’esprit de la comprendre, de la deviner ; s’il était ambitieux du moins, s’il se souciait d’être distingué dans son art, de s’élever par l’étude, par le travail, de rendre son nom honoré, considéré ; mais rien : il n’a ni ambition, ni curiosité, aucun des mobiles qui font qu’on sort de son cercle, qu’on marche en avant, et qu’une femme est fière devant tous du nom qu’elle porte.
Cependant, avant de considérer Bonstetten sous sa forme dernière et définitive (si tant est qu’il y ait jamais eu rien de définitif en lui), nous avons à le mener, à l’accompagner rapidement à travers ses âges intermédiaires. […] Et de plus, il y a tout lieu de croire, si l’on considère les progrès de la raison, que dans trente ans d’ici, ce même fils trouvera vos sollicitudes bien ridicules.
Considérez notre littérature depuis le Moyen-Age, rappelez-vous l’esprit et la licence des fabliaux, l’audace satirique et cynique du Roman de Renart, du Roman de la Rose dans sa seconde partie, la poésie si mêlée de cet enfant des ruisseaux de Paris, Villon, la farce friponne de Patelin, les gausseries de Louis XI, les saletés splendides de Rabelais, les aveux effrontément naïfs de Régnier ; écoutez dans le déshabillé Henri IV, ce roi si français (et vous aurez bientôt un Journal de médecin domestique, qui vous le rendra tout entier, ce diable à quatre, dans son libertinage habituel) ; lisez La Fontaine dans une moitié de son œuvre ; à tout cela je dis qu’il a fallu pour pendant et contrepoids, pour former au complet la langue, le génie et la littérature que nous savons, l’héroïsme trop tôt perdu de certains grands poëmes chevaleresques, Villehardouin, le premier historien épique, la veine et l’orgueil du sang français qui court et se transmet en vaillants récits de Roland à Du Guesclin, la grandeur de cœur qui a inspiré le Combat des Trente ; il a fallu bien plus tard que Malherbe contrebalançât par la noblesse et la fierté de ses odes sa propre gaudriole à lui-même et le grivois de ses propos journaliers, que Corneille nous apprît la magnanimité romaine et l’emphase espagnole et les naturalisât dans son siècle, que Bossuet nous donnât dans son œuvre épiscopale majestueuse, et pourtant si française, la contrepartie de La Fontaine ; et si nous descendons le fleuve au siècle suivant, le même parallélisme, le même antagonisme nécessaire s’y dessine dans toute la longueur de son cours : nous opposons, nous avons besoin d’opposer à Chaulieu Montesquieu, à Piron Buffon, à Voltaire Jean-Jacques ; si nous osions fouiller jusque dans la Terreur, nous aurions en face de Camille Desmoulins, qui badine et gambade jusque sous la lanterne et sous le couteau, Saint-Just, lui, qui ne rit jamais ; nous avons contre Béranger Lamartine et Royer-Collard, deux contre un ; et croyez que ce n’est pas trop, à tout instant, de tous ces contrepoids pour corriger en France et pour tempérer l’esprit gaulois dont tout le monde est si aisément complice ; sans quoi nous verserions, nous abonderions dans un seul sens, nous nous abandonnerions à cœur-joie, nous nous gaudirions ; nous serions, selon les temps et les moments, selon les degrés et les qualités des esprits (car il y a des degrés), nous serions tour à tour — et ne l’avons-nous pas été en effet ? […] Il faut absolument, pour rétablir l’équilibre, pour maintenir la composition de l’esprit français, considéré dans son expression la plus haute, non seulement des esprits sérieux, mais des esprits dignes, des poëtes héroïques dans les âges d’héroïsme, de grands évêques éloquents dans le siècle monarchique religieux, des tragiques capables de sublime, des écrivains porte-sceptre, des autorités.
Flaubert met complètement de côté et considère comme non avenu le célèbre chapitre de Montesquieu dans l’Esprit des Lois : « Le plus beau traité de paix dont l’histoire ait parlé, est, je crois, celui que Gélon fit avec les Carthaginois. […] L’auteur ne se tient pas au-dessus de son ouvrage : il s’y applique trop, il a le nez dessus : il ne paraît pas l’avoir considéré avant et après dans son ensemble, ni à aucun moment le dominer.
À ce titre, il serait ingénieux de considérer l’intrusion de la science, en son œuvre, comme un merveilleux d’un nouveau genre, le merveilleux scientifique, et de ne pas tenir autre compte de ses velléités d’expérimentateur. […] Puis, sans se préoccuper de savoir à qui il s’adresse, il se pose en inventeur et se met à débiter avec emphase le boniment amphigourique d’une encre merveilleuse qui se décolore peu à peu et permet, au bout de huit jours, de considérer comme non avenues les promesses que l’on a solennellement signées ; il donne ensuite à sa femme une sorte de leçon allégorique, dans le genre de celle qu’Hamlet donne, devant la cour de Danemark, à la reine coupable du meurtre de son mari, et enfin, sans attendre de réponse, il salue et rentre rapidement dans sa chambre.
Mais les conquêtes donnaient un pouvoir immense aux chefs de l’état ; et les principaux Romains, élite de la ville reine de l’univers, se considéraient comme possesseurs du patriciat du monde. […] Ovide, dans ses Tristes, défend aux femmes de lire les Annales en vers d’Ennius, parce que, dit-il (nihil est hirsutius illis), rien n’est plus grossier que ces Annales ; et le plus grand nombre des commentateurs latins considèrent Ennius comme un mauvais écrivain.
Puis, d’une façon plus générale, il nous a encouragés à ne pas nous arrêter dans le dilettantisme artistique ou dans l’impassibilité scientifique, à considérer la littérature comme une collection d’actes humains, libres et moraux ; c’est-à-dire qu’il nous amène à poser toujours la question de la valeur morale, des propriétés morales de chaque œuvre. […] Ces écrits, pourtant, peuvent se considérer dans leur rapport à l’histoire : ils sont documents d’histoire et la matière d’où la science méthodique extraira plus tard son œuvre.
J’y vois l’humanité opposée à la socratité, à la platonité, et les individus considérés tour à tour comme existant seuls absolument, ou comme n’étant que les parties et comme les membres du genre humain. […] L’homme n’est guère considéré que dans l’état théologique, pour ainsi dire ; tour à tour au niveau de l’ange, quand on regarde de quel prix il a été racheté ; ou au-dessous du néant, quand on le compare à celui qui l’a fait.
De plus, parmi les circonstances d’un phénomène, il y en a que nous regardons comme négligeables, et nous considérerons A et A′ comme peu différents, s’ils ne diffèrent que par ces circonstances accessoires. […] Or nous venons de le dire, c’est dans les relations seulement que l’objectivité doit être cherchée ; il serait vain de la chercher dans les êtres considérés comme isolés les uns des autres.
Mais ce n’est pas assez de constater les rapports du milieu physique et de la littérature qui peuvent être considérés comme de simples indices des goûts d’une époque ; il faut pousser plus avant et tâcher de mettre en lumière les phénomènes physiques qui peuvent être regardés comme des causes véritables de phénomènes littéraires. […] Il ne serait pas inutile de considérer la densité de la population, sa distribution entre la campagne et la ville.
Quand je lisais pour la première fois ce livre aux âpretés incertaines et aux violences troubles, je me charmais surtout à considérer Léon Daudet, être équivoque dont je ne devinais point l’avenir banal. […] Tout en refusant encore de voir, je m’irritais et je reprochais à l’auteur d’obéir à une mode6 : « Une conversion est considérée depuis quelque temps, comme le plus élégant des dénouements : au lieu de marier ses héros ou de les tuer, on les agenouille.
Par exemple, dans l’éloge du grand physicien Duhamel, en annonçant qu’il va le considérer d’abord comme agriculteur, l’orateur biographe nous dira que « les premières fleurs qu’il jettera sur le tombeau de M. […] Pariset, c’est que ce dernier, malgré l’intervalle des temps, peut être considéré véritablement comme son successeur.
J’en ferais bien autant, aurait-il pu dire de presque chaque production de ce genre qu’on lui aurait offert à considérer. […] Le goût d’enseigner ne doit point se considérer chez elle comme un travers, c’était le fond même et la direction de sa nature.
Homme d’observation toutefois et de bon sens avant tout, absolument étranger par ses origines comme par ses habitudes d’esprit aux doctrines du droit divin, il est évident pour ceux qui le lisent que, s’il avait vécu, il ne se serait nullement considéré comme enchaîné à la Restauration, et qu’il eût fait mieux que consentir à l’essai de monarchie constitutionnelle de Louis-Philippe : il aurait cru un moment y voir la réalisation tardive de ce qu’il avait longtemps désiré et de ce dont il avait désespéré tant de fois, l’établissement d’un gouvernement mixte, devenu enfin possible en France après ces trente ou quarante ans d’une éducation préliminaire si chèrement achetée. […] Quelques mois après, il écrivait à M. de Sainte-Aldegonde à propos de la paix générale considérée comme très prochaine, et en dégageant sa pensée fondamentale de tout ce désarroi universel où chaque État faisait sa paix à part et tirait à soi : Tous ces tracas européens ne signifient plus rien pour nous.
Portalis fut un des organes les plus éloquents et les plus considérés de cette vie publique. […] À cette date, l’idée d’uniformité dans la législation de l’empire ne lui paraît pas un bien : « l’uniformité dans la législation, dit-il, a toujours été un des grands moyens de préparer le despotisme. » Il considère la France, telle qu’elle était en effet alors, comme une fédération de petits États, plutôt unis que confondus, chaque petit État possédant sa législation propre, et restant indépendant jusqu’à un certain point dans les moyens de la diriger et de la contrôler.
Cousin, un jour, traçait ainsi le plan idéal d’une vie d’homme de lettres : « Un monument et beaucoup d’épisodes. » Le monument, il considère sans doute qu’il l’a fait dans sa traduction de Platon, et il en est aux épisodes. […] Mais je ne les considère ici qu’au seul point de vue littéraire, et, à ce point de vue, on ne peut trop les admirer.
Un autre médecin, plus hardi, a poussé plus loin les mêmes conclusions, et n’a pas hésité à considérer le génie comme un phénomène de la même famille que l’aliénation mentale. […] L’homme de génie dut être considéré connue une créature à part, à laquelle les lois communes n’étaient pas applicables ; il était en dehors et au-dessus des lois morales et des lois sociales : le désordre eu était la condition indispensable.
Eh bien, si je regarde autour de nous, et si je considère les principaux événements de l’histoire du monde depuis le Contrat social, il me semble que le principe de la souveraineté sort de plus en plus de l’utopie pour entrer dans la réalité des faits. […] L’abus du détail dans les descriptions, les sentiments trop particuliers et trop raffinés, les paradoxes de l’utopie, le spécial introduit dans l’histoire, enfin la disproportion de l’imagination et de la raison, c’est-à-dire la prépondérance de la forme sur le fond, et quelquefois le contraire, — tels sont les défauts qui ne permettent pas à la littérature contemporaine de se considérer comme classique.
Le culte des femmes, chez nos premiers aïeux, se transformera en galanterie sous Louis XIV, et subira une bien autre métamorphose sous la Régence ; mais ne craignez jamais que chez nous les femmes soient considérées autrement que comme la noble compagne de l’homme. […] Chez nous, par exemple, pour la certitude du calcul, il faut considérer les opinions où elles sont actuellement, et les mœurs où elles étaient avant la Régence ; car ce n’est qu’à cette époque que l’on peut juger de nos véritables mœurs nationales ; à présent elles sont trop voilées par nos opinions : les mœurs de la Régence et celles qui ont suivi sont une exception dans l’histoire de notre caractère, une sorte d’interrègne et de confusion.
Mais ceux-ci sont de pures abstractions, dès qu’on les considère en dehors de leur application à quelque objet d’expérience. […] Mais il fallait que celle-là aussi fût minée par le mal fatal des héroïnes de Chateaubriand, au prix de quelle invention outrée et, pour peu qu’on la considère hors du voile brillant, insupportable ! […] Le Romantisme, qu’on considère son empreinte dans les idées, les sentiments, les mœurs, la littérature ou l’art, manifeste partout les instincts et le travail de la femme livrée à soi. […] Et ne faut-il pas être haussé jusqu’à cette perfection, dans un « système » qui considère la « liberté absolue de l’être moral comme son premier bien ». […] Quand je considère cette littérature dans son ensemble, j’ai l’impression d’une âme débile tellement envahie et obnubilée par l’hypertrophie du corps, qu’elle prend l’opulence de ce corps pour la sienne propre.
Si donc, après avoir considéré le vêtement comme utile, nous l’envisageons comme décoratif, il est évident qu’il ne pourra orner le corps qu’à la condition d’en respecter les contours, de n’en point briser l’ensemble harmonieux et l’unité.
Il faudrait plier l’opinion à honorer, partout et toujours, la maternité, à la considérer comme auguste et purificatrice, à penser qu’elle lave les souillures même d’où elle est sortie, par la souffrance, par le devoir accepté, et par ce qu’elle apporte de renfort possible à la communauté humaine dont nous faisons partie.
Mais celle que je vous recommande est tout autre chose : elle est formée d’un sens très-vif du réel, qui n’est pas simple, et du possible, qui est limité, et de l’habitude de considérer les aspects divers et contraires des questions ; elle est le produit naturel de l’esprit critique.
A ne considérer que ces rois de l’intelligence, on s’expose à les grandir jusqu’à des proportions surhumaines ; on en arrive à confondre en eux ce qui leur est personnel avec ce qui leur est commun avec leurs voisins.
Il prétendoit que l’Homme raisonnable ne doit s’occuper que du vrai, considéré en lui-même ; que ce vrai peur seul perfectionner notre intelligence ; que l’étude de l’Homme est préférable à toute autre étude ; qu’il n’appartient enfin qu’à la Philosophie de nous le montrer, tel qu’il est, dans les idées primitives, dont l’Histoire ne nous présente, selon lui, que des copies imparfaites, ou des portraits défigurés.
Quant à ces deux volumes pris en eux-mêmes, l’auteur n’a qu’un mot à en dire : le genre humain, considéré comme un grand individu collectif accomplissant d’époque en époque une série d’actes sur la terre, a deux aspects : l’aspect historique et l’aspect légendaire.
Dans le chapitre dixième, je considérerai la succession géologique des êtres organisés dans le temps ; dans le onzième et le douzième, leur distribution géographique dans l’espace ; dans le treizième, leur classification et leurs affinités mutuelles, soit à l’état adulte, soit à l’état embryonnaire.
Je ne parle pas de celle qui dit son rosaire, qui fait de sa cour un couvent, et qui n’est pourtant pas une petite femme ; mais de celle qui donne des lois à son pays qui n’en avait point ; qui appelle autour d’elle les sciences et les arts, qui fonde les établissemens les plus utiles, qui a su se faire considérer dans toutes les cours de l’Europe, contenir les unes, dominer les autres, qui finira par amener le polonais fanatique à la tolérance ; qui aurait pu ouvrir la porte de son empire à cinquante mille polonais, et qui a mieux aimé avoir cinquante mille sujets en Pologne ; car vous le savez tout aussi bien que moi, mon ami, ces dissidens persécutés deviendront persécuteurs, lorsqu’ils seront les plus forts, et n’en seront pas moins alors protégés par les russes.