Cet art que Corneille avait établi sur l’étonnement et l’admiration, et sur une nature souvent idéale, il le fonda sur une nature vraie et sur la connaissance du coeur humain. […] Indépendamment des inimitiés personnelles qui avaient pu nuire à l’auteur, ne pourrait-on pas trouver dans la nature même de l’ouvrage les raisons de ce succès tardif que le temps seul a pu établir ? […] Loin de moi cet odieux dessein d’établir le triomphe d’un grand homme sur l’abaissement de son rival, ni de faire souvenir qu’il existe une autre Bérénice que celle de l’inimitable Racine.
Porté à la tête des finances dans le temps même où la paix de Vervins (1598) permettait de réduire les dépenses extraordinaires et d’établir un ordre régulier, il s’appliqua à dresser de nouveau un état général sur des bases plus sûres qu’il ne l’avait pu faire jusque-là, et en ne se fiant cette fois qu’à lui-même. […] Il aime que les États s’établissent par prudence, par ordre, par or.
Mais ces exemples, trop tôt interrompus, n’avaient pas eu force de loi, et il fallut en effet le règne de Bourdaloue, durant plus de trente ans, pour inaugurer et établir dans le sermon la véritable et juste éloquence, digne en tout de l’époque de Louis XIV. […] Bourdaloue, c’est l’orateur qu’il faut être quand on veut prêcher trente-quatre ans de suite et être utile : il ne s’agit pas de tout dissiper d’abord, de s’illustrer par des exploits, d’avoir des saillies qui étonnent, qui ravissent et auxquelles on applaudit, mais de durer, d’édifier avec sûreté, de recommencer sans cesse, d’être avec son talent comme avec une armée qui n’a pas seulement à gagner une ou deux batailles, mais à s’établir au cœur du pays ennemi et à y vivre.
Il établit bien d’abord qu’il n’aspire point à améliorer la condition de l’homme ou la morale de la vie ; il estime que chacun a en soi, c’est-à-dire dans son tempérament, les principes du bien et du mal qu’il fait, et que les conseils de la philosophie servent de peu : « Celui-là seul est capable d’en profiter, dit-il, dont les dispositions se trouvent heureusement conformes à ces préceptes ; et l’homme qui a des dispositions contraires agit contre la raison avec plus de plaisir que l’autre n’en a de lui obéir. » Ce qu’il veut faire, c’est donc de présenter un tableau de la vie telle qu’elle est, telle qu’il l’a vue et observée : « Tous les livres ne sont que trop pleins d’idées ; il est question de présenter des objets réels, où chacun puisse se reconnaître et reconnaître les autres. » Les premiers chapitres des Mémoires de La Fare, et qui semblent ne s’y rattacher qu’à peine, tant il prend les choses de loin et dans leurs principes, sont toute sa philosophie et sa théorie physique et morale. […] Louis XIV, même dans sa jeunesse et dans son train de galanterie, prétend-il établir un peu de décorum à la Cour, de la réserve dans les rapports extérieurs des hommes et des femmes, La Fare ne voit en lui qu’un roi d’une humeur naturellement pédante et austère, qui, en nuisant à l’ancienne galanterie, en viendra à ruiner la politesse et à introduire par contrecoup l’indécence.
Mais, d’une autre part, ce besoin d’un état n’était pas distinct, chez un grand nombre, de la poursuite d’un emploi, d’une place ; et de ce côté, la presse et l’encombrement aussi se produisant, on avait dû établir des conditions, des difficultés, une sorte de barrière : des certificats d’études, des diplômes littéraires étaient exigés pour l’entrée et pour les moindres emplois dans les administrations ; et ces diplômes, souvent en disproportion avec le but nouveau de la carrière, devenaient, dans bien des cas, un obstacle. […] Je voudrais bien établir la difficulté telle qu’elle était réellement, en la dégageant des accessoires, et en la posant dans ses termes les plus nets, et, s’il le faut, un peu grossis.
Il passa en Suisse, et s’établit dans le pays de Vaud d’abord, puis près de Genève. […] Mais il dut bientôt à la protection du duc de Choiseul de vivre plus rassuré, et alors il se livra avec une incroyable ardeur au plaisir de bâtir, de planter, de peupler ses environs, d’y établir des industries et des fabriques de montres, d’y introduire la joie, la santé et l’aisance.
Il est nouvellement arrivé et à peine établi à Montpellier, et dès lors, après une transplantation qui lui a fait sentir plus que jamais combien il est, lui et les siens, entre les mains de celui qui peut tout, il tient à se rendre un compte exact de l’emploi de son temps, « afin que si cet emploi est bon, il se réjouisse et rende grâces à Dieu, et que, s’il en perd quelque chose par distraction ou par sa faute, il le sache aussi et reconnaisse son malheur ou son imprudence ». […] À propos de cette critique de Commynes dans la bouche de Jacques Ier, faisons pourtant remarquer nous-même que, loin d’être léger dans son jugement des Anglais et des institutions anglaises, Commynes est bien informé, plein de sens, de prévoyance, et que dans la différence qu’il établit entre la manière dont les choses se passaient de son temps en France et en Angleterre, il devance tout à fait les publicistes modernes et Montesquieu.
Cette histoire, telle qu’il a su l’établir et la bâtir, est tout à fait le contraire de ces histoires générales, systématiques, où l’auteur prête de ses intentions et de son parti pris aux personnages et aux événements eux-mêmes, tellement qu’en les lisant le vulgaire des esprits qui aime à être mené croit tout comprendre et se déclare charmé, tandis que tout esprit politique et qui a tâté des affaires humaines sent aussitôt que ce n’est pas ainsi que les choses ont dû se passer. […] Comme on faisait travailler les soldats aux fortifications, il y avait une comptabilité établie entre les officiers et les entrepreneurs.
Mlle Eugénie de Guérin, et, depuis sa mort, les autres membres de la famille, ont tenu à établir la distinction qui est à faire entre la foi de Maurice de Guérin et toutes les apparences contraires qui semblent résulter du fond même de son talent. […] Loin de moi l’idée d’établir une rivalité, de risquer un parallèle qui pourrait devenir une pomme de discorde et allumer la guerre civile dans un certain monde !
Voilà le fait établi et durable. […] que l’histoire littéraire est donc difficile à établir et à maintenir dans ses lignes délicates, et qu’il y aura d’à-peu-près et de contresens qui s’y glisseront de plus en plus !
Ces mots d’opposition et de motions sont établis comme au Parlement d’Angleterre, avec cette différence que lorsqu’on passe à Londres dans le parti de l’opposition, on commence par se dépouiller des grâces du roi, au lieu qu’ici beaucoup s’opposent à toutes les vues sages et bienfaisantes du plus vertueux des maîtres, et gardent ses bienfaits. […] Necker refusait absolument ; mais je le crois un très malhonnête homme, et la confiance ne s’établirait pas avec lui.
Il reste beaucoup à faire pour établir avec sûreté et précision les premières années de Catinat : une Vie critique de ce guerrier de tant de mérite n’est pas écrite encore. […] Le brevet, bien lu, dit simplement que le roi l’a établi « en la charge d’aide de ses camps et armées. ».
La filiation des Touareg, certaine en gros et pour le corps de la nation, est d’ailleurs fort obscure et fort mêlée dans le détail ; ne les interrogez pas de trop près sur leur généalogie : un d’Hozier leur manque, et de l’aveu même des plus instruits d’entre eux : « Si tu nous demandes, disent-ils, de mieux caractériser les origines de chaque tribu et de distinguer les nobles des serfs, nous te répondrons que notre ensemble est mélangé et entrelacé comme le tissu d’une tente dans lequel entre le poil du chameau avec la laine du mouton : il faut être habile pour établir une distinction entre le poil et la laine. » Les Touâreg forment une confédération aristocratique. […] Le docteur Barth est de Hambourg, mais il est établi à Berlin.
« Non-seulement il ordonna qu’ils récitassent les rhapsodies dans leur suite naturelle, sans omission ni altération, mais encore il établit un souffleur ou autorité censoriale pour assurer l’obéissance à ses ordres » ; ce qui implique l’existence d’un ensemble ou agrégat régulier, généralement reconnu et consacré, et aussi l’existence de certains manuscrits. […] Rapprochez-la encore des vers 194, 195, 200, 201, 243 à 250 du chant XIX, et voyez si la suite des idées n’est point parfaitement établie.
Flammarion a toute raison de considérer comme établi que « la terre n’a aucune prééminence marquée dans le système solaire, de manière à être le seul monde habité », et que, « astronomiquement parlant, les autres planètes sont disposées aussi bien qu’elle au séjour de la vie. » Jusqu’ici on est entièrement de son avis, et il ne tire aucune conclusion que celles que l’analogie, la probabilité scientifique indiquent et suggèrent. […] Il va plus loin, il jette le câble électrique, il établit la chaîne : « Qui nous dit que ces mondes et leurs humanités ne forment pas dans leur ensemble une série, une unité hiérarchique, depuis les mondes où la somme des conditions heureuses d’habitabilité est la plus petite jusqu’à ceux où la nature entière brille à l’apogée de sa splendeur et de sa gloire ?
Chéruel a établi une biographie du duc, la plus exacte et la plus complète qu’on ait jusqu’ici ; il a ensuite examiné la valeur du témoin et la confiance qu’il mérite à titre d’historien. […] Il s’agit du maréchal de La Feuillade et de son énorme flagornerie, lorsque ayant acheté l’hôtel de Senneterre, il le fit abattre, y établit la place dite des Victoires et y dédia solennellement la statue pédestre de Louis XIV avec les quatre principales puissances de l’Europe enchaînées sous la figure d’esclaves.
Mais il n’y a rien de commun entre Jasmin et lui, que d’être du peuple et d’avoir du talent ; du reste, nul rapprochement à établir. […] Voilà une filiation poétique tout aussi établie que celle des deux Marot.
Ce sont là de véritables impôts, fonciers, mobiliers, personnels, de patente, de circulation, de mutation, de succession, établis jadis à condition d’un service public dont aujourd’hui il n’est plus chargé. […] Enfin, d’après Arthur Young, la rente foncière perçue par le propriétaire en France était non de 2 1/2 pour 100 comme aujourd’hui, mais de 3 3/4 pour 100. — Quant à la nécessité de doubler les chiffres pour avoir leur valeur en monnaie actuelle, elle est établie par quantité de preuves, entre autres par le prix de la journée de travail, qui était alors de dix-neuf sous.
Ce qui intéressait le public contemporain, et ce qui nous intéresse encore aujourd’hui le plus dans les Parallèles, c’est de voir la façon dont Perrault s’y prend pour établir qu’en matière de belles-lettres comme en tout, les anciens étaient des enfants, tandis que les modernes représentent la maturité de l’esprit humain ; et que là aussi il suffit de venir le dernier pour être le plus grand. […] L’idée générale du respect que méritent les anciens, s’y affirme violemment ; jamais Boileau n’essaye de l’établir par un raisonnement décisif.
« Qu’on établisse le paradis dans un lieu plus élevé, qu’on dispose à l’entour des draperies et des tentures de soie, à telle hauteur que les personnes qui seront dans le paradis puissent être vues par le haut à partir des épaules. […] On sait l’adoration, la tendresse dont le moyen âge a honoré Notre-Dame : une foule de confréries pieuses s’établissaient sous son invocation.
Le christianisme a été une révolte morale des humbles et des pauvres contre l’ordre établi. […] « S’il est une vérité que la sociologie a fermement établie, c’est que la société a sur l’individu une supériorité qui n’est pas simplement physique, mais intellectuelle et morale, qu’elle n’a rien à craindre du libre examen, pourvu qu’il en soit fait un juste emploi105. » — La discipline sociale dans son ensemble, y compris les croyances sociales, est « fondée en raison et en vérité ».
Pourtant, à partir d’un certain moment, on la trouve établie sur un pied assez honorable de liaison régulière avec le président Hénault, homme d’esprit, mais incomparablement inférieur à elle. […] S’il est malade, s’il n’écrit pas assez souvent, elle le menace agréablement des plus violentes extrémités : Remarquez bien, dit-elle, que ce ne sont point des lettres que j’exige, mais de simples bulletins : si vous me refusez cette complaisance, aussitôt je dirai à Viart (son secrétaire) : Partez, prenez vos bottes, allez à tire-d’aile à Londres, publiez dans toutes les rues que vous y arrivez de ma part, que vous avez ordre de résider auprès d’Horace Walpole, qu’il est mon tuteur, que je suis sa pupille, que j’ai pour lui une passion effrénée, et que peut-être j’arriverai incessamment moi-même ; que je m’établirai à Strawberry-Hill, et qu’il n’y a point de scandale que je ne sois prête à donner.
Ici encore Frédéric arrête Voltaire et lui donne une leçon de tact : Louis XIV, dit-il, était un prince grand par une infinité d’endroits ; un solécisme, une faute d’orthographe, ne pouvaient ternir en rien l’éclat de sa réputation, établie par tant d’actions qui l’ont immortalisé. […] Par un reste de culte et, si l’on veut, d’idolâtrie encore touchante, dans toutes les comparaisons qu’il établit entre eux deux, toujours il donne l’avantage à Voltaire, et d’un ton senti dont la sincérité n’est pas suspecte.
Étienne Pasquier, né à Paris en 1529, d’une famille honorablement établie, mais qu’il devait le premier illustrer, se trouva, par la date de sa naissance, en mesure de profiter de toute la science et de l’érudition qui sont propres au xvie siècle. […] Étaient-ce les anciens parlements mêmes qui, durant les minorités, avaient graduellement établi cette autorité consentie depuis et ratifiée par le monarque ?
C’est ce caractère de l’homme et du littérateur que nous tâcherons d’établir et de mettre en vue. […] Mais, dans une note qu’il ajouta à la lettre de son ami, La Harpe, l’un des rédacteurs du Mercure, le prit de plus haut : S’il s’est tu jusqu’à présent, disait-il, c’est par mépris : Mais aujourd’hui que l’on voudrait infirmer l’hommage que je rends à la liberté, et faire croire que ma haine pour l’aristocratie n’est que le sentiment de jalousie que l’on suppose aux conditions inférieures, je suis obligé de déclarer qu’en effet le hasard m’a fait un assez bon gentilhomme, d’une famille originaire de Savoie et établie dans le pays de Vaud, remontant en ligne directe jusqu’à l’année 1389, où l’un de mes ancêtres était gentilhomme de la chambre de Bonne de Bourbon, comtesse de Savoie.
Perrault expose au long et il établit la vraie part qu’eut son frère le médecin au bâtiment de l’Observatoire et à la façade du Louvre. […] Colbert, et l’Académie, qui, en ce temps-là, était très docile aux puissances, s’empressa de modifier son usage et d’établir la publicité pour la cérémonie de réception44.
Le second roman de Mme Sophie Gay, qui parut avec les seules initiales de son nom, en 1813, est Léonie de Montbreuse, et, si j’osais avoir un avis en ces matières si changeantes, si fuyantes, et dans lesquelles il est si difficile d’établir une comparaison, je dirais que c’est son plus délicat ouvrage, celui qui mérite le mieux de rester dans une bibliothèque de choix, sur le rayon où se trouveraient La Princesse de Clèves, Adèle de Senange et Valérie. Léonie a seize ans ; orpheline de sa mère, elle a été élevée au couvent ; elle en sort ramenée par son père, M. de Montbreuse, qui va songer à l’établir.
Seuls, les états intellectuels qui les accompagnent, sensations, perceptions, jugements, raisonnements, leur communiquent une couleur distinctive et établissent entre eux des différences discernables. […] Cette loi, c’est que la propagation du plaisir et de la peine jusqu’aux centres sensori-moteurs ne s’est établie, ou n’a subsisté par sélection naturelle, que quand elle produisait une réaction utile des muscles volontaires, qui partent du cerveau et sont dirigés par le moi.
En me mettant l’album dans les mains, elle m’a dit gentiment : « Tenez, je me porte très bien, je vous ferai attendre trop longtemps… Je ne sais quelle idée m’avait pris de les vendre cet hiver, comme ça je ne pourrai plus. » Jeudi 24 juin Je dîne aujourd’hui chez Francis Magnard, établi dans 2 500 mètres de terre, à Passy. […] » Et il remarche, jetant des phrases comme celle-ci : « Enfin nous sommes dans un monde tout nouveau, où toutes les conditions de l’existence sont changées, sans qu’on ait l’air de s’en apercevoir… Autrefois un ouvrier chaudronnier gagnait 6 francs par jour… Il pouvait mettre 3 francs de côté… Donc au bout de cinq ans, il avait 5 000 francs et pouvait se faire chaudronnier… Aujourd’hui il faut 800 000 francs pour établir un chaudron… donc il n’y a plus moyen pour le peuple de sortir du peuple… et le peuple ne veut pas rester peuple… Savez-vous avec quelle somme s’est fondée, sous Louis-Philippe, la plus grande fabrique de produits chimiques… Chabrol vous l’apprend… avec 60 000 francs… Allez maintenant chez Salleron, il vous demandera 15 000 francs pour une cheminée… un fourneau sans luxe, c’est une affaire de 50 000 francs… Et tout comme cela… une confiserie se fonde avec un capital de 1 200 000 francs… une épicerie, vous connaissez la maison Potin ?
De celles surtout qui rarement exposées à nos yeux, telles que le ventre, le haut des reins, l’articulation des cuisses ou des bras, où le (…) et le (…) sont sentis par un si petit nombre d’artistes, ne tiennent pas le nom de belles de l’opinion populaire que l’artiste trouve établie en naissant et qui décide de son jugement. […] Je prétens que sans recourir aux notions que je viens d’établir on prononcera éternellement les mots d’exagération, de pauvre nature, de nature mesquine, sans en avoir d’idées nettes.
Or, sans métaphysique, on manque éternellement du point fixe qu’il faut établir, en esthétique comme en morale, car le beau doit avoir la certitude du devoir, et on retombe aux petites misères de la sensation individuelle qui sont toujours de petites misères, quelle que soit la grandeur de l’homme qui donne sa sensation pour règle et qui la jette dans la balance, comme Brennus son épée, pour l’entraîner du côté de la vérité ! […] Xavier Aubryet, au plus fort du mal qui l’afflige, établit sa gloire d’avenir et augmente ses œuvres.
… Et quelle garantie, qu’une pareille théorie, de la vérité de la Vie de Jésus par Renan, qui veut certainement que les idées de son livre s’établissent dans le monde et qui ne peuvent s’y établir que par le mensonge et le mal.
Il y aurait même, à ce propos, une carte curieuse à établir. […] Il y aurait une contrepartie à faire, et, après avoir établi que le Parisien a souvent une opinion fausse du provincial, on pourrait aisément démontrer que celui-ci méconnaît à son tour le Parisien.
En obéissant à son goût naturel et réfléchi, M. de Latena cependant ne s’y est point laissé aller comme un simple amateur ; il n’a pas jeté au hasard et sans suite les remarques que lui suggérait l’étude de l’homme ou le spectacle de la société, et, sans enchaîner précisément toutes ses notes et ses aperçus dans une combinaison de chapitres se succédant avec méthode et transition, il a tenu à y établir un ordre général qui maintient la liaison des principales parties ; il a fait et voulu faire un ouvraget ; il a eu tout le respect du sujet qu’il traitait.
C’en est bien assez pour justifier les rapprochements qu’on a tant de fois établis entre les deux Révolutions, et ce parallélisme historique se fortifie même de mille ressemblances singulières.
Aussi, dès qu’il se borne à peindre l’art et les artistes dans ce moyen âge, où il y avait du moins harmonie et stabilité pour les âmes, quelque chose de calme, de doré et de solennel succède aux délirantes émotions qu’il tirait des désordres du présent ; depuis l’atelier de maître Martin le tonnelier, qui est un artiste, jusqu’à la cour du digne landgrave de Thuringe, où se réunissent autour de la jeune comtesse Mathilde, luth et harpe en main, les sept grands maîtres du chant, partout dans cet ordre établi, on sent que le talent n’est plus égaré au hasard, et que l’œuvre de chacun s’accomplit paisiblement ; s’il y a lutte encore par instants dans l’âme de l’artiste, le bon et pieux génie finit du moins par triompher, et celui qui a reçu un don en naissant ne demeure pas inévitablement en proie au tumulte de son cœur.
D’ailleurs, les restes de l’hôtel Rambouillet étaient encore menaçants du temps de Molière, et voilà pourquoi il en voulait, avant tout, déblayer la scène, afin d’y établir son franc-parler.
De nos jours, si le pouvoir absolu d’un seul s’établissait en France, il nous manquerait ce recours à des idées majestueuses, à des idées qui, planant sur l’espèce humaine entière, consolaient des hasards du sort ; et la raison philosophique opposerait moins de digues à la tyrannie, que l’indomptable croyance, l’intrépide dévouement de l’enthousiasme religieux.
J’y étais toujours fort bien reçu ; et j’ai plaisir à vous apprendre (pardonnez-moi cette innocente vanité) que je suis membre d’une des Compagnies savantes établies jadis par le roi Louis XIV.
En somme, tradition ou progrès, l’une ne s’établit et l’autre ne se détermine que par la docilité et la crédulité des esprits subalternes, et par la suggestion qu’exercent sur eux quelques esprits supérieurs autour desquels se rangent, en deux camps, les snobs de la nouveauté et les snobs de l’habitude, diversement, mais également dociles, et satisfaits de l’être.
André Fontainas Sans doute, il serait possible d’établir d’étranges ou de naturelles affinités avec tels des dramaturges qui l’ont précédé, mais l’on ne pourrait nier à M.
Les progrès de la Science ont semblé mettre en péril les principes les mieux établis, ceux-là mêmes qui étaient regardés comme fondamentaux.
En vertu du régime alors établi dans la vie conjugale, nous verrons désormais une alternative continuelle de brouilleries et de raccommodements entre madame de Montespan et le roi, entre madame Scarron et madame de Montespan.
Les Hollandais s’établissaient aux Indes, et Philippe recueillait les premiers trésors du Pérou ; Coligny même avait envoyé une colonie dans la Caroline ; le chevalier de Gourgue offrait à l’auteur de la Henriade l’épisode le plus touchant : une Épopée doit renfermer l’univers.
Il est assez établi en Europe, comme je l’ai déja dit, que les françois, qui depuis cent ans composent les meilleures pieces dramatiques qui paroissent aujourd’hui, sont aussi ceux qui récitent le mieux les tragedies, et qui sçavent les représenter avec le plus de décence.
Il est même capable bien-tôt de remonter jusques à la source de ces regles, et de juger de l’importance de chacune d’elle par l’importance des principes qui l’ont fait établir.
Nous avons, au contraire, entrepris d’établir qu’il était possible de les traiter scientifiquement sans rien leur enlever de leurs caractères spécifiques.
Lémontey, au contraire, né dans les temps qui ont immédiatement précédé la révolution, avait vu l’inquiétude et le malaise général des années, qui se sont écoulées depuis 1783 jusqu’en 1789 ; de plus, comme il était fort jeune à cette époque, il s’était accoutumé à penser que le dix-huitième siècle avait fondé des doctrines, établi des principes.
Et qu’est ce livre de la Conformité du langage français avec le grec, sinon, sous la forme la plus innocente, car elle est la plus superficielle, la preuve, essayée vainement par un érudit, de cette origine et de cette descendance que les païens de la Renaissance ont toujours cherché à établir entre le monde moderne et l’antiquité ?
Et, au contraire, qu’un homme qui voit juste en cela le dise comme nous, — mais que, pour mieux l’affirmer, il établisse une fondation de post-obit, une espèce de repas des funérailles comme les Écossais en font à la mort de leurs parents, le tout, dit-il, en se moquant un peu de nous, pour ressusciter le défunt, ce qui serait un miracle auquel ne croient pas les Écossais, ni lui non plus, tous les gens d’esprit de France et de Navarre qui l’entendent, cette redoutable impertinence, ne s’insurgent ni ne se gendarment, et disent même, en approuvant : « Tiens, c’est une idée !
La filiation, la parenté entre le protestantisme et toutes les hérésies, en haut et en bas dans l’histoire, Nicolas l’a assez établie pour épouvanter Guizot, pour que le protestantisme n’ose plus rien contre le socialisme, si ce n’est à la condition de cesser d’être le protestantisme.
Mais au moment où s’éteignait radieusement Walter Scott, Balzac naquit à la publicité, et, à LUI SEUL, il allait établir un équilibre qui n’avait jamais existé entre la France et l’Angleterre.
Les volumes rassemblés sous la main, nous hésitons à saisir l’un plutôt que l’autre, car rien n’établit, entre eux, la moindre différence. […] Fortunio achète un hôtel quand il lui plaît et résolu de vivre à Paris pendant quelques mois, il a acquis un quartier tout entier pour y établir son harem indien. […] La distinction est facile à établir. […] si les mœurs romaines s’étaient établies dans la Germanie vaincue, que de choses seraient différentes. […] Jules Janin le premier, dis-je, s’affranchit superbement de cette règle, et s’établit de façon à se passer également de justice, de raisonnements, de science littéraire, et même de la lecture préalable des volumes dont il était censé devoir indiquer le mérite à ses lecteurs.
Ils n’ont pas établi une différence suffisante entre les ordres de faits. […] Quelques-uns d’entre nous profitaient de cette liberté pour passer leur après-midi dans un cabinet de lecture établi rue Soufflot. […] Anatole France, sont des récits établis aussi sur des documents. […] Vous avez établi que, chez Pascal, le croyant a sa racine dans le savant. […] Si nous voulons, la tempête finie, établir une paix durable, c’est cette politique de petits États qu’il nous faut reprendre.
Quand nous analysâmes ce dernier, nous donnâmes l’idée des différences établies dans la poétique d’Aristote, et nos motifs de changer sa classification, pour en substituer une qui comprît les heureuses inventions que les temps ont produites, et qu’il n’a pu connaître. […] Dites-moi si j’aurais pu, d’après un tel homme, établir ces démonstrations, par lesquelles je vous prouvai que l’esprit et le génie étaient, chez les grands écrivains, proportionnels à la droiture et à la vertu si constamment inspiratrice du bon et du beau ? […] On ne saurait trop bien faire discerner ces différences qui seules établissent les caractères distincts des ouvrages, les limites précises des genres, et celles du style qui leur est proprement convenable. […] Nous avons précédemment rapproché les ressemblances qu’établit ce merveilleux divin entre les combats des Dieux païens avec les Titans, et ceux de nos anges avec nos démons : il est superflu d’y revenir. […] Je ne personnifiai que les puissances motrices de la création, quelles propriétés des substances, et j’établis entre ces divinités une hiérarchie correspondante à leur importance naturelle.
Ils prirent donc le parti de s’éloigner, et rien ne les a, dans la suite, attachés plus fortement à nos intérêts que cette différence de manière et de caractère des deux peuples qu’ils ont vus s’établir dans leur voisinage. […] Ce grand homme (que M. de Bonald, digne d’être son admirateur, cite avec tant de complaisance), établit aussi l’excellence de la succession au pouvoir suprême. […] Il établit pour la famille, ou la société domestique, les divers rapports entre les maîtres et les domestiques, entre les pères et les enfants. […] En même temps que Rome avait établi ses milices, l’État a voit fondé les siennes Les croisades, les usurpations de la couronne ayant appauvri l’ordre des nobles, il fallut avoir recours pour la défense de l’État aux troupes soldées. […] Il faut des tempêtes pour marier, sur des hauteurs inaccessibles, le cèdre du Liban au cèdre du Sinaï, tandis qu’au bas de la montagne le plus doux vent suffit pour établir entre les fleurs un commerce de volupté.
Les vainqueurs, disposant en maîtres de ces villes presque abandonnées, établissaient leurs magasins et leurs hôpitaux dans les églises et les lieux publics. […] Napoléon, à cheval dès la pointe du jour, s’était établi de sa personne dans le cimetière à la droite d’Eylau. […] À la fin de la nuit, trois ponts, situés à cent toises l’un de l’autre, se trouvèrent solidement établis, et la cavalerie légère put passer sur l’autre bord. […] Quel autre que lui pouvait établir les plans de campagne, étudier sur les cartes et sur les lieux la topographie des champs de bataille, faire mouvoir les masses au doigt même du général en chef, porter l’œil et le jour sur les innombrables accidents de la lutte, débrouiller la mêlée, donner la raison secrète de la victoire ou de la déroute ?
La brochure sur le théatre d’opéra royal de Vienne (1863) établit surtout les qualités que doivent avoir les acteurs chargés de représenter l’œuvre artistique. […] Dans Art Allemand et Politique allemande (Leipzig, 1868), le Maître établit la nécessité d’imposer au monde une civilisation nouvelle sur les ruines de la civilisation romaine mourante. […] Article voulu éclectique, en somme favorable ; éloges et critiques dont quelques citations donneront une idée suffisante : Dans ses compositions, Wagner n’établit pas de différence entre le chant et l’orchestration….. […] De Bach à Wagner 17, tel est le titre de cette très remarquable étude, établie d’après des citations textuelles puisées dans les dix volumes d’écrits théoriques de Richard Wagner.
Mais cela veut simplement dire que, se plaçant à un point de vue déterminé comme tout physicien, adoptant nécessairement un système de référence déterminé et notant ainsi des grandeurs déterminées, il établira entre ces grandeurs des relations qui devront se conserver, invariantes, entre les grandeurs nouvelles qu’on trouvera si l’on adopte un nouveau système de référence. […] Mais quand, par des expériences de laboratoire, on établit ce point, quand on mesure le « retard » apporté à la constatation psychologique d’une simultanéité, c’est encore à elle qu’il faut recourir pour la critiquer : sans elle ne serait possible aucune lecture d’appareil. […] Ou bien c’est une simultanéité simplement approximative, l’approximation étant d’ailleurs suffisante eu égard à la distance énormément plus grande qui sépare les événements entre lesquels vous allez établir une simultanéité « savante » ; ou bien c’est une simultanéité parfaite, mais alors vous ne faites que constater à votre insu une identité d’indications entre les deux horloges microbiennes synchronisées dont vous parliez tout à l’heure, horloges qui existent virtuellement en A et en B. […] Nous avons montré plus haut (p. 54) et nous venons de répéter qu’on ne saurait établir une distinction radicale entre la simultanéité sur place et la simultanéité à distance.
Entre deux conquêtes, il avait fait rédiger une syntaxe de la langue théotisque qui, avec le latin, était alors la langue de la cour et des affaires ; et il avait établi des écoles pour l’enseignement de l’un et de l’autre. […] Comment établir quelque fait général sur de si faibles échantillons ? […] Les Normands débarquent ; leurs invasions se renouvellent pendant cinquante ans, ils s’établissent enfin ; ils s’emparent d’une des plus riches provinces de France, et y fondent un État nouveau. […] De même qu’il établit la loi du couvre-feu, il établit la loi du français. […] Ce Brut fait de longs voyages, rencontre des îles enchantées, des palais merveilleux, et enfin trouve l’Angleterre, où il établit sa famille qui règne glorieusement.
Il s’agissait de remplacer une quantité de droits divers, abusifs, souvent arbitraires et d’une comptabilité compliquée, et d’établir un système général de contributions de manière à en distribuer le poids le moins inégalement possible. […] Roederer, dans les premiers mois de son administration, s’appliqua d’abord, comme eût pu le faire en temps régulier un bon préfet de la Seine, à établir et à mettre en pratique le nouveau système de contributions qu’il avait si activement travaillé à introduire.
Toute cette première partie de la vie et de la jeunesse de Madame serait curieuse et importante à bien établir : « J’étais trop âgée, dit-elle, quand je vins en France, pour changer de caractère ; la base était jetée. » Tout en se soumettant avec courage et résolution aux devoirs de sa position nouvelle, elle gardera toujours ses goûts allemands ; elle les confessera, elle les affichera en plein Versailles et en plein Marly, et cette cour, qui était alors la règle de l’Europe, et qui donnait le ton, aurait pu s’en choquer si elle n’avait mieux aimé en sourire. […] À propos de Heidelberg rebâti après les désastres et d’un couvent de Jésuites ou de Cordeliers qu’on y établissait sur la hauteur : « Mon Dieu !
Cowper d’ailleurs, qui a encore de commun avec lui de s’être développé si tard, a parlé de Rousseau plus d’une fois, et en connaissance de cause ; il l’avait lu, au moins dans ses premiers grands ouvrages, et, dès le temps où il était établi à Huntingdon auprès des Unwin, il écrivait à son ami Joseph Hill ; « Vous vous souvenez de la peinture que fait Rousseau d’une matinée anglaise ; telles sont celles que je passe ici avec ces braves gens. » Je ne sais de quelle matinée anglaise il s’agit, à moins que ce ne soit dans L’Émile le joli rêve de « la maison blanche avec des contrevents verts », et de la vie qu’on y mène ; Cowper et Hill, en le lisant d’abord ensemble, l’avaient peut-être qualifié ainsi26. […] Une fois il a découvert dans ses courses autour d’Olney, sur une colline assez escarpée, une toute petite cabane cachée dans un bouquet d’arbres, et il l’a appelée le nid du paysan ; il rêve de s’y établir, d’y vivre en ermite, y jouissant de son imagination de poète et d’une paix sans mélange ; mais il ne tarde point à s’apercevoir que le site est incommode, qu’on y manque de tout, qu’il est dur d’être seul : tout bien considéré, il préférera son cabinet d’été et sa serre avec son simple et gracieux confort, et il dira à la hutte sauvage et pittoresque : « Continue d’être un agréable point de vue à mes yeux ; sois mon but de promenade toujours, mais mon habitation, jamais !
Mais, mon cher frère, c’est une entreprise qui surpasse mes forces, une idée théorique qui m’a occupé souvent, et dont l’exécution ne se réalisera probablement que lorsqu’on établira la belle république que Platon avait imaginée. […] L’union étroite qui s’établit entre la Russie et la Prusse, et que Frédéric jugeait si essentielle aux intérêts de sa politique, date des voyages du prince Henri, et l’honneur de l’avoir cimentée lui en revient.
Je dis que pendant trois générations successives Voltaire a été sainement apprécié de quelques-uns, bien que ces jugements soient comme en pure perte et qu’ils n’aient pu se consolider encore et s’établir parmi tous. […] La grande affaire et la seule qu’on doive avoir, c’est de vivre heureux ; et si nous pouvions réussir à le devenir sans établir une caisse de juifrerie, ce serait autant de peine épargnée.
Lorsqu’il y fut établi, le roi le vint voir, l’entretint pendant deux heures. […] On traversa l’Escaut sur des ponts improvisés ; on arriva à cette double ligne établie pour la sûreté des convois, et que les ennemis avaient appelée le chemin de Paris ; on assaillit d’emblée le camp surpris, et on défit totalement le corps qui y était retranché.
Si vous pouviez connaître combien de plaisirs différents nous procure une réputation établie dans ce genre ! […] Mais pendant ce temps-là, Mirabeau court le monde, rompt avec sa dame, arrive à Paris et s’y établit.
Il fallait, à l’exemple de Montesquieu, considérer les révolutions qui sont arrivées dans les mœurs, dans la politique, dans la religion et dans les arts, en établir la réalité, en chercher les causes, en marquer les moments, en un mot, peindre les hommes comme vous l’aviez promis, et non peindre quelques hommes, comme vous l’avez fait. […] C’est à vous de voir si l’emploi d’établir et d’étendre les sciences dans ce climat, ne vous sera pas aussi glorieux que d’avoir appris au genre humain de quelle figure est le continent qu’il cultive.
C’est son refrain perpétuel dans ses préfaces qui, à mesure qu’il avance en âge, ne sont plus qu’une longue lamentation : « Il ne suffit pas toujours, disait-il, de faire un bel ouvrage pour en acquérir de la réputation à son auteur, il lui faut encore des amis affectionnés et puissants en crédit pour l’établir dans l’opinion du monde : le peuple n’est pas capable de lui-même d’en connaître le mérite. » Marolles s’estime ainsi victime du mauvais vouloir ou de l’indifférence, à son égard, des principaux oracles de l’opinion ; il croit volontiers à la conspiration du silence. […] Dans le sacré, la réputation de Marolles n’était pas moins établie que dans le profane : Arnauld ne pensait guère de lui autrement que Chapelain.
D’Argenson a écrit quelque part, dans cette supposition favorite de son futur ministère : « Si j’étais premier ministre et le maître, certainement j’établirais une académie politique dans le goût de celle de M. de Torcy. » Et voilà à quoi, certainement, il était le plus propre : établir une Académie des sciences morales et politiques, faire une société de l’Entresol en grand et au premier étage, y lire, en compagnie de gens de savoir et de mérite, des mémoires nourris, instructifs, à vues nombreuses et touffues, à projets drus et vifs, et dans lesquels d’autres que lui verraient ensuite ce qui est à prendre ou à laisser, ce qui est pratique ou ce qui ne l’est pas.
C’était un usage établi, et qui datait de François Ier, que les gentilshommes vinssent à la Cour et s’y fissent présenter sans y être amenés par aucun office particulier. […] Grün a établi les divers temps et les principaux chapitres de la vie publique de Montaigne.
Mais, indépendamment de ces talents établis qui poursuivent leur œuvre, en la modifiant la plupart, et avec raison, selon une pensée sociale, voilà qu’il s’élève et se dresse une troisième génération de poëtes, dont on peut déjà saisir la physionomie distincte et payer l’effort généreux. […] M. de Musset ne paraît pas s’être inquiété jusqu’ici d’établir en son talent une force concentrique et régnante : il embrasse beaucoup, il s’élance très-haut et très-avant en tous sens ; mais il brise, il bouleverse à plaisir ; il se plaît à aller, puis soudain à rebrousser ; il accouple exprès les contraires.
Mlle de Liron est une jeune fille de vingt-trois ans qui habite à Chamalières, près Clermont-Ferrand en Auvergne, avec son père, M. de Liron, dont elle égaie la vieillesse et dirige la maison, suffisant aux moindres détails, surveillant, dans sa prudence, les biens, la récolte des prairies, et aussi l’éducation de son petit cousin Ernest, de quatre ans moins âgé qu’elle, et qui, depuis quatre ans juste, est venu du séminaire de Clermont s’établir chez son grand-oncle et tuteur. […] Dans la première, une femme de qualité établie à Lausanne, la mère de la jolie Cécile dont nous avons cité le portrait, écrit à une amie qui habite la France les détails de sa vie ordinaire, le petit monde qu’elle voit, les prétendants de sa fille et les préférences de cette chère enfant qu’elle adore ; le tout dans un détail infini et avec un pinceau facile qui met en lumière chaque visage de cet intérieur.
Il les commente en juriste, qui n’a pas à les infirmer, à les corriger, à les rectifier ; il les tient pour établis, authentiques, véridiques ; il se borne à en définir le sens et marquer les conséquences. […] Il s’établit d’un saut dans son idée ; d’un saut, ensuite, il atteint une autre idée, sans retenir le contact de la première : sa réflexion n’est pas un acte continu, c’est une série d’actes isolés, dont chacun commence et détermine un effort, entre deux temps d’arrêt.
Quand on a relevé les points de contact établis, soit par les hommes, soit par les livres, entre une nation et celles qui l’environnent, on n’a rempli qu’une moitié de sa tâche. […] De bons travaux178 ont déjà commencé à établir entre plusieurs d’entre eux cette espèce particulière de balance du commerce ; il n’y a qu’à pousser plus avant dans cette voie.
Les physiologistes allemands ont très bien établi que dans les organismes individuels, le progrès consiste dans le passage d’une structure homogène à une structure hétérogène. […] On allume une chandelle, c’est là un fait simple ; mais il en résulte une production de lumière, une production de chaleur, une colonne ascendante de gaz chauds, des courants établis dans l’air environnant, une formation continue d’acide carbonique, d’eau, etc.
« C’est une mode établie de dîner ou de souper avec moi, écrivait-elle, parce qu’il a plu à quelques duchesses de me faire cet honneur. » Cet honneur avait bien ses charges et entraînait des sujétions, elle nous l’avoue : Si ma pauvre santé, qui est faible, comme vous savez, me fait refuser ou manquer à une partie de dames que je n’aurais jamais vues, qui ne se souviennent de moi que par curiosité, ou, si j’ose le dire, par air (car il en entre dans tout) : « Vraiment, dit l’une, elle fait la merveilleuse ! […] Le ton qui y régnait ne devait pas ressembler à celui que nous voyons établi, vers le milieu du siècle, dans les soupers de Mlle Quinault.
En fait de société polie et de conversation, le xviiie siècle n’eut qu’à étendre, à régulariser et à perfectionner ce que le xviie avait premièrement fondé et établi. […] Walckenaer, aux tomes I et IV de ses excellents Mémoires sur Mme de Sévigné, a très bien établi ce qu’on peut appeler la Chronologie de Ninon.
Au milieu de ces soins tout paternels, il composa son premier écrit, qui contient déjà tous les autres, et qu’il fit imprimer à Constance par des prêtres émigrés qui y avaient établi une imprimerie française : Théorie du pouvoir politique et religieux dans la société civile, démontrée par le raisonnement et par l’histoire, par M. de B…, gentilhomme français, 1796. […] M. de Bonald avait pris pour épigraphe cette phrase de Rousseau dans le Contrat social : « Si le Législateur, se trompant dans son objet, établit un principe différent de celui qui naît de la nature des choses, l’État ne cessera d’être agité jusqu’à ce que ce principe soit détruit ou changé, et que l’invincible nature ait repris son empire. » — M. de Bonald se réservait de prouver qu’ici la nature n’était autre chose que la société même la plus étroitement liée et la plus forte, la religion et la monarchie.
Cette Notice, lue dans la dernière séance publique de l’Académie des inscriptions, a ramené l’attention sur un homme respectable et excellent, original de mœurs et de caractère, bon de nature, fin pourtant, rude et brusque d’accent et de ton, qui a eu, au début de l’Empire, le plus grand succès tragique d’alors (Les Templiers), qui, depuis, a créé toute une érudition (l’étude du provençal classique et de ce qui en dépend), l’a établie et organisée d’une manière féconde, et s’est véritablement illustré par ce vaste et sagace labeur. […] Napoléon, qui se connaissait en héros et qui savait l’étoffe dont ils sont faits, insiste sur ce point que le héros d’une tragédie ne doit pas l’être de pied en cap, qu’il doit, pour intéresser, rester un homme ; et ici, sans s’en douter et en croyait n’être que classique, Napoléon se rapproche du point de vue de Shakespeare, chez qui il y a des hommes toujours, et point de héros : L’auteur, dit-il, paraît surtout avoir oublié une maxime classique, établie sur une véritable connaissance du cœur humain : c’est que le héros d’une tragédie, pour intéresser, ne doit être ni tout à fait coupable ni tout à fait innocent.
Il poussait très loin cette doctrine d’accommodement avec les penchants, et on l’a entendu dire : « Quand on a un vice, il faut savoir le porter. » Avant d’être ce que nous l’avons connu, c’est-à-dire une espèce d’amateur en politique, assis à l’orchestre, jugeant la pièce, et consulté même souvent par les auteurs ou acteurs, avant de s’être établi dans son habitude d’observer le monde « comme s’il ne remuait que pour son instruction », M. […] Le scandale qui eut lieu à Saint-Roch lors du refus de sépulture de la danseuse, Mlle Chameroy, lui fournit l’occasion de remarques politiques relativement à la religion : « Elle aura longtemps encore, dit-il, plus besoin d’être soutenue que contenue. » Il établit très bien la différence qu’il y a entre ces deux supports de l’Ancien Régime, la noblesse qui est véritablement finie, et l’établissement religieux qui doit se transformer et subsister.
En même temps, il s’établissait plus régulièrement à la campagne par l’achat de sa maison de La Chavonnière, à Véretz près de Tours. […] À peine établi à Sainte-Pélagie, il y reçut visites et félicitations, plus qu’il n’en voulait : Tout le monde est pour moi, écrivait-il à sa femme avec une sorte d’épanouissement ; je peux dire que je suis bien avec le public.
Il y aurait entre eux un parallèle à établir, dans lequel la question de sincérité serait hors de cause. […] Necker intervient dans la guerre ouverte entre les incrédules et les intolérants de tout genre dont il était environné, comme un médiateur honnête, sensé, sincère, éloquent même à la longue, si l’on consent à l’écouter ; il dira de toutes les manières à ceux qu’il s’efforce de ramener : Un homme sage ne se permet jamais de semer la tristesse et le découragement, pour la ridicule vanité de se montrer un peu élevé au-dessus des opinions communes, ou pour le plaisir de faire des distinctions plus ou moins ingénieuses sur quelques parties de la religion établie.
Elle établit une tradition en philosophie : à travers tant de systèmes changeants, elle retrouve et essaye de dégager ce que Leibniz appelait la philosophie perpétuelle, perennis philosophia. […] Je ne méconnais pas d’ailleurs la distinction établie entre les esprits justes et les esprits faux (quoique cette distinction soit assez difficile à expliquer psychologiquement) ; mais elle me paraît indépendante de la qualité des systèmes.
Cette division en catégories n’a rien que de relatif et, pour l’établir, j’ai dû ne tenir compte que du caractère le plus marqué du récit à classer, alors que, par ses caractères accessoires, ce même récit pourrait se voir rangé dans une ou deux autres catégories. […] A première vue on est tenté d’établir des similitudes, d’identifier Diâtrou, l’hyène, au brutal Isengrin et frère lièvre à Goupil le renard, mais l’ouvre médiévale est avant tout une suite de fabliaux satiriques où l’humeur gouailleuse du populaire s’esbaudit à un pastiche de la société féodale.
VII Et ce n’est pas seulement un grand historien que Saint-Simon, c’est le légiste du droit monarchique de la France, dans toute la vérité et la majesté de sa tradition… C’est le tout-puissant jurisconsulte du droit coutumier de la monarchie ; car, excepté une seule loi, cette fameuse loi salique promulguée par Clovis et même peut-être avant Clovis, qui établissait l’hérédité de mâle en mâle, il n’y a jamais eu en France qu’un vaste ensemble de coutumes solidifiées par le temps, les circonstances, et cette hérédité sans laquelle les nations ne seraient plus que de confuses et tourbillonnantes multitudes. […] Tel le droit que dans deux Mémoires55, restés inédits et remis aujourd’hui en lumière, Saint-Simon a établi de la manière la plus péremptoire et la plus irréfragable, avec la logique la plus victorieuse, car là où il y a l’obscurité d’un hiatus dans la chaîne des faits nécessaires au développement de sa thèse il répond par l’impérieuse et inévitable nature des choses, que les fautes et les crimes des gouvernements et des hommes peuvent violer, mais dont, pour l’avoir violée, les hommes et les gouvernements meurent nécessairement toujours !
IV Maintenant, résumons un peu, et établissons plus visiblement les propositions principales, qui sont comme une espèce de théorie du rire. […] Et, enfin, on peut aussi établir une classification de comiques suivant les climats et les diverses aptitudes nationales.
C’est pourquoi, si c’eût été le moment de discuter avec le docteur, je lui aurais dit : « je ne sais si le récit qu’on vous a fait était digne de foi ; j’ignore si la dame a eu la vision exacte de la scène qui se déroulait loin d’elle ; mais si ce point m’était démontré, si je pouvais seulement être sûr que la physionomie d’un soldat inconnu d’elle, présent à la scène, lui est apparue telle qu’elle était en réalité — eh bien alors, quand même il serait prouvé qu’il y a eu des milliers de visions fausses et quand même il n’y aurait jamais eu d’autre hallucination véridique que celle-ci, je tiendrais pour rigoureusement et définitivement établie la réalité de la télépathie, ou plus généralement la possibilité de percevoir des objets et des événements que nos sens, avec tous les instruments qui en étendent la portée, sont incapables d’atteindre. » Mais en voilà assez sur ce point. […] Et il aurait fallu alors que se constituât une société comme la vôtre — mais, cette fois, une Société de Recherche physique — laquelle eût fait comparaître les témoins, contrôlé et critiqué leurs récits, établi l’authenticité de ces « apparitions » de bateaux à vapeur.
Aujourd’hui, la Commission n’a pu faire en quelque sorte que reconnaître le terrain, et surtout bien établir l’esprit de la fondation en vertu de laquelle elle était convoquée : elle a mieux aimé être sobre et négative sur bien des points que de fausser cet esprit dès l’origine, en l’interprétant avec trop de facilité et de complaisance.
Sur l’École française d’Athènes On a récemment parlé d’un projet qui honorerait à la fois le Gouvernement français et le Gouvernement grec : il s’agirait d’établir un lien régulier entre l’Université de France et la patrie renaissante des Hellènes, de mettre en rapport l’étude du grec en France avec cette étude refleurie au sein même de la Grèce, d’instituer en un mot une sorte de concordat littéraire entre notre pays latin et la terre d’Athènes.
« Si la France ne le comptait pas parmi ses citoyens, si M. de La Fayette était anglais ou américain, on ne manquerait pas de raisonnements et de raisonneurs pour établir que jamais un caractère si persévérant et si droit n’aurait pu s’élever et grandir en France, pays de la mobilité, terre toujours remuée et toujours ébranlée.
Elle s’établit au Canada et poussa de si profondes racines, qu’après un siècle et plus de domination anglaise, elle s’est maintenue dans sa pureté et dans sa dignité, apte même à la production littéraire.
L’Avenir de la Science est un livre de foi, si vous pensez que la foi peut être autre chose que la croyance aux formules dogmatiques de quelqu’une des religions établies.
Dire que la chasteté du langage ne doit pas aller au-delà de celle des mœurs, quelque corrompues qu’elles soient, c’est prétendre que la société de mœurs honnêtes est condamnée à entendre et à parler un langage qui respire le mépris de l’honnêteté et de la morale ; c’est avancer que le langage peut mettre à découvert des mœurs que la morale oblige à cacher ; c’est aussi établir en principe que des esprits délicats et polis n’ont pas le droit d’exclure de leur langage des expressions grossières et brutales, et j’observe ici que si la décence est une loi de la morale, c’est aussi une loi du goût.
L’arbitraire, & l’arbitraire établi sur les débris des notions de tous les devoirs, répand dans les Esprits l’incertitude, la défiance, la langueur, une espece de mort morale, présage des plus funestes révolutions.
Sa plume éloquemment féconde, & vouée à l’indépendance & aux changemens, enfanta écrits sur écrits, pour achever la révolution commencée & pour établir la nouvelle domination.