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41. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — La solidarité des élites »

Je veux dire qu’ils ont réellement découvert dans ce monde qui nous entoure, dans ce monde proche ou lointain, une nature totalement différente de celle que nous connaissions ; et dans l’homme à qui nous parlons dans la rue, dans l’homme qui vit loin de nous sous d’autres cieux, l’homme que vous êtes, l’homme que je suis, un être radicalement nouveau par sa nature et par sa vie, un être qui paraît surgir comme une tige nouvelle du sein d’une terre vierge. […] Écartant d’une main les ombres d’un passé néfaste, Michelet découvre à nos yeux la forme vivante et frémissante de l’humanité que nous sommes, faisant jaillir de sa libre fécondité sa vie physique et spirituelle, nourrie elle-même de ses divines énergies qui la font renaître, enfin consciente de ses éternelles richesses. […] Roberts, — vers récents ceux-là, que je découvre en tête de son volume : Chants de tous les jours :‌ A travers le brouillard la lune repose belle, Pénétrée d’une couleur spectrale d’améthyste, ‌ Ô blanche nuit, charme jusqu’à l’étonnement ‌ Des bestiaux dans la brume !‌ […] Il nie la valeur positive de cette autorité dont nous avons découvert le vice intime et les mortelles conséquences : mais il ne nie pas toute « autorité » extérieure, si l’on peut exprimer par ce mot perverti le sens que nous voulons y mettre. […] Nationalisme… Voilà l’un de ces mots que leur emploi conventionnel et irréfléchi a revêtu d’une telle couche d’erreurs et de mensonges qu’il nous faut un effort gigantesque pour en découvrir le véritable sens, logique et simple.

42. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « La Mare au diable, La Petite Fadette, François le Champi, par George Sand. (1846-1850.) » pp. 351-370

Ce fut Jean-Jacques qui le premier eut la gloire de découvrir la nature en elle-même et de la peindre ; la nature de Suisse, celle des montagnes, des lacs, des libres forêts, il fit aimer ces beautés toutes nouvelles. Bernardin de Saint-Pierre, peu après, découvre à son tour et décrit la nature de l’Inde. Chateaubriand découvre plus tard les savanes d’Amérique, les grands bois canadiens et la beauté des campagnes romaines. Voilà bien des découvertes, les déserts, les montagnes, les grands horizons italiens ; que restait-il à découvrir ? […] On avait commencé par la Suisse, par l’Amérique, par l’Italie et la Grèce : il fallait Mme Sand pour nous découvrir le Berry et la Creuse.

43. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 33, que la veneration pour les bons auteurs de l’antiquité durera toujours. S’il est vrai que nous raisonnions mieux que les anciens » pp. 453-488

Il en font des analyses, suivant la méthode des geometres, méthode si propre à découvrir les fautes échappées aux censeurs précedens. […] Je nie seulement que nous raisonnions avec plus de justesse que les grecs et les romains, et je me contente de soutenir qu’ils auroient fait un aussi bon usage que nous des veritez capitales que le hazard nous a revelées, pour ainsi dire, s’il lui avoit plû de leur découvrir ces veritez. […] Il n’y a pas quarante ans que cette faute grossiere, sur la distance des côtes de l’Afrique et des côtes de l’Amerique meridionale, païs découvert depuis deux cens ans, est corrigée. […] Qu’on juge par ce récit, dont personne ne sçauroit contester la verité, si ce sont les doutes éclairez et les spéculations des philosophes qui les aïent conduits de principe en principe, du moins jusqu’aux expériences qui ont fait découvrir la pesanteur de l’air. […] On peut appliquer à l’état présent des sciences naturelles l’emblême du temps qui découvre toujours, mais peu à peu, la verité.

44. (1911) La valeur de la science « Deuxième partie : Les sciences physiques — Chapitre VI. L’Astronomie. »

Aujourd’hui, nous ne sollicitons plus la Nature : nous lui commandons, parce que nous avons découvert quelques-uns de ses secrets et que nous en découvrons chaque jour de nouveaux. […] Aujourd’hui, une hypothèse ne nous paraîtra plus absurde, parce qu’elle nous oblige à imaginer des objets beaucoup plus grands ou beaucoup plus petits que ceux que nos sens sont capables de nous montrer, et nous ne comprenons plus ces scrupules qui arrêtaient nos devanciers et les empêchaient de découvrir certaines vérités simplement parce qu’ils en avaient peur.

45. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Première partie. Plan général de l’histoire d’une littérature — Chapitre IV. Moyens de déterminer les limites d’une période littéraire » pp. 19-25

On découvre à première vue qu’il y a des caractères d’une persistance inégale. […] Cette réserve faite, il est assez aisé de découvrir, presque du premier coup d’œil, trois grandes périodes dans notre histoire littéraire. […] Assurément des faits de cette espèce ont plus de portée dans la vie d’un peuple que la mort d’un prince, voire même qu’une bataille gagnée ou perdue ; mais ils sont cachés, et l’historien n’a pas trop de toute sa perspicacité pour les découvrir ni de tout son talent pour les mettre en lumière.

46. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre V. Des trois ordres de causes qui peuvent agir sur un auteur » pp. 69-75

Il est évident que, pour en découvrir l’origine, il faut chercher parmi les ascendants de l’individu qu’on étudie. […] On les découvre en appliquant aux phénomènes qu’on étudie les méthodes d’investigation qui sont usitées dans les sciences naturelles. […] Nous sommes donc en droit de conclure : Il est possible de découvrir scientifiquement un certain nombre des causes qui ont agi sur une œuvre littéraire par l’intermédiaire de son auteur.

47. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre XII. Suite des machines poétiques. — Voyages des dieux homériques. Satan allant à la découverte de la création. »

À mesure qu’il avance vers le jour, l’empyrée, avec ses tours d’opale et ses portes de vivants saphirs, se découvre à sa vue. Enfin, il aperçoit au loin une haute structure, dont les marches magnifiques s’élèvent jusqu’aux remparts du ciel… Perpendiculairement au pied des degrés mystiques, s’ouvre un passage vers la terre… Satan s’élance sur la dernière marche, et plongeant tout à coup ses regards dans les profondeurs au-dessous de lui, il découvre, avec un immense étonnement, tout l’univers à la fois.

48. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre IV. La philosophie et l’histoire. Carlyle. »

Et non-seulement il le découvre et le proclame, mais il y croit et il le voit. […] Dans la puissance de découvrir les idées générales. […] Nous découvrons en nous « quelque chose de plus haut que l’amour du bonheur », l’amour du sacrifice. […] Il découvre que ce ne sont point des remèdes. […] Notre constitution pose en principe que, pour découvrir le vrai et le bien, il n’y a qu’à faire voter deux millions d’imbéciles.

49. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre premier. Que le Christianisme a changé les rapports des passions en changeant les bases du vice et de la vertu. »

Cette seule transmutation de principes montre la nature humaine sous un jour nouveau, et nous devons découvrir dans les passions des rapports que les anciens n’y voyaient pas. […] Cette curiosité conduit peu à peu à douter des choses généreuses ; elle dessèche la sensibilité, et tue pour ainsi dire l’âme : les mystères du cœur sont comme ceux de l’antique Égypte : le profane qui cherchait à les découvrir sans y être initié par la religion, était subitement frappé de mort.

50. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 26, que les sujets ne sont pas épuisez pour les peintres. Exemples tirez des tableaux du crucifiment » pp. 221-226

Il découvre une difference infinie entre des objets, qui aux yeux des autres hommes paroissent les mêmes, et il fait si bien sentir cette difference dans son imitation, que le sujet le plus rebatu devient un sujet neuf sous sa plume ou sous son pinceau. […] On découvre derriere la croix des spectateurs qui la font avancer, et qui semblent tellement enfoncez dans le tableau, qu’à peine ose-t’on croire que toutes ces figures soient placées sur une même superficie.

51. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXVIII » pp. 305-318

Le besoin de vengeance pour la cour et pour lui-même, et de précaution contre des malveillances au moins incommodes, se montrent fort à découvert dans des scènes où paraissent les deux savants et surtout dans celle où Clitandre, homme de la cour, les traite avec le plus insultant mépris. […] Si on l’avait exercée à découvrir pourquoi ce poète, si heureux pour l’ordinaire dans le choix de ses sujets, qui marque toujours si clairement son but, qui y marche si franchement, a manqué ici de ces mérites, on aurait reconnu ce qu’il y avait d’embarrassant dans sa position en face de la société qu’il voulait attaquer pour plaire au roi, et qui, puissante dans l’opinion, gagnait tous les jouis dans l’esprit du roi lui-même. […] La Bruyère, dans la préface qui précède son discours de réception à l’Académie française, s’élève contre ces gens « qui, au lieu de prendre pour eux les divers traits semés dans un ouvrage, s’appliquent à découvrir lesquels et donnent au public de longues listes ou clefs des originaux auxquels ils ont jugé à propos de les appliquer.

52. (1896) Les origines du romantisme : étude critique sur la période révolutionnaire pp. 577-607

La critique moderne a révisé ce jugement porté dans la fièvre de la lutte ; elle a fouillé les archives et elle a découvert aux Romantiques des ancêtres authentiquement Gaulois et irréprochablement Moyen-Âge ; elle insinue même, l’audacieuse, des doutes sur la légitimité de la littérature classique ; elle la traite de variété accidentelle, particulière aux xviie et xviiie  siècles et dans les goûts et les idées de ces temps aristocratiques. […] Mais l’honneur d’avoir découvert le parti qu’on pouvait tirer de son père et de sa mère à la ville et au théâtre appartient à René Chateaubriand : cette trouvaille est d’autant plus méritoire que le régime nouveau détruisait l’antique majesté de la famille et inscrivait dans son code l’interdiction de la recherche de la paternité. […] La Fatalité, cette interprétation religieuse des phénomènes dont on ne sait découvrir les causes ; la Fatalité dont les Romantiques de 1830 usèrent et abusèrent si libéralement, était alors autre chose qu’un expédient littéraire, fraîchement retrouvé des Grecs : si Racine se servait des Romains et des Grecs pour déguiser les courtisans de Versailles, qui sont les personnages de ses tragédies, il ne recourait pas à la Fatalité pour expliquer leur actions. […] Les Rêveries sur la nature primitive de l’homme, de Senancour, publiées quelques années avant René, bien qu’imprégnées de mélancolie et surchargées de divagations métaphysiques, passèrent inaperçues, selon l’observation de Sainte-Beuve, qui ajoute que, « le monde de René était véritablement découvert par celui qui n’a pas eu l’honneur de le nommer ». Sainte-Beuve fait erreur, le monde de René était découvert avant Senancour et Chateaubriand, mais l’honneur de le marquer de son sceau revient à Chateaubriand ; il sut se servit de la langue, des images et des passions du jour, et personnifier ce monde sentimental et idéal que les contemporains portaient dans leur cœur et dans leur tête.

53. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XVII. De la littérature allemande » pp. 339-365

Mais je n’en connais point qui renferme une peinture plus frappante et plus vraie des égarements de l’enthousiasme, une vue plus perçante dans le malheur, dans cet abîme de la nature, où toutes les vérités se découvrent à l’œil qui sait les y chercher. […] Les Allemands écoutent encore avec plaisir les pensées les plus connues, quoique leur esprit en découvre chaque jour de nouvelles. […] La liberté donne des forces pour sa défense, le concours des intérêts fait découvrir toutes les ressources nécessaires, l’impulsion des siècles renverse tout ce qui veut lutter pour le passé contre l’avenir : mais l’action inhumaine sème la discorde, perpétue les combats, sépare en bandes ennemies la nation entière ; et ces fils du serpent de Cadmus, auxquels un dieu vengeur n’avait donné la vie qu’en les condamnant à se combattre jusqu’à la mort, ces fils du serpent, c’est le peuple, au milieu duquel l’injustice a longtemps régné. […] Un lithologiste allemand, discutant, dans un de ses écrits, sur une pierre qu’il n’avait pu jusqu’alors découvrir, s’exprime ainsi en parlant d’elle : Cette nymphe fugitive échappe à nos recherches  ; et s’exaltant ensuite sur les propriétés d’une autre pierre, il s’écrie en la nommant : Ah Sirène !

54. (1875) Premiers lundis. Tome III « Maurice de Guérin. Lettre d’un vieux ami de province »

Dans son Homère, l’idée du grand et du primitif se retrouve et se découvre même pour la première fois. Dans l’étude de la statuaire grecque, on en resta ainsi longtemps au pur gracieux, à l’art joli et léché des derniers âges : ce n’est que tard qu’on a découvert la majesté reculée des marbres d’Égine, les bas-reliefs de Phidias, la Vénus de Milo.

55. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une conspiration sous Abdul-Théo. Vaudeville turc en trois journées, mêlé d’orientales — Première journée (1865). Les soucis du pouvoir » pp. 215-224

vizir, as-tu découvert quelque chose ? […] Seigneur, je n’ai rien découvert, et votre peuple murmure toujours.

56. (1881) La psychologie anglaise contemporaine «  M. Georges Lewes — Chapitre I : L’histoire de la philosophie »

Cependant l’anatomie comparée a montré l’indépendance des organes des sens et du cerveau quoiqu’elle n’ait pas encore découvert les rapports qui les relient. […] D’abord il l’a proclamée une science d’observation ; il a découvert que nos sensations ne correspondent pas à des qualités externes, qu’elles ne sont que des modifications du sujet sentant ; découverte que Descartes a adoptée ou faite lui-même, dans ses Méditations ; enfin il a écrit sur l’association des idées un chapitre « magistral », mais « sans voir combien cette loi porte loin. » Locke est le fondateur de la psychologie moderne : il a compris la nécessité d’une critique, d’une détermination des limites de l’esprit humain. […] Analysez le concept de matière, et vous découvrirez qu’il n’est qu’une synthèse mentale de qualités. […] Analysez votre concept d’esprit, et vous découvrirez qu’il n’est qu’une synthèse de qualités (états de conscience) qui sont les activités de l’organisme. […] Ces explications naïves supposaient une sorte d’imagination autocrate, sans sentir aucunement le besoin de découvrir un mécanisme particulier pour la production des résultats.

57. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Édouard Rod »

Il a lu les romans de Tolstoï et de Dostoiewski, et cela lui a donné un coup  comme si ces Russes avaient découvert la charité et comme s’il n’en eût jamais entendu parler avant. […] Il découvre très vite qu’il est incapable de pratiquer pour de bon, et dans la rigueur réelle de ses obligations, la « religion de la souffrance humaine », et qu’il n’est, comme tant d’autres, qu’un brave homme assez pitoyable et pas méchant, mais non pas héroïque… Et il souffre de cette constatation. […] C’est que cette tristesse vaine, et pourtant sincère, je l’ai souvent sentie en moi, et que j’en rougis ; c’est que j’ai peur d’y découvrir un mélange affreux de vanité, d’égoïsme, de « gendelettrerie », de complaisance pour la beauté et la distinction de ma propre intelligence ; et que, de souffrir uniquement par la pensée (oh !

58. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XXI. Le littérateur chez les peintres » pp. 269-282

Le plus louable critique, en ce sens, demeurera Huysmans, qui, il y a douze et quinze ans, sonnait la gloire d’artistes qu’on croit trop, ici ou là, avoir découverts hier… Ces bons écrivains pratiquent la bonne méthode ; avec le minimum de préjugés, ou avec des préjugés qui me plaisent, ils disent le sentiment qui devant tel tableau les retint ; leur dire vaut par la délicatesse de leur tact, et la grâce de leurs racontars les plus philosophes intercalent quelques théories d’ensemble, intéressantes puisqu’ils sont intelligents. […] Ces délicats sont excusables d’être rebutés par les deux mille morceaux de peinture tombant à date fixe sur chaque salon, où les œuvres qu’ils préféreraient les attristent quand ils les découvrent dans leur lamentable entourage, à moins qu’ils ne parviennent pas à les découvrir parce qu’on les a juchées trop haut, ou, plus simplement, parce qu’on les a refusées.

59. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 7761-7767

La Poésie, la Peinture, la Sculpture, l’Architecture, la Musique, la Danse, les différentes sortes de jeux, enfin les ouvrages de la nature & de l’art, peuvent lui donner du plaisir : voyons pourquoi, comment & quand ils les lui donnent ; rendons raison de nos sentimens ; cela pourra contribuer à nous former le goût, qui n’est autre chose que l’avantage de découvrir avec finesse & avec promptitude la mesure du plaisir que chaque chose doit donner aux hommes. […] L’art vient à notre secours, & nous découvre la nature qui se cache elle-même ; nous aimons l’art & nous l’aimons mieux que la nature, c’est-à-dire la nature dérobée à nos yeux : mais quand nous trouvons de belles situations, quand notre vûe en liberté peut voir au loin des prés, des ruisseaux, des collines, & ces dispositions qui sont, pour ainsi dire créées exprès, elle est bien autrement enchantée que lorsqu’elle voit les jardins de le Nôtre, parce que la nature ne se copie pas, au lieu que l’art se ressemble toûjours. […] Ce qui fait ordinairement une grande pensée, c’est lorsque l’on dit une chose qui en fait voir un grand nombre d’autres, & qu’on nous fait découvrir tout-d’un-coup ce que nous ne pouvions espérer qu’après une grande lecture. […] Mais s’il faut de l’ordre dans les choses, il faut aussi de la variété : sans cela l’ame languit ; car les choses semblables lui paroissent les mêmes ; & si une partie d’un tableau qu’on nous découvre, ressembloit à une autre que nous aurions vue, cet objet seroit nouveau sans le paroitre, & ne seroit aucun plaisir ; & comme les beautés des ouvrages de l’art semblables à celles de la nature, ne consistent que dans les plaisirs qu’elles nous font, il faut les rendre propres le plus que l’on peut à varier ces plaisirs ; il faut faire voir à l’ame des choses qu’elle n’a pas vûes ; il faut que le sentiment qu’on lui donne soit different de celui qu’elle vient d’avoir. […] Lorsqu’une chose nous est montrée avec des circonstances ou des accessoires qui l’aggrandissent, cela nous paroit noble : cela se sent sur-tour dans les comparaisons où l’esprit doit toûjours gagner & jamais perdre ; car elles doivent toûjours ajoûter quelque chose, faire voir la chose plus grande, où s’il ne s’agit pas de grandeur, plus fine & plus délicate : mais il faut bien se donner de garde de montrer à l’ame un rapport dans le bas, car elle se le seroit caché si elle l’avoit découvert.

60. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre premier. Que personne à l’avance ne redoute assez le malheur. »

La douleur est fixe, et rien ne peut la déplacer qu’un événement, ou le courage ; alors que le malheur se prolonge, il a quelque chose d’aride, de décourageant, qui lasse de soi-même, autant qu’il importune les autres ; on se sent poursuivi par le sentiment de l’existence, comme par un dard empoisonné ; on voudrait respirer un jour, une heure, pour reprendre des forces, pour recommencer la lutte au-dedans de soi, et c’est sous le poids qu’il faut se relever, c’est accablé qu’il faut combattre, on ne découvre pas un point sur lequel on puisse s’appuyer pour vaincre le reste. L’imagination a tout envahi, la douleur est au terme de toutes les réflexions, et il en arrive subitement de nouvelles qui découvrent de nouvelles douleurs.

61. (1908) Promenades philosophiques. Deuxième série

C’est alors que son intelligence lui fit découvrir le feu. […] Dire que l’homme a découvert le feu par hasard, c’est ne rien dire. […] En somme, il semble qu’à travers les siècles l’homme se découvre lui-même en même temps qu’il découvre la nature. […] Léonard de Vinci a découvert le mécanisme de la combustion. […] Un jour, tout petit encore, il découvre dans le jardin un oiseau mort.

62. (1925) Feux tournants. Nouveaux portraits contemporains

A-t-il découvert quelque conteur pour se distraire d’une existence monotone, que l’on vient le battre sur sa lecture. […] C’est d’un de ses balcons que, débarquant de la gare de l’Est, enfant, j’ai découvert le monde. […] Sous Alain, qu’il est facile à chaque instant de découvrir Philippe ! […] Simon découvre en même temps qu’il est sensuel, mais qu’il est surtout délicat. […] Elle commence par Paris qu’elle découvre en un mois, puis prend le bateau à Saint-Nazaire.

63. (1911) Études pp. 9-261

Nous découvrons ici l’erreur où l’engage son abstraction. […] C’est donc quelque chose de donné, de tout présent : rien à atteindre, rien qui demande à être découvert. […] Avec cette âme il découvre soudain la vie. […] L’immoraliste, comme il a découvert sa vie, découvre celle des autres314. […] De Nietzsche à la longue je me suis détourné, pour avoir découvert trop exclusive et monotone sa préoccupation.

64. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre III. Trois ouvriers du classicisme »

Et le même Chapelain, dans ses lettres intimes qui nous découvrent sa véritable pensée, se montre essentiellement classique par toutes les préférences et par la direction générale de son esprit. […] Et il manque aussi trop absolument du sens de l’art : cet élément essentiel des œuvres antiques, la beauté, il ne le découvre pas ; ces règles dont il fait tant de bruit, sont un mécanisme plutôt qu’une esthétique. […] Mais il y a pourtant grande différence entre les résolutions qui procèdent de quelque fausse opinion et celles qui ne sont appuyées que sur la connaissance de la vérité : d’autant que, si on suit ces dernières, on est assuré de n’en avoir jamais de regret ni de repentir, au lieu qu’on en a toujours d’avoir suivi les premières lorsqu’on en découvre l’erreur295. » En un mot, « la volonté est tellement libre qu’elle ne peut jamais être contrainte… ; et ceux même qui ont les plus faibles âmes pourraient acquérir un empire très absolu sur leurs passions, si l’on employait assez d’industrie à les dresser et à les conduire ». […] Remarquant donc que seuls les mathématiciens ont su découvrir quelques démonstrations, c’est-à-dire « quelques raisons certaines et évidentes », il extrait de leur méthode quelques règles absolues et générales, qui lui servent à vérifier tous ses jugements.

65. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « J.-J. Weiss  »

S’il est obligé de répéter après d’autres des vérités connues, il semble qu’il les découvre, tant il sait les rajeunir par la vivacité de l’impression, par le style, par l’accent. […] Et qu’on ne dise point que le procédé est facile ; car ces aspects nouveaux, c’est bien lui qui les découvre ; nous n’y aurions jamais songé sans lui ; et c’est chose si rare et si précieuse que d’avoir dans la critique littéraire, où la tradition est encore si puissante, des impressions et des vues vraiment personnelles ! […] Il découvre dans Polyeucte « tous les types et tous les phénomènes qui ont dû se produire durant les deux premiers siècles au cours de la révolution chrétienne ». […] Et l’on découvre aussi parfois, dans son esprit si lucide, une ombre de songerie germanique.

66. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Introduction »

Oui, voilà ce que je découvris dans cet objet à peine aussi gros qu’un gros fruit, et que le bourreau peut faire tomber d’un seul coup, de manière à plonger du même coup dans la nuit le monde qui y est renfermé. » La genèse des idées dans ce monde intérieur ne donne pas lieu, de nos jours, à moins de discussions que la genèse des espèces dans le monde extérieur ; la loi qui régit l’une semble aussi régir l’autre. […] En face de cette doctrine, l’idéalisme représente le sujet pensant comme le principe même des lois universelles et des relations nécessaires que l’on croit découvrir dans les objets extérieurs : c’est la forme du miroir qui explique celle de l’image, et par cela même de l’objet représenté.

67. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre II. Des Époux. — Ulysse et Pénélope. »

Les transports qui suivent la reconnaissance des deux époux ; cette comparaison si touchante d’une veuve qui retrouve son époux, à un matelot qui découvre la terre au moment du naufrage ; le couple conduit au flambeau dans son appartement ; les plaisirs de l’amour, suivis des joies de la douleur ou de la confidence des peines passées ; la double volupté du bonheur présent, et du malheur en souvenir ; le sommeil qui vient par degrés fermer les yeux et la bouche d’Ulysse, tandis qu’il raconte ses aventures à Pénélope attentive, ce sont autant de traits du grand maître ; on ne les saurait trop admirer. Il y aurait une étude intéressante à faire : ce serait de tâcher de découvrir comment un auteur moderne aurait rendu tel morceau des ouvrages d’un auteur ancien.

68. (1925) La fin de l’art

On a découvert dans les provinces les moins connues toutes sortes de merveilles de pierre. […] Ce livre, qui m’avait amusé quand je le découvris, a bien vieilli, mais beaucoup moins que tant d’autres de la même époque et du même genre. […] Ce n’est que tout récemment que l’on découvrit qu’il pouvait y avoir une relation entre ce régime trop bénin et l’extension de ce mal. […] Il y a les paysages du Berry et les paysages de Provence, ceux du Dauphiné, de la Champagne ou du Limousin, récemment découverts. […] Étant le dernier découvert, il est certainement le moins gâté.

69. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « VI »

Sans vocation, pas d’écrivain possible, cela va de soi, et c’est dans ce sens qu’on peut dire « qu’on ne se donne pas son style », Mais cette disposition obscure, ce don qu’on ne s’était pas découvert, nous disons, nous : c’est la volonté qui les dégage, c’est le travail qui les précise, c’est l’effort qui les développe. […] Il ne s’agit pas de dire : « Taine a écrit en coloriste parce qu’un beau jour il s’est reconnu coloriste. » Non, Taine a voulu peindre ; il a voulu colorer, et il a essayé, il a travaillé, il a lu, il s’est assimilé les auteurs, et c’est ainsi qu’il s’est découvert un talent qu’il n’aurait peut-être pas soupçonné sans cela.‌

70. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre I : Une doctrine littéraire »

J’accorde qu’il ne faut pas, en littérature ni en philosophie, sacrifier les vérités acquises aux vérités à découvrir : là est la part de la tradition ; toutefois, il ne faut pas tarir la source des vérités nouvelles, car là est l’origine de la tradition future. […] Christophe Colomb croyait avoir découvert les côtes de l’Asie : il a, sans le savoir, découvert l’Amérique ; est-ce un utopiste ?

71. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VIII »

Mais dans cette scène, elle va en diminuant ; et dans le dernier duo avant l’entrée du roi Marke, ce n’est guère que l’analogie et la décroissance graduelle qui nous permet d’en découvrir encore. […] Il est donc naturel que l’homme de notre époque ait ressenti le besoin insatiable, désespérant, de découvrir une « nouvelle révélation du monde » (VII, 270), ce qui, au fond, est la même chose que de découvrir un nouveau mode d’exprimer sa propre âme. […] Et surtout elle nous apparaît comme l’œuvre initiale dans un nouveau domaine de l’art ; elle nous découvre tout un monde de possibilités d’expression. […] Pendant longtemps nous aurons le privilège de ne lui découvrir que de nouvelles beautés. […] Wagner (1879) écrit ceci : « Aux sages se découvrit le secret du monde, qui consiste en un pénible mouvement de déchirement. » La Douleur est donc la base de l’existence humaine d’après ces deux philosophes.

72. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Préface pour les Maximes de La Rochefoucauld, (Édition elzévirienne de P. Jannet) 1853. » pp. 404-421

Le mouvement de l’amour-propre nous est si naturel, que le plus souvent nous ne le sentons pas, et que nous croyons agir par d’autres principes. » La Rochefoucauld, de même, a dit avec plus de grandeur : « L’orgueil, comme lassé de ses artifices et de ses différentes métamorphoses, après avoir joué tout seul tous les personnages de la comédie humaine, se montre avec un visage naturel, et se découvre par sa fierté ; de sorte qu’à proprement parler, la fierté est l’éclat et la déclaration de l’orgueil. » Un des hommes qui ont le mieux connu les hommes et qui ont su le mieux démêler leur fibre secrète pour les gouverner, Napoléon, a fait un jour de La Rochefoucauld un vif et effrayant commentaire. […] M. de La Rochefoucauld, parlant ou écrivant des choses de la vie, se souvenant des choses du cœur et de ce monde des femmes qu’il connaissait si bien, n’aurait jamais fait, comme Ménage éloquent ou comme le philosophe amoureux ; il ne se serait point écrié tout d’abord avec emphase : « Nous sommes parvenu à découvrir toute une littérature féminine, aux trois quarts inconnue, qui ne nous semble pas indigne d’avoir une place à côté de la littérature virile en possession de l’admiration universelle. » Sans compter qu’il n’est pas honnête de prétendre avoir découvert ce que beaucoup d’autres savaient et disaient déjà, cela n’est pas de bon goût d’emboucher ainsi la trompette à tout moment et de proclamer sa propre gloire en si tendre sujet. […] Cousin s’écria pour la première fois qu’il venait de découvrir la littérature des femmes au xviie  siècle (15 janvier 1844), un critique qui ne pensait alors qu’à se rendre compte à lui-même de son impression particulière écrivit la note suivante : L’article de M. 

73. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le surintendant Fouquet. (Article Fouquet, dans l’Histoire de Colbert, par M. P. Clément.) 1846. » pp. 294-312

L’abondance paraissait en même temps chez les gens d’affaires, qui d’un côté couvraient toutes leurs malversations par toute sorte d’artifice, et les découvraient de l’autre par un luxe insolent et audacieux, comme s’ils eussent appréhendé de me les laisser ignorer. […] On ne marche pas ainsi la tête levée et à front découvert, quand on se sent, si peu que ce soit, coupable. […] La Fontaine devait bien ce soupir de cœur à Fouquet : c’était celui-ci qui avait en quelque sorte découvert le poète. […] Son malheur prolongé, en réveillant la pitié publique, et en mettant à découvert ses amis fidèles, a fait sa gloire ; on n’inspire jamais de tels dévouements parmi l’élite des esprits, sans avoir, plus ou moins, de quoi les mériter53.

74. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre V. Le génie et la folie »

Moreau (de Tours) lui-même déclare qu’il est impossible de découvrir par les sens la propriété physique dont l’intelligence peut dépendre. […] Par conséquent, le génie tient à un certain état pathologique du système nerveux analogue à celui qui se découvre dans les casque nous citons. […] C’est ce qu’il me paraît absolument impossible de découvrir, c’est du moins ce qui demanderait des observations si longues et si délicates, que je ne crois pas que la science puisse encore rien avancer de sérieux sur un pareil sujet. […] Ainsi les alchimistes du moyen âge ne découvraient pas la pierre philosophale qu’ils cherchaient ; mais dans les combinaisons fortuites de leur art se rencontraient des substances utiles qui entraient dans le commerce, et rendaient plus de services utiles à la société que n’eût fait le succès de leur téméraire espérance.

75. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IX : M. Jouffroy écrivain »

Dès l’abord, on découvrait en lui un foyer secret d’ardeur inextinguible, plus violente et plus puissante que l’éblouissante illumination de M.  […] Bien plus, apercevant les choses par des vues générales, il découvre en l’homme cent mille misères que le vulgaire n’aperçoit pas : l’immensité de notre ignorance, l’incertitude de notre science, la brièveté de notre vie, la lenteur de notre progrès, l’impuissance de notre force, le ridicule de nos passions, l’hypocrisie de notre vertu, les injustices de notre société, les douleurs sans nombre de notre histoire. […] Qui le découvre à travers ces expressions si générales, tirées péniblement des faits par tant d’intermédiaires ? […] — Ces fautes découvrent une dernière habitude de son esprit, et achèvent son portrait.

76. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Discours préliminaire » pp. 25-70

Les écrivains distingués, en se livrant seulement à l’impulsion de leur talent, découvriraient ce qu’il y a de plus héroïque dans le dévouement, de plus touchant dans les sacrifices. […] Ce qu’il découvre aujourd’hui sera dans peu généralement connu, parce que les vérités importantes une fois découvertes, frappent tout le monde presque également. […] Quelles belles formes d’indignation la haine du crime n’a-t-elle pas fait découvrir à l’éloquence ? […] Cependant la poésie n’admet ni l’analyse, ni l’examen qui sert à découvrir et à propager les idées philosophiques. […] Le voyageur que la tempête a fait échouer sur des plages inhabitées, grave sur le roc le nom des aliments qu’il a découverts, indique où sont les ressources qu’il a employées contre la mort, afin d’être utile un jour à ceux qui subiraient la même destinée.

77. (1855) Préface des Chants modernes pp. 1-39

On découvre la vapeur, nous chantons Vénus, fille de l’onde amère ; on découvre l’électricité, nous chantons Bacchus, ami de la grappe vermeille. […] Quoi, nous sommes le siècle où l’on a découvert des planètes et des mondes, où l’on a trouvé les applications de la vapeur, l’électricité, le gaz, le chloroforme, l’hélice, la photographie, la galvanoplastie, et que sais-je encore ? […] La vraie gloire d’Arago sera peut-être moins d’avoir découvert tant de belles choses que d’avoir éclairé et vulgarisé les questions les plus ardues ; ce sera là du moins sa gloire populaire, et c’est la meilleure de toutes et la seule enviable. […] Francœur dit quelque part : « J’ai calculé le poids du soleil, et j’ai découvert que pour le mettre seulement en mouvement, il fallait dix milliards d’attelages, attelés, chacun, de dix milliards de chevaux. […] Aujourd’hui, il n’en est plus ainsi ; la littérature a soutenu assez de luttes, rendu assez de services, découvert assez de soleils pour mériter, exiger et obtenir son droit de cité.

78. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « [Note de l’auteur] » pp. 422-425

 Les autres, au contraire, trouvent ce traité fort utile, parce qu’il découvre aux hommes les fausses idées qu’ils ont d’eux-mêmes, et leur fait voir que, sans la religion, ils sont incapables de faire aucun bien ; qu’il est toujours bon de se connaître tel qu’on est, quand même il n’y aurait que cet avantage de n’être point trompé dans la connaissance qu’on peut avoir de soi-même. […] Plus rien de ce second paragraphe : « Les uns croient que c’est outrager les hommes, etc. » Après la fin du premier, où il est question des jugements bien différents qu’on a faits du livre, on saute tout de suite au troisième, en ces termes : « L’on peut dire néanmoins que ce traité est fort utile, parce qu’il découvre, etc., etc. » Les autres petits changements ne sont que de style.

79. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Un grand voyageur de commerce »

Il a, non le premier, mais après très peu d’autres, découvert un grand morceau du mystérieux continent noir. […] Stanley découvre que la forêt est l’image de la société, en ce que, chez les arbres comme chez les hommes, les plus forts tuent les plus faibles.

80. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « M. DE LA ROCHEFOUCAULD » pp. 288-321

Ces pensées, qui aux jours de la jeunesse révoltaient comme trop fausses ou ennuyaient comme trop vraies, et dans lesquelles on ne voyait que la morale des livres, nous apparaissent pour la première fois dans toute la fraîcheur de la nouveauté et le montant de la vie ; elles ont aussi leur printemps à elles ; on les découvre : Que c’est vrai ! […] Avant le nouveau texte des Mémoires, découvert en 1817, et qui donne sur cette période première une foule de particularités retranchées par l’auteur dans la version jusqu’alors connue, on ne se pouvait douter du degré de chevalerie et de romanesque auquel se porta tout d’abord le jeune prince de Marsillac. […] Plus rien de ce second paragraphe : « Les uns croient que c’est outrager les hommes, etc. » Après la fin du premier, où il est question des jugements bien différents qu’on a faits du livre, on saute tout de suite au troisième, en ces termes : « L’on peut dire néanmoins que ce traité est fort utile, parce qu’il découvre, etc., etc. » Les autres petits changements ne sont que de style. […] Une chose des plus faites pour étonner, c’est lorsque, venant à retrancher tout ce qui n’est que bonne éducation, bonnes intentions, bonnes manières, jugements appris, on découvre un matin combien de gens au fond sont bêtes. […] La rudesse venant, tout se découvre.

81. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, par M. Camille Rousset, professeur d’histoire au lycée Bonaparte. »

Mais, dira-t-on, après tout ce qu’on a écrit et imprimé déjà, qu’y a-t-il donc tant à découvrir sur le règne de Louis XIV ? Ce qu’il y avait à découvrir, l’auteur du présent livre nous l’apprend dans les premières pages. […] De plus il a sous lui toute une élite d’hommes secondaires que cette histoire nous découvre et qui prennent figure et vie à nos yeux : — en première ligne, Martinet, lieutenant-colonel du régiment du Roi, mort maréchal de camp, officier modèle, dont le nom devient proverbial dans l’armée, et qui est l’instrument de la réforme, le parfait instructeur, le praticien de la discipline nouvelle dans l’infanterie ; — après lui, le chevalier de Fourilles, qui rend des services pareils, et qui est un autre Martinet pour la cavalerie ; — des intendants comme Chaniel, agent zélé, ferme, intelligent, dont les plus grands généraux redoutent les écritures, qui ne paraît pas en avoir abusé toutefois, et que Louvois, fidèle au principe de la séparation des pouvoirs, soutient sans broncher dans ses contestations avec les maréchaux victorieux, après la conquête. […] Quant à moi, qui ne suis pas moins accusé qu’eux, et qui, peut-être, suis encore plus coupable, je vous supplie et vous conjure, Monseigneur, si vous avez quelque bonté pour moi, d’écouter tout ce que l’on vous dira contre, et d’approfondir, afin d’en découvrir la vérité ; et si je suis trouvé coupable, comme j’ai l’honneur de vous approcher de plus près que les autres, et que vous m’honorez d’une confidence plus particulière, j’en mérite une bien plus sévère punition.

82. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Les frères Le Nain, peintres sous Louis XIII, par M. Champfleury »

Monmerqué, le Sévigniste, d’aimable et souriante mémoire, n’était pas plus à l’affût de la moindre relique de sa Notre-Dame de Livry ; — le docteur Payen, ce modèle des admirateurs fidèles, n’est pas plus à la piste d’une lettre ou d’une signature authentique de Montaigne ; — notre ami Eudore Soulié n’est pas plus sagace à découvrir et à déterrer sous des liasses poudreuses la moindre trace biographique du grand Molière ; — MM.  […] Champfleury d’ailleurs, dans cette sorte de vie conjecturale des Le Nain, qu’il tire par induction de l’étude et de la comparaison prolongée de leurs œuvres, a de la chaleur, de la verve, et un accent de sympathie qui sort du cœur ; on sent que c’est bien pour ses maîtres d’adoption et presque pour ses saints qu’il prêche : « Qu’ils soient trois ou quatre frères, dit-il, les archivistes le découvriront peut-être un jour16. […] Quand Gardilanne est parvenu à découvrir et à posséder le fameux violon de faïence qu’il avait flairé chez un marchand de vieilleries et qu’il emporte à la barbe de Dalègre, la douleur de celui-ci, son envie surexcitée, son impossibilité de vivre heureux sans le violon unique, achèvent cette description d’un cas de pathologie morale. […] Il paraît que les archivistes l’ont découvert en effet ; on a retrouvé un acte notarié qui constate l’existence d’un quatrième frère dont on ne sait rien de plus.

83. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre IV. Des figures : métaphores, métonymies, périphrases »

L’homme a distingué d’abord et nommé ce qui le touchait de plus près : quand le cercle de ses idées et de ses connaissances s’est élargi, il n’a point créé les mots à profusion ; il a appliqué autant qu’il a pu ceux qu’il possédait déjà aux objets nouveaux qu’il découvrait, et n’a enrichi sa langue que par la multiplication des métaphores. […] Le roitelet, la bergeronnette, le bouvreuil, ne sont pas pour nous un petit roi, une petite bergère, un petit bouvier : nous ne songeons guère à ces gentilles et poétiques images ; et ces mots valent pour nous autant que chat ou cheval, où l’étymologie ne découvre pas de figure. Pareillement nous ne croyons pas prendre dans la trappe celui que nous attrapons, ni attirer avec le leurre celui que nous leurrons ; les gens délurés, hagards, niais, ne représentent guère des faucons à notre imagination, et quand nous dessillons les yeux de quelqu’un, nous ne nous figurons point être un fauconnier qui découvre les paupières de l’animal enfin dompté. […] Toutes les périphrases ne sont pas des rébus, qui ne donnent qu’un mot à découvrir.

84. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Les Confessions de J.-J. Rousseau. (Bibliothèque Charpentier.) » pp. 78-97

Rousseau parut : le jour où il se découvrit tout entier à lui-même, il révéla du même coup à son siècle l’écrivain le plus fait pour exprimer avec nouveauté, avec vigueur, avec une logique mêlée de flamme, les idées confuses qui s’agitaient et qui voulaient naître. […] En la peignant, le style de Rousseau s’adoucit et s’amollit avec grâce, et en même temps on découvre aussitôt un trait, une veine essentielle qui est en lui et dans toute sa manière, je veux dire la sensualité. […] Quand il revoit Mme de Warens, à son retour de Turin, il est logé quelque temps chez elle, et de la chambre qu’on lui donne il voit des jardins et découvre la campagne : « C’était depuis Bossey (lieu où il avait été mis en pension dans son enfance), c’était la première fois, dit-il, que j’avais du vert devant mes fenêtres. » Il avait été bien indifférent jusque-là à la littérature française d’avoir ou de n’avoir pas du vert sous les yeux ; c’était à Rousseau qu’il appartenait de l’en faire apercevoir. […] Ce jour-là il découvrait la rêverie, ce charme nouveau qu’on avait laissé comme une singularité à La Fontaine, et qu’il allait, lui, introduire décidément dans une littérature jusque-là galante ou positive.

85. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, Les Chants du crépuscule (1835) »

Je sais bien qu’après tout la manière dont les fruits naissent en poésie ne fait rien à l’affaire ;l’essentiel est ce qu’ils sont et ce qu’ils paraissent au goût : mais le mal serait que le goût y découvrît quelque chose du procédé factice, artificiel, qu’un redoublement d’art eût peut-être recouvert, fondu, dissimulé. […] Mais, dans toutes ces pièces récentes, louables de pensée, grandioses de forme, sur le bal de l’Hôtel de Ville, sur le gala du budget ; dans ces prières à Dieu sur les révolutions qui recommencent ; dans ces conseils à la royauté d’être aumônière comme au temps de saint Louis ; dans ce mélange, souvent entre-choqué, de réminiscences monarchiques, de phraséologie chrétienne et de vœux saint-simoniens, il n’est pas malaisé de découvrir, à travers l’éclatant vernis qui les colore, quelque chose d’artificiel, de voulu, d’acquis : toute cette portion des Chants du Crépuscule me fait l’effet d’une tenture magnifique dressée tout exprès pour une scène. […] Mainte pièce du recueil décèle chez lui des sources de tendresse élégiaque plus abondantes et plus vives qu’il n’en avait découvert jusqu’ici, quoique, même en cela, le grave et le sombre dominent.

86. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le comte Gaston de Raousset-Boulbon »

L’histoire n’eût pas écrit le mot sublime : « Ce qui fait de Colomb un grand homme, ce n’est pas d’avoir découvert l’Amérique, c’est d’être parti la chercher !  […] Cette idée, qui est celle de tous ceux qui ont aspiré à la plus grande gloire qu’il y ait parmi les hommes, depuis Fernand Cortès jusqu’à Raousset, depuis Christophe Colomb jusqu’à Lapérouse, — car découvrir des mondes, c’est toujours les prendre à quelqu’un, — cette idée que Raousset manqua, mais qui lui eût donné taille d’histoire s’il l’avait réussie, ne lui vint point comme ces bouffées d’ambition qui passent dans la tête des aventuriers et y portent parfois l’éclair… Le comte Gaston est un singulier mélange de justesse d’esprit et d’audace, d’imagination et de bon sens, de positivisme et de grandiose. […] Mais la Madelène, qui est de son temps, et de plus écrivain, n’a pu s’empêcher de découvrir ce petit côté de poésie et de phrase que le xixe  siècle aime à choyer dans les plus mâles et les plus réels d’entre nous.

87. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Les snobs » pp. 95-102

Une autre espèce de snob, c’est le marquis de la Critique de l’École des Femmes : snob d’Aristote, qu’il a découvert dans l’abbé d’Aubignac, et des trois unités : car les trois unités d’Aristote, qui ne sont pas dans Aristote, furent une nouveauté, une mode, « le dernier cri », avant d’être une vieillerie ; et le marquis les défend dans le même sentiment et avec la même compétence que les conspuera tel naïf gilet rouge de 1830. […] On découvre que quelques-unes de nos plus grandes admirations nous ont été imposées ; que ce qui nous fait le plus de plaisir ou le plus de bien, ce ne sont pas toujours les œuvres reconnues et consacrées, mais tel livre moins célèbre, qui nous parle de plus près et pénètre en nous plus avant… Or, si chacun faisait ainsi, quel désordre !

88. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre second. Philosophie. — Chapitre II. Chimie et Histoire naturelle. »

C’est cette impuissance de créer qui découvre le côté faible et le néant de l’homme. […]découvrira-t-elle la vérité ?

89. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XVI »

Cela signifie, en propres termes, qu’on trouve d’abord des images quand on a du talent ou du génie, ce qui est, je crois, faire la part assez belle à la spontanéité et à l’inspiration. « On les découvre, déclarons-nous ensuite, par inspiration ou à tête reposée », autrement dit par l’effort, la réflexion et le travail ajoutés au talent naturel. […] Ceci posé, mon livre s’adressant aux débutants et aux élèves, c’est-à-dire à ceux qui commencent à exercer leur faculté d’invention, j’ai prévenu, en effets ces apprentis écrivains « qu’il y avait des images qu’on peut découvrir plus facilement que d’autres, par l’application de l’esprit et l’effort du travail », à condition toujours d’avoir « du talent et des dispositions imaginatives ».

90. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « M. Ampère »

Sa qualité dominante, en apparence moins spéciale, parce qu’elle appartient plus ou moins à tous les hommes et surtout à un certain âge de la vie où le besoin d’apprendre et de découvrir nous possède, lui est propre par le degré d’intensité, de sagacité, d’étendue. […] Mais il finit par découvrir que les connaissances du bon M.  […] Quant au grand Haller, il est nécessaire de lire le journal de sa vie pour découvrir sa lutte perpétuelle et ses combats sous cette apparence calme qu’on lui connaissait : il s’est presque autant tourmenté que Pascal. […] Ampère, toute la richesse de la pensée et de l’organisation est laissée, pour ainsi dire, plus à la merci des choses, et le bouillonnement intérieur reste à découvert. […] voilà bien à découvert ta pure source sacrée, bouillonnante ! 

91. (1856) Cours familier de littérature. I « IVe entretien. [Philosophie et littérature de l’Inde primitive (suite)]. I » pp. 241-320

Mais, avant de vous donner quelques fragments de ces immenses poèmes épiques de l’Inde primitive récemment découverts, un mot sur ce qu’on entend par la poésie. […] Les Portugais et les Vénitiens furent les Christophes Colombs qui découvrirent à l’Europe ce nouveau monde. […] Elle récapitule les signes extérieurs, attributs des divinités, et ne peut les découvrir. […] Elle est enfin rendue à la tendresse du roi son père ; elle envoie de tous côtés des Brahmanes messagers, pour découvrir le sort et le séjour de son époux. […] Elle lui avoue que cette faute apparente n’était que la ruse de son amour pour le forcer par la jalousie à se découvrir.

92. (1879) L’esthétique naturaliste. Article de la Revue des deux mondes pp. 415-432

À vrai dire, c’est ce qu’il n’est pas toujours bien aisé de découvrir. […] Zola n’ait, après beaucoup d’autres, découvert l’Amérique. […] Il n’est sage à aucun d’eux de prétendre qu’il embrasse la réalité tout entière et que rien n’existe hormis ce qui l’attire et ce qu’il découvre. […] Sa fille, innocente, est condamnée à mort, et si, dans une conversation suprême, elle découvre que son père est l’assassin de sa sœur et l’auteur de sa propre mort, ce n’est pas elle qui le dénoncera. […] Il ne faut pas en effet un bien grand effort ni même un travail bien long pour découvrir quelque chose d’inédit sinon de nouveau dans les rayons de la grande ruche ouvrière parisienne, et se figurer que l’on enrichit son siècle de précieux « documents humains ».

93. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de lord Chesterfield à son fils. Édition revue par M. Amédée Renée. (1842.) » pp. 226-246

Dans ces divers traités de savoir-vivre et de politesse, si on les rouvre dans les âges suivants, on découvre à première vue des parties qui sont aussi passées que les modes et les coupes d’habit de nos pères ; le patron évidemment a changé. […] Il n’avait pas été long à sentir ce qui manquait à cet enfant qu’il voulait former, et dont il avait fait l’occupation et le but de sa vie : En scrutant à fond votre personne, lui disait-il, je n’ai, Dieu merci, découvert jusqu’ici aucun vice du cœur ni aucune faiblesse de la tête ; mais j’ai découvert de la paresse, de l’inattention et de l’indifférence, défauts qui ne sont pardonnables que dans les personnes âgées, qui, sur le déclin de leur vie, quand la santé et la vivacité tombent, ont une espèce de droit à cette sorte de tranquillité. […] Si vous voulez gagner en particulier les bonnes grâces et l’affection de certaines gens, hommes ou femmes, tâchez de découvrir leur mérite le plus saillant, s’ils en ont, et leur faiblesse dominante, car chacun a la sienne ; puis rendez justice à l’un, et un peu plus que justice à l’autre.

94. (1927) André Gide pp. 8-126

On découvre que l’enfant infirme est le fils naturel de noble et puissante demoiselle Isabelle de Saint-Audéol, petite-fille ou petite-nièce des bons vieux. […] Nous ne sommes point étonnés de découvrir que la Madone, sa victime, apparaît nuitamment à M.  […] Le premier a découvert la seconde en visitant, selon le devoir de son ministère, une vieille pauvresse, parente de l’infirme, et qui l’avait recueillie. […] On en découvrirait même par hasard un ou deux qui appartiennent à la catégorie des bibliophiles spéculateurs) et qui réalisent au moment qu’ils jugent favorable : car on joue aujourd’hui sur les livres comme sur la Royal Dutch ou le Rio-Tinto. […] Bernard Profitendieu, à la veille de son baccalauréat, quitte la maison paternelle, parce qu’il a découvert, en volant dans un tiroir des lettres adressées à sa mère, qu’il n’est pas vraiment le fils de M. 

95. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Préface »

En tout cas, je concluais que, si jamais nous découvrons celle qu’il nous faut, ce ne sera point par les procédés en vogue. En effet, il s’agit de la découvrir, si elle existe, et non de la mettre aux voix.

96. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Laurent Tailhade à l’hôpital » pp. 168-177

Pour François Coppée, il ne faut pas oublier qu’il a découvert Albert Samain et Pierre Louÿs. […] Les amoureux savent trouver les jolies femmes même lorsqu’elles se cachent ; les fervents d’art savent découvrir les bons poètes, si verrouillés et si triplement cadenassés soient-ils, au fond des boîtes des quais, par l’indifférence ou l’hostilité de leurs contemporains.

97. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « L’état de la société parisienne à l’époque du symbolisme » pp. 117-124

C’est à les glaner au hasard que nous pouvons prendre mesure de la société du temps et découvrir en quoi consistait, aux yeux de l’élite, la vertu du « surhomme » en l’an de grâce 1897. […] La fine fleur de la société, en quête de distractions distinguées, imite les grands ducs en tournée, découvre les tsiganes, les lutteurs de chez Marseille, la Goulue, le Pétomane et se donne patience, en accréditant le Moulin Rouge et la foire de Neuilly, d’attendre la Foire des foires, en construction, l’exposition universelle de 1900 qui sera surtout prétexte à villages nègres et à danses du ventre.

98. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XVIII » pp. 198-205

On est ravi de découvrir ce qu’il y peut avoir à redire ; et, pour tomber dans l’exemple, il y avait l’autre jours des femmes à cette comédie, vis-à-vis de la loge où nous étions, qui, par les mines qu’elles affectèrent durant toute la pièce, leurs détournements de tête, et leurs cachements de visage, firent dire de tous côtés cent sottises de leur conduite, que l’on n’aurait pas dites sans cela ; et quelqu’un même des laquais cria tout haut, qu’elles étaient plus chastes des oreilles que de tout le reste du corps 59. » L’autorité que je reconnais à Molière ne m’empêchera pas de dire qu’il y a peu de bonne foi à reprocher aux critiques d’avoir donné un sens criminel aux plus innocentes paroles et de s’offenser de l’ombre des choses. […] Dire que la chasteté du langage ne doit pas aller au-delà de celle des mœurs, quelque corrompues qu’elles soient, c’est prétendre que la société de mœurs honnêtes est condamnée à entendre et à parler un langage qui respire le mépris de l’honnêteté et de la morale ; c’est avancer que le langage peut mettre à découvert des mœurs que la morale oblige à cacher ; c’est aussi établir en principe que des esprits délicats et polis n’ont pas le droit d’exclure de leur langage des expressions grossières et brutales, et j’observe ici que si la décence est une loi de la morale, c’est aussi une loi du goût.

99. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 312-324

comparables à ces clartés sinistres, qui ne brillent que dans la tempête, ne frappent la vue que pour découvrir des spectres, des abîmes, & un horizon chargé, de tous côtés, de nouveaux orages prêts à éclater. […] Autrefois l’ignorance, la grossiéreté, en étoient, il est vrai, les sources ordinaires ; mais alors se montrant plus à découvert, ils étoient moins dangereux.

100. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 1, du génie en general » pp. 1-13

Aussi découvre-t-il d’un coup-d’oeil le mauvais mouvement que fait son ennemi, et que des officiers plus vieux que lui regarderont long-temps, avant que d’en appercevoir le motif ou le défaut. […] La crainte de la mort intimide ceux qui ne s’animent point à la vûë de l’ennemi, et ceux qui s’animent trop, perdent cette présence d’esprit, si nécessaire pour voir distinctement ce qui se passe, et pour découvrir ce qu’il conviendroit de faire.

101. (1874) Premiers lundis. Tome II « Jouffroy. Cours de philosophie moderne — II »

Un individu humain quelconque, bien organisé toutefois, pris au hasard dam l’époque présente ou dans toute autre époque, et se traitant lui-même par la méthode expérimentale intérieure, découvrira, autant qu’il est donné à l’homme de le faire, sa destinée propre, et la destinée des autres hommes ses semblables, et la destinée de l’espèce tout entière ; il saura déterminer, autant que cela nous est possible, la loi du passé et de l’avenir de l’humanité. […] Si nous devons enfin sortir de ce point de vue pour nous élever à une conception plus compréhensive, la psychologie est impuissante pour le savoir et pour nous le dire ; car elle suppose l’égalité essentielle des moi contemporains ; car elle opère sur un moi quelconque actuel ; et ce n’est jamais dans un moi quelconque que se découvre l’idée d’un progrès futur de l’humanité. […] Vous la supposez dès l’abord à votre insu, et vous serez ensuite tout heureux de la découvrir ; mais prenez-y garde, et ne croyez pas avoir saisi la clef des choses, car c’est vous qui l’y aurez mise.

102. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre II. De l’ambition. »

Dans les situations communes de la vie, on se fait illusion sur son propre mérite ; mais un sentiment actif fait découvrir à l’ambitieux la mesure de ses moyens, et sa passion l’éclaire sur lui-même, non comme la raison qui détache, mais comme le désir qui s’inquiète ; alors, il n’est plus occupé qu’à tromper les autres, et pour y parvenir, il ne se perd pas de vue ; l’oubli d’un instant lui serait fatal, il faut qu’il arrange avec art ce qu’il sait, et ce qu’il pense, que tout ce qu’il dit ne soit destiné qu’à indiquer ce qu’il est censé cacher : il faut qu’il cherche des instruments habiles, qui le secondent, sans trahir ce qui lui manque, et des supérieurs pleins d’ignorance et de vanité, qu’on puisse détourner du jugement par la louange ; il doit faire illusion à ceux qui dépendent de lui par de la réserve, et tromper ceux dont il espère par de l’exagération. Enfin, il faut qu’il évite sans cesse tous les genres de démonstration du vrai ; mais aussi agité qu’un coupable qui craint la révélation de son secret, il sait qu’un homme d’un esprit fin peut découvrir dans le silence de la gravité, l’ignorance qui se compose, et dans l’enthousiasme de la flatterie, la froideur qui s’exalte. […] C’est dans la lutte de leurs intérêts, et non dans le silence de leurs passions, qu’on croit découvrir les véritables opinions des hommes : et quel plus grand malheur que d’avoir mérité une réputation opposée à son propre caractère !

103. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre premier. Les signes — Chapitre III. Des idées générales et de la substitution à plusieurs degrés » pp. 55-71

La complication des composés va croissant ; elle est indéfinie ; tous ensemble, ils forment un royaume à part d’objets qui ne sont pas réels, mais qui sont distribuables, comme les objets réels, en familles, genres, espèces, et dont nous découvrons les propriétés en considérant à côté d’eux les propriétés des formules qui sont leurs substituts. […] Trouver la formule algébrique d’une courbe, c’est découvrir entre certaines lignes liées à la courbe un rapport mathématique et traduire une qualité en quantité. — Quel que soit le raisonnement que nous fassions sur des nombres et des grandeurs, il consiste toujours à aller d’un équivalent jusqu’à un autre équivalent par une série d’équivalents intermédiaires, à remplacer des grandeurs par les nombres qui les expriment, une forme par l’équation qui lui correspond, une quantité faite par une quantité en voie de formation dont celle-là est la limite, un mouvement et une force par une ligne qui les représente. […] On vient de voir comment, en combinant ensemble des abstraits, nous fabriquons de toutes pièces le premier terme d’un couple dont le second est hors de notre portée, et comment, en étudiant la formule génératrice, nous découvrons les propriétés de l’objet qu’elle doit engendrer.

104. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre premier : M. Laromiguière »

Descartes rejetait l’argument des causes finales, Leibnitz celui que Descartes tirait de l’idée d’infini, Kant toutes les démonstrations, excepté celle qu’il découvrait dans la loi morale. […] Il entrechoque devant ses auditeurs cette foule d’abstractions, d’explications et d’argumentations ; et quand il les voit bien assourdis par le bruit du combat et par le choc sonore de pompeux adjectifs philosophiques, il les amène doucement hors de la mêlée, éclaircit leurs idées par des exemples familiers, les engage adroitement dans la bonne route, leur fait découvrir d’eux-mêmes et près d’eux ce qu’ils cherchaient si loin et dans les autres, et les laisse satisfaits d’eux, contents du maître, enrichis d’une idée claire, et munis d’une leçon de patience et de discrétion. […] On a dit que le propre de l’esprit français est d’éclaircir, de développer, de publier les vérités générales ; que les faits découverts en Angleterre et les théories inventées en Allemagne ont besoin de passer par nos livres pour recevoir en Europe le droit de cité ; que nos écrivains seuls savent réduire la science en notions populaires, conduire les esprits pas à pas et sans qu’ils s’en doutent vers un but lointain, aplanir le chemin, supprimer l’ennui et l’effort, et changer le laborieux voyage en une promenade de plaisir.

105. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre deuxième. La connaissance des corps — Chapitre premier. La perception extérieure et les idées dont se compose l’idée de corps » pp. 69-122

Nous découvrons en outre qu’elles appartiennent à des êtres humains ou sensibles, autres que nous-mêmes. […] Cela posé, il découvre peu à peu que, dans ses définitions des corps et de leurs propriétés, un mode ou une particularité du mouvement ainsi conçu peut tenir lieu de ses sensations. […] Mais, si l’on analyse celui qu’il a choisi, on découvre que tous les éléments originels et constitutifs de sa définition, comme de la définition de tous les autres, ne sont jamais que des sensations, ou des extraits plus ou moins élaborés de sensations. […] Ne découvrons-nous en elle que des propriétés relatives, par exemple la possibilité de telles sensations tactiles pour un sujet sentant, la nécessité des mêmes sensations tactiles pour le sujet sentant qui se donnera telle série de sensations musculaires, à savoir la série des sensations musculaires à la suite desquelles sa main arrive à toucher la pierre ? […] Ainsi nous découvrons dans les corps un caractère réel et propre, le mouvement, et nous le concevons comme analogue de loin à notre sensation musculaire de locomotion, comme un extrait prodigieusement réduit de cette sensation, bref, comme on l’a défini tout à l’heure.

106. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre IV. De la délimitation, et de la fixation des images. Perception et matière. Âme et corps. »

. — Le dogmatisme découvre et dégage les difficultés sur lesquelles l’empirisme ferme les yeux ; mais, à vrai dire, il en cherche la solution dans la voie que l’empirisme a tracée. […] Cette déduction n’est possible, il est vrai, que si l’on découvre, sous l’hétérogénéité apparente des qualités sensibles, des éléments homogènes et calculables. […] Disons donc, pour en découvrir un nouvel aspect, qu’elles impliquent ce double postulat, également accepté par le réalisme et par l’idéalisme : 1º entre divers genres de qualités il n’y a rien de commun ; 2º il n’y a rien de commun, non plus, entre l’étendue et la qualité pure. […] Mais le réalisme atomistique, à son tour, qui met les mouvements dans l’espace et les sensations dans la conscience, ne peut rien découvrir de commun entre les modifications ou phénomènes de l’étendue et les sensations qui y répondent. […] Faut-il s’étonner si notre entendement, s’exerçant désormais sur cette idée qui représente justement l’inversion du réel, n’y découvre que des contradictions ?

107. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIII. Retour de Molière à Paris » pp. 225-264

La prudence de Virginia le rassure ; elle joue très bien son rôle : le jour elle fait semblant de ne point le connaître ; la nuit elle use de toute sorte de précautions pour le faire entrer chez elle, et, pour qu’on ne les découvre point, n’allume point de lumière. […] Il tremble que celui-ci n’ait découvert la supercherie dont il a été victime. […] Pandolfo veut savoir qui est la femme qui est entrée chez lui et la force à se découvrir le visage. […] Tebaldo vient à son aide et découvre à Ricciardo et à Fabio que Lelio est une fille et que c’est elle, et non Virginia, que ce dernier a épousée.

108. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVII et dernier » pp. 442-475

Il serait bien triste que Dieu n’éclairât pas une âme faite pour lui. » Cependant les yeux jaloux de madame de Montespan ont découvert l’intrigue du roi et de madame de Fontanges. […] Elle promet à Gobelin le plaisir de voir le roi très aimable et très chrétien à la messe, quand il viendra à Versailles ; elle parle de la simplicité de la chambre qu’elle occupe ; mais elle ajoute : « Plût au ciel qu’il y en eut autant dans mon cœur, et que sans compter ce que je n’y connais pas, le n’y découvrisse pas encore des replis qui peuvent gâter ce que je suis !  […] Les noms des Bossuet, Fléchier, Bourdaloue, Fénelon, Massillon, nous découvrent d’avance la nouvelle condition de la littérature. […] Le roi la rencontre ainsi en chassant du côté de Maintenon, « sans mante, sans écharpe, les bras nus, le cou découvert, et n’ayant sur son sein qu’un simple mouchoir de la mousseline la plus claire.

109. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre I. La critique » pp. 45-80

De cette faiblesse, les causes se découvrent facilement : 1º Le critique s’est laissé gagner par la confusion générale des lettres. […] La critique ici nous découvre des beautés souvent inaperçues. […] Ernest-Charles est admirable c’est lorsqu’il parle de la langue française et lorsqu’il découvre une œuvre étrangère proclamant la précellence de notre langue, lorsqu’il combat le style trop hâtif. […] Ces derniers ne brillent pas en général par un souci fort apparent de découvrir des talents ignorés ou de guider le goût du public.

110. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. Mignet : Histoire de la Révolution française, depuis 1789 jusqu’en 1814. 3e édition. »

Sans doute il se laissa plus d’une fois séduire à des inductions pressenties plutôt que trouvées ; plus d’une fois sa perspicacité ingénieuse donna le change à son intelligence exigeante ; et, portant en lui tant de ressources avec tant de besoins, il jugea souvent plus commode d’inventer que de découvrir. […] Son seul tort est d’avoir exclusivement rattaché à cet ordre unique de causes, des résultats auxquels ont concouru, pour une part indéterminée et peut-être immense, d’autres causes obscures et inappréciables, comme s’il en avait trop coûté à son esprit rigoureux d’admettre de la réalité ailleurs que là où il découvrait de l’ordre et des lois.

111. (1874) Premiers lundis. Tome II « Charles de Bernard. Le nœud Gordien. — Gerfaut. »

M. de Balzac a découvert cette veine ; c’est lui qui, le premier, après d’inconcevables écoles, a fini par bien saisir et par traiter dans ses moindres nuances la forme de sensibilité, d’imagination, de fatuité, de rouerie, qui caractérise un certain monde à la mode de notre temps. […] Quand Christophe Colomb (M. de Balzac me pardonnera la comparaison) découvrit l’Amérique, il ne savait qu’à demi ce qu’il faisait ; il croyait rejoindre la Chine et prendre par le revers le grand kan de Tartarie ; la tour de porcelaine, ou je ne sais quoi de pareil, lui semblait à chaque pas miroiter à l’horizon : il mourut sans comprendre, sans apprécier tout ce qu’il avait trouvé.

112. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre VII. De la littérature latine, depuis la mort d’Auguste jusqu’au règne des Antonins » pp. 176-187

Mais en avançant dans la littérature, on se blase sur les jouissances de l’imagination, l’esprit devient plus avide d’idées abstraites, la pensée se généralise, les rapports des hommes entre eux se multiplient avec les siècles, la variété des circonstances fait naître et découvrir des combinaisons nouvelles, des aperçus plus profonds ; la réflexion mérite du temps. […] Enfin à cette époque, comme on n’avait pas découvert la véritable méthode qu’il faut suivre dans l’étude de la nature physique, l’émulation n’était point excitée dans une carrière où de grands succès n’avaient point encore été obtenus.

113. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre IX. De l’esprit général de la littérature chez les modernes » pp. 215-227

Les femmes ont découvert dans les caractères une foule de nuances que le besoin de dominer ou la crainte d’être asservies leur a fait apercevoir : elles ont fourni au talent dramatique de nouveaux secrets pour émouvoir. […] Les philosophes anciens, exerçant pour ainsi dire une magistrature d’instruction parmi les hommes, avaient toujours pour but l’enseignement universel ; ils découvraient les éléments, ils posaient les bases, ils ne laissaient rien en arrière ; ils n’avaient point encore à se préserver de cette foule d’idées communes, qu’il faut indiquer dans sa route, sans néanmoins fatiguer en les retraçant.

114. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre IV. De la bienfaisance. »

Il y a des vertus toutes composées de craintes et de sacrifices, dont l’accomplissement peut donner une satisfaction d’un ordre très relevé à l’âme forte qui les pratique ; mais, peut-être, avec le temps découvrira-t-on que tout ce qui n’est pas naturel, n’est pas nécessaire, et que la morale, dans divers pays, est aussi chargée de superstition que la religion. […] Jamais il ne voit un homme dans le malheur qu’il ne lui dise ce qu’il a besoin d’entendre, que son esprit, son âme ne découvrent la consolation directe, ou détournée, que cette situation rend nécessaire, la pensée qu’il faut faire naître en lui, celle qu’il faut écarter, sans avoir l’air d’y tâcher.

115. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XVII. Conclusion » pp. 339-351

Mais ce n’est pas, à notre avis, dans cette sorte de caput mortuum qu’il faut découvrir et signaler le service le plus important que les Italiens rendirent au chef de l’école française. […] Les études comme celle que nous terminons ont l’avantage de nous apprendre à n’être point trop injustes pour les temps qui, au premier coup d’œil, paraissent stériles ; on découvre, grâce à elles, qu’ils ont eu aussi leur travail et leur fécondité.

116. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 23, que la voïe de discussion n’est pas aussi bonne pour connoître le mérite des poëmes et des tableaux, que celle du sentiment » pp. 341-353

Combien l’expérience a-t-elle découvert d’erreurs dans les raisonnemens philosophiques qui étoient tenus dans les siecles passez pour des raisonnemens solides ? Autant qu’elle en découvrira un jour dans les raisonnemens qui passent aujourd’hui pour des veritez incontestables.

117. (1897) L’empirisme rationaliste de Taine et les sciences morales

D’après eux, il y a entre les choses des relations logiques, des rapports de parenté que la science a pour fin de découvrir et cette logique des choses est identique à celle de l’esprit. […] La réflexion scientifique, si elle est méthodiquement employée, ne peut que les découvrir ; il n’y a donc rien à en redouter.

118. (1912) L’art de lire « Chapitre X. Relire »

Je l’ai beaucoup relu ; c’est un mystique. » Beaucoup relire Sainte-Beuve pour en arriver à découvrir qu’il est un mystique, c’est certainement un abus de la révision. […] Il arrive que dans un livre on découvre, au bout de vingt ans, une foule de choses que l’on n’y avait pas entrevues.

119. (1841) Matinées littéraires pp. 3-32

Il faut la chercher dans des milliers de volumes, où de longs et pénibles travaux suffisent à peine pour la découvrir. […] Il est des esprits chagrins qui ne regardent jamais un tableau qu’avec le désir d’y reconnaître des fautes de dessin, qui ne prennent jamais un livre qu’avec l’espoir d’y découvrir des incorrections de style. […] La critique, telle que nous la comprenons, est fille du bon sens et du bon goût ; elle s’attache à reconnaître, à découvrir le mérite réel des écrivains, et tout en cherchant à nous garantir d’une vénération aveugle et irréfléchie, elle se complaît à éveiller en nous le sentiment du beau, en nous faisant partager son enthousiasme pour ce qui lui paraît digne d’admiration. […] Nous demanderons à leur vie le secret de leurs œuvres : nous remonterons le cours du fleuve depuis son embouchure jusqu’à sa source, afin de découvrir la cause des variations et dans la rapidité de sa marche et dans la limpidité de ses eaux. […] L’une reconnaît plus vite la réalité du mérite dans un ouvrage, l’autre en découvre plus aisément la fausseté.

120. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VII. Repos »

Voilà transformé en un être de grâce le brutal Laurent Tailhade et voici des latins bien inattendus découverts en Paul Verlaine le fuyant lorrain et en Boissier, breton, comme l’Océan sur les côtes du Finistère ou comme la brume sur la lande. […] Mais parmi votre chevelure je découvre deux cheveux un peu plus sombres que les autres et ce sont eux que j’ai tenu à louer avant tout. — On ne saurait mieux avouer qu’on n’a compris du poète que ce qu’il a de moins personnel, ses tentatives à moitié heureuses pour sortir de son domaine et ses rares efforts presque grinçants pour dire autre chose que ce qu’il peut dire. […] Et le critique devrait encore découvrir le secret de chaque maître, nous faire sentir en quoi diffèrent l’alexandrin de Racine sinueux et profond comme un sourire dessiné par Vinci et l’alexandrin de Corneille solide et précis comme sur une médaille un profil de Romain. […] Cependant les rares petites taches qu’y découvre une lecture sévère sont des fautes du penseur, tandis que le rêveur et le musicien nous satisfont toujours. […] « Sur les confins extrêmes des réalités sensorielles », cette incantation puissante « découvre à l’âme humaine son infini nostalgique ».

121. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre IX. Le trottoir du Boul’ Mich’ »

Quand Montesquieu hésite, le pion n’hésite pas, lui, à découvrir la vraie pensée de Montesquieu. […] Pierre Brun dispute à feu Gidel la gloire d’avoir découvert Pierre Bertrand de Mérigon, professeur de grec sous Louis XIII. […] D’ailleurs, parmi ses banalités, on découvre parfois des renseignements si intéressants… « Par lui nous savons que le vendredy vingt-septiesme jour de septembre 1630, le roi eut une fièvre très forte… que sa dysenterie était si forte qu’il fut à la garde-robe jusques à quarante fois dans vingt-quatre heures. » M.  […] Il découvre qu’il faut revenir au berceau, mentalement, non physiquement, et que sa victoire est antinaturelle et précaire : les mouvements des peuples vont toujours de l’est à l’ouest. […] Si ces « lois invisibles » sont celles qu’il vient de découvrir, il me semble qu’il vient d’atteindre la sagesse ; s’il est dément, je désire qu’on m’indique les vraies « lois invisibles ».

122. (1870) La science et la conscience « Chapitre II : La psychologie expérimentale »

Or aucune espèce d’observation ne découvre dans la vie des animaux, même des animaux qui vivent en société, rien qui ressemble à ce qu’on nomme, dans toute langue humaine, morale et religion. […] Ensuite, alors même que la méthode psychologique des naturalistes réussit à découvrir un caractère vraiment essentiel, comme le sentiment moral, elle a toujours le grave inconvénient de s’arrêter à des phénomènes qui ne sont que la manifestation d’un principe constitutif de la nature humaine, et qui peuvent se ramener eux-mêmes à des facultés premières. […] Enfin, en rapprochant les monuments religieux et poétiques des divers peuples de la race sémitique, et en les comparant avec les monuments religieux et poétiques du même genre chez les grands peuples de la race âryane, les Indous, les Perses et les Grecs, l’ethnographie a découvert que le génie symbolique manque absolument à la race des sémites, dont la répugnance invincible pour la doctrine des incarnations est aussi connue que le goût des peuples âryans pour les symboles de toute espèce, naturels ou anthropomorphiques. […] Quelle autre science nous aurions du génie de la race nègre ou de la race jaune, si nous découvrions tout à coup des livres où tel esprit supérieur, tel philosophe, tel moraliste de ces races, eût essayé, même grossièrement, de faire l’histoire intime de ses sentiments et de ses passions, l’analyse de ses facultés ! […] C’est ainsi qu’ont procédé les plus grands observateurs de la nature humaine, philosophes ou moralistes, analysant, décrivant et définissant les instincts, les penchants, les passions, les facultés de l’homme, au moyen des révélations du sens intime, tandis que d’autres observateurs s’attachent aux actes extérieurs, aux œuvres mêmes de ces facultés, pour découvrir les lois de leur développement.

123. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre quatrième »

On y sent une habitude ancienne et presque une pratique de ces penseurs, une comparaison déjà douloureuse de son propre intérieur avec ce qu’ils ont découvert de celui de l’homme. […] Où est le philosophe qui s’estime assez éclairé sur sa nature, par les seules lumières de sa raison, pour s’étonner que Pascal ait senti l’insuffisance de la sienne, et qu’il l’ait employée à croire à une lumière venue d’en haut, qui découvre aux plus humbles esprits ce qui se dérobe à la curiosité des plus superbes ? […] Arnauld lui donnait un problème de morale à résoudre, des intentions à découvrir derrière des doctrines : il se met à l’œuvre ; et, comme dit madame Périer : « Cela eut un succès que l’on a vu. » Au reste, en attaquant la morale des jésuites, Pascal accomplissait à son insu une menace prophétique de son père. […] Tout Pascal se découvre dans cette magnifique apostrophe à ses adversaires : « Vous vous sentez frappés par une main invisible ; vous essayez en vain de m’attaquer en la personne de ceux auxquels vous me croyez uni. […] Les Philippiques ne surpassent pas les Provinciales dans l’art d’interpréter les intentions, de découvrir les endroits faibles, de dénoncer les pièges, d’embarrasser, de réduire l’adversaire.

124. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XIV : Récapitulation et conclusion »

À l’égard des formes vivantes, nous devons nous rappeler que nous ne pouvons nous attendre, sauf en des cas très rares, à découvrir les liens qui les unissent directement les unes aux autres, mais seulement ceux qui les rattachent à quelque forme éteinte et déjà supplantée. […] De nombreuses formes douteuses existent, qui ne sont probablement que des variétés ; mais qui nous assure que dans l’avenir un assez grand nombre de fossiles seront découverts pour que les naturalistes soient capables de décider, d’après les règles communes, si ces formes douteuses sont ou ne sont pas des variétés ? […] Les variétés locales ne se répandent pas en d’autres régions éloignées avant de s’être considérablement modifiées et perfectionnées ; et, quand elles émigrent et qu’on les découvre dans une formation géologique éloignée, elles semblent y avoir été soudainement créées, et on les classe simplement comme de nouvelles espèces. […] Le système naturel est un arbre généalogique dont il nous faut découvrir les lignées à l’aide des caractères les plus permanents, quelque légère que soit leur importance vitale. […] Si nous ne possédons ni arbre généalogique, ni Livre d’Or, ni armoiries héréditaires ; nous avons, pour découvrir et suivre les traces des nombreuses lignes divergentes de nos généalogies naturelles, un héritage longtemps conservé de caractères de toutes sortes.

125. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal de Dangeau. tomes III, IV et V » pp. 316-332

Au moment où le corps de la Dauphine est exposé dans sa chambre, avant l’autopsie, il s’est commis une irrégularité dont le narrateur ne manque pas de nous avertir : « Mme la Dauphine a été à visage découvert jusqu’à ce qu’on l’ait ouverte, et on a fait une faute : c’est que pendant ce temps-là, les dames qui n’ont pas droit d’être assises devant elle pendant sa vie, n’ont pas laissé d’être assises devant son corps à visage découvert. » Les choses se passent plus correctement en ce qui est des évêques : « Il a été réglé, nous dit Dangeau, que les évêques qui viennent garder le corps de Mme la Dauphine auront des chaises à dos, parce qu’ils en eurent à la reine ; l’ordre avait été donné d’abord qu’ils n’eussent que des tabourets. » L’acte de l’adoration de la croix, le jour du vendredi saint, est avant tout, chez Dangeau, l’occasion d’une querelle de rang, d’un grave problème de préséance : « Ce matin, les ducs ont été à l’adoration de la croix après les princes du sang. […] Il ne s’est pas contenté de cela, et pour mieux voir, il s’est montré fort à découvert ; il s’est même mis fort en colère contre les courtisans qui l’en voulaient empêcher, et a monté sur le parapet de la tranchée, où il a demeuré assez longtemps.

126. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Fanny. Étude, par M. Ernest Feydeau » pp. 163-178

Le comte me découvrit dans l’espèce de retraite où je m’étais réfugié ; il vint à moi, me prit par la main, et me conduisit vers Ellénore. […] Je mangeais machinalement, du bout des lèvres, m’efforçant d’être attentif et poli, mais plus hagard qu’un assassin qui se sent sur le point d’être découvert. […] N’est-ce pas aussi un prétexte qu’il se donne à son insu, et parce qu’il aura découvert un matin chez cette belle personne de dix ou onze ans plus âgée que lui une première pâleur fanée, un premier pli à la tempe, une première ride ?

127. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Mémoires du duc de Luynes sur la Cour de Louis XV, publiés par MM. L. Dussieux et E. Soulié. » pp. 369-384

L’abbé Le Dieu, ancien secrétaire de Bossuet, étant allé visiter Fénelon à Cambrai en septembre 1704, fut invité à dîner et à souper avec le prélat, et il nous a laissé un détail minutieux de tout ce dont il fut témoin en ce palais où régnait la politesse : « M. l’archevêque, dit-il, prit la peine de me servir de sa main de tout ce qu’il y avait de plus délicat sur sa table ; je le remerciai chaque fois en grand respect, le chapeau à la main, et chaque fois aussi il ne manqua jamais de m’ôter son chapeau, et il me fit l’honneur de boire à ma santé. » Du temps de M. de Luynes, il paraît que l’usage ordinaire de dîner le chapeau sur la tête subsistait encore, puisqu’il remarque qu’on se découvre quand on dîne avec le roi. […] Un mois ou six semaines après M. de Tessé étant prêt de se coucher, et son cuisinier étant dans sa chambre dans ce moment, il lui demanda s’il ne pourrait donc point lui faire découvrir le seigneur espagnol à qui il avait tant fait de questions. […] Les Mémoires du duc de Luynes nous découvrent une chose assez neuve, le règne très prolongé de Mme de Mailly comme maîtresse, et nous fixent sur son étendue chronologique ; ils le font, en effet, remonter avec certitude jusqu’à 1733, c’est-à-dire à un temps où personne n’en avait le soupçon.

128. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Mémoire de Foucault. Intendant sous Louis XIV »

Cela ne l’empêchera pas de faire de son mieux et le plus énergiquement dans l’autre système, celui de la force et de l’attaque plus à découvert. […] Et puis, quand, tout cela sera fait et parfait, quand il se sera maintenu au premier rang des ministres du second ordre force de zèle et de miracles administratifs ; quand il pourra se vanter auprès du roi d’avoir accompli ses désirs les plus chers, d’avoir converti vingt-deux mille âmes sur vingt-deux mille, moins quelques centaines, et cela dans l’espace d’environ seize mois ; quand il aura plus que personne contribué, par cette fausse apparence d’une réussite aisée, au fatal Édit qui s’ensuivit ; lorsqu’il aura inscrit de gaieté de cœur son nom dans l’histoire au-dessous de celui de Baville, ce même, honnête homme s’en ira jouir de sa réputation acquise, dans une intendance heureuse et plus facile, il s’y fera aimer, aimer surtout des savants qu’il assemblera et présidera volontiers, et avec une entière compétence ; il fondera des chaires, il fera des fouilles, il découvrira d’antiques cités enfouies, en même temps qu’il embellira les cités nouvelles ; il recherchera des manuscrits, il aura un riche cabinet de médailles, il sera auprès des curieux l’aménité même et recueillera pour tant de services pacifiques et d’attentions bien placées des éloges universels. […] Dans le temps qu’il était à Montauban, il envoya à Colbert, grand amateur aussi en matière de collections, des actes et manuscrits curieux, tirés de l’abbaye de Moissac ; il y trouva notamment il y découvrit sinon de ses yeux, du moins par ceux d’un docte abbé qu’il y employa, un ouvrage qu’on croyait perdu sur les Persécuteurs, De Mortibus Persecutorum.

129. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIV. La commedia dell’arte au temps de Molière (à partir de 1662) » pp. 265-292

Diamantine dit que tout est découvert, que son intendant a tout dit. […] Il découvre enfin que Trivelin a ordonné le repas ; il se doute que la clef inconnue est celle de la chambre du fourbe ; il va l’essayer, ouvre la porte, entre, trouve une montre d’or, la vend et invite ensuite Pantalon avec toute sa famille à souper. […] « L’inimitable Monsieur Dominique, dit son successeur Gherardi, a porté si loin l’excellence du naïf du caractère d’Arlequin, que les Italiens appellent goffagine, que quiconque l’a vu jouer trouvera toujours quelque chose à redire aux plus fameux Arlequins de son temps. » L’inimitable, c’est l’épithète attachée à son nom : « Qui ramènera, dit Palaprat dans la préface de ses œuvres, qui ramènera les merveilles de l’inimitable Domenico, les charmes de la nature jouant elle-même à visage découvert sous le visage de Scaramouche ? 

130. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Pensées de Pascal. Édition nouvelle avec notes et commentaires, par M. E. Havet. » pp. 523-539

Pascal n’était qu’audacieux et non téméraire ; mais, puisque je l’ai comparé à un général, j’ajouterai que c’était un général qui avait été tué dans le moment même de son opération : elle était restée inachevée et en partie à découvert. […] Quant aux autres, aux indifférents, à ceux qui sont destitués de foi vive et de grâce, « dire à ceux-là qu’ils n’ont qu’à voir la moindre des choses qui les environnent, et qu’ils verront Dieu à découvert, et leur donner, pour toute preuve de ce grand et important sujet, le cours de la lune ou des planètes, et prétendre avoir achevé sa preuve avec un tel discours, c’est leur donner sujet de croire que les preuves de notre religion sont bien faibles ; et je vois, par raison et par expérience, que rien n’est plus propre à leur en faire naître le mépris ». […] Il va se heurter par moments, s’aheurter (c’est son mot) aux écueils qu’il est plus sage à la raison, et même à la foi, de tourner que de découvrir et de dénoncer à nu ; il dira, par exemple, des prophéties citées dans l’Évangile : « Vous croyez qu’elles sont rapportées pour vous faire croire.

131. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre III. Le cerveau chez l’homme »

« D’autres, disait-il, emplissent des crânes de millet desséché qu’ils pèsent ensuite, et, comparant les poids obtenus, ils s’imaginent avoir découvert la mesure de la capacité intellectuelle des différentes races. […] Celui-ci a découvert que les sutures du crâne22 ne se soudent que très tard dans les races supérieures, ce qui permet au crâne de grandir, et à l’encéphale de s’accroître avec lui. […] On nous raconte que lorsqu’on ouvrit le crâne de Pascal, on y découvrit (ce sont les expressions mêmes des médecins) « une abondance de cervelle extraordinaire. » Malheureusement on ne pensa pas à la peser.

132. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — II. L’histoire de la philosophie au xixe  siècle — Chapitre I : Rapports de cette science avec l’histoire »

Son principal objet est d’exposer et de faire connaître les différents systèmes philosophiques, de les interpréter avec toute l’exactitude désirable, d’en rechercher les origines, les conséquences, d’en découvrir les lois ; en un mot, il se propose, non pas de découvrir la vérité en soi, mais de chercher ce que les hommes, et les plus grands hommes, ont pensé de la vérité. […] Ce qui nous trompe ici, c’est que les sciences les plus autorisées, les sciences physiques et chimiques (je laisse les mathématiques, qui ont pour objet l’absolu), ne s’occupent que du présent de l’univers ; elles dirigent leurs recherches sur les propriétés que manifeste actuellement la matière, et on est porté à croire, sans y avoir beaucoup réfléchi, que ces propriétés ont toujours existé et sont inhérentes à la substance où nous les découvrons, quoique cela ne soit pas évident, puisqu’il pourrait se faire qu’elles ne fussent que des états acquis à une époque inconnue.

133. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Les deux cathédrales »

En juxtaposant l’œuvre de Huysmans et celle de Monet, j’y découvre non seulement deux conceptions d’art très différentes, — ce qui serait d’un intérêt secondaire, — mais surtout l’indice de deux compréhensions, exactement situées à l’opposite, des choses de ce monde, — ce qui est d’une toute autre importance.‌ […] Il est à remarquer, néanmoins, que les deux exégètes de la cathédrale se sont rencontrés en ceci : tous deux sont artistes et tous deux ont découvert de la vie, là où n’apparaissent aux regards vulgaires que ruine et décrépitude. […] La force nouvelle qui le travaillait, ne le laissa plus en repos qu’il n’eut découvert quelque fragment de cette vérité dont l’aube avait point en lui.

134. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Première partie — Chapitre III. Les explications anthropologique, idéologique, sociologique »

Je n’ai pas encore expliqué la décoloration des tissus si j’ai découvert que, toutes les fois qu’on a trempé des tissus dans le chlore, ils ont été décolorés. […] Analysez l’esprit de la Révolution : vous trouvez au fond de votre creuset l’esprit cartésien, l’esprit classique, l’esprit chrétien44, c’est-à-dire des systèmes de pensées découverts ou des façons de penser instituées par des hommes supérieurs. […] Depuis quand d’ailleurs est-il impossible a priori, parce qu’un phénomène se reproduit rarement, de découvrir la loi de sa production ?

135. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre IV. Addison. »

Sa morale, tout anglaise, se traîne toujours terre à terre, parmi les lieux communs, sans découvrir des principes, sans serrer des déductions. […] Il découvre que les mauvais livres sont pernicieux, parce que leur durée porte leur venin jusqu’aux générations futures. […] Figurez-vous maintenant cet esprit moyen par excellence, tout occupé à découvrir de bons motifs d’action. […] Comme je les comptais, le Génie me dit que ce pont était d’abord de mille arches, mais qu’une grande inondation avait balayé le reste, et l’avait laissé ruiné comme je le voyais maintenant. —  Dis-moi encore, reprit-il, ce que tu y découvres. —  Je vois, répondis-je, une multitude de gens qui le traversent, et un nuage noir suspendu sur chacune de ses deux issues. —  Puis, regardant plus attentivement, je vis plusieurs des voyageurs tomber au travers dans la grande marée qui conduit au-dessous, et je découvris bientôt qu’il y avait dans ce pont d’innombrables trappes cachées, où l’on ne mettait le pied que pour s’enfoncer et disparaître à l’instant. […] Les nuages reposaient encore sur une des deux moitiés, en sorte que de ce côté je ne pus rien découvrir ; mais l’autre était un vaste océan semé d’îles innombrables : ces îles étaient couvertes de fruits et de fleurs, et entrecoupées de mille petites mers brillantes qui serpentaient tout au travers.

136. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Seconde faculté d’une Université. Faculté de médecine. » pp. 497-505

Il exposera la nature de chacune et les principes caractéristiques que l’analyse chimique y découvre. […] Là il leur. fera observer les symptômes de chacune des maladies qu’il aura à traiter, leur indiquera les moyens d’en découvrir les causes, leur fera remarquer la marche que la nature suit le plus ordinairement, les indications qui se présentent à remplir, et leur rendra raison de la méthode curative qu’il croira devoir adopter.

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