Les beaux jours sont passés ! […] Le conte fait passer le précepte avec lui. […] Il nous faut également nous souvenir qu’en aucun temps la tradition n’est tout le passé, mais seulement et au contraire le peu qui en a survécu. […] Il y avait une grande place à passer, et dans les commencements de notre connaissance, il prenait son chemin par les côtés de cette place. […] Les Époques du théâtre français]. — Qu’il s’est pourtant passé quelque chose entre 1640 et 1660 ; — et qu’il y a moyen de le dégager de la statistique elle-même.
Changés peut-être, mais en pis, comme les Francs, comme tous les barbares qui passent de l’action à la jouissance. […] Mais la flamme inextinguible de la vengeance a passé de son cœur dans celui de sa sœur ; cadavre sur cadavre, on les voit tomber tour à tour l’un sur l’autre ; une sorte de fureur colossale les précipite les yeux ouverts dans la mort. […] Une couleur en attire une autre, d’un son il passe à un autre son ; son imagination est une enfilade de tableaux qui se suivent sans s’expliquer. […] Cœdmon, leur ancien poëte62, était, dit Bède, un homme plus ignorant que les autres, et qui ne savait aucune poésie, en sorte que dans la salle, lorsqu’on lui passait la harpe, il était obligé de se retirer, ne pouvant chanter comme ses compagnons. […] Là il passait sa vie à écouter les morceaux de l’Écriture, qu’on lui expliquait en saxon, « les ruminant comme un animal pur, et les mettant en vers très-doux. » Ainsi naît la vraie poésie ; ceux-ci prient avec toute l’émotion d’une âme neuve ; ils adorent, ils sont à genoux ; moins ils savent, plus ils sentent.
J’en passe, car il faut abréger. […] Non, non, Thomas, cela ne se doit pas passer ainsi. […] Une meurtrissure, une franche ordure passe en pareil monde pour un trait d’esprit. […] Songez que je n’ai traduit le texte qu’en partie, et dispensez-moi de montrer jusqu’au bout comment les gravelures françaises ont passé dans le poëme anglais. […] Le savant passe pour magicien, l’illuminé pour hérétique ; les Vaudois, les Cathares, les disciples de Jean de Parme, sont brûlés ; Roger Bacon meurt à temps pour ne pas être brûlé.
Passons à la petite Italie, à l’Italie du moyen âge, à l’Italie d’hier : qui prétendez-vous ressusciter dans ces huit ou dix Italies incohérentes, formées des lambeaux de l’Italie historique ? […] Rendez-lui Candie, Lépante, ses flottes, ses ports, son commerce, ses Doria faisant pencher la victoire et l’empire tantôt du côté de Charles-Quint, tantôt du côté de la France, selon qu’ils passaient d’un vaisseau à l’autre sur les escadres de ces deux rivaux couronnés qui se disputaient l’Italie ! […] L’habitude du régime républicain y avait tellement passé dans les mœurs, qu’après les empereurs auteurs de la servitude et de la décadence, l’Italie renaquit partout de ses cendres sous la forme républicaine : république en Sicile, en Calabre, en Campanie, à Naples, république à Rome sous la domination des papes, république à Sienne, république à Lucques, république à Pise, république à Florence, république à Gênes, république à Venise, républiques presque partout. […] Nous la donnons ici, cette raison, pour la première fois en explication du passé : elle est irréfutable pour ceux qui admettent les concordats ; elle est sans valeur pour ceux plus religieux qui n’admettent comme nous d’autres concordats entre les gouvernements et les pontifes que le respect mutuel et la liberté absolue des consciences. […] XXIII Voyez ce qui se passe à Londres : L’Angleterre cherchait en vain depuis trois siècles une position militaire, politique et navale au Midi contre nous ; elle l’avait trouvée en Espagne et en Portugal pendant la guerre de l’indépendance contre Napoléon ; lui aussi avait voulu s’annexer l’Espagne ; on a vu, à la bataille de Toulouse et à l’invasion des Anglais à Bordeaux en 1814, ce qu’a valu à la France le patronage anglais fatalement introduit en Espagne et en Portugal !
Ainsi Renan, qui peut bien passer pour un poète, avait une ascendance bretonne et une autre gasconne. […] Vous limitez votre enquête à je ne sais quel passé qui exclut les trois ou quatre cents poètes de Toulouse (que vous connaissez comme moi). […] La limite inférieure, c’est-à-dire, la ligne où disparaissent les derniers caractères d’oïl, part d’un point situé à 15 kilomètres environ au nord-est d’Angoulême, à l’extrémité supérieure de la forêt de la Braconne, se dirige vers le nord-est, laissant Confolens en pays d’oc, passe au-dessus de Bellac, contourne Guéret au sud, sépare le Puy-de-Dôme de l’Allier, touche par leur limite nord aux territoires de Roanne et de Lyon pour rejoindre la frontière à peu près au point où le Rhône pénètre en France. […] Passons au second point. […] Passera-t-on sous silence du Bartas « The divine du Bartas » comme l’appellent les Anglais.
Nous donnerons quelque idée du wagnérisme à Munich en publiant une semaine wagnérienne de la Lœwenbraeu-Keller ; parmi les trois ou quatre grandes brasseries ou cafés qui donnent chaque soir, à Munich, des concerts, nous avons pris les programmes de la brasserie de Lœwenbraeu, jour par jour, pendant la semaine que nous avons passée à Munich ; les programmes des autres maisons ressemblent à ceux là. […] Notes historiques et esthétiques — le motif de réminiscence Meminisse juvat Un soir du printemps passé, notre directeur, de passage à Berlin, me demanda pour sa chère Revue Wagnérienne une réduction de la minutieuse et longue étude que je viens de publier dans la Revue de Bayrteuh55 sur le « Motif de réminiscence » avant Wagner. […] En regard des innombrables métamorphoses par où passe le Leitmotif chez Wagner, je me bornerai à indiquer, parmi les modifications si originales de ce thème de l’« Idée fixe » de Berlioz, la fin du premier mouvement, fortissimo et en accords syncopés, haletants, dominés par la petite flûte aiguë d’un caractère sauvagement désespéré et diaboliquement triomphal, — et encore, et surtout, le fameux épisode du final, en mouvement dansant de 6/8 où la « Mélodie aimée », confiée à la petite clarinette en mi doublée de la petite flûte si vulgairement criarde, est travestie selon la remarque même de Berlioz, en « un air de guinguette triviale, ignoble et grotesque. » On connaît la pensée secrète de Berlioz et le sous-entendu vengeur de cette ironie sanglante à l’adresse de la belle miss Smithson57 az. […] Et malgré les souvenirs parfois du mal, la discrète joie s’affermit ; des ondées scintillent ; rappel d’heureux passés, imaginations gaies ? […] Il rencontra Schumann en 1833 lors d’un voyage en Allemagne, passa plusieurs années comme musicien à la cour de Nicolas Ier et fonda l’école de violon du conservatoire de Saint-Pétersbourg.
Les petits intérêts, purement locaux, matériels ou nationaux, n’auraient pas passé les frontières de France. Les intérêts ne les passent pas, mais l’esprit passe par-dessus les fleuves et les montagnes. […] Je pars, et des ormeaux qui bordent le chemin J’ai passé les premiers à peine. […] Ces chants, de ma prison témoins harmonieux, Feront à quelque amant des loisirs studieux Chercher quelle fut cette belle : La grâce décorait son front et ses discours, Et, comme elle, craindront de voir finir leurs jours Ceux qui les passeront près d’elle.
Passons donc sur ces exclamations qui sont agréables, mais un peu fades, et lisons ce qui suit : Echo, qui ne tait rien, vous conta ces amours ; Vous les vîtes gravés au fond des antres sourds : Faites que j’en retrouve au temple de Mémoire Les monuments sacrés, sources de votre gloire, Et que, m’étant formé sous vos savantes mains, Ces vers puissent passer aux derniers des humains ! […] Quand vous eûtes passé ce temps plein d’innocence. […] Harpajême proteste, protestations sur lesquelles je passe. […] Mon âge et mon expérience Doivent dans votre esprit inspirer ma science, Je sais ce qu’en vaut l’aune, et j’ai passé par là.
Zola ; il y a entre la Notre-Dame de Paris et Le Ventre de Paris assez d’espace pour qu’on y ait vu passer bien des choses, doctrines et œuvres, abaissantes, abaissées, se matérialisant, se démocratisant toujours davantage. On y a vu passer Les Iambes sur la Sainte canaille, de Barbier ; La Charogne, de Baudelaire ; Les Réfractaires et La Rue, de Vallès ; Littré et ses singes, volés à Darwin ; Courbet, en peinture, Courbet-le-Déboulonneur ; Manet, L’Homme au bon bock. […] Voici un roman qui, dans l’estime de beaucoup de gens, — les avancés ou les faisandés en littérature, — doit passer pour un livre étonnant, un coup de pistolet dans une poudrière, une nouveauté foudroyante, un chef-d’œuvre ! […] Émile Zola — et pour moi ce n’est pas un éloge — doit être tenu pour le réaliste le plus accentué, le plus résolu, le plus systématiquement exaspéré d’une littérature qui n’a de cœur pour rien et mal au cœur de rien… Ni MM. de Goncourt, qui ont commencé la triste chaîne du Réalisme contemporain, ni Flaubert et tant d’autres, par lesquels elle a passé pour aboutir à M. […] En effet, voyez ce qui passe devant nous en ces photographies : des concubinages et des accointances plus ou moins infâmes, des noces d’ouvriers grotesques auxquels l’auteur ôte toute poésie, toute naïveté, toute honnêteté vraie ; des noces gourmandes et bêtes chez le traiteur, — ô Paul de Kock !
La farce lui a appris à faire passer l’expression naïve et plaisante des sentiments avant l’arrangement curieux de l’intrigue et les grâces littéraires de l’esprit de mots. […] Il faut passer condamnation là-dessus. […] Le style fin et discret ne passe guère la rampe. […] La morale de Molière Ceci nous fait passer à la morale de Molière. […] A la mort de celui-ci, il passa à l’Hôtel de Bourgogne ; puis il fut de la troupe formée, en 1680, par la réunion des trois troupes de l’Hôtel, du Palais-Royal et du Marais, réunion d’où date la Comédie-Française.
Si touché qu’il ait été de la réputation, dans ces courtes années de vie flatteuse et brillante qui précédèrent sa retraite à Port-Royal, jamais il ne le fut jusqu’à faire passer la fortune de son esprit avant la vérité, et à chercher la célébrité dans l’éclat de quelque différence entre son illustre devancier et lui. […] Quel jour se passa sans combat dans cette âme si orageuse et si passionnée ? […] Une fois que de la raison de Descartes elles sont passées dans la mienne, elles y demeurent à l’état de notions claires, indestructibles, mais inactives. […] Il était allé à Port-Royal des Champs, pour y passer quelque temps. […] Vérités, ou plutôt principes de conservation devenus si nécessaires aux peuples chrétiens, qu’il leur serait aussi impossible de s’en passer que de liberté ou d’indépendance.
Nos Welches n’ont jamais été trop sages ; mais du moins ils passaient pour galants, et je ne sais rien de si grossier que de porter les armes contre vous ; cela est contre toutes les lois de la chevalerie. […] Le droit que le pacte social donne au souverain sur les sujets ne passe pas, comme j’ai dit, les bornes de l’utilité publique. […] Qu’il songeât aux républiques anciennes, c’est peu douteux ; mais il était de taille à considérer l’avenir en même temps que le passé et celui-la à travers celui-ci. […] Ces deux officiers faisaient tous les jours le tour de leur district et avertissaient le supérieur Jésuite de tout ce qui se passait. […] Ils en étaient absolument propriétaires, et il suffisait, pour qu’ils l’exerçassent, qu’ils eussent passé les examens constatant leurs capacités juridiques.
Émile de Labretonnière, membre de l’Académie de La Rochelle, dont la pièce a obtenu la première de ces mentions, a composé, sous le titre de Petit Souper, tableau de chevalet, une scène nocturne qui se passe à la Maison d’or, en carnaval, et où il introduit des originaux et des masques à demi philosophes qui parlent très spirituellement de nos vices et de nos travers. […] Une autre pièce, qui a longtemps attiré rattention de la sous-commission et du jury, est un conte dont la scène se passe en Normandie, et qui sent tout à fait sa littérature familière du xviiie siècle, poésie courante, négligée, gracieuse toutefois et spirituelle, dernier souvenir d’un genre ancien et qui s’efface. […] Il faut s’arrêter et passer à la dernière branche du concours, à celle qui confine au roman.
La vie ne paraît qu’un instant auprès de l’éternité, et la félicité humaine, un songe ; et, s’il faut parler franchement, ce n’est pas seulement contre la mort qu’on peut tirer des forces de la foi ; elle nous est d’un grand secours dans toutes les misères humaines ; il n’y a point de disgrâces qu’elle n’adoucisse, point de larmes qu’elle n’essuie, point de pertes qu’elle ne répare ; elle console du mépris, de la pauvreté, de l’infortune, du défaut de santé, qui est la plus rude affliction que puissent éprouver les hommes, et il n’en est aucun de si humilié, de si abandonné, qui, dans son désespoir et son abattement, ne trouve en elle de l’appui, des espérances, du courage : mais cette même foi, qui est la consolation de misérables, est le supplice des heureux ; c’est elle qui empoisonne leurs plaisirs, qui trouble leur félicité présente, qui leur donne des regrets sur le passé, et des craintes sur l’avenir ; c’est elle, enfin, qui tyrannise leurs passions, et qui veut leur interdire les deux sources d’où la nature fait couler nos biens et nos maux, l’amour-propre et la volupté, c’est-à-dire tous les plaisirs des sens, et toutes les joies du cœur… Vauvenargues avait vingt-quatre ans quand il écrivait ces lignes. […] Je ne lis jamais de poète, ni d’ouvrage d’éloquence, qui ne laisse quelques traces dans mon cerveau ; elles se rouvrent dans les occasions, et je les couds à ma pensée sans le savoir ni le soupçonner ; mais lorsqu’elles ont passé sur le papier, que ma tête est dégagée, et que tout est sous mes yeux, je ris de l’effet singulier que fait cette bigarrure, et malheur à qui ça tombe ! […] Vauvenargues le sentait et dut passer outre.
Ce serait un vrai malheur qu’une si excellente créature ne passât que comme une ombre charmante. […] Le duc de Laval avait de la gaieté dans l’esprit ; c’est lui qui disait d’une grande femme qui avait un grand nez : « Il faut beaucoup la ménager, car si on la fâchait, elle vous passerait son nez au travers du corps. » Le mot a été relevé comme spirituel et original ; mais je ne saurais admettre, avec l’écrivain distingué qui en a fait la remarque, qu’il n’y ait que ce mot-là à retenir dans les deux volumes. […] Ballanche, elle n’aura point passé comme une ombre charmante.
Je leur accorde beaucoup sur tout le reste, je ne puis leur passer ce sentiment-là. […] Qu’il ne sache pas seulement, qu’il sente par où ses aïeux, les premiers hommes, ont passé. […] Renan disait, l’autre jour, de ce brave et digne baron d’Eckstein, lequel semblait se ressouvenir confusément des origines scythiques et alpestres de notre race, qu’on le puisse dire, et plus agréablement, de l’enfance ; que plus tard l’homme, le jeune homme ait toujours en lui, par un coin de son passé, une réminiscence de l’âge d’or et des premiers printemps de l’imagination humaine, dût-il ensuite devenir positif, polytechnique, encyclopédique, dût-il être élevé comme le voulait Arago, ou plutôt et mieux comme le voulait Rabelais.
Aucun des talents, jeunes alors, qui ont séjourné et vécu dans l’un de ces groupes, n’y a passé impunément. […] Les très grands individus se passent de groupe : ils font centre eux-mêmes, et l’on se rassemble autour d’eux. […] Mais fussions-nous un peu primés, ne désirons jamais qu’un homme de notre génération tombe et disparaisse, même quand ce serait un rival et quand il passerait pour un ennemi ; car si nous avons une vraie valeur, c’est encore lui qui, au besoin et à l’occasion, avertira les nouvelles générations ignorantes et les jeunes insolents, qu’ils ont affaire en nous à un vieil athlète qu’on ne saurait mépriser et qu’il ne faut point traiter à la légère son amour-propre à lui-même y est intéressé : il s’est mesuré avec nous dans le bon temps, il nous a connus dans nos meilleurs jours.
De la théologie il passa au droit. […] « Heureux, est-on tenté de s’écrier quand on lit ces choses, heureux qui réussit à passer sa vie sans être dans ces alternatives de faveur et de disgrâce ; que les nécessités d’une carrière, l’aiguillon d’un continuel avancement ne commandent pas ; qui n’a pas soif de pouvoirs et d’honneurs ; qui n’est pas ballotté entre Colbert et Louvois, au risque d’oublier entre les deux sa conscience, d’étouffer ses scrupules et d’y perdre même le sentiment d’humanité ; qui n’est ni persécuteur ni victime, ni hypocrite, ni dupe, ni écrasant ni écrasé ; qui, après avoir connu sans doute quelques traverses de la vie et avoir essuyé quelques amertumes inévitables (sans quoi il ne serait pas homme), s’échappe le plus tôt qu’il peut, retire son âme de la foule et de la presse (comme dit Montaigne), passe le restant de ses jours « entre cour et jardin », ne voyant qu’autant qu’il faut et n’étant pas vu ; aussi loin de l’ovation que de l’insulte ; qui se soustrait en soi-même aux appels et aux tentations de la fortune non moins qu’aux irritations sourdes de l’envie et des comparaisons inégales qu’elle suggère, aux ennuis de toutes sortes, aux iniquités souvent qui s’en engendrent ; qui aime de tout temps quelques-unes de ces choses innocentes et paisibles qu’aimait et cultivait Foucault dans la dernière moitié de sa vie, mais sans en avoir taché comme lui le milieu, sans y avoir imprimé une note brûlante, et en pouvant, d’un bout à l’autre, reparcourir doucement, à son gré, et supporter du moins tous ses souvenirs !
en nous développant et en nous peignant à plaisir des personnages et des mœurs si étranges, si semblables de tout point à des monstruosités, à force de s’y enfermer et d’y vivre, il croira n’être que vrai, réel, et ne faire que reproduire une image exacte ou équivalente de ce qui se passait ou qui existait en effet. […] Il renouvelle à son tour ce grand effort, dans des conditions particulières, bien moins avantageuses à ne considérer que les sources, la matière et l’intérêt, et cependant avec une intention et une prétention plus marquée, plus formelle, de tout restaurer du passé. […] A ces fureurs et à cette poursuite, la nuit entière est passée.
Dans le cas présent il va se trouver engagé à continuer de représenter à Paris un souverain qui aura une autre inclination et inspiration politique que la sienne ; il va passer, même à Dresde et dans son pays, pour un partisan du système français, sans l’être pour cela devenu, et en ayant au cœur une politique toute différente. […] M. de Senfft se décida, en cette occasion, à mettre sa maison sur un plus grand pied que par le passé et à représenter, à proprement parler, ce qu’il n’avait pas fait encore. […] Tout ce que j’en vois est bien pitoyable : c’est encore pis que les scènes de l’automne passé.
Aussi n’y eut-il aucun ami, et outre le scandale d’un divorce (qu’il avait causé)…, ses faits et gestes s’y bornèrent à diriger l’espionnage de tout ce qui se passait en Russie, dans le sens qu’il croyait convenir le mieux aux idées de l’Empereur et du duc de Bassano, mais faisant en même temps germer de plus en plus dans les cœurs polonais la défiance et le mécontentement contre Ja France. […] La verve du belliqueux abbé, dont il avait prodigué les étincelles aux Tuileries, à Fontainebleau, à Bayonne, en tous lieux, devait passer dans tout son être et dans ses actions. […] Il m’est arrivé, une fois, de passer une soirée avec l’abbé de Pradt ; il était à dîner chez un financier opulent qui avait des propriétés en Auvergne et qui était son voisin de terre.
Quand je jette un coup d’œil sur le passé, sur tout le non-succès de mes desseins, sur la perte de tant d’années, je me condamne, je me dis : « Il fallait prendre tel parti ; » puis je trouve qu’il a été si mal à propos de ne pas prendre ce parti que je me mets à examiner mieux les circonstances pour voir ce qui a pu faire obstacle : alors je me rappelle des choses qui me prouvent qu’en effet cette conduite qui eût été la plus sage n’a pas été praticable. […] Et si celui qui est de bonne foi se voit toujours près de juger trop sévèrement sa propre conduite, parce qu’il ne voit que confusément une circonstance passée et qu’il oublie presque toujours une partie des obstacles qu’il a rencontrés jadis, comment ne serions-nous pas injustes lorsque nous condamnons les autres d’après un aperçu encore moins distinct et sans savoir ce qui les arrête ou les détermine ? […] « Après avoir passé une partie de la vie d’une manière indécise, ne devient-il pas plus difficile de sortir de ce vague ?
Dans l’Assemblée Constituante, les membres du côté droit auraient pu faire passer quelques-uns des décrets qui les intéressaient, s’ils eussent laissé la parole à des hommes plus modérés qu’eux, et par conséquent plus agréables au parti populaire ; mais ils aimaient mieux perdre leur cause, en la faisant soutenir par l’abbé Maury, que de la gagner en la laissant défendre par un orateur qui ne fut pas précisément de leur opinion sous tous les autres rapports. […] Ce qu’ils ont fait pour faire triompher leur parti, a perdu leur réputation individuelle ; ceux mêmes qui les applaudissaient, lorsqu’ils croyaient être préservés par eux de quelques dangers, veulent l’honneur de les juger, lorsque le péril est passé ; la vertu est tellement l’idée primitive de tous les hommes, que les complices sont aussi sévères que les juges, lorsque la solidarité n’existe plus ; et les vaincus et les vainqueurs sont réconciliés ensemble quand les uns renoncent à leur absurde cause, et les autres à leurs coupables chefs. […] Aussi se réveilleront-ils un jour ceux qui seuls sont sincères, ceux qui seuls méritent les regrets ; accablés de mépris, tandis qu’ils auraient besoin de considération ; accusés du sang et des pleurs, tandis qu’ils seront encore capables de pitié ; isolés dans l’univers sensible, tandis qu’ils pensaient s’unir à toute la race humaine ; ils éprouveront ces douleurs alors que les motifs qui les ont entrainés auront perdu toute réalité, même à leurs yeux, et ne conserveront de la funeste identité, qui ne leur permet pas de se séparer de leur vie passée, que les remords pour garants ; les remords, seuls liens des deux êtres les plus contraires ; celui qu’ils se sont montrés sous le joug de l’esprit de parti ; celui qu’ils devaient être par les dons de la nature.
Quand un homme passe son temps à attiser les haines des souffrants, à provoquer la révolution sociale, à faire tout, sous prétexte que le monde va mal, pour qu’il aille plus mal encore, il faut qu’il soit bien persuadé de la justice de son œuvre, et cette foi ne suppose pas un très grand fond de gaieté ni surtout une humeur de plaisantin. […] Si peut-être ils ont quelquefois des doutes et soupçonnent le mal qu’ils font, cette impression doit passer vite ; les extrêmes conséquences des paroles mauvaises qu’ils écrivent sont si lointaines et si aléatoires ! […] Puis il songe que, si dans un ou plusieurs siècles, la forme actuelle de la société se trouve radicalement changée, à cette distance tous les révoltés d’aujourd’hui, pêle-mêle, passeront pour des précurseurs et sembleront avoir travaillé pour l’avènement de la justice… Décidément le rôle de révolutionnaire artiste comporte des plaisirs si distingués qu’on est presque excusable d’y sacrifier un peu de sa conscience.
Est-il historiquement exact qu’une véritable unité morale ait jamais été réalisée dans les sociétés du passé ? […] Or l’éducation mnémonique vise à faire de la mémoire de l’individu un raccourci de la mémoire de l’humanité ; elle tend à river l’individu au passé, à faire de lui un esprit historique, un esprit de passivité et de règle. […] Ce qu’il y a de plus clair dans les différents systèmes d’éducation que nous venons de passer en revue, c’est que l’école est un moyen d’imposer plus ou moins sournoisement certaines croyances, certaines manières de penser et d’agir à la jeune génération.
En longue robe droite, tombant, sans un pli, Sephore vers la berge plate, dans l’attente Fatale du départ, — et Lohengrin, pâli, Le regard s’abîmant dans les moires du fleuve, Où le flot nouveau-né chasse le flot ancien, A l’heure de laisser l’Épouse, vierge et veuve, Se lamente au passé qui devait être sien ! […] La mauvaise rumeur des prochaines années Passe dans les frissons heureux de la forêt, Dans chaque bruit résonne un bruit de destinées Et, là-bas, le jardin des baisers apparaît. […] L’auteur montre que Richard Wagner avait une connaissance profonde et détaillée du moyen âge ; il ne fait pas étalage de son érudition dans Lohengrin, mais chaque détail est exact, et en beaucoup d’endroits une parole qui paraît sans importance au vulgaire, est pleine d’intérêt pour le savant. — En un seul point Wagner ne s’est point conformé à l’exactitude historique, — c’est en faisant célébrer le mariage de Lohengrin et d’Elsa à l’église ; l’action de Lohengrin se passe au commencement du dixième siècle, or ce n’est guère que vers les onzième et douzième siècles que l’église parvint à imposer le mariage religieux, et dans les descriptions de mariages avant cette époque il n’est jamais question de cérémonies religieuses.
Montrez-nous l’abbaye en deux grands traits, et passez outre comme vous fîtes alors. […] Y aura-t-il un lieu et un jour, ajouta-t-elle tristement, où la mémoire de ce qui s’est passé en nous, là, dans des heures immortelles, ne vous apparaîtra plus, dans le lointain de votre avenir, que comme cette petite tache sur le fond ténébreux de cette côte ? […] Mais ne pourrait-on pas lui répondre : Il y aura quelque chose de plus triste pour vous, pour la mémoire de ces heures immortelles, que d’être reléguée comme un point à peine visible dans le lointain du passé : ce sera de n’être prise un jour, de n’être étalée et exposée aux yeux de tous que comme un prétexte à des rêves nouveaux, comme un canevas à des broderies et à des pensées nouvelles.
Mais, en admettant ce doute universel des philosophes, il ne s’effraie pas de cet état ; il le décrit avec lenteur, presque avec complaisance ; il n’est ni pressé, ni impatient, ni souffrant comme Pascal ; il n’est pas ce que Pascal dans sa recherche nous paraît tout d’abord, ce voyageur égaré qui aspire au gîte, qui, perdu sans guide dans une forêt obscure, fait mainte fois fausse route, va, revient sur ses pas, se décourage, s’assied au carrefour de la forêt, pousse des cris sans que nul lui réponde, se remet en marche avec frénésie et douleur, s’égare encore, se jette à terre et veut mourir, et n’arrive enfin qu’après avoir passé par toutes les transes et avoir poussé sa sueur de sang. […] Il vient de nous peindre cette jouissance spirituelle du premier ordre, qui commence par Pythagore et par Archimède, qui passe par Aristote, et qui arrive et monte jusqu’aux saints : il semble lui-même, en l’envisageant dans ce suprême exemple, n’avoir fait que monter un degré de plus à l’autel. […] En le prenant de la sorte, on résistera suffisamment à sa logique quelque peu étroite, opiniâtre et absolue ; on s’ouvrira cependant à cette flamme, à cet essor, à tout ce qu’il y a de tendre et de généreux en lui ; on s’associera sans peine à cet idéal de perfection morale qu’il personnifie si ardemment en Jésus-Christ, et l’on sentira qu’on s’est élevé et purifié dans les heures qu’on aura passées en tête-à-tête avec cet athlète, ce martyr et ce héros du monde moral invisible : Pascal pour nous est tout cela.
On reste dans ces écoles illustres jusqu’à douze années en Allemagne, après quoi on va passer quatre années dans quelque université, et puis on est savant. […] Ceux d’entre les écoliers qui ne se destinent pas aux études, c’est-à-dire qui ne veulent devenir ni théologiens, ni jurisconsultes, ni médecins, se contentent de passer cinq ou six années dans ces écoles, à fréquenter les trois ou quatre premières basses classes, après quoi ils quittent le gymnasium pour prendre le parti du commerce ou d’autres professions honorables. […] Soit raison, soit préjugé, je croirai difficilement qu’on puisse se passer de la connaissance des Anciens.
Au contraire la poësie nous décrit tous les incidens remarquables de l’action qu’elle traite, et ce qui s’est passé jette souvent du merveilleux sur une chose fort ordinaire qui se dit ou qui arrive dans la suite. […] Un autre philosophe qu’on juge à son air de tête un homme ferme et même obstiné, a le menton sur la poitrine : il est absorbé dans des reflexions sur les merveilles qu’il entend, et l’on croit s’appercevoir qu’il passe dans ce moment-là de l’ébranlement à la persuasion. […] Horace passe avec raison pour le plus judicieux des auteurs qui ont donné des enseignemens aux poëtes.
Le caractère de l’original doit donc passer aussi dans la copie. […] Dans le premier cas, il peut se flatter de faire passer dans la copie le caractère de la pensée, et par conséquent au moins la moitié de l’esprit de l’auteur ; dans le second cas, s’il ne rend pas la diction, il ne rend rien. […] Qu’on interroge ceux de nos grands poètes qui ont fait passer avec succès en notre langue quelques beaux endroits de Virgile ou d’Homère : combien de fois ont-ils été forcés de substituer aux idées qu’ils ne pouvaient rendre, des idées également heureuses et prises dans leur propre fonds, de suppléer aux vers d’image par des vers de sentiment, à l’énergie de l’expression par la vivacité des tours, à la pompe de l’harmonie par des vers pensés ?
Il fait passer à l’acte ce qui n’était que puissance indéterminée. […] Mais il faut bien dire qu’à notre goût scientifique elle offre, si elle prétend se suffire à elle-même et se passer du secours de la sociologie, peu d’aliment. […] L’expansion de l’idée de l’égalité n’est qu’un cas particulier des « lois de l’imitation49 » : comme de corps en corps les microbes invisibles, elle passe de conscience en conscience et fait ainsi le tour des sociétés.
On cite encore aujourd’hui ses remerciements et ses discours en vers, et son discours de la mollesse ; et cette fameuse épître, où, selon un poète anglais, un peu de mauvaise humeur, il fit deux cents vers pour chanter que Louis n’avait pas passé le Rhin. […] Cet esprit avait passé jusque dans les ateliers des artistes : la peinture, la sculpture et la gravure, retraçaient sans cesse à Louis XIV tout ce qu’il avait fait de grand. […] Il eut des connaissances sur le gouvernement ; mais ayant passé presque tout son règne en grandes entreprises, c’est-à-dire, à conquérir ou à résister, au lieu de pouvoir diriger à son gré ses plans et ses systèmes, il était forcé de plier ses plans à ses besoins.
Nation impétueuse et légère, ardente à ses plaisirs, occupée toujours du présent, oubliant bientôt le passé, parlant de tout, et ne s’affectant de rien, elle regarde avec indifférence tout ce qui est grand ; et quelquefois un ridicule est tout le salaire d’une action généreuse, ou d’un service rendu à l’État et à nous. […] Les sentiments passent de l’orateur au peuple, et reviennent du peuple à l’orateur. […] Si on se passionne pour ce qui ne le mérite pas, on est froid ; si on passe le but, on est ridicule.
Maintenant, par la brèche largement ouverte, ce n’est plus seulement Shakespeare qui passe tout entier : ce sont les Italiens, Alfieri, Manzoni, et ce sont les Allemands, Schiller, Goethe, Burger, Novalis, Hoffmann ; ce seront bientôt les philosophes, Kant, Fichte, Schelling. […] Que dirons-nous encore que soient les Histoires de Michelet, sinon la notation lyrique des émotions qu’il éprouve à revivre, dans le silence apaisé des archives, les hontes ou les gloires du passé ? […] Mais précisément, erreurs ou préjugés, leur méthode n’a pour objet que de les affranchir des uns, de les préserver des autres, et ils mettent leur honneur, on serait tenté de dire leur amour-propre professionnel, à n’être que les greffiers impartiaux du passé. […] Le « naturalisme » de Taine, aussi bien que celui de Flaubert, était plus large ; — il était surtout plus intelligent que ne l’était le réalisme des Courbet et des Champfleury ; — et, par exemple, il n’excluait de ses « représentations » ni la beauté, ni le passé [Cf. […] XV, 1860 ; — Barbey d’Aurevilly, Les Prophètes du passé, 1851 ; — Edmond Scherer, Mélanges de critique religieuse, Paris, 1853 ; — L.
Ni Plaute, ni Térence, ni Aristophane, ni Molière, ne sont descendus jusqu’à ces profondeurs d’analyse d’un vice, et n’ont passé par le burlesque pour arriver au tragique. […] Eugène de Rastignac, qui avait été passer les vacances dans son humble famille, revient affamé d’ambition à la pension Vauquer. […] À la lueur de la lumière qui passe sous la porte il entrevoit le vieillard faisant un paquet avec son linge et son argenterie de réserve, et allant le vendre à un usurier juif du quartier. […] Aujourd’hui tu veux mon passé, le voici. […] Mais si vous n’êtes pas fatigué, nous pouvons passer la rivière, et monter à Clochegourde, où vous aviserez à reconnaître vos épaules.
Quelques-uns viennent du passé très lointain et de pays confus, peut-être oubliés ; ils n’en sont pas moins proches de mon cœur. […] C’est à travers les vitres d’un café Qu’il faut voir son siècle qui passe… Mais voilà ! […] Passons… Le mien au néant S’en est retourné naguère. […] — Ayant passé, en compagnie de plusieurs, de suaves et profondes minutes, j’hésite aujourd’hui quelque peu sur le choix unique. […] … Aux siècles passés, la question s’expliquait : Quel est votre poète ?
Il faut bien, comme dit le proverbe, que jeunesse se passe ; soyez bien né, ayez un fonds d’honnêteté première, et, nonobstant quelques écarts faits pour être pardonnés, tout, en fin de compte, ira bien. […] ” — La seule lecture de ce paragraphe si précis a mis fin à la discussion, et la commission, à l’unanimité, n’a eu qu’à passer outre.
Mettons immédiatement en regard de ce qui eut lieu pour Dom Juan, ce qui se passa pour Le Tartuffe, et nous aboutirons, dans le rapprochement qui s’offre à nous, à des résultats non moins curieux et non moins frappants. […] Ipocrito passe en revue toutes les professions, dont son aigre raillerie n’épargne aucune.
. ― Comment passer des faits particuliers à des vérités générales ? […] Il en est des idées comme des plantes ; elles ne peuvent passer d’un pays à un autre et y prospérer que si elles y rencontrent un sol et un climat favorables.
Voici encore une de ces fables qui peuvent passer pour un chef-d’œuvre. […] On ne lui passerait pas maintenant un vers tel que celui-là, et on ne voit pas pourtant qu’on le lui ait reproché sous Louis XIV.
La maniere de faire savoir au public par une espêce de Journal, ce qui se passe dans la République des Lettres, est une des plus belles inventions du dix-septiéme siécle. […] Mais cette défense n’empêcha pas qu’il n’y en passât tous les mois un grand nombre d’exemplaires qui étoient lus avec une avidité inconcevable.
Nous disons d’un homme qui passe dans la rue, qu’il est mal fait. […] Cependant il faut en passer par là.
Un demi-connaisseur passera, sans s’arrêter, devant un chef-d’œuvre de dessin, d’expression, de composition ; l’œil n’a jamais négligé le coloriste. […] C’est que tandis que l’œil de l’artiste est attaché à la toile et que son pinceau s’occupe à me rendre, je passe, et que lorsqu’il retourne la tête, il ne me retrouve plus.
comme elle a été mondaine autrefois et même comme elle a été ménagère, quand elle mettait une robe de velours et passait un poignard à sa ceinture pour aller payer une note chez son épicier, tant l’effet dramatique est de race chez ces Dumas ! […] La maison Dumas, pour l’esprit qui l’a habitée, est la guérite de l’adultère, du duel, de toutes les rengaines dramatiques sur lesquelles cette grande pauvreté qui se croit un luxe, Je théâtre vit depuis des siècles, et quand on y a passé une partie de sa jeunesse, on reste imprégné de ces idées de duels et d’adultères, on les respire ; on les transpire ; on n’est plus capable de rendre autre chose, de créer autre chose que cela.
Selon la loi de toute révolution populaire, celle qui eut son prodrome à la prise de la Bastille et son épilogue au 9 thermidor était déchirée en deux parts lorsque le mouvement dit du Fédéralisme se produisit en 1793 ; et comme Caen, dit Vaultier, fut une des villes de France où le mouvement se prononça le plus (nous allons voir tout à l’heure avec quelle vigueur), ce qui se passa à Caen donne l’idée de ce qui se passa dans les autres villes, et cela fait véritablement pitié.
Il est vrai aussi — et c’est là son excuse — que par cela même que Dumas fils est plus spécialement auteur dramatique, il est forcément voué à l’idée commune, la seule qui réussit pleinement au théâtre, et que, de toutes les idées communes, la plus sympathique à ce public de Sganarelles passés, présents ou futurs, qui remplissent nos salles de spectacle, c’est l’idée du mari… trompé, ce double type, comique ou tragique, à volonté, pour le poète. […] D’un autre côté, la Critique pourrait admettre encore que si Alexandre Dumas fils n’avait pas cette puissance de détails qu’ont les grands inventeurs dans l’ordre du roman comme Balzac, il était bien capable — lui qui passe pour l’esprit le plus dramatique de notre temps quand il s’agit de mettre en œuvre une idée quelconque, lui qui fait de l’arrangement d’un drame une espèce de création, lui, enfin, l’orthopédiste dramatique qui redresse les enfants mal venus, mal bâtis, bossus ou bancroches, et qui dernièrement a failli faire de ce talent-là une industrie, — de tailler quelque chose de grand, de profond et de nouveau, dans l’idée commune de son roman que lui ont soufflée ses habitudes de théâtre, et de se rattraper de son impuissance radicale de romancier sur son habileté de grand poète dramatique, puisqu’on dit qu’il l’est ?
à ce moment, on concevrait qu’on passât une tunique de soie au cadavre qui n’eût pas froidi et qu’on piquât des roses sur le drap funèbre d’un cercueil. […] N’est-ce pas la moquerie du passé ?
Avec l’argent qu’il a, il pouvait se passer toutes ses fantaisies, et elles pouvaient être grandioses. […] On peut passer près d’elle et se taire, et même ne pas l’apercevoir.
Tous les révolutionnaires de ce temps qui, comme l’auteur de Césara, ont déclaré une guerre implacable à cette religion du passé qui s’appelle le Christianisme, ne savent pas, ne sentent pas qu’ils sont plus chrétiens qu’ils ne pensent. […] … Les hommes des temps et des progrès futurs ne sont que les hommes dévoyés du passé.
Que l’on considère, en effet, la pensée comme une simple fonction du cerveau et l’état de conscience comme un épiphénomène de l’état cérébral, ou que l’on tienne les états de la pensée et les états du cerveau pour deux traductions, en deux langues différentes, d’un même original, dans un cas comme dans l’autre on pose en principe que, si nous pouvions pénétrer à l’intérieur d’un cerveau qui travaille et assister au chassé-croisé des atomes dont l’écorce cérébrale est faite, et si, d’autre part, nous possédions la clef de la psychophysiologie, nous saurions tout le détail de ce qui se passe dans la conscience correspondante. […] Fût-il doué d’une intelligence surhumaine, eût-il la clef de la psychophysiologie, il ne serait éclairé sur ce qui se passe dans la conscience correspondante que tout juste autant que nous le serions sur une pièce de théâtre par les allées et venues des acteurs sur la scène.
Ce monstre fut aussi orateur ; et, à ce que nous apprend Tacite18, il avait même une éloquence mâle et forte ; il avait loué Drusus son frère : il prononça l’éloge funèbre d’Auguste son beau-père, et dans la suite il eut le triste courage de faire l’éloge de son fils unique empoisonné par Séjan ; mais ce qui eût passé peut-être pour fermeté dans un autre, ne fut attribué, dans ce cœur sombre, qu’à une dure insensibilité. […] Ses pleurs ne passèrent que pour un outrage, et sa douleur pour une hypocrisie barbare.
Ce droit, sous Constantin, passa aux ministres des autels ; alors les prêtres chrétiens montèrent publiquement dans les chaires, et les discours religieux succédèrent dans l’empire aux discours politiques. […] L’orateur commence par dire que jusqu’alors n’ayant pas manqué une occasion de célébrer tout ce qui avait été fait de grand par la divinité de Constantin, il regarderait comme un sacrilège, de passer sous silence quelque chose de bien plus grand que tout le reste, c’est la victoire sur Maxence.
Et lorsque ainsi mes jours auront passé sans bruit, que je meure vieillard plébéien ! […] Plusieurs règnes avaient passé, depuis Néron et ses nombreuses victimes.
Le papisme passe toujours en Angleterre pour une idolâtrie impie, et pour une servitude dégradante. […] Tous les genres divers d’intérêt qui appartiennent au passé et au présent, aux objets voisins et aux objets éloignés, étaient rassemblés dans un même lieu, et dans une même heure. […] Les officiers passaient une grande partie de leur temps avec lui et avec sa famille. […] Ces détails précis, ces conversations de soldats, cette peinture des soirées passées au coin du foyer, donnent à l’histoire le mouvement et la vie du roman. […] In the Gaelic tongue Glencoe signifies the Glen of Weeping : and in truth that pass is the most dreary and melancholy of all the Scottish passes, the very Valley of the Shadow of Death.
Quantité de choses qui échappaient dans le premier cas, au long desquelles on passait, pour ainsi parler, sans les apercevoir, apparaissent alors, surprennent et retiennent l’attention. […] Disons encore, si l’on le veut, que, pour détruire un état de choses abhorré, l’une et l’autre, et l’une après l’autre, elles ont pris ou cherché leur point d’appui contre le présent dans le passé. […] Dans aucun livre l’art n’a consisté plus manifestement à savoir s’en passer, et à se priver de tous les moyens, même les plus légitimes, d’intéresser la sensibilité du lecteur à la vérité de la doctrine que l’on enseigne. […] Que du Bellay a créé en France la « poésie intime » et la satire ; — Comparaison de ses élégies avec celles de Marot. — Il a la grâce, la délicatesse et la mélancolie. — Il a aussi l’ironie légère. — Pourquoi la flamme de ses poésies latines n’a-t-elle pas passé dans ses vers français ? […] Il n’y tombe pas encore tout à fait dans les Poèmes ; — et c’est qu’il lui faut auparavant passer par l’alexandrinisme, — [Cf.
Il croit savoir de l’homme tout ce qu’on en peut connaître ; il estime que le temps est passé de descendre en soi-même : in sese descendere, comme disait Montaigne ; et qu’au contraire le moment est venu d’en sortir. […] Ajouterons-nous après cela que le Discours de Turgot, écrit et prononcé en latin, par un inconnu, a passé presque inaperçu ? […] Pour les traductions de l’anglais, l’énumération seule en tiendrait ici plusieurs pages ; et l’on peut avancer sans exagération que, de 1725 à 1750, tout Pope et tout Addison, tout Swift et tout Richardson, sans parler des moindres, ont passé de leur langue en français [Cf. […] Voltaire écrit contre eux L’Homme aux quarante écus, qui n’est pas, à vrai dire, une de ses meilleures facéties, qui n’en réussit pas moins, dont le titre passe même en proverbe. […] Ils l’ont élevé au rang de cette « douzaine d’hommes » dont Diderot disait encore en 1762, que « sans s’élever sur la pointe du pied, ils le passeraient toujours de toute la tête » [Cf.
Ou, plutôt, un génie qui passe pour gaulois, et, je pense, ne l’est guère. […] — Voilà une singulière façon de passer le temps, dit le saint. […] Il passa parmi nous avec la constante préoccupation de l’en-deçà ou de l’au-delà de l’humanité. […] Et plusieurs passaient en pleurant. Et plusieurs passaient en riant.
Une fois, dit-on, ayant été vaincu à Bidford dans un de ces combats d’ale, il revint trébuchant, ou plutôt ne put revenir, et passa la nuit avec ses camarades sous un pommier au bord de la route. […] » Le prince qui les passe en revue lui dit qu’il n’a jamais vu de si pitoyables gredins : « Bon ! […] La mer entière passerait sur elles qu’elles garderaient la couleur du meurtre. « Ah ! […] Deux fins gentilshommes passent. […] Qu’elles passent sous vos yeux comme un songe charmant et rapide.
Je m’abstiens donc à regret de ces développements dans le passé ; je ne sortirai pas de notre siècle. […] Élu membre de l’Assemblée constituante, il avait déserté à propos, mais avec ménagement, les opinions et les croyances ruinées, pour passer au parti de la force et de l’avenir. […] Ce jeune homme, novice et inexpérimenté en diplomatie, n’était accrédité que par son titre auprès des hommes d’État du cabinet de Saint-James ; il passait pour être l’envoyé secret et actif du jacobinisme français auprès des factions anarchistes de Londres ; plutôt que l’ambassadeur loyal de Louis XVI auprès des ministres de la Grande-Bretagne. […] Le moment était passé ; ce n’était plus le cœur de l’empereur d’Autriche qui allait prononcer : c’était sa raison, c’était son cabinet, c’était son armée. […] Le prince de Talleyrand ne donnait que peu d’heures au sommeil ; il passait une moitié de sa nuit dans les salons aristocratiques de Londres ; il y semait ou il y recueillait négligemment ces mots qui deviennent le lendemain des indices ou des actes.
Ils y seroient nez d’eux-mêmes sans cela, ou du moins ils y seroient passez à la faveur du commerce. […] Ceux mêmes qui de nos jours ont passé en Angleterre pour les premiers peintres du païs n’étoient pas anglois. […] il en faut convenir de bonne foi, il y a environ dix ans que ce bon temps est passé. […] Non, mais ses jours heureux étoient passez. […] D’ailleurs, l’expérience de ce qui s’est passé depuis Paterculus, donne encore un nouveau poids à ses refléxions.
. — Quel dommage, n’est-ce pas, que le pauvre homme ait justement passé toute sa vie à écrire pour le théâtre ! […] Et, chaque fois, après des centaines d’heures passées à mon Théâtre, chacun s’en retournera dans son pays, l’âme agrandie et fortifiée par la seule audition de quoi ? […] Et, enfin, lorsque ceux-là même qui, de par le monde entier, haïront, de naissance, Ma Mu-sique, seront acculés jusqu’à se voir forcés de l’admirer et de l’applaudir quand même, sous peine de passer pour des imbéciles, je te dis et jure que Ma Mu-sique résistera même à leur admiration profane. […] L’Evocation d’Erdabb Souillées par l’Or — (l’anneau du Nibelung), — les trois antiques races périront, les Dieux, les Géants, et les Nains ; et le monde passera à la race nouvelle, innocente, des Hommes. […] Teodor de Wyzewa retient la conception musicale du philosophe qui place la musique au sommet de tous les arts, en ce qu’elle dévoile l’essence même des choses sans devoir passer par leur représentation.
Passez-moi cette imprécation contre le rire en poésie. […] Le titre et la forme d’entretien que nous avons donnés à ce Cours familier de littérature universelle, disent assez d’eux-mêmes que nous ne procéderons pas toujours méthodiquement dans cet inventaire des œuvres intellectuelles de l’homme ; mais que, pour éviter la monotonie, la satiété et l’ennui, ces fléaux de l’étude, nous passerons quelquefois d’un siècle à l’autre, d’un homme à l’autre, d’un livre à l’autre, avec la logique secrète des analogies, mais aussi avec la liberté de la conversation. […] La scène se passe sur un des plateaux de l’Himalaya, dont la description forme un des paysages les plus grandioses et les plus terribles que l’imagination d’un Salvator Rosa ait jamais conçus. Les chefs, les héros, les dieux y passent en revue, dans leur majesté et leur terreur, sous l’œil du poète. […] Non, non, je resterai ici, ô mon roi, dans ces sombres forêts pour calmer les peines qui te rongent, lorsque, accablé sous le poids de ces angoisses de la faim, de la soif, du froid, tu reportes un triste et lointain regard sur ta félicité passée !
Il les passait à lire ou à ramasser sur le rivage des coquillages et principalement des insectes, car il aimait l’histoire naturelle comme tous ceux qui en ont fini avec les hommes, et il s’était formé une collection entomologique « qu’un Swammerdam aurait enviée ». […] C’est à partir de cette soirée, qu’un mois passé, Poe, qui n’est pas retourné chez Legrand, voit arriver Jupiter, chargé d’une lettre qui n’est ni dans le style ordinaire, ni dans les habitudes épistolaires de son ami. […] En présence d’un oubli pareil, on se demande si le mutisme moral du poète a passé dans l’âme de son traducteur. […] Le spiritualisme apparent de l’inspiration d’Edgar Poe est du matérialisme, passé au filtre d’un esprit poétique, mais l’Amérique, la nation matérialiste par excellence, ne pouvait pas avoir un fils plus pur. […] Tout cela est agité, orageux, terrible, presque fou, et peut faire passer un frisson sur la peau et sur l’âme, mais n’y entre pas si l’on a une croyance solide, une foi religieuse, une certitude.
Il était mort sans bruit ; le concierge nouveau ne connaissait pas même son nom, il ne savait pas de qui je voulais parler. « Ce petit vieillard si bon et si gai, me dit-il, oui, on s’entretient encore de lui dans le quartier ; on l’a porté au cimetière du Mont-Parnasse ; ses livres de prières ont été son seul héritage. » Ainsi passe la mémoire d’un siècle, un à un et sans bruit ; puis l’histoire vient, qui nous raconte emphatiquement ses fables, et le monde croit que la terre était peuplée de géants, quand ces prétendus géants, bons ou mauvais, n’étaient que des hommes comme nous : major e longinquo ! […] Ses joues passaient continuellement du pourpre à la pâleur, et révélaient les bouillonnements et le reflux de son sang. […] Tout son passé lui apparaissait à l’heure de la mort. […] Les détenus de la Conciergerie, presque tous ennemis du rôle et du nom du duc d’Orléans dans la Révolution, se pressaient en foule dans les préaux, dans les corridors, dans les guichets, pour le voir passer. […] Mais la justice que l’on doit à la mort et la vérité qu’on doit à l’histoire passent avant ces retours que l’écrivain peut faire sur son propre temps.
Ainsi, Crébillon concevait ou empruntait à la Fable un caractère et une action atroces ; et pour les faire passer au théâtre, il altérait le caractère ou adoucissait l’horreur de l’action par des atténuations de pure fantaisie. […] Il n’en resta pas à ses premières insinuations contre le théâtre de ses devanciers ; il s’émancipa peu à peu du principe salutaire qu’il faut écrire pour être représenté et lu, et il fit passer le parterre avant le lecteur. […] Une certaine image des arts et de la civilisation, à l’époque et dans le pays où se passe l’action, ajoute à l’effet dramatique le profit d’une notion d’histoire. […] Cependant la tristesse de Mérope, à la fois noble et tendre, son indifférence pour la possession d’une couronne qui ne doit pas passer sur la tête de son fils, l’ennui qu’on lui cause en lui parlant des intrigues de Polyphonte au milieu de ses angoisses sur le sort d’Égisthe, ce vide du pouvoir suprême pour une mère qui craint de n’avoir plus de fils, voilà des traits de nature ; et si la Mérope de Voltaire n’est pas une de ces vigoureuses créations auxquelles le génie du poète donne une existence historique, c’est du moins une admirable esquisse. […] Que Gengis-kan redevienne un moment Témugin, que Mahomet arrête sa course victorieuse pour parler d’amour à une esclave, soit : nous avons passé à Racine Mithridate amoureux ; ne soyons pas plus difficiles pour Voltaire.
Il y a donc des écrivains sur lesquels on pourrait se passer parfaitement d’une étude biographique. […] En fit deux parts dont il soulait passer L’une à dormir et l’autre à ne rien faire. […] Il paraît on a beaucoup étudié cette question, elle est intéressante jusqu’à un certain point il paraît que le bon La Fontaine fit des démarches auprès de Boileau pour que Boileau voulût bien retirer sa candidature afin de lui permettre de passer. […] Pour vous montrer la manière dont quelquefois ceux qui n’ont pas tout l’esprit qu’il faut avoir pour en avoir assez, parlent aux hommes de génie ; pour vous donner aussi l’idée d’un ton qui, certainement depuis, a complètement disparu des usages de l’Académie, je vous lirai le fragment suivant du discours de M. de La Chambre : « Ne comptez pour rien, monsieur, tout ce que vous avez fait par le passé. […] Les grands hommes se mesurent de loin, et ce n’est que lorsque les siècles ont passé qu’ils paraissent tout à fait supérieurs aux La Chambre.
Où il a passé, l’herbe ne repousse plus, ou, si elle repousse, c’est de la même herbe qu’il avait fauchée… Depuis Balzac, d’ailleurs, les mœurs parisiennes (et il n’est question dans l’étude de Daudet que de celles-là) n’ont pas assez changé, ne se sont pas assez renouvelées, pour que l’observateur y puisse découvrir de ces choses inattendues qui font à un livre qui les retrace une géniale originalité. […] Car voilà l’incroyable fascination du génie de Balzac, que ce qu’il n’a pas peint nous croyons le voir, et que nous le voyons dans ce qu’il a déjà peint, — comme on voit l’avenir dans le passé, disait Leibnitz. […] Où veut-on que le moraliste et le romancier prennent leurs modèles, si ce n’est pas dans des êtres réels qui ont passé devant leurs yeux, surtout quand ils peignent les mœurs de leur temps ? […] Alphonse Daudet, cette âme dans le talent, a mieux à faire maintenant qu’à regarder, du bout des yeux, une société qui passe et qui a été décrite jusqu’à épuisement. Il a à regarder dans l’âme humaine, qui ne passe point.
Il trouve moyen d’abord de passer le Rhin à Huningue (1er et 2 octobre 1702), en s’aidant d’une île qui coupe le cours du fleuve et qui laisse le plus petit bras du côté de la rive opposée. […] Il prenait tout le premier sa part à la peine en ne quittant presque pas la tranchée. « Il n’est pas nécessaire, lui disaient les ingénieurs, qu’un maréchal de France y soit si souvent. » — « Non, répondait-il, mais avouez que cela ne fait pas mal. » Je passe avec eux (avec les soldats) une partie de la nuit, écrivait-il au ministre ; nous buvons un peu de brandevin ensemble : je leur fais des contes, je leur dis qu’il n’y a que les Français qui sachent prendre les villes l’hiver. […] On ne suivit pas exactement la méthode de l’art dans l’attaque, et, sentant de la mollesse dans les assiégés, Villars passa sur quelques règles que le corps du génie a coutume d’observer. […] Il sentait à son tour le poids de la responsabilité : « Ce que je crains le moins, ce sont les ennemis, écrivait-il ; et dès que j’aurai passé le Rhin, mon salut consiste à les chercher partout, et je désire seulement qu’ils ne prennent pas le parti d’éviter le combat. » Louis XIV fut mécontent de ce raisonnement prolongé et de cette persistance de Villars dans son propre sens : Vous m’aviez bien mandé, lui écrivit-il (19 mars 1703), le besoin que vos troupes avaient de repos, et la nécessité de leur donner un mois ou cinq semaines pour se rétablir, faire joindre leurs recrues, et les réparations dont elles avaient besoin pour être en état d’agir plus utilement ; mais vous ne m’aviez pas donné lieu de croire que vous les feriez repasser dans l’Alsace ; je devais même être persuadé que vous les feriez cantonner de l’autre côté du Rhin.
La vertu devient alors une impulsion involontaire, un mouvement qui passe dans le sang, et vous entraîne irrésistiblement comme les passions les plus impérieuses. […] Il est impossible que, dans un état libre, l’autorité publique se passe du consentement véritable des citoyens qu’elle gouverne. […] La force se passe du temps, et brise la volonté ; mais par cela même elle ne peut rien fonder parmi les hommes. […] La philosophie peut quelquefois considérer les souffrances passées comme des leçons utiles, comme des moyens réparateurs dans la main du temps ; mais cette idée n’autorise point à s’écarter soi-même, en aucune circonstance, des lois positives de la justice.
À Lyon, il y a plus de vingt mille ouvriers en soie qui sont consignés aux portes ; on les garde à vue, de peur qu’ils ne passent à l’étranger. » À Rouen616 et en Normandie, « les plus aisés ont de la peine à avoir du pain pour leur subsistance, le commun du peuple en manque totalement, et il est réduit, pour ne pas mourir de faim, à se former des nourritures qui font horreur à l’humanité » « À Paris même, écrit d’Argenson617, j’apprends que le jour où M. le Dauphin et Mme la Dauphine allèrent à Notre-Dame de Paris, passant au pont de la Tournelle, il y avait plus de deux mille femmes assemblées dans ce quartier-là qui leur crièrent : Donnez-nous du pain, ou nous mourrons de faim. » — « Un des vicaires de la paroisse Sainte-Marguerite assure qu’il a péri plus de huit cents personnes de misère dans le faubourg Saint-Antoine depuis le 20 janvier jusqu’au 20 février, que les pauvres gens expiraient de froid et de faim dans leurs greniers, et que des prêtres, venus trop tard, arrivaient pour les voir mourir sans qu’il y eût du remède. » — Si je comptais les attroupements, les séditions d’affamés, les pillages de magasins, je n’en finirais pas : ce sont les soubresauts convulsifs de la créature surmenée ; elle a jeûné tant qu’elle a pu ; à la fin l’instinct se révolte. […] L’intendant de Bourges marque qu’un grand nombre de métayers ont vendu leurs meubles, que « des familles entières ont passé deux jours sans manger », que, dans plusieurs paroisses, les affamés restent au lit la plus grande partie du jour pour souffrir moins. […] En guenilles, pieds nus, ne mangeant que du pain noir, mais couvant dans son cœur le petit trésor sur lequel il fondait tant d’espérances, il guettait l’occasion, et l’occasion ne manquait pas. « Malgré tous ses privilèges, écrit un gentilhomme en 1755651, la noblesse se ruine et s’anéantit tous les jours, le Tiers-état s’empare des fortunes. » Nombre de domaines passent ainsi, par vente forcée ou volontaire, entre les mains des financiers, des gens de plume, des négociants, des gros bourgeois. […] Vers 1760, un quart du sol dit-on, avait déjà passé aux mains des travailleurs agricoles.
« Quand les poèmes de Moïse, de David, d’Isaïe, ne nous auraient été donnés que comme des productions purement humaines, ils seraient encore, par leur originalité, par leur antiquité, dignes de toute l’attention des hommes qui pensent, et, par les beautés littéraires dont ils brillent, dignes de l’admiration et de l’étude de ceux qui ont le sentiment du beau. » Lisons donc ces chants inspirés ; ils ont passé par des bouches humaines, et, sous ce point de vue au moins, ils ressortent du jugement humain. […] » VIII Pendant que cela se passait à Bethléem, à l’insu de Saül et de l’armée, le roi est saisi d’un de ces accès de démence que la musique seule, ce remède de l’âme, a le don de calmer. […] Amène-le-moi donc, car il est le fils de la mort. » XV Mais tout se passa comme il avait été convenu entre Jonathas et son ami. […] C’est que ce poète était plus qu’un poète ; il était l’inspiré de l’humanité passée et de l’humanité future.
Mais alors, loin de s’en passer, personne ne l’a plus fortement exigée que Boileau, puisqu’il en fait l’élément primordial, la condition sine qua non de la poésie. […] Qui veut se passer d’elle, ou la dévier, quand il aurait toute la science et toute la patience du monde, ne fera rien qui vaille. […] Entre la fadeur et la finesse, entre l’enflure et le grotesque, la simple nature et la réelle humanité passaient inaperçues, inexprimées. […] En peinture, on peut se passer peut-être du romantisme et du lyrisme, et y gagner ; mais il n’y a point de littérature qui, si elle n’a pas de poésie lyrique, ne soit amoindrie et découronnée.
Dès le xiie siècle encore, et même avant (car le Poème de la Passion est du xe ), on fit passer en langue vulgaire tantôt par des traductions, tantôt par des imitations, tantôt, et d’abord, en vers, tantôt, et de bonne heure, en prose, les principaux récits de la Bible et de l’Évangile : au point que l’Église s’inquiéta parfois de voir les sources du dogme trop libéralement ouvertes à l’ignorance téméraire des laïcs. […] De saint Basile, à qui Ulysse abordant à l’île des Phéariens représentait la vertu toute nue, auguste et vénérable dans cette nudité même, de Fulgentius Planciades, à qui l’Enéide racontait les voyages de l’âme chrétienne, de Prudence, qui faisait battre les vertus et les vices dans sa Psychomachie de Martianus Capella, qui mariait en justes noces Mercure et la philologie, l’allégorie passa aux clercs scolastiques qui en firent leur instrument favori d’interprétation et de recherche, l’explication allégorique d’un texte fut légitime et nécessaire ainsi que l’explication littérale, et même au-dessus d’elle. […] Les phénomènes passent, les individus meurent : l’espèce seule a de la réalité, seule elle est, parce que seule elle reste. […] Mais l’œuvre délicate de Joinville exprime surtout ce qui va périr, elle est déjà le passé ; l’œuvre grossière de Jean de Meung exprime ce qui va germer et grandir, elle contient l’avenir.
Le drame romantique offrira de plus une évocation pittoresque du passé. […] Puis ce fut la grande journée du 25 février 1830, la bataille d’Hernani : la censure laissant passer la pièce pour faire exécuter le romantisme par le public, tant elle estimait impossible le succès d’une telle extravagance ! […] Ténébreux, fatal, amer, il sort on ne sait d’où, il passe enveloppé d’un triple prestige de mystère, de crime et d’amour : le Giaour, Lara, le Corsaire, ces incarnations de la sensibilité misanthropique de Byron, sont les modèles d’après lesquels nos robustes et bien portants poètes, le joyeux Dumas, le solide Hugo, ont dressé le type de leur héros, bâtard ou enfant trouvé, victime ou ennemi de la société, désespéré, magnanime et tout débordant de tendresses séduisantes : Antony est plus brutal, Didier plus pleurard. […] Hugo nous a donné avec puissance la vision poétique du passé : en dépit des extravagances de l’action, Ruy Blas évoque devant nos yeux l’effondrement de la monarchie espagnole, l’épuisement de la dynastie autrichienne à la fin du xviie siècle ; et les Burgraves ressuscitent dans notre imagination l’effrayante, la confuse grandeur de l’Allemagne féodale.
Je n’essayerai même pas de passer en revue les pages innombrables sorties de la plume aisée et robuste de M. […] Mais enfin, quand il saute d’une scène à l’autre, il ne nous cache pas qu’il a pu se passer bien des choses dans l’intervalle. […] Et, comme tout se passe en dialogues, il faut bien, le plus souvent, que les personnages se révèlent à nous par leurs propres discours, même quand ces discours ont dans leur bouche quelque chose d’un peu surprenant. […] Les mots importants, significatifs, doivent se détacher, être comme « lancés », non seulement par l’acteur, mais d’abord par l’écrivain, de façon à passer la rampe. « Il y a un style de théâtre comme il y a un style d’oraison funèbre, un style de traité de philosophie, un style de journal. » Souvent la situation initiale suppose des événements antérieurs qui ont quelque chose d’extraordinaire et d’invraisemblable.
Voici les réponses que nous avons reçues : Jules Bertaut 1º Ce qui manque le plus à une époque très productive comme la nôtre, c’est moins un Sainte-Beuve qu’un Faguet, moins un grand écrivain capable de juger le passé avec toutes ses finesses et de le reconstituer dans tous ses détails qu’un esprit très clair, toujours averti et sans préjugé de confession religieuse ou d’opinions politiques, qui débrouille sans cesse le chaos du présent. […] Mais la presse jette des poignées de noms pêle-mêle et passe : il reste à faire l’indispensable sélection, c’est-à-dire le principal. […] En effet, passez cinq ans, dix ans, à faire une œuvre pensée, méditée, intensément sentie, où vous aurez mis tout votre cœur, toute votre flamme, tout votre art, et vous aurez dix-neuf chances sur vingt de voir cette œuvre tomber dans un monde sourd et muet. […] Il faudrait maintenant reprendre cette analyse historique où Gourmont l’a laissée, car il s’est tout de même passé certaines choses depuis cette époque symboliste qui paraît déjà vieille.
Bon nombre de propositions ont été tenues pour inconcevables, qui sont maintenant passées dans la science à l’état de vérités incontestées : ainsi l’existence des antipodes, ainsi l’existence de la gravitation, que les cartésiens repoussaient parce qu’ils jugeaient impossible un mouvement sans contact. […] C’est à tort que les logiciens considèrent le dictum de omni et multo, comme la base de tout raisonnement ; en réalité, « toute inférence est du particulier au particulier. » « Non-seulement nous pouvons conclure du particulier au particulier sans passer par le général, mais nous ne faisons presque jamais autrement. » « Toutes nos inférences primitives sont de cette nature. Dès les premières lueurs de l’intelligence, nous tirons des conclusions, mais des années se passent avant que nous apprenions l’usage des termes généraux. […] Dès lors, si deux faits ou groupes de faits sont tels que l’expérience nous les ait montrés jusqu’ici (sans exception connue) dans un rapport de succession invariable et inconditionnelle, il en résulte que l’un des termes donne l’autre, auquel il est indissolublement lié ; que si nous tenons la cause, nous pouvons inférer l’effet ; que si nous connaissons l’effet, nous pouvons inférer la cause, et que le passage s’opère ainsi légitimement du connu à l’inconnu ; que, d’ailleurs, l’uniformité des causes supposant celle des effets et réciproquement, nous passons ainsi du particulier au général.
Si de la question de principe nous passons à la question de fait, nous trouverons que Tocqueville n’a peut-être pas aperçu complètement ni tous les périls ni tous les avantages de la démocratie. […] Il dit avec raison : « Éclairez les hommes à tout prix, car je vois approcher le temps où la liberté, la paix publique et l’ordre social lui-même ne pourront se passer de lumières. » Est-il donc contraire aux lumières de cultiver la vertu pour elle-même, et d’obéir au devoir, parce qu’il est le devoir ? […] Albert de Broglie la question suivante, qui, de la part d’un écrivain, un peu suspect de libre pensée, ne laisserait pas que de passer pour indiscrète : « Pourquoi la religion chrétienne, qui, sous tant de rapports, a amélioré l’individu et perfectionné l’espèce humaine, a-t-elle exercé, surtout à sa naissance, si peu d’influence sur la marche de la société ? […] Il reste donc toujours à examiner comment les choses se passent, et ce qui advient des principes abstraits, lorsqu’ils sont réalisés par les hommes et parmi les hommes.
Dieu semble les produire afin de se prouver ; Il prend pour les pétrir une argile plus douce, Et souvent passe un siècle à les parachever. […] Vos désirs inconnus, sous l’arceau triomphal, Dont votre esprit en songe arrondissait la voûte, Passent assis en croupe au dos de leur cheval. […] Un poëte a essayé d’exprimer ces sensations subtiles dans des vers dont la sincérité peut faire passer la bizarrerie : Delacroix, lac de sang, hanté des mauvais anges, Ombragé par un bois de sapins toujours vert, Où, sous un ciel chagrin, des fanfares étranges Passent comme un soupir étouffé de Weber30.
Il n’est pas bon, même quand on étudie le passé, de rester sur ces impressions décourageantes, et je veux indiquer l’antidote après le poison, un poème d’honneur et de courage en face de ce tableau d’hypocrisie consommée et de rouerie impudente. […] Messire Geoffroi de Boves, l’un de ses compagnons, lui répondit : Bois ton sang, Beaumanoir, la soif te passera. Ce jour aurons honneur : chacun y gagnera Vaillante renommée…………………… Et Beaumanoir, que cette parole enflamme, se remet si vivement à l’action que, de colère et de douleur, la soif lui passa.
Ce paysan, ce fils de fermier, arrivé de son village, beau garçon de dix-neuf ans, entré comme domestique chez son seigneur, une espèce d’enrichi ; puis rencontré sur le Pont-Neuf par la dévote Mlle Habert, beauté de plus de quarante-cinq ans, dont il devient le mari après quatre ou cinq jours, passe presque aussitôt à l’état d’homme comme il faut, à qui il ne reste qu’un peu de gaucherie et de rouille provinciale ; et encore la secoue-t-il bien lestement. […] 81. » Il mêlait aux éloges, aux beaux noms de La Bruyère et de Théophraste qu’il ne craignait pas d’appliquer à notre auteur, quelques réserves et quelques censures morales, en priant son nouveau confrère de les lui passer et de les mettre sur le compte du ministère saint dont il était chargé. […] Tous les contemporains, Voisenon, Marmontel, Grimm, s’accordent à dire que vers la fin, et sentant que son moment de faveur était passé, Marivaux était incommode et épineux dans la société par trop de méfiance ; il entendait finesse à tout ; « on n’osait se parler bas devant lui sans qu’il crût que ce fût à son préjudice ».
Après des assemblées tenues à Soissons et à Compiègne, et où les principaux croisés n’avaient pu s’accorder ni sur la date du départ ni sur la route à suivre, il fut résolu que l’on s’en remettrait à six messagers ou députés, à qui l’on donnerait pleins pouvoirs par lettres afin de traiter des voies et moyens d’exécution, et de passer les marchés pour l’embarquement et le transport De ces députés, deux furent nommés par Thibaut, comte de Champagne, deux par Baudouin, comte de Flandre, et deux par Louis, comte de Blois ; c’est-à-dire que les commissaires choisis représentaient en nombre égal les trois seigneurs les plus qualifiés et les plus puissants d’entre les nouveaux croisés. […] Les commissaires, après vingt-quatre heures de réflexion, en passèrent par ces articles, qui ne leur parurent avoir rien d’excessif, et qu’on ne voit pas qu’ils aient songé à débattre. […] Je traduis, ou plutôt je transcris avec le moins de rajeunissement possible, cette scène qui se passa dans la chapelle de Saint-Marc.
Pendant deux ans, la négociation passa par toutes les phases qu’on peut imaginer, parfois semblant toucher au terme, le plus souvent pénible et laborieuse, et à certains moments désespérée. […] Lui et ses collègues, au nom de la France, conclurent en janvier 1608 un traité de ligue et d’alliance défensive avec les États-Généraux des Provinces-Unies, traité qui avait cet avantage de ne pas faire dépendre la fortune de la république de la paix dont on allait discuter les conditions, de la mettre à même de s’en passer ou de n’y adhérer qu’à bon escient. […] Notre passé est riche pourtant, plus riche encore que nous ne le croyons ; il suffit d’y pénétrer par une étude un peu courageuse pour en dégager maint personnage antique et d’autant plus frappant de nouveauté.
Au moment le plus critique de l’expédition, et lorsqu’il s’agit de savoir si après des mois d’attente au fond du Portugal devant les lignes inexpugnables de Torrès-Vedras, sans secours reçus, on passera ou non le Tage, et à quel parti on s’arrêtera, il y a un déjeuner chez le général Loison à Golgao, où, dans une sorte de conseil de guerre amical, on a en présence et en action la physionomie, le caractère et les idées des principaux chefs consultés par Masséna : c’est un récit des plus piquants, et qu’il n’eût tenu qu’à l’historien de rendre plus piquant encore ; mais M. […] Je voudrais que l’historien, quand il n’est pas tout spécial et militaire, n’entrât dans cette voie de considérations qu’à son corps défendant, et qu’en tant que cela est strictement indispensable pour l’intelligence du fait tel qu’il paraît s’être passé. […] Chaque esprit d’historien porte en quelque sorte au dedans de lui son ordre de faits tels qu’il les voit et les conçoit dans le passé.
« Il avait la variété des tons, et passait du plaisant à l’accent élevé et poétique. » A ce portrait d’Halévy, tracé par M. […] » Déjà bien las et bien épuisé de santé, et revenant du Tréport où il avait passé d’assez bonnes semaines : « Allons, disait-il à un ami, je me sens mieux, je suis content ; il faut décidément que je prenne un congé sérieux de deux ou trois mois ; je reviendrai en ce petit lieu, j’y apporterai un opéra que je finirai : il faut que je fasse cela avant ma mort. » Et sur ce qu’une de ses chères enfants présente se récriait sur ce mot : « Aimes-tu mieux, reprit-il, que je dise que je le ferai après ma mort ? […] Villemain, lui en touchait un jour quelque chose : un vif sentiment de joie brilla sur son visage, mais ne fit que passer et disparut presque à l’instant : il craignait déjà de porter préjudice ou ombrage à un frère méritant et bien aimé.
Rien pour elle ne se passe comme pour un autre enfant. […] pourquoi lui prêter cette manie ou cette magie (c’est tout un), qui fait que partout où elle passe, où elle habite, elle apporte avec elle une sorte de régénération, une transfiguration, de vrais miracles ? […] Le moment des avances est dès longtemps passé ; vous êtes maître désormais.
Les formes sous lesquelles le passé apparaît aux hommes de notre temps, voilà pour le poëte la vraie réalité. » Il semblerait, d’après ce passage, que nous soyons autre chose que les très-proches contemporains de Napoléon. […] Antiquaire par son érudition allemande, poëte et philosophe par ses vues profondes et intimes sur l’histoire de l’humanité, familier avec les idées des Niebühr et des Gœrres, épris de l’imagination pittoresque de l’auteur de l’Itinéraire, il aborde la Grèce et l’interroge par tous les points, sur son antiquité, sur ses races, sur la nature de ses ruines, sur les vicissitudes de ses États, sur ses formes de végétation éternelle ; il saisit, il entend, il compose tous ces objets épars ; il les enchaîne et les anime dans un récit vivant, fidèle, expressif, philosophique ou lyrique par moments, selon qu’il s’élève aux plus hautes considérations de l’histoire des peuples, ou selon qu’il retombe sur lui-même et sur ses propres émotions ; c’est une œuvre d’art que ce récit de voyage : le sens historique et le sens des lieux y respirent et s’y aident d’un l’autre ; l’harmonie y règne ; le souffle du dieu Pan y domine ; l’interprétation du passé, depuis les époques cyclopéennes et homériques jusqu’à la féodalité latine, y est d’un merveilleux sentiment, et elle pénètre de toutes parts dans l’âme du lecteur, sinon toujours par voie claire et directe, du moins à la longue par mille sensations réelles et continues, comme il arriverait à la vue des ruines mêmes et sous l’influence du génie des lieux. […] En vain, des races se sont mêlées ou renouvelées ; sitôt qu’elle retombe dans la solitude, elle reprend, comme si rien ne s’était passé, le début de son ancien poëme, et recompose incessamment le premier tableau de l’épopée. » Or c’est précisément ce début de l’ancien poëme pélasgique, ce tableau si obscurci de l’épopée primitive dont on retrouve à tout moment les vestiges confus, mais certains, et les débris parlants, si l’on suit le voyageur au mont Ithôme, au mont Lycée, à Tyrinthe.
N’importe, s’écrieront quelques âmes ardentes, n’exista-t-il qu’une chance de succès contre mille probabilités de revers ; il faudrait tenter une carrière dont le but se perd dans les cieux, et donne à l’homme après lui, ce que la mémoire des hommes peut conquérir sur le passé : un jour de gloire est si multiplié par notre propre pensée qu’il peut suffire à toute la vie. […] Tant d’actions composent la vie d’un homme célèbre, qu’il est impossible qu’il ait assez de force dans la philosophie, ou dans l’orgueil, pour ne reprocher aucune faute à son esprit : le passé, prenant dans sa pensée la place qu’occupait l’avenir, son imagination vient se briser contre ce temps immuable, et lui fait parcourir en arrière, des abymes aussi vastes que l’étaient, en avant, les heureux champs de l’espérance. […] n’est plus un bonheur accordé à celui que la passion de la gloire a dominé longtemps ; ce n’est pas que son âme soit endurcie, mais elle est trop vaste pour être remplie par un seul objet ; d’ailleurs, les réflexions que l’on est conduit à faire sur les hommes en général, lorsqu’on entretient avec eux des rapports publics, rendent impossible la sorte d’illusion qu’il faut, pour voir un individu à une distance infinie de tous les autres : loin aussi que de grandes pertes attachent au genre de bien qu’il reste, elles affranchissent de tout à la fois ; on ne se supporte que dans une indépendance absolue, qui n’établit aucun point de comparaison entre le présent et le passé.
Si vous êtes traversés dans vos projets pour acquérir et conserver la gloire, votre esprit peut s’attacher à l’événement qui, tout à coup, a interrompu votre carrière, et se repaître d’illusions, plus faciles encore dans le passé que dans l’avenir. […] C’est dans la crise d’une révolution qu’on entend répéter sans cesse, que la pitié est un sentiment puérile, qui s’oppose à toute action nécessaire, à l’intérêt général, et qu’il faut la reléguer avec les affections efféminées, indignes des hommes d’état ou des chefs de parti ; c’est au contraire au milieu d’une révolution que la pitié, ce mouvement involontaire dans toute autre circonstance, devrait être une règle de conduite ; tous les liens qui retenaient sont déliés, l’intérêt de parti devient pour tous les hommes le but par excellence : ce but, étant censé renfermer et la véritable vertu et le seul bonheur général, prend momentanément la place de toute autre espèce de loi : hors dans un temps où la passion s’est mise dans le raisonnement, il n’y a qu’une sensation, c’est-à-dire, quelque chose qui est un peu de la nature de la passion même, qu’il soit possible de lui opposer avec succès ; lorsque la justice est reconnue, on peut se passer de pitié ; mais une révolution, quel que soit son but, suspend l’état social, et il faut remonter à la source de toutes les lois, dans un moment où ce qu’on appelle un pouvoir légal, est un nom qui n’a plus de sens. […] des guerriers pendant la paix, des génies dans l’art de la guerre, alors que toutes les pensées se tourneront vers la prospérité de l’intérieur, et que les dangers passés laisseront à peine des traces.
. — Quand nous l’en séparons, nous faisons comme l’homme qui dirait, en parcourant tour à tour les divisions de la planche : « Cette planche est ici un carré, tout à l’heure elle était un losange, là-bas elle sera un triangle ; j’ai beau avancer, reculer, me rappeler le passé, prévoir l’avenir, je trouve toujours la planche invariable, identique, unique, pendant que ses divisions varient ; donc elle en diffère, elle est un être distinct et subsistant, c’est-à-dire une substance indépendante dont les losanges, le triangle, le carré, ne sont que les états successifs. » Par une illusion d’optique, cet homme crée une substance vide qui est la planche en soi. […] Comme on l’a montré, cette trame peut être considérée à deux points de vue, soit directement, en elle-même et par la conscience, soit indirectement, par la perception extérieure et d’après les impressions qu’elle produit sur nos sens. — À côté des idées, images et sensations, événements fort composés dont nous avons conscience et que cette particularité distingue des autres événements analogues, sont d’autres événements rudimentaires et élémentaires du même genre, dont nous n’avons pas conscience, et que dénote l’action réflexe : tel est le premier point de vue. — À côté des mouvements moléculaires fort composés qui se passent dans la substance grise des lobes cérébraux et des centres dits sensitifs, sont d’autres mouvements moléculaires analogues et moins composés qui se passent dans la substance grise de la moelle et dans les ganglions du système nerveux sympathique170 ; tel est le second point de vue. — Le premier est le point de vue psychologique ; le second est le point de vue physiologique. — D’après le second, il y a dans l’animal plusieurs centres d’action nerveuse, les ganglions du grand sympathique, les divers segments de la moelle, les divers départements de l’encéphale, plus ou moins subordonnés ou dominateurs, plus ou moins simples ou compliqués, mais tous distincts, mutuellement excitables, et doués des mêmes propriétés fondamentales. — D’après le premier, il y a dans l’animal plusieurs groupes d’événements moraux, idées, images, sensations proprement dites, sensations rudimentaires et élémentaires, tous plus ou moins subordonnés ou dominateurs, plus ou moins simples ou compliqués, mais tous distincts, mutuellement excitables, et plus ou moins voisins de la sensation. — En forçant les termes, on pourrait considérer la moelle comme une file d’encéphales rudimentaires, et les ganglions du système sympathique comme un réseau d’encéphales plus rudimentaires encore171.
Un souffle de charité évangélique a passé sur nous, et a fondu la dureté de notre naturalisme. […] Jules Lemaître960 a eu la même fortune que Renan : il a passé par le séminaire ; et puis, il a traversé l’École Normale. […] Quant aux œuvres, il est remarquable que du réalisme, insensiblement, par la force des choses, le Théâtre-Libre est passé au symbolisme.
À part le grand Anatole France — qui est si peu académicien — ces braves gens passent inaperçus et la plupart d’entre eux sont confondus avec les auteurs attitrés de Cluny et de Déjazet et les plus bas producteurs de romans-feuilletons. […] En devenant académicien, on revient aux traditions du passé noble et pour cela seul c’est peut-être agréable, sinon utile. Je vois très bien Henri de Régnier « Entrer dans le passé comme en un grand salon !
Sur un brouillard du soir, sur un violoniste qui passe, sur une danseuse qui s’en va, sur une bouquetière qui meurt, il a écrit des pages délicieuses qui méritent d’être conservées. […] Elles garderont, était-il dit, un juste tempérament, qui ne fasse pas rire les fous et qui ne contriste pas les sages, qui ne les fasse pas remarquer par la légèreté de la mode, ni par le ridicule d’un usage passé… Elles seront bien propres sans curiosité, nettes sans délicatesse, et bien mises sans afféterie. […] Elle n’aurait pas été languir et mourir dix-huit ans dans l’exil, comme tant de souverains dépossédés, elle qui avait passé ses belles années à se créer une petite principauté et un petit trône.
Des actes farouches s’accomplissent, une mort soudaine, une tentative de viol, le double assassinat d’une vieille usurière et d’une mûre mystique ; et ces faits se répercutent en d’infinis affolements ; l’on assiste au trouble naissant puis despotique et mortel que cause, en une pauvre cervelle de petite fille, le souvenir d’un passé de cruauté et de souffrance ; dans Crime et châtiment l’horrible fièvre du remords sévit, étreint le meurtrier, le relâche, l’endurcit, le rompt et le prosterne en une faiblesse mêlée de férocité et de désespoir, jusqu’à ce que, cerné par la société, retranché de sa famille et renié de lui-même, il trouve auprès d’une humble fille le secret oublié des larmes et la paix du châtiment. […] Il aperçoit des gens qui gesticulent et passent, qui pleurent, qui prospèrent, qui nuisent, qui meurent, et rien ne s’explique dans le trouble de son esprit, sinon que très clairement tous soutirent et font souffrir. […] Malade de la névrose épileptique, ayant passé en sa jeunesse par le choc effroyable d’une condamnai ion à mort, et gracié les pieds sur l’échafaud, pour aller traîner des années dans un bagne en Sibérie avec toute la vermine d’une société primitive, il vécut ensuite sous le ciel, « saturé d’encre », de Saint-Pétersbourg, et promena dans cette sombre ville, dure aux pauvres, sa silhouette râpée.
Ce n’est plus une action qui se passe en nature, c’est une action apprêtée, compassée, qui se joue sur la toile. […] Cependant, comme sur un visage où régnait la douleur et où l’on a fait poindre la joie, je retrouverai la passion présente confondue parmi les vestiges de la passion qui passe, il peut aussi rester au moment que le peintre a choisi, soit dans les attitudes, soit dans les caractères, soit dans les actions, des traces subsistantes du moment qui a précédé. […] De six à cinq figures, à peine en resterait-il deux ou trois sur lesquelles il ne fallût pas passer la brosse.
De la pension ils passent à l’école de Rome, où on ne les garde que quatre ans ; c’est trop peu. […] Il serait mieux qu’il n’y eût aucune distinction d’étrangers et de régnicoles, et qu’un anglais pût venir à Paris étudier devant notre modèle, disputer la médaille, la gagner, entrer à la pension, et passer à notre école française de Rome. […] Du reste, grande économie de crayon ; regard farouche, sourcils froncés, caractère d’indignation très-propre à passer dans une composition historique.
Et puisque nous en sommes à ces petites scènes et à ces historiettes vivantes du passé, représentons-nous bien les lieux et les gens comme ils étaient. […] Comme ceux qui sentent en eux un aiguillon secret de douleur et qui ont la vie rapide, l’abbé de Pons se prenait plus activement qu’un autre aux choses du jour, à la circonstance qui passe, et s’y jetait avec une vivacité et un feu qui faisaient de lui un excellent journaliste : ce n’est pas une raison pour nous de le mépriser.
Elle ne s’adressait pas au gros du siècle, à la masse de la jeunesse et de la population, que des affections et des croyances contraires entraînaient bien au delà ; mais, au sein du parti religieux et royaliste, elle cherchait à convaincre quelques esprits moins immobiles, moins irrémissiblement voués à l’entière tradition du passé, quelques âmes élevées et judicieuses, pures d’ambition, amoureuses de la vérité, et ne désespérant pas de la Providence, même dans des voies un peu nouvelles. […] Il est curieux et profitable pour nous et les jeunes hommes de notre bord, qui n’avons rien senti de cela, mais qui avons passé également par nos rêves, d’étudier ce côté nouveau, primitivement inhérent à des convictions adverses qui sont en train de nous revenir aujourd’hui.
Homme d’ordre, de probité ferme, de régularité judicieuse et laborieuse, d’amélioration sociale moyennant l’action administrative, il a surtout apprécié l’époque par cet aspect ; lui-même, dans son rang secondaire, il avait mérité l’estime de l’empereur ; son excellent travail de premier commis passait tous les soirs sous cet œil d’aigle. […] Georges se hâta de passer à Londres, et trois mois s’étaient à peine écoulés qu’il revenait en Bretagne pour diriger de là cette machine du 3 nivôse.
Par des extraits de voyages, par des traductions et des analyses d’ouvrages étrangers, par des études de toute espèce sur le passé, le Globe cherchait à mettre sous la main de ses lecteurs les principaux éléments des questions ; à leur représenter les travaux antérieurs et l’état de la science contemporaine sur chaque point de controverse ; à leur apporter et à leur distribuer en ordre les matériaux les plus complets pour les solutions les plus larges et les plus conciliantes. […] Car, nous y insistons, il y a, depuis le premier numéro du Globe jusqu’au dernier, dans sa pensée première, dans le but général qu’il poursuivait, dans une portion constante de sa direction et de ses travaux, une raison profonde pour qu’il ait suivi la marche qu’il a suivie, pour qu’il ait passé par ses transformations diverses, et pour qu’il soit aujourd’hui aux mains dans lesquelles il est.
. — Rapport de l’ordre et de l’originalité On affecte souvent de mépriser cette partie du travail qui consiste à disposer ses idées et à marquer d’avance tous les points de la route où l’on doit passer. […] Je ne sais que deux écrivains qui aient pu se passer d’être méthodiques sans y perdre.
Mousquetaire gris à dix-sept ans, mestre-de-camp de cavalerie, il est démissionnaire en 1702, de dépit de n’avoir pas passé brigadier : le roi, qui à cette date avait plus que jamais besoin d’officiers, et qui n’aimait pas les esprits si prompts à fixer leur droit, ne lui pardonna jamais d’avoir quitté l’armée. […] Il interrogeait sans cesse, âprement, avec une insistance de juge d’instruction, femmes, ministres, généraux, courtisans, diplomates, médecins, et même valets de chambre : de chacun il tirait une bribe du présent ou du passé.
L’époque où nous arrivons est une époque de transition : on peut hésiter si l’on doit la rattacher au passé ou à l’avenir. […] Le Journal des Débats, créé en 1789, prit un grand développement à partir de 1799, où il passa aux mains des Bertin ; il fit une large place à la littérature, et là, comme en politique, il représenta surtout les opinions, le goût, les aspirations de la classe bourgeoise.
Passez-moi cette sincère vanité. […] Le vrai roman de la jalousie serait : un amant vierge, une maîtresse vierge, ils se prennent, et la jalousie commence avec l’amour, parce que l’amour se voudrait un, et qu’ils sont deux, et que le spasme même divise, est jouissance, est égoïsme, parce que l’amant de la maîtresse la plus prise peut toujours serrer dans ses mains le front de son amie et dire comme un personnage de Shakespeare : « Que se passe-t-il dans cette petite tête ?
Les mécaniciens ont un mot, passé dans l’argot, pour désigner celui qui devine aisément le secret des rouages compliqués : « Il débine le truc », disent-ils. […] Mais il avait passé par l’école.
Le jour où elle passe dans les faits, c’est qu’elle est déjà presque entièrement accomplie dans les esprits. […] Si nous jugions uniquement d’après ce qui se passe de nos jours, nous pourrions affirmer qu’une certaine façon de concevoir l’art et le monde dure environ trente-cinq ou quarante ans.
Il étoit passé en proverbe de dire, cela est beau comme le Cid. […] Il voulut passer pour être l’auteur du Cid.
M. de Voltaire passe pour avoir innové à son tour ; mais la pratique qu’il suit & qu’il est parvenu à rendre assez commune, avoit été proposée avant lui. […] Si des contestations élevées au sujet de l’orthographe, nous passons à celles qu’à suscitées la prononciation, nous verrons encore les grammairiens divisés.
IX Cette distance du temps, cette décomposition des langues, ces morts et ces ensevelissements des empires qui parlaient ces langues, ont donc fait disparaître, dans le passé reculé du monde, d’immenses trésors de littérature. […] C’est cet inventaire que j’entreprends de parcourir avec vous, non par ordre de date, ce qui serait trop fastidieux, mais par catégorie de chefs-d’œuvre, ce qui nous permettra de passer d’un peuple à l’autre, et de l’antiquité à nos jours, avec une diversité de temps, de sujets et d’écrivains, qui soutiendra l’intérêt dans cette étude.
On peut dire même que ce n’en est pas un, puisqu’un apologue doit offrir une action passée entre des animaux, qui rappelle aux hommes l’idée d’une vérité morale, revêtue du voile de l’allégorie. […] Passe encor de bâtir ; mais planter à cet âge !
Il fait son compliment, et montre d’une main l’esprit-saint de ronde-bosse, à l’angle supérieur droit de la chambre, à la pointe du faisceau lumineux et fécondant qui passe sur la tête de la vierge et forme des sillons de bas-relief sur le fond. […] Un homme qui sent ne passe pas là-devant sans être tiré par la manche.
L’auteur de l’écrit contre les spectacles des anciens qui a passé pour être de saint Cyprien, l’appelle illas magnas tragicae vocis infanias. […] Pour entendre les passages des anciens, qui parlent de leurs représentations théatrales, il me semble necessaire de sçavoir ce qui se passe sur les théatres modernes, et même de consulter les personnes qui professent les arts lesquels ont du moins quelque rapport avec les arts que les anciens avoient, mais dont la pratique est perduë.
Il y eut aussi du succès, et ce fut ce succès immobilisé, passé à l’état de pagode, qui donna à la Revue Contemporaine l’envie naturelle d’exister et de s’établir sur un plan qui avait si bien réussi. […] … où la voyons-nous dans ces revues où passent les uns après les autres des gens d’esprit, des gens de science, des gens d’infiniment d’agrément, qui viennent tous déballer leurs petites curiosités devant le public, lequel se plaît à ces différents déballages ?
Nous demandions pour notre part que cette lubie des temps actuels lui passât très vite, et nous avions appris avec bonheur qu’il préparait un livre d’histoire sur une époque limitrophe à celles que, dans les Césars, il avait déjà étudiées et sur lesquelles il s’était montré si vivant, si compétent et si renseigné. […] Il n’a pas à perdre ou à compromettre un passé qui proteste contre ses productions plus récentes.
Nous nous disions qu’il aurait l’admiration révélatrice et féconde, et qu’il sortirait de la tourbe des gens d’esprit qui ont commenté, chacun à son tour, La Bruyère, et qui se sont efforcés — qu’on nous passe le mot en faveur de sa vérité ! […] Nous avons certainement beaucoup d’estime pour l’homme qui passe neuf ans de sa vie — une année de moins que pour prendre Troie — à purifier le texte imprimé d’un grand écrivain, à lui ôter, avec une loupe pour les voir mieux, ses plus imperceptibles grains de poussière, et à le rétablir dans toute la force et dans toute la beauté de ses points et de ses virgules ; mais il nous reste dans l’âme encore beaucoup d’estime que nous lui aurions offerte, et avec quel élan !
Elle donne à un de ses amis des leçons du bon sens le plus vulgaire, et pour faire passer le dur pédantisme de sa leçon elle ajoute gracieusement : « Si vous le prenez mal, vous êtes un sot ! […] Alfred de Musset, qui a gravé le sien dans celui de Madame Sand et à une telle profondeur qu’on ne peut plus effacer le chiffre qu’ils forment pour la Postérité, n’apparaît, lui, qu’à la CXIIe lettre, et il ne fait que passer comme un pâle fantôme dans le clair-obscur de deux ou trois lettres dont on a épaissi l’obscurité.
Réjouissons-nous de ce que, grâce à l’initiative de l’Académie, nous puissions parler, sans être moine et à d’autres qu’à des moines, d’un des plus grands esprits du temps passé, qui eut le malheur moderne d’être moine. […] Jourdain, qu’elle peut se passer de démonstration !
Ce flot de vingt ans qui engloutirait tant de choses avait passé sur eux, ne leur laissant qu’une épitaphe. […] Un bout du prêtre passe, comme un bout de décoration !
Othon passa presque pour un grand homme pour avoir su mourir, et Pétrone, l’homme le plus voluptueux de son siècle, se donna la mort avec plus de tranquillité que Caton. […] Survivre à sa défaite, eût passé pour une lâcheté, et le suicide fut presque un devoir d’honneur pour les malheureux.
Plusieurs consécrations de ce genre passeront dans la loi des douze tables : quiconque violait la personne d’un tribun du peuple était dévoué, consacré à Jupiter ; le fils dénaturé, aux dieux paternels ; à Cérès, celui qui avait mis le feu à la moisson de son voisin ; ce dernier était brûlé vif. […] L’Empereur était à la porte, les lances baissées, les épées nues, tout prêt à user de la victoire ; cependant malgré sa colère, il laissa échapper tous les habitants qu’il allait passer au fil de l’épée.
D’autres n’ont eu qu’une existence virtuelle, laquelle, faute de conditions avantageuses, n’a point passé à l’acte. […] Et des siècles passeront avant que l’on entende de nouveau la gentille chanson qu’il portait en lui. […] France n’en reste pas moins toujours, au fond, la langue simple, précise, claire et sobre des grands auteurs des siècles passés. […] La représentation écrite des événements passés. […] Ochorowicz pouvait, à la rigueur, se passer de cette ingrédience.
C’est ce qui fait l’hypotypose, l’image, la peinture ; il semble que l’action se passe sous vos yeux. […] J’avoue que cette expression me paroit trop hardie dans une ode de Rousseau : pour dire que l’hiver est passé et que les glaces sont fondues, il s’exprime de cette sorte : l’hiver, etc. […] C’est passer de l’ordre idéal à l’ordre physique que d’imaginer un autre système. […] Il faut remarquer qu’il y a des actions et des sentimens qui passent sur un objet qui en est le terme. […] Le gout de toutes ces sortes d’ouvrages, heureusement, est passé.
Vous savez avec quelle dédaigneuse inadvertance on passe sur les compositions médiocres.
On auroit pu se passer d’apprendre qu’il naquit avec deux dents, & qu’on ne trouva pas de nourrice pour l’allaiter.
On pourroit se passer aujourd’hui de ces Lettres ; mais, du temps de Bongars, elles étoient utiles & agréables.
On dirait une âme d’enfant qui traduirait avec une simplicité candide ses éveils à la lumière, ses sensations d’aube, et qui, peu à peu, verrait s’évanouir tous ses rêves dans le crépuscule de la vie qui passe.
Et, par-dessus tout cela, passe un admirable Sursum corda !
José-Maria de Heredia Dans le volume intitulé : Les Alouettes, de nobles inspirations, des vers d’une langue élégante et colorée, d’une facture solide, nous font très favorablement augurer de ce poète qui, après de si illustres devanciers, a tenté de trouver des formes nouvelles pour dire le charme de l’amour, la mélancolie du passé et la beauté des choses.
Il a fallu un Le Kain, avec la prodigieuse renommée de Voltaire, pour faire passer cet étrange personnage de Gengiskan. […] Voltaire, en effet, dans cette pièce, a passé le but. […] » Faut-il donc mettre sur la scène tout ce qui se passe communément dans une maison ? […] Heureusement on ne les comprend pas ; le jeu de l’actrice les couvre ; elles passent sous le nom d’amour. […] Dans Voltaire, tout le premier acte se passe en vaines lamentations, en exclamations, en apostrophes.
Scènes de bal, en des décors de Boucher et de Watteau, évoquaient les chères ombres du siècle passé.
Ascagne, fils d’Énée, les introduisit dans Albe, d’où ils passèrent à Rome, et s’y perpétuèrent jusque sous les empereurs. […] La circonstance était favorable : la cour devait passer à Baïes les cinq jours consacrés à Cérès. […] Je ne me dissimule rien, je ne me passe rien. […] Passons à la seconde. […] Ceci se passa l’an 19 de Jésus-Christ, et pendant les années 5 et 6 du règne de Tibère.
Elles ont, dans leur fraîcheur juvénile, mieux et plus que la beauté du diable qui, comme on le sait, passe très vite.
« Mais si, comme on l’a dit et comme de notre temps on ne se lasse pas de le prouver, l’histoire est toujours à faire, cela est vrai surtout de l’histoire des lettres, où les tentatives nouvelles du talent, les disputes des écoles, les prétentions du paradoxe et les démentis de l’expérience font incessamment découvrir des points de vue négligés dans l’art, des enseignements utiles pour le présent, des encouragements à la vraie nouveauté, des préservatifs contre la fausse et stérile hardiesse, et toute une étude d’imagination et le goût à faire pour l’avenir, sur les monuments du passé. » M.
Avant de passer à la description du culte, il nous reste à examiner quelques sujets que nous n’avons pu suffisamment développer dans les livres précédents.
Non, — il les désavouait pour leurs crimes, pour leur inhumanité, mais il sentit en même temps ce qu’il y avait dans quelques-uns des plus fameux d’essentiellement patriotique, d’héroïque et d’invincible. « Et, après tout, comme il le disait un jour, parlant à Chateaubriand lui-même, ç’a été une bataille où chaque parti a eu ses morts. » Et le plus affreux de la crise passé, aux différentes phases du décours, comme il touche à point les moments essentiels, les occasions irréparables et fugitives ! […] Selon lui, en effet, dans le récit des plus circonstanciés qu’il nous offre des dispositions des puissances à ce congrès et des phases diverses par lesquelles on passa successivement, M. de Talleyrand, qui eut l’art et le mérite, dès le premier jour, de s’y faire une place digne de la France, n’aurait point été également habile à profiter de la situation qu’il s’y était faite ; il aurait dû tenter d’autres alliances que celles qu’il pratiqua, se rapprocher de la Russie et de la Prusse plutôt que de se lier avec l’Angleterre et avec l’Autriche.
Il excelle, à propos des nouveautés qui passent, à se tailler un sujet à part dans une étoffe souvent vulgaire qu’il rehausse aussitôt, à en détacher et à y découper pour son compte un personnage historique, une grande figure, un type, et il s’y applique, il s’y déploie avec sa vigueur d’expression, sa couleur éblouissante, avec son instruction et sa vaste lecture toujours neuve, originale, inventive et heureuse d’allusion et d’à-propos, qui n’a rien de banal ni d’usé dans ses citations, et qui même, lorsqu’elle sort d’un coffre antique, a la splendeur d’une étoffe d’Orient. « Quand je lis Saint-Victor, je mets des lunettes bleues », disait Lamartine. […] Il avait vu de trop près la politique ; il l’avait touchée et maniée dans ses secrets ressorts, il en savait les vanités, les corruptions et les turpitudes ; désappointé et désabusé, il passa les dernières années de sa vie dans une sorte d’exil, sevré du commerce des amis qui lui étaient chers.
Or il existe, parmi les œuvres de l’historien ecclésiastique Eusèbe, un discours grec qui passe pour la traduction d’un discours latin attribué à Constantin, et dans ce discours, qui n’est qu’une démonstration du Christianisme, l’Empereur s’appuie sur le témoignage des Sibylles, et particulièrement sur la IVe églogue qu’il produit et commente. […] « A mesure qu’on a plus d’esprit ; a dit Pascal, on trouve qu’il y a plus d’hommes originaux. » A mesure qu’on a plus de science et de sagacité dans l’érudition, on trouve qu’il y a plus de questions à se faire, et, là où un autre aurait passé outre sans se douter qu’il y a lieu à difficulté, on insiste, on creuse, et parfois on fait jaillir une source imprévue.
Quand vous avez regardé cette bonne et ouverte face d’honnête savant que porte Rabelais, passez à Calvin : ce profil fin et dur, ces lèvres minces, cette jolie main effilée et nerveuse, qui se lève impérieusement pour enfoncer un argument, vous donnent la sensation de l’homme. […] En 1536, il va à Ferrare, près de la duchesse Renée de France, revient secrètement en France, puis passe par Genève, où Farel le retient.
Le caractère absolutiste de la loi est atténué par plusieurs causes qui ont joué un rôle dans le passé et qui continuent encore à agir dans le présent. — L’une de ces causes est l’influence de la jurisprudence qui est une sorte de casuistique judiciaire, une adaptation du droit aux individus et aux cas particuliers. […] Elle est favorisée en partie par le droit lui-même qui fournil au justiciable, par ses variations et ses contradictions, des moyens de tourner la loi, d’opposer la loi à elle-même, de passer à travers les mailles du code.
Assurément, c’est une bien vaine existence que celle de l’érudit curieux qui a passé sa vie à s’amuser doctement et à traiter frivolement des choses sérieuses. […] Si le but de la science était de compter les taches de l’aile d’un papillon ou d’énumérer dans une langue souvent barbare les diverses espèces de la flore d’un pays, il vaudrait mieux, ce semble, revenir à la définition platonicienne et déclarer qu’il n’y a pas de science de ce qui passe.
D’un langage doucereux & compatissant, elle a passé avec rapidité à l’emportement & à la déclamation ; ses lumieres sont devenues des torches ardentes, prêtes à porter par-tout l’incendie ; la divine Tolérance s’est changée en Furie inexorable, pour renverser tout ce qu’on avoit respecté jusqu’alors : les vérités les plus saintes, les principes les plus sacrés, les devoirs les plus indispensables, le Ciel, la Terre, l’Autel, le Trône, tout auroit éprouvé ses ravages, si les hommes eussent été aussi prompts à pratiquer ses maximes, qu’elle étoit ardente à les débiter. […] Les Auteurs vivans, si nous en avons passé quelques-uns sous silence (comme cela est très-vraisemblable), ne doivent pas nous savoir mauvais gré de cet oubli : leur nom ou leurs Ouvrages ont échappé à nos recherches.
Qu’on ajoute « qu’en traitant de l’Agriculture en Vers, il n’est pas possible de n’avoir pas à parler des Vaches & de leur lait, des Porcs, des Veaux, des Cavalles, des Etalons, & qu’auqu’un de ces termes ne peut se souffrir dans les Vers sérieux ; qu’on ne peut y faire entrer les mots d’engaris, de coutre, d’arbre fruitier, de vesse, de choux, de foin, de poids, de chénevieres, de noisette, de tant d’autres choses qui ne peuvent pas plus se passer d’entrer dans un Poëme sur l’Agriculture, que dans le ménage de l’Homme des champs* ». […] Boileau, dans son Art poétique, a passé sous silence une infinité d’objets qui font néanmoins partie d’une poétique ; de là vient qu’en parlant de la Tragédie, il n’entre dans aucun détail sur la division des Pieces en Actes, des Actes en Scenes ; sur l’exposition, l’intrigue, le dialogue, les surprises, la catastrophe.
Deux ou trois années se passèrent, et un jour, M. […] C’était la copie des instructions rédigées par Kuranosuké, dont l’original existerait encore au temple de la Colline-du-Printemps, et qui, au milieu de recommandations relatives aux préparatifs du combat, à l’échange des mots de passe, etc., etc., contient ce curieux paragraphe : « Avant de partir, prenez médecine.
Passons, et abordons la question de choses, car la frivole querelle des romantiques et des classiques n’est que la parodie d’une importante discussion qui occupe aujourd’hui les esprits judicieux et les âmes méditatives. […] Sans parler des chantres sacrés, toujours inspirés par des malheurs passés ou futurs, nous voyons Homère apparaître après la chute de Troie et les catastrophes de l’Argolide ; Virgile, après le triumvirat.
La connoissance profonde qu’il avoit des auteurs Grecs & Latins, & l’usage qu’il en faisoit pour extraire les beautés originales & les faire passer dans notre langue, lui ont fait imaginer qu’il falloit tenir la même route. […] Les écrivains de nos jours en qui l’on voyoit encore des étincelles de ce beau feu qui animoit ceux du siècle passé, ont en vain crié contre cette déraison, & voulu sauver le goût égaré en France.
Ce professeur passerait ensuite à l’éclaircissement des faits les plus importants de l’Église, s’occupant particulièrement de celle des premiers siècles, et faisant remarquer à ses auditeurs la perpétuité de la foi, la chaîne de la tradition et du ministère, la forme ancienne du gouvernement ecclésiastique, ses vicissitudes, sa forme actuelle, la naissance des hérésies, l’origine des abus, le relâchement de la discipline, etc. […] Au demeurant, je supplie Sa Majesté Impériale de considérer qu’il ne faut point de prêtres, ou qu’il faut de bons prêtres, c’est-à-dire instruits, édifiants et paisibles ; que s’il est difficile de se passer de prêtres partout où il y a une religion, il est aisé de les avoir paisibles s’ils sont stipendiés par l’État, et menacés, à la moindre faute, d’être chassés de leurs postes, privés de leurs fonctions et de leurs honoraires et jetés dans l’indigence.
Mais si l’on perd ces années précieuses, si l’on les laisse écouler sans les mettre à profit, la docilité des organes se passe sans que tous nos efforts puissent jamais la rappeller. […] Quand la force du génie ramenera notre jeune peintre à une étude plus sérieuse de son art, parce que l’yvresse de la jeunesse sera passée, sa main et ses yeux ne seront plus capables d’en bien profiter.
Ces trente ans narquois sont passés maintenant, et les Mémoires mystificateurs n’apparaissent pas à l’horizon. […] Seulement, étiolés par cette diplomatie dans laquelle on avait déporté leur énergie, ils assistent, l’âme assombrie et l’esprit désarmé, aux événements qui passent devant eux et dont ils mesurent la portée avec la tristesse de l’impuissance ; et comme si ce n’était pas assez de les voir diminués par la diplomatie, cette rogneuse d’hommes, il faut qu’un autre diplomate comme eux, — et s’il ne l’est pas, il est digne de l’être, — le comte Adhémar d’Antioche, intervienne à chaque instant dans leur Correspondance et la coupe où bon lui semble, pour obéir, affaiblissement sur affaiblissement !
Quand l’auteur des Deux Masques va, par exemple, chercher l’Histoire, — dont il a besoin pour montrer jusqu’où plongent les racines du génie d’Eschyle et faire le lumineux décompte de ce qui est de la personnalité et de la race, — et qu’à travers l’antique Hérodote, et plus haut et plus loin qu’Hérodote, il va la chercher, cette fuyante histoire, jusque dans les derniers éloignements et les derniers effacements du passé, il la saisit et l’amène sous le regard par la force de la couleur, et il la pousse sur nous, pour ainsi dire, vainqueur des âges et des lointains ! […] Ses facultés ont en effet, dans ce livre, la nouveauté d’une perfection définitivement atteinte… L’énorme talent que ses innombrables feuilletons ont prouvé vient de réaliser enfin un de ces chefs-d’œuvre qui fixera sa renommée dans le silence de l’avenir, quand les turbulents bavardages du temps présent auront passé.
Elle passe dans sa nuée rose, et c’est tout. […] En racontant comme ils l’ont fait Marie-Antoinette, ce règne qui passe entre deux insultes : l’insulte de Louis XV, qui osa bien présenter madame Du Barry à la Dauphiné, femme de son fils, et l’insulte des Tricoteuses qui vouaient à la mort l’Autrichienne, ils n’ont raconté que la Reine, mais pas assez la femme du Roi.
N’être pas niais dans un temps comme le xixe siècle, où le génie lui-même peut glisser là-dedans… et où la niaiserie est passée presque à l’état de mysticité, halte-là ! […] En somme, il a toujours passé pour un gaillard d’érudition, très vif, très éveillé, très dispos, et dont la riche santé et le tempérament heureux ont dû inquiéter et mécontenter souventes fois ses maîtres, les bilieux ennuyés de l’Histoire majestueuse !
Elle passe dans sa nuée rose, et c’est tout. […] En racontant comme ils l’ont fait Marie-Antoinette, ce règne qui passe entre deux insultes : l’insulte de Louis XV, qui osa bien présenter Mme Du Barry à la Dauphine, femme de son fils, et l’insulte des Tricoteuses qui vouaient à la mort l’Autrichienne, ils n’ont raconté que la Reine, mais pas assez la femme du Roi.
Le ton si peu ému de son histoire, la sobriété de ses condamnations rapides, quand il condamne, passeraient peut-être pour de l’habileté, de l’habileté profonde, assez retorse pour ne pas appuyer. […] Mais c’est, surtout, quand il s’agit de l’homme redoutable envers lequel il était si facile à un écrivain comme Prescott d’être injuste, que ses paroles deviennent, à force d’impartialité, d’un grand poids : « Nous frémissons, — (je ne crois pas qu’il frémisse beaucoup, cet homme de race anglo-saxonne, fils de boucanier et de flibustier, mais passons-lui ce petit sacrifice à la rhétorique), — nous frémissons en regardant un tel caractère, — (il s’agit du monstrueux duc d’Albe), — mais, nous devons l’avouer, il y a quelque chose qui provoque notre admiration dans cette rigueur, dans cette inflexibilité, dans ce mépris de toute crainte et de toute faveur avec lesquels cette nature indomptable exécute ses plans !!!
Sa vie eût été différente, et sa gloire, dans la mémoire des hommes, serait mieux que ce trait de feu qui l’a traversée, mais qui a passé, et que le but de cette Correspondance est de raviver. […] le ton qu’on avait, en ce moment-là, à Paris, et qu’il prit bientôt, comme Alcibiade — cet autre Arlequin de l’Antiquité — prit le ton persan chez les Persans, déplut tout d’abord à cet homme que dix ans de travaux scientifiques avaient passé à leur empois… mais qui, en deux temps, fut désenglutiné et devint Français et Parisien, et tellement Parisien que quand il fut obligé de quitter Paris il eut le mal du pays d’un pays qui n’était pas le sien et qu’il emporta dans le sien pour lui gâter éternellement sa patrie !
Sa politique, à lui, est de l’histoire, et c’est de l’histoire où elle est, c’est-à-dire dans le passé, qu’il invoque, sous le nom de saint Louis et de la reine Blanche, en face de l’histoire telle qu’on veut la faire aujourd’hui sous le nom du comte de Chambord… Pour prendre Maurice de Bonald sur le pied hardi où il se donne, il faut évidemment être un chrétien comme lui, ayant inébranlablement dans l’esprit la conception de la monarchie comme elle a été réalisée depuis Clovis jusqu’à saint Louis, qui en fut l’idéal le plus pur et le plus élevé… Or, cette monarchie n’existait pas en soi et par elle-même. […] ce bon monseigneur de Labastida, archevêque de Mexico, s’y employa ardemment ; mais, à peine arrivé au Mexique, Maximilien ne tint aucun compte de ses promesses et se hâta de mécontenter les catholiques pour passer sous le joug des sectaires vous savez comme Dieu l’a châtié ; mais au moins il s’est repenti et il est mort en chrétien.
Pendant tout le temps qui nous en sépare, on eût passé pour un cœur bien dur si on avait dit, sans précaution, la vérité sur Gérard de Nerval, et le sentiment, cette niaiserie toujours triomphante dans les choses de l’esprit, se serait révolté, comme une femme à qui l’on dit des indécences. […] Ces compositions hybrides et morbides, mystérieuses, mystagogiques, qui traitent de magie et de surnaturalités et charrient dans leur flot noir ou brumeux toutes les superstitions et tous les songes de l’humanité, l’auteur des Illuminés les avait lues, et peut-être y avait-il cru, le temps de les lire ; car il n’était préservé par rien, ce sceptique à impression, qui se teignait pour une minute de tous les milieux par lesquels il passait, et qui nous a avoué quelque part qu’il avait été chrétien, polythéiste, mahométan, bouddhiste, enfin de dix-sept religions, tour à tour.
Tel est le fond du poème, tel est le motif de roman ou de romance qui, par le détail, devient épique et qui fait jaillir de la pensée du poète tout un monde grandiose, passionné, héroïque, infini, où passent des lueurs à la Corrége sur des lignes à la Michel-Ange ! […] Corrége, même par clartés qui passent !
… Ce Corneille qu’il nous exhibe, ne l’avons-nous pas déjà vu passer dans les pénombres des notices, des commentaires, des critiques, des biographies, de tout ce qui, en définitive, est l’Histoire avant qu’elle soit épurée et condensée en ce noyau lumineux auquel nul autre rayon ne peut plus s’ajouter ? […] il a eu peut-être ses raisons pour affecter cette froideur singulière, pour étouffer l’expression ardente, pour pâlir une couleur qui eût pu briller davantage, pour enfin avoir fait, qu’on me passe le mot !
Delbousquet peignent à la fois la beauté des sites et l’harmonie des êtres qui y passent.
Sainte-Beuve Je ne ferai que passer devant vous, couple conjugal qui unissez vos deux voix ; qui, après avoir perdu un enfant, votre unique amour, l’avez pleuré dans un long sanglot, et qui, cette fois, inconsolés encore, mais dans un deuil apaisé, avez songé à lui en composant des chants gradués pour les divers âges, continuant ainsi en idée, d’une manière touchante, à vous occuper, dans la personne des autres, de celui qui n’a pas assez vécu pour nous.
Ne fait-elle point passer devant nous les grâces des printemps disparus, des tendresses écoulées, des jeunesses évanouies ?
Louis Denise À son retour de la Palestine où il avait passé quelques années, Nouveau fut accueilli à Paris par un amour que le long isolement subi lui fit accepter avec une joie enfantine, une adorable reconnaissance.
Après avoir fait passer dans notre langue plusieurs morceaux intéressans de la Littérature Italienne, & avoir publié un excellent Dictionnaire historique des Artistes, en deux gros volumes in-8°, il a succédé à M. de Querlon dans la rédaction des Annonces & Affiches pour la Province ; & l’on s’apperçoit de plus en plus que cette Feuille n’a dégénéré ni du côté du style, ni rien perdu du côté de la solidité des principes, de la justesse, de la critique, & de l’honnêteté des jugemens.
Cet enfant passe et regarde en passant.
Passe sa vie à braconner des pièces de cinq francs — sur la lisière du Code pénal.
Brun, Antoine [Bibliographie] Chansons diverses : Fou, Amor, Nos démons, Ma promise, Prière d’amour, Je passe, oie (1890-1895).
En quarante strophes, l’auteur nous a fait passer par toutes les sensations de l’homme qui, lassé de la vie, s’est décidé à en trancher le fil lui-même.
Le passé français vit là-bas au cœur de tout Canadien et s’échappe des lèvres impersonnelles de M.
Les utopies passent, le mouvement qu’elles impriment à l’esprit d’un siècle persister se modère lui-même en se composant d’impulsions et de tendances divergentes, et reste ainsi salutaire, parce qu’il devient plus régulier. […] C’est donc sous cette forme que l’idée du progrès passe du moyen âge à la renaissance et au XVIIe siècle. […] Il n’est pas sans intérêt de passer rapidement en revue les plus célèbres, et de voir ce qu’en laisse subsister la pénétrante critique de M. […] Quand il rapporte des faits qui passent pour des présages, c’est d’un ton qui ne rappelle guère la naïve dévotion d’Hérodote. […] Il en suit l’histoire et les procédés à travers tous les échelons de la nature vivante et en a fait l’objet d’un traité spécial qui passe à bon droit pour son chef-d’œuvre en zoologie.
En d’autres cas, de grands arbres fossiles, encore demeurés debout sur le sol où ils ont vécu, nous fournissent la preuve que de longs intervalles de temps se sont écoulés, et que de fréquents changements de niveau ont eu lieu pendant le procédé d’accumulation : ce que nul n’aurait jamais supposé, si ces muets témoins des choses passées ne s’étaient conservés par un heureux hasard. […] En règle générale, des formations riches en fossiles, d’une puissance suffisante pour résister à des dénudations subséquentes, et pour persister inaltérées pendant de longues périodes, telles enfin qu’ont été dans le passé les formations secondaires, ne peuvent s’accumuler dans un archipel que durant des périodes d’affaissement. […] Si ces observations ont quelque justesse, nous ne pouvons espérer trouver dans nos formations géologiques un nombre infini de ces formes transitoires qui, d’après ma théorie, ont relié les unes aux autres les espèces passées et présentes d’un même groupe dans la chaîne longue et ramifiée des êtres vivants. […] De cette histoire nous ne possédons que le dernier volume, qui contient le récit des événements passés dans deux ou trois contrées. […] Tout ceci se passe sous les eaux : dès qu’une formation émerge, une autre série de faits contraires commence.
Il vit peu dans le monde, ou du moins il n’y donne qu’une partie extérieure de lui-même et ce qui est de représentation, il s’isole le reste du temps ; il passe des journées entières dans les forêts, au spectacle de la nature, et dans cette tour qui était son cabinet de travail. […] Foisset, d’après la tradition locale et d’après les nombreuses lettres qui lui ont passé sous les yeux, croit avoir le droit d’être moins favorable à la sensibilité et au cœur de Buffon : Je sens bien que je ne saurais vous persuader, me faisait l’honneur de m’écrire M. […] On devrait toujours se demander, quand on admire si fort un génie du passé : « Qu’aurait-il dit de cette manière d’être admiré12 ?
Mais, malgré ces traits à noter et bien d’autres, ce second sermon pour la Toussaint est pénible, je le répète, un peu obscur, et, si l’on veut retrouver Bossuet tout à fait grand orateur, il faut passer au troisième : ou plutôt, dans une lecture bien faite et bien conseillée de cette partie des œuvres de Bossuet, on devra omettre, supprimer et le premier sermon et le quatrième, qui ne sont que des canevas informes, ne pas s’arrêter à ce second, qui est difficultueux, et alors on jouira avec fraîcheur de toute la beauté morale et sereine de cet admirable troisième sermon prêché en 1669 dans la chapelle royale, et où Bossuet réfutant Montaigne, achevant et consommant Platon, démontre et rend presque sensibles aux esprits les moins préparés les conditions du seul vrai, durable et éternel bonheur. […] Si elle passe si vite, elle n’est point la vraie. […] Il prêchera Jésus dans Athènes, et le plus savant de ses sénateurs passera de l’Aréopage en l’école de ce barbare.
Plus je deviens vieux, plus je pense que c’est la meilleure chose pour un artiste qui aime véritablement son art. » — En octobre 1826, au moment d’une réunion avec sa mère, qu’il avait décidée à venir passer quelque temps à Rome, il écrivit au même ami M. […] Ma mère pense quitter Rome au printemps prochain : l’isolement où nous nous trouverons, mon frère et moi, ne sera pas assez long, j’espère, pour nous faire faire des retours trop sérieux sur les moments heureux que nous passons actuellement. […] J’ai anticipé en tout ceci sur les derniers sujets de réflexion familiers et chers à Léopold Robert ; car, passé trente ans, il aimait à moraliser de plus en plus : j’ai à revenir en arrière et à le suivre, en le citant surtout et en me servant de ses paroles.
Ce rêve qu’il décrit en détail et dont il nous donne toute la sensation et l’image, ce serait de passer tout un hiver seul cantonné sur ce haut mont, d’y avoir, sous un rocher capable de résister aux avalanches, une hutte assez solide et assez bien approvisionnée pour y vivre, et, là, spectateur curieux, observateur attentif, d’assister à des phénomènes qui n’ont jamais eu de témoin, de soumettre à des calculs, d’assujettir à des mesures le combat des éléments, la vitesse des vents, la puissance des neiges déplacées, les convulsions de l’air et de la terre : Non, s’écrie-t-il en se voyant à la place de l’observateur favorisé, non, ses jours ne seraient point livrés à l’ennui. […] Il n’avait que dédain pour ceux qui rapportaient l’origine d’une si grande secousse à tel objet particulier de leur dépit ou de leur aversion : L’heure des révolutions sonne, messieurs, disait-il (et c’est dans un discours qu’il eut à prononcer comme préfet à l’ouverture du lycée de Clermont sous l’Empire), — l’heure des révolutions sonne quand la succession des temps a changé la valeur des forces qui concourent au maintien de l’ordre social, quand les modifications que ces forces ont subies sont de telle nature qu’elles portent atteinte à l’équilibre des pouvoirs ; quand les changements, imperceptiblement survenus dans les mœurs des peuples et la direction des esprits, sont arrivés à tel point qu’il y a contradiction inconciliable et manifeste entre le but et les moyens de la société, entre les institutions et les habitudes, entre la loi et l’opinion, entre les intérêts de chacun et les intérêts de tous ; quand enfin tous les éléments sont parvenus à un tel état de discorde qu’il n’y a plus qu’un conflit général qui, en les soumettant à une nouvelle épreuve, puisse assigner à chaque force sa mesure, à chaque puissance sa place, à chaque prétention ses bornes… Cette manière élevée de considérer les choses contemporaines comme si elles étaient déjà de l’histoire, dispense de bien des regrets dans le passé et de bien des récriminations en arrière. […] Ramond, dont le talent semble destiné à être prostitué à des charlatans, élevait le divin Motier encore plus haut qu’il n’avait fait le divin Cagliostro, dans son journal intitulé L’Ami des patriotes, etc., etc. » Ramond ne passe point pour avoir été le rédacteur de L’Ami des patriotes, journal modéré d’ailleurs, rédigé alors par Regnault de Saint-Jean-d’Angély.
Le combat s’était passé tout ainsi qu’il l’avait craint ; M. de Strozzi avait été complètement battu, et, blessé lui-même, on le croyait en danger de la vie. […] On était environ à la mi-octobre, et le siège dura jusqu’au 22 avril suivant, six grands mois, pendant lesquels on passa par tous les degrés de privation, de souffrance, d’exténuation, entremêlés de dangers perpétuels, vaillamment et, on peut le dire, ingénieusement combattus. […] [NdA] Page 193 (les Études sur le passé et l’avenir de l’artillerie, par le prince Napoléon-Louis Bonaparte, 1846.
Il fallait avoir passé par la Ligue pour avoir ce sentiment-là. […] » Le roi, secouant la tête, lui répondit : « C’est un peuple : si mon plus grand ennemi était là où je suis, et qu’il le vît passer, il lui en ferait autant qu’à moi, et crierait encore plus haut qu’il ne fait. » Cromwell ne dirait pas mieux ; mais, comme le caractère d’un chacun imprime aux mêmes pensées une diverse empreinte, Henri IV ne laissait pas de rester, à travers cela, indulgent et bon, et, qui plus est, de gausser l’instant d’après comme de coutume. […] Et aux capitaines et soldats, touchant d’abord cette même corde de l’intérêt et du profit dans l’honneur, il disait : Mes amis, voici une curée qui se présente bien autre que vos butins passés : c’est un nouveau marié qui a encore l’argent de son mariage en ses coffres ; toute l’élite des courtisans est avec lui.
La première guerre de Frédéric, qui était un coup d’ambition et de jeunesse, la seconde guerre qui n’en était qu’une conséquence, ne passèrent point, même en Prusse, sans beaucoup de contradictions et de rumeurs. […] Le roi fait bâtir à son frère un palais à Berlin ; il lui donne en propriété le domaine et le château de Rheinsberg, où lui-même avait passé une partie de sa jeunesse. […] Pendant que je la lisais, je me rappelais bien souvent cette autre correspondance récemment publiée, si étonnante, si curieuse, si pleine de lumière historique et de vérité, entre deux autres frères, couronnés tous deux, le roi Joseph et l’empereur Napoléon ; et, sans prétendre instituer de comparaison entre des situations et des caractères trop dissemblables, je me bornais à constater et à ressentir les différences : — différence jusque dans la précision et la netteté même, poussées ici, dans la correspondance impériale, jusqu’à la ligne la plus brève et la plus parfaite simplicité ; différence de ton, de sonoréité et d’éclat, comme si les choses se passaient dans un air plus sec et plus limpide ; un théâtre plus large, une sphère plus ample, des horizons mieux éclairés ; une politique plus à fond, plus à nu, plus austère, et sans le moindre mélange de passe-temps et de digression philosophique ; l’art de combattre, l’art de gouverner, se montrant tout en action et dans le mécanisme de leurs ressorts ; l’irréfragable leçon, la leçon de maître donnée là même où l’on échoue ; une nature humaine aussi, percée à jour de plus haut, plus profondément sondée et secouée ; les plaintes de celui qui se croit injustement accusé et sacrifié, pénétrantes d’accent, et d’une expression noble et persuasive ; les vues du génie, promptes, rapides, coupantes comme l’acier, ailées comme la foudre, et laissant après elles un sillon inextinguible54.
Un grand génie comme le vôtre trouve des ressources quand même tout est perdu… Voltaire écrivait à Frédéric dans le même sens, et rachetait tous ses torts passés par le bon sens et la franchise de ses remontrances. […] La gravité, l’autorité de la parole, celle des doctrines, cette immortalité religieuse acceptée et passée dans le cœur, puisée à la source des croyances, qui s’étend de celui qui parle aux personnes qu’il célèbre et les revêt de leurs vertus épurées comme d’un linceul éblouissant et indestructible, tout cela manquait ; et, il faut le dire, la mémoire même de la généreuse et noble margrave n’y prêtait pas. […] Cela dit, ne confondons point les ordres ; laissons les existences diverses et les personnages du passé dans les cadres naturels que la réalité nous offre et où notre observation les décrit.
Suard, participa plus qu’une autre à ce besoin d’effacer les traces du passé et de se purger de toute roture révolutionnaire. […] Tout membre de l’Académie française passa dans l’opinion pour un gentilhomme littéraire qui en prend à son aise. […] Lacordaire fut mort depuis près d’une semaine, et que la première émotion de cette triste nouvelle fût passée, l’Académie, assemblée un jeudi, — le premier jeudi depuis qu’on avait reçu la lettre de faire part, — leva incontinent sa séance, après cette lettre entendue.
Quant à la personne même qui les a écrites, Saint-Simon, si sévère, si injuste pour l’illustre maréchal, son fils, a tracé d’elle, dans sa vieillesse, un portrait unique : « Cette marquise, nous dit-il, était une bonne petite femme sèche, vive, méchante comme un serpent, de l’esprit comme un démon, d’excellente compagnie, qui avait passé sa vie jusqu’au dernier bout dans les meilleures et les plus choisies de la Cour et du grand monde, et qui conseillait toujours « son fils de ne point donner de scènes au monde sur sa femme, de se vanter au roi tant qu’il pourrait, mais de jamais ne parler de soi à personne. […] Dès que la reine eut traversé la rivière de Bidassoa, et qu’elle eut été remise aux mains des Espagnols dans l’île des Conférences, célèbre par le traité des Pyrénées, la jeune princesse, fille de cette aimable Madame, Henriette d’Angleterre, et jusque-là habituée à toutes les douceurs et « les manières aisées dont on vit en France », passa sous un régime tout nouveau. […] » Deux gentilshommes de l’ambassadeur de Hollande, pour s’être arrêtés trop respectueusement devant le carrosse de Leurs Majestés quand elles passèrent, et pour s’être trouvés par hasard du côté de la reine, étant habillés ce jour-là à la française, faillirent en être les mauvais marchands.
On a, par Frédéric, le récit exact de cette guerre bizarre qui se passa presque toute en menaces, en marches pénibles, en escarmouches, sans rien de décisif. […] « … Il serait bien malheureux que le repos de l’Europe dépendît de deux puissances si connues dans leurs maximes et principes, même en gouvernant leurs propres sujets ; et notre sainte religion recevrait le dernier coup, et les mœurs et la bonne foi devraient alors se chercher chez les barbares. » Elle fait un léger mea culpa sur l’affaire de la Pologne, sur ce partage où l’Autriche s’est laissé induire (le mot est d’elle), en se liant avec ces deux mêmes puissances qu’elle qualifie si durement ; elle a l’air d’en avoir du regret ; et l’on entrevoit pourtant, par quelques-unes de ses paroles, que si pareille chose était à recommencer, et si l’Autriche, abandonnée d’ailleurs, n’avait point d’autre ressource qu’une telle alliance, elle pourrait encore la renouer sans trop d’effort et jouer le même jeu, en se remettant à hurler avec les loups : « Car je dois avouer qu’à la longue nous devrions, pour notre propre sûreté ou pour avoir aussi une part au gâteau, nous mettre de la partie. » La femme ambitieuse laisse ici passer le bout de l’oreille. […] Cela se passait en 1821-1822.
Ai-je passé le temps d’aimer ? […] C’est qu’en effet ces fadeurs et ce faux goût n’en sont plus, du moment qu’ils ont passé sous cette plume enchanteresse, et qu’ils se sont rajeunis de tout le charme d’alentour. […] A cette époque de croyances régnantes et traditionnelles, c’étaient les sens d’ordinaire, et non la raison, qui égaraient ; on avait été libertin, on se faisait dévot ; on n’avait point passé par l’orgueil philosophique ni par l’impiété sèche ; on ne s’était pas attardé longuement dans les régions du doute ; on ne s’était pas senti maintes fois défaillir à la poursuite de la vérité.
En outre, ils sont les plus importants : c’est par leur moyen que nous faisons, des classifications, des jugements, des raisonnements, bref, que nous passons de l’expérience brute et décousue à la science ordonnée et complète. […] On recommence alors en divisant la recherche ; on passe tour à tour en revue le paysage, l’architecture, les vêtements, les types, les expressions, les attitudes, le coloris général ; on trouve quelque trait principal et saillant pour chacun de ces fragments, on le note, comme on peut, au passage, par un mot familier ou exagéré, puis, reprenant tous ces résumés, on tâche de les résumer encore en quelque phrase abréviative qui serve de centre à tant de rayons dispersés. […] Quelle que soit cette expression, geste imitatif de l’artiste, demi-vision métaphorique du poète, pantomime figurative du sauvage, parole accentuée de l’homme passionné, parole terne et mots abstraits du raisonneur calme, l’opération mentale est toujours la même ; et, si nous examinons ce qui se passe en nous lorsque de plusieurs perceptions nous dégageons une idée générale, nous ne trouvons jamais en nous que la formation, l’achèvement, la prépondérance d’une tendance qui provoque une expression, et, entre autres expressions, un nom.
Le Maistre à Démosthène dans les collèges, l’opinion publique était secrètement complice de Perrault, et de plus en plus concevait qu’on pouvait se passer des anciens et trouver la perfection dans les ouvrages des Français. […] Mais surtout sa gloire acquise par des œuvres critiques et dogmatiques, ses vers passés en proverbes ou reconnus pour les lois de l’art d’écrire, persuadent à des gens de lettres par toute l’Europe que les théoriciens peuvent créer une littérature ou lui imposer une direction : on perd de vue tout ce que l’œuvre de Despréaux continue et achève ; au lieu d’un terme et d’un couronnement, on y voit un commencement, une création de mouvement ; et l’on agit en conséquence. […] Nous autres Français, nous avons tous Boileau dans le sang, dans les moelles : nous ne saurions nous passer de vérité, d’agrément, de clarté, de précision.
Désormais le temps des vagues tendances, des complexes poursuites est passé. […] On passe de là facilement à sa morale. […] Biographie : François Rabelais, né à Chinon à la fin du xve siècle, des cordeliers de Fontenay-le-Comte passe aux bénédictins de Maillezais : il étudie la médecine à Montpellier, est attaché en 1532 à l’Hôtel-Dieu de Lyon, fait imprimer divers ouvrages d’érudition et de médecine, des almanachs, et enfin Pantagruel et Gargantua.
Portalis était de ces esprits sages, amis d’une tradition progressive et d’une innovation légitime, qui croient qu’on peut étendre, sans la briser, la chaîne du passé, et qui ne résistent que là où ils voient qu’elle ne s’y prête plus. Par malheur, dans l’histoire, jamais les choses ne se sont conduites selon le vœu et le conseil de cette classe d’esprits : les nations, et surtout la nôtre, ne marchent qu’en brisant et rompant de temps en temps avec leur passé. […] Le moment de détruire était passé ; celui de gouverner, qui ne se rencontre jamais qu’avec l’homme qui gouverne, n’était pas encore venu.
Il avait lu çà et là tous ces apologues et toutes ces fables dans les livres de seconde main où les sujets avaient passé, dans les auteurs du xvie siècle, chez les Italiens ou ailleurs ; car il en lisait de tous bords. […] Dans Les Souris et le Chat-huant, il revient sur ce sujet philosophique ; dans Les Lapins, adressés à M. de La Rochefoucauld, il y revient et en raisonne encore ; mais il égaye vite son raisonnement, selon son usage, et fait passer au travers comme un parfum de bruyère et de thym. […] Et notez bien que, s’il n’y avait pas de La Fontaine dans le passé, ou que si l’on cessait de le goûter et de l’aimer dans l’avenir, il n’y aurait pas ce coin d’esprit français mêlé jusque dans la poésie, qui ne se contente pas de la sensibilité pure, qui raille le vague du sentiment, et, pour tout dire, qui sourit souvent même aux beaux endroits de Lamartine.
Si des sentiments nous passons aux idées, je me demande s’il ne faut voir en Rousseau qu’un utopiste. […] Enseignez donc à ce siècle-ci le respect de la tradition, l’intelligence du passé, le goût de la stabilité, l’amour de ce qui dure, rien de mieux. […] En soutenant qu’il n’y a pas de discipline absolue dans les beaux-arts, ou du moins que cette discipline ne se compose que de quelques principes très-généraux qui se plient à d’innombrables applications, veux-je dire que tout est également beau, que toutes les époques littéraires se valent, ou encore que toutes les beautés passent à leur tour, qu’elles ne charment que pendant un temps ou doivent céder la place à des beautés nouvelles, également mobiles, également périssables ?
Bref, pour l’historien littéraire qui considère un mouvement littéraire du passé, l’optique n’est pas la même que pour le contemporain. […] Il dit, il répète : « Tout s’en va, il n’y a rien, plus de style, plus de goût, plus de France, plus de tradition. » Le novateur dit : « Mais la tradition c’est moi qui la maintiens, je vais essayer de le prouver. » Alors les esprits ouverts et conciliants, les témoins bienveillants, les sages qui ont du goût pour le passé et quelque tendresse vis-à-vis de l’avenir disent aux novateurs : « On a eu tort vis-à-vis de vous, on vous méconnaît ! […] Après, le plus tôt possible, nous passerons à l’audition des poèmes.
Prenez la préface de ce volume, que l’impossibilité des citations empêche la critique de rouler par les escaliers, et dans la partie diable de cette préface (il y en a une qui ne l’est pas), vous apprendrez comment Michelet de simple professeur passa prêtre, et prit solennellement charge d’âmes. […] Quand on a passé toute sa vie dans la chasteté du travail, dans le recueillement de l’étude, quand on est — par la science, du moins, — un moderne bénédictin de l’histoire, quelle fin à faire que le livre de Michelet ! […] … Il est vrai que Michelet ne reconnaît pas cette vieillerie de Dieu, qu’il a supprimée dans son livre un peu plus aisément que la science ne supprimera la tempête, et que c’est même là le seul point — le dédain de Dieu et la possibilité de s’en passer très bien — qui reste fixe sous les pirouettes de cet esprit toton qui nous a montré tant de faces et qui doit nous en présenter bien d’autres avant qu’il cesse de tourner !
La même année, il publia les Poèmes sincères, dont un poète a écrit : « Pas un mot que nous n’entendions, pas une idée qui nous passe.
Sur la variété des sujets d’allure vive ou de douleur, les syllabes passent ou glissent sur des musiques diverses, par elles évoquées.
Quant à nous, nous dirons que quelques Articles fournis à l’Almanach de Lyon, qu’un peu de part à la confection de l’Almanach des Muses, que l’honneur d’avoir travaillé au Journal des Dames, Ouvrage malheureux, qui est venu expirer entre ses mains, après avoir passé par tant de mains meurtrieres, seroient des titres bien foibles pour prétendre à la gloire.
Un jour je vis, debout au bord des flots mouvants, Passer, gonflant ses voiles, Un rapide navire enveloppé de vents, De vagues et d’étoiles ; Et j’entendis, penché sur l’abîme des cieux, Que l’autre abîme touche, Me parler à l’oreille une voix dont mes yeux Ne voyaient pas la bouche : — Poëte, tu fais bien !
Boucher Avant que de passer à la sculpture ; il ne faut pas que j’oublie une petite Nativité de Boucher.
Ses Contes des Fées font l’ornement de plusieurs Recueils, & ne sont pas indignes de la lecture d’un homme sage, qui veut passer agréablement une heure de loisir.
Les Philosophes qui ont relevé ces imprudences, & voulu faire passer sa maniere de prêcher pour celle qui étoit généralement en usage dans son Siecle, se sont trompés grossiérement.
Il passe.
Depuis la Renaissance, les écrivains supérieurs semblent à quelques égards procéder les uns des autres et, selon la belle image de Lucrèce, se passer de main en main le flambeau de la vie, qui brille de plus en plus à mesure qu’on approche de l’époque de perfection. […] Ce grand art, qui n’a pour ainsi dire point de passé, sort consommé de la tête de Corneille. […] L’événement se passait dans le compartiment du milieu, le dénoûment s’accomplissait dans celui d’en haut ou dans celui d’en bas. […] Voltaire, dans le roman de l’Ingénu, fait dire à son héros, à propos de l’histoire ancienne : « Je m’imagine que les nations ont été longtemps comme moi, qu’elles ne se sont instruites que fort tard, qu’elles n’ont été occupées pendant des siècles que du moment présent qui coulait, très peu du passé, et jamais de l’avenir. » Rien n’est plus vrai de notre littérature, et en particulier de notre théâtre, jusque vers le milieu du seizième siècle. […] Corneille lui-même se paye ici de mots ; car si don Sanche passe pour n’avoir point de naissance, il n’en est pas moins fils d’un roi ; la grandeur de son origine perce sous l’obscurité de sa condition présente.
C’est pour vous dire, ô Parisiens qui pensez à jouer quelque gîte pittoresque au bord de la mer ou en pleine campagne pour y passer agréablement le temps des vacances, de ne rien décider avant d’avoir lu le dernier numéro de la Revue wagnérienne française, paraissant à Paris vers le 8 de chaque mois. L’étonnante Revue ne se contente pas de chercher à wagnériser les musiciens français, qui voudrait aussi wagnériser la langue française, parce que, dit-elle, dans l’état actuel de cette pauvre langue, il est impossible de raconter « une vie d’âme entière », la Revue vous indiquera le moyen de passer vos vacances mieux qu’au bord de la mer, dans une vraie mer d’incomparables délices. […] Wagner entame la question de Tannhaeuser à l’Opéra, et, loin de se plaindre de sa mésaventure, de déplorer la catastrophe, se demande, l’ironie et l’amertume aux lèvres, s’il ne vaut pas mieux, après tout, que les choses se soient ainsi passées, « car, dit-il, d’un grand succès, s’il eût été possible, en vérité je n’aurais su que faire. » C’est l’histoire de ce joueur qui, ne gagnant pas, aime mieux perdre. […] Il demeurait donc bien convenu que, dans ces trois fameuses représentations, tout se passerait entre amis, en famille … On ignore trop ce que peuvent pour la gloire d’un seul grand homme deux cents amis dûment groupés et qui manoeuvrent sous l’infatigable direction de huit ou dix journalistes jouant du fifre et du tambour. […] Malgré leur haute valeur, le Vaisseau Fantôme, Tannhaeuser et Lohengrin ne sont que les créations admirables d’un génie ignorant encore à quel point de prodigieuse audace il lui sera, donné d’atteindre. « On m’accordera, dit-il, que j’ai fait un plus grand pas de Tannhaeuser à Tristan que pour passer de mon premier point de vue, celui de l’opéra ordinaire, à Tannhaeuser ».
Le mot de passe de ses initiés sera, plus tard, cette formule : « J’ai mangé du tambour et bu de la cymbale. » C’est la nuit, sous la lune à laquelle l’unissent des hymens cosmiques, aux éclairs des torches de mélèze furieusement agitées, qu’il aime surtout à célébrer ses Mystères. […] Il franchit l’Euphrate sur un pont de sarments, il passe sur le dos d’un tigre, à la nage, le fleuve auquel sa monture donnera son nom. […] Brahma rentre, pour quelque temps, dans l’œuf d’or natal ; Vischnou s’est rendormi dans la mer de lait, sur sa couleuvre à cinq têtes, laissant passer ce brûlant orage. […] Un mariage funèbre les unit, la vie et la mort se pénètrent dans leurs embrassements. « Il y a aussi dans la tombe des amours et des noces », dit un poète antique : — Ως ϰάν ταφοίς έρωτες είσί ϰαί γάμοι Tous deux passent la saison de la torpeur hivernale dans le noir royaume ; puis ils remontent à la lumière, au milieu de la gloire en fleurs du printemps. […] De la mythologie assombrie et rétrécie des basses époques de l’antiquité, il passe, comme par un couloir ténébreux, dans la magie du Moyen âge, et il y reparaît déformé sous la figure bestiale de Satan.
Entassement puéril des plus petites chiures de mouches (qu’on me passe le mot parce qu’il est exact !) […] Cette scène, que j’accepterais sans bégueulerie si elle était passée aux flammes de la passion, purificatrices comme le feu, mais que j’accuse de la plus dégoûtante indécence, est surtout impossible par la raison que toute femme assez affolée pour, comme la femme de Putiphar, déchirer le manteau d’un homme, oublie tout, quand la terrible furie de ses sens l’emporte, ne songe point à parler alors, comme un vieux et froid faiseur d’éroticum, d’Amphitrite qui s’est livrée au cyclope, d’Urgèle qui s’est livrée à Bugryx, de Rhodope qui a aimé Phtah (l’homme à la tête de crocodile), de Penthésilée, d’Anne d’Autriche, de madame de Chevreuse, de madame de Longueville, et ne se livre pas, en ce moment décisif et décidé, au plaisir érudit de faire, qu’on me passe le mot ! […] Et cette conspiration contre la vérité et contre l’histoire, qui va de Burchard à Leibnitz, a encore passé par Bayle et par Voltaire, qui, un jour de bon sens, en a ri, pour arriver enfin à Victor Hugo, qui n’a pas le bon sens de Voltaire, — et qui n’en rira pas ! […] Si son poète n’est pas entièrement passé à l’ennemi, il est à califourchon sur la palissade des deux camps.
Maurice Le Corbeiller avait écrit, pour la circonstance, une scène élégante, en prose et en vers, intitulée : La Nuit de juin… Dans ces vers, inspirés de Musset, à travers l’expression un peu flottante, quelque chose a passé de la grâce et de la tendresse du cher poète… M.
Tous les pays par où il passa, & il en vit beaucoup, furent marqués par ses disgraces.
Outre qu’il est le premier qui ait fait passer dans notre Langue tout ce qui existe des Ouvrages de cet Orateur, dont on n’avoit encore traduit que dix ou douze Harangues ; il a rendu avec une exactitude singuliere le sens de l’original.
Il passa par les premieres places de sa Société, & fut Confesseur de Louis XIII.
Cependant il a passé toute sa vie à satiriser & à plaisanter.
Le temps des mêlées, des avantages de l’adresse et de la force de corps, et des grands tableaux de bataille est passé ; à moins qu’on ne fasse d’imagination, ou qu’on ne remonte aux siècles d’Alexandre et de Caesar.
Darzens, qui est heureusement très jeune, passe de l’imitation de M.
En souvenir et en reconnaissance de cette constante harmonie qui m’a rendu facile et douce la carrière de professeur en pays étranger, j’ai voulu laisser à ceux et à celles dont je fus le maître un instrument de travail que j’eusse éprouvé par un long usage et qui leur permit de se passer de moi.
que l’on seroit heureux « Dans ce beau lieu digne d’envie, « Si, toujours aimé de Silvie, « L’on pouvoit, toujours amoureux, « Avec elle passer sa vie !
DULARD, [Paul-Alexandre] de l’Académie de Marseille, où il naquit en 1696, & où il mourut en 1760, est Auteur d’un volume de différentes Pieces de Poésies, dont la réputation n’a pas passé les bornes de sa Province.
Il passe pour un des meilleurs Prédicateurs de sa Secte.
Quand la Reine Christine de Suede passa par Lyon où il étoit, elle voulut juger par-elle-même, si ce que la Renommée en publioit étoit exactement vrai.
Si la foule qui s’ouvre devant l’homme fier qui passe, s’inclinait ou se prosternait et qu’on remarquât un seul homme debout, on dirait, voilà Mardochée.
Vers étranges et singuliers, chansons qui sanglotent, voix qui mord, mélancolie et passion qu’exaltent l’eau qui passe, la feuille qui tombe, la rose qui saigne, l’étoile qui descend.
Quand on est établi Juge en Littérature, on doit au moins savoir ce qui s’est passé dans le Monde Littéraire ; s’il est permis d’ignorer les regles de la République des Lettres, on est inexcusable d’en ignorer les faits.
On pourroit le regarder comme un bon Traducteur, si la fidélité à rendre le sens de son original étoit la seule qualité nécessaire à quiconque entreprend de faire passer les Poëtes célebres dans une Langue étrangere, sur-tout lorsqu'il s'agit d'une Traduction en Vers.
Au reste, ce Poëte est le premier qui ait fait passer le Madrigal, de la Poésie Italienne dans la nôtre, & c'est lui qui en a fixé le véritable caractere.
Crois-moi, Vallier, je donnerais la moitié de ce qui me reste à vivre pour passer l’autre dans quelque coin du monde où la liberté ne fût point une furie sanglante. » La vérité sur le républicanisme de Ducis doit se trouver entre son cri d’enthousiasme à Hérault de Séchelles et ce cri d’indignation à Vallier. La Terreur passée, Ducis eut comme la société un réveil, un rafraîchissement, et l’un des premiers il en donna le signal au théâtre. […] Cet ami l’avait averti un peu trop charitablement, ce semble, de méchants propos qu’il vaut mieux laisser ignorer à ceux qui vivent solitaires : « Vous avez bien raison, il m’est fort indifférent que les hommes du jour me fassent passer pour un imbécile. […] Ils s’étaient rassemblés la veille chez Chénier qui leur avait donné à déjeuner et à dîner, et là ils avaient passé quatorze heures de suite à travailler tous ensemble pour réduire la pièce en trois actes, ce qu’ils avaient fait en supprimant plusieurs morceaux, en faisant quelques coupures, et ce qui ne les avait pas obligés de refaire plus de dix ou douze vers.
Il n’est resté de tant d’artifices grecs, que ces écouteurs inactifs dont le nom seul trahit l’inconvenance : encore Chénier et d’autres modernes ont-ils supprimé ces froids personnages dont nos romantiques voisins, qui nous les reprochent, ne savent pas toujours se passer. […] Zaïre n’a été fournie à Voltaire par aucune chronique : quelques noms à peine ont passé de l’histoire dans cet immortel ouvrage. […] Nos auteurs français deviennent romantiques, lorsqu’aux dépens de la vérité des mœurs, ils nous font les siècles passés à l’image et à la ressemblance du nôtre. […] Peut-être n’est-ce qu’une faute d’impression, qui laissée par Boileau lui-même dans la première édition de l’Art poétique, a passé dans toutes les autres.
Non, dirait Boileau : quand même j’ai la connaissance du fait, je ne saurais encore me passer de comprendre le fait. […] Dans cette partie de l’art, l’invention individuelle ne peut se passer de l’étude : le génie doit avoir à son service une science technique qui lui permette d’élire toujours les moyens d’expression les plus sûrs et les plus puissants. […] De même qu’il se fait des transpositions d’art, et qu’on peut essayer de produire par des moyens musicaux des impressions pittoresques ou par les formes de la poésie les effets de la musique, on peut aussi passer d’un genre à l’autre, et mêler dans une certaine mesure l’élément lyrique dans le drame, ou l’élément comique dans la tragédie, à condition que l’on ne méconnaisse point les lois essentielles et l’objet propre de chaque genre, et qu’on ne fasse point retomber l’ouvrage dans une indétermination qui serait la négation même de l’art. […] C’est le vers, c’est le style, c’est la beauté des rimes et des rythmes, la propriété et l’énergie des expressions, le bel ordre et la juste proportion des parties, c’est le choix des objets et des signes aptes à produire le plaisir essentiel à chaque genre, c’est tout cela, et rien que cela, qui constitue ces ornements nécessaires, dont la poésie ne saurait se passer.
Il verra passer entre de tels propos le bout de l’oreille d’un réactionnaire. […] On s’en passe en diplomatie. […] Oserais-je espérer que l’on trouvera le moyen de se passer de l’apprentissage des langues étrangères ? […] Une démocratie ne peut se passer d’une élite, mais elle prétend ne la devoir qu’au travail et au talent.
J’aurais pu additionner de notules certains paragraphes ; mais passons, car je dirai prochainement toute ma pensée sur la matière, en tête de l’œuvre qui occupe mes heures présentes. […] Verlaine, dans un sonnet très admiré, il s’imaginera qu’il est à lui seul l’empire romain tout entier : Je suis l’empire à la fin de la décadence Qui regarde passer les grands barbares blancs, En composant des acrostiches indolents D’un style d’or où la langueur du soleil danse. […] C’est ainsi que, façonnés pour le joug, nous retombons d’un esclavage dans un autre, et qu’après les poncifs classiques, il y a eu des poncifs romantiques, poncifs de coupes, poncifs de phrases, poncifs de rimes ; et le poncif, c’est-à-dire le lieu commun passé à l’état chronique, en poésie comme en toute autre chose, c’est la Mort. […] Mais enfin, le passé de l’esprit humain lui échappe en partie et, quand il a essayé d’établir les prolégomènes du naturalisme dans le roman et au théâtre, il a montré beaucoup d’incertitude.
Wagner a plus tard lui-même avoué que « tout l’intérêt de ce drame réside dans ce qui se passe dans le cœur d’Elsa » (VII, 163). […] Le vrai drame, l’évolution qui mène de la foi au doute, se passe en dehors de lui. […] Déjà les partitions de Lulli et des compositeurs contemporains témoignent du déplacement du chant ; la mélodie a passé aux violons et aux flûtes, on prend donc la peine de la transcrire ; les parties intermédiaires continuent à être négligées, et la basse chiffrée, acceptant la seconde place, prend le caractère déterminé d’un accompagnement. […] Ce premier moment passé, la revue s’adressera à un public débarrassé des préjugés antiwagnériens, à ceux qui « doivent devenir des wagnéristes », c’est-à-dire qui souhaitent créer selon les préceptes esthétiques de Wagner.
Pour pouvoir faire cette étude librement, il me faudra d’abord consacrer quelques pages à la réfutation d’une opinion qu’on répète avec tant de persistance, chaque écrivain empruntant l’idée l’un à l’autre, que bientôt elle sera passée à l’état de fait reconnu et indiscutable. […] Nous passerons donc légèrement sur les détails de la cérémonie, pour arriver à l’exécution du Prométhée, vaste composition doublement lyrique, dont les paroles, écrites jadis par Herder, ont été mises en musique par Listz. […] Lohengrin est un chevalier errant qui passe par hasard à Anvers, en Brabant, vers le onzième siècle, au moment où la fille d’un prince de ce pays, qui passe pour mort, est accusée d’avoir fait disparaître son jeune frère dans le but d’obtenir l’héritage du trône en faveur d’un amant inconnu.
Illusions ou réalités, des visions passent ; qui se trouve là, les voit18. » Aussi, pour le poète, rien de purement subjectif : le monde de l’imagination est, à sa façon, un monde réel ; le monde intérieur n’est-il pas un prolongement de l’autre, une nouvelle nature dans la nature ? […] Tout en te disant chef de la création, Tu la vois ; elle est là, la grande vision, Elle monte ; elle passe, elle emplit l’étendue19. […] D’une part, donc, l’œuvre d’art est l’expression plus ou moins fidèle des facultés, de l’idéal, de l’organisme intérieur de ceux qu’elle émeut ; d’autre part, l’œuvre d’art est l’expression de l’organisme intérieur de son auteur ; il s’ensuit qu’on pourra, de l’auteur, passer aux admirateurs par l’intermédiaire de l’œuvre et conclure à l’existence d’un ensemble de facultés, d’une âme analogue à celle de l’auteur ; en d’autres termes, il sera possible de définir la psychologie d’un groupe d’hommes, et d’une nation par les caractères particuliers de leurs goûts. […] Hennequin note lui-même la prédilection des ouvriers pour les aventures qui se passent dans un fabuleux « grand monde », l’attrait des histoires romanesques ou sentimentales pour certaines personnes d’occupations incontestablement prosaïques, le charme que les habitants des villes trouvent aux paysages ; des hommes habituellement simples et calmes sont souvent avides de la musique la plus passionnée.
C’est la grenouille, ayant peur de tout ce qui se passe autour d’elle. […] Par exemple, l’hirondelle qui est l’animal le plus individualiste, le plus domestique qui soit, l’hirondelle qui, dans la saison qu’elle passe chez nous, ne semble songer qu’à son nid et à ses petits, lorsqu’une autre hirondelle est en danger, on l’a remarqué, se précipite à son secours. […] Ils savent en hiver élever leurs maisons, Passent les étangs sur des ponts, Fruit de leur art, savant ouvrage ; Et nos pareils ont beau le voir, Jusqu’à présent tout leur savoir Est de passer l’onde à la nage.
C’est justement parce qu’ils sont très différents qu’ils ne peuvent plus se passer les uns des autres. […] Les temps sont passés où sans hésitation, du premier coup d’œil, on reconnaissait à la taille, à la couleur des yeux ou des cheveux, les supérieurs et inférieurs. […] « L’habitude chaque jour plus générale de prendre exemple autour de soi, dans le présent, au lieu de prendre exemple exclusivement derrière soi, dans le passé… produit l’uniformité vaste des idées et des goûts, des usages et des besoins qui rend possible, puis nécessaire, non seulement la fusion des peuples assimilés, mais encore l’égalité des droits et des conditions, c’est-à-dire la similitude juridique entre les citoyens de chaque peuple devenus semblables sous tant d’autres rapports140. » Le triomphe de la mode serait donc l’avant-coureur de l’égalitarisme. […] D’où il résulte que les signes distinctifs que la mode fait passer d’un homme à l’autre se détachent de plus en plus aisément, à nos yeux, de ceux qu’ils ne recouvrent que pour un jour.
Si l'on fait attention que de son temps les premiers principes du goût étoient ignorés & la langue encore informe, on aura plus d'indulgence pour les incorrections, les rudesses, les mauvaises plaisanteries qu'on trouve dans ses Satires, & on lui saura gré de la vigueur qu'il a mise dans ses tableaux, des saillies agréables qui ont échappé à sa plume, de l'heureuse naïveté avec laquelle il a attaqué le vice & poursuivi les vicieux : plusieurs de ses Vers peuvent encore passer pour originaux, & il a plusieurs traits qui n'ont point vieilli.
Cette tournure d’esprit peut avoir son agrément, mais le goût en passe vîte, & il n’est pas à propos que la Nation préfere ces Productions légeres à des Ecrits plus utiles & plus conformes à son génie.
Elle passa et outrepassa la mesure. […] Dans ce rapprochement qui se faisait naturellement d’elle et de Louis XIV, elle n’était pas sans se rappeler les revers qui attristèrent les dernières années du grand roi ; mais ces idées ne faisaient que lui traverser l’esprit et « passaient comme des nuages. » Elle retrouvait aussitôt sa sérénité, n’oubliant jamais cependant que rien n’est stable sous le soleil, et que la gloire et le succès sont choses passagères et incertaines.
William d’Alton, né le 1er janvier 1766, volontaire à quinze ans (avril 1781) au régiment d’infanterie de Berwiek, y avait gagné ses premiers grades lorsque la Révolution éclata ; il eut à subir bien des vicissitudes ; il était en 1793 à l’armée du Rhin, commandée par Beauharnais ; il fit la campagne de 1795 dans l’armée de Rhin-et-Moselle, puis passa dans l’armée de l’Ouest, où il devint aide de camp du général Hédouville ; il l’accompagna à Saint-Domingue en 1798 ; il était estimé de Hoche, sous qui il avait servi en Vendée ; mais cette expédition de Saint-Domingue l’avait retardé dans sa carrière ; il eut quelque peine à se voir confirmé dans le grade de chef de brigade (colonel) que le général Hédouville lui avait conféré dans la traversée ; nommé par le premier consul aux fonctions d’adjudant commandant (titre analogue), employé à l’armée d’Italie, il allait enfin pouvoir se produire sur un théâtre en vue, quand la fortune du premier coup le mit en lumière et le frappa. […] Lorsque l’avant-garde de l’armée d’Italie était repoussée après avoir passé le Mincio à Monzambano, tous les grenadiers commandés par le citoyen Daltou ont été envoyés contre l’ennemi, l’ont enfoncé, lui ont enlevé toutes ses positions et ont pris Valeggio.
Nous sommes donc dans la famille Lhéry, bons fermiers enrichis, dont la fille est une demoiselle et s’appelle Athénaïs : elle a passé deux ans dans un pensionnat d’Orléans ; on la destine à Bénédict, son cousin germain, jeune homme orphelin et pauvre que son bon oncle et sa bonne tante Lhéry ont recueilli chez eux en bas âge et ont, plus tard, envoyé étudier à Paris. […] Au sujet de la scène de chambre à coucher, j’avoue que le délire éloquent que l’auteur a su tirer de la potion d’opium bue par Valentine ne me fait point passer sur la convenance de ce moyen fantastique, devenu si à la mode : y aura-t-il donc inévitablement dans chaque roman nouveau une scène d’opium, comme il y avait autrefois un songe et une tirade : Où suis-je ?
Marie, la gentille brune aux dents blanches, aux yeux bleus et clairs, l’habitante du Moustoir, qui tous les dimanches arrivait à l’église du bourg, qui passait des jours entiers au pont Kerlo, avec son amoureux de douze ans, à regarder l’eau qui coule, et les poissons variés, et dans l’air ces nombreuses phalènes dont Nodier sait les mystères ; Marie, qui sauvait la vie à l’alerte demoiselle abattue sur sa main ; qui l’hiver suivant avait les fièvres et grandissait si fort, et mûrissait si vite, qu’après ces six longs mois elle avait oublié les jeux d’enfant et les alertes demoiselles, et les poissons du pont Kerlo, et les distractions à l’office pour son amoureux de douze ans, et qu’elle se mariait avec quelque honnête métayer de l’endroit : cette Marie que le sensible poëte n’a jamais oubliée depuis ; qu’il a revue deux ou trois fois au plus peut-être ; à qui, en dernier lieu, il a acheté à la foire du bourg une bague de cuivre qu’elle porte sans mystère aux yeux de l’époux sans soupçons ; dont l’image, comme une bénédiction secrète, l’a suivi au sein de Paris et du monde ; dont le souvenir et la célébration silencieuse l’ont rafraîchi dans l’amertume ; dont il demandait naguère au conscrit Daniel, dans une élégie qui fait pleurer, une parole, un reflet, un débris, quelque chose qu’elle eût dit ou qu’elle eût touché, une feuille de sa porte, fût-elle sèche déjà : cette Marie belle encore, l’honneur modeste de la vallée inconnue qu’arrosent l’Été et le Laita, ne lira jamais ce livre qu’elle a dicté, et ne saura même jamais qu’il existe, car elle ne connaît que la langue du pays, et d’ailleurs elle ne le croirait pas. […] Sans projets, sans envie, Ne cherchons désormais que l’oubli de la vie : Que chaque objet qui passe, ou noble ou gracieux, Nous attire, et sur lui laissons aller nos yeux ; Vivons hors de nous-même ; il est dans la nature, Dans tout ce qui se meut, et respire, et murmure, Dans les riches trésors de la création, Il est des baumes sûrs à toute affliction : C’est de s’abandonner à ces beautés naives, D’en observer les lois douces, inoffensives, L’arbre qui pousse et meurt où nos mains l’ont planté, Et l’oiseau qu’on écoute après qu’il a chanté.
Le beau leur apparaît par lueurs, et les lueurs une fois passées, ils n’y songent plus. […] Racine lui-même, j’oserai l’affirmer, Racine, dans les chœurs d’Esther et d’Athalie, n’a pas fait passer tout ce que son âme avait conçu de mélodie céleste et d’onction sacrée.
Il sent qu’elles ne peuvent s’en passer, et cette idée fait naître en lui la tentation de le refuser. […] Jamais les hommes, en France, ne peuvent être assez républicains pour se passer entièrement de l’indépendance et de la fierté naturelle aux femmes.
Ce n’est plus qu’un exercice littéraire, un jeu de société, où il ne s’agit que de passer adroitement par les conditions convenues. […] Cette habitude d’escompter les effets sûrs, unie au défaut d’invention psychologique, a été cause que Voltaire n’a pu, malgré ses bonnes intentions, se passer des artifices de ses prédécesseurs.
Il se dit : « Vivre pour les autres, oui, c’est là le but de la vie. » Il nous raconte alors l’histoire d’une vieille demoiselle qu’il a connue dans son enfance, qui a passé ses jours à se dévouer, et qui, seule, paralytique, presque pauvre, sans une joie extérieure, a vécu sereine à force de résignation, de douceur et de charité. […] On a beau la haïr et la mépriser, on l’aime pourtant ; elle a, jusque dans ses pires cruautés, des saveurs qui la font désirable, et, quand on a senti la mort passer tout près, quand on a failli voir disparaître une de ces existences qui sont la vôtre même, on comprend alors que la vie, affreuse, inique, féroce, vaut encore mieux que le néant. » À la bonne heure !
Cela fait toujours passer une heure ou deux. […] Mais chez Boussod et Valadon, chez Le Barc de Bouteville, chez Vollard, chez Bing, à l’École des Beaux-Arts, on a pu voir ces mois passés des séries d’expositions personnelles ou partielles : de Degas, de Pissarro, de Meissonnier, de Toulouse-Lautrec, de Sisley, des peintres symbolistes, etc.
Ce sont les hommes d’école au contraire qui passent pour pédants et mal élevés. […] L’étude seule de la Loi passait pour libérale et digne d’un homme sérieux 132.
Quant aux miracles, ils passaient, à cette époque, pour la marque indispensable du divin et pour le signe des vocations prophétiques. […] La faculté de faire des miracles passait pour une licence régulièrement départie par Dieu aux hommes 739, et n’avait rien qui surprît.
L’explication des vers qui les renferment, passe de bouche en bouche et descend jusqu’au plus bas étage du public. […] Quand un orateur fait bailler et dormir son auditoire, ne passe-t-il pas pour constant qu’il a mal harangué, sans qu’on songe à s’informer si les personnes que son discours a jettées sur le côté sçavoient la rhetorique.
Communément, Mme de Staël passe pour une des meilleures et des plus généreuses femmes qui aient jamais existé. […] Les salons, c’est la rue qui a passé par le bain, la pâte d’amande, la grammaire et les bonnes manières, mais c’est toujours la rue, au fond des esprits et des cœurs !
c’est-à-dire l’histoire de ce qu’il y a de plus profond, de plus fin, de plus ondoyant et de plus nuancé dans la vie et le passé d’un peuple ! […] On ne l’a point assez remarqué, c’est sous la solive blasonnée du château féodal que la société française est née ; c’est là qu’elle a commencé sa première causerie, cette causerie charmante, cette maîtresse de maison qui faisait si adorablement les honneurs de chez elle à l’univers ensorcelé ; c’est là qu’elle a dit son premier mot et laissé son premier sourire, entre quelque châtelaine oisive, quelque vieux prêtre savant et aimable, et le troubadour qui passait !
Jusqu’à l’arrivée du colonel Philippe de Kœnigsmark, elle n’avait passé pour rien de plus qu’une femme sans mœurs, ce qui n’était pas une distinction dans cette cour, uniformément corrompue. […] On a retrouvé les faits matériels de la chronique de Kœnigsmark, le Disparu de l’Histoire sans laisser derrière lui, quelque part, comme le dernier des Ravenswood, la plume noire de sa toque, pour dire : « C’est là qu’il a passé et qu’il fut englouti. » Mais les causes de ces faits, étudiées à leur sinistre clarté, dans ces âmes d’une énergie presque fabuleuse en ces temps où, pour le bien comme pour le mal, l’âme humaine se ramollissait, pouvons-nous dire que nous les ayons ?
Qui sait si la plupart des pensées les plus individuelles de Rivarol lui-même ne passeront pas un jour dans la langue française et ne feront pas corps avec elle, comme des inscriptions sur le marbre où elles sont gravées, — et si, comme tant de mots dont le génie qui les a prononcés a été exproprié, pour cause d’utilité publique, avant le Code Napoléon, elles ne seront pas recueillies par quelque Quitard de 1990 ? […] … Ce serait là un livre délicieux, à nous défrayer tous, nous qui aimons la langue et les vieilles coutumes du passé, si parfumées de naïveté, si enfumées de bonhomie.
Seulement, si bien qu’il se tienne sous la garde de cette prudence en ces deux volumes qu’il offre au public, il a glissé, et en glissant, dans une toute petite phrase sur Fontenelle il a montré les parties honteuses de sa pensée : — « Fontenelle — nous dit-il — respecte tout COMME IL CONVIENT, mais, partout où il est passé, rien n’est resté debout. » Sentez-vous la joie ? […] Baudrillard, comme Laboulaye, comme enfin tous les heureux de la médiocrité qui se sont cantonnés dans l’immobilité de la réussite, une fois pour toutes Prévost-Paradol a passé par les trois grades de la franc-maçonnerie du succès.
Campaux a mis, avec beaucoup de tact, à part de tout, dans l’analyse qu’il fait du génie de son poète, cette fusion divinement humaine du rire et des larmes qui fait tomber des pleurs dans la coupe rose des lèvres souriantes, et passer à travers les épanouissements des rires le cruel fausset des sanglots. […] cet homme, qui a passé toute une vie haletante et balancée entre deux condamnations à mort, comme le pendu, qu’il faillit bien être, au bout de sa corde dans les airs, est revenu deux fois à cette forme de testament fatale pour sa pensée, et antithèse que l’on comprend très bien de la part de ce hors-la-loi, de ce communiste du xve siècle, mi-parti de mendiant un peu trop brusque et de voleur un peu trop gai.
C’est sous le coup de ces découragements qu’on le vit retiré au prieuré de Burnham Thorpe, entre son père qu’il aima toujours et sa femme qu’il aimait encore, y passer des années entières de jeunesse, lui, l’éblouissant officier, fou de la gloire comme Charles XII, qui devait être le vainqueur d’Aboukir, de Copenhague et de Trafalgar, et qui, — détail piquant dans son contraste même ! […] Ont-ils compris la spontanéité de ce génie qui n’eut guère qu’une manœuvre en tout, — couper la ligne de l’ennemi au risque de se faire écraser, — mais qui n’avait besoin d’aucune autre pour être le roi de la mer ; qui pouvait se passer de tout, de réflexion, d’expérience et de science, et n’en pas moins être ce qu’il fut, parce qu’il avait le plus brave, le plus pur et le plus puissant du génie militaire, qui est d’aller, même contre toute raison, toujours en avant !
C’est, en effet, une des erreurs les plus profondes du spiritualisme humain, que de croire à la puissance spirituelle réduite à sa seule force isolée ; c’est la plus vaine des abstractions que de la cantonner dans la sphère mystérieuse de la conscience sans qu’elle passe à l’instant même au dehors, dans la sphère visible et les faits apparents. […] Je n’avais, moi, à propos du livre de M. de L’Épinois sur le gouvernement temporel de la Papauté, qu’à rappeler à ceux qui l’incitent perfidement à renier son passé et son origine en donnant d’une seule fois sa démission de toutes ses couronnes, le principe de son existence historique, et, ce qu’il ne faut jamais perdre de vue, la grandeur morale — quand elle fut la plus politique — de son action.
croyez-le bien, la sagacité des hommes n’est pas plus grande quand il s’agit du passé que quand il s’agit de l’avenir, et, dans tous les sens, leur vue est courte… Mais puisque après toutes les histoires sur la Révolution française, et Dieu sait s’il y en a eu déjà et s’il y en aura encore ! […] La lueur qui était passée de son esprit dans son livre, s’est éteinte.
Les faits rendent impossible toute dénégation mais le ton de l’auteur, plus puissant que les faits, rend tout enthousiasme impossible pour les nations où les choses se passaient comme il prend la peine de les raconter. […] L’Université passe donc de ces tuniques de Nessus à ceux-là qu’elle élève pour son service ?
C’est une chose qui ne saurait passer qu’à la honte de l’observation humaine, et, comme moraliste et observateur, nous réclamons. […] Je lui demanderai la permission d’en prendre deux ou trois dans sa cassolette ; car on ne me croirait peut-être pas non plus si je parlais de ces parfums inconnus qu’on n’apprécie bien que quand on les a respirés : « À la vue d’un pareil sentiment, — (nous avons dit ce qu’il était, ce sentiment), — ne semble-t-il pas que l’Amour lui-même a passé devant nous — (bienheureuse hallucination !)
C’est sous le coup de ces découragements qu’on le vit, retiré au prieuré de Burnham-Thorpe, entre son père, qu’il aima toujours, et sa femme, qu’il aimait encore, y passer des années entières de jeunesse, lui, l’éblouissant officier, fou de la gloire comme Charles XII, qui devait être le vainqueur d’Aboukir, de Copenhague et de Trafalgar, et qui — détail piquant dans son contraste même ! […] Ont-ils compris la spontanéité de ce génie qui n’eut guère qu’une manœuvre en tout, — couper la ligne de l’ennemi au risque de se faire écraser, — mais qui n’avait besoin d’aucune autre pour être le roi de la mer, qui pouvait se passer de tout : de réflexion, d’expérience et de science, et n’en pas moins être ce qu’il fut, parce qu’il avait le plus brave, le plus pur et le plus puissant du génie militaire, qui est d’aller, même contre toute raison, toujours en avant !
… Eh bien, celui-ci n’a point passé ! […] Mais cela n’a pas empêché les baisers de toute une époque de pleuvoir sur cette bouche empoisonnée, qui se purifiait peut-être une minute au feu de l’esprit et de la passion qui y passait.
Si on avait prévu la Sainte, on aurait été plus insolent encore… La Sainteté, en effet, c’est par là que devait finir cet incomparable amour, qui passa, sans s’éteindre, de la terre au ciel. […] L’intérêt de ces lettres n’est dans aucun fait, dans aucune chose intime passée entre eux et qu’elles rappellent… On n’en connaît point de pareilles parmi les chefs-d’œuvre épistolaires que nous devons même au sentiment de l’amour.
C’est une chose qui ne saurait passer qu’à la honte de l’observation humaine, et comme moraliste et observateur, nous réclamons. […] « À la vue d’un pareil sentiment (nous avons dit ce qu’il était, ce sentiment) ne semble-t-il pas que l’Amour lui-même a passé devant nous (bienheureuse hallucination !)
… Un homme comme lui devait casser le masque, rompre l’incognito, passer à travers le déguisement, comme un boulet à travers une tapisserie ! […] Victor Hugo avait passé à travers Olympio, comme au travers d’un cerceau, emportant au derrière de son nom les loques de ce pseudonyme mis en pièces ; et le voilà pris, hermétiquement pris, dans Vacquerie !
Laissons-la donc passer aussi ! […] Sensualiste, mais le plus profond des sensualistes, et enragé de n’être que cela, l’auteur des Fleurs du mal va, dans la sensation, jusqu’à l’extrême limite, jusqu’à cette mystérieuse porte de l’infini à laquelle il se heurte, mais qu’il ne sait pas ouvrir, et de rage il se replie sur la langue et passe ses fureurs sur elle.
car il s’est passé d’étranges et cruelles choses à cette Résurrection de Ronsard. […] Avant qu’on sût bien — nous, du moins, qui ne fûmes pas ses contemporains, — ce qu’il fut en réalité, cet illustre poète d’une époque finie ; avant la savante édition de Prosper Blanchemain, laquelle complète et résume toutes les éditions antérieures, on pouvait croire, et moi-même je l’ai cru longtemps, que Ronsard n’était plus qu’un nom et qu’une date, une de ces comètes qui ne font que passer dans une littérature et dont parlent entre eux les astronomes.
Et ce n’est ni la durée dans le passé, ni la fascinante perspective de l’Histoire, qui grandit les hommes à mesure qu’elle les éloigne de nous, ni le coudoiement avec eux dans la même époque et dans la vie et qui les rapetisse en les mettant de plain-pied avec nous, qui doivent empêcher de juger deux poètes séparés par des siècles, et de dire, sans trembler devant la tradition, lequel est le plus grand des deux. […] Le naturalisme de cette heure, qui s’est vanté d’être le républicanisme littéraire, n’acceptera pas plus le naturel de Lamartine que son idéal, ces deux choses qui font tout son génie, et ces Mémoires inédits qu’on publie passeront sans attirer le regard et l’admiration de personne, comme il convient, du reste, à un temps grossier, sans âme et sans Dieu.
… Qui pense à Milton, à cette heure, dans ce monde moderne, attelé aux plus âpres besognes, qui n’est ni religieux, ni poétique, — tout ce que fut Milton, — et qui, tas de fourmis en travail, passe au pied de la statue des plus grands hommes sans avoir même le temps de la regarder ? […] Milton, ce beau jeune homme qui ensorcelait les femmes, même quand il dormait ; Milton, cet Endymion de la poésie anglaise, auprès de qui une inconnue qui passait quand il dormait sur un gazon laissa les fameux vers : Occhi, stelle mortali, Si chiusi m’uccidite, Aperti, che farete 5 ?
mais hommage dont le talent se passerait bien peut-être… L’égoïsme du talent est facilement ingrat. […] Il a bénéficié des quarante ans passés sur ces vieilles œuvres mortes de la jeunesse de Victor Hugo, qu’il a ressuscitée dans une œuvre du même genre, mais à laquelle il a communiqué la vie du moment (notre vie !)
Il fut une fortune, et il passa pour une puissance. […] Quand il eut mangé son dernier écu, il se passa la main sur le front et se demanda ce qu’il ferait désormais pour battre monnaie, et il s’arrangea pour écrire.
« Évoque devant moi les grands hommes ; je veux les voir et converser avec eux, disait un jeune prince plein d’imagination et d’enthousiasme, à une Pythonisse célèbre qui passait dans l’Orient pour évoquer les morts. » Un sage qui n’était pas loin de là, et qui passait sa vie dans la retraite, approcha et lui dit : « Je vais exécuter ce que tu demandes.
Lorsque, pour prélude de son entreprise sur l’Asie, en souvenir de l’ancienne défection de Thèbes et contre sa résistance nouvelle, il vint, avant de passer l’Hellespont, écraser cette malheureuse ville comme une victime expiatoire, et que, dans sa fureur, semblable aux Thraces demi-barbares qui remplissaient son armée, il fit tuer la garnison et rasa de fond en comble les murailles et les maisons, il ne se borna pas à épargner, comme on l’a vulgairement répété, cette maison de Pindare dont Pausanias, quatre siècles plus tard, notait les ruines saintes encore. […] On passa dans les lettres, de l’invention à la critique, et de l’inspiration à la science.
Nadaud, lui, se tient à l’écart de la mêlée ; sa poésie, aux goûts calmes, pêche à la ligne, prend les goujons et regarde sans trouble passer le fleuve des révolutions… La joie n’est pas le chant complet du monde, le plaisir n’est pas l’amour, l’esprit n’est pas la liberté.
Cette originalité passe de sa peinture dans la gravure.
C’est aussi la perpétuité de l’individualité humaine ; car c’est le fil continu qui relie entre eux le passé, le présent, l’avenir de l’homme, considéré comme unité collective. […] Il passait pour penser, et il rêvait. […] Quant au troisième consul, Lebrun, c’était un homme de littérature politique et un homme d’affaires administratives d’un passé sans tache et d’une universelle capacité. […] Thiers, dans une rapide revue de l’Europe passée par un esprit juste et fin, dévoile la scène diplomatique et militaire où son héros va bientôt agir. […] Il vécut de ses émoluments, qui étaient considérables, et, sans qu’il fût pauvre, passa pour l’être.
Et puis, l’auteur de Catherine s’est si bien mis en règle avec la vertu qu’on lui peut passer quelques licences. […] Puis, on ne voit pas assez si l’auteur est ironique dans cette conclusion même, et s’il se rend bien compte que Costard et Bobette, « rangés » de la façon qu’il dit, vaudront moins qu’ils ne valaient, puisque passer du nouveau jeu au vieux jeu, ce sera, pour eux, passer du cynisme ingénu à l’hypocrisie. — Mais surtout ce dernier acte est si inutile ! […] Des choses que Dumas fils, il y a trente ans, n’aurait hasardées qu’avec un luxe de préparations, et qu’il eût tour à tour insinuées avec des finesses de diplomate ou imposées avec des airs de dompteur, passent maintenant le plus aisément du monde et sans l’ombre de scandale. […] Tout ce qu’il voit en cette affaire, c’est que cette fille de trente ans doit « avoir quelque chose dans son passé » et qu’il peut donc « marcher ». […] Dursay s’était fait passer pour marié, afin, dit-il, d’être tranquille, — et aussi pour qu’on ne pût escompter le dénouement et que Lia ne pût l’entrevoir ou le désirer, même dans le plus secret de sa pensée.
Alfred de Vigny, qui a passé au premier tour de scrutin, dédommagement bien dû après une si longue attente.
C’est un poème en prose, plein de vie et haut en couleur : « Et un grand souffle d’amour passa sur Israël.
Octave Raquin Nous donna, en un trop mince reliquaire, Ibis, cette sensation unique, je pense, de passer sans perceptible froissement des vers aux proses, réciproquement, et cela sans nul artifice de transition savante.
J’aimerai à les citer et, pourtant, je passe.
S’il est poète, cela lui passera.
La Traduction des Métamorphoses d’Ovide, par M. de Fontanelle, annonce une plume, sinon aussi exercée & aussi élégante que celle de l’Abbé Bannier qui a traduit le même Ouvrage, du moins plus exacte, & capable de faire passer, dans notre langue, les graces & la facilité de l’ingénieux Poëte de Sulmone.
Linant sont très-médiocres, si l’on en excepte le Madrigal que voici, où l’on trouvera un éloge délicat & fin du château de Cirey, & de l’illustre Marquise du Châtelet qui l’habitoit alors : Un Voyageur qui ne mentoit jamais, Passe à Cirey, l’admire, le contemple ; Il croit pourtant que ce n’est qu’un Palais ; Mais voyant Emilie : Ah !
Son Hercule sur le bûcher et son Milon de Crotone sont peints d’hier, mais jaunes, noirs, enfumés ; on les prendrait pour des morceaux du siècle passé.
La mère leur jette de l’argent sans les regarder ; elle tourne la tête vers son mari et cette tête ne dit mot non plus que celle du père ; de plus, ces deux figures muettes sans caractère, sans expression, sont encore lourdes, courtes et grises ; si le balcon était percé en dessous et qu’elles fussent achevées, leurs jambes passeraient de beaucoup à travers.
Il est plus hanté par l’avenir que par le passé. […] Que se passe-t-il donc par-delà ces toiles peintes ? […] Il se console de l’absence cruelle des belles héroïnes, en poursuivant le plus frivole, le plus anonyme des trottins qui passent. […] Elles nous apparaissent comme d’émouvantes monographies de races mourantes, figées dans un songe passé, résorbées dans une existence intérieure, silencieuse comme des logis clos. […] Saint-Georges de Bouhélier, dans un cri superbe d’extase, enflammé de ferveur, écrivait : « Il faudrait passer sa vie à genoux » M.
Plusieurs, à l’église, surtout au moment de l’élévation, n’ont pas voulu dire de prières et sont restés assis, « muets comme des bêtes. » Trois hommes, dont un charpentier, ont passé ensemble une nuit lisant un livre de l’Écriture. […] Ils ont aussi besoin de porcs pour leur nourriture, afin d’avoir du lard ; le lard est leur venaison ; vous savez bien que le justice est là avec son latin et sa potence, s’ils veulent en avoir une autre ; en sorte que le lard est leur nourriture nécessaire, de laquelle ils ne peuvent se passer. […] Encore un pas, et ce grand mouvement va passer du dedans au dehors, des mœurs privées aux institutions publiques. […] Il passe devant une croix et le lourd fardeau des péchés qu’il portait à ses épaules se détache et tombe. […] Il la franchit, et arrive dans la ville de la Vanité, foire immense de trafics, de dissimulations et de comédies, où il passe les yeux baissés sans vouloir prendre part aux fêtes ni aux mensonges.
. — Passé le Détroit (1895). — Les Brisants (1896). — L’Œuvre nuptial (1896). — Trois Cœurs, un acte (1897). — Cœurs en détresse (1898). — Les Arts de la vie et le Règne de la laideur (1899).
À l’entendre, on croirait que renaissent, avec les histoires du temps de la duchesse Anne, tous les exquis poèmes d’un passé d’amour simple et de simple croyance.
Il a la nostalgie du passé.
En 1870, il passa à la Comédie dont il est actuellement sociétaire.
Félicité passée, Qui ne peux revenir, Tourment de ma pensée, Que n’ai-je en te perdant, perdu le souvenir !
De France, il passa à Geneve, où il embrassa le Calvinisme.
Sur Diderot, à propos de Langres sa patrie ; sur Riouffe, en passant à Dijon où il fut préfet ; sur les bords ravissants de la Saône en approchant de Lyon ; sur l’endroit où Rousseau y passa la nuit à la belle étoile en entendant le rossignol ; sur cet autre endroit où probablement, selon lui, Mme Roland, avant la Révolution, avait son petit domaine, Mme Roland que Beyle ne nomme pas et qu’il désigne simplement « la femme que je respecte le plus au monde » ; sur Montesquieu « dont le style est une fête pour l’esprit » ; sur une foule de sujets familiers ou curieux, il y a de ces riens qui ont du prix pour ceux qui préfèrent un mot vif et senti à une phrase ou même à une page à l’avance prévue. […] Les souvenirs de 1815 et du retour de l’île d’Elbe y sont racontés avec détail et avec le feu d’un contemporain et presque d’un témoin : le passé chevaleresque y est senti avec noblesse. […] Dans le genre plus classique de Didon et d’Ariane, dans les romans du ton et de la couleur de La Princesse de Clèves, on prodigue moins les balles et les coups mortels, on a les plaintes du monologue, les pensées délicates, les nuances de sentiment ; quand on a poussé à bout l’un des genres, on passe volontiers à l’autre pour se remettre en goût ; mais, abus pour abus, un certain excès poétique de tendresse et d’effusion dans le langage est encore celui dont on se lasse le moins.
Ces trois ou quatre points, sur lesquels il veut attirer son attention d’homme à jeun, sont précisément les divers degrés d’impression et de sensation, puis de jugement et de raisonnement, de réflexions générales ; la conception que nous avons du passé, du présent et de l’avenir ; la faculté de retour et de considération interne sur nous-mêmes ; l’invention et la découverte des hautes vérités ; tant de sublimes imaginations des beaux génies, « une infinité de pensées enfin, si grandes et si vastes, et si éloignées de la matière qu’on ne sait presque par quelle porte elles sont entrées dans notre esprit », toutes choses qui restent à jamais inexplicables pour une philosophie atomistique et tout épicurienne. […] Voiture même passa pour un homme grossier. » On sent tout le piquant dont cela devait être. […] Il a bien pu y avoir dans le monde byzantin quelque bel esprit qui se soit avisé d’un voyage mythologique, mais je m’imagine qu’en y prodiguant les dieux et les nymphes il n’y plaisantait pas, quoiqu’on ne puisse absolument répondre de ce qui passe à certain jour dans ces sortes d’esprits, tels qu’un Lucien ou un Apulée.
Tout s’est passé d’ailleurs avec égards et ainsi qu’il sied entre gens comme il faut, et M. de Barthélémy, en jouissant des honneurs de la priorité, entend bien ne préjudicier nullement à l’édition prochaine qui profitera de ses découvertes. […] Soyez donc éditeur, si c’est votre plaisir et votre orgueil, mais soyez-le avec tous les soins qu’exige cette tâche épineuse ; et gare surtout si, auteur vous-même, vous laissez trop passer le bout de l’oreille ! […] « La constance des sages n’est qu’un art avec lequel ils savent enfermer leur agitation dans leur cœur. » La générosité n’est que le désir de se donner le rôle où l’on se trouve le plus grand, le plus à sa gloire ; ou, comme il le dit avec sa subtilité profonde, « c’est un industrieux emploi du désintéressement pour aller plus tôt à un plus grand intérêt. » La magnanimité n’est qu’un trafic plus grand et plus hardi que les autres : « La magnanimité méprise tout, pour avoir tout. » Ou encore (et ceci, je le crois, est inédit en effet) : la magnanimité, c’est « le bon sens de l’orgueil et la voie la plus noble pour recevoir des louanges. » Les plus humbles vertus, après les grandes, y passent à leur tour ; pas une ne trouve grâce devant lui.
J’en indiquerai quelques-unes qu’il faudrait citer dans l’original : « De même que chez les poètes un vrai génie n’est jamais que rare, de même le vrai goût est rarement le lot des critiques ; les uns et les autres également ne tirent que du Ciel leur lumière, les uns nés pour juger comme les autres pour produire. » « Quelques-uns ont d’abord passé pour beaux esprits, ensuite pour poètes ; puis, ils se sont faits critiques, et ils se sont montrés tout uniment des sots sous toutes les formes ! […] Mais l’historien littéraire, voyageur infatigable et toujours prêt pour les hospitalités les plus diverses, prend les grands hommes, les hommes distingués du passé, comme ils se présentent à lui, chacun chez soi ; il sait qu’il y a plus d’un climat et plus d’une demeure pour les grands ou les beaux esprits. […] André Chénier, lorsqu’il a dit dans une Épître, parlant de son art composite et de ce métal de Corinthe auquel il compare son style : Tout ce que des Bretons la muse inculte et brave, Tout ce que des Toscans la voix fière et suave ……………………………………………… M’offraient d’or et de soie est passé dans mes vers, se souvenait probablement de ce passage de Pope.
Parce qu’on a réussi dans quelques exemples notables à ce jeu d’élévation et de rabaissement, voilà qu’il prend à chacun les idées et les fantaisies les plus singulières à propos des personnages célèbres du passé : ceux-ci, on se contente de les diminuer, de les amoindrir ; ceux-là, on veut les dégrader à tout prix, les abîmer et les abattre ; quelques autres, au contraire, en petit nombre, on n’est occupé qu’à les grandir et à les transfigurer, c’est-à-dire encore à défigurer leur caractère. […] Je crois cette méthode fort hasarde,, et injuste pour le passé : c’est, me dira-t-on, celle du génie qui procède volontiers en maître et en conquérant ; mais, comme le génie est rare, c’est aussi celle de la prétention et de l’effort ambitieux, bruyant, une méthode tapageuse et qui prête fort au charlatanisme. […] Sa lettre à Louvois du 2 octobre, porte la marque de cette sollicitude, et en même temps il plaisante du peu que cela lui a coûté : « Les troupes que j’ai conduites ont passé, dit-il, sans aucun désordre.
Il passa le reste de l’année 1859 à diverses reconnaissances dans les parties du Sahara dépendant des provinces d’Alger et de Constantine ; il effleurait son sujet et s’aguerrissait en même temps. […] La géographie physique des lieux parcourus, la géologie, la météorologie, les productions minérales, la flore, si l’on ose parler ainsi, la faune, sont la matière d’autant de chapitres et de tableaux ; puis l’on passe au moral des peuples qui se meuvent dans ce cadre inflexible et sous ce climat impérieux : les centres commerciaux, les centres religieux, puis les mœurs des Touareg en particulier, leurs origines probables, leur histoire (si histoire il y a), leur constitution, leur vie politique et intérieure, tout vient par ordre et en son lieu. […] Il ne s’agit que de les atteindre, et partout où on le peut, il y a oasis. — Le Sahara, ainsi analysé et défini, passe à l’état scientifique.
Les choses littéraires, Messieurs, ne se passent pas toujours ainsi, par une filiation si directe, si pieuse, si ininterrompue. […] Nous ne craignons pas ici de soulever avec respect un voile pieux qui est désormais celui du deuil : le voyage d’Italie réalisa tout son rêve, il y vit tout ce qu’il attendait du passé, il trouva plus ; son cœur rencontra celle qui lui était destinée, et son avenir s’enchaîna. […] Certes il aurait pu y avoir quelques mauvais jours à passer, quelques luttes pénibles à soutenir contre le flot.
Tels sont, en Auvergne, en Flandre, en Hainaut, dans l’Artois, dans la Picardie, l’Alsace et la Lorraine, les droits de poursoin ou de sauvement qu’on lui paye pour sa protection générale ; ceux de guet et de garde qu’il réclame pour sa protection militaire ; l’afforage qu’il exige de ceux qui vendent de la bière, du vin et autres boissons en gros ou en détail ; le fouage, en argent ou en grains, que, dans plusieurs coutumes, il perçoit sur chaque feu, maison ou famille ; le pulvérage, fort commun en Dauphiné et en Provence, sur les troupeaux de moutons qui passent ; les lods et ventes, droit presque universel, qui est le prélèvement d’un sixième, parfois d’un cinquième ou même d’un quart sur le prix de toute terre vendue et de tout bail qui excède neuf ans ; le droit de rachat ou relief, équivalent à une année de revenu et qu’il reçoit des héritiers collatéraux, parfois des héritiers directs ; enfin un droit plus rare, mais le plus lourd de tous, celui d’acapte ou de plaît-à-merci, qui est un cens double ou une année des fruits, payable aussi bien au décès du seigneur qu’à celui du censitaire. […] À Saint-Claude, il acquiert ce droit sur quiconque a passé un an et un jour dans une maison de la seigneurie. — Quant à la propriété du sol, on voit plus nettement encore que jadis il l’avait tout entière. […] Sur les 123 millions, 23 passent en frais de perception ; mais, quand on compte le revenu d’un particulier, on n’en défalque pas ce qu’il paye à ses intendants, régisseurs et caissiers. — Talleyrand (10 octobre 1789) estime le revenu des biens-fonds à 70 millions et leur valeur à 2 100 millions ; mais, à l’examen, le capital et le revenu se sont trouvés notablement plus grands qu’au premier aperçu.
Charles Perrault ne sembla pas d’abord pressé d’accepter l’héritage de Desmarets, et la chose se passa d’abord en escarmouches entre ses deux frères et Despréaux ou Racine, jusqu’à ce que, rendu par la disgrâce à la littérature, il donna son Saint Paulin, orné d’une Préface où l’Art poétique était saisi par son côté faible, je veux dire par son insoutenable théorie du merveilleux païen. […] Il annonçait l’intention de passer en revue tous les arts, toutes les sciences et tous les genres littéraires : architecture, sculpture, peinture, astronomie, géographie, navigation, physique, chimie, mécanique, éloquence, poésie ; et dresser le bilan des progrès de l’esprit humain. […] Il s’engageait à faire voir que le siècle de Louis XIV était non pas plus grand à lui seul que tous les siècles passés, mais supérieur à n’importe quel siècle pris à part, même à celui d’Auguste.
Dès lors le poète est délivré de l’embarras des opérations intellectuelles : il a fait passer dans sa sensation son idéal ou sa doctrine ; il n’a que faire d’analyser ; il n’a qu’à utiliser son admirable mémoire des formes, et ce don qu’il a de les agrandir, déformer ou combiner sans les détacher de leur soutien réel, ce don aussi de suggestion qui lui fait trouver des passages inconnus entre les apparences les plus éloignées. […] De là, ce défilé des dieux et des religions qui sont les formes par où l’humanité tente toujours de tromper son ignorance et d’éterniser sa brièveté ; mais ces formes elles-mêmes passent, portant témoignage de l’universel écoulement et de l’éternelle illusion, démasquant le néant dans leur mélancolique succession. […] Ni cri, ni révolte, ni tension même : une tristesse douce et discrète, toute en demi-teintes, un vif sentiment de l’humaine misère, une déploration sans violence des êtres et des formes qui passent.
Notre philosophe dit quelque part (livre II, chapitre xvii) qu’il connaît bien assez d’hommes qui ont diverses parties très belles : l’un, l’esprit ; l’autre, le cœur ; l’autre, l’adresse ; tel la conscience, tel autre la science, plus d’un le langage ; enfin chacun a sa partie : « Mais de grand homme en général, et ayant tant de belles pièces ensemble, ou une en tel degré d’excellence, qu’on le doive admirer ou le comparer à ceux que nous honorons du temps passé, ma fortune ne m’en a fait voir nul… » Il fait bien ensuite une exception pour son ami Étienne de La Boétie, mais c’est là un de ces grands hommes morts en herbe et en promesse, et sans avoir eu le temps de donner. […] Montaigne alors sent que c’est en lui seul, après tout, qu’il peut se fonder dans la détresse et s’affermir, et que c’est le moment ou jamais de mettre en pratique ces hautes leçons qu’il a passé sa vie à recueillir çà et là dans les livres des philosophes ; il se ranime, il arrive à toute sa vertu : En un temps ordinaire et tranquille on se prépare à des accidents modérés et communs ; mais, en cette confusion où nous sommes depuis trente ans, tout homme françois soit en particulier, soit en général, se voit à chaque heure sur le point de l’entier renversement de sa fortune. Et, loin de s’abattre et de maudire le sort de l’avoir fait naître en un âge si orageux, il s’en félicite tout à coup : « Sachons gré au sort de nous avoir fait vivre en un siècle non mol, languissant ni oisif. » Puisque la curiosité des sages va chercher dans le passé les confusions des États pour y étudier les secrets de l’histoire et, comme nous dirions, la physiologie du corps social à nu : « Ainsi fait ma curiosité, nous déclare-t-il, que je m’agrée aucunement de voir de mes yeux ce notable spectacle de notre mort publique, ses symptômes et sa forme ; et, puisque je ne la puis retarder, je suis content d’être destiné à y assister et m’en instruire. » Je ne me permettrai pas de proposer à beaucoup de personnes une consolation de ce genre ; la plupart des hommes n’ont pas de ces curiosités héroïques et acharnées, telles qu’en eurent Empédocle et Pline l’Ancien, ces deux curieux intrépides qui allaient droit aux volcans et aux bouleversements de la nature pour les examiner de plus près, au risque de s’y abîmer et d’y périr.
Chabanon nous le montre tout jeune, à l’âge de vingt-sept ans, installé chez Voltaire à Ferney, où il passa toute une année (La Harpe y était avec sa femme, une assez jolie femme, la fille d’un limonadier, qui faisait elle-même des vers et qui jouait la comédie). […] On alla chez le créancier, qui vint recevoir ses deux cents pistoles ; mais la scène dura plus de deux heures, et une bonne âme qui passait dans la rue Saint-Honoré répandit le bruit que La Harpe avait battu sa femme, et qu’une escouade du guet, conduite par le commissaire du quartier, avait rétabli la paix dans le ménage. […] N’importe ; il est bon que cette première impression se donne, dût-on ensuite la pousser plus loin ; il est bon de se laisser faire avec lui, d’accueillir et de ressentir ce premier jugement, situé, si je puis dire, dans le vrai milieu de la tradition française ; il est bon en un mot d’avoir passé par La Harpe, même quand on doit bientôt en sortir.
D’ailleurs, la personne du monde la plus propre à l’intrigue, et qui y avait passé sa vie à Rome par son goût ; beaucoup d’ambition, mais de ces ambitions vastes, fort au-dessus de son sexe et de l’ambition ordinaire des hommes, et un désir pareil d’être et de gouverner. […] Il lui fallait passer par ces soins domestiques pour arriver aux affaires d’État et pour y conduire peu à peu ce jeune couple. […] Mme de Maintenon, Mme des Ursins, et Louis XIV, ces trois personnes furent quelque temps sous un même charme : Je rappelle souvent votre idée et cette aimable contenance qui me charmait à Marly, lui écrivait un an après Mme de Maintenon ; conservez-vous cette tranquillité qui vous faisait passer de la conversation la plus importante avec le roi au badinage de Mme d’Heudicourt dans mon cabinet ?
Un jour que Beaumarchais dînait chez la princesse de Nassau-Siegen, on parla de cette infortunée, qui avait écrit du fond de sa prison une requête touchante ; on la lui donna à lire, ainsi qu’un paquet de lettres du mari, et qui étaient très peu à l’honneur de ce dernier : Je passai sur une terrasse, dit Beaumarchais, où je les lus avidement. […] Encore chaud de ma lecture, je fis chez le magistrat un plaidoyer brûlant qui bientôt l’échauffa lui-même : il donna les plus grands éloges à la malheureuse détenue, à sa douceur, à sa douleur, au ton pénétrant de ses plaintes… Tout cela se passait en 1781 et se termina alors par la sortie de la pauvre femme à qui Beaumarchais, qui avait couru à Versailles chez tous les ministres, était venu annoncer lui-même la délivrance. […] Danton était assis de l’autre côté de la table ; il commence la discussion ; mais, comme je suis presque sourd, je me lève et demande pardon si je passe auprès du ministre (parce que j’entends mal de loin), en faisant, selon mon usage, un petit cornet de ma main.
Les artistes des siècles passés mieux connus, je rapporterais la manière et le faire d’un moderne, au faire et à la manière de quelqu’ancien la plus analogue à la sienne ; et vous auriez tout de suite une idée plus précise de la couleur, du stile et du clair-obscur. […] Je prétens que la raison principale pour laquelle les arts n’ont pu dans aucun siècle, chez aucune nation atteindre au degré de perfection qu’ils ont eue chez les grecs ; c’est que c’est le seul endroit de la terre où ils ont été soumis au tâtonnement ; c’est que, grâce aux modèles qu’ils nous ont laissés, nous n’avons jamais pu, comme eux, arriver successivement et lentement à la beauté de ces modèles ; c’est que nous nous en sommes rendus plus ou moins servilement imitateurs, portraitistes, et que nous n’avons jamais eu que d’emprunt, sourdement, obscurément le modèle idéal, la ligne vraie ; c’est que si ces modèles avaient été anéantis, il y a tout à présumer qu’obligés comme eux à nous traîner d’après une nature difforme, imparfaite, viciée, nous serions arrivé comme eux à un modèle original et premier, à une ligne vraie qui aurait été bien plus nôtre, qu’elle ne l’est et ne peut l’être : et pour trancher le mot, c’est que les chefs-d’œuvre des anciens me semblent faits pour attester à jamais la sublimité des artistes passés, et perpétuer à toute éternité la médiocrité des artistes à venir. […] Après cette excursion à laquelle, vraie ou fausse, peu d’autres que vous seront tentés de donner toute l’importance qu’elle mérite, parceque peu saisiront la différence d’une notion qu’on fait ou qui se fait d’elle-même je passe au sallon ou aux différentes productions que nos artistes y ont exposées cette année.
Si vous avez des prédilections pour le pantalon collant, je mettrai un maillot ; si, au contraire, vous nourrissez des préférences pour le pantalon à la hussarde, je n’hésiterai pas à passer un jupon. […] Rodolphe et Marcel passeront dans la rue, — chemises bouffantes, nez et foulards au vent, — en compagnie de mesdemoiselles Musette et Mimi, qui portent leur bonnet de travers — quand elles ont un bonnet ! […] Peut-être lui passera-t-on plus volontiers qu’à un autre ces défaillances de style, et les sentiments qu’il exprime y gagnent-ils en désinvolture et en spontanéité.
Dans cette histoire de la comédie inédite, qui a passé avec les hommes qui la jouaient sans laisser des œuvres après elle, ce n’est ni la comédie ni l’histoire qui m’ont le plus intéressé, mais l’auteur lui-même, cet esprit, confisqué jusqu’ici par la science, doué de tant de forces différentes, et qui, sorti enfin de ses études spéciales, me donne aujourd’hui l’occasion de parler de lui pour la première fois ! […] En Angleterre, qui est prévenant, disait le prince de Ligne, passe pour étranger. […] Il y a plus, les fonds d’or sont là pour dorer la pilule, — pour faire passer le mensonge, l’erreur ou la chimère du portrait.
Blanc Saint-Bonnet a passé sa vie dans les plus hautes études. […] Un jour, Shakespeare, le plus spontané des génies, lança dans un de ses drames cet éclair en passant, et comme passent les éclairs : que « la douleur est une culture ». […] Le mot de Shakespeare, que Saint-Bonnet, — ce penseur par lui-même, — assez fort pour pouvoir se passer de lire (Malebranche ne lisait pas), n’a peut-être pas lu dans Shakespeare, a été redit par son génie et à la manière du plus religieux et du plus métaphysique des génies.
Laissons-la donc passer aussi ! […] Sensualiste, mais le plus profond des sensualistes, et enragé de n’être que cela, l’auteur des Fleurs du mal va, dans la sensation, jusqu’à l’extrême limite, jusqu’à cette mystérieuse porte de l’Infini à laquelle il se heurte, mais qu’il ne sait pas ouvrir, et de rage il se replie sur la langue et passe ses fureurs sur elle. […] Les uns y ont vu une étude très soignée, très épinglée, très atomistique, où rien n’est oublié des sensations et des nuances de sensation par lesquelles on passe dans les états qu’il décrit… et j’aime mieux le croire que d’y aller voir.
Depuis ce jour, a passé ses nuits et ses jours à ramener les blessés et à secourir les mourants. […] Vendredi saint, journée rédemptrice du genre humain, comme nous savons bien passer cette journée ! […] Il rassure ses hommes, les encourage : « Ne craignez pas : je tomberai dans les premiers, mais vous passerez. » Un grand Christ qui, jadis, étendait ses bras sur la plaine, est là, à l’entrée de la tranchée ; les obus de l’ennemi lui ont arraché le bras gauche ; son bras droit semble montrer le ciel aux soldats qui vont mourir et qui le saluent en passant.
Aussi ne lit-on plus ses Ouvrages ; ce qu’il peut y avoir de bon a passé dans les Ecrits de quantité de nos Littérateurs, qui, pour s’épargner la peine de penser, ne font pas difficulté de s’approprier les pensées d’autrui, en les habillant à leur maniere.
« Quand on les lit, on ne comprend pas, dit cet Ecrivain, qu’il ait pu trouver du temps pour composer tant d’autres Ouvrages sur les matieres les plus importantes, & l’on est tenté de croire qu’il a passé sa vie à lire Homere & Virgile, dont il prend si bien le tour & le caractere ».
Qu'on lise l'Ode qu'il a composée sur ce sujet, & qui passe pour son chef-d'œuvre : on verra que ce n'est qu'une déclamation vague, un tissu de phrases détachées, d'expressions boursoufflées, qui ne disent rien, fumum ex fulgore, non ex fumo dare lucem, cogitat.
Votre femme s’en passe quand elle lace son corset. […] L’auteur vient de passer en revue tous les snobs d’Angleterre : que va-t-il dire de ses frères, les snobs littéraires ? […] La voilà qui passe, aérienne, les yeux au ciel, un faible sourire arrêté sur ses lèvres roses, touchante sylphide, si consolante pour tous ceux qui l’entourent que chacun la souhaite au fond d’un puits. […] Si l’auguste amant eût été heureux, il n’eût point passé son temps à soupirer. […] Esmond passa dans la petite chambre du chapelain
Dans cet article le spirituel écrivain a l’air d’épuiser toutes les formes ingénieuses et subtiles de raisonnement pour faire l’apologie de ce qui se passe dans les journaux et dans les feuilletons.
j’aurai passé près d’elle inaperçu, Toujours à ses côtés et pourtant solitaire, Et j’aurai jusqu’au bout fait mon temps sur la terre.
Ces syllabes forment le nom d’un grand poète, et unique en son genre, au point que les échos n’en sont pas encore fatigués ; toutes les gloires passent et s’en vont mourir, murmurer sous la paix des forêts ; Borrelli sonne et rebondit de montagne en montagne.
Les charmantes heures passées ainsi à feuilleter ces vers parfois encore inachevés, là-haut, dans le pittoresque logis que Gineste s’est trouvé sur les plus hautes cimes de Belleville, avec son jardin en terrasse qu’un corbeau apprivoisé ravage et au travers duquel d’innombrables chats, génération sans cesse augmentée, se font les griffes en déchirant la fine écorce des genêts et des lilas.
On peut employer encore un autre moyen : il est certaines Sociétés dévouées à des hommages mutuels, où l’encensoir passe de main en main : il est aisé de s’y faire agréger, afin d’obtenir de ses confreres une ample dose d’encens, en revanche de celle qu’on leur a distribuée.
Rome plaint les diserts qu’ Auguste a caressés ; Tes Ecrits ont enfin guéri la Renommée De l’amour qu’elle avoit pour les siecles passés.
Après la mort du Cardinal, ce tombeau passa entre les mains de Gaston, Duc d’Orléans.
Cet oubli vient sans doute de ce qu'il passa sa vie en Hollande, où il s'étoit réfugié après la révocation de l'Edit de Nantes.
Cette épidemie avoit gagné tous les écrivains, & des écrivains avoit passé au reste de la nation.
Ce sont communément des gens ou qui passent, ou qui méditent, ou qui errent, ou qui habitent ou qui se reposent.
Le temps en est passé : les Philippiques de Démosthène, au contraire, sont toujours contemporaines, parce qu’il parlait à l’homme, et que l’homme est resté. […] Ici se terminent mes réflexions sur le passé.
Il n’a guère varié les éléments de sa poésie : toutes ses grandes odes, à Henri IV, à Marie de Médicis, a Louis XIII, au duc de Bellegarde, présentent les mêmes matériaux et le même argument : éloge des actions passées, prédiction des prospérités futures, développements moraux et applications mythologiques. […] On peut trouver sa forme étriquée, ses rythmes monotones et simples : songeons que la liberté antérieure était indétermination, confusion : il a réglé la cadence de la poésie comme il était possible en son temps, et il fallait passer par la simplicité classique pour arriver à la complexité plus riche de l’harmonie romantique.
« Il les publie, dît-il dans sa préface, pour faire valoir l’esprit de ses illustres amies, et pour ne rien ôter à si reconnaissance et à leur gloire. » Il ajoute : « Je leur dois rendre le témoignage que leurs innocentes faveurs ont adouci tout le chagrin de ma vie et m’ont mis en état de me passer plus aisément de ce qu’on appelle fortune… Les femmes de qualité ont poli mes mœurs et cultivé mon esprit ; et comme je ne leur ai jamais eu d’obligation pour ma fortune, je n’ai jamais souffert auprès d’elles de servitude ni de contrainte. » Ces paroles ne sont pas d’un homme méprisable. […] On y lit aussi que l’hôtel d’Albret et l’hôtel de Richelieu « étaient une suite et une imitation de l’hôtel de Rambouillet, quoiqu’avec des correctifs, et qu’il leur manquât un Voiture pour en faire passer à la postérité les plaisirs et les amusements. » Avant les hôtels d’Albret et de Richelieu, j’aurais dû citer en première ligne les cercles de mademoiselle de Montpensier.
Cette manière de concevoir la religion, qui a été celle des esprits les plus éclairés et les plus élevés, Lessing, Schleiermacher, Benjamin Constant, Mme de Staël, ne laisse pas que de soulever des difficultés considérables, lorsqu’au lieu de l’appliquer au passé on l’applique à l’avenir, et qu’on cherche à se faire une idée de la destinée religieuse de l’humanité. […] De même que Luther et Calvin se sont aujourd’hui réconciliés, au point qu’on voit journellement les pasteurs d’une Église passer dans l’autre et y exercer leur ministère, pourquoi, sans aucun sacrifice d’opinion propre, ne verrait-on pas une réconciliation s’opérer entre des opinions qui la plupart du temps ne se combattent que dans leurs excès ?
C’est ainsi qu’on voudrait faire passer pour un sot doux Bernardin de Saint-Pierre, qui fut un peintre de grand talent. […] Mais cela passe l’entendement de nos contradicteurs.
Passe donc pour renverser, en certains cas, l’ordre de l’enquête ; mais je n’en voudrais pas faire une règle absolue, et je ne croirais pas pouvoir suppléer si facilement « les notions de l’hérédité et de l’influence des milieux », quoique les lois en soient encore « incertaines et présomptives ». […] Ici encore il faut distinguer, comme je l’ai fait plus haut, une règle méthodique, laquelle consiste à passer de la psychologie des plus géniaux à ceux qui le sont au degré moindre, et une doctrine, qui peut tenir en deux mots.
Nous sortons tous d’un passé qui parfume ou souille à jamais la coupe du sang de notre vie, si nous ne mettons pas notre vertu à l’épurer. […] Leur affliction est la meilleure critique du passé dont ils sont sortis.
Ni Augustin Thierry ni Guizot eux-mêmes, les œdipes officiels de ce temps qu’ils n’ont pas deviné toujours et qu’ils ont calomnié quelquefois ; ni Augustin Thierry ni Guizot n’ont été assez forts pour se soustraire à ces préjugés du siècle dernier qui offusquent tout, quand il s’agit du Moyen Âge, Il est vrai que, pour Guizot, le moment n’est peut-être pas fort éloigné où l’Histoire de la Civilisation rencontrera quelque contradicteur terrible ; quant à Augustin Thierry et à ses travaux, il s’est lui-même, avant de mourir, passé par les armes. […] Elle a la sienne, et au Moyen Âge elle l’a tenue si haut, et cette bannière était si vaste, que toutes les autres passaient par dessous et qu’elle les couvrait !
Tous, et je passe les noms de ces marionnettes d’historiens, à qui l’Histoire a tiré le fil quand elle ne l’a pas cassé, furent pris ou d’une admiration ou d’une horreur qui n’étaient plus des sentiments, mais des vertiges… L’historien froid, l’historien que l’Histoire ne mène pas, et qui, même, ne mène pas l’Histoire, — car être mené par l’Histoire ou la mener, c’est tout un pour la vérité, et c’est ici que l’esclave vaut bien le despote, — l’historien impartial qui ne se soucie que de l’exactitude ou de la justesse de son observation, a manqué jusqu’alors. […] Il a passé au microscope, comme deux insectes, ces deux monstres énormes, pour qu’on les vît mieux, — pour qu’on les discernât jusque dans leurs animalcules et leurs derniers atomes… Il n’a oublié ni une goutte de sang, ni une goutté de boue, analyseur patient, minutieux, implacable, d’un dégoût si haut qu’il en est impassible.
Il a passé à travers, comme on passe à travers un plafond qu’on crève, pour, aller tomber· dans les sous-sols du pamphlet.
Souvent nous avons vu un peu de grâce faire passer par-dessus beaucoup de folie, mais que dire de beaucoup de grâce consacrée à nous faire aimer beaucoup de bon sens ? […] C’est le fruit d’une civilisation qui, passé un certain moment, un certain coup de soleil, ne mûrit plus.
, laquelle a trouvé que lui, Byron, l’auteur du Corsaire, de Lara, du Giaour, de Don Juan, et de tant d’autres chefs-d’œuvre, était, en termes de cette École : horriblement poncif ; que ses Turcs et ses Grecs ressemblaient à des sujets de pendule ; que tout cela était vieux et passé comme le turban de madame de Staël, comme le Malek-Adel de madame Cottin… Ah ! […] Comme elle, saisi par l’embonpoint bien avant sa trentième année, il fut tellement épouvanté de la déformation menaçante de sa beauté, qu’il s’infligea un régime d’ascète et passa sa vie à prendre des torrents de soda-water et à mâcher du mastic.
Car il fut bien souvent grotesque là où il passe pour le plus éblouissant dans les traductions qu’on fait de lui, et qui, je vous le jure, n’aveugleront personne ! […] Fils d’évêque, riche de son patrimoine, élevé à l’ordre équestre, assesseur au Collège des mines, comblé par le roi et les princes de Suède, il passait sa vie à écrire ses livres dans sa belle maison de Stockholm et à voyager incessamment dans les deux pays qu’il préférait, l’Angleterre et la Hollande, et, à y préparer de magnifiques éditions de ses ouvrages, colossaux de nombre et de poids.
Il n’était pas un de ces Siméon Stylites, passés marbre sur leur colonne, avec lesquels la Philosophie puisse se donner les airs des explications indiennes et qu’elle traite sans façon de fakirs. […] En lisant la vie qu’on nous donne de cet infatigable confesseur au xixe siècle, qui passa cinquante ans la main levée dans le geste d’absoudre, peut-on dire qu’il n’a pas glorieusement rempli sa mission et douter qu’il ait réussi ?
Les saints se passent très bien de la gloire du monde. […] Les anecdotiers de l’histoire — qui passeraient bien un médaillon, ou même un grand portrait de saint Vincent de Paul, mais pas plus que cela, les honnêtes gens !
Dans l’introduction de son nouveau volume, écrite avec la distinction qui est le caractère de cette plume toujours à cent pieds de la chose ou de l’expression vulgaire, Gères ne nous raconte rien, mais nous laisse cependant entrevoir qu’il a passé par la douleur suprême que madame de Staël appelle « le mal de l’irréparable ». […] Fût-elle seule, une telle pièce sacrerait un homme poète… Quand mon ami (qu’on me passe cette fierté !)
« Il n’y a de beau que les commencements », a dit une femme qui savait que le génie de son sexe n’est pas plus durable que sa beauté, et c’est cette beauté des commencements, c’est cette loi qui fait, chez la femme, quand il a le plus l’air d’exister, quelque chose d’aussi délicat, d’aussi fragile et d’aussitôt passé que l’humidité de ses yeux et le rose de sa joue, c’est cette loi que va nous démontrer aujourd’hui le volume de poésies de Mme de Girardin, qui furent ses commencements, à elle ! […] Elle se maria, eut un salon, et de Corinne passa Mme de Staël, pour être toujours dans l’imitation qui a marqué sa vie d’un empêchement d’originalité.
Fénelon, cet homme de foi et d’amour au xviie siècle, s’il avait senti passer sur lui les mauvais courants du xixe n’aurait peut-être été non plus qu’un sceptique, versant, de désespoir de n’être pas davantage, dans une espèce de fatalisme chrétien, comme Alfred de Vigny — il faut bien le dire, car le livre l’atteste, — y avait versé. […] À une époque, en effet, où la poésie est devenue tellement extérieure que toute son âme a passé par dehors et que les plasticités de Rubens sont la visée commune de tous les poètes, rien de plus curieux et de plus inattendu que ces quelques vers, qui n’ont pas jailli, mais qui sont tombés lentement d’une tête réfléchie comme le sang tombe lentement d’une blessure quand elle est trop profonde pour dégorger… Et ce n’est pas tout.
Sujet épouvantable, qu’il fallait toucher avec les mains pures, passées au charbon d’Isaïe, d’un artiste consommé. […] Rosette, la concubine d’Antoine Quérard, reste donc sa concubine, mais, comme elle aime Paul et qu’elle le lui a dit, elle se dégrade de plus en plus, et, dès cette heure, elle passe à l’état de bovarisme absolu.
Elle est passée… passée comme les rubans hortensia qui servaient de serre-têtes à nos grands-pères !
Elle passa longtemps pour avoir su régner, comme son père avait su combattre. […] Veut-on que des hommes, ensevelis dans les mines, parlent avec éloquence de ce qui se passe sur la terre ?
Je passe rapidement sur tous les discours, pour venir à celui qui a, et qui mérite en effet le plus de réputation ; c’est l’éloge funèbre de Turenne, de cet homme si célèbre, si regretté par nos aïeux, et dont nous ne prononçons pas encore le nom sans respect ; qui, dans le siècle le plus fécond en grands hommes, n’eut point de supérieur, et ne compta qu’un rival ; qui fut aussi simple qu’il était grand, aussi estimé pour sa probité que pour ses victoires ; à qui on pardonna ses fautes, parce qu’il n’eut jamais ni l’affectation de ses vertus, ni celle de ses talents ; qui, en servant Louis XIV et la France, eut souvent à combattre le ministre de Louis XIV, et fut haï de Louvois comme admiré de l’Europe ; le seul homme, depuis Henri IV, dont la mort ait été regardée comme une calamité publique par le peuple ; le seul, depuis Du Guesclin, dont la cendre ait été jugée digne d’être mêlée à la cendre des rois, et dont le mausolée attire plus nos regards que celui de beaucoup de souverains dont il est entouré, parce que la renommée suit les vertus et non les rangs, et que l’idée de la gloire est toujours supérieure à celle de la puissance. […] Il est étonnant que Fléchier ait passé si légèrement sur un pareil sujet.
Il a reçu de Nebraska une lettre dans laquelle on lui demande où les hirondelles passent l’hiver. — “Cette question n’est-elle pas encore pendante ? […] « Nous passons de la sphère des objets extérieurs à la sphère des sentiments. […] Il ne faut pas oublier que l’efficacité de ces moyens dépend en grande partie de l’état de la culture chez les modernes, et des dispositions de l’âme, qui, selon les races et les temps, est plus ou moins sensible aux impressions de la nature. » XVI Humboldt passe à la poésie descriptive, à Hésiode ; il cite Homère et Pindare. […] Les eaux coulent du haut des montagnes dans les vallons, aux lieux qui leur ont été assignés, afin que jamais elles ne passent les bornes prescrites, mais qu’elles abreuvent tous les animaux des champs. […] Là passent les vaisseaux et se meuvent les monstres que tu as créés, ô Dieu, pour qu’ils s’y jouassent librement”.
Mais, malgré cet excès de coloris, les Intermèdes n’ont point passé inaperçus.
Aussi M. l’Abbé Berardier n’a-t-il pas prétendu réparer une perte peut-être irréparable : content de suivre avec respect les traces de l’Evêque de Meaux, il s’est proposé seulement de faciliter l’étude de l’Histoire, en plaçant, pour ainsi dire, sous un seul point de vue, le grand spectacle de tous les principaux événemens qui se sont passés sur le théâtre de l’Univers ; ce qu’il a exécuté avec autant de précision, que de méthode & de clarté.
Cette Histoire est en effet écrite avec pureté, avec noblesse, & de ce ton sensible & communicatif, qui fait passer, avec l'instruction, l'amour de l'objet qu'on présente.
Il s'agissoit de faire passer dans notre Langue un Original dont l'esprit brillant & épigrammatique exigeoit un génie semblable au sien.
Venevault, Boizot, Bachelier et Francisque Millet Es jours de septembre, Apollon et Mercure s’étant transportés le matin au Salon du Louvre où les artistes de France avaient exposé leurs productions, le dieu du goût en admira quelques-unes, il passa dédaigneusement devant un grand nombre d’autres ; quelquefois il sourit, quelquefois ses sourcils se froncèrent et son visage devint sévère.
Il prétend qu’il ne va à la cour que pour leur dire leurs vérités, et à Versailles il passe pour un fou dont les propos ne tirent point à conséquence ; ce qui lui conserve son franc-parler.
D’ailleurs, si nous voulons savoir toutes les choses à mesure qu’elles passent sous nos yeux, nous instruire des doctrines avant qu’elles aient vieilli ; savoir, pendant qu’ils l’occupent encore, les noms des acteurs qui se succèdent sur la scène politique, n’avons-nous pas les journaux de tous les jours, les livres de chaque semaine, les pamphlets du soir et du matin ?
Ou encore ils font comme ces seigneurs voleurs, ces Burgraves du Rhin qui barraient le fleuve ; aucune vérité ne passe. » C'est une raison de plus pour la Revue suisse de donner à son public ce qui lui arrive de ces vérités non scandaleuses et désintéressées.
Elle se promène en des paysages d’automne et d’hiver, des paysages attendris où nulle joie trop vive n’éclate, où seul le souvenir des tristesses passées éveille quelque souffrance douce.
Sa Muse, après avoir passé rapidement sur la Scène, où elle ne pouvoit en effet figurer long-temps, du moins avec avantage, s’est exercée avec plus de succès sur le Théatre de l’Opéra.
On passera légérement sur quelques négligences de style, en rendant justice à l’adresse avec laquelle cette Tragédie est conduite, & au grand effet qu’elle produit.
Le temps des systèmes est passé, même en littérature.
Ceci est bien : les jeunes cœurs tendres et ouverts aux sympathies ont dû passer par cette phase mélancolique à leur entrée dans un monde égoïste et oisif ; livrés à des occupations sans rapport avec leur vocation secrète, ils ont dû placer leur idéal dans cette vie opulente et facile dont ils sont les témoins un peu jaloux : ils rêvent un véritable paradis à deux, dans le parc de quelque vieux château, à l’ombre des hautes futaies ou des charmilles.
. — Celles qui passent (1898). — Les Deux Justices (1898). — Sous le sable (1898).
Coppée, c’est qu’il a vite passé !
André Theuriet Georges Lafenestre a passé une partie de sa jeunesse en Touraine.
Pourroit-on s’étonner, après cela, de voir toute l’Europe s’empresser de recueillir ses Ouvrages, & la gloire de la Langue Françoise passer chez l’Etranger avec les richesses du savoir ?
M. de Laplace a encore fait passer dans notre Langue plusieurs bons Romans Anglois, en les corrigeant d’une certaine prolixité, de certains détails minutieux, qui n’auroient pas été de notre goût.
Les Italiens & les Allemands l'ont fait passer dans notre Langue, & il a été accueilli en France, des Esprits qui tiennent à la Religion & aux mœurs.
Je suis tenté de croire aujourd’hui le contraire… Je recommande mes livres de voyage à ceux qui s’affligent d’un passé et qui ont assez d’esprit de reste pour souffrir aussi de l’esprit de leur passé. […] L’humanité vit sur son passé, auquel elle tient par habitude ; et ce passé n’est qu’erreur et ne peut être qu’erreur. […] Il paraît que nous autres Européens nous ne pouvons absolument pas nous passer de cette mascarade qui s’appelle l’habillement. […] Assurément ; car si la loi est ce que pense la majorité, si c’est la pluralité qui gouverne, sans aucun correctif, que se passe-t-il ? […] Il faut qu’il dise avec orgueil, en voyant passer les équipages, ce mot recueilli par Taine : « Ah !
On ne pouvait avoir des votes qu’argent comptant, et encore aux moments importants ces mercenaires menaçaient de passer à l’ennemi, se mettaient en grève, et demandaient davantage. […] D’aristocratique elle devient populaire ; au lieu d’être un amusement, elle est une foi ; des mains délicates et sceptiques, elle passe aux mains enthousiastes et grossières. […] Une sorte de médiocrité incurable les retient la bêche à la main dans des tranchées où personne ne passera. […] C’est le sens moral qui de la conscience publique le fait passer dans le monde littéraire, et de populaire le rend officiel. […] Pour eux, ils sont « les princes de l’espèce humaine. » « Je les vois passer, l’orgueil dans le maintien, le défi dans les yeux, tendus vers de hauts desseins, troupe sérieuse et pensive.
— Que s’est-il donc passé ? […] Je ne sais rien de plus beau que ce court poème de remords et de terreur où le souvenir, plongeant dans le passé et tremblant de se reconnaître dans l’avenir, éclate en prière. […] Les temps de l’ignorance et de la naïveté sont passés. […] Mais admirez la merveilleuse indifférence de l’art qui, fondé sur un principe immuable, sert successivement et également le paganisme et le christianisme, dérivant de l’un vers l’autre, sans démentir son passé et utilisant au service de l’un les conquêtes qu’il devait à l’autre. […] Mais elle rhythme sa pénitence harmonieusement comme elle rhythmait sa folie ; elle est aussi belle dans le désespoir que dans le plaisir : et même, elle ne saurait du tout se passer d’être belle.
On but à la santé d’Homere, & tout se passa bien.” […] “Il seroit sans doute à souhaiter, dit M. de Querlon, que tout le feu de ce génie pût passer dans la traduction de son Poëme ; mais ne demandons pas l’impossible. […] On fit des Epigrammes contre lui, & du Copiste on passa aux Originaux. […] L’Enéide passe auprès des gens de goût pour le plus parfait des poëmes épiques. […] Elle passe pour exacte & fidéle.
Mais comme ils n’en parurent pas satisfaits et qu’ils ne voulurent point promettre à leur évèque de changer de sentiments, il les envoya prendre deux jours après par ordre du Roy, et ils ont été conduits dans les prisons de la Conciergerie de cette ville, où on les fait instruire. » Ces simples textes se passent, semble-t-il de tout commentaire. […] Il est glorieux pour la nature humaine qu’un si grand nombre d’hommes aient, pour ne pas mentir, tout sacrifié, passé de la richesse à la mendicité, hasardé leur vie, leur famille, dans les aventures périlleuses d’une fuite si difficile. […] La croix de Jésus, le juste et le pitoyable passée aux mains des prévaricateurs et des bourreaux, se dresse alors, dans tout l’éclat de sa victoire, sur les débris d’un peuple de trente millions d’hommes dont elle a fait sa proie, sa chose et sa conquête… Réfléchissons à cela. […] Que se passe-t-il ? […] N’est-il pas plus prodigieux encore qu’un tollé d’indignation et de mépris ne couvre pas pour toujours la voix d’un homme que nous venons d’entendre condamner, quoique à regret, la Révocation, et qui ne craint pas cependant de prononcer d’aussi dérisoires paroles que celles-ci : « Partout où j’ai passé, j’ai pu constater que le catholicisme c’était la France, et la France c’était le catholicisme.
Ils passent de corps en corps, s’alambiquent, s’élaborent, se travaillent, fermentent, se subtilisent dans leur rapport avec le vase où ils sont actuellement contenus. […] Mais j’ai hâte d’en revenir à de plus riantes ébauches, et de m’ébattre avec lui, avec le lecteur, comme par le passé, dans sa renommée gracieuse. […] Au sein de cette future édition difficile, mais possible, d’André Chénier, on trouverait moyen de retoucher avec nouveauté les profils un peu évanouis de tant de poëtes antiques ; on ferait passer devant soi toutes les fines questions de la poétique française ; on les agiterait à loisir. […] J’indique, je sens cela, et je passe.
Je passais une partie des jours à côté de lui, à la cuisine, à écouter les vieilles légendes de la famille, qu’il se plaisait lui-même à me raconter. […] IX Je la vois encore en idée, et, toutes les fois que je passe en chemin de fer en vue des sombres croupes des forêts d’Urcy, d’Arcey et du pont de Pany, croupes boisées qui me cachent le toit du château désert, j’ai envie de descendre pour revoir la Jumelle, et pour savoir si elle conserve encore, après tant d’années, quelques traces des charmes véritablement attiques dont cette Chloé des Gaules enchantait mon enfance, mes yeux et presque mon cœur. […] XV À la fin de la journée, après avoir dételé, jeté le trèfle dans le râtelier, chaussé ses souliers et passé sa veste, il ne parut point à la cuisine pour recevoir, comme à l’ordinaire, son écuelle des mains du vieux Joseph. […] Ce qui se dit dans cette entrevue entre le petit Didier et le père de sa future on ne peut que le deviner ; mais tout se passa sans doute de bon accord et de bonne grâce, car la nuit était déjà tombée toute noire sur la montagne et sur la vallée que le père et le prétendu, le visage ouvert par la confiance et par la bonne amitié, étaient encore assis chacun sur un coin du banc, la table entre eux deux et la nappe mise devant une bouteille de vin, un morceau de pain et un fromage blanc, pendant que la Jumelle, rappelée du verger, debout et modeste derrière son père, était invitée par lui et résistait longtemps à boire un doigt de vin dans le verre de son fiancé.
Une pensée cependant me rassure : c’est que les grands écrivains de l’antiquité et des temps modernes sont, pour la plupart d’entre vous, de ces vieilles connaissances, de ces anciens amis dont on aime toujours à entendre parler ; et que les autres me sauront gré de leur faire connaître ces hommes du passé qui deviendront bientôt leurs amis les plus chers. […] Ils commencent par établir sur chaque branche de littérature les préceptes que l’usage a consacrés, puis ils passent en revue les divers ouvrages qui en font partie, et le jugement qu’ils en portent se formule d’après les principes qu’ils ont posés, comme étant sous ce rapport la législation souveraine et absolue. […] Les événements qui se passent sous les yeux d’un poète, la nature des lieux qu’il habite, l’air même qu’il respire, ont une influence directe, une action puissante sur ses idées, sur ses impressions, sur son style, sur son génie enfin. […] Permettez-moi maintenant de joindre à ces observations, peut-être trop longues, le récit de ce qui s’est passé, il y a quelques années, dans un château voisin de la capitale.
La lecture leur est plus favorable que la représentation : c’est exagéré, et à la scène les acteurs exagèrent encore, ce qui passe tout.
L'article de Magnin sur Lucrèce passe décidément dans la Revue des Deux Mondes du 1er juin.
Ces deux Ouvrages, sans avoir le mérite de l’élégance dont ils peuvent se passer, ont celui de l’intérêt, de la clarté, de la simplicité, de la facilité, & de l’onction, qui vaut bien la sécheresse, l’obscurité, l’enflure, l’entortillage & la morgue des Productions philosophiques.
La gloire qui les suit, après tant de travaux, Se passe en moins de temp que la poudre qui vole Du pied de leurs chevaux.
Si l'on fait attention aux difficultés du sujet qu'il a entrepris de traiter dans une Langue telle que la nôtre, & combien la Poésie Françoise se prête peu aux expressions techniques d'un Art dont la plupart des regles sont fondées sur l'Optique & l'Anatomie, on lui saura gré d'avoir surmonté de tels obstacles, & on passera sans peine sur le défaut d'intérêt & d'élégance, qu'on lui reproche, en lui tenant compte des vraies beautés qu'il a le plus souvent répandues sur une matiere ingrate par elle-même.
Caractères naturels Passons de cette revue générale des épopées aux détails des compositions poétiques.
La Terreur passée, Daru reprit ses fonctions administratives comme commissaire ordonnateur. […] Pour lui, il passait quelquefois sept nuits de suite sans dormir. […] Lorsqu’à cette époque d’union, de confraternité sincère, dans ces intervalles de Marengo et du camp de Boulogne, Andrieux qui savait bien le latin, Picard qui ne le savait guère, mais qui aimait à en placer quelques mots96, Campenon, Roger, Alexandre Duval, tous ces académiciens présents ou futurs se réunissaient avec Daru le dimanche à déjeuner, lorsqu’on récitait quelque ode d’Horace, redevenue comme d’à-propos et de circonstance, l’ode Ad sodales ou quelque autre (le sentiment de tous s’y joignant), il ne manquait rien, presque rien, à la traduction de Daru pour faire passer l’esprit de l’original dans tous les cœurs.
» Mais il demeura toujours quelque chose au président Hénault de ces années passées à l’Oratoire ; il lui arriva plus d’une fois d’en regretter l’innocence et la paix ; il a même célébré en vers ces agréables ombrages où se menaient de doux et sérieux entretiens ; ces retraites riantes, disait-il, où le désir est calme et la chaîne légère. […] Mais voilà que de son côté le premier président M. de Mesme, qui avait de l’amitié pour Hénault, et qui passait sa vie avec lui dans les mêmes sociétés, lui parla de son discours prochain et des divers canevas ou projets qu’il en avait fait faire par de très mûrs conseillers ; il lui demanda de mettre tout cela en ordre et de lui rédiger un discours qui fût en situation : ce que fit volontiers notre président. […] S’il n’y avait dans l’édition à laquelle est attaché le nom d’un arrière-neveu de l’auteur que des inexactitudes légères, en si grand nombre qu’elles fussent, j’aimerais à les passer sous silence : malheureusement toute la partie historique en est atteinte et compromise, ainsi qu’on va en juger.
Après la révolution de 1830, M. de Pontmartin retourna passer quelques années dans son pays d’Avignon, avant de venir chercher la réputation littéraire à Paris. […] Les trois ordres de la société, selon lui, « la société chrétienne au nom de sa foi, le monde aristocratique au nom de son honneur et de son orgueil, la classe bourgeoise au nom de ses intérêts, tous s’accordent dans un sentiment de répulsion et d’alarme à l’endroit de la littérature. » Recherchant les causes de cet abaissement général, de ce désaccord de la littérature avec la société, il en demande compte à la critique ; il partage celle-ci en trois catégories, et toutes les trois également impuissantes ou stériles, sous lesquelles il ne tient qu’à nous de mettre des noms : la critique dogmatique et immobile (Gustave Planche, probablement) ; la critique qui se joue en de fantasques arabesques (apparemment Janin, ou Gautier, ou Saint-Victor) ; et celle qui se réfugie dans le passé pour n’avoir pas à se déjuger et à se contredire dans le présent (c’est moi-même, je le crois). […] Voilà comment les choses se passent dans la réalité et sans tant de solennel.
Aussi, nous qui regrettons personnellement, et regretterons jusqu’au bout, comme y ayant le plus gagné à cet âge de notre meilleure jeunesse, les commencements lyriques où un groupe uni de poëtes se fit jour dans le siècle étonné, — pour nous, qui de l’illusion exagérée de ces orages littéraires, à défaut d’orages plus dévorants, emportions alors au fond du cœur quelque impression presque grandiose et solennelle, comme le jeune Riouffe de sa nuit passée avec les Girondins (car les sentiments réels que l’âme recueille sont moins en raison des choses elles-mêmes qu’en proportion de l’enthousiasme qu’elle y a semé) ; nous donc, qui avons eu surtout à souffrir de l’isolement qui s’est fait en poésie, nous reconnaissons volontiers combien l’entière diffusion d’aujourd’hui est plus favorable au développement ultérieur de chacun, et combien, à certains égards, cette sorte d’anarchie assez pacifique, qui a succédé au groupe militant, exprime avec plus de vérité l’état poétique de l’époque. […] Toutes les pièces à Délie respirent la grâce, l’esprit uni au sentiment ; la dernière, le Retour chez Délie, déroule l’âme d’Hélène dès l’enfance, et les orages du passé ; la première, encore souriante, Du goût des vers pourquoi me faire un crime ? […] L’idée de l’ancienne élégie de l’Indiscret est reprise dans Réveil, et le premier mouvement a toute la secousse d’un effroi ressenti : C’est qu’ils parlaient de toi, quand, loin du cercle assise, Mon livre trop pesant tomba sur mes genoux ; C’est qu’ils me regardaient, quand mon âme indécise Osa braver ton nom qui passait entre nous.
On veut donner à la vertu l’air de la duperie, et faire passer le vice pour la grande pensée d’une âme forte ; il faut que la comédie s’attache à faire sentir avec talent que l’immoralité du cœur est aussi la preuve des bornes de l’esprit ; il faut qu’elle parvienne à mettre en souffrance l’amour-propre des hommes corrompus, et qu’elle fasse prendre au ridicule une direction nouvelle. […] La vie s’écoule, pour ainsi dire, inaperçue des hommes heureux ; mais lorsque l’âme est en souffrance, la pensée se multiplie pour chercher un espoir, ou pour découvrir un motif de regret, pour approfondir le passé, pour deviner l’avenir, et cette faculté d’observation, qui, dans le calme et le bonheur, se porte presque entièrement sur les objets extérieurs, ne s’exerce dans l’infortune que sur nos propres impressions. L’action infatigable de la peine fait passer et repasser sans cesse dans notre cœur des idées et des sentiments qui tourmentent notre être en dedans de nous-mêmes, comme si chaque instant amenait un événement nouveau.
Un jour il prit la plume, et de son style de poète il essaya de faire passer son enthousiasme dans l’âme du jeune Louis XIII. […] Montaigne a bien délimité l’inconnaissable : mais s’il vit à l’aise dans son positivisme, tous les esprits qui ne peuvent se passer de certitude demandent à la foi de parler où la raison se tait. […] L’idée capitale de la Renaissance est passée dans les faits : la substitution des genres gréco-romains aux vieux genres français est définitivement acquise, et notre littérature, à peu près détachée du moyen âge, va se relier à l’antiquité.
Ainsi l’habitude de penser par épigrammes ou par sentences passe chez lui en nature. […] Elle ne passera dans l’Esprit des Lois que mutilée, rétrécie, presque faussée : car Montesquieu, supprimant à peu près les intermédiaires réels et vivants, l’homme, son âme, son corps, relie les lois humaines aux causes naturelles par un rapport direct et en quelque sorte artificiel ; il ne s’attache qu’à présenter abstraitement le tableau des dépendances réciproques et des variations simultanées qu’il a constatées entre les climats et les institutions. […] Au point de vue politique, notre démocratie échappe de plus en plus à ses cadres et à ses formules, et le réduit à n’être que le théoricien d’un passé médiocrement aimé.
Au sortir du collège, la Nécessité passe à l’enfant sa robe virile, l’uniforme d’un métier ou d’une profession, et elle le pousse dans la mêlée humaine, comme les soldats orientaux qu’on chassait au combat, à coups de fouet. […] La scène se passe dans un pays romanesque, étranger aux lois du code commercial. […] elle a passé sa vie à deux pas de la pauvreté, et ce voisinage lui inspire une peur si affreuse, qu’elle prend tous les déguisements pour lui échapper.
Tantôt, à propos des solennités de réception, il déclare doucement et d’un ton de doléance que « le temps est passé, il faut bien en convenir, de ces réunions brillantes que la mode comptait parmi ses fêtes ». […] J’insiste sur la date, parce qu’en relisant ces volumes, ceux qui les ont le plus goûtés dans leur primeur les trouveront un peu vieillis et déjà en partie passés. […] « Peu de temps après ce rapprochement, dit l’historien sans avoir l’air d’y toucher, la princesse fut reconnue enceinte, et avant sept mois elle accoucha d’un enfant qui ne vécut pas. » Cela veut dire en bon gaulois que la princesse passait pour être déjà enceinte, quand elle jugea nécessaire de venir retrouver son mari.
Si, par exemple, il accordait tant à la constitution municipale des vieilles cités, s’il croyait à la perpétuité de cette constitution depuis les Romains et à travers les diverses conquêtes, s’il en faisait le pivot de sa théorie politique, c’est que cela s’était passé ainsi à Brignoles et aux environs, dans la Provence ; il transportait involontairement au reste de la France cette forme permanente et latente de constitution dont la tradition locale avait tout d’abord frappé son esprit, l’avait imbu et comme affecté d’un premier amour. […] Rabelais avait fait l’un de ses contes les plus plaisants sur une religieuse de Brignoles ; tout en réfutant le conte dans sa Notice sur Brignoles, Raynouard se souvient que Rabelais a passé par sa ville natale. […] À quarante ans passés, Raynouard allait y débuter avec le feu d’un jeune homme, et, de plus, avec la solidité d’un vétéran.
Je ne sais pas de plus belle page historique que celle où il nous peint ce soudain passage du découragement et de l’assoupissement des esprits, qui leur fait croire que le mal présent ne finira jamais, à l’extrémité toute contraire par laquelle, loin de considérer les révolutions comme impossibles, on arrive à les trouver chose simple et facile : Et cette disposition toute seule, ajoute-t-il, est quelquefois capable de les faire… Qui eût dit, trois mois devant la petite pointe des troubles, qu’il en eût pu naître dans un État où la maison royale était parfaitement unie, où la Cour était esclave du ministre, où les provinces et la capitale lui étaient soumises, où les armées étaient victorieuses, où les compagnies paraissaient de tout point impuissantes, qui l’eût dit eût passé pour insensé, je ne dis pas dans l’esprit du vulgaire, mais je dis entre les d’Estrées et les Senneterre. […] Lorsque Saint-Simon, de son côté, nous peint les délices et le chatouillement qu’il éprouve à pouvoir observer les visages et les physionomies de la Cour dans les grandes circonstances qui mettent les passions et les intentions secrètes à nu, il ne s’exprime pas avec un sentiment plus vif de délectation que Retz nous rendant sa jouissance à l’idée de se saisir du rôle tant souhaité : on en pourrait conclure que l’un était dans son centre comme observateur, et l’autre comme agitateur, artistes tous deux en leur sens, et consolés après tout par leur imagination, quand il leur est donné de raconter leur plaisir passé et de le décrire. […] Il passait de l’une à l’autre : ainsi ce qui lui paraissait un jour plus léger, lui paraissait le lendemain plus pesant.
Fréron, dans L’Année littéraire, ne manqua pas cette occasion de critique ; il y raillait l’enthousiasme lyrique du jeune poète, méconnaissait les beautés réelles de son ode, et disait en propres termes : « Il m’est passé bien des odes par les mains ; je n’en ai point encore lu d’aussi mauvaise que celle de M. […] C’est vers cette (époque qu’eut lieu chez l’aimable peintre Mme Lebrun (laquelle n’était nullement parente du poète) un souper improvisé qui fit bruit, et où tout se passa à la grecque. […] Il a loué le héros, comme il avait loué déjà indifféremment Louis XVI, Calonne, Vergennes, Robespierre1, sans préjudice des petites épigrammes qu’il se passait dans l’intervalle et qui ne comptaient pas.
Rica est l’homme moqueur, Parisien dès le premier jour et peignant avec badinage les travers et les ridicules des originaux qui passent sous ses yeux et desquels il s’accommode : Usbek, plus sérieux, résiste et raisonne ; il aborde les questions, il les pose et les discute dans les lettres qu’il adresse aux théologiens de son pays. […] Je passe la nuit sans m’éveiller, et le soir, quand je vais au lit, une espèce d’engourdissement m’empêche de faire des réflexions. […] Il se dégagea de ses liens, vendit sa charge, fut reçu en 1727 à l’Académie française, bien qu’il s’en fût beaucoup moqué comme tout le monde, avant d’en être, et il entreprit, au printemps de 1728, ses voyages en commençant par l’Allemagne, la Hongrie : à Vienne, il vit assidûment le prince Eugène ; en arrivant à Venise, il eut le plaisir d’y rencontrer Bonneval qui n’était pas encore passé chez les Turcs ; il visita Turin, Rome, l’Italie, revint par la Suisse, les bords du Rhin et la Hollande, et acheva son cours d’observations par l’Angleterre (octobre 1729).
La Correspondance de Grimm passe en général pour sévère, un peu sèche dans sa justesse, et même légèrement satirique ; mais, à l’origine, Grimm eut l’enthousiasme et cet amour du beau qui est l’inspiration de la vraie critique. […] Sans prétendre à en pénétrer les causes, il lui semble qu’une expérience constante l’a suffisamment démontré : Quand ce siècle est passé, les génies manquent ; mais, comme le goût des arts subsiste dans la nation, les hommes veulent faire à force d’esprit ce que leurs maîtres ont fait à force de génie, et, l’esprit même devenu plus général, tout le monde y prétend bientôt ; de là le bon esprit devient rare, et la pointe, le faux bel esprit et la prétention prennent sa place. […] Alors il essaye de la poésie didactique et philosophique à la suite de Voltaire ; mais le vent tourne encore, et L’Esprit des lois de Montesquieu vient tenter Helvétius d’entreprendre ce malencontreux livre De l’esprit, qui arrivera lui-même quand le moment de faveur sera passé.
Je pourrais relever bien d’autres singularités de pensée et d’expression dans ce discours ; je me hâte d’ajouter que, malgré tout, il réussit fort tant à l’Académie que devant le public ; les juges les plus difficiles, en s’accordant à reconnaître « que la langue semblait manquer à tout moment à l’auteur », le lui passèrent en faveur de ce qu’on appelait l’énergie ou la nouveauté de ses pensées. […] Un métier de tapisserie, qu’on peut avancer ou reculer sans peine, est habituellement devant elle, et ses bras posés sur une tenture toujours commencée, afin qu’on n’y aperçoive aucun motif, elle passe et repasse une aiguille avec une noble nonchalance. […] Il y a encore le moment où l’on passe du salon dans la salle à manger qui est une épreuve périlleuse, et qui devient le signal du grand conflit pour les amours-propres : il est merveilleusement décrit.
C’est un album dont la rêverie d’une femme tourne les feuilles ; c’est un appel, sans ordre, à des souvenirs qui s’en viennent vers vous, un à un, évoqués par des paysages ; ce sont enfin les méandres d’une âme qui se replie sur elle-même, dans les mélancolies du passé. […] Pour ma part, j’ai vu peu de choses sentimentalement aussi belles, J’ai peu vu de ces langages, inouïs d’ardeur, de mouvement, d’aspiration, d’expression inspirée, poignante, navrée ou héroïque dans la douleur et dans l’amour ; j’en ai peu vu de pareils, même dans les livres, religieux ou profanes, qui passent pour les plus passionnés, pour les plus chauffés au feu des brûlantes larmes humaines. […] Si vous mutilez mon être moral pour rendre à Dieu la tâche aisée, Dieu refusera de telles facilités. » Ni le repos promis par les uns, ni la contemplation immobile dans la lumière, décrite par les autres, car, le repos, « c’est l’oubli du passé, l’effacement de tout, excepté de l’ardeur présenté, éternelle, identique », ne peuvent satisfaire l’âme exigeante qui veut vivre dans les cieux avec des intensités plus grandes que celles de la terre, et qui demande au Paradis un Dieu personnel à aimer de toute l’énergie de sa personnalité à elle-même.
Comme le moyen âge, elle hérite de tout le passé : elle le reçoit obscurci, brisé, confondu ; elle le dément tour à tour et le répète ; elle lui prend ses fictions et les éclaire d’une vérité nouvelle ; elle lui prend ses vérités, et les rend plus pathétiques et plus vastes ; elle bâtit Saint-Pierre de Rome avec les débris des temples païens, mais elle place au sommet la coupole de Michel-Ange. […] Mais, sur la route du ciel et dans le ciel même, l’admiration mystique n’a pas de repos, et l’enthousiasme ne peut passer ni renaître. […] Alors une Cianghella, un Lapo Salterello, auraient passé pour un prodige, tels que le seraient aujourd’hui un Cincinnatus et une Cornélie.
Il n’y a pas de danger qu’on se méprenne sur ce mot Éloge : il ne saurait s’appliquer qu’au grand écrivain toujours debout et subsistant ; l’homme et le caractère sont dorénavant trop connus, trop percés et mis à jour pour que l’éloge puisse y prendre pied décidément, et quoique les appréciations de ce genre soient sujettes à de perpétuelles vicissitudes, quoiqu’il semble qu’en littérature et en morale les choses ne se passent point comme dans la science proprement dite et que ce soit toujours à recommencer, je pense toutefois qu’il y a, dans cet ordre d’observations aussi, de certaines conclusions acquises et démontrées sur lesquelles il n’y a pas lieu pour les bons esprits à revenir. […] Dans cette persuasion, il fait avec une pleine et entière sécurité ce qui lui passe par la tête, sans s’approuver ni se blâmer le moins du monde.
De braves lieutenants s’y acharnèrent beaucoup trop ; des bois dérobaient à Napoléon ce qui s’y passait d’héroïque, mais d’un peu inutile à l’ensemble des opérations, comme dans un siège séparé. […] … » Que s’était-il donc passé dans l’intervalle autour de Napoléon ?
Quand on se sert de ces phrases, on ne passe point par le long détour de l’association des idées : on ne songe même pas à Philis, à Ulysse, à Émilie, et en les nommant on ne va point au-delà des sons. […] Il faut proscrire sans indulgence tout ce cliquetis qui amuse l’oreille sans passer outre : ces analogies de sens, qui obligent à donner aux mots une articulation plus nette, un accent plus fort, doivent faire jaillir des rapports de sens ; il faut qu’elles enfoncent ou qu’elles illuminent la pensée.
Mais rien n’aboutissait : dans la littérature, qui seule doit nous occuper, tous les efforts individuels se perdaient dans l’inerte masse des débris du passé. […] Cependant un grand effort se fait pour élever à la forme de l’art, sinon toute la littérature, du moins celle de ses parties qui peut le mieux s’y prêter, ou le moins s’en passer : la poésie.
« Le dernier acte se passe en partie dans le tombeau du commandeur où celui-ci a invité à son tour Don Juan à venir souper. […] vous savez que mon maître est à tous les diables, où, vous autres, grands seigneurs, irez aussi quelque jour : réfléchissez donc sur ce qui vient de se passer.”
Certains, donnés inédits, manquaient tout de même un peu trop d’originalité comme ces Marguerites du temps passé, de Mme James Darmesteter, dont les pages les plus savoureuses avaient un parfum un peu vif de Brantôme : les musiciens, n’est-ce pas, madame, ne sont point seuls exposés aux fâcheuses réminiscences… D’autres écrivaines, Mesdames Bertheroy, Judith Gautier, Stanislas Meunier, Augustine Filon, Andrée Theuriet, et Jane Dieulafoy accaparèrent la Collection que, jusque hier, le seul M. […] Le rédacteur captive des sympathies qui vont non à ses créations, mais aux glorieux bonshommes pour qui il les fait passer.
Bergson, l’écrasement de la conscience individuelle (par le mot qui en est l’expression impersonnelle et sociale) n’est aussi frappant que dans les phénomènes du sentiment27. » Qu’une émotion profonde, une mélancolie indéfinissable, que le souvenir heureux ou triste d’une heure lointaine émergent du fond de notre passé et envahissent notre être tout entier ; le frisson de cette émotion ne pourra se propager dans l’atmosphère opaque qui nous sépare d’autrui de la même façon que se propage une onde lumineuse ou sonore. […] Il y a au fond de l’amour une volonté de lutte et de domination. — Ce qui se passe dans la série animale éclaire l’essence du phénomène amoureux chez l’homme.
Voilà donc une première raison pour laquelle le physicien ne peut se passer des mathématiques ; elles lui fournissent la seule langue qu’il puisse parler. […] Or, en ce qui concerne ce mouvement, les deux lois ne diffèrent que par la forme ; on passe de l’une à l’autre par une simple différenciation.
Les prophètes, vrais tribuns et en un sens les plus hardis tribuns, avaient tonné sans cesse contre les grands et établi une étroite relation d’une part entre les mots de « riche, impie, violent, méchant », de l’autre entre les mots de « pauvre, doux, humble, pieux 510. » Sous les Séleucides, les aristocrates ayant presque tous apostasié et passé à l’hellénisme, ces associations d’idées ne firent que se fortifier. […] Le grand mouvement ombrien du XIIIe siècle, qui est, entre tous les essais de fondation religieuse, celui qui ressemble le plus au mouvement galiléen, se passa tout entier au nom de la pauvreté.
Il faut observer, du reste, que ces pouvoirs étaient en quelque sorte passés en métier. […] Le mot grec [Greek : pandokeion] a passé dans toutes les langues de l’Orient sémitique pour désigner une hôtellerie.
On y passe plus d’une fois en Angleterre, ou, mieux, on ne cesse pas de l’embrasser d’un même regard parallèlement avec la France, et de suivre l’histoire de la littérature et de l’éloquence anglaise durant tout le siècle, depuis Bolingbroke jusqu’à M. […] Les diverses phases par lesquelles la prose a passé depuis la fin du xvie siècle s’éclairent avec précision ; les moindres variations de régime dans les formes et les vogues successives du langage viennent se fixer avec une sorte de méthode et de rigueur, non seulement par l’étude de quelques écrivains célèbres, mais aussi par celle de beaucoup d’écrivains secondaires et pourtant agréables, auxquels on avait peu songé.
Pour ces quelques heures de vie, un peu monotones parfois, que nous passons sur la terre, nous allons nous donner tant de mal, écrire un bréviaire, rédiger un règlement, que la plupart d’entre nous n’auront même pas le temps d’observer ! […] Une mauvaise nuit est bientôt passée, et, au lieu de me mettre en peine, j’entends aller à l’aventure et sans autre souci jusqu’au bout de ce fossé où votre générosité m’annonce la culbute définitive.
Passe pour un poète de se fâcher ! […] Il a représenté un type alors prédominant, mais qui a passé, n’étant point assez conforme à celui de la vie simple et éternelle.
Tuer un homme endormi, après possession préalable, bien entendu, — une idée qui a passé dans la tête, et jusque dans la main de la dame cosaque d’aujourd’hui, car son poignard était déjà levé, quand l’homme menacé se réveilla ; — le tuer, cet homme endormi qui avait été à tant de femmes, pour qu’il ne fût plus à personne, n’est pas une idée d’originalité très cosaque, mais du plus vieux, du plus usé et du plus plat romanesque de partout, à cette heure, sotte et folle, de ce beau monde civilisé ! […] la main sur la conscience, ce n’est pas parce qu’on s’est donnée à un homme ; parce qu’on s’est jetée à sa tête comme un projectile ; qu’on a pris la poste, du fond de la Russie, pour aller le prendre, lui, à Rome et qu’on l’y a pris, car le Don Juan ici, c’est Madame, — si on en croit Madame, — et Monsieur, c’est Mademoiselle Jocrisse, qui fait bien quelques petites façons, mais qui enfin y passe, comme disaient gaiement nos pères !
Il est vrai que le sujet, unique et varié, de ces diverses œuvres, était la question d’histoire contemporaine qui nous passait le plus près du cœur, puisque c’était l’histoire de la France en Afrique et la destinée de sa conquête ; mais, il faut être juste, ce n’est pas le prodigieux intérêt d’un pareil sujet qui fut exclusivement la cause du succès du général Daumas. […] Qu’on nous passe le mot !
Sur ce mot d’avocat, malgré le nom de Montesquieu qui vous accroche et qui vous retient, j’aurais filé et volontiers passé outre… J’ai peu de goût pour les avocats en littérature. […] Il y passa deux ans, et son esprit y prit des lettres de naturalité.
Ce n’est pas un de ces ardents épouseurs du passé qui aiment et défendent les causes perdues, et le pauvre René d’Anjou a perdu toutes les siennes ! […] L’honneur chevaleresque, encore la religion de ce temps et qui passait alors avant l’intérêt matériel des patries, s’était indigné, et la chrétienté tout entière, qui était l’opinion, avait poussé un terrible cri.
Il est vulgaire comme un passant, et un passant déjà passé, car son livre est de 1853. […] si on lit son livre en Amérique.) — Or, pour montrer à quel point cet orgueil est stoïquement invulnérable, il nous raconte une éloquente anecdote, dans laquelle il ne casse pas la cuisse d’Épictète, mais crache un jour par inadvertance sur un Américain qui passait, et qui ne se retourna même pas.
Il a mieux aimé être agréable, être piquant, et même çà et là surprenant, sur des sujets usés et aplatis par le rouleau de tant de pédants qui passe dessus depuis des années ! […] III Nous voilà enfin arrivés à l’une des deux places de son volume où l’auteur de ces délicieuses bribes d’histoire, enlevées comme des bulles de savon et aussi colorées, se métamorphose et se permet la fantaisie d’être profond… C’est justement quand, dans l’ordre de ses Notices, il arrive à madame de Maintenon, et que lui, l’amoureux de madame de Sévigné, il passe à l’ennemi, si on peut dire l’ennemi d’une femme qui, pour avoir la raison la plus haute qu’une tête féminine ait jamais possédée, avait autant d’agrément à sa manière que la vive et brillante Sévigné.
Il ne lui passait pas la manche de son habit. […] Je me moque, moi, des éloges adressés au Globe, dont je n’étais pas, et dont Gœthe ne pouvait, dit-il, se passer !
… Pourquoi ne pas laisser tranquilles un temps et un homme qui ont eu assez d’historiens comme cela, et qui prouvent, avec la plus désagréable évidence, combien le passé l’emportait, dans ses idées, ses mœurs, ses institutions et ses hommes, sur les hommes, les institutions, les mœurs et les idées sortis de nos glorieuses et modernes révolutions ? […] Qu’importe qu’on y passe auprès de figures comme Frédéric II, — ce poème de Lord Byron au Moyen Âge, — comme Grégoire IX, — cette énergie de quatre-vingt-dix-huit ans, — comme Urbain IV, Clément IV, Alexandre IV, sans que l’auteur les regarde et soit tenté d’en faire le portrait !
De souplesse vertébrale il passe là-dessous joyeusement. […] En France, c’était alors plus difficile, cela, que de passer le Rubicon… Quant à son fils, Henri de Guise, tout ambitieux qu’il fût, tout enivré qu’il fût de la faveur populaire, et tout méprisant qu’il fût aussi de cette race hermaphrodite des Valois, rivale de la sienne, il n’osa pas.
Elle est passée… passée comme les rubans hortensias qui servaient de serre-tête à nos grands-pères !
Jean Reynaud passe en ce moment pour une œuvre très forte. […] Le traité de Terre et Ciel, qui résume toute sa vie intellectuelle, car il a été effeuillé dans des revues et des journaux depuis dix ans, ce traité, regardé comme un système, à toute solution, par un petit nombre de gens solennels et mystérieux, qu’on pourrait appeler les Importants de la philosophie, est, qu’on nous passe le mot (le seul qu’il y ait, hélas !
« J’ai eu », dit-il dans une lettre à M. de Montalembert, « le fanatisme de l’expression, le fanatisme de la beauté dans les formes, et ce fanatisme est passé… Je dédaigne plutôt que je n’admire ce talent qui est plus une maladie de nerfs qu’un talent de l’esprit… », ce qui est assez insolent et assez faux, par parenthèse, et au moment même où il écrit cela, sans transition et comme pour se punir, il ajoute ce mot de rhéteur inconséquent, de rhéteur incorrigible, qui tout à coup reparaît « les formes d’une lettre ne sont ni littéraires ni belles », misérable axiome de rhétorique, non moins faux ! […] Quoiqu’il ait eu, comme orateur, ses deux à trois moments sublimes, Donoso Cortès, ni dans le journal ni à la tribune, n’a été un de ces voyants à distance, qu’on nous passe le mot, un de ces prophètes de longueur qu’il faut forcément être, si, comme orateur ou comme journaliste, on a la prétention, que je trouve un peu forte, de ne pas mourir.
Elle passe sur plus d’hommes et de choses qu’elle n’en immole. […] Franchement, quand plus de deux mille ans ont passé sur la poussière de telles philosophies, continuées par de telles sophistiques, et que la clarté du Christianisme — la seule vérité qui soit à la portée de l’homme — est tombée du ciel sur cette poussière, quel intérêt y a-t-il pour nous à en compter les grains et à les peser dans les toiles d’araignée du temps ?
Il leur a lestement passé par-dessus la tête à tous, et il est allé droit à leur père commun, à Hegel. […] … Cette chemise-là, cette chemise du spiritualisme pur que Cousin a déterrée dans un des vieux bahuts de Leibnitz, et qu’il a passée, comme à bien d’autres, à Caro, nous avait, jusqu’à ce dernier moment, paru insuffisante autant que… nécessaire ; car on n’est pas vêtu avec une simple chemise, et le spiritualisme pur et réduit à ses propres notions n’est que cela !
L’autre part n’est plus si belle et si douce ; J’expie en ce jour les bonheurs passés ; Mes ramiers n’ont plus de pentes de mousse Où poser leurs pieds meurtris et glacés ! […] Nous ne savons pas si nous nous trompons… mais au mouvement de ces vers, à leur réchauffement, à leur battement d’ailes, au souffle de tendresse et de plainte qui y passe en notes si simples et si pressées, l’épée est brisée, la cape est brûlée et le Naturel commence, le Naturel, cette fleur tardive de nos automnes intellectuels !
Il pouvait tenailler et reforger à froid des sujets qui avaient passé sur des enclumes plus brûlantes que la sienne, mais qui gardaient sous son marteau des empreintes et des contournements qu’il n’était pas de force à effacer. […] Athée, comme on l’était au xvie siècle et comme l’était Stendhal, son maître, il affecte la scélératesse dans le ton et ne serait pas fâché, j’en suis sûr, de passer pour un petit Borgia littéraire.
Des monuments de sa grandeur passée, et la triste monotonie de la servitude présente, voilà ce qui lui restait. […] Dion composa quatre discours sur les devoirs des rois : il y en a un surtout qui peut passer pour un véritable panégyrique de Trajan.
La douleur irritée de Cérès, la vengeance dont elle menace les humains en laissant la terre inculte, est vaincue par les prières de Rhéa, sa mère, et par la promesse qu’elle reverra sa fille et passera désormais avec elle dans l’Olympe les deux tiers de l’année. […] Aujourd’hui ils sont tombés sur nous, et nous voilà tout haletants de notre plaie sanglante ; ensuite ils passeront à d’autres.
C'est la seule chose qui lui reste de son passé ; ce grain de sel de l’autel sur son pain devrait le faire se ressouvenir un peu, et lui faire relire le chapitre xiv, livre III de l’Imitation, avec le commentaire qu’il y a joint sur les chutes par orgueil.
Fuster, je dirai qu’elle se passe pendant la dernière guerre ; que deux fiancés, Louise et Pierre, recueille et, soignent un blessé, lequel se prend d’amour pour la jeune fille ; mais le malade, rendu à la santé, retourne parmi les siens ; Louise revient peu à peu à celui qui n’a cessé de l’aimer et oublie ce mirage d’un instant qui avait trompé son cœur.
Qu’importent les objections de détail qui ne prévalent pas contre le robuste chant d’une voix pure, jamais lasse et préférable à toutes les gloses, un peu malignes peut-être, mais qui me furent inspirées par une très vive estime pour l’œuvre passée et une très vive espérance que l’œuvre future lui sera supérieure encore !
La première partie : La Maison du passé indique, par une certaine attitude lassée et pessimiste, l’état des esprits à l’époque où furent écrites les pièces qui la composent.
Q’il éveille l’atencion ou qu’il passe inaperçu, au fond de ma retraite, je ne le saurai pas.
Il casse avec plaisir les ailes du vieil alexandrin, et il savoure je ne sais quelle volupté néronienne à voir sa victime panteler au ras du sol comme un oiseau blessé : Des voix confuses passent à travers la brume… ……………………………………………………… Ce pendant qu’au ciel tranquille un soleil pâlot Sommeillait, qui parfois laissait errer sa bouche À la cime fuyante et sonore du flot.
Les années qu’il m’est donné de vivre encore ne me réservent pas d’aussi douces heures que celles que j’ai passées au milieu d’eux, au sein de devoirs aimés, surprenant ou veillant dans de jeunes cœurs ouverts à toute parole sincère ces secrètes conformités de l’écrivain et du lecteur qui font la vie des ouvrages d’esprit.
. — Mais à côté de la partie qui, dans l’individu, est façonnée par les influences sociales passées ou présentes, il y a un fond physiologique et psychologique qui lui est propre et qui apparaît comme un résidu irréductible aux influences sociales.
Il en sortit huit mois après, pour cause de maladie, & fut exilé dans ses Terres en Bourgogne, où il passa dix-sept ans à cultiver les Lettres, toujours avec la même ardeur & les même défauts.
ce bizarre enthousiasme les porte à tant d’intrigues, à tant de manéges, à tant de folles déclamations, qui ne trompent tout au plus qu’un moment, que celle-ci mérite une gloire particuliere pour avoir consacré sa plume à la défense des Héros des siecles passés, & vraisemblablement des siecles à venir.
Il vouloit que dans celle de dix Vers, on marquât un repos après le quatrieme & le septieme, & que dans celle de six Vers, on en marquât un autre au milieu, minuties très-indifférentes, & dont on se passe très-bien.
Ses écarts sont comme les débordemens du Nil, qui répandent la fertilité dans tous les lieux où ils passent.
Mill, il est vrai, s’est assez longuement occupé de la question9 ; mais il n’a fait que passer au crible de sa dialectique ce que Comte en avait dit, sans y rien ajouter de vraiment personnel.
Mais puisque l’article a excité tant de tumulte et que, depuis trois mois passés, ni la trêve du premier jour de l’an, ni la chute du ministère, ni la démission d’un président de la République, ni l’élection de M. […] I Les temps ne sont pas très éloignés de nous où l’incrédulité savante passait communément pour marque, ou pour preuve, de supériorité d’intelligence et de force d’esprit. […] Que s’est-il donc passé depuis lors ? […] Ce sera l’affaire de deux mots et de trois questions, — dont la première est déjà bien jolie, mais la seconde l’est encore davantage, et la troisième les passe toutes deux. […] La science peut donc bien avoir aujourd’hui le droit de passer leurs idées comme au crible et de n’en retenir que ce qu’elle y reconnaît de conforme à ses propres certitudes.
J’ai souvent vu, dans l’Amérique du Sud, un Tyran Gobe-Mouche (Saurophagus sulphuratus), planer au-dessus d’un lieu, de là passer à un autre, comme une Cresserelle (Tinnunculus) ; et d’autres fois demeurer immobile à l’affût au bord des eaux, puis s’y élancer soudain à la poursuite d’un poisson, comme un Martin-Pêcheur (Alcedo). […] Dans la recherche des degrés successifs de perfection par lesquels un organe a passé successivement en se perfectionnant chez une espèce quelconque, il faudrait considérer exclusivement la série rétrogressive de ses ancêtres ; mais il nous est presque impossible de remplir une telle condition. […] Pour découvrir les degrés primitifs de transition à travers lesquels cet organe a passé, il nous faudrait rechercher les formes ancestrales les plus anciennes qui se sont éteintes depuis longtemps. […] Il nous devient aisé d’expliquer le fait étrange, constaté par le professeur Owen, que chaque particule de nourriture solide ou liquide que nous avalons doit passer sur l’orifice de la trachée, avec risque de tomber dans les poumons, nonobstant l’admirable combinaison au moyen de laquelle se ferme la glotte. […] Il se passa donc encore ici une succession de phénomènes analogues à ceux qui résultèrent de la conquête de l’air par le poisson volant.
Au fond les gens sages du clergé en passeront par ce Rapport et seront trop heureux si les conclusions en sont adoptées.
Le charme virgilien, le souffle de Théocrite passent en mouvements lumineux dans ses tableaux.
Victor-Émile Michelet Corsaire breton qui crocha dans les cordes de la lyre, avec la sauvagerie héritée de la mer et du sol granitique, Tristan Corbière passe sur les vagues des littératures comme à bord de son Redan, isolé et dédaigneux.
. — Le Chevalier du passé (1892). — La Fin d’Antonia (1893). — Les lauriers sont coupés, avec trois poèmes et les Hantises (1898). — L’Initiation au péché et à l’amour (1898).
Depuis longtemps, Les chanteurs d’amour, de printemps, D’idéal et de fantaisie Ne sont plus écoutés ni lus, Et l’on compte trop peu d’élus Dans le ciel de la poésie… Prenez donc ce coffret où dort Mon passé, cher et jeune mort, Fleuri de fis et d’asphodèles, Et dans quelque abîme profond, Au fond, poète, jusqu’au fond, Jetez-le de vos mains fidèles !
Pour justifier un pareil choix, il entreprit de la faire passer pour une Muse, en publiant quelques vers sous son nom.
Il répondit à un homme qui s’obstinoit à défendre la Métempsycose : Je savois bien que l’ame des Hommes, selon ce systême, devoit passer dans le corps des animaux ; mais vous m’apprenez que l’ame des animaux repasse dans le corps des Hommes : Réponse vraiment convenable à nos lumineux Matérialistes, qui renchérissent encore sur les Pythagoriciens.
Je ne sais point s’il passera à la postérité, mais il faudra pour cela qu’il ressuscite, puisqu’on peut dire qu’il est déjà mort, n’étant presque plus maintenant lu de personne. » Nous remarquerons, avant de finir cet article, qu’on lit dans une Ode de M.
Si l’Eloquence consiste à faire passer dans l’ame d’autrui le sentiment dont on est soi-même pénétré, à s’emparer fortement d’un sujet, à en connoître toutes les ressources, & à les déployer avec autant de méthode que d’énergie, M. l’Abbé Maury ne sauroit figurer parmi les Orateurs vraiment éloquens.
Ne vaudroit-il pas mieux se guérir de la démangeaison du Théatre, si on est sans talent, ou, si l'on en est pourvu, se borner à ne produire dans tout le cours de sa vie qu'une ou deux bonnes Pieces, que d'amuser le Public par des bagatelles qui passent bientôt de vogue, sans avoir le mérite de reparoître une seconde fois avec succès ?
On passe alors de la grandeur à la douceur des images : sous l’ombrage, des forêts, on parcourt l’empire de l’Ange de la solitude ; on retrouve dans la clarté de la lune le Génie des rêveries du cœur ; on entend ses soupirs dans le frémissement des bois et dans les plaintes de Philomèle.
Je me souviens qu’à l’âge de ces enfants, mes camarades et moi, nous pensâmes démolir un des bastions de ma ville, et passer les vacances de la semaine sainte en prison.
En un mot, ils font passer les radicaux par toutes les transformations légitimes et adéquates.
Madame d’Aulnoy, qui a créé Le Prince gracieux, est souvent un Tacite qui s’ignore, et elle a des portraits, dans ses Mémoires, — comme celui, par exemple, de la grande camerera-mayor, la duchesse de Terra Nuova, — d’un terrible aussi sombre que si les plus sinistres peintres de l’Espagne y avaient passé !
Un seul jour passé suivant tes préceptes est préférable à l’immortalité de quiconque s’en écarte. […] « Pouvoir se passer des Grecs dans l’étude de la philosophie sera sans doute glorieux pour les Romains : eh bien ! […] Aussi ce livre de la République passait-il à Rome et en Grèce pour l’apogée du génie, de la philosophie et de la politique de Rome. […] Alors il n’avait pu se passer de roi ; maintenant, après l’expulsion de Tarquin, le nom même de roi lui était odieux. » Il combat ensuite, avec une vigueur qu’il puise dans la conscience autant que dans la raison, la doctrine de Machiavel, vieille comme le monde, qu’on doit gouverner les hommes par l’habileté et l’injustice, pourvu que l’habileté et l’injustice produisent la force. […] Il était d’une santé faible, et c’est là qu’il a passé dans l’étude des lettres presque toute sa vie.
Un bien qui nous est dû se fait si peu priser, Qu’une femme fût-elle entre toutes choisie, On en voit en six mois passer la fantaisie Mais, lui dit Éraste, tout le monde médit de ce joug, et tout le monde y vient : Pour libertin qu’on soit, on s’y trouve attrapé ; Toi-même, qui fais tant le cheval échappé, Nous te verrons un jour songer au mariage. […] Une fois averti des puissants effets de la nature bien observée, Molière n’eut plus besoin de la comédie d’intrigue : il se passa des personnages de convention. […] Cette émotion qui anime toutes les scènes du Tartufe était passée de l’âme de Molière dans celle de ses personnages. […] Il n’y a pas d’imitation là, où, pour se passer du trait imité, il eût fallu laisser une belle scène incomplète, un personnage boiteux. […] Si l’observation est du génie dans le poète comique, y a-t-il moins de génie à reconnaître la nature dans l’auteur qu’on lit qu’à la surprendre sur l’original qui passe ?
Draghicesco, l’unité ethnique, l’unité nationale est encore une trop grande concession à la diversité ; il faut s’en tenir à l’unité humaine, à la fusion non seulement des individus au sein d’une même race ou d’une même nation, mais de tous les peuples au sein d’une même humanité socialisée sinon dans le passé, sinon même dans le présent, du moins dans l’avenir, grâce aux progrès de l’éducation et de la morale. […] Il les reconnaît sans doute pour le passé, mais il les nie pour l’avenir. […] C’est là que se passe le drame silencieux et insaisissable, intraduisible, en mots, de notre existence. — Il semblerait donc résulter de cette hypothèse que toute la vie sociale restât en dehors de notre existence vraie et qu’elle dût être pour nous sans intérêt véritable comme elle est sans réalité essentielle. […] Passons au second sens du mot science. […] Or, quand on passe des principes les plus généraux de la pensée aux vérités de l’ordre social, le critérium pragmatisme devient d’une extrême subjectivité.
. — Depuis, l’Art moderne, comme toutes choses vivantes, a passé par la triple évolution de la thèse, de l’antithèse et de la synthèse. […] Que se passe-t-il autour de nous ? […] Il a revu, par ce regard, l’essence intérieure du Monde ; et maintenant, il fait jouer aux Cordes une Danse nouvelle, mais telle que le Monde n’en a point entendu (Allegro final) ; car c’est la Danse du Monde lui-même ; joie sauvage, plaintes douloureuses, ravissements amoureux, suprêmes délices, gémissements, transports furieux, jouissances éperdues, et souffrances ; tout cela passe comme des éclairs, dans une tempête ; et, dominant tout cela, l’extraordinaire Ménétrier, qui retient et gouverne ces choses, reste, ferme et fier, tout entier, s’appuyant à l’abîme de la Réalité. […] Cependant, les poètes du siècle passé avaient pressenti le rôle de la Musique ; Schiller écrivait, en 1797, à Goethe : « j’ai toujours eu confiance que de l’opéra, comme autrefois des chœurs des antiques fêtes dionysiaques, surgirait une plus noble forme de tragédie. » C’est Beethoven qui rendit la musique capable de faire ce qu’on attendait d’elle, et Wagner est le grand disciple de Beethoven, l’héritier direct des poètes classiques. […] Il est certain que la philosophie de Schopenhauer comme le bouddhisme passent par le philtre wagnérien pour les lecteurs de la Revue.
Si nous passons la main sur la surface, et si nous jugeons que deux points, A et B, sont séparés par un espace, nous voulons dire simplement qu’il y a une série de sensations musculaires interposée entre le moment où nous sentons A et le moment où nous sentons B. […] Le voisinage et la distance ne signifient pour eux rien de plus qu’un temps plus court ou plus long, un nombre plus petit ou plus grand de sensations, qui sont nécessaires pour passer d’une sensation à l’autre113. » — Nous répondrons que Platner n’en pouvait rien savoir et qu’il se borne à faire une hypothèse ; de plus, cette hypothèse est contraire à l’expérience. […] Comme le mouvement est analysable en positions occupées à divers moments par le mobile, une foule de philosophes, après Kant et Schopenhauer, ont nié à tort la possibilité de sentir ou percevoir le fait du mouvement actuel : ils ont attribué au chien qui voit fuir le lièvre, à l’enfant qui voit passer une bougie devant ses yeux, une analyse plus ou moins consciente des positions successives. […] Toutes les objections éléatiques n’empêcheront pas cette sensation de mouvement de se produire, de nous révéler l’action de quitter un lieu pour passer dans un autre. […] De même, quand un oiseau passe devant nos yeux, l’impression de transition rapide n’est ni celle d’une série d’efforts, ni celle d’une série de résistances.
Est-il vrai que l’âge des grandes choses, des grands esprits et des grandes paroles soit passé pour nous et pour nos descendants, et que nous n’ayons plus qu’à nous résigner à la stérilité et à couvrir nos fronts, comme les prophètes de malheur, de la cendre de nos pères ? […] L’accent de l’hébreu et ses âpres images passent avec lui dans le français, et en fait une langue d’airain. […] Énumérez seulement quelques-unes des conditions innombrables de ce qu’on nomme style, et jugez s’il est au pouvoir de la rhétorique de créer dans un homme ou dans une femme une telle réunion de qualités diverses : Il faut qu’il soit vrai, et que le mot se modèle sur l’impression, sans quoi il ment à l’esprit, et l’on sent le comédien de parade au lieu de l’homme qui dit ce qu’il éprouve ; Il faut qu’il soit clair, sans quoi la parole passe dans la forme des mots, et laisse l’esprit en suspens dans les ténèbres ; Il faut qu’il jaillisse, sans quoi l’effort de l’écrivain se fait sentir à l’esprit du lecteur, et la fatigue de l’un se communique à l’autre ; Il faut qu’il soit transparent, sans quoi on ne lit pas jusqu’au fond de l’âme ; Il faut qu’il soit simple, sans quoi l’esprit a trop d’étonnement et trop de peine à suivre les raffinements de l’expression, et, pendant qu’il admire la phrase, l’impression s’évapore ; Il faut qu’il soit coloré, sans quoi il reste terne, quoique juste, et l’objet n’a que des lignes et point de reliefs ; Il faut qu’il soit imagé, sans quoi l’objet, seulement décrit, ne se représente dans aucun miroir et ne devient palpable à aucun sens ; Il faut qu’il soit sobre, car l’abondance rassasie ; Il faut qu’il soit abondant, car l’indigence de l’expression atteste la pauvreté de l’intelligence ; Il faut qu’il soit modeste, car l’éclat éblouit ; Il faut qu’il soit riche, car le dénûment attriste ; Il faut qu’il soit naturel, car l’artifice défigure par ses contorsions la pensée ; Il faut qu’il coure, car le mouvement seul entraîne ; Il faut qu’il soit chaud, car une douce chaleur est la température de l’âme ; Il faut qu’il soit facile, car tout ce qui est peiné est pénible ; Il faut qu’il s’élève et qu’il s’abaisse, car tout ce qui est uniforme est fastidieux ; Il faut qu’il raisonne, car l’homme est raison ; Il faut qu’il se passionne, car le cœur est passion ; Il faut qu’il converse, car la lecture est un entretien avec les absents ou avec les morts ; Il faut qu’il soit personnel et qu’il ait l’empreinte de l’esprit, car un homme ne ressemble pas à un autre ; Il faut qu’il soit lyrique, car l’âme a des cris comme la voix ; Il faut qu’il pleure, car la nature humaine a des gémissements et des larmes ; Il faut… Mais des pages ne suffiraient pas à énumérer tous ces éléments dont se compose le style. […] La voix s’éteint, l’orateur passe, mais le diapason reste. […] L’espace nous manque ; nous le prendrons dans l’entretien suivant, et nous dirons pourquoi nous ne désespérons pas d’une littérature qui a peut-être autant de chefs-d’œuvre dans l’avenir qu’elle en a dans le passé.
Harley, pour qu’ils me traitassent en conséquence946. » Saint-John l’approuva, se justifia, dit qu’il avait passé plusieurs nuits à travailler, une nuit à boire, et que sa fatigue avait pu paraître de la mauvaise humeur. […] On dit qu’il passa une année sans prononcer une parole, ayant horreur de la figure humaine, marchant dix heures par jour, maniaque, puis idiot. […] Si j’étais avec lui, et qu’il se moquât de moi, je ne me fâcherais pas ; je prendrais le ton, je rirais de moi-même, je sentirais qu’il n’a d’autre envie que de passer une heure agréable, qu’il ne m’en veut pas, qu’il me traite en égal et en convive, qu’il éclate en plaisanteries comme un feu d’hiver en étincelles, et qu’il n’en est ni moins joli, ni moins salutaire, ni moins réjouissant. […] Je n’ai pas d’enfants dont, par cet expédient, je puisse espérer tirer un sou, mon plus jeune ayant neuf ans et ma femme ayant passé l’âge de devenir grosse1021. […] One passes half an hour pleasant enough.
L'amendement du 1er article, qui enlève la rédaction du programme du baccalauréat à la seule Université et y joint le contrôle du Conseil d’État, a passé (hier 4) à la Chambre des pairs.
Quand la prévention qu’on ne saurait manquer d’avoir pour ce qu’on fait, au moment où on le fait, est passée, quand la joie de produire, qui aveugle si facilement l’amour-propre, est apaisée, et qu’on peut regarder son travail avec le même détachement qu’on ferait celui d’un étranger, alors on peut se faire avec fruit le critique de soi-même : le moment est venu de corriger son œuvre.
Il y en a de magnifiques… La Nuit est une œuvre faite pour ceux qui voient douloureusement fuir l’ombre du temps, l’incertitude des choses, et qui, lassés, exhalent la colère de leur mélancolie en des songes et des harmonies où perce un oubli des peines passées conduisant à un besoin de repos dans l’obscurité, dans le silence, dans la mort.
soit qu’il dessine en un sonnet, comme sur une stèle de marbre, la figure d’Euripide ou de Damœtas ; soit qu’il dépeigne Éros endormi, Et la blanche Artémis qui passe au fond des bois.
. — Passé l’Amour (1895). — Gens de mer (1897). — Morgane (1898). — La Payse (1898). — Le Bois dormant (1889-1899-1900).
Je ne saurais m’en plaindre : j’appartiens, par mes maîtres, au passé.
Vous passerez les heures les plus exquises.
Jean passa en faisant le bien.
« Je veux envoyer aux Petites Maisons un vieux garçon de bonne famille, lequel n’a pas plutôt un ducat qu’il le dépense, & qui, ne pouvant se passer d’especes, est capable de tout faire pour en avoir.
Le Journal passa dans ses mains en 1666, & il le poussa jusqu’en 1674.
Un trait trop honorable aux Lettres pour être passé sous silence, c’est que notre jeune Monarque, touché du sage emploi que M.
Le but du Prédicateur est de persuader, c’est-à-dire, de faire passer dans l’ame de ceux qui l’écoutent ou qui le lisent, les sentimens qu’il a intérêt de leur communiquer.
Je pense d’ailleurs qu’il ne faut jamais hésiter à faire entrer la science dans la littérature ou la littérature dans la science ; le temps des belles ignorances est passé ; on doit accueillir dans son cerveau tout ce qu’il peut contenir de notions et se souvenir que le domaine intellectuel est un paysage illimité et non une suite de petits jardinets clos des murs de la méfiance et du dédain.
Il y a là-dedans un mélange des sens et de l’âme, de désespoir et de fureur amoureuse, qui passe toute expression.
On m’a dit que Greuze, montant au Salon, et apercevant le morceau de Chardin que je viens de décrire, le regarda et passa en poussant un profond soupir.
On passerait de là au sexe, à l’âge, à la couleur de la peau, à l’état, à des convenances plus fines, d’où l’on parviendrait à démontrer qu’un dessin de robe est de mauvais goût, et cela aussi sûrement que le dessin de quelque autre objet que ce fût, car enfin les mots de tact, d’instinct, ne sont pas moins vides de sens dans ce cas qu’en tout autre, si l’on fait abstraction de la raison, de l’usage des sens, des convenances et de l’expérience.
Partout où il est passé, il s’est mis en relation avec les griots, qui forment en quelque sorte la caste littéraire chez les populations du Soudan, et il a collectionné toutes les histoires qu’il a pu se faire conter.
La controverse fait ainsi passer le temps.
Avant d’en venir au système qui prévalut et qui présida à la réorganisation de l’Université sous Fontanes, on avait à passer par des épreuves successives : le système de Roederer fut un de ces essais intermédiaires. […] Lorsque Joseph passa de Naples sur le trône d’Espagne, ce fut Roederer qui fut chargé deux fois et dans des circonstances diversement délicates (avril 1809 et juillet 1813) d’aller lui transmettre les intentions de l’empereur, de les lui interpréter et de les lui faire agréer. […] I, p. 312, 391-396) : il finit pourtant par reconnaître qu’à un certain moment « le mauvais coucheur » se montra « très radouci et presque bonhomme » ; et pendant huit jours que Roederer passa chez lui à Düsseldorf en 1811, ils apprirent réciproquement à se mieux connaître.
Dans sa litière, où cette infatigable voyageuse passa la moitié de son existence, elle travaillait, conversait, dictait : vers ou prose, chant, drame ou récit, religion ou galanterie, mythologie ou réalité, toute forme et tous sujets lui étaient bons. […] Ainsi s’explique qu’Amadis et son cycle aient éclipsé les preux demeurés Français de France, Lancelot, Tristan, Perceforêt, dont les Vérard et les Galiot du Pré avaient imprimé les aventures ; et que la tradition de la Table ronde ait fait comme un crochet à travers la chevaleresque Espagne pour passer de notre xiie à notre xvie siècle. Le fait est considérable, et ce premier apport de l’Espagne ne pouvait être passé sous silence : car Amadis ne fut pas seulement au temps de François Ier et de Henri II le code des belles manières et de l’honneur mondain, il ranima le roman idéaliste, et devint le point de départ d’une évolution qui nous conduit, par d’Urfé et Mlle de Scudéry, jusqu’à George Sand et à Feuillet.
Cela dit, Boileau passe. […] Puis il passe aux genres : les genres, subdivisions des arts, sont comme eux des conventions qui font abstraction d’une partie des caractères naturels pour en mettre quelques-uns en lumière. […] En général, ces mots qui impliquent une intervention de la personne de l’artiste et une accommodation de la nature à l’esprit, se rapportent à l’idée, que l’art ne saurait se passer de plaire.
Le romanesque, beaucoup plus restreint, est presque tout entier dans l’invention d’une humanité meilleure, et il peut se passer de l’expression plastique. […] Charlotte d’Erra est venue passer un mois chez la grand’mère de son amie Cécile de Stèle. […] Quand elles ont rencontré l’homme qu’elles doivent aimer, elles passent, généralement par trois phases principales.
L’accident passa pour un châtiment des dieux offensés, et un scholiaste attribue à ce désastre le départ d’Eschyle. […] Deux mille ans ont passé, et l’Orestie reste encore le plus terrible des drames. […] Le passé devient le présent, le fait éloigné se rapproche, la bataille envahit la scène, les mots se font hommes et coursiers, flots et poussière, armes et navires ; le sépulcre même rend ses morts. — Les Evocateurs, c’était le titre d’une des tragédies disparues d’Eschyle, et c’est le nom que pourraient porter tous ses Messagers et tous ses Héraults.
Je passe les atours, reste de vieux style : …… Pourquoi ces atours Entre tes baisers et mes charmes ? […] Parlant de la littérature du temps, dont il a passé en revue tous les noms (George Sand, Hugo, Dumas), il m’a dit que « notre malheur à tous avait été de débuter trop tôt, et que cela nous avait exposés aux palinodies ». […] Celle de passer pour le seul vraiment sage de son temps.
En l’écrivant, il se revoit en idée et il se montre à nous chez Mme Geoffrin, comme il y était par le passé : Me voilà donc tel que toujours, l’abbé, le petit abbé, votre petite chose. […] Galiani est un franc virtuose napolitain, mais qui ne pouvait se passer de l’auditoire de Paris. […] Passe pourtant, puisqu’il est d’usage aujourd’hui que l’étiquette, en librairie, enfle la valeur de la marchandise.
Trouvant dans les Œuvres de Vauvenargues deux morceaux qui sont une « Prière » et une « Méditation » religieuse, Condorcet, que ces morceaux gênaient, déclare sans hésiter qu’ils ont été trouvés dans les papiers de l’auteur, après sa mort ; qu’ils n’ont été écrits, d’ailleurs, que par une sorte de gageure ; mais que les éditeurs ont jugé à propos de les ajouter aux Pensées de Vauvenargues, pour faire passer les maximes hardies qui sont à côté. […] L’idée de Turgot et de Condorcet, et qui d’ailleurs, dans ses termes les plus généraux, ne leur est point particulière, est celle-ci : l’humanité, considérée dans son ensemble et depuis ses origines, peut se comparer à un homme qui a passé successivement par un état d’enfance, puis par un état de jeunesse et de virilité. […] Biot, de plus intéressant, de plus digne, de plus noble, que ses éloges de Linné, d’Euler et de Haller. » L’extrême faveur dont jouissait alors la philosophie faisait qu’on passait volontiers à Condorcet quelques petits pamphlets anonymes et satiriques, dont il se donnait parfois le plaisir sous divers déguisements.
C’est dans cette retraite dernière qu’il écrivit son plus agréable et son plus durable ouvrage, ses Mémoires : « C’est pour mes enfants que j’écris l’histoire de ma vie, dit-il en les commençant ; leur mère l’a voulu. » Il s’y trouve bien des choses qu’on est étonné, à la lecture, qu’il ait écrites pour ses enfants et à la sollicitation de sa femme ; mais cela forme un trait de mœurs de plus, et le ton général de bonhomie et de naturel qui règne dans l’ensemble du récit fait tout passer. […] La seule chose que je veuille conclure de ces détails qui assaisonnent en toute occasion la partie aimable des Mémoires de Marmontel, c’est qu’il était de sa nature un peu sensuel et qu’il le laisse voir, ce qui ne nuit pas à l’intérêt et ce qui fait que le lecteur se dit en le suivant : « Le bon homme embellit quelquefois le passé de trop faciles couleurs, mais il s’y montre avec naïveté en somme et tel qu’il était, il ne ment pas ! […] Il ne cherche point à tout prix la faveur, mais il ne la repousse pas non plus ; il l’accueille très bien quand elle passe.
Accours, jeune Chromis, je t’aime, et je suis belle, Blanche comme Diane, et légère comme elle, Comme elle grande et fière ; et les bergers, le soir, Lorsque, les yeux baissés, je passe sans les voir, Doutent si je me suis qu’une simple mortelle,. […] Cependant cette aurore qu’il trouve au sortir du Tartare, cette lumière qu’il voit passer rapidement sur la mer, ont du vague et de la fraîcheur. […] Il prêchera Jésus dans Athènes, et le plus savant de ses sénateurs passera de l’Aréopage en l’école de ce barbare.
Le monde a passé comme un rêve ! […] Que s’est-il donc passé, qu’y a-t-il pour que M. […] Cette pyramide physique qui, en poésie, est une barbarie ou une corruption, l’audacieux poète s’est-il permis de l’élever, solitaire, parmi ses autres poésies, comme un avertissement de ne pas aller plus loin de ce côté sur le vu de ce qu’on y trouverait, ou une exhortation à passer outre ?
Les temps modernes, où l’égalitarisme passe à l’acte, sont aussi ceux où les concentrations de la population dans les grandes villes deviennent la loi. […] En France, depuis 40 ans, la proportion de la population urbaine à la population totale a passé de 24 pour 100 à 36 pour 100. […] Les villes, en ce sens, passent à juste raison pour des fabriques d’irrespect.
Mais, comme tous ceux qui ont eu le bonheur ou le malheur de respirer cet encens dangereux, Robert sentait, tout en le méprisant et en reconnaissant son néant, qu’il ne pouvait plus s’en passer.
Chaque publication de ces volumes de critique est une manière pour moi de liquider, en quelque sorte, le passé, de mettre ordre à mes affaires littéraires.
Il est difficile en ce métier de persévérer sans passer outre ; on ne pique pas au premier sang, aussi longtemps qu’on veut, et il vient un moment où l’action l’emporte et où l’on ne calcule plus.
Les baisers les plus purs sont grossiers auprès d’elles ; Leur langage est plus fort que toutes les paroles ; Bien n’exprime que lui les choses immortelles, Qui passent par instants dans nos êtres frivoles.
Son calme regard passe en revue, non sans quelque hautaine goguenardise, courses et salons, audiences et séances, obsèques et premières, retenant tous détails nécessaires sans négliger d’aucune sorte l’ensemble à brosser largement.
De beaux vers doux et tristes y passent enlacés, comme des ombres heureuses.
La simple induction, tirée d’un grand nombre de faits particuliers, qu’en telles circonstances données les choses se passent de telle ou telle façon.
Ce jeune prodige passa ensuite en Angleterre, où Cromwell le combla de bienfaits ; chose étonnante de la part d’un sombre esprit & d’une ame aussi farouche que celle de ce Tyran d’Angleterre ; il alla en Perse, où les Muses ne le suivirent pas sans doute, car il n’a plus rien produit depuis.
Le galimatias de Richesource est passé en proverbe, & jamais Auteur n'a mieux mérité ce genre de célébrité.
Sa mine est bien torchée (passez-moi ce mot, il est de l’art), largement peinte et d’un faire très-ragoûtant.
La Minerve de Vassé, la baigneuse d’Allegrain ont supérieurement ce mérite dont je ne pense pas qu’un morceau de sculpture puisse se passer, et dont plusieurs artistes n’ont pas la première idée.
Arroser le langage et le vivifier avec fraîcheur, cela demande des sources perpétuelles et pures ; ces sources, je le sais, on doit les chercher surtout en soi, dans son propre passé aux divers âges ; mais, du moment qu’on en demande au dehors, de quel côté se tourner de préférence à celui-là ? […] Il vécut vieux, et, après avoir passé sa jeunesse à Tyr, il mourut dans l’île de Cos. […] Passons vite sur ces délires. […] Nous nous garderons bien de traduire ici cette comparaison trop suivie de la petite Timo avec quelque carène délabrée de Tyr, et mieux vaut passer à la petite Fanie.
Il ne peut remettre ses pouvoirs qu’après que toutes les crises sont passées, et que l’œuvre révolutionnaire est incontestée, complète et consolidée. […] Un peuple ne passe pas en un jour, ni même en cinquante ans, de l’action révolutionnaire au repos monarchique. […] Il y eut du sang de Louis XVI dans tous les traités que les puissances de l’Europe passèrent entre elles pour incriminer et étouffer la république ; il y eut du sang de Louis XVI dans l’huile qui sacra Napoléon si peu de temps après les serments à la liberté ; il y eut du sang de Louis XVI dans l’enthousiasme monarchique qui raviva en France le retour des Bourbons à la restauration ; il y en eut même en 1830 dans la répulsion au nom de la république, qui jeta la nation indécise entre les bras d’une autre dynastie. […] Les transactions, les indécisions, les négociations cessèrent ; et la Mort, tenant la hache régicide d’une main et le drapeau tricolore de l’autre, fut prise seule pour négociateur et pour juge entre la monarchie et la république, entre l’esclavage et la liberté, entre le passé et l’avenir des nations. » XXII Tout est juste, selon moi, dans ce jugement de l’histoire sur le droit, sur le fait, sur l’exécution de ce crime de la république.
Ce qui s’est passé depuis qu’on eut commencé à rédiger les chansons de geste nous garantit ce qui arriva quand elles n’étaient pas écrites. […] Adenet, Jean Bodel, Jendeus de Brie, Bertrand de Bar-sur-Aube ne veulent pas perdre le bénéfice de leur travail ; s’ils tiennent au profit, ils aiment aussi la gloire, dont la recherche est un des symptômes caractéristiques de l’individualisme : cela seul nous avertirait que les temps épiques sont passés. […] Un type banal de héros s’établit : sans fatigue et sans peur, bravache, impatient, il a toujours le poing levé, il écrase des nez, fracasse des cervelles, traîne les femmes par les cheveux dès qu’on le contredit ; tenons compte des mœurs, c’est le beau gentilhomme, héroïque, impertinent, fine lame, qui passe, la moustache en croc, le poing sur la hanche, à travers nos mélodrames : c’est le d’Artagnan du xiiie siècle. […] Une fois surtout que l’histoire, la chronique en vers, puis en prose, s’est détachée du tronc de l’épopée, les chansons de geste se vident en quelque sorte de leur solide substance historique ; elles perdent de plus en plus leur caractère de commémoration héroïque du passé pour devenir l’expression vulgaire du présent.
Que la jeune fille se marie, que le provincial passe huit jours à Paris, que le Parisien reçoive quelques billets de faveur, et ils sont guéris d’une passion toute superficielle. […] On est de plus en plus informé de ce qui se passe au théâtre, mais on y va de moins en moins. […] … Le geste, depuis quelque temps, dépasse toujours la pensée, si le mot ne passe pas toujours la rampe. […] Dans un livre, les profonds écrivains font passer des expressions d’âme, traduisent noblement leur idéal, témoignent de la profondeur de leurs visions et nous imprègnent de leur personnalité.
Attiré en avant, toujours, par l’élision de l’accord qui conclut chaque groupe, il passe de son en son, cherchant en la tonique la cadence parfaite que longtemps on élude. […] S’ils gardèrent intacte sa charpente, ils voulurent au moins en renouveler l’intérieur décor et toute l’atmosphère ; le vers, conservé en ses strictes limites, put désormais faire mouvoir entre ces bornes solides les rythmes internes qui le varièrent, tandis que l’accent oratoire, issu de la logique même de la phrase, passait à travers la mesure en se combinant avec elle ou en s’y opposant à la manière de ce qu’on nomme en musique la Syncope. […] Ainsi que les clairons se taisent à la flûte D’un pâtre parmi son troupeau qui broute et bêle, Des songes tressaillirent où se renouvelle, Avec ses soirs mornes et ses aubes belles Tout le passé muet que l’angoisse interpelle. […] L’expression directe n’y apparaît qu’à peine, le vers didactique est encore absent, mais les lèvres d’où résonne la musique des rimes ne sont plus toujours cachées par le rideau des images, le geste victorieux détrône l’attitude, et les rythmes ont déjà trouvé leur vie propre en dehors des mesures ; cependant une hésitation, ou un reste d’habitude peut-être, les unit fréquemment à celles-ci, sans qu’ils osent déployer au vent qui passe leurs voiles toutes neuves.
L’immense diffère du grand, en ce qu’il exclut, si bon lui semble, la dimension, en ce qu’« il passe la mesure », comme on dit vulgairement, et en ce qu’il peut, sans perdre la beauté, perdre la proportion. […] Les deux fils d’Eschyle, Euphorion et Bion, passent pour avoir refait l’Orestie, exactement comme, deux mille trois cents ans plus tard, Davenant, bâtard de Shakespeare, refit Macbeth. […] Être un comptoir, cela passe ; être une école, cela dure. […] La pensée impossible à entraver, le progrès inarrêtable, qu’on nous passe le mot, le livre imperdable, tel est le résultat de l’imprimerie.
Si nous passons aux autres personnages, quelle bouillante activité dans le fils d’Achille ! […] Un des caractères du vrai talent, et surtout du talent dramatique, est de passer d’un genre à un autre sans s’y trouver étranger, et d’être toujours le même sans se ressembler jamais. […] Il en passa douze dans l’inaction. […] C’est là qu’à l’exemple de Sophocle qui se montra dans les choeurs l’égal de Pindare, Racine passe avec tant de facilité et de bonheur à un genre de composition qui dans notre langue surtout est infiniment éloigné du style de la scène ; c’est dans les choeurs d’ Athalie , ainsi que dans ceux d’ Esther , qu’il donne à notre idiome poétique plus de pompe, d’harmonie, d’onction, de douceur et de variété qu’il n’en eut jamais, et que, fait pour être en tout un modèle, il nous laisse les monumens les plus beaux de la vraie poésie lyrique.
« Le poète a passé trente ans, et il se complaît dans la peinture du vice et de l’orgueil ! […] Laissons-la donc passer aussi ! […] Sensualiste, mais le plus profond des sensualistes, et enragé de n’être que cela, l’auteur des Fleurs du mal va dans la sensation jusqu’à l’extrême limite, jusqu’à cette mystérieuse porte de l’Infini à laquelle il se heurte, mais qu’il ne sait pas ouvrir, et de rage il se replie sur la langue et passe ses fureurs sur elle. […] Scribe, intitulé Abailard et Héloïse, — et qui ne mentait pas à son titre, — a passé sans difficulté.
Il est clair, d’après cela, que, quoiqu’il soit infiniment plus facile et plus court d’apprendre que d’inventer, il serait certainement impossible d’atteindre le but proposé si l’on voulait assujettir chaque esprit individuel à passer successivement par les mêmes intermédiaires qu’a dû suivre nécessairement le génie collectif de l’espèce humaine. […] (2) Ayant ainsi indiqué la règle fondamentale qui doit présider à la classification des sciences, je puis passer immédiatement à la construction de l’échelle encyclopédique d’après laquelle le plan de ce cours doit être déterminé, et que chacun pourra aisément apprécier à l’aide des considérations précédentes. […] (3) Passons maintenant à la détermination de la sous-division principale dont est susceptible, d’après la même règle, chacune de ces deux grandes moitiés de la philosophie naturelle. […] Je ne dois point passer à une autre considération sans mettre le lecteur en garde à ce sujet contre une erreur fort grave, et qui, bien que très grossière, est encore extrêmement commune.
Les philosophes grecs précipitèrent la marche naturelle que devait suivre leur nation ; ils parurent dans la Grèce lorsqu’elle était encore toute barbare, et la firent passer immédiatement à la civilisation la plus raffinée ; en même temps les Grecs conservèrent entières leurs histoires fabuleuses, tant divines qu’héroïques. […] Les Latins eurent leurs victimes de Saturne (Saturni hostiæ) ; les Phéniciens faisaient passer à travers les flammes les enfants consacrés à Moloch ; et les douze tables conservent quelques traces de semblables consécrations. — Cette explication nous fera mieux entendre le vers fameux : La crainte seule a fait les premiers dieux. […] Qu’on y réfléchisse, on trouvera que le vrai poétique est vrai métaphysiquement, et que le vrai physique, qui n’y serait pas conforme, devrait passer pour faux. […] Selon une tradition ancienne, Tyr, fondée d’abord dans les terres, fut ensuite assise sur le rivage de la mer de Phénicie ; et l’histoire nous apprend que de là elle passa dans une île voisine, qu’Alexandre rattacha par une chaussée au continent.
Il ne serait pas du tout exact de dire, comme je vois que l’a fait un critique35 d’ordinaire attentif et qui sait son xviie et son xviiie siècle, que les historiens de Port-Royal, Besoigne, dom Clémencet et leurs successeurs, n’ont pas connu ces lettres ; ils n’en ont pas connu la totalité, mais il leur en était passé par les mains un bon nombre. […] On conçoit que la mère Agnès eût très bien pu se passer de M. de Saint-Cyran, et qu’elle eût été une Philothée parfaite, une fille accomplie du saint évêque de Genève ; elle aurait pu remplir toute sa vocation et ne recevoir sa règle de conduite que du directeur et du père de Mme de Chantal.
Combien de fois, il y a près de quarante ans, ne l’ai-je pas rencontré dans la plaine de Vanves (il passait alors les étés à Issy) tenant un livre à la main et lisant sous le soleil ! […] Maintenant surtout que le charme de ses surprises est passé, il est difficile de l’aimer comme on l’admire.
Après bien des scènes pénibles, lorsqu’une réconciliation semble à jamais scellée, lorsque Brigitte Pierson consent à tout oublier, à tout fuir du passé, à voyager bien loin et pour longtemps avec lui, survient un tiers jusque-là inaperçu, l’honnête Smith qui aime involontairement Brigitte et se fait aimer d’elle. […] Ces pages sont vraies en ce sens qu’elles rendent des scènes qui ont pu se passer entre deux personnages pareils78, et qu’elles trahissent la confusion des pensées qui ont pu s’agiter dans leur cerveau ; mais l’art qui choisit, qui dispose, qui cherche un sommet et un fondement à ce qu’il retrace, avait-il affaire de s’engager dans cette région variable d’accidents et de caprices, où rien n’aboutit ?
Tous les sentiments chez lui sont tour à tour effleurés, puis quittés ; un air de tristesse, un éclair de malice, un mouvement d’abandon, un élan d’éloquence, vingt expressions passent en un instant sur cet aimable visage. […] Nous n’avons plus le mot, mais nous avons encore la chose : « Ne pas sourire respectueusement au seul nom de M. le préfet, disait Beyle, passe aux yeux des paysans de la Franche-Comté pour une imprudence signalée, et l’imprudence dans le pauvre est promptement punie par le manque de pain. » L’état des choses n’a guère changé, et les maximes qui en naissent n’ont pas changé davantage.
Chapelain est un de ces demi-génies, plus confus que complexes, en qui l’avenir lutte avec le passé, et qui n’ayant pas une claire conscience du chemin qu’ils suivent, semblent souvent marcher au hasard, tant il y a d’arrêts, de reculs et d’indécisions dans leur allure. […] Nous voyons dans ses Lettres ce qu’il a de bon ; mais il passait sa vie à démentir, par complaisance ou par intérêt, ses sentiments intimes.
Elle redouble son mal en l’analysant, elle en trouve la formule : c’est la privation du sentiment, avec la douleur de ne pouvoir s’en passer. […] Et voici le prince de Ligne écrivant à une marquise française : d’un haut promontoire de la Crimée, le soir, il regarde la mer immobile, il reporte sa pensée sur tous les hommes, tous les peuples qui sont venus par cette mer, ont passé sur cette côte, ont vécu dans ces villes dont il vient de fouler les ruines.
Après le désastre, il lui suffit de s’attacher à sa place, pour réduire à l’impuissance les minorités monarchiques ; il lui suffit de rester le président de la République, pour fonder la république : quand il se retira (le 24 mai 1873), il était trop tard, l’heure d’une restauration avait passé. […] Mais surtout le beau temps du journalisme littéraire semble passé : l’information prime l’invention.
Or, il n’en est pas ainsi dans la Nature, et c’est précisément ce que le principe de Carnot nous enseigne, la chaleur peut passer du corps chaud sur le corps froid, et il est impossible ensuite de lui faire reprendre le chemin inverse et de rétablir des différences de température qui se sont effacées. […] Il a cru d’abord que c’était un phénomène vital, mais il a vu bientôt que les corps inanimés ne dansaient pas avec moins d’ardeur que les autres ; il a alors passé la main aux physiciens.
Aussi, depuis que la fureur des systèmes a passé, sa psychologie a augmenté en crédit. » M. […] II Il n’est guère possible, qu’en parcourait les études qui précèdent, le lecteur n’ait pas été frappé de deux choses : de l’accord des philosophes que nous avons passés en revue, sur les questions capitales de la psychologie, et de leurs dissentiments sur quelques points secondaires.
Il la maria au prince de Condé (qui passait pour être son fils). […] Il ajoute : Il n’est pas permis, en chose si importante, de faire passer des soupçons et des conjectures pour des vérités assurées.
Jamais, sous prétexte d’avoir mis son humilité, une fois pour toutes, aux pieds du Saint-Siège, un jeune talent d’orateur ne s’est passé plus en sûreté de conscience ses facultés altières, piquantes, ironiques, et n’a joué plus librement de l’arme du dédain. […] Si j’en crois de bons renseignements, M. de Montalembert, dans son procédé de composition oratoire, a passé par les différentes phases qui sont familières aux gens du métier.
Ne jamais trouver le point d’arrêt, passer d’une spirale à l’autre comme Archimède, et d’une zone à l’autre comme Alighieri, tomber en voletant dans le puits circulaire, c’est l’éternelle aventure du songeur. […] Il passe outre.
Sans doute il se passe quelque chose dans les nerfs et dans le cerveau, et ce quelque chose peut être supposé analogue aux vibrations extérieures de l’éther ; mais ce mouvement, quel qu’il soit, n’est pas encore la lumière : il ne devient lumière que lorsque le moi est apparu et avec lui la sensation consciente. […] cette cause extérieure inconnue que nous appelons chaleur peut, dans certaines conditions, disparaître à nos sens et cesser d’être sentie comme chaleur ; alors il se passe en dehors de nous un autre phénomène, qui est précisément l’équivalent de la chaleur perdue, à savoir, un phénomène de mouvement.
Mais chacune de ces écoles se partagent en nuances diverses qui servent de transition de l’une à l’autre : de telle sorte qu’il est possible, en descendant de degré en degré, de passer sans interruption des théories les plus contraires à la Révolution jusqu’aux doctrines les plus révolutionnaires. […] Il serait impossible de surprendre une vue politique de quelque nouveauté et de quelque importance dans les Paroles d’un croyant, dans le Livre du peuple, dans l’Esclavage moderne, dans le Passé et l’avenir du peuple.
En verité, pour braver un consentement si general, pour donner le démenti à tant de siecles passez, et même au nôtre, il faut croire que le monde ne fait que sortir de l’enfance, et que nous sommes la premiere generation d’hommes raisonnables que la terre ait encore portée. […] Mais, dira-t-on, il faut passer au poëte à qui l’on fait le procès sur une traduction, toutes les figures et toutes les prosopées fondées sur les moeurs et sur les usages de son païs.
On l’emploie couramment pour désigner à peu près tous les phénomènes qui se passent à l’intérieur de la société, pour peu qu’ils présentent, avec une certaine généralité, quelque intérêt social. […] Aussi, une fois que l’assemblée s’est séparée, que ces influences sociales ont cessé d’agir sur nous et que nous nous retrouvons seul avec nous-même, les sentiments par lesquels nous avons passé nous font l’effet de quelque chose d’étranger où nous ne nous reconnaissons plus.
« En 1823, devant Pampelune, — écrit d’Arpentigny, — l’armée espagnole dite de la Foi passait les nuits à jouer de la guitare, à fumer des cigarettes, à psalmodier des litanies en égrenant des rosaires ; le jour, couchée sur l’herbe poudreuse, elle jasait en mangeant des ciboules ou dormait au soleil. […] Dans ces portraits de tous les genres que d’Arpentigny fait passer devant nous et où nous retrouvons cette touche particulière qu’il n’aurait point si sa main n’avait pas fait longtemps siffler une cravache ou une épée, dans ces portraits s’attestent avec éloquence toutes les qualités qui créent les grands portraitistes : la finesse des nuances, l’observation concentrée, et ce magique sentiment des analogies dont on est obligé de parler beaucoup quand on parle du capitaine d’Arpentigny, car les défauts de son esprit comme les plus brillants avantages de son talent viennent de ce sentiment puissant et dangereux : « Chopin — dit d’Arpentigny — n’était pas de ceux-là qui ont les nerfs en harmonie avec leur tempérament.
C’est ce grand et mystérieux Inconnu de la Papauté qu’il a voulu nous faire connaître, en écrivant l’histoire de son passé pour en inférer l’avenir de son règne… Léon XIII, ce lion de Juda, — comme il s’est nommé lui-même dans une circonstance que Teste a racontée dans son livre, — Léon XIII, ce lion de Juda, qui ne rugit pas, mais qui attend l’heure de son rugissement, est d’une date trop récente pour avoir donné sa mesure, mais s’il est de taille avec les besoins de son siècle, il sera bien grand ! […] Violée en Italie par l’ambition de la maison de Savoie, indifférente aux souverains de l’Europe qui, comme leurs peuples, ne croient plus en elle ; méprisée et haïe, comme une ruine du passé, par tous ceux qui ont l’orgueilleuse suffisance de se donner pour l’avenir ; telle la papauté qui échéait à Léon XIII, à cet homme dont on sentit tout à coup la main, quand il l’eut prise dans sa main… La biographie de Teste, qui fourmille de détails et d’anecdotes impossibles à faire tenir dans ce chapitre, nous montre, dès les premiers instants de son pontificat, Léon XIII serrant tous les freins relâchés dans les dernières années de l’administration de Pie IX et rappelant tout le monde au devoir, — à toutes les hauteurs de hiérarchie et de fonction.
Mais, tel qu’il est, il a son accent, et, comme les deux modèles que nous venons de citer, c’est une critique sociale qui s’enveloppe, pour passer partout, dans le manteau flottant et bariolé de la Fantaisie. […] Individualisé de la sorte par la fantaisie de l’auteur, cet Amour passa en zigzag dans le xixe siècle, et il en oppose les particularités et les mœurs aux mœurs et aux particularités de la société d’autrefois.
Au théâtre il faudra décompter un peu : mais la pièce n’a que trois actes ; le premier est bien posé, ce qui fera passer les deux autres.
Le Juif Errant d’Eugène Sue a passé presque inaperçu dans cet éclat : je ne sais s’il va se relever et regagner l’attention.
M. du Clésieux, nous dit-on, après de bonnes études, et quelques années passées à Paris dans sa première jeunesse, s’est bientôt retiré, et comme enfui dans sa Bretagne ; les plaisirs l’avaient effleuré un moment, et il s’y dérobait avec une sorte d’effroi.
Leconte de Lisle, dans un esprit dont les pensées ne sont point neuves, sans religion, mais par une manière triste et forte d’être mystique avec matérialité, d’avoir une claire conscience de son projet, une claire vision de son but et de ses chemins, confine au futur, sans en être, mais se ressent du passé surtout en ces points où, par l’usage et peut-être l’abus des facultés rationnelles, il pressentait l’instant actuel.
Auguste Desplaces Les Sentiers perdus eurent cela de particulier, que, paraissant à une époque où la poésie se préoccupait outre mesure de couleur et de rythme, ils osèrent se passer de tout cet art savant jusqu’à la raideur.
C’est bien le recueil d’un ramageur de ballades à la cour des Papes en Avignon, ou d’un ménestrel du royaume d’Arles, au temps de la comtesse de Die : cela chante, chatoie, frissonne et flamboie comme une étoffe de soie moirée de jadis, avec des cliquetis de joaillerie et une belle envolée d’oriflammes ; cela jase comme un jet d’eau, babille comme une mandoline et embaume comme une fleur : marjolaine et pimprenelle ; c’est à la fois sauvage, élégant et précieux, et c’est bien en mai neigeux d’amandiers ou en juin de flamme qu’il faut feuilleter, à l’heure de la sieste, avec la mer ensoleillée apparue entre les lamelles des persiennes closes, ces jolis lais et virelais qui fleurent la ruine, le thym, le passé et la brise du large… [Le Journal (8 juin 1897).]
Il se démit de son Evêché, afin d’avoir plus de temps à donner à l’étude, & se retira ensuite à la Maison Professe des Jésuites de Paris, où il passa les vingt dernieres années de sa vie.
Après avoir tâché de se rendre utile au Public par des Ouvrages, tels qu’une Traduction de la Siphylis de Fracastor ; l’Histoire des Révolutions de l’Empire de Russie ; l’Histoire de Christine, Reine de Suede ; l’Abrégé chronologique de l’Histoire Ancienne, celui de l’Histoire du Nord ; le Dictionnaire portatif des Beaux-Arts, & la Poétique de M. de Voltaire ; de l’amour des Lettres, il est passé à celui de la Librairie.
Il se dispensa, comme Législateur de la Loi, qui force ceux qui vivent dans ce tombeau à ignorer ce qui se passe sur la terre.
Depuis vingt-cinq ans déjà que j’ai débuté dans la carrière, c’est la troisième forme que je suis amené à donner à mes impressions et à mes jugements littéraires, selon les âges et les milieux divers où j’ai passé.
Une guirlande vagabonde de jasmin embrasse une Vénus, comme pour lui rendre sa ceinture ; une barbe de mousse blanche descend du menton d’une Hébé ; le pavot croît sur les feuillets du livre de Mnémosyne : symbole de la renommée passée, et de l’oubli présent de ces lieux.
Un peintre peut donc passer pour un grand artisan, en qualité de dessinateur élegant, ou de coloriste rival de la nature, quand même il ne sçauroit pas faire usage de ses talens pour répresenter des objets touchans, et pour mettre dans ses tableaux l’ame et la vraisemblance qui se font sentir dans ceux de Raphaël et du Poussin.
L’usage de ce qui se passe dans le monde et l’experience de nos amis au défaut de la nôtre, nous apprennent qu’une passion contente s’use tellement en douze années, qu’elle devient une simple habitude.
Et le côté par où cette théorie semble froisser l’opinion commune passait alors au premier plan : nous aurions à nous appesantir sur les « paradoxes » de la théorie de la Relativité, sur les Temps multiples qui coulent plus ou moins vite, sur les simultanéités qui deviennent des successions et les successions des simultanéités quand on change de point de vue.
Ils se disent, en parlant de moi, ce vers de Virgile au laboureur expulsé de ses prairies de Mantoue : Fortunate senex, ergo tua rura manebunt ; Secondement, parce que, même en me payant ces terres à des prix de faveur, ils passeraient très injustement pour avoir bénéficié de ma ruine ; Troisièmement, enfin, parce qu’il n’est pas toujours agréable à une famille investie de la considération locale la mieux méritée de succéder à un nom malheureusement célèbre dans les demeures ébruitées, sinon illustrées, par ce nom. […] C’est humiliant pour ces milliards de créatures humaines qui passent comme les flots sous l’arche des ponts sans qu’on les compte ou qu’on les nomme ; c’est glorieux pour ce petit nombre d’hommes privilégiés qui donnent leur nom, leur individualité, leur pensée, leur mémoire à toute une race. […] Pour ce qui est du culte qu’on lui rend ici, on a tort de s’imaginer que c’est un culte religieux ; il ne passe pas les bornes du respect et de la reconnaissance qui sont légitimement dus à un homme qui, de son vivant par ses exhortations, et après sa mort par ses écrits, a fait à ses semblables tout le bien qu’il a été en son pouvoir de leur faire. […] Dans l’idée chinoise, tout cela ne passe pas les bornes du culte civil, et c’est même un devoir indispensable pour un être raisonnable et un homme bien né. […] Les usages pratiqués dans tous les temps, dont il est fait mention, ont passé successivement sous mes yeux, et, leur diversité m’ayant convaincu qu’ils n’avaient pas été constamment les mêmes, les raisons que l’on a eues de changer quelquefois m’ont convaincu aussi qu’on ne doit pas s’en tenir toujours à ce qui avait été établi.
Lié avec Atticus, riche Romain, voluptueux d’esprit, qui n’estimait les choses que par le plaisir qu’elles donnent, Cicéron se proposait de recueillir son modique patrimoine en Grèce, et de s’établir à Athènes pour y passer obscurément sa vie dans l’étude du beau, dans la recherche du vrai, dans la jouissance de l’art. […] Mais l’ombre de leur vie passée suit les hommes publics jusque sur la terre étrangère : la mer, qui les sépare de leur patrie, ne les sépare pas de leur nom. […] César avait passé le Rubicon, en jetant au hasard le sort de la république. […] Vers le même temps, quoiqu’il eût déjà passé la soixantième année de sa vie, il répudia sa première femme Térentia, coupable de l’avoir négligé pendant ses disgrâces, et il épousa une de ses pupilles, très jeune, très belle, très riche, qu’un père mourant lui avait confiée. […] Il y passa quelques jours à écouter de loin le bruit des pas de l’armée des triumvirs qui s’approchaient de Rome ; il semblait résolu à y attendre la mort sans se donner la peine ni de la fuir plus loin ni de la braver de plus près.
Malheur à qui passe indifférent auprès de ces masures vénérables, à l’ombre desquelles l’humanité s’est si longtemps abritée, et où tant de belles âmes trouvent encore des consolations et des terreurs ! […] Croyez-vous que Vénus, Pan et les Grâces n’avaient pas pour les hommes primitifs qui les créèrent un sens différent de celui qu’ils ont dans le parc de Versailles, réduits à un froid allégorisme par un siècle réfléchi, qui va par fantaisie chercher une mythologie dans le passé pour s’en faire une langue conventionnelle 144. […] Tracer des divisions absolues dans la littérature, déclarer que toute œuvre sera une épopée, ou une ode, ou un roman, et critiquer les œuvres du passé d’après les règles qu’on s’est posées pour chacun de ces genres, blâmer Dante d’avoir fait une œuvre qui n’est ni une épopée, ni un drame, ni un poème didactique, blâmer Klopstock d’avoir pris un héros trop parfait, c’est méconnaître la liberté de l’inspiration et le droit qu’a l’esprit de souffler où il veut. […] Combien il s’en faut encore que les mines du passé aient rendu tous les trésors qu’elles renferment ! […] Hérodote et Tite-Live devaient être tenus pour des historiens sérieux, Homère devait passer pour un poète individuel, avant que l’étude comparée des littératures eût révélé les faits si délicats du mythisme, de la légende primitive, de l’apocryphisme.
Toute la littérature française y passe — en lambeaux, On a voulu me persuader que M. […] Wilder enfourche un Pégase tout à lui et pendant longtemps il n’est plus question du poème allemand45 ; d’autres fois, se passe une chose très curieuse, M. […] Et voici que ces mêmes gens, ont aujourd’hui l’esprit tellement faussé par tout ce qui se dit sur Wagner et le goût tellement dépravé par ce qui se passe dans les salles de concert, qu’ils battent des mains et trouvent cela beau ! […] Nicolaus Oesterlein a eu, depuis son ouverture au mois d’avril passé, beaucoup de visiteurs. […] Dans l’imagerie wagnérienne, Parsifal prend souvent les traits du Christ, comme dans les gravures de Franz Stassen par exemple ou dans certaines mises en scène de Bayreuth du début du siècle passé.
Il pense que les espèces copistes ont acquis lentement et par sélection naturelle leur parure actuelle, qui a pour effet de les faire passer pour des représentants des espèces communes victorieuses, et qu’elles échappent ainsi à quelque danger auquel autrement elles seraient restées exposées169. […] Lorsque deux groupes d’animaux, quelles que soient actuellement les différences de leur organisation ou de leurs habitudes, passent néanmoins par une phase embryonnaire semblable ou seulement analogue, nous pouvons tenir pour certain qu’ils descendent tous les deux de parents identiques ou très semblables, et que, par conséquent, ils sont parents à ce même degré. […] Il faut aussi se rappeler que la loi supposée de la ressemblance des anciennes formes de la vie avec les diverses phases embryonnaires des formes actuelles pourrait être vraie, mais cependant n’être pas encore de longtemps susceptible d’une démonstration complète, parce que nos documents géologiques ne remontent pas assez loin dans le passé. […] Si nous regardons le passé, les êtres pourvus d’un organe à l’état naissant auront généralement été supplantés et exterminés par leurs successeurs, pourvus de ce même organe à un état plus parfait et plus développé. […] Cette théorie expliquerait pourquoi l’embryon d’un mammifère ne passe pas, à proprement parler, par toutes les formes que ses ancêtres directs ont successivement revêtues, mais seulement par toutes les ébauches de ces formes ; car dans le cours des générations, l’embryon doit toujours cesser son développement vers les formes ancestrales, au point où la forme actuelle de la race tend, soit à diverger de chacune de ces formes successives, soit à revenir à quelque type ancien.
On passait subitement d’une poésie sèche, maigre, pauvre, ayant de temps en temps un petit souffle à peine, à une poésie large, vraiment intérieure, abondante, élevée et toute divine.
De nos jours on a essayé de rendre à la poésie sa langue propre, son style, ses images, ses priviléges, mais l’entreprise a pu paraître bien artificielle, parce qu’il a fallu aller chercher ses exemples dans le passé par delà Malherbe, et encore des exemples très-incomplets et sans autorité éclatante.
Je lui passerais certains chapitres où, rangeant des vers sous air de prose, il s’amuse à les faire filer comme des troupes déguisées et à mystifier le lecteur qui n’y prendrait pas garde ; ces chapitres-là sont une critique lutine du jargon lyrique à la mode : ils valent mieux que notre critique sérieuse.
Débutant à peu près au moment de la vie où Byron publiait ses Heures de loisir, il avait sur le Byron des Heures de loisir d’avoir déjà passé par les impressions que lord Byron ne connut qu’après Childe-Harold… Je l’ai dit, c’est une âme de poète que M.
Insoucieux de la mode, étranger aux cénacles, respectueux des maîtres, il a regardé d’un œil craintif les femmes qui passaient sur sa route.
Chez lui, pas de ces hésitations et de ces tâtonnements par lesquels ont passé à leurs débuts tant d’écrivains en prose et en vers, qui plus tard sont devenus célèbres ; au contraire, il sut en un moment, comme d’instinct et par révélation, ce métier laborieux, compliqué et difficile de la poésie, si divers et si inépuisable, qu’on met toute sa vie à l’apprendre.
Bref, la science sera en possession de vérités qui, rendant plus intelligible la façon dont le passé s’est déroulé, rendront par-là plus facile l’art de prévoir et de créer l’avenir.
On conviendra volontiers qu’en se garantissant du Pyrrhonisme qu’il affecte & veut établir sur toutes les questions, il auroit pu passer pour un Génie rare, & se rendre très-utile dans le développement des connoissances humaines.
quel coup porté à l’orgueil de ces Esprits superbes, convaincus, d’après les textes les plus formels, de n’être que des usurpateurs des lumieres étrangeres, & les plus foibles échos de tant de dogmes dont ils voudroient passer pour les créateurs !
Et ces costumes des Pères et des premiers chrétiens, costumes qui sont passés à nos Religieux, ne sont autres que la robe des anciens philosophes grecs, appelée περιϐόλαιον ou pallium.
Ils ont passé sur ces plages inconnues, ces hommes qui adoraient la Sagesse qui s’est promenée sous les flots.
C’est une grande figure, froide, imbécile, sans action, sans passion, sans mouvement, sans caractère, ne prenant pas le moindre intérêt à ce qui se passe.
Mais j’allais passer sous silence vos deux petits tableaux de Vierge, et j’aurais fort mal fait.
Il en veut point passer à nos poëtes pour un merite, ce jargon plein de fadeur, selon lui, qu’on appelle galanterie.
Cependant, quoiqu’il possédât seul le talent de faire passer dans l’idiome Latin, toute la douceur de l’idiome Grec, il ne put pas en rendre toute la richesse & toutes les beautés. […] Les sublimes productions des plus grands génies d’Athènes & de Rome, trouvèrent un asile assuré dans les retraites de la Religion ; & c’est de-là qu’elles ont passé de siècle en siècle jusqu’à nous. […] Enfin le règne des Troubadours passa. […] On se les rendit bientôt assez familiers, pour oser les faire passer, soit Grecs, soit Latins, dans notre langue, toute barbare qu’elle étoit encore. […] Les Anciens seront toujours les maîtres & les modèles de tout Auteur, qui, jaloux de sa gloire, voudra que ses Ecrits passent à la postérité.
Mais nous pouvons aller au-delà et, des propositions vulgaires, passer aux propositions scientifiques. […] Des grandeurs artificielles, passons aux grandeurs naturelles. […] Par exemple, les axiomes disent que la matière est inerte, incapable de modifier spontanément son état, de passer du repos au mouvement si elle est en repos, et du mouvement au repos si elle est en mouvement. Or tous les jours nous voyons des corps passer du mouvement au repos ou du repos au mouvement, à ce qu’il semble, spontanément, et sans l’intervention appréciable d’une condition nouvelle. […] Nous admettons ainsi pour A deux mouvements simultanés et différents, l’un qui lui est commun avec tous les autres points de la droite AB, l’autre qui lui est propre. — Remarquez que nous ne savons pas si les choses se passent ainsi dans la nature.
Le profond rajeunissement des êtres, l’air tiède du printemps qui renouvelle et ébranle toutes les vies, ne leur suggère qu’un couplet gracieux ; ils remarquent en passant que « déjà est passé l’hiver, que l’aubépine fleurit, et que la rose s’épanouit » ; puis ils vont à leurs affaires. Légère gaieté prompte à passer, comme celle que fait naître un de nos paysages d’avril ; un instant le conteur a regardé la fumée des ruisseaux qui monte autour des saules, la riante vapeur qui emprisonne la clarté du matin ; puis, quand il a chantonné un refrain, il revient à son conte. […] Quand elle sera couchée dans son lit moelleux, on suspendra dans sa chambre une cage d’or où brûleront des aromates, et si elle ne peut dormir, toute la nuit les ménestrels veilleront pour elle129. » J’en ai passé, il y en a trop ; l’idée disparaît comme une page de missel sous les enluminures. […] Leurs culottes sont de toile pareille, et ne passent pas le genou, en sorte que le reste de la jambe est nu. […] De sos le pis, parmie la pance, Li fist passer ultre la lance, A terre estendu l’abati.
Après la bataille des Dunes gagnée par Turenne (1658) et la prise de Dunkerque, Mazarin eut une envie prodigieuse de passer pour un grand capitaine, et il mit tout en œuvre pour obtenir de Turenne une lettre qui lui attribuât l’honneur et le plan de cette campagne.
Jeune homme, qui vous destinez aux lettres et qui en attendez douceur et honneur, écoutez de la bouche de quelqu’un qui les connaît bien et qui les a pratiquées et aimées depuis près de cinquante ans, — écoutez et retenez en votre cœur ces conseils et cette moralité : Soyez appliqué dès votre tendre enfance aux livres et aux études ; passez votre tendre jeunesse dans l’etude encore et dans la mélancolie de rêves à demi-étouffés ; adonnez-vous dans la solitude à exprimer naïvement et hardiment ce que vous ressentez, et ambitionnez, au prix de votre douleur, de doter, s’il se peut, la poésie de votre pays de quelque veine intime, encore inexplorée ; — recherchez les plus nobles amitiés, et portez-y la bienveillance et la sincérité d’une âme ouverte et désireuse avant tout d’admirer ; versez dans la critique, émule et sœur de votre poésie, vos effusions, votre sympathie et le plus pur de votre substance ; louez, servez de votre parole, déjà écoutée, les talents nouveaux, d’abord si combattus, et ne commencez à vous retirer d’eux que du jour où eux-mêmes se retirent de la droite voie et manquent à leurs promesses ; restez alors modéré et réservé envers eux ; mettez une distance convenable, respectueuse, des années entières de réflexion et d’intervalle entre vos jeunes espérances et vos derniers regrets ; — variez sans cesse vos études, cultivez en tous sens votre intelligence, ne la cantonnez ni dans un parti, ni dans une école, ni dans une seule idée ; ouvrez-lui des jours sur tous les horizons ; portez-vous avec une sorte d’inquiétude amicale et généreuse vers tout ce qui est moins connu, vers tout ce qui mérite de l’être, et consacrez-y une curiosité exacte et en même temps émue ; — ayez de la conscience et du sérieux en tout ; évitez la vanterie et jusqu’à l’ombre du charlatanisme ; — devant les grands amours-propres tyranniques et dévorants qui croient que tout leur est dû, gardez constamment la seconde ligne : maintenez votre indépendance et votre humble dignité ; prêtez-vous pour un temps, s’il le faut, mais ne vous aliénez pas ; — n’approchez des personnages le plus en renom et le plus en crédit de votre temps, de ceux qui ont en main le pouvoir, qu’avec une modestie décente et digne ; acceptez peu, ne demandez rien ; tenez-vous à votre place, content d’observer ; mais payez quelquefois par les bonnes grâces de l’esprit ce que la fortune injuste vous a refusé de rendre sous une autre forme plus commode et moins délicate ; — voyez la société et ce qu’on appelle le monde pour en faire profiter les lettres ; cultivez les lettres en vue du monde, et en tâchant de leur donner le tour et l’agrément sans lequel elles ne vivent pas ; cédez parfois, si le cœur vous en dit, si une douce violence vous y oblige, à une complaisance aimable et de bon goût, jamais à l’intérêt ni au grossier trafic des amours-propres ; restez judicieux et clairvoyant jusque dans vos faiblesses, et si vous ne dites pas tout le vrai, n’écrivez jamais le faux ; — que la fatigue n’aille à aucun moment vous saisir ; ne vous croyez jamais arrivé ; à l’âge où d’autres se reposent, redoublez de courage et d’ardeur ; recommencez comme un débutant, courez une seconde et une troisième carrière, renouvelez-vous ; donnez au public, jour par jour, le résultat clair et manifeste de vos lectures, de vos comparaisons amassées, de vos jugements plus mûris et plus vrais ; faites que la vérité elle-même profite de la perte de vos illusions ; ne craignez pas de vous prodiguer ainsi et de livrer la mesure de votre force aux confrères du même métier qui savent le poids continu d’une œuvre fréquente, en apparence si légère… Et tout cela pour qu’approchant du terme, du but final où l’estime publique est la seule couronne, les jours où l’on parlera de vous avec le moins de passion et de haine, et où l’on se croira très clément et indulgent, dans une feuille tirée à des milliers d’exemplaires et qui s’adresse à tout un peuple de lecteurs qui ne vous ont pas lu, qui ne vous liront jamais, qui ne vous connaissent que de nom, vous serviez à défrayer les gaietés et, pour dire le mot, les gamineries d’un loustic libéral appelé Taxile Delord.
Elle ne passera pas dans les anthologies ; n’importe !
Prosper Mérimée Si l’on se rappelle à quel degré Nodier possédait la connaissance grammaticale, ses origines et ses transformations, on déplore amèrement qu’il n’ait pas laissé après lui quelqu’un de ces grands ouvrages dans lesquels la science du passé devient la règle du présent et le guide de l’avenir.
Paul Léautaud Malgré tant de points parfaits où la modernité s’allie au grand passé que nous tous portons en nous, où « l’harmonie, la grâce du paysage, le charme virgilien, loin de nuire à l’originalité de l’auteur, y ajoutent encore », et qui sont d’une langue et d’un rythme admirables, c’est surtout comme poète satirique que M.
Les uns et les autres sentaient le besoin de s’affranchir de formules surannées et de réformer la prosodie, mais les Décadents n’entendaient pas faire table rase du passé.
Nous savons plus que le passé ; l’avenir saura plus que nous.
Le passé qui redevient le présent, des fantômes reprenant leurs corps, des légendes immémoriales revenant du fond des siècles, sur le premier plan de la vie ; des hommes quelconques, connus et coudoyés tout à l’heure, transformés par le revêtement d’un costume, par l’ascension de quelques gradins, en dieux visibles, en héros ressuscités et palpables, et le faisant croire aux yeux autant qu’à l’esprit !
Sayous à qui nous devons ce détail, comptait les trois jours qu’il avait passés avec ce grand homme excellent parmi les plus délicieux de sa vie ; c’était dans l’automne de 1752 : Je ne puis, écrivait-il à Bonnet, vous exprimer, mon cher ami, les délices que j’ai goûtées pendant ce séjour.
Le critique suisse salue cet effort de classement des émotions, inscrit dans le sillage de Spencer et de Wundt, qui a contribué à faire passer l’étude des phénomènes de conscience du « dogmatisme » à « l’observation » ; il signale en outre que « l’auteur ne se sert que modérément de la doctrine de l’évolution, et s’abstient de toute métaphysique ».
Aussi tout est ténèbres dans leur origine : vous y voyez à la fois de grands vices et de grandes vertus, une grossière ignorance et des coups de lumière, des notions vagues de justice et de gouvernement, un mélange confus de mœurs et de langage : ces peuples n’ont passé ni par cet état où les bonnes mœurs font les lois, ni par cet autre où les bonnes lois font les mœurs.
On le creuserait, on poserait les fondements, on élèverait l’édifice assise par assise, jusqu’au faîte ; de là on passerait aux détails de la distribution et de la décoration intérieure, et les élèves s’instruiraient par les yeux, profondément et sans fatigue.
Elle publie de beaux recueils que personne n’achète et ne lit, parce que personne ne les entend ; de ces recueils il en passe au loin quelques exemplaires qui ne compensent pas les dépenses, et la nation reste au même point d’ignorance ou d’instruction.
Le lendemain l’homme appela sa vieille mère et lui raconta ce qui s’était passé.
Ces faits nombreux, et, qu’on nous passe le mot !
Il était métaphysicien et avait lu, probablement dès sa jeunesse, tous les philosophes grecs des temps passés. […] Ils semblaient dire aux hommes : « Le règne de la force brutale est passé. […] Ils aimaient leurs amis, leurs disciples, les sages du passé, du présent et de l’avenir ; les hommes, non, ou fort tranquillement. […] Il lui arrive de faire l’éloge du passé glorieux d’Athènes. […] Il croit boire la vie et il la fait passer à travers lui, pour ainsi parler, sans la sentir.
Nous sommes le peuple chez qui tout se passe le plus par va-et-vient.
On y passe la vie à être d’accord avec soi-même, sans contradiction de personne.
Mais quand l’homme change sans cesso, Nu passé pourquoi rien changer ?
Philippe Gille Je ne puis passer sous silence le beau livre, Poèmes de Provence, que vient de publier M.
Et du temps passa.
C’est un besoin, c’est une envie ; le voilà maître du trône et au comble de ses vœux, et alors il se passe dans son être quelque chose d’extraordinaire.
J. de Strada, comme Leconte de Lisle, est un témoin qui raconte le passé et qui communique aux faits un peu du phosphore que son génie lui a mis aux doigts, de ce phosphore dont parle Joubert.
Nous saurons maintenir la tradition de l’esprit moderne et contre ceux qui veulent ramener le passé et contre ceux qui prétendent substituer à notre civilisation vivante et multiple je ne sais quelle société architecturale et pétrifiée, comme celle des siècles où l’on bâtit les Pyramides.
Ils n’ont pas le pouvoir que les vers françois doivent avoir sur une oreille françoise. à l’exception d’un petit nombre de mots qui peuvent passer pour des mots imitatifs, nos mots n’ont d’autre liaison avec l’idée attachée à ces mots, qu’une liaison arbitraire.
Une portion de l’air et de la seve de la terre des Canaries passe en Angleterre dans les vins de ces isles qu’on y transporte en si grande quantité.
Elle ne révéla rien de ce qui s’était passé car elle eût eu honte d’avouer qu’elle avait cédé à la nécessité.
Quand un livre qui a la prétention de raconter et d’expliquer les cent dernières années qui viennent de s’empreindre si profondément sur l’Europe ne renferme que les connaissances les plus superficielles, et les moins sûres encore dans leur superficialité, et, de plus, quand c’est l’inconséquence, non pas seulement d’une tête faible, mais d’un distrait, qui se sert de ces connaissances pour en tirer de ces jugements sans cesse contredits et abolis les uns par les autres, la Critique peut passer outre avec moins de dédain que de pitié.
Elle n’avait pas lu la préface générale, placée à la tête du premier volume des Œuvres et des Hommes (le volume des Philosophes et des Écrivains religieux), ou si elle l’avait lue, elle ne s’en souvenait plus, car il est dit positivement dans cette préface, que pour être plus dans le mouvement de son temps, l’auteur laisserait là toute exposition artificielle ou chronologique, et ne partirait jamais, tout en embrassant le siècle tout entier, dans un nombre indéterminé de volumes, que des publications contemporaines ou des réimpressions par lesquelles on atteint à tous les moments du passé et à tous les hommes qui y ont laissé une place durable ou éphémère… Avec ce système, il y a des attentes, il n’y a pas d’oublis !
XII Dans le deuxième livre de la République, après avoir magnifiquement développé cette idée de la divinité de la justice, le dialogue passe du particulier au général. […] Puis il passe à la catégorie capitale des gardiens de l’État, les soldats, et, dans la vue de former cette catégorie de défenseurs de l’État avec toutes les conditions et les vertus de la profession, il se jette dans des utopies presque aussi révoltantes et aussi absurdes que les utopies des blasphémateurs de la propriété, des destructeurs de la famille et des expropriateurs de nos jours. […] « — Ainsi donc, réunir ces diverses fonctions, ou passer de l’une à l’autre, c’est ce qui peut arriver de plus funeste à l’État et ce qu’on peut très bien appeler un véritable crime. » XV La communauté des femmes et des enfants, ce scandale de la raison et ce sacrilège contre la nature, est un des fondements de sa société. […] C’est la famille qui est l’homme, car elle est l’homme dans les trois temps de son être : le passé, le présent, l’avenir.
Mais n’était-ce pas un subterfuge d’assez mauvaise foi, que de passer de la grâce à la morale, et de déplacer ainsi la question ? […] D’abord la casuistique semble y être enveloppée dans la condamnation des casuistes : c’est en méconnaître l’innocence, la légitimité, la nécessité ; la casuistique est l’art d’appliquer les principes de la science morale, elle est nécessaire toutes les fois qu’il s’agit de passer de la théorie à la pratique, de la loi universelle aux cas particuliers : dans tous les conflits de devoirs, et dans les situations complexes, elle seule éclaire l’homme. […] Il est vrai aussi que ces lourds bouquins, scolastiques presque toujours de style et de langue, étaient plus à l’usage des directeurs que des fidèles, et servaient plus à absoudre l’irréparable passé qu’à autoriser les fautes à faire. […] Les Pensées Pascal n’avait pu terminer son Apologie de la Religion chrétienne : les fragments qu’il avait rédigés lurent publiés en 1670 par MM. de Port-Royal, assez inexactement, avec toute sorte de retranchements et de corrections, mais en somme de la seule façon qui put en ce temps-là faire passer et faire goûter l’ouvrage.
Il en eut de si étranges dans la nuit du 10 novembre 1619, qu’au dire du même Baillet, si Descartes n’avait déclaré qu’il ne buvait pas de vin, on eût pu croire qu’avant de se coucher il en avait fait excès, « d’autant plus, ajoute naïvement le biographe, que le soir était la veille de Saint-Martin20. » Après quelques années passées soit dans des voyages, où il étudiait les mœurs, et par la vue de leur diversité et de leurs contradictions, se fortifiait dans son dessein de chercher la vérité en lui-même, soit à la guerre, où il s’appliquait tout à la fois à étudier les passions que développe la vie des camps, et les lois mécaniques qui font mouvoir les machines de guerre ; après quelque séjour à Paris, où il cacha si bien sa retraite que ses amis même ne l’y découvrirent qu’au bout de deux ans, il se fixa en Hollande, comme le pays qui entreprenait le moins sur sa liberté, et dont le climat, selon ses expressions, lui envoyait le moins de vapeurs. […] On s’y plaisait toutefois, soit par le souvenir de l’ignorance passée, soit par le dégoût des affirmations violentes. […] Il est un autre trait par où Descartes est plus véritablement original que les écrivains ses prédécesseurs : il se passe de l’antiquité. […] Il se jette à chaque instant hors de la raison générale, qu’il n’a pas d’ailleurs reconnue ; et bon nombre de ces délicatesses de pensée et d’expression, de ces nuances dont son style est chargé, ne peuvent passer de son esprit dans l’esprit de ses lecteurs.
Ce qu’ils appellent instinct étant tout ce qui leur passe par la tête de temps à autre il leur passe quelque chose de très bien II n’y a pas plus lieu de s’en surprendre que s’étonner de découvrir dans les accidents de nuages certains rappels d’organisation. […] Mais je ne vis pas dans le passé, je ne crois pas à la pérennité d’une forme de « classique », et je voudrais que l’émotion, dans une œuvre que l’émotion pénètre et soulève fut marquée termes d’une eulogieas plus térébranteat. […] En 1917, il passe trois semaines en Suisse chez Romain Rolland et, de retour à Paris, il entre en contact avec le petit milieu rollandien français : Marcel Martinet, Fernand Desprès, Gustave Dupin, avec qui il fonde La Plèbe (n° 1, avril 1918).
. — Le Directoire exécutif, tel que le projet l’annonce, est un berceau, qu’on nous passe ce mot, un nid de factions ennemies ; et sa destinée serait de ressembler bientôt à tous les conseils de gouvernement que nous avons vus en France depuis trois ans, où Roland et Pache, Robespierre et Billaud se sont tour à tour arraché la puissance… Je n’entre pas dans le détail des voies et moyens, des remèdes plus ou moins efficaces qu’il proposait ; je ne fais qu’indiquer la ligne générale de Roederer en ces années. […] Il peut passer dix-huit heures de suite au travail, à un même travail, à des travaux divers. […] J’ai souvent comparé vos questions sur les hommes et sur les choses à l’étude d’une poignée de sable que vous passez grain à grain à la loupe.
Ce fut vers 1450 que ce nom passa aux représentations dramatiques. […] C’est au xve siècle certainement que le théâtre du moyen âge s’épanouit dans tout son éclat : et littérairement, les œuvres dramatiques du xve siècle sont fort médiocres ; je ne sais si, quand on passe du xiie et du xiiie siècle au xve , il n’y a pas décadence : à coup sûr il n’y a pas progrès. […] Au xvc siècle, les représentations profanes sont, elles aussi, données par des bourgeois momentanément associés, et l’on voit par exemple cinq ou six artisans passer contrat par-devant notaire pour monter ensemble une moralité qui leur plaît.
IL n’était pas causeur ; une pointe d’amertume passait dans la gravité souriante de ses propos ; il portait avec une grâce héroïque l’incurable blessure que la trahison de la vie lui avait faite. […] Il lui suffit de se donner l’air de renoncer à tout, de sembler ne garder du passé ni une espérance, ni un regret, ni un ressentiment. […] Elle avait passé par l’Hôtel de Rambouillet, où l’on se piquait de bien faire les lettres.
Ils nous ont montré en effet que les mêmes mouvements, correspondant aux mêmes sensations musculaires, nous font passer de la première à la deuxième, ou de la troisième à la quatrième. […] Mais avant d’aller plus loin, faisons une réflexion ; d’après ce qui précède, nous ne connaissons les points de l’espace ou plus généralement la situation finale de notre corps, que par les séries de sensations musculaires nous révélant les mouvements qui nous ont fait passer d’une certaine situation initiale à cette situation finale. […] À chaque élément du continu C, ou si l’on aime mieux s’exprimer ainsi, à chaque point du premier espace tactile, correspond une série de sensations musculaires Σ qui me font passer d’une certaine situation initiale à une certaine situation finale1.
O tigres défiés par d’autres tigres, vous croyez donc passer à l’immortalité ? […] Des Princes, des Magistrats, des Guerriers, des Prêtres, la Philosophie passe aux Nations entieres ; &, par un zele de préférence, c’est à la nôtre qu’elle s’adresse. […] « J’ai passé, dit-il, chap.
La « dure nécessité » pourtant, comme il l’appelle, le rengagea dans une carrière : il fut attaché à la diplomatie et passa jusqu’à trois années à Londres, trois années d’ennui, de souffrance et de contrainte. […] Il faut l’entendre qualifier cette « scandaleuse bacchanale », cette « bambochade ignominieuse », que favorisaient la lâcheté des corps constitués et l’immortelle badauderie parisienne, et s’écrier, par un mouvement digne d’un ancien : On dit que, dans toutes les places publiques où passera cette pompe, les statues seront voilées. […] Une lettre de lui, écrite à la date du 28 octobre 1792, nous le montre désormais « bien déterminé à se tenir toujours à l’écart, ne prenant aucune part active aux affaires publiques, et s’attachant plus que jamais, dans la retraite, à une étude approfondie des lettres et des langues antiques. » Sa santé s’était altérée ; il allait de temps en temps passer à Versailles des semaines vouées à la méditation, à la rêverie, à la poésie.
Caron vous passera sans passer les amours ; Devant ce temps-là même ils vous auront quittée. […] Psyché écrit (comme un personnage de l’Astrée), écrit, au milieu de ses épreuves, les vers suivants sur les rochers d’un désert affreux qu’elle est forcée de traverser : Que nos plaisirs passés augmentent nos supplices !
Une syllabe se prononce d’autant plus aisément ou plus difficilement à la suite d’une autre, que l’organe doit conserver plus ou moins la disposition qu’il a dû prendre pour prononcer la première : sur quoi il faut remarquer, que deux consonnes de suite forment chacune une syllabe, parce qu’il y a toujours nécessairement un e muet entre deux ; et comme cet e muet passe fort vite et ne se prononce presque pas, l’organe est obligé de faire d’autant plus d’effort pour marquer la double consonne. […] Il n’avait jamais été en Italie ; à la bonne heure : il n’avait jamais parlé que français aux Italiens qu’il avait vus ; cela n’est guère vraisemblable, mais passe encore : on conviendra du moins qu’il avait eu avec ces Italiens de fréquentes et de profondes conférences sur leur langue ; or cela suffisait à la rigueur pour la bien savoir, et croit-on qu’il ne les consultât pas sur ses productions italiennes, et qu’il ne se corrigeât pas d’après leurs avis ? […] On peut faire à peu près la même réflexion sur tant d’écrivains modernes, qui passent pour avoir fait d’excellents vers latins.
Jean Rival, né à Grenoble, fils d’un professeur du lycée, étudiant à Lyon, qui va mourir pour la France à dix-neuf ans, écrit à son plus jeune frère : … Mon plus grand réconfort, dans les moments difficiles que j’ai à passer ici, c’est de penser que vous tous, mes petits frères et sœurs, vous faites comme moi votre devoir. […] Je ne connais pas de poésies pastorales plus limpides, plus transparentes que ces lettres où l’on voit passer soudain le lièvre de Cowper et les perdrix de Francis Jammes. […] Combien en ai-je vu qui s’essuyaient les yeux, en regardant passer notre beau bataillon. » Il arriva aux tranchées le 20 avril 1915, et le 29 mai, héroïquement, il tombait21 (Lettres imprimées à Chambèry, sans nom d’éditeur.)
Ainsi sur le théâtre de la civilisation, on voit souvent passer et repasser les mêmes figurants, mais diversement groupés, et changeant de costumes suivant les situations. […] Par la complication sociale, « l’individu passe au premier plan de la scène, tandis que les anciennes personnes morales dont il était englobé naguère se dissipent comme des ombres derrière cette unique figure en vif relief. » Comment, d’ailleurs, la complication sociale combat directement cette notion de classe, ennemie née de l’égalitarisme, c’est chose aisée à apercevoir. […] À l’origine de l’époque moderne les grands courants commerciaux, qui passent par les villes de l’Italie et du Rhin, fraient la voie à l’émancipation des hommes181.
Les serviteurs, au contraire, étaient obligés de passer leur vie dans le même état de dépendance. […] D’un autre côté, les châteaux et les terres qui composaient le domaine particulier des rois, ayant passé, par mariage ou par concession, à leurs vassaux, se trouvent aujourd’hui assujettis à des taxes et à des tributs. […] Cette coutume barbare dura si longtemps chez les nations les plus policées, qu’au rapport de Polybe, les Romains imposèrent aux Carthaginois, entre autres conditions de paix, celle de ne point passer le cap de Pélore pour cause de commerce ou de piraterie.
Ils arrêtèrent le duc de Rovigo et le baron Pasquier : le général Hulin reçut un coup de feu dans la figure ; mais, en arrivant à la préfecture de la Seine, les choses se passèrent plus simplement. […] Les dernières années de sa vie, — treize années, — se passèrent à la campagne, à Étuf, sur les confins de la Haute-Marne et de la Côte-d’Or, dans une ferme qu’il acheta, qu’il exploita de ses mains, où il prit au sérieux les occupations agricoles les plus positives, aimant à se dire « cultivateur. » Il y adapta, selon les terrains, divers modes d’assolement ; il y introduisit et y acclimata certains arbres et une race bovine particulière.
Avoir vécu, dès l’enfance et durant la jeunesse, de la vie de famille, de la vie de devoir, de la vie naturelle ; avoir eu des années pénibles et contrariées sans doute, comme il en est dans toute existence humaine, mais avoir souffert sans les irritations factices et les sèches amertumes ; puis s’être assis de bonne heure dans la félicité domestique à côté d’une compagne qui ne vous quittera plus, et qui partagera même vos courses hardies et vos généreux plaisirs à travers l’immense nature ; ne pas se douter qu’on est artiste, ou du moins se résigner en se disant qu’on ne peut pas l’être, qu’on ne l’est plus ; mais le soir, et les devoirs remplis, dans le cercle du foyer, entouré d’enfants et d’écoliers joyeux, laisser aller son crayon comme au hasard, au gré de l’observation du moment ou du souvenir ; les amuser tous, s’amuser avec eux ; se sentir l’esprit toujours dispos, toujours en verve ; lancer mille saillies originales comme d’une source perpétuelle ; n’avoir jamais besoin de solitude pour s’appliquer à cette chose qu’on appelle un art ; et, après des années ainsi passées, apprendre un matin que ces cahiers échappés de vos mains et qu’on croyait perdus sont allés réjouir la vieillesse de Goëthe, qu’il en réclame d’autres de vous, et qu’aussi, en lisant quelques-unes de vos pages, l’humble Xavier de Maistre se fait votre parrain et vous désigne pour son héritier : voilà quelle fut la première, la plus grande moitié de l’existence de Topffer. […] Pour la première fois il renonça à son voyage annuel avec sa jeune bande, et il allait partir pour son cher Cronay272, petit bien de famille appartenant à sa femme, où il se réjouissait de passer les vacances, quand le voile se déchira.
Comment la fera-t-on vraiment passer dans son intelligence ? […] Nous vivons au jour le jour : les événements passent sur nous, et les émotions s’effacent.
C’était un étourdissant causeur ; sa conversation était un feu d’artifice, où l’on voyait passer avec une vertigineuse rapidité images, idées, polissonneries, sciences, contes, métaphysique, rêves fous, hypothèses fécondes, divinations étonnantes. […] « Le premier serment que se firent deux êtres de chair, ce fut au pied d’un rocher qui tombait en poussière ; ils attestèrent de leur constance un ciel qui n’est pas un instant le même ; tout passait en eux, autour d’eux, et ils croyaient leurs cœurs affranchis de vicissitudes.
Quand ce travail de mot à mot, pour ainsi dire, est achevé, alors il s’agit de passer du sens littéral au sens littéraire. […] Tout ce travail se fait en faisant concourir sans cesse l’impression personnelle dont on ne peut se passer, et la connaissance érudite qui sert à préciser, interpréter, contrôler, élargir, rectifier l’impression personnelle.
Il ne paraît pas, après quarante ans passés, que les choses aillent mieux, ni que le livre de Michelet ait rien perdu de son à-propos. […] Il en fait bénéficier jusqu’à la jeune fille qui se laissa endommager et qui ne s’en vante pas la nuit de ses noces : « Vous devez, dit-il au mari, vous fier à elle tout d’abord pour son passé : que serait-ce si elle osait vous interroger sur le vôtre ?
Au-delà tout m’échappe : c’est le bégayement de la folie ; c’est la nuit noire ; c’est, comme dit Baudelaire, le vent de l’imbécillité qui passe sur nos fronts. […] Pierrot y passe maquillé, saupoudré de farine, de sucre ou de neige, et mire son visage blanc dans une fontaine translucide.
Passe pour les poètes ! […] On croit que les compliments sont là tout exprès pour faire passer les critiques.
Les chasses, les fêtes, les équipages, les trains princiers, les convives y ont passé, comme une invasion. […] Qu’il était difficile encore de faire passer la paternité, sans trop l’avilir, d’une camaraderie complaisante à une minorité surveillée !
Il est quelquefois cassant ; il est quelquefois un peu trop admiratif et ami de tout le monde ; il est quelquefois, à votre goût, trop tourné du côté du passé ou au contraire trop attiré vers les nouveautés, et homme qui découvre tous les matins un nouveau chef-d’œuvre, ce qui lui fait oublier celui qu’il a découvert hier ; il est quelquefois l’homme qui n’a que de la mémoire et qui cite presque sans choix, et vous le trouvez monotone ; il est quelquefois l’homme qui, en parlant des autres, songe surtout à lui et qui, dans l’esprit des auteurs, ne trouve presque qu’une occasion de faire admirer celui qu’il a ; mais quels que soient ses défauts vous l’aimez toujours un peu : le lecteur aime celui qui lit et qui lui parle de lectures, et en vient même, par besoin de confidences intellectuelles à faire et à recevoir, à ne pouvoir plus se passer de lui Eh bien !
Cet auteur, d’une incontestable originalité, d’un immense savoir et d’une rare intelligence au travail, peut passer pour exemple de ce qu’une seule mauvaise qualité peut faire perdre à une réunion de facultés éminentes. […] Machiavel, dont le Traité du Prince peut passer pour un pamphlet contre la corruption des mœurs de son temps, et dont les comédies sont à coup sûr des satires du genre le plus vif, après avoir subi deux fois l’exil et la torture, meurt victime d’une méprise, pour s’être trompé sur la dose du médicament destiné à le soulager.
Excepté le mot du duc de Doudeauville, en parlant d’une femme dont le nez était exorbitant : « Je vous conseille de la ménager, car, si vous la fâchiez, elle vous le passerait au travers du corps ! […] peut-être aussi sur l’imagination des critiques ; car il y aura des critiques qui n’oseront jamais dire que ce livre n’est pas d’un intérêt dévorant et qu’il n’ajoute rien à la gloire de personne, pas même à celle de la femme pour laquelle il a été écrit, et qui pouvait très bien, sans que pour cela on l’oubliât, se passer d’un si vide hommage !
Mais il est à peu près impossible d’arriver à l’hypothèse d’une relativité double sans passer par celle d’une relativité simple, où l’on pose encore un point de repère absolu, un éther immobile. […] Beaucoup sont incapables d’y procéder ; et celles qui en sont capables se règlent, dans cette opération, sur la forme de leur activité et sur la nature de leurs besoins. « Les corps, écrivions-nous, sont taillés dans l’étoffe de la nature par une perception dont les ciseaux suivent le pointillé des lignes sur lesquelles l’action passerait 16 ».
Mis à la tête de l’empire, il y soutint son caractère ; on le vit à la cour dédaigner le faste, fuir la mollesse, combattre ses sens, dompter en tout la nature, se contenter de la nourriture la plus grossière ; souvent il la prenait debout, souvent se la refusait, dormait peu, n’avait d’autre lit qu’une peau étendue sur la terre, et passait une partie des nuits ou dans son cabinet, ou sous sa tente, occupé au travail et à l’étude. […] Son caractère ardent est souvent inégal ; souvent il voit le but, l’atteint et le passe ; enfin, il eut dans ses idées plus d’impétuosité que de règle, et, dans plusieurs de ses sentiments, plus de grandeur que de sagesse.
De là la divination appliquée aux phénomènes du tonnerre, au vol de l’aigle, qui passait pour l’oiseau de Jupiter. […] Ainsi, la vie d’un seul homme nous présente plus de faits qu’il ne s’en passerait en mille années !
Une discussion, qui s’est passée un jour sous nos yeux, au moment même de l’apparition du livre, et dont les termes me reviennent presque textuellement, en sera la meilleure preuve.
Peut-être serait-elle plus sûre encore, si toutes deux avaient passé l’âge de plaire. » En revanche, il croit fort à l’amitié d’un sexe à l’autre.
. — Les Prophètes du passé (1851). — L’Ensorcelée, roman (1854)
La révolution des Trois Jours avait emporté et noyé dans son brusque courant tous ces discrets ombrages du Delta romantique, lorsque cette voix stridente et rauque vint à retentir, comme pour rompre aussi de ce côté — là avec le passé.
Pierre Quillard s’évade de ce musée aux blanches figures antiques dont il étudie et retrace sans cesse les immobilités, il faut convenir qu’il a le don du vers condensé et de l’image évocatrice, mais évocatrice du passé.
Au juste, comme il a passé son baccalauréat et séduit une fille de chambre, il se croit mûr pour le roman.
Mais, dès qu’on passe à la recherche des causes et des effets, que de difficultés, et souvent quelle impossibilité de saisir le vrai !
d’Alembert, qu’il passe à la description du Temple de l’imagination.
Désormeaux auroit dû éviter, est une affectation trop sensible dans les louanges qu’il donne à ses Héros, une application trop marquée à passer légérement sur les foiblesses & les fautes dont ils n’ont pas été exempts.
L’Histoire de la Baronne de Lus, les Confessions du Comte de ***, sont réellement des Ouvrages bien écrits, pleins d’esprit & de sagacité ; le dernier principalement passera pour un Roman original ; mais ses Ouvrages ne seront, après tout, que des Romans qu’on ne relit pas deux fois.
Malherbe, au contraire, en s’attachant à la lecture des Anciens, ne puisa dans leurs Ouvrages que cette douce harmonie ; cette noble simplicité, qu’il nous est si difficile de faire passer dans les nôtres.
Il a fait aussi passer l'Epithalame dans notre Langue : celle qu'il composa pour le Mariage de Monsieur de Vendôme avec Jeanne d'Albret, Reine de Navarre, est la premiere qu'on connoisse.
Dans le huitieme Chant de Clovis, un vénérable Druide conduit ce premier Roi des Francs dans le Temple de la Gloire, & le fait passer, pour y aller, par un antre mystérieux, où, Sur les pas de Clovis s’offrent de toutes parts Des Monstres dont l’aspect étonne ses regards.
Semblable à ces femmes qui faisoient profession de pleurer aux funérailles des Anciens, & qui regrettoient avec de grands cris ceux même qu'elles n'avoient jamais vus, l'Eloquence gémit indistinctement sur toute sorte de tombeaux, &, confondant le Génie dans la médiocrité, veut quelquefois consacrer à celle-ci des monumens dont on a privé jusqu'à ce jour la cendre des Corneille & des Racine, &c. » * Au reste, l'Histoire de Pologne passe pour le meilleur Ouvrage de M. de Solignac, & seroit une excellente Histoire aux yeux de tout le monde, si le naturel, la simplicité & la correction étoient les seules qualités qu'on dût exiger d'un Historien ; mais ces qualités, pour être précieuses, ne sont pas les seules nécessaires, & malheureusement M.
Il voulut passer avec elle à la postérité.
Du caractère de l’époux, passons à celui de père ; considérons la paternité dans les deux positions les plus sublimes et les plus touchantes de la vie, la vieillesse et le malheur.
Le même esprit de religion inspira Charlemagne ; et l’église des Apôtres, élevée par ce grand prince à Florence, passe encore, même aujourd’hui, pour un assez beau monument129.
D’où vint donc cette grande réputation qu’ils acquirent & qui a passé jusqu’à nous ?
Speroné Speroni, poëte du dix-septiéme siecle, a fait une tragedie italienne, intitulée Canacée, qui du moins peut passer pour une des meilleures tragedies écrites en italien.
Ce principe, que nous avons tous plus ou moins rencontré, plus ou moins coudoyé, plus ou moins senti dans la vie historique, soit du présent, soit du passé, Mancel a eu le mérite de le formuler en une phrase d’une brièveté lapidaire et dont tout son livre est la justification rationnelle : « Le pouvoir se prend et ne se donne pas », nous dit-il avec une simplicité qu’il a l’art de rendre féconde.
Et celui qui passe, sans y pénétrer, devant les sanctuaires, les bénit du moins de toute sa raison.
C’est alors, cher ami Morf, que tu m’ouvris les yeux, que tu me montras, dans un passé de volonté consciente, toutes les promesses d’avenir.
Ils regrettaient le passé, fidèles à la ballade, à la villanelle, aux vieux mots gaulois, au système de poésie facile qui permettait à Ronsard de faire, si on l’en croit, quatre cents vers dans sa journée. […] On lisait à l’envi, on se passait de mains en mains les lettres et les billets galants d’Antonio Perez. […] Les anecdotes en abondent ; quelques-unes passent la vraisemblance. […] Aujourd’hui que le danger est passé, il est commode de le croire moins sérieux qu’il n’a été. […] La neuvième satire, le chef-d’œuvre du genre, fait définitivement passer tous les rieurs du côté de Boileau, et met hors de combat, outre Cotin, les plus déterminés de ses adversaires.
. — Eh bien, il fait de même dans ses exposés politiques, et, quand il arrive à la portion positive, organique, à l’indication précise des voies et moyens, il met des points et passe outre.
Il a eu, il a encore de certaines pages évocatrices et divinatrices du passé.
Pendant qu’on imprime ces volumes, il se peut que plus d’un sujet se dérobe à ma classification et acquière le droit de passer d’une série à l’autre.
Pour le coup, monsieur, vous vous attendez à des révélations sincères : patience, elles sont manuscrites encore ; jusqu’ici nul aveu éclatant qui motive cette boutade de repentir ; on sent que la chasteté et la dévotion de 1800 ont passé là-dessus, et que madame de Genlis a effacé ses fautes avec ses larmes.
La scène se passe au moment de la Révolution, dans un village.
Vous faites des choses si belles, Si justes & si naturelles, Que votre style est sans égal ; Sans cesse je vous étudie : Qui peut être votre Copie, Passe pour être Original.
un Ouvrage, où la richesse des détails, la grandeur des événemens, la vérité des caractères, la sublimité de la morale, l’harmonie de la prose, l’emportent sur la pompe de la versification, & prouvent qu’un Ecrivain de génie peut s’en passer dans un Poëme épique !
la Mothe pourra passer encore pour un de nos bons Poëtes Bucoliques.
Nous ne citerons rien de ses Discours philosophiques, parce que tout y est d’une égale beauté ; nous dirons seulement qu’ils suffiroient pour faire la réputation d’un grand Poëte, & qu’ils passeront à la Postérité, malgré les cris de l’Envie, comme un des plus beaux monumens de la Littérature de ce Siecle.
Comme avecque grand bruit le Rhosne plein de rage, Soulevé par les vents ou grossi par l'orage, Vient & traîne avec soi mille flots courroucés ; L'onde flotte après l'onde, & de l'onde est suivie : Ainsi passe la vie, Ainsi coulent nos jours l'un sur l'autre entassés.
Il faut, pour cela, qu’il jette sur ses contemporains ce tranquille regard que l’histoire jette sur le passé ; il faut que, sans se laisser tromper aux illusions d’optique, aux mirages menteurs, aux voisinages momentanés, il mette dès à présent tout en perspective, diminuant ceci, grandissant cela.
Il passe pour avoir ouvert la carrière aux Cochin, aux Aubri.
Mais qu’on ne nous blâme point, en une époque de confusion et d’anarchie, d’avoir réservé nos meilleures louanges à ceux qui gardent fidèlement le sens de la tradition nationale : clarté, sobriété, mesure, méthode ; à ceux qui n’ont pas vêtu la déesse d’ornements étrangers, qui ne l’ont pas éloignée du grand chemin tranquille où passèrent, indifférents aux soucis de la politique éphémère et aux modes qui se fanent, les classiques.
Il faut passer au quinzième siècle, pour en voir la renaissance en Italie.
Des préceptes passons aux exemples.
Il y auroit donc de la folie à faire passer en revue tous ces ouvrages calqués les uns sur les autres, & qui pour la plûpart ne sont que des compilations de regles triviales, faites par des Ecrivains très-médiocres.
Mais abandonnons ce pauvre Mr Halle à son sort et passons à un homme qui en vaut bien un autre.
La tête du cloud est même chargée des dépouilles hideuses qu’elle a emportées en déchirant les chairs du pied à travers lequel elle a passé.
Un païs n’est découvert pour les gens d’une certaine profession, ils ne sçauroient profiter de celles de ses richesses, qui sont à leur usage, qu’après qu’il y a passé des gens de leur profession.
Après avoir satisfait les esprits les plus novateurs, après avoir été celui de qui s’autorisaient les contempteurs de la vieille morale, de la vieille religion, de la vieille société, après avoir passé pour un « révolutionnaire », M.
C’est alors, plus de mille ans après le déluge, que Tyr, capitale de la Phénicie, descend de l’intérieur des terres sur le rivage, pour passer ensuite dans une île voisine.
Ménandre fut le père de la comédie nouvelle, dont les personnages sont de simples particuliers, et en même temps imaginaires ; c’est précisément parce qu’ils sont pris dans une condition privée, qu’ils pouvaient passer pour réels sans l’être en effet.
Si nous traversons l’Océan pour passer dans le Nouveau-Monde, nous trouverons que l’Amérique eût parcouru la même carrière sans l’arrivée des Européens.
Je ne puis mieux l’adresser qu’à vous, dont l’exemple prouve si bien qu’on peut vivre heureux sans les grands, et dont le commerce fait sentir combien il est facile de s’en passer. […] Comme dans des circonstances pareilles et avec des intérêts semblables, les hommes voient à peu près les mêmes choses, je ne doute pas que plusieurs gens de lettres n’aient fait les mêmes observations que moi ; tant pis même pour ceux à qui elles seront nouvelles : mais la plupart d’entre eux ne peuvent faire part aux autres de ces observations, parce qu’ils sont en quelque sorte établis dans le pays où je n’ai fait que passer, et qu’il faut être de retour chez soi pour parler à son aise des nations qu’on a parcourues ; je souhaite que mes réflexions puissent être de quelque secours à ceux qui me suivront dans la même carrière ; et quand je ne me proposerais pas un but si raisonnable, je serais du moins semblable à la plupart des voyageurs, assez rassasiés de leurs courses pour n’avoir nulle envie de les recommencer, mais en même temps assez pleins de ce qu’ils ont vu pour vouloir en entretenir les autres. […] Malheur à tout ouvrage dont l’auteur ne cherche qu’à passer son temps, ou à obtenir cinq ou six suffrages déjà assurés avant la lecture. […] Voulez-vous passer pour homme d’esprit ? […] Un homme de lettres forcé par des circonstances singulières à passer ses jours auprès d’un ministre, disait de lui avec beaucoup de vérité et de finesse : il veut se familiariser avec moi, mais je le repousse avec le respect.
Le « nous » voulait nous faire croire à son accord avec le « moi », mais l’instinct égoïste, à son tour, cherche à passer sous le couvert de l’instinct social. […] Sans doute on peut dire que, la société étant plus importante, son droit doit passer le premier. […] Le « guillotiné par persuasion » passe pour un personnage plutôt comique et paradoxal. […] S’il ne crée pas tout à lui seul, il se sert de tout ce qui naît, de tout ce qui passe dans l’esprit.
Aussi, plusieurs années se passèrent sans que je pensasse à recourir à ce moyen ; et ce premier germe de désir, déposé dans mon esprit par Sacountala elle-même, y demeura longtemps enseveli dans la plus profonde inaction. […] « Quelques mois d’un travail assidu m’ayant mis à même de me former une idée telle quelle du système de déclinaison et de conjugaison sanscrites, et de la manière non moins ingénieuse que compliquée avec laquelle les mots y sont orthographiés, je cherchai aussitôt à me faire l’application de ces éléments, en m’exerçant sur quelque manuscrit ; car il n’existait pas même alors de texte imprimé, sauf celui de l’Hitopadèse, qui n’avait pas encore passé sur le continent. […] XII Après quelques jours passés dans les fêtes et dans les douceurs de l’amour, le héros repart pour sa capitale, et l’ermite revient après une longue absence. […] Elle vient de passer dans ces lieux !
Lorsque d’Alembert fut reçu à l’Académie française en 1754, son élection fut très combattue et traversée de beaucoup d’obstacles, « et même il passe pour constant, rapporte La Harpe, qu’il y avait un nombre de boules noires plus que suffisant pour l’exclure, si Duclos, qui ne perdait pas la tête et qui était en tout hardi et décidé, n’eût pris sur lui de les brouiller dans le scrutin, en disant très haut qu’il y avait autant de boules blanches qu’il en fallait ». […] Un voyage en Italie était alors une entreprise fatigante ; Duclos avait soixante ans passés, mais une santé d’athlète, a-t-il soin de nous dire, en ajoutant qu’il la mit dans ce voyage à toutes sortes d’épreuves : Duclos avait l’orgueil de sa bonne santé et de son tempérament robuste, comme Voltaire avait la coquetterie d’être et de se faire malingre.
L’auteur avait voulu peindre les guerres et discordes des comtes et des prélats d’Alsace, ranimer les cadavres de l’histoire, mettre en actions les légendes ou chroniques qui se rattachaient aux débris des vieux châteaux : ils passeront devant les yeux du lecteur dans leur costume antique, disait-il de ses personnages, ils agiront suivant les mœurs de leur siècle ; en un mot, je copierai fidèlement la nature, même lorsque je suppléerai par la fiction aux faits que le temps a ensevelis dans les ténèbres de l’oubli. […] Il alla successivement à Naples, à Bordeaux, en Suisse, à Lyon ; on ne suit pas bien exactement sa trace, mais ce qui paraît certain, c’est que le cardinal, privé de sa présence et ne pouvant se passer de ses communications, envoya à un moment auprès de lui son jeune secrétaire, c’est-à-dire Ramond, tant pour pourvoir à son entretien que pour continuer en chiffres la correspondance : c’est l’abbé Georgel, bien informé, qui atteste le fait.
Il resta longtemps malade, alité, écorché au vif tout le long du dos à force d’être immobile ; puis, quand il fut debout, il eut à passer deux ou trois ans encore avant de pouvoir entièrement guérir ; mais il sauva son bras et aussi sa carrière d’homme de guerre. […] Il advint même, pour plus de vérité et pour que cela ressemblât davantage à ce qui s’est passé trop souvent, que François Ier ne fut point informé que c’était à lui qu’on devait l’exécution de son désir.
Dans la description de sa marche, il n’a garde d’omettre qu’il emmena avec lui et fit passer tous les Siennois compromis qui s’exilaient, et en voyant les adieux de ceux qui partaient et de ceux qui restaient, leur déchirement, et toute cette ruine et désolation d’un peuple « si dévotieux à sa liberté », il n’avait pu retenir ses larmes. […] Le bâton de maréchal, que Henri III lui mit en main à Lyon à son retour de Pologne (1574), ne fut qu’une récompense des services passés : Montluc, estropié et âgé de plus de soixante-dix ans, était hors d’état d’en rendre de nouveaux.
À la suite de la gageure et pour la tenir, Benjamin Constant est passé du salon dans son cabinet et a pris la plume, qui a couru sur le papier en nuances fines et subtiles. […] Nous autres critiques, placés entre la tradition et l’innovation, c’est notre plaisir de rappeler sans cesse le passé à propos du présent, de les comparer, de faire valoir l’œuvre ancienne en même temps que d’accueillir la nouvelle (car je ne parle pas de ceux qui sont toujours prêts à immoler systématiquement l’une à l’autre).
J’estime que, dans nos circonstances publiques, le pays courrait quelque risque, si le pouvoir passait actuellement dans d’autres mains. […] Ainsi encore ce passage d’une lettre à M. de Corcelles (4 août 1855) : En revoyant mes paperasses, j’ai songé au temps passé.
Cette journée du 20 octobre avait eu pour but ou pour prétexte de faire passer le gouvernement dans les mains des patriotes cisalpins et des amis de la France, en éliminant les tièdes ou les suspects. […] Saint-Cyr, qui commandait la droite de l’armée, nous a laissé, dans ses intéressants mémoires où il fait preuve d’un sens critique si distingué mais si sévère, le tableau circonstancié et fidèle de tout ce qui se passa la veille de cette intempestive journée de Novi.
Je laisse les paroles indignes et cyniques qui passent pour avoir été échangées à l’autel même, et que le souffle de l’impure légende a portées jusqu’à nous ; mais j’ose dire que ce n’est point impunément qu’une Constitution nouvelle, fût-elle la meilleure, s’inaugure devant tout un peuple par une momerie ou un sacrilège. […] Elle juge, de quelques mots qu’il a laissé échapper dans sa dernière conversation avec elle, qu’il est question pour lui de mourir ; aussi a-t-elle passé la nuit dans une grande agitation et dans les larmes.
Peut-être fallait-il faire dire aux anciens ce qu’on voulait apprendre aux modernes, et rappeler le passé comme servant d’allégorie pour le présent. […] La liberté donne des forces pour sa défense, le concours des intérêts fait découvrir toutes les ressources nécessaires, l’impulsion des siècles renverse tout ce qui veut lutter pour le passé contre l’avenir : mais l’action inhumaine sème la discorde, perpétue les combats, sépare en bandes ennemies la nation entière ; et ces fils du serpent de Cadmus, auxquels un dieu vengeur n’avait donné la vie qu’en les condamnant à se combattre jusqu’à la mort, ces fils du serpent, c’est le peuple, au milieu duquel l’injustice a longtemps régné.
Belle Erembour à sa fenêtre voit passer le comte Renaud, qui l’a abandonnée. […] Aussi, à l’ordinaire, nos amants resteront bien loin des ardeurs qui échauffent chaque ligne de l’Imitation : leur dame ne sera que l’idée de la dame, leur passion ne sera que l’idée de la passion ; tout se passera dans leur tête, en constructions abstraites, non dans leurs cœurs en vivantes émotions.
Ce qui est certain, c’est que le Pantalon Turi passait pour querelleur. […] À la page 6 de l’imprimé, on lit : « Flore sera représentée par la gentille et jolie Louise-Gabrielle Locatelli, dite Lucile, qui, avec sa vivacité, fera connaître qu’elle est une vraie lumière de l’harmonie. » À la page 7 : « Cette scène sera chantée, et Thétis sera représentée par la signora Giulia Gabrielli, nommée Diane, laquelle à merveille fera connaître sa colère et son amour. » Même page : « Le prologue de cette pièce sera exécuté par la très excellente Marguerite Bertolazzi, dont la voix est si ravissante, que je ne puis la louer assez dignement. » Une scène est suivie de cette note : « Cette scène sera toute sans musique, mais si bien dite qu’elle fera presque oublier l’harmonie passée. » 34.
Jésus, selon son habitude, passa le val du Cédron, et se rendit, accompagné des disciples, dans le jardin de Gethsémani, au pied du mont des Oliviers 1093. […] Le mot grec [Greek : bêma] était passé en syro-chaldaïque.
Il en concluait que l’absence de phosphore dans l’encéphale réduit l’homme à l’état de la brute, qu’un grand excès irrite le système nerveux et le plonge dans ce délire épouvantable que nous appelons la folie, enfin qu’une proportion moyenne rétablit l’équilibre et produit cette harmonie admirable qui n’est autre chose que « l’âme des spiritualistes. » À cette théorie, on a opposé que la cervelle des poissons, qui ne passent pas pour de très grands penseurs, contient beaucoup de phosphore. […] Nous lisions dernièrement le récit d’un courageux voyageur américain qui a passé deux ans dans le commerce intime des Esquimaux, partageant leurs mœurs, leur vie, leur langue.
Mais ne raisonnons point d’après ce qui se passe en Asie ; les passions humaines existent partout : là elles s’épuisent sur des individus, ailleurs c’est sur les choses ; toujours les hommes périssent. […] Un tel bienfait ne fut point apprécié ; il parut à des esprits chagrins un retour vers le passé, pendant que c’était une heureuse transition vers l’avenir.
Conséquences de l’émancipation de la pensée dans la sphère de la littérature et des arts Toute théorie de l’avenir ne peut reposer que sur la juste appréciation du passé ; mais aujourd’hui cette première donnée nous manque presque entièrement. […] Mais avant de passer à une autre partie de la discussion, je ne puis m’abstenir de remarquer combien les travaux actuels de M.
Si les facultés de l’intelligence eussent été seules en Mme Colet, elle aurait passé comme une foule de femmes qui agacent l’attention deux jours ; puis, qui s’en vont : Où va la feuille de rose Et la feuille de papier ! […] Corinne sans Oswald ; le temps des Oswald était passé.
Stapfer passe ensuite à celles qu’on a dirigées contre son génie. […] … Pour ceux qui n’entendent pas l’arabe comme pour ceux qui le comprennent, ce mot de Koran a beau signifier, dans son sens primitif et grammatical, une collection de chapitres, il n’en fait pas moins, dès qu’on le prononce, passer devant nous le monde de l’Orient avec ses dogmes, ses coutumes, ses mœurs, ses tableaux.
Vous dites quelque part, en marquant le réveil spirituel qui se fait le matin après les nuits mal passées, que, lorsque l’aube blanche et vermeille, se montrant tout à coup, apparaît en compagnie de l’Idéal rongeur, à ce moment, par une sorte d’expiation vengeresse, Dans la brute assoupie un ange se réveille !
De son côté, il n’avait cessé de m’exhorter directement ou indirectement à me fixer, à croire… Mais, je le demande, que pouvais-je faire lorsque, tout d’un coup, je le vis passer du blanc au noir ou au rouge, et dans sa pétulance sauter par-dessus ma tête, m’enjamber comme au jeu du cheval fondu pour aller tomber tout d’un bond du catholicisme dans l’extrême démagogie ?
des fleurs pourtant qui jetaient leurs senteurs aux vents, aux brises du désert, ou quelquefois aux groupes joyeux qui passaient.
Elle avait jusque-là très-peu connu sa grâce ; Elle oubliait son heure et que l’enfance passe.
D’une part, engagée par les sollicitations de votre mémoire, disons mieux, de votre conscience ; de l’autre retenue par les scrupules de votre amour-propre, ou du moins de votre délicatesse, il vous faudra, et j’adopte ici la supposition la plus douce, il vous faudra tout ménager, tout prévoir, conter avec apprêt et réserve, fausser presque à votre insu vos réminiscences, prendre à propos vos rêves pour des souvenirs, en un mot, par un officieux et perpétuel mensonge d’imagination, reconstruire le passé en croyant le reproduire ; à moins toutefois, ce que je ne redoute guère, qu’il ne vous advienne l’orgueilleux caprice de nous confesser voire vie pleine et entière, à la mode de saint Augustin, sinon de Jean-Jacques.
L’action paraît se passer vers le commencement du siècle.
C’est là qu’isolé, tout à fait aveugle, après avoir passé par les horreurs d’une tentation sinistre de mort, un matin de printemps, il s’avisa de demander à la poésie, au chant, quelque chose de ce qu’il avait demandé vainement au pinceau et à la lumière, un haut refuge du moins, une patrie idéale où se reposer.
Ils aspirent aux jouissances de l’art, si puissantes à concilier et à purifier les âmes, que de longs ressentiments ont aigries ; et s’ils paraissent commencer en cette voie une sorte de révolution, celle-là du moins se passera tout entière dans la région des idées, dans le domaine de la poésie, et c’est d’ailleurs presque seulement de l’époque de la Restauration qu’elle date, et par des hommes de la Restauration qu’elle est tentée.
Ne disons donc pas que Shakespeare a su se passer de goût, et se montrer supérieur à ses lois.
Remy de Gourmont Il y a, dans ce livre de l’enfance (La Chambre blanche), toute une philosophie de la vie : un regret mélancolique du passé, une peur fière de l’avenir.
Je cueille au hasard ces beaux vers : Ne te lamente pas, homme des nouveaux âges, Parce que, dans les yeux des voyants et des sages, Les rêves du passé ne resplendiront plus.
Arthur Rimbaud prend tous les tons, pince toutes les cordes de la harpe, gratte toutes celles de la guitare et caresse le rebec d’un archet agile s’il en fût… Bien des exemples de grâce exquisément perverse ou chaste à vous ravir en extase nous tentent, mais les limites normales de ce second essai déjà long nous font une loi de passer outre à tant de délicats miracles, et nous entrerons sans plus de retard dans l’empire de la Force splendide où nous convie le magicien avec son Bateau ivre.
Il nomme la duchesse de Montausier gouvernante de M. le Dauphin, et le duc de Montausier est désigné d’avance pour être son gouverneur, quand, âgé de sept ans, le prince passera des mains des femmes en celles des hommes.
La Fontaine et Racine avaient besoin, l’un de l’imagination des femmes de la cour pour faire passer ses contes, l’autre de leur âme pour faire sentir plus vivement le pathétique dont la sienne renfermait le secret ; tous avaient besoin du roi pour obtenir la vogue, objet ordinaire de l’ambition des talents, et souvent leur unique récompense.
Quels autres noms pouvoit-il lui donner, en voyant que, parmi les cent cinquante volumes qui composent le Recueil de son Journal, il n’y en a pas un où il n’ait l’audace de critiquer ceux qui passent pour nos meilleurs Ecrivains ?
Ce n’est pas assez d’être doué d’une éloquence prestigieuse, qu’on nous passe ce terme, propre à faire valoir tout ce qu’elle prend, pour ainsi dire, sous sa protection.
Diane elle-même ne peut guère passer que pour une pâle doublure d’Artémis.
Patriarche sous le palmier de Tophel, ministre à la cour de Babylone, prêtre à Memphis, législateur à Sparte, citoyen à Athènes et à Rome, il change de temps et de place à son gré ; il passe avec la rapidité et la majesté des siècles.
J’ai vu peindre La Tour, il est tranquille et froid ; il ne se tourmente point ; il ne souffre point, il ne halète point, il ne fait aucune de ces contorsions du modeleur enthousiaste, sur le visage duquel on voit se succéder les images qu’il se propose de rendre, et qui semblent passer de son âme sur son front et de son front sur la terre ou sur sa toile.
Notre principal objectif, en effet, est d’étendre à la condition humaine le rationalisme scientifique, en faisant voir que, considérée dans le passé, elle est réductible à des rapports de cause à effet qu’une opération non moins rationnelle peut transformer ensuite en règles d’action pour l’avenir.
— Passe moi mon carquois et mon arc !
Sans exagérer la valeur de Mercier et refaire une réputation posthume à un homme qui de son vivant eut sa part de célébrité, cependant nous croyons que son livre, réduit à des proportions qui le rendent plus clair et plus ferme, et passé, qu’on nous permette le mot !
Pour les esprits qui ne passent pas leur vie à couper en quatre des fils de la Vierge avec de microscopiques instruments, il n’y a que trois femmes en nature humaine et en histoire : La femme de l’Antiquité grecque (car la matrone romaine, qui tranche tant sur les mœurs antiques, n’est qu’une préfiguration de la femme chrétienne), la femme de l’Évangile, et la femme de la Renaissance, — pire, selon nous, que la femme de l’Antiquité, pire de toute la liberté chrétienne dont la malheureuse a si indignement abusé.
Tout ce qui a un nom dans cette moitié de xixe siècle l’a depuis plus de quinze ans et vit sur le bénéfice de son passé.
On a rapporté ces lois au législateur d’Athènes, d’où elles seraient passées à Rome, et l’on n’y a point vu l’histoire du droit naturel des peuples héroïques du Latium ; on a cru que les poèmes d’Homère étaient la création du rare génie d’un individu, et l’on n’y a pu découvrir l’histoire du droit naturel des peuples héroïques de la Grèce.
Les secousses souvent contradictoires, les espérances précipitées suivies de découragement, puis de nouveau reprises avec ferveur, les jugements excessifs, passionnés, lancés dans la colère, et que plus tard elle mitigera, le bon sens fréquent qui s’y mêle, la sincérité invariable, tout contribue à faire de ces pages sans art un témoignage bien honorable à celle qui les écrivit, en même temps qu’une utile leçon, suivant nous, pour ceux qui cherchent dans la réflexion du passé quelque sagesse à leur usage, quelque règle à leurs jugements en matière politique, quelque frein à leurs premiers et généreux entraînements. […] Chacun y est touché et marqué en quelques lignes ; ils passent tous l’un après l’autre devant nous dans leurs physionomies différentes, et le digne Sers (depuis sénateur), aimable philosophe, habitué aux jouissances honnêtes, mais lent, timide et par là même incapable en révolution ; et Gensonné si faible à l’égard de Dumouriez dans l’affaire de Bonne-Carrère, qui ne sait pas saisir le moment de perdre un homme quand il le faut ; avec trop de formes dans l’esprit et pas assez de résolution dans le caractère ; et l’estimable Guadet, au contraire trop prompt, trop vite prévenu ou dédaigneux, s’étant trompé d’ailleurs sur la capacité de Duranthon qu’il a poussé aux affaires, et ayant à tout jamais compromis son jugement par cette bévue sans excuse ; et Vergniaud qu’elle n’aime décidément pas ; trop épicurien, on le sent, trop voluptueux et paresseux pour cette âme de Cornélie : elle ne se permettrait pas de le juger, dit-elle, mais les temporisations subites de l’insouciant et sublime orateur ne s’expliquent pas pour elle, aussi naturellement que pour nous, en simples caprices et négligences de génie ; mais elle le trouve par trop vain de sa toilette, et se méfie, on ne sait pourquoi, de son regard voilé, qui pourtant s’éclairait si bien dans la magie de la parole. […] Il se passe en effet, il se noue et se dénoue entre Mme Roland et Bancal, durant ces deux années, une espèce de roman ; oui, un roman de cœur, dont, à travers les distractions des grands événements et la discrétion du langage, on poursuit çà et là les traces à demi couvertes.
Je passe, sans m’y arrêter, les réflexions de l’auteur sur « quelques infirmités de la pensée », comme la croyance aux causes finales, à la distinction de la puissance et de l’acte, au principe vital, etc. : cela nous entraînerait trop loin, ou trouvera mieux sa place ailleurs. […] Passons, sans nous arrêter sur les sophistes, Socrate, Platon et Aristote, et arrivons au demi-scepticisme de la nouvelle Académie qui fournit à M. […] La conscience est restreinte, confinée au moi et à ce qui se passe dans le moi : toutes les idées que nous avons sur le non-moi ne peuvent être fondées que sur des inférences.
Il s’entendait blâmer de ces demi-retraites, il s’en irritait, il se relançait par accès dans le monde qui lui était à la fois insupportable et nécessaire, — nécessaire, car c’était le théâtre où il déployait avec le plus de succès cette plaisanterie acérée, escrime savante où il était passé maître. […] M. de Lassay, homme très doux, mais qui avait une grande connaissance de la société, disait qu’il faudrait avaler un crapaud tous les matins, pour ne trouver plus rien de dégoûtant le reste de la journée, quand on devait la passer dans le monde. […] Stahl-Hetzel, qui est du moins un garçon d’esprit, et qui ne passe pas pour maladroit, se soit avisé (page xl de sa Notice) de faire allusion à cette journée, qui n’est embarrassante et déshonorante que pour d’autres que moi.
Michel Bréal, dans sa récente Sémantique 143, écrit, à propos de la singularité de certaines métaphores : « Si l’on disait qu’il existe un idiome où le même mot qui désigne le lézard signifie aussi un bras musculeux, parce que le tressaillement des muscles sous la peau a été comparé à un lézard qui passe, cette explication serait accueillie avec doute, ou bien croirait-on qu’il est parlé des imaginations de quelque peuple sauvage. […] A cette liste, il faut peut-être joindre son nom allemand, passé en hollandais, en anglais, en danois, wiesel ; on y trouverait la blanche. […] Qui a directement passé en français, en italien, en espagnol, en portugais.
Les Mémoires de M. de Tillemont sont en seize volumes & ils ne passent guéres le cinquiéme siécle. L’importance de ces premiers âges du Christianisme demande, dit l’Abbé Lenglet, que des Ecrivains modernes qui ont traité l’Histoire Ecclésiastique, on passe aux auteurs originaux. […] De-là il passe au désert de Nitrie & des cellules dans le troisiéme livre ; puis à celui de Sceté dans le quatriéme, & aux monastères de l’Egypte proprement dite, ou des environs d’Alexandrie dans le cinquiéme.
Ce sublime a jailli du ciseau de Michel-Ange sur le front inspiré de sa statue de Moïse : il n’a point passé dans cette poésie du Tasse ou d’Arioste, gracieuse, variée, brillante, égale à tout hormis ce qu’il y a de plus pathétique et de plus grand. […] Voici seulement des inscriptions funèbres, là où passèrent des ombres glorieuses. […] Ne semble-t-il pas étrange que, tout près de ce grand écrivain, Ronsard ait passé pour un si grand poëte, et que Montaigne lui-même l’ait cru et nous dise « que les Français de son temps avaient monté la poésie au plus haut degré, où elle sera jamais, et que Ronsard et du Bellay ne sont guère éloignés de la perfection antique ».
Ponsard, et celui-ci doit aller passer quelque temps à Saint-Point.
Et d’abord, pour les esprits sévères qui aiment avec raison qu’en recueillant même les songes et les fantaisies de l’imagination dans le passé, on soit fidèle à la lettre et qu’on transmette scrupuleusement les vestiges, l’ouvrage de M.
L’art comique, tel qu’il était du temps des Grecs, ne pouvait se passer d’allusions : on n’avait pas assez approfondi le cœur humain dans ses passions secrètes, pour intéresser seulement en les peignant ; mais il était très aisé de plaire au peuple en tournant ses chefs en dérision.
Le rapport des parties est changé : ce qui était au premier plan passe au second, et réciproquement.
Théodore de Banville Tel que je l’ai vu à Nice, il y a peu d’années encore, sous le noir plafond des rosiers qui s’étendait devant sa maison, quel visage spirituel et robuste, tourmenté dans le calme, exprimant bien la force herculéenne de celui sur lequel la Sottise a toujours compté pour tuer les monstres de ses marais et pour nettoyer ses étables, en y faisant passer un furieux fleuve de bon sens, qui emporte tout dans son flot rapide et sonore !
Émile Zola Laforgue, mort jeune, si inconnu, si peu formulé, n’ayant laissé que des indications si peu précises, qu’il échappe lui à tout classement, une ombre de maître, l’ombre qui s’efface, qui ne fait que passer en laissant la place aux autres.
Laprade en fut quitte pour son frisson, et l’Académie, où il se passe de pareilles choses, pour sa dignité… [Les Quarante Médaillons de l’Académie (1863).]
Un souffle a passé, un besoin de bâter la justice, de vivre la vie vraie, pour réaliser le plus de bonheur possible.
Page 23, on nous confie : « Dix ans se passaient de cette existence. » Comment, dix ans ?
Le soi-disant ne se borne point à des injures calomnieuses : il me donne des avis admirables ; il m’apprend des anecdotes impies sur quelques Auteurs ; il fait des sorties tout-à-fait touchantes contre les gens d’Eglise ; il passe en revue plusieurs articles des Trois Siecles, pour avoir occasion de se déchaîner contre les bons Ecrivains qui ne sont pas Philosophes, & d’élever à la sublimité du génie ceux qui sont reconnus pour tels.
Il passa successivement par toutes les places de la haute Magistrature, &, dans les différentes fonctions qu’il eut à remplir, il sut toujours régler ses travaux selon l’esprit de chaque ministere.
« Je passe, Monsieur, au quatrieme Libelle : son titre est des Dictionnaires de calomnies *, auxquels il fourniroit un article des mieux conditionnés.
Jules Lemaître juge ainsi que du temps perdu les années passées au collège à « ne pas apprendre le latin » ; mais il ne s’agit pas d’apprendre le latin : il s’agit de ne pas désapprendre le français.
S’il y avait un homme aujourd’hui qui pût réaliser le drame comme nous le comprenons, ce drame, ce serait le cœur humain, la tête humaine, la passion humaine, la volonté humaine ; ce serait le passé ressuscité au profit du présent ; ce serait l’histoire que nos pères ont faite confrontée avec l’histoire que nous faisons ; ce serait le mélange sur la scène de tout ce qui est mêlé dans la vie ; ce serait une émeute là et une causerie d’amour ici, et dans la causerie d’amour une leçon pour le peuple, et dans l’émeute un cri pour le cœur ; ce serait le rire ; ce serait les larmes ; ce serait le bien, le mal, le haut, le bas, la fatalité, la providence, le génie, le hasard, la société, le monde, la nature, la vie ; et au-dessus de tout cela on sentirait planer quelque chose de grand !
On verra ailleurs qu’il ne traite pas aussi bien l’autorité royale, et que même il se permet un trait de satyre qui passe le but.
Quand, du haut de la montagne, je t’aperçois au fond de ce vallon, tu me parais, au milieu de nos vergers, comme un bouton de rose… Quoique je te perde de vue à travers les arbres, je n’ai pas besoin de te voir pour te retrouver : quelque chose de toi que je ne puis dire, reste pour moi dans l’air où tu passes, sur l’herbe où tu t’assieds… Dis-moi par quel charme tu as pu m’enchanter.
Vous savez, d’ailleurs, que nous sommes assez riches de nous-mêmes, pour pouvoir nous passer des richesses des Grecs & des Latins.
Les amateurs des faits littéraires ne peuvent guéres se passer des Mémoires pour servir à l’histoire des hommes illustres dans la république des lettres, par le P.
., qui n’a pas passé avec les Jésuites & une partie de leurs livres.
Ce qu’ils sçavent du passé, ce qu’ils prévoïent de l’avenir, les empêche de s’étonner de ce qu’ils voïent.
Passe-moi donc ton cimeterre.
Enfin le cliché véritable, comme je l’ai expliqué antérieurement, se reconnaît à ceci : l’image qu’il détient en est à mi-chemin de l’abstraction au moment où, déjà fanée, cette image n’est pas encore assez nulle pour passer inaperçue et se ranger parmi les signes qui n’ont de vie et de mouvement qu’à la volonté de l’intelligence.
— Il n’y eut pas besoin de comète pour prédire ce changement, — puisque son cadavre pouvait passer pour une constellation694 ! […] La forme, qui n’est plus inventée ni spontanée, mais imitée et transmise, survit à l’esprit passé qui l’a faite, et contredit l’esprit présent qui la défait. […] Dryden fut élevé dans une excellente école, chez le docteur Busby, alors célèbre ; il passa ensuite quatre ans à Cambridge. […] Il passe régulièrement sa matinée à écrire ou à lire, puis dîne en famille. […] Dryden les passe tous en revue.
Ce serait donc de ma part une étrange contradiction, ô Athéniens, si, après avoir gardé fidèlement, comme un bon soldat, tous les postes où j’ai été placé par vos généraux, à Potidée, à Amphipolis, à Délium, aujourd’hui que le dieu de l’oracle intérieur m’ordonne de passer mes jours dans la philosophie, la peur de la mort ou de quelque autre danger me faisait abandonner ce poste ; et ce serait bien alors qu’il faudrait me citer devant ce tribunal, comme un impie qui ne reconnaît point de Dieu, qui désobéit à l’oracle, qui se dit sage et qui ne l’est pas ; car craindre la mort, Athéniens, c’est croire connaître ce qu’on ne connaît pas. […] XXII « L’âme, continue-t-il, qui est immatérielle, qui va dans un autre séjour, de même nature qu’elle, séjour parfait, pur, immatériel, et que nous appelons pour cette raison l’autre monde, auprès d’un Dieu parfait et bon (où bientôt, s’il plaît à Dieu, mon âme va se rendre aussi), l’âme, si elle sort pure, sans rien emporter du corps avec elle, comme celle qui pendant sa vie n’a eu aucune faiblesse pour ce corps, qui l’a vaincu et subjugué au contraire, qui s’est recueillie en elle-même, faisant de ce divorce son principal soin, et ce soin est précisément ce que j’appelle bien philosopher ou s’exercer à mourir ; « L’âme donc, en cet état, se rend vers ce qui est semblable à elle, immatériel, divin, immortel et sage, et là elle est heureuse, affranchie de l’ignorance, de l’erreur, de la folie, des craintes, des amours déréglées et de tous les maux des humains, et, comme on le dit des initiés, elle passe véritablement l’éternité avec les dieux (les êtres divins). […] « En disant ces mots, il se leva et passa dans la salle du bain ; nous l’attendîmes, tantôt en nous entretenant de tout ce qu’il avait dit, tantôt parlant de l’affreux malheur qui allait nous frapper, nous regardant véritablement comme des enfants privés de leur père, et condamnés à passer le reste de notre vie comme des orphelins. » XXVI « Après qu’il fut sorti du bain, on lui apporta ses enfants, car il en avait trois, deux en bas âge et un qui était déjà assez grand, et on fit entrer les femmes de sa famille.
Comment un génial parmi les artistes, en une histoire dont le cours très vaste imagine lointainement une histoire de l’art, par des recherches longuement suivies et une ardeur infatigable au mieux, entre les fortunes les plus variées et des misères fructueuses et de néfastes triomphes, — comment un artiste, des plus géniaux, ayant passé les ignorances stériles et traversé les folles ambitions, peu à peu est arrivé à se concevoir artiste et à l’être et à faire œuvre d’artiste, et à se reconnaître musicien et à le devenir et à instituer une œuvre de musique, — méditons-le en l’œuvre close de Wagner. […] Et voilà donc qu’ayant achevé la Babel de sa Gœtterdæmmerung, né à cette solide vieillesse qui n’est que la maturité des esprits géniaux, il avait passé la série entière des liminatoires épreuves ; car, si la création d’une œuvre d’ensemble est folie à tout jeune artiste, quelque grandiose soit-il, si le devoir à tout jeune artiste est de travailler en des études sensationnelles très restreintes, et si tout artiste, même expérimenté de science et de méditation, doit terriblement redouter toute institution générale, c’est pourtant le droit aux maîtres d’essayer à l’heure de la vieillesse, comme leur dernier et suprême monument, cette création gigantesque, une synthèse sensationnelle ; et Richard Wagner, debout en 1876 dans son Bayreuth inauguré, pouvait tenter l’œuvre synthétique de la sensation humaine qui fut le Parsifal. […] ma face était de fiancée ; et il passa me disant « je suis l’Amant, sois l’Amante » ; il passait, l’attendu, l’élu, et qui m’offrait l’holocauste de son amoureuse divinité ; et — ah — je ne le connus point, je ris, je le dédaignai, je ris, je le chassai, je ris, je le refusai ; et le regard de son adieu me regarda dans la plainte et la compassion.
Mais des qualités de l’enfance elle est passée tout aussitôt aux infirmités de la décrépitude, et rien ou presque rien n’a rempli l’entre-deux. […] Fustel de Coulanges, Histoire des institutions, etc.] — Comment et pourquoi la « germanisation » de la Gaule ne pouvait succéder à sa « romanisation », Gallia capta ferum victorem cepit… De quelques catégories d’idées et de mots qui semblent avoir passé du germanique dans le français [Cf. […] Bédier pour la négative]. — Qu’il se peut qu’en effet quelques fabliaux nous soient venus de l’Inde ; — mais qu’en général on a de notre temps beaucoup abusé des « origines orientales » ; — et que la plupart de nos fabliaux, comme Brunain, La Vache au Prêtre, ou Le Vilain Mire, ou La Bourgeoise d’Orléans, ne supposent pas un effort d’invention qui passe la capacité de l’expérience la plus vulgaire. — Grossièreté des fabliaux ; — et difficulté d’en transcrire seulement les titres ; — pour cause d’obscénité. — De la portée satirique des fabliaux ; — et, à ce propos, qu’ils semblent avoir évité d’attaquer les puissants du monde. — Comment, en revanche, ils traitent le prêtre, le « curé de village », non le moine, ni l’évêque ; — et comment ils traitent la femme. — De la valeur « documentaire » des fabliaux ; — et s’ils nous apprennent quelque chose de plus que les Dits, par exemple ; — ou tant d’autres « documents » de tout ordre. — Fortune européenne des fabliaux ; — et, au cas que l’origine n’en soit pas française, — du peu de gré qu’il faut savoir à nos trouvères de la forme d’esprit que les fabliaux ont propagée dans le monde. […] La valeur des Mystères, — et qu’en général, au point de vue littéraire, ils sont la médiocrité même ; — ce qui s’explique aisément si le théâtre vit de son fonds, comme un art indépendant ; — et que l’histoire n’en coïncide qu’accidentellement avec celle de la littérature. — Mais les Mystères ne sont même pas du théâtre : ils ne sont que du « spectacle », — et leurs auteurs ne les ont traités que comme tel. — Que cette opinion est prouvée par les conditions mêmes de la représentation des Mystères. — Et cela ne veut pas dire qu’ils ne contiennent parfois des « aventures » intéressantes, comme quelques Mystères du Cycle des saints ; — des scènes où se retrouve quelque chose de la grandeur du modèle, comme les Mystères du Cycle de l’Ancien Testament ; — et des « épisodes » curieux, d’un caractère plus ou moins réaliste, comme les Mystères du Cycle du Nouveau Testament ; — mais cela veut dire qu’ils n’ont aucune valeur littéraire ; — que l’on n’a pas à regretter leur décadence ni leur mort, — et qu’il n’a rien passé d’eux, même dans le théâtre « chrétien » de l’époque classique.
Partout, de Constantinople au village d’Arianze, chez ces artisans laborieux des villes que saint Basile nous montre si intelligents de la parole sainte et si curieux des merveilles de la nature, dans ces bourgades hautes semées sur des plaines fécondes, dans les pieuses panégyries, les assemblées, les processions fréquentes que le christianisme ramenait pour ces hommes, de tout temps amis des jeux et des solennités, n’entendez-vous pas, sous ce beau ciel des deux continents qui se rapprochent, parmi les chœurs chantants de cette race heureuse alors, retentir dans le passé cette poésie sainte et pure ? […] Tu es la racine du présent, du passé, de l’avenir. […] Tu es roi ; je t’offre l’or : la myrrhe conviendra pour ta tombe. — Ta présence a purifié la terre, et les flots de la mer, et les routes où passa le démon, les plaines liquides de l’air et les profonds abîmes de la terre. […] conserve-moi mon frère, que naguère, lorsqu’il était près de passer les portes de la mort, tu nous as ramené, dissipant ainsi mes inquiétudes, mes pleurs et l’agitation de mon âme.
Comment peut-on encore ignorer quelque part que les recherches les plus profondes, la lecture la plus assidue, ne sont que des moyens d’instruction dont l’application seule fait le mérite, et que se tourmenter pour devenir érudit, sans avoir d’autre talent et sans se proposer d’autres vues, c’est passer sa vie à aiguiser une arme dont on ne doit jamais se servir ? […] Mais un savant qui se renferme dans sa bibliothèque, loin de toute société, peut-il se passer d’une compagne qui rende sa solitude aimable ?
En même temps qu’il admet que le souvenir du Déluge se montre partout comme un fait historique conservé par la tradition et dont l’idée funeste ne serait point venue naturellement à l’homme, il reconnaît que le souvenir de l’âge d’or peut être le produit d’une imagination heureuse et complaisante qui jette des reflets sur le passé, et pourtant il répugne à y voir une pure fiction : « J’y vois les embellissements de l’imagination, dit-il, mais j’y crois découvrir un fond réel. […] Mais aux générations qui se succèdent il faut quelque chose de plus, pour qu’elles consentent à voir l’âge d’or dans le passé, sur la foi des vieillards ; il faut, selon Bailly, que la race ait été transplantée : On peuplait jadis plus qu’on ne fait aujourd’hui ; on vivait plus difficilement, parce que la terre était moins cultivée : de là la nécessité d’envoyer au loin des colonies, de chasser hors de l’habitation nationale des essaims nombreux, comme font encore de nos jours les abeilles.
Je suis toujours étonné de la singulière direction que l’on adopte pour devenir peintre : il me semble qu’elle est absurde ; car je ne peux pas me représenter un homme qui a quelque chose dans la tête, qui passe des années à copier. […] Quand, au contraire, je suis content, je suis autant occupé, mais d’une autre manière. » Ainsi se passa, tant qu’il fut maître de lui et que sa volonté tint les rênes, cette vie laborieuse et exemplaire.
Il a très bien montré que c’était une grande nouveauté alors en France de lire Homère en grec, que dans l’Université même, et parmi ceux qui passaient pour doctes, on ne s’en avisait que depuis peu, et il en a fait un mérite à notre poète, qui, non content de l’étudier sans cesse, voulait encore l’imiter, le reproduire, et doter son siècle et son pays d’un poème épique : vain effort, mais noble pensée ! […] D’où vient cette servile et désagréable imitation des anciens que chacun remarque dans ses ouvrages, jusques à vouloir introduire dans tout ce qu’il faisait en notre langue tous ces noms des déités grecques, qui passent au peuple, pour qui est faite la poésie, pour autant de galimatias, de barbarismes et de paroles de grimoire, avec d’autant plus de blâme pour lui, qu’en plusieurs endroits il déclame contre ceux qui font des vers en langue étrangère, comme si les siens, en ce particulier, n’étaient pas étrangers et inintelligibles.
Guillaume Favre, appelé dans sa jeunesse Favre-Cayla, et aussi depuis son mariage Favre-Bertrand, mort le 14 février 1851 à quatre-vingts ans passés, était un de ces Genevois de la belle époque, qui avaient trente ans en 1800 ; qui, après les années de la domination française, assistèrent à la restauration cantonale en 1814 ; qui, dès ce moment surtout, vécurent au bord de leur lac à côté d’Étienne Dumont, l’ami de Mirabeau, du libre publiciste d’Ivernois, du spirituel observateur Châteauvieux, de l’illustre naturaliste de Candolle, du Bernois le plus naturellement français et voltairien Bonstetten, de l’historien Sismondi, et de Rossi plus tard, des Pictet, des de La Rive, des Diodati. […] À Genève, où il passait les hivers et où il n’allait d’ailleurs que le plus tard possible, il avait dans son hôtel vingt et une toiles ni plus ni moins, des toiles accomplies des plus grands peintres hollandais.
Taine plus de sévérité dans les jugements contemporains, je dirai qu’ayant connu Stendhal, l’ayant goûté, ayant relu encore assez récemment ou essayé de relire ses romans tant préconisés (romans toujours manqués, malgré de jolies parties, et, somme toute, détestables), il m’est impossible d’en passer par l’admiration qu’on professe aujourd’hui pour cet homme d’esprit, sagace, fin, perçant et excitant, mais décousu, mais affecté, mais dénué d’invention. […] Guizot, tout allait bien, et il parlait de ces choses du dedans à qui savait les entendre ; mais devant les contradicteurs, et avec ses tâtonnements de parole, il restait court et se déconcertait aisément : Le 25 novembre (1817), j’ai passé la soirée chez l’abbé Morellet. — Conversation psychologique. — Mon vieux ami m’a demandé brusquement : « Qu’est-ce que le moi ?
il prétend se passer d’un seul ; il ne veut qu’une force génératrice, partout la même, vague, diffuse, infinie, sacrée, féconde, enivrante, qui éclate dans le printemps : It ver et Venus, et Veneris prænuntius ante Pinnatus graditur Zephyrus…………… ; une force qui se joue et se diversifie en toutes les saisons et jusque dans les destructions passagères qui ne font que déplacer et transférer la vie. […] Invitez-les à passer quelques jours sous votre toit, ces utopistes féroces, offrez-leur de les promener sous vos ombrages : ce doit être là toute votre réfutation, encore amie et hospitalière.
N’était-ce pas là véritablement une révélation au sein de la morale humaine, et si l’on y joint ce qui ne saurait se séparer, l’ensemble d’une telle vie passée à bien faire et de cette prédication de trois années environ, couronnée par le supplice, n’est-il pas exact de dire que ç’a été un « nouvel idéal d’une âme parfaitement héroïque » qui, sous cette première forme à demi juive encore et galiléenne, a été proposé à tous les hommes à venir ? […] On reprochait à Aristote d’avoir secouru un homme qui ne le méritait pas : « Ce n’est pas l’homme que j’ai secouru, répondit-il, c’est l’humanité souffrante. » L’imagination de Platon avait fait plus et semblait s’être portée spontanément au-devant du christianisme : on le voit, dans un de ses dialogues, se plaire à figurer en face du parfait hypocrite, honoré et triomphant, le modèle de l’homme juste, simple, généreux, qui veut être bon et non le paraître : « Dépouillons-le de tout, excepté de la justice, disait un des personnages du dialogue, et rendons le contraste parfait entre cet homme et l’autre : sans être jamais coupable, qu’il passe pour le plus scélérat des hommes ; que son attachement à la justice soit mis à l’épreuve de l’infamie et de ses plus cruelles conséquences et que jusqu’à la mort il marche d’un pas ferme, toujours vertueux, et paraissant toujours criminel… Le juste, tel que je l’ai représenté, sera fouetté, mis à la torture, chargé de fers ; on lui brûlera les yeux à la fin, après avoir souffert tous les maux, il sera mis en croix… » C’est une vraie curiosité que ce passage de Platon, et même, à le replacer en son lieu et à n’y chercher que ce qui y est, c’est-à-dire une supposition à l’appui d’un raisonnement, sans onction d’ailleurs et sans rien d’ému ni de particulièrement éloquent, ce n’est qu’une curiosité.
Cervantes nous dit nettement et clairement ce qu’il a voulu ; son livre (il nous explique pourquoi dans la Préface) n’a pas besoin, pour paraître au jour, de tout l’appareil de sonnets laudatifs et de témoignages pompeux qui s’étalent en tête des écrits du temps ; il n’a besoin non plus, chemin faisant, d’aucun attirail d’érudition sacrée ou profane, et il peut se passer de ces notes et commentaires de toutes sortes qui encombrent d’ordinaire les marges ou qui chargent la fin des volumes, et qui produisent de si belles listes d’auteurs cités. […] Et toutes ces opinions ainsi énumérées et passées en revue, je ne puis m’empêcher d’ajouter encore : Une des plus grandes vanités de la gloire, même de la gloire littéraire, qui de toutes semble pourtant la plus authentique, c’est qu’un de ses premiers effets consiste, si elle vous saisit une fois, à vous changer plus ou moins et à vous défigurer.
En attendant, la guerre est un de ces grands faits historiques qu’il faut reconnaître et savoir étudier dans le passé : du moment qu’elle cesse d’être une pure dévastation et un brigandage, c’est un art, une science, et digne, à ce titre, de toute l’attention des esprits éclairés. […] Les divers Mémoires de Monglat, de Saint-Hilaire, l’Histoire militaire du règne de Louis le Grand, par Quincy, donnent assez couramment au lecteur l’intelligence des mouvements qu’ils racontent et qu’ils exposent ; mais c’est surtout Feuquières qui est le grand critique de cette époque, et qui passe au crible les opérations de tous les généraux de son temps, sans faire grâce à aucun.
Le présent et l’avenir furent comme anéantis par le puéril examen des moindres circonstances du passé. […] Arrêtons-nous cependant à l’époque qui commence la nouvelle ère, à dater de laquelle peuvent se compter, sans interruption, les plus étonnantes conquêtes du génie de l’homme ; et, comparant nos richesses avec celles de l’antiquité, loin de nous laisser décourager, par l’admiration stérile du passé, ranimons-nous par l’enthousiasme fécond de l’espérance ; unissons nos efforts, livrons nos voiles au vent rapide qui nous entraîne vers l’avenir.
Les souvenirs d’une grandeur passée, sans aucun sentiment de grandeur présente, produisent le gigantesque. […] Cependant le dernier vers qui termine le récit : Passa la bella donna et par che dorma35, est trop harmonieux, trop doux, glisse trop mollement sur l’âme, pour être d’accord avec l’impression profonde que doit produire un tel événement.
On a des amies de cœur pour qui « on éprouve quelque chose de si vif et de si tendre que véritablement c’est de la passion », et qu’on ne peut se passer de voir trois fois par jour. « Toutes les fois que des amies se disent des choses sensibles, elles doivent subitement prendre une petite voix claire et traînante, se regarder tendrement en penchant la tête, et s’embrasser souvent », sauf à bâiller tout bas au bout d’un quart d’heure et à s’endormir de concert parce qu’elles n’ont plus rien à se dire. […] La reine ne pouvait se passer d’un nécessaire de voyage, et il a fallu en fabriquer un énorme qui contient tous les meubles imaginables, depuis une bassinoire jusqu’à une écuelle d’argent ; outre cela, d’autres caisses et, comme s’il n’y avait pas de chemises à Bruxelles, un trousseau complet pour elle et ses enfants320 La dévotion étroite, l’humanité quand même, la frivolité du petit esprit littéraire, l’urbanité gracieuse, l’ignorance foncière321, la nullité ou la rigidité de l’intelligence et de la volonté sont encore plus grandes chez les princes que chez les nobles Contre l’émeute sauvage et grondante, tous sont impuissants.
La terre de Blet, possédée pendant plusieurs siècles par la maison de Sully, passa par mariage de l’héritière, en 1363, à la maison de Saint-Quentin, où elle fut transmise en ligne directe jusqu’en 1748, date de la mort d’Alexandre II de Saint-Quentin, comte de Blet, gouverneur de Berg-op-Zoom, père de trois filles d’où sont nés les héritiers actuels Ces héritiers sont le comte de Simiane, le chevalier de Simiane, et les mineurs de Bercy, chacun pour un tiers, qui est de 97 667 livres sur la terre de Blet, et de 20 408 livres sur la terre des Brosses. […] Édit du roi de 1497 fixant cette charge, pour les habitants de Blet et tous ceux demeurant dans l’étendue de la justice, pour ceux de Charly, Boismarvier, etc., à 5 sous par feu et par an, ce qui fut exécuté. « Ce n’est que depuis peu qu’on en a cessé la perception, quoique, par les reconnaissances modernes, tous les habitants se soient reconnus sujets auxdits guet et garde du château. » 10° Droit de péage pour toutes les marchandises et denrées qui passent par la ville de Blet, sauf les blés, grains, farines et légumes.
nous ne possédons pas l’organe intellectuel, nous n’avons même pas apparemment le rudiment de cet organe, qui nous permettrait de passer par le raisonnement d’un phénomène à l’autre. […] Des deux côtés, à la base de l’échelle, les événements sont infinitésimaux ; on a vu dans les sensations dont on peut pousser un peu loin l’analyse, celles de l’ouïe et de la vue, que l’événement moral, comme l’événement physique, passe dans un temps très court par une série rigoureusement infinie de degrés.
Le singe de sa part disait : « Venez, de grâce, Venez, messieurs, je fais cent tours de passe. […] Votre serviteur Gille, Cousin et gendre de Bertrand, Singe du pape en son vivant, Tout fraîchement en cette ville Arrive en trois bateaux exprès pour vous parler : Car il parle, on l’entend ; il sait danser, baller, Faire des tours de toute sorte, Passer en des cerceaux, et le tout, pour six blancs.
Mais surtout il faut tenir compte de ce qu’il dégrossissait le premier la poésie moderne : s’il a ébauché la forme que ses successeurs devaient porter à la perfection, on peut lui passer beaucoup de défaillances nécessaires. […] D’abord, sa langue le discrédite : où elle est de son invention, elle ne s’est pas imposée ; où elle est de son temps, elle a passé.
Il passait dans la rue, le tournesol légendaire à la main ; ornait sa boutonnière d’un œillet vert ; affectait des allures déplaisantes et outrancières ; affichait les vices mêmes qu’il n’avait pas. […] Quel illogisme d’invoquer la protection des lois qu’on a voulu démolir et de faire appel à l’opinion quand on a passé sa vie à la répudier !
C’est par ces morceaux où a passé souvent le souffle de Notre-Dame de Paris et de la Kermesse que Zola pourra se survivre dans les anthologies du xxe siècle, alors qu’on aura cessé de lire ses pesants volumes. […] En cette conception nouvelle, il procéda, comme précédemment, par affirmations énergiques, tranchantes et répétées, sans instituer une théorie qu’il eût été très incapable de concevoir et sans passer par des raisonnements qu’il eût été bien incapable d’enchaîner, ni par des observations historiques dont tout élément lui manquait.
Les peintres qui passent aujourd’hui pour avoir été les plus grands poëtes en peinture, ne sont pas ceux qui ont mis au monde le plus grand nombre de personnages allegoriques. […] On voit dans la galerie de Versailles beaucoup de morceaux de peinture dont le sens enveloppé trop misterieusement, échappe à la penetration des plus subtils, et passe les lumieres des mieux instruits.
Ils étaient les rois de cette poésie qui s’est assise sur la tombe de la poésie du Passé, — la poésie sereine, idéale, lumineuse ! […] Nous avons, nous, passé par Edgar Poe et Baudelaire, les précurseurs de M.
Ils toléreront que l’historien de la marquise de Pompadour ou de mademoiselle de La Vallière raconte des anecdotes à la fois libres et historiques ; qu’un diplomate signant Trois-Étoiles rapporte un propos léger, — qu’on appellera gaulois pour le faire passer, — d’un personnage russe ou anglais ; qu’un naturaliste s’exprime en termes clairs sur les phénomènes naturels : et d’ailleurs, quinze jours après l’apparition de la livraison, vous êtes sûrs de retrouver intacts, dans plus d’une maison, sans une coupure aux tranches, les articles de cette sorte. […] La parcelle d’univers où nous vivons et que nous n’avons pas faite influe sur nous, et aussi l’entourage immédiat que nous nous sommes donné : notre maison, les objets dont elle est ornée, les ombres habituelles de ses murailles et les clartés de ses fenêtres, le bruit encore avec lequel la vie nous berce, bruit de la rue et de la place, murmure des eaux, murmure du vent, voix d’enfants, voix de femmes, voix chères dont les mots ne parviennent pas toujours à l’oreille, dont l’accent va toujours au cœur, bourdonnement du travail dans l’atelier voisin, silence même de la nuit, où passe l’accord de mille bruits apaisés et confus.
Ils passent aux Espagnols, parce que Mazarin leur résiste ; et Condé croit emporter la France dans les plis de son manteau. […] Passons aux preuves a posteriori, c’est-à-dire à l’expérience et aux témoignages.
Ce plaisir, nous devons le dire, a été mêlé de regret pour une nombreuse partie de l’auditoire ; on écoutait, on saisissait quelques mots, on sentait que quantité de choses justes, délicates et fines passaient tout près de là ; on les devinait au sourire même de celui qui parlait, et à la satisfaction de tous ceux qui se trouvaient assez voisins pour en jouir ; on était bien sûr de ne pas se tromper en joignant ses applaudissements aux leurs, mais on éprouvait, en réalité, un peu du supplice de Tantale.
C'est ainsi que tout passe et que tout change, et qu’après soixante ans d’une vie honorable et constante, ce pauvre Athénée, tombé en enfance, s’en va avant peu de mois mourir.
La causerie élégante de M. de Ségur se joue tour à tour sur des riens qu’elle relève, sur des sujets sérieux qu’elle égayé, ramène soigneusement toutes choses au ton de la bonne compagnie, et, à l’image de cette société passée qu’elle retrace, confondant le grave et le léger dans une même nuance d’agrément, n’offre qu’une superficie uniformément brillante et polie où il est difficile de rien saisir.
Quand il avait une fois commencé, il s’arrêtait difficilement, et aucun de ses auditeurs n’était tenté de mettre le signet. » Or, comme à chaque séance du Conseil, M. le maréchal de Ségur soumettait à la délibération l’affaire de Hollande et sollicitait une décision prompte, l’archevêque, s’emparant adroitement de la parole, trouvait moyen d’interpeller M. de Malesherbes sur quelque événement passé, analogue aux circonstances présentes ; et celui-ci, selon son usage, commençait à raconter.
Aliste, qui a un poignard tout prêt, le tire aussitôt, s’en pique légèrement à la cuisse, le passe aux mains de Berte, qui le prend sans savoir pourquoi ; puis Aliste se met à crier, à réveiller le roi qui continuait de dormir, à montrer son sang, bien qu’il fasse nuit, et à accuser Berte, que la vieille Margiste vient saisir aussitôt comme sa fille, et la disant folle, sujette à ces frénésies.
Lire un livre pour en jouir, ce n’est pas le lire pour oublier le reste, mais c’est laisser ce reste s’évoquer librement en nous, au hasard charmant de la mémoire ; ce n’est pas couper une œuvre de ses rapports avec le demeurant de la production humaine, mais c’est accueillir avec bienveillance tous ces rapports, n’en point choisir et presser un aux dépens des autres, respecter le charme propre du livre que l’on tient et lui permettre d’agir en nous… Et comme, au bout du compte, ce qui constitue ce charme, ce sont toujours des réminiscences de choses senties et que nous reconnaissons ; comme notre sensibilité est un grand mystère, que nous ne sommes sensibles que parce que nous sommes au milieu du temps et de l’espace, et que l’origine de chacune de nos impressions se perd dans l’infini des causes et dans le plus impénétrable passé, on peut dire que l’univers nous est aussi présent dans nos naïves lectures qu’il l’est au critique-juge dans ses défiantes enquêtes.
Le berceau de cette révolution fut l’hôtel de Rambouillet, cet hôtel regardé, depuis la fin du siècle passé, comme l’origine des affectations de mœurs et de langage, et qui fut dans le grand siècle, et pour tous les grands écrivains qui l’illustrèrent, pour Corneille, pour Boileau, pour La Fontaine, pour Racine, pour Molière même, oui pour Molière, plus que pour aucun autre, l’objet d’une vénération profonde et méritée.
On pourroit seulement lui reprocher d’avoir trop dirigé les essors de sa Muse vers l’admiration ; mais s’il subjugue trop despotiquement l’esprit, il a tant de ressort dans l’action, une marche si aisée, si imposante, si ferme, si rapide ; ses intrigues sont si habilement ménagées, conduites avec tant de dextérité, terminées par une explosion (qu’on nous passe ce terme) si lumineuse, si frappante, que la terreur & la pitié qui naissent au gré du Poëte & saisissent le Spectateur, ne sont jamais affoiblies par le sentiment de l’admiration.
Ce que je sais bien, c’est que, lorsque j’ai eu à m’occuper d’Hégésippe Moreau, je me suis enquis avec attention et intérêt de tout ce qui pouvait le faire aimer, estimer ; je me suis adressé aux amis de son enfance, à la fermière, à la personne qui le connut dans la petite imprimerie proprette où il passa quelques jours heureux.
Les mots chapelet et rosaire ont passé du sens de chapeau et de couronne de roses à celui de grains enfilés, et c’est de ce dernier sens brut que dérivent nécessairement, aujourd’hui, toutes leurs significations métaphoriques, amoureuses ou pieuses.
Si l’instinct & la loi, par des effets contraires, Ont également attaché L’un tant de douceur au péché, L’autre des peines si sévères ; Sans doute, ou la nature est imparfaite en soi, Qui nous donne un penchant que condamne la loi ; Ou la loi doit passer pour une loi trop dure, Qui condamne un penchant que donne la nature.
Voici encore un exemple de l’artifice et du naturel avec lequel La Fontaine passe du ton le plus simple à celui de la haute poésie.
De là, nous passons à la peinture de l’ombre d’Hector.
Quant aux poëtes qui traitent des actions qui ne se sont point passées entre des païens, ils ne doivent emploïer les divinitez fabuleuses que comme des personnages allegoriques.
Les grands écrivains se passent de guides, et leurs corrections doivent nous servir de modèle.
Il y passe des régiments de personnages ; on y entasse des boisseaux de meurtres.
On se les fût passés de la main à la main.
Te voilà peut-être forcée De venir payer à l’amour Ton indifférence passée.
Toutes ses qualités précises et fines ont passé dans ses écrits, mais il restera de lui une plus haute encore et plus chère idée à ceux qui l’ont entendu.
Nulle éloquence, nulle poésie ne peut se passer de simplicité, puisqu’en somme la simplicité n’est que l’équivalence rigoureuse du mot et de l’idée, la parfaite convenance de la forme et du fond.
Un secret et profond sentiment de vanité burlesque unit ici les tourmenteurs qui furent victimes l’an passé, et les victimes qui seront bourreaux l’année prochaine.
Vous avez filé du collège pour l’enterrement de Lamennais, vous êtes à la coule de tout ce qui s’est passé sur le pavé de la ville, au moment des coups de chien.
Celle-ci, pratiquée patiemment, a apporté une unité à sa vie, et une unité non limitée, car dans la science rien ne se perd, et, dans l’effort heureux, on a conscience de continuer, de couronner les efforts du passé, de capitaliser en même temps pour l’avenir.
Votre place est marquée dans l’exécution de ces grandes œuvres modernes ; car, en même temps que vous êtes du présent, vous tenez fortement au passé.
Il y a étudié les écrivains qui lui paraissent avoir fait passer le plus de leurs pensées et de leurs sentiments dans la jeunesse dont il faisait partie lui-même.
Douée, dès l’âge le plus tendre, d’une prudence capable de seconder les vûes politiques de ses parens, qui la faisoient passer pour un garçon, elle touchoit à sa sixieme année, lorsqu’elle fut envoyée à Paris auprès d’une de ses Tantes.
Si, dans ses Lettres Persanes, la vivacité de la jeunesse, une licence qu’on ne sauroit trop condamner, l’ont engagé quelquefois à des peintures ou à des discussions trop libres, ce n’a été, dans lui, que des momens d’ivresse qui passent rapidement, & après lesquels la saine raison reprend son empire.
Nous eussions pu, il est vrai, nous passer de cette sorte de Drames qui offrent tout aux sens & presque rien à l’esprit & à la raison ; mais la difficulté d’y réussir n’en suppose pas moins de génie, quand l’Auteur y a excellé sans aucun secours.
Renan, que vous vouliez me faire passer auprès du public, il me restait, en 1870, encore assez de mémoire pour ne pas confondre l’Allemagne de Goethe et de Schiller avec l’Allemagne de Bismarck et de Moltke, et je n’ai jamais eu assez d’imagination, pour inventer, dans mes conversations, des interruptions comme celle de Saint-Victor.
Craignez, lui dit Costar, que ce capitaine ne passe par l’Angoumois, & n’en vienne à quelque exécution militaire.
Lorsque nous passons de ces détails à une vue générale de l’Enfer et du Tartare, nous voyons dans celui-ci les Titans foudroyés, Ixion menacé de la chute d’un rocher, les Danaïdes avec leur tonneau, Tantale trompé par les ondes, etc.
C’est un tableau à moitié peint sur lequel on a passé un glacis.
Section 4, du pouvoir que les imitations ont sur nous, et de la facilité avec laquelle le coeur humain est ému Personne ne doute que les poëmes ne puissent exciter en nous des passions artificielles, mais il paroîtra peut-être extraordinaire à bien du monde et même à des peintres de profession, d’entendre dire que des tableaux, que des couleurs appliquées sur une toile puissent exciter en nous des passions : cependant cette verité ne peut surprendre que ceux qui ne font pas d’attention à ce qui se passe dans eux-mêmes.
Suivant les apparences, on choisissoit un chanteur dont la voix approchât, autant qu’il étoit possible, de la voix du comédien, et l’on peut croire qu’il n’étoit plus possible de reconnoître les deux voix et de les distinguer quand elles avoient passé par le masque.
Sans être un Hercule, il file aux pieds d’une Omphale qui ne lui permettrait même pas de s’y asseoir, si elle était vivante ; mais nous n’en aurons pas moins probablement l’occasion de nous replier sur ses anciens travaux à propos de quelque édition de ses œuvres, et alors, il aura le jugement auquel il a droit comme Lamennais, Royer-Collard, Ballanche et tant d’autres qui — à quatre pas dans le passé, — semblent déjà s’enfoncer dans l’ombre d’un siècle.
Pour éclairer l’avenir encore obscur de Constantinople, il remonte dans les profondeurs de son passé et nous peint, dans une fresque au plus éclatant vermillon, l’énorme et houleux panorama d’hommes et de choses qui s’étend, se roule et se perd à l’horizon des siècles, depuis les rives du Bosphore jusqu’au Danube, et du fond de la Perse au Pont-Euxin !
I La règle de vie d’un philosophe Dans l’étroit appartement où il passait ses soirées auprès de sa sœur Henriette, vers 1846, M.
. — Plus tard la sagesse passa dans l’opinion aux hommes qui ordonnent et gouvernent sagement les états, dans l’intérêt des nations. — Plus tard encore le mot sagesse vint à signifier la science naturelle des choses divines, c’est-à-dire la métaphysique, qui cherchant à connaître l’intelligence de l’homme par la contemplation de Dieu, doit tenir Dieu pour le régulateur de tout bien, puisqu’elle le reconnaît pour la source de toute vérité41. — Enfin la sagesse parmi les Hébreux et ensuite parmi les Chrétiens a désigné la science des vérités éternelles révélées par Dieu ; science qui, considérée chez les Toscans comme science du vrai bien et du vrai mal, reçut peut-être pour cette cause son premier nom, science de la divinité.
Elle commence par nous montrer la place où cet événement va se passer, un site, un paysage, une ville, une maison, un palais, un temple, un champ de bataille, une assemblée publique, un peuple en ébullition ou en silence, mêlé ou attentif à un événement : puis elle nous montre un personnage qui arrive sur cette scène pour y figurer au premier plan, son visage, son attitude, sa démarche, sa physionomie calme ou convulsive, son costume même et jusqu’à l’ombre que son corps projette à côté ou derrière lui sur la place ou sur la foule au milieu de laquelle il apparaît. […] D’abord le lieu, puis l’homme, puis les accessoires, les indices de l’événement qui va se passer. […] La pensée la plus sainte, la plus juste et la plus pieuse, quand elle passe par l’imparfaite humanité, n’en sort qu’en lambeaux et en sang.
On l’a déjà dit, et nous ne craignons pas de le répéter, il n’y a aucun livre profane, ancien dans le monde, qui ait passé par plus d’examens que ceux que nous appelons King, par excellence, ni dont on puisse raconter si en détail l’histoire et prouver la non-altération. […] Génie universel, en qui se résument toute la littérature antique, toute la littérature moderne, toute la religion, toute la raison, toute la philosophie, toute la législation, toute la politique d’un passé sans date et de trois cent millions d’hommes ; cet homme fut à la fois, par une merveilleuse accumulation de dons naturels, de vertu, d’éloquence, de science et de bonne fortune, l’Aristote, le Lycurgue, le ministre, le pontife, et presque le demi-dieu d’un quart de l’humanité. […] XXII Ce caractère distingue Confucius des sophistes grecs ; un autre caractère le distingue des autres législateurs de l’Inde, de l’Égypte, de la grande Grèce et des deux Asies, c’est qu’il ne fait point intervenir le ciel et les prodiges dans l’autorité qu’il affecte sur les hommes ; il n’étale point l’inspiration surnaturelle de Zoroastre, de Pythagore, du prophète arabe, pas même le génie conseiller et un peu frauduleux de Socrate ; il ne se substitue pas aux lois absolues de la nature, il ne se proclame ni divin, ni ange, ni demi dieu ; il ne sonde le passé que par l’étude, il ne lit dans l’avenir que par la logique qui enchaîne les effets aux causes ; il se confesse homme faible, ignorant, borné comme nous ; seulement, à l’aide de cette clarté purement intellectuelle et toute humaine qui vient pour la vérité de l’intelligence et pour la morale de la conscience, il recherche le vrai et conseille le bien. […] XXVIII L’ordre, selon la politique de la Chine, étant la première nécessité comme le premier objet de la société, passe avant la liberté.
Cette négation de tout le passé théologique, philosophique, poétique, architectural, historique même, de l’humanité antérieure à nous, leur est nécessaire ; car, sans cela, comment pourraient-ils se justifier à eux-mêmes cette progressivité indéfinie et continue de l’esprit humain, progressant de Brahma, de Job, de l’Égypte, de la Judée, de la Grèce et de Rome, jusqu’à Paris, au siècle de Louis XV, et au nôtre ? […] Ainsi qu’un nuage qui passe Mon printemps s’est évanoui ; Mes yeux ne verront plus la trace De tous ces biens dont j’ai joui. […] Est-ce que rien, dans Œdipe, est égal, en amertume et en souvenir de sa grandeur et de sa félicité passées, qui remontent de son cœur comme des bourreaux successifs, chargés de lui renouveler, par la comparaison, le sentiment de ses humiliations présentes ? […] sur le passé, le présent et l’avenir de tous ces êtres, dont vous êtes vous-même un grain d’être, un atome imperceptible et fugitif, mais un atome pensant, sentant et jugeant ?
Vers la fin de sa vie, il aimait à s’y reporter en imagination, et il regrettait quelquefois cette cellule où il avait passé dans la ferveur d’une paix mystique une ou deux saisons heureuses2. […] Heureux, vous dit-il, non celui qui fait l’admiration de son siècle, mais celui qui fait sa principale occupation du siècle à venir, et qui vit dans le mépris de soi-même et de tout ce qui passe… !
Le vicomte de Turenne, depuis duc de Bouillon, opina le premier : c’était un homme de grands discours et habile à donner des infinités de raisons à l’appui des conclusions qu’il embrassait ; ayant été récemment accusé d’avoir été trop prompt à la dernière levée de boucliers, son point de départ, cette fois, fut qu’il fallait changer de méthode, mettre de son côté le droit et l’apparence, éviter avant tout l’odieux : « Si vous vous armez, disait-il, le roi (Henri III) vous craindra ; s’il vous craint, il vous haïra ; s’il vous hait, il vous attaquera ; s’il vous attaque, il vous détruira. » Par ces raisons subtilement déduites et enchaînées, il concluait qu’il fallait introduire, faire couler les gens de guerre dans les armées royales et servir de la sorte sans enseignes déployées : « Le roi devra sa délivrance à notre vertu, et sacrifiera sa haine passée à notre humilité. » Cet avis allait l’emporter, et la majorité semblait s’y ranger lorsqu’un mestre de camp, c’est-à-dire d’Aubigné, commandé de parler à son tour, s’exprima en sens contraire et changea la face de la délibération. […] On en voit le thème : il s’indigne pour les siens, pour les hommes de sa cause, à cette seule idée de se faufiler dans l’armée royale ; ce serait abjurer le passé : Ce serait, dit-il en commençant, fouler aux pieds les cendres de nos martyrs et le sang de nos vaillants hommes, ce serait planter des potences sur les tombeaux de nos princes et grands capitaines morts, et condamner à pareille ignominie ceux qui, encore debout, ont voué leurs vies à Dieu, que de mettre ici en doute et sur le bureau avec quelle justice ils ont exercé leurs magnanimités ; ce serait craindre que Dieu même ne fût coupable ayant béni leurs armes, par lesquelles ils ont traité avec les rois selon le droit des gens, arrêté les injustes brûlements qui s’exerçaient de tous côtés, et acquis la paix à l’Église et à la France… Je dis donc que nous ne devons point être seuls désarmés quand toute la France est en armes, ni permettre à nos soldats de prêter serment aux capitaines qui l’ont prêté de nous exterminer, leur faire avoir en révérence les visages sur lesquels ils doivent faire trancher leurs coutelas, et de plus les faire marcher sous les drapeaux de la Croix blanche qui leur ont servi et doivent servir encore de quintaine (point de mire) et de blanc.
Je passe sur la période militante de la vie de Béranger : la Correspondance n’offre qu’un intérêt médiocre durant ces quinze années ; elle ne prend son développement et son cours régulier qu’à dater de 1830 et à partir du second volume. […] Il passa en un instant de la position de tirailleur à celle de spectateur, d’avocat politique consultant (il se lassa vite de ce dernier rôle), de causeur avisé, curieux de tous sujets, et qui avait son franc parler sur chacun au coin du feu.
Ferrari, s’arrêtant sur le rôle et la fonction historique de la Rome moderne, et cherchant en vain à se la représenter sous une figure nouvelle digne de son passé, il va jusqu’à la vouer à jamais à la destinée mélancolique et pittoresque de gardienne des tombeaux ; il est poëte et peintre à outrance ce jour-là, ni plus ni moins que Chateaubriand : « Pour moi, s’écrie-t-il, je ne puis envisager sans terreur le jour où la vie pénétrerait de nouveau ce sublime tas de décombres. […] Sous une forme ou sous une autre, il est conquis à Jésus ; il l’est surtout depuis qu’il a visité cette Palestine, objet et terme désiré de son voyage, ce riant pays de Génézareth, qui ressemble à un jardin, et où le Fils de l’Homme a passé le meilleur temps de sa mission à prêcher les petits et les pauvres, les pêcheurs et les femmes au bord du lac de Tibériade ; il faut entendre comme il parle à ravir et avec charme de ce cadre frais et de ce paysage naturel des Évangiles.
Les discours de réception se ressentirent de la publicité dès le premier jour : « Mais j’élève ma voix insensiblement, disait Fléchier, et je sens qu’animé par votre présence, par le sujet de mon discours (l’éloge de Louis XIV), par la majesté de ce lieu (le Louvre), j’entreprends de dire foiblement ce que vous avez dit, ce que vous direz avec tant de force… » Dès ce moment, le ton ne baissa plus ; la dimension du remercîment se contint pourtant dans d’assez justes limites, et la harangue, durant bien des années, ne passa guère la demi-heure. […] Molé a lui-même dû rabattre énergiquement ce qu’il y a d’exagéré en certain tableau d’une représentation à Saint-Cloud, dans laquelle il se serait passé des choses formidables, des choses qui rappelleraient quasi le festin de Balthasar.
Considérons donc quelle sera cette carrière, seul avenir qui soutienne encore la pensée prête à s’abîmer dans la douloureuse contemplation du passé. […] Lorsque, après une suite d’actions que votre opinion vous a d’abord inspirées, votre intérêt se trouve intimement uni avec le succès de cette opinion, et que cet intérêt vous engage toujours plus avant, il se passe dans les réflexions intérieures des combats que l’on se nie à soi-même, et que l’on parvient à étouffer.
L’homme primitif ne fut point un être supérieur, éclairé d’en haut, mais un sauvage grossier, nu, misérable, lent dans sa croissance, tardif dans son progrès, le plus dépourvu et le plus nécessiteux de tous les animaux, à cause de cela sociable, né comme l’abeille et le castor avec l’instinct de vivre en troupe, outre cela imitateur comme le singe, mais plus intelligent, capable de passer par degrés du langage des gestes au langage articulé, ayant commencé par un idiome de monosyllabes, qui peu à peu s’est enrichi, précisé et nuancé340. […] Pareillement, de plusieurs idées générales du même degré, nous en extrairons une autre plus générale, et ainsi de suite, pas à pas, en cheminant toujours selon l’ordre naturel, par une analyse continue, avec des notations expressives, à l’exemple des mathématiques qui passent du calcul par les doigts au calcul par les chiffres, puis de là au calcul par les lettres, et qui, appelant les yeux au secours de la raison, peignent l’analogie intime des quantités par l’analogie extérieure des symboles.
C’est pourquoi les animaux, relativement moins incohérents que nous et mieux adaptés à leur vie plus simple, se passent d’une « morale » et c’est pourquoi aussi les rudiments en apparaissent chez eux quand nous voulons les adapter, comme nous avons faits pour le chien, à des rapports sociaux auxquels leur nature n’était point accommodée, pourvu que leur vie mentale soit assez riche et assez forte. […] Il suffit, pour reconnaître la fragilité de l’« humanité » dans l’homme, de se rappeler les excès où le pouvoir absolu conduisit jadis ceux qui l’ont exercé, ou les faits qui se passent de nos jours encore en temps de guerre, surtout quand les adversaires ne sont pas de même race et de même couleur, les massacres désintéressés, les pillages, les viols, ou bien les exactions, les violences exercées dans de lointaines colonies où la pression sociale n’arrive que bien atténuée.
La musique, la poésie, l’éloquence ne peuvent se passer du rhythme, de la cadence, de variations dans le volume de la voix, le ton, etc. […] Elle consiste à faire passer l’excitation à quelque autre partie du système nerveux.
C’est ainsi que les choses ont dû se passer, ou peu s’en faut, et que M. de Lamartine les recompose pour leur faire rendre tout leur effet aux yeux des générations nouvelles. […] Tous ces portraits séduisent à première vue, et offrent des traits heureux, des couleurs neuves : mais, en général, ils sont outrés et passent la mesure.
Il y a deux manières d’observer en politique, — l’observation directe des choses présentes et l’étude du passé, c’est-à-dire l’histoire. […] En signalant avec tant de force, et peut-être avec un excès d’inquiétude, les maux et les périls que la démocratie recèle dans son sein, M. de Tocqueville a-t-il voulu décourager les sociétés démocratiques, les ramener aux institutions du passé, et leur proposer comme remède une restauration plus ou moins profonde de l’ancien régime ?
Non seulement pour un livre ; mais pour un auteur ; et beaucoup ne lisent un ou plusieurs ouvrages d’un homme que quand il est passé grand écrivain dans l’estime de tout le public, ou quand il a été nommé de l’Académie française, ce qui, du reste, n’est pas tout à fait exactement la même chose ; ou quand ils apprennent sa mort ; ces lecteurs nécrologiques sont assez nombreux. […] Le lecteur doit s’abandonner d’abord à une sympathie instinctive ou voulue, pour l’auteur ; le poète doit s’abandonner d’abord à son inspiration, à sa verve, à sa foi en lui, à sa sympathie pour lui-même en tant qu’artiste ; — le lecteur doit ensuite se faire critique, raisonner, comparer, juger, discuter ; l’auteur doit ensuite se faire critique, réveiller le critique qui est en lui, examiner, comparer, raisonner, discuter, juger ; — le lecteur doit enfin admirer, s’il y a lieu, ce qui a comme passé successivement par sa sympathie et par sa critique ; l’auteur doit enfin approuver et même admirer, s’il y a lieu, ce qu’il a conçu dans la foi et dans l’amour, ce qu’il a contrôlé et redressé ensuite à l’aide de son sens critique.
Hégel n’entrera jamais chez nous sous sa cuirasse de formules ; elle est si lourde, que si ses héritiers essayent de passer le Rhin, ils sont sûrs de s’y noyer. […] Si nous redevenons critiques, douteurs, amateurs d’exactitude, exigeants en matière de démonstration, nous examinerons de nouveau les raisonnements qui depuis trente ans passent pour bons, et nous les traiterons comme au dix-huitième siècle on traita ceux de Malebranche, de Leibnitz, de Descartes, avec cette différence qu’aujourd’hui le scepticisme est usé, que la pleine destruction ennuie, que les progrès de l’expérience ont amassé depuis cinquante ans des moitiés de science et des sciences entières, prouvées et solides, utiles pour bâtir la route, et des lumières grandioses, quoique fumeuses, érigées en Allemagne pour nous indiquer le but.
On a passé des siècles à raisonner sur la force vitale ; et des gens fort savants, à Montpellier, dépensent encore en son honneur la moitié de leur temps et tout leur esprit. […] Par quels états intermédiaires l’aliment a-t-il passé ?
Deuxième vérification : passez d’une espèce à l’autre. […] De là suit une certaine forme du condyle, pour que les deux mâchoires s’engrènent en façon de ciseaux, un certain volume dans le muscle crotaphite, une certaine étendue dans la fosse qui le reçoit, une certaine convexité de l’arcade zygomatique sous laquelle il passe, et une foule de propriétés qu’un anatomiste prédit.
Jamais, dans les vrais siècles de grandes et vertueuses œuvres, on n’a songé ainsi à étaler cette plainte secrète ; on travaillait, on mûrissait, et se sentir mûrir console des fleurs qu’on n’a plus : on croyait à ce perfectionnement intérieur qui va à l’inverse des grâces riantes et qui, en définitive, sait s’en passer.
Diodati et Gaffarelli, auxquels je voudrois vous prier d’écrire confidemment que vous avez entendu parler des différends qui se passent entre lui et moi, et que, sachant assurément que le Père m’a donné juste sujet de me plaindre de lui, vous les priez de le réduire et persuader à me donner quelque satisfaction par lettre de sa propre main, conçue en telle sorte qu’il montre au moins d’avoir regret de m’avoir offensé à tort et légèrement contre tant de services que je lui avois rendus.
Ses dernières années se passèrent dans l’étude, au sein de l’Académie des inscriptions dont il était membre assidu, ou au milieu d’une magnifique bibliothèque, qui, enrichie encore par son fils et depuis acquise au public, est devenue celle de l’Arsenal.
Ledieu ; il a conclu du présent au passé, et a interprété le Dumouriez de 93 par le Dumouriez de 1823.
Sa conduite, dans la tempête, au milieu des murmures de l’équipage, sa résolution de monter au mât sur le refus du lieutenant, sa volonté ferme de demeurer à bord du vaisseau abandonné tant qu’il en restera une planche à flot, tous ces sentiments énergiques et vrais répandent au milieu de tant de scènes déchirantes une forte teinte de sublimité morale qui rehausse et achève leur effet ; et lorsque, après la tempête, la nuit, sous les rayons de la lune, on voit Wilder, au gouvernail de la chaloupe, se pencher en avant, comme pour entendre la douce respiration de Gertrude endormie, l’âme du lecteur, qui a passé par tous les degrés de l’angoisse, jouit délicieusement de cet instant de pure ivresse, et succombant aux sensations qui l’inondent, elle dirait volontiers avec le poète : C’est assez pour qui doit mourir.
Les deux premiers actes se passent dans une auberge d’Allemagne, à quelques lieues de Vienne.
… Mais nous ne sommes pas pareils (et c’est là notre crime) à ces flacons remplis de banals parfums, tristes et stériles fioles qu’on dédaigne le plus souvent de refermer, et dont la vertu s’aigrit ou s’évente à tous les souffles qui passent.
Rien, par hasard, ne s’est-il passé depuis la veille ?
Dès l’âge le plus tendre, j’y passais mes vacances d’écolier, chez le brave Morineau, chef des gardes, ami de mon père, dans son logement de Trianon-sous-bois.
Nous venons de passer en revue une nombreuse société qui n’est pas moins en opposition avec celle de la cour qu’avec les précieuses ridicules de la ville.
Ses délassemens étoient des divertissemens d’enfant, & c’étoit par une raison très-digne d’un Philosophe, qu’il y cherchoit cette puérilité, honteuse en apparence ; il ne vouloit pas qu’ils laissassent aucune trace dans son ame : dès qu’ils étoient passés, il ne lui en restoit rien, que de ne s’être pas toujours appliqué.
Ces principes posés, passons succinctement en revue les catégories supérieures de sentiments et d’émotions ; nous les verrons s’expliquer par les mêmes lois.
Aujourd’hui comme durant tous les siècles passés, le vin se vend à la chopine, au démi-setier, au verre ; et dans les provinces les vieux mots pots, pinte, poisson, roquille, demoiselle et bien d’autres sont toujours en usage ; pièce, foudre, velte, queue, baril, pipe, feuillette, muid, tonneau, quartaut n’ont point capitulé devant hectolitre, ni boisseau, ni barrique, ni hotte.
Les possibles qu’on peut employer, ce sont les possibles vraisemblables, et les possibles vraisemblables, ce sont ceux où il y a plus à parier pour que contre qu’ils ont passé de l’état de possibilité à l’état d’existence dans un certain temps limité par celui de l’action.
Avant de passer aux sculpteurs, il faut, mon ami, que je vous entretienne un moment d’un tableau que Vien a exécuté pour la grande impératrice.
Au milieu de ce violent tumulte, qui fut le plus souvent une discussion très solennelle, les idées anciennes étaient défendues, tantôt avec une réserve que l’on prenait pour de la faiblesse, tantôt avec un courage que l’on prenait pour de l’exagération ; quelquefois on eût dit le chant du cygne qui va mourir : mais ce chant du cygne n’était point entendu, et n’avait point la force d’émouvoir ; il n’y avait rien de contagieux dans ces derniers accents d’idées expirantes, ou dont l’empire n’était plus que dans le passé : encore, il faut l’avouer, souvent aussi ce n’était point même le chant du cygne ; c’était quelque chose de vague et d’incertain, comme un éblouissement des oreilles ; c’était, en un mot, une cause mal comprise et mal défendue.
Demandez plutôt à About, à qui on a exécuté l’an passé un si beau nocturne !
Il le met au-dessus de tous pour la solidité, pour l’onction, pour la vertu chrétienne qui est dans toute sa vie et qui passe dans ses discours.
Il y a du Triboulet en perspective dans la traduction ; chez Sophocle, s’il passe quelque chose au fond, c’est l’antique Ménade.
Arnault d’être court sur un sel sujet, qui lui prescrivait pourtant de ne pas omettre quelques noms rayés en même temps que le sien et restés jusqu’ici absents, lui interdisait-elle donc, à lui naguère proscrit, de sortir un moment du cadre étroit de cette enceinte, de se rappeler à l’esprit ce qu te passe autour de nous, ce qui s’y accomplit d’arbitraire, ce qui y règne de violent et d’inusité ?
Au théâtre, où la petite école des Impassibles a voulu transporter son action, elle n’a fait que passer.
Mais comme l’abus de ces termes de liaison donne au discours un air pesant et pédant, et comme d’autre part il paraît facile de s’en passer, on ne se donne pas la peine d’en connaître l’énergie et les propriétés.
Comme d’un étage à l’autre de la société se perçoivent certaines différences d’esprit, il en éclate d’autres, et les mêmes dans tous les étages, quand on passe d’une région à l’autre.
On passerait aisément condamnation sur ces banalités ambitieuses et sur toute cette rhétorique, si elle n’avait un inconvénient très grave.
* * * Quoi qu’il en soit, meneurs et menés se passent, provisoirement, presque tout.
Delavigne n’a pas l’audace qu’il faut pour enfourcher l’indocile Hippogriffe ; mais, s’il court moins de risques, il ne voit pas non plus se déployer sous lui, comme une carte immense, la figure du monde et l’infini des horizons ; il ne peut pas, au détour d’un nuage, entrer en conversation avec un ange qui monte, ni passer sa main dans les cheveux d’or des étoiles ; le moindre mur, la plus petite colline bleue suffisent à masquer sa perspective… M.
Sans doute les Arlequin, les Pedrolino, les Pantalon, étaient d’excellentes charges (ce mot est la traduction du mot italien caricature, passé depuis lors dans notre langue), c’est-à-dire des copies ressemblantes, quoique outrées, de la nature humaine.
Sébastien-Charles Leconte : L’Esprit qui passe. — Le Bouclier d’Arès, Charles Le Goffic : Sur la Côte.
Beaucoup d’autres diront sans doute, avec non moins de raison, que ses Ballades ne sont pas des ballades ; passe encore.
Il s’appuye de celle de Henri IV, qui reçut la discipline sur les épaules, des cardinaux d’Ossat & du Perron ; formalité bien vaine, mais raison plus étrange encore pour vouloir qu’on admettre un usage quelquefois criminel & suggéré par la débauche ; un usage qui peut être remplacé par tant d’autres plus dignes d’un vrai pénitent ; un usage qui peut être remplacé par tant d’autre plus dignes d’un vrai pénitent ; un usage enfin que la religion ne prescrit pas, & qui rappelle ces prêtres de Baal, qui se déchiroient à coups de lancettes, ou ces insensés Brammins qui passent la plus grande partie de leur vie, nuds dans leurs cellules, occupés à s’enfoncer des clous dans les bras & dans les cuisses, en l’honneur de leur dieu Brama.
Ni les chevaux ne sont vites, ni les hommes ne sont adroits que pour fuir devant le vainqueur198. » Je passe, et mon oreille retentit de la voix d’un prophète.
Même les Pairs, même les Précurseurs, les Maîtres originaux, qui avaient préparé de longue main la bataille, prenaient patience en reconnaissance des services passés.
« Sa vie passée dans le luxe, dit Bossuet, ne lui faisait point sentir la durée, tant elle coulait doucement17. » C’est le mot ordinaire ; mais si je veux, spontanément par trouvaille, ou volontairement par effort, si je veux donne ; à ce mot plus de hardiesse, l’accoupler à des pensées imprévues, ce simple verbe peut devenir admirable, la plume de Bossuet : « Laissez couler sur le prochain cet amour que vous avez pour vous-même18. » Et ailleurs « Dieu a tant d’amour pour les hommes et sa nature est si libérale qu’on peut dire qu’il semble qu’il se fasse quelque violence quand il retient pour un temps ses bienfaits et qu’il les empêche de couler sur nous avec une entière profusion19. » Et toujours de Bossuet dans cet ordre d’idées : « Les générations des hommes s’écoulent comme des torrents. » Encore une fois, ces trouvailles, ces images, ces transpositions de sens peuvent n’avoir pas coûté d’effort à Bossuet.
Seulement, la force n’est plus où on la voyait ; elle est passée aux mains de ceux qui hier étaient dominés.
Le génie de la sculpture étrusque, mystère dans son passé, mystère à sa renaissance, apparaissait au monde comme un phénomène de l’esprit humain qui ne sera jamais expliqué. […] Michel-Ange passa huit mois dans les montagnes de Carrare, ébloui des masses et de l’éclat du marbre où il taillait en imagination des poëmes de pierre, restés faute d’argent et de temps dans les grottes de Carrare. […] Quiconque a passé seul une heure à San Lorenzo, dans la chapelle des tombeaux, au lever ou au déclin du jour, peut dire qu’il a respiré l’âme de Michel-Ange et qu’il s’est entretenu avec le grand mort qui revit éternellement de la vie de ses marbres.
Chronique : Chronique musicale J’entendais le deuxième acte d’un opéra nouveau, — le Cid : une rue sombre, une scène de duel, un chœur, des récits, un requiem ; et les lieux communs des émotions insignifiantes défilaient en une suite de formules rabâchées ; un duel de pantins, un chœur de momies, des récits de Capitan-Matamore, un requiem de contrebandiers déguisés, et, finalement, la grande scène dramatique où l’éternelle « tragédienne lyrique » réitère les éternels bras crispés, yeux hagards, sanglots étouffés qui de toute antiquité expriment le désespoir… Et, sur les visages des spectateurs, parmi les flots d’applaudisseurs loués, l’invincible ennui… Puis, le décor changea ; ce fut un horizon élargi de paysages espagnols, dans un chatoiement d’ors et de lumières ; des cortèges passaient, puis les danseuses apparurent ; des rondes se nouaient, nouant les multiples évolutions des gracieuses et fugitives filles, tandis que les guidaient des sons très cadencés d’orchestres vifs, voluptueux. […] … dass heilig ich sterbe. » (Parsifal, I, 3) L’église est haute et claire ; des groupes de priants passent vaguement ; des agenouillés prolongent des rangées indistinctes de fronts ; le confus bruissement des litanies s’atténue en silences graves. […] le Malade revoit les damnées visions, et dans ses yeux fanés passent des lubriques choses : yeux pécheurs !
Pour peu que le cerveau ne soit pas imbécile, la métaphysique est le milieu, dans la tête humaine, par lequel tous les faits sont obligés de passer pour se teindre des reflets qui sont les conditions de leur lumière. […] Voltaire, Diderot, Rousseau, qu’il exagère énormément en les décrivant, lui passent moins près du cœur que Condillac et Montesquieu, et on le comprend : Condillac est pour lui le matérialisme de la source, — les premières gouttelettes du fleuve immense ; Montesquieu, le ton de la bonne compagnie dans l’impiété, — si opposé aux engueulades athées et compromettantes de Diderot, — la haute discrétion dans l’audace dangereuse, extrêmement chère aux héros intellectuels d’à présent, et que M. […] Elle ne flétrit pas qu’un passé coupable en le racontant.
Cela est sensible à qui lit l’Exposition du Système du Monde, de La Place, le modèle du genre : il y a des endroits où on lit des yeux l’énoncé d’une formule que le mathématicien seul comprend : le profane est réduit à l’accepter ; il doit en croire son auteur sur parole et passer outre. […] Flammarion, d’en passer par son hypothèse ou de ne voir dans l’univers qu’une immense « lanterne magique », un spectacle de marionnettes en grand : toute ma conscience intellectuelle se soulève contre un pareil dilemme dans lequel le jeune astronome, enivré de sa thèse, voudrait m’enfermer.
Voici comment les choses se passèrent à Rouen : une crèche derrière l’autel, avec l’image de la Vierge ; un enfant, d’un lieu élevé, figurait un ange et annonçait la nativité ; les pasteurs, vêtus de la tunique et de l’amiet, traversaient le choeur, et l’ange leur disait un verset de saint Luc. […] On passerait donc comme de plain-pied du xiie siècle au xve , d’Adam et de Saint Nicolas aux mystères.
Dorante se fait passer pour un domestique, et Silvia pour une soubrette ; un homme et une femme se rencontrent, qui ont juré chacun de leur côté de né jamais aimer ; une fée s’éprend d’Arlequin balourd et niais : ces données ne représentent rien, ou pas grand chose, de réel. […] Il multiplia les portraits : ses Lisette et ses Frontin passent leur temps à faire les caractères satiriques de tous les gens qui paraissent ou qu’on nomme dans la comédie.
Car, pendant tout le procès de Rennes « le destin s’accomplissait, l’innocent passait dieu ». […] Bergeret, et vous demanderiez pour vous le supplice d’une Danaïde qui fait passer des fleuves par son tonneau sans fond plutôt que la destinée aimable de l’enfant dont la moindre fontaine remplit l’urne légère.
Quelles qu’aient pu être antérieurement les opinions par lesquelles il avait passé, Vauvenargues, à cette date de 1746 et jusqu’à sa mort, était donc et demeura dans des sentiments religieux, élevés, mais philosophiques et libres. […] [NdA] Il s’est passé, depuis que ceci est écrit, de grands événements sur Vauvenargues.
Avec Frédéric il n’y a point d’étiquette, et tout se passe comme avec un particulier, homme de génie. […] Et il l’engage à venir passer quelques mois avec lui dès qu’il le pourra : « Nous philosopherons ensemble sur le néant de la vie, sur la philosophie des hommes, sur la vanité du stoïcisme et de tout notre être. » Et il ajoute avec ce mélange de roi-guerrier et de philosophe, qui semblerait contradictoire s’il n’était ici touchant, « qu’il ressentira autant de joie de le tranquilliser que s’il avait gagné une bataille ».
Homme du monde et du très grand monde, tenant à passer pour tel, réservé, diplomatique et un peu enveloppé, très peu enclin aux confessions, on ne sait presque rien de précis sur ses débuts. […] Il mourut à temps, et subitement, à Paris, le 30 janvier 1791, à l’âge de cinquante-six ans et demi, disent les uns, de soixante ans passés, disent les autres, et, dans tous les cas, ne paraissant pas son âge.
Il parut étonné quand celui-ci lui répondit qu’il n’avait pas cet honneur : Il faut que vous en soyez, dit Colbert ; c’est une compagnie que le roi affectionne beaucoup, et, comme mes affaires m’empêchent d’y aller aussi souvent que je le voudrais, je serai bien aise de prendre connaissance par votre moyen de tout ce qui s’y passe. […] Il est un pur amateur qui dit son avis ; c’est son droit et son plaisir : L’agréable dispute où nous amusons Passera, sans finir, jusqu’aux races futures ; Nous dirons toujours des raisons, Ils diront toujours des injures45.
* * * Bourgeois, fils de bourgeois, appartenant à cette classe moyenne qui fut si longtemps la maîtresse de nos destinées, Émile Augier ne pouvait pas, sans angoisses, assister à la rapide et inévitable dispersion de cette élite, oublieuse des vertus et des efforts passés, engourdie dans son bien-être et dissipant, en moins de deux générations, le patrimoine d’honneur, de travail, de modestie dans les goûts, de pureté dans les mœurs, légué par les ancêtres. […] Aussi, pour lui épargner toute angoisse, pour ne pas troubler les derniers moments de leur parent par le spectacle de leur immense douleur, tous les membres de la famille s’étaient scrupuleusement abstenus de se montrer au chevet du mourant, tant qu’on avait pu supposer qu’il pouvait entendre et voir ce qui se passait autour de lui.
Peut-être, il est vrai, ces sarcasmes ont-ils pour but de stimuler la vanité de ceux qui font passer leur intérêt propre avant leur amour-propre. […] — Si, de l’étude des sentiments, nous passons à celle des idées, nous trouverons encore dans les contes des indications utiles à recueillir.
Quand La Bruyère et La Rochefoucauld nous manquent, je n’hésite pas à aller un moment jusqu’à Marivaux, ou même à passer jusqu’à Chamfort.
Thiers, les choses ne se passent pas aussi simplement, et qu’il n’ait eu garde d’omettre les fréquentes perturbations qui ont altéré sinon dévié leur cours ; on lui a reproché d’introduire dans l’histoire une sorte de fatalisme systématique, qui subordonne les actes humains à des règles inflexibles, intercale les hommes dans le cadre d’une destinée toute faite, et, dès lors, dispense trop l’historien d’indignation contre les oppresseurs, de sympathie pour les victimes, et de tous ces sentiments qui donnent couleur et vie.
Plus d’une fois, au milieu de joyeux compagnons, et autour du punch bleuâtre, il lui est revenu d’amères pensées, des regrets du cloître et de la vie des vieux temps, et comme il l’a dit lui-même, un amour inouï, un désir effréné pour un objet qu’il n’aurait pu définir ; plus d’une fois son cœur a battu d’une émotion douloureuse en voyant à l’horizon des cités germaniques planer ces magnifiques monuments qui racontent comme des langues éloquentes l’éclat, la pieuse persévérance, et la grandeur réelle des âges passés.
Presque autant vaudrait, dans un drame, nous donner la biographie détaillée, passée et future, de chacun des comparses.
Enfin le code de la féodalité donnant pour base à toutes les institutions, à tous les pouvoirs, les droits antérieurs consacrés par le temps, il n’était pas permis de dire la vérité sur le passé, quelque ancien qu’il pût être ; les autorités présentes en dépendaient : des erreurs de tous les genres arrêtaient les historiens sur tous les sujets, ou, ce qui était plus fâcheux encore, les historiens adoptaient sincèrement ces erreurs mêmes.
Ceux qui vous traiteront ainsi seront tous des philosophes, auront à tout moment à la bouche les phrases que vous débitez depuis une heure, répéteront toutes vos maximes, citeront comme vous les vers de Diderot et de la Pucelle Et quand tout cela n’arrivera-t-il Six ans ne se passeront pas que tout ce que je vous dis ne soit accompli Voilà bien des miracles, dit Laharpe, et vous ne m’y mettez pour rien Vous y serez pour un miracle tout au moins aussi extraordinaire ; vous serez alors chrétien Ah !
L’essentiel est de lire les réflexions développées dans ce volume, d’une manière désintéressée, sans le vulgaire désir d’y apprendre des procédés rapides et mécaniques ; si l’on y prend des points de départ, des matériaux, une direction, un stimulant, pour penser par soi-même, pour comprendre comment les écrivains bâtissent leurs ouvrages, ordonnent et expriment leurs conceptions, et comment on doit soi-même travailler, insensiblement l’esprit, familiarisé avec les grandes lois de l’art d’écrire, dont il aura pénétré la vérité et mesuré la portée, s’y conformera en composant, et il conduira, disposera, traduira ses pensées selon des règles qui ne seront plus logées dans la mémoire, mais feront partie de lui-même et auront passé dans sa substance.
Mais il paraît que l’adorable femme a un passé un peu trouble.
Le poète vit aussi à de plus belles heures passer la Nuit de juin traînant Le somptueux manteau de ses cheveux sur l’herbe.
L’imagination magnifique de ce poète évoque les héros et les pâles princesses de la légende et les fait passer sur de somptueux décors.
Sully Prudhomme, ce rêveur adorable dont les vers ont le charme d’un regard et d’une voix, — un regard où passent des larmes, une voix où flotte un soupir.
L’auteur expose le plus gravement du monde, dans la dédicace, l’analogie qu’il aperçoit, d’abord entre la partie supérieure et noble de ses personnages et la dédicace qu’il présente à Sa Majesté, puis entre la partie basse et monstrueuse de ses héros et l’œuvre qu’il dépose aux pieds de la reine. » Après avoir passé en Italie l’été de 1623, les Comici Fedeli revinrent en France et y représentèrent pendant l’année 1624 et le commencement de l’année 1625.
On négligea que l’histoire ne se compose point comme un roman, qu’elle n’a le droit de synthétiser le passé sous la forme d’un récit suivi qu’une fois en possession de documents complets et que jusque-là elle ne peut légitimement dresser qu’un inventaire des pièces en portefeuille.
Elle eut bien voulu faire passer à la postérité la prose de cet illustre écrivain, pour prouver à tous les siècles qu’il n’a pas mieux réussi hors de son genre, que Cicéron hors du sien.
L’auteur y passe en revue les écrivains & même les libraires de Londres.
Il publie & brode, je ne sçais quelles scènes qu’il disoit s’être passées, tantôt à l’église des Sablons, tantôt chez madame de Prie, tantôt chez la princesse de la Tour, & généralement dans tous les endroits où le célèbre poëte avoit paru.
Ce grand homme eut le malheur de passer sa vie au milieu d’un cercle de littérateurs médiocres, qui, toujours prêts à l’applaudir, ne pouvaient l’avertir de ses écarts.
Suivant ces regles, il faut répresenter les lieux où l’action s’est passée tels qu’ils ont été si nous en avons connoissance, et quand il n’en est pas demeuré de notion précise, il faut, en imaginant leur disposition, prendre garde à ne se point trouver en contradiction avec ce qu’on en peut sçavoir.
C’est un de ces jugemens que l’esprit fait par une operation qui n’est pas prémeditée, et que nous ne connoissons même que par une refléxion qui nous fait retourner, pour ainsi dire, sur ce qui s’est passé dans nous-mêmes.
En d’autres années l’hyver se passe sans trois jours de gelée consécutive.
Il est clair qu’en se cantonnant dans l’abstraction, en surélevant le point de vue, en méprisant les contingences d’exécution et les difficultés de détails, on peut un instant dominer le débat, passer pour avoir raison et présenter le problème comme résolu ou, plus exactement, comme inutile à résoudre.
Nodier disait « Pour juger une grande époque de destruction et de renouvellement, comme celle où nous vivons, il faudrait pouvoir se séparer tout à fait du passé et de l’avenir, ne conserver de l’un que des souvenirs sans passion, ne fonder sur l’autre que des espérances sans regrets… On sent partout, dans ce livre, l’inspiration qui a produit Antigone ; et je ne sais par quel mystère qui étonne et qui effraie, il rappelle le langage des fondateurs de la civilisation, comme si la nôtre était déjà détruite : il résulte de ce mélange d’éléments quelque chose qui accable la pensée, mais qui a un caractère monumental très instructif pour le siècle, si les livres remarquables sont les témoins de l’état de la société.
Ce qui passe avant, c’est la fierté, c’est la pureté, c’est la hauteur morale de la vie.
Et cela, non pas une nuit, mais des années, se faisant prier par tout le monde pour être heureux, comme un mulet obstiné qui se ferait tirer sur la bride pour passer un petit fossé de rien du tout.
Il est très difficile à la Critique, qui a toujours la main un peu rude, de toucher à ce livre, si peu livre, et qui n’a de livre que le petit arrangement (lequel n’a pas dû infiniment coûter) de ce monsieur Paria Korigan, à qui on feint de s’adresser pour offrir au public cette enfilade de récits, et pour qu’entre eux il y eût un lien dont ils auraient pu très bien se passer.
Préface De toutes les œuvres que nous passons en revue dans cet ouvrage, la plus généralement intéressante, la plus actuelle, l’œuvre qu’on pourra spécialement appeler un jour l’œuvre même du xixe siècle est celle où nous voici arrivés.
On veut qu’il y ait des rangs, même après la mort, et que les titres des grands passent, pour ainsi dire, à leurs réputations.
Ferme dans sa foi religieuse complote, il maintient la neutralité la plus absolue, et rendant à tous les Dieux un honneur égal, il éprouve pour l’action qui se passe sous ses yeux une sorte d’horreur. […] La vanité de la lutte ne sera-t-elle donc sensible qu’aux spectateurs, qui, voyant la contradiction que la démocratie renferme en elle-même, voyant dans ce père insulté la destruction du caractère paternel, comprennent que rien n’est sérieux dans l’action qui se passe sous leurs yeux, et que d’un drame où rien n’est sérieux rien de redoutable pour la morale ne pourra sortir ? […] Dans le monde de la nature, l’Idée (Begriff) passe par divers modes d’existence avant d’être l’Idée véritable (Idee)… Le système solaire est pour l’Idée une manière encore imparfaite de manifester son unité… La plante ne peut avoir le sentiment de sa subjectivité, parce qu’elle pousse sans cesse au dehors un nouvel individu sans pouvoir revenir sur elle-même… Dans l’animal, le principe spirituel n’apparaît pas encore comme Âme véritable ; car il ne se sait pas… La propriété d’être pour soi est ce qui constitue la véritable subjectivité. […] Euripide abandonne la grandeur et la simplicité plastiques qui distinguent les caractères antiques, pour passer au pathétique sentimental.
… Et ils écrivent aux journaux, déclarent être français, nomment la Patrie : ils ne comprennent plus Wagner, passé Lohengrin… Cependant, ils persévèrent, faisant des œuvres bruyantes et qui paraissent audacieuses, ainsi qu’ils ont appris ; et le public s’acharne à les juger wagnériennes ; les critiques, aussi, la plupart pour les en louer, M. […] Ne pourrait-il avoir entre le peuple même et l’artiste sincère, entre le réalisme et l’idéalisme, une entente plus parfaite que par le passé ? […] Angleterre. — Le mois passé n’a offert que peu d’événements ; mais maintenant que la saison va bientôt commencer à Londres, nous pouvons attendre, certainement, plus d’activité parmi les musiciens. […] Son roman, Valbert ou les Récits d’un jeune homme (1893), se passe à Bayreuth en 1888 pendant Parsifal.
Perrin les passe en revue et prend des notes. […] Un sujet extraordinaire, une histoire à dormir debout, qui se passe à Carthage. […] Nous passons cette vie à bâtir la vaine tour de notre prospérité, qui, jamais, ne peut être construite. […] Jésus oppose à la vie personnelle non la vie d’outre-tombe, mais la vie commune qui se fond avec la vie présente, passée et future de toute l’Humanité.
Il suit de là, comme à l’égard de l’organisation physique, que nous devrions trouver dans la nature, non pas les degrés transitoires eux-mêmes par lesquels chaque instinct complexe a successivement passé, car ils ne peuvent avoir existé que dans la lignée des ascendants directs de chaque espèce, mais seulement quelques vestiges de transitions analogues dans les diverses lignées collatérales aujourd’hui vivantes. […] Je passerai donc légèrement sur cette première objection. […] C’est ce qu’on ne saurait ni affirmer ni nier : nous ne savons rien, absolument rien, de ce qui se passe ou peut se passer dans le cerveau d’une Abeille ou de tout autre animal ; nous ne pouvons donc en rien dire, surtout en rien assurer.
Quand l’heure sera venue, il contribuera avec lui, et à côté de lui, à détrôner ce pouvoir directorial usé, qui était bien véritablement l’anarchie, rien que l’anarchie ; et il pourra, après le 18 Brumaire, dire avec orgueil ce mot qui résume les deux grands moments de sa vie historique : « J’ai passé auprès de Louis XVI la dernière nuit de son règne, j’ai passé auprès de Bonaparte la première nuit du sien. » 47.
L’archevêque en avait fait un lieu si soigné, si peigné que lorsqu’on marchait dans les allées ; un garçon jardinier, dit-on, était là qui passait le râteau derrière. […] Son successeur, M. de Noailles, y aida lorsque, après la première lune de miel passée, on s’aperçut de son insuffisance et de ses petitesses.
» — « Le paysan annonce sans cesse que le pillage et la destruction qu’il fait sont conformes à la volonté du roi. » — Un peu plus tard, en Auvergne, les paysans qui brûlent les châteaux montreront « beaucoup de répugnance » à maltraiter ainsi « d’aussi bons seigneurs » ; mais ils allégueront que « l’ordre est impératif, ils ont des avis que « Sa Majesté le veut ainsi743 » À Lyon, quand les cabaretiers de la ville et les paysans des environs passent sur le corps des douaniers, ils sont bien convaincus que le roi a pour trois jours suspendu les droits d’entrée744 Autant leur imagination est grande, autant leur vue est courte. « Du pain, plus de redevances, ni de taxes », c’est le cri unique, le cri du besoin, et le besoin exaspéré fonce en avant comme un animal affolé. […] Aujourd’hui ils se contentent de vous regarder et ricanent : à peine êtes-vous sur le seuil, que vous les entendez parler de vous d’une manière plus leste que si vous étiez leur camarade » Aux environs de Paris, même attitude chez les paysans, et Mme Vigée-Lebrun747 allant à Romainville chez le maréchal de Ségur, en fait la remarque : « Non seulement ils ne nous ôtaient plus leurs chapeaux, mais ils nous regardaient avec insolence ; quelques-uns même nous menaçaient avec leurs gros bâtons. » — Au mois de mars ou d’avril suivant, à un concert qu’elle donne, ses invités arrivent consternés. « Le matin, à la promenade de Longchamps, la populace, rassemblée à la barrière de l’Étoile, a insulté de la façon la plus effrayante les gens qui passaient en voiture ; des misérables montaient sur les marchepieds en criant : L’année prochaine, vous serez derrière vos carrosses et nous serons dedans. » — À la fin de 1788, le fleuve est devenu torrent, et le torrent devient cataracte.
Si les mots suivants ont la même vertu, le style est comme un flambeau qui, promené successivement devant toutes les parties d’une grande toile, fait passer devant nos yeux une suite de figures lumineuses, chacune accompagnée par le groupe vague des formes qui l’entourent et sur lesquelles la clarté principale a égaré quelques rayons. […] On agrandit les événements par des images violentes ; on dit d’un richard qui s’enrichit, « qu’il pleut dans son escarcelle » ; on dit des pèlerins alléchés par la vue d’une huître « qu’ils l’avalent des yeux. » On insiste, on redouble, on s’acharne ; on ne se contente pas de dire qu’un avare entasse et compte ; on le montre « passant les nuits et les jours à compter, calculer, supputer sans relâche, calculant, supputant, comptant comme à la tâche. » On revient vingt fois sur le même objet, avec vingt expressions différentes ; un seul mot est impuissant à manifester la sensation intérieure ; tout le dictionnaire y passe ; toutes les images grossissantes ou appétissantes défilent coup sur coup pour l’exprimer.
Je passe les diverses combinaisons de doctrine d’histoire et de psychologie, propres à MM. […] Il a un faible très marqué pour les belles étrangères qui passent l’hiver à Paris.
Et encore, du même Poète : J’entrevois d’immobiles chasses, Sous les fouets bleus des souvenirs, Et les chiens secrets des désirs, Passent le long des pistes lasses. […] Comme ils passaient par la roseraie Avec de si doux yeux à nul ne leur mentir.
L’art seul, où la forme est inséparable du fond, passe tout entier à la postérité. […] Il faut maintenir toutefois « que l’époque des dissertations et des mémoires n’est pas encore venue pour l’Inde, ou plutôt qu’elle est déjà passée, et que les travaux des Colebrooke et des Wilson, des Schlegel et des Lassen, ont fermé pour longtemps la carrière qu’avait ouverte avec tant d’éclat le talent de Sir William Jones 118 ».
Après avoir regretté cette expression irréfléchie, il ajoute dans des pages sincères : Mais voici, avec la même vérité, le mouvement qui se passa en moi, et comment elle me fut arrachée. […] Bérenger, dans l’estimable et intéressante Notice qu’il a placée en tête des présents volumes, n’ait point abordé et discuté ce point délicat pour le fixer avec précision ; c’est là une lacune fâcheuse dans un travail qui pourrait autrement passer pour définitif.
Personne certes ne connaissait mieux le Fontenelle définitif que Mme Geoffrin ; qui passait sa vie avec lui et qui fut son exécutrice testamentaire. […] Chez Fontenelle, la vérité nouvelle se déguise en madrigal, et elle passe plus sûrement.
Les dix ou douze années qu’il passa à Bourges furent des années fécondes, et dans lesquelles il posa les fondements de tous ses grands travaux. […] Ces quatre ou cinq années environ qu’Amyot passa en Italie, à Venise et à Rome, lui furent grandement profitables, tant pour l’étude des textes que pour le commerce des hommes et aussi pour la connaissance des affaires.
D’une âme ardente et dont le feu se dirigeait sur des sujets graves, à peine hors des bancs, il prit part aux discussions et aux dissensions qui agitaient alors cette petite république, et il eut ses premiers écarts, même ses excès ; car il est écrit pour chacun qu’il faut que jeunesse se passe. […] Des conseils de cet ordre, en effet, n’ont chance de réussir que quand ils rencontrent à la tête des États des hommes qui sont de force à s’en passer et à se les donner eux-mêmes.
LEs Grecs ont été les premiers qui ont donné des regles d’Eloquence, quoique ce peuple ingénieux pût s’en passer plus facilement qu’un autre. […] Si des Grecs nous passons aux Latins, nous trouvons d’abord Ciceron qui fut le maître, ainsi que le modèle ; de la véritable éloquence.
» J’ai passé au front de durs moments, car pendant le premier hiver nous n’avions pas encore l’habitude de cette guerre de « taupes » et dans les Vosges (col de Sainte-Marie) nous souffrions beaucoup du froid. […] Âgé de quarante ans, affecté au service des étapes, il demande à passer dans l’active. « J’attends impatiemment de faire mon devoir comme je le désire et le comprends ; comme Français et Juif, je dois le faire doublement.
A d’autres, l’admission loyale des éléments extérieurs paraît pratiquement impossible. « Vous ne ferez jamais que des éléments hétérogènes se combinent, nous disent-ils ; il ne faut attendre aucune fécondité du contact de races ou d’individus tout à fait divergents. » Mais les races les plus distantes l’une de l’autre par leur histoire, leur passé, leur situation, leurs mœurs n’ont-elles pas un caractère commun, qui les relie malgré tout, celui d’humanité ? […] Je le demande, car il ne faut pas se contenter de l’opinion courante, toujours fausse, puisqu’elle prend racine dans le passé : il faut se mettre, pour juger, au point de vue de l’ensemble, si peu étendu que soit le champ de notre vision mentale.
Il fit des études régulières et solides, et passa sa jeunesse à l’Université de Cambridge. […] Pour rétablir sa poitrine attaquée, il passa deux ans en Italie, puis en France.
Il passait pour classique, et on ne l’entend plus parler que de Shakspeare.
on frémit… le péril a passé.
Qu’elle les ait, en effet, parcourues sans entraves ; que de la majorité dans le sein de laquelle elle s’était formée, elle ait, en s’altérant, passé au service des diverses minorités factieuses qui l’interprétèrent à leur façon et la maintinrent dominante ; que ces minorités, sortant l’une de l’autre et s’épurant sans cesse, en soient venues à tyranniser horriblement l’immense majorité subjuguée : c’est ce qu’expliquent de reste les besoins militaires de plus en plus impérieux de ces dernières périodes, besoins de détresse qui s’accordaient merveilleusement avec les passions furieuses du pouvoir, qui les eussent sollicitées si elles n’avaient été déjà flagrantes, et qui les firent tolérer tant qu’elles les servirent.
Il a passé sous silence les secondes Méditations, supérieures encore aux premières, et plus admirables de plénitude et d’immensité ; il n’a pas nommé le Dernier chant de Child-Harold, où tant de sublimité abonde.
Quoique la plaisanterie ne puisse se passer aussi facilement qu’un ouvrage philosophique d’un succès national, elle est soumise comme tout ce qui tient à l’esprit, au jugement du bon goût universel.
Cette remarque me fait passer de l’arithmétique à l’algèbre.
L’Avenir de la Science est sans doute un des premiers livres où une entreprise qui passait, il y a cent ans, pour irréligieuse, ait été tentée chez nous religieusement et ait ainsi repris son vrai caractère.
Par les portes ouvertes, on voit des mains crisper furieusement les draps ; une toux obstinée claque dans un coin ; une porte s’ouvre ; un infirmier, les manches retroussées, passe dans un courant d’air, en sifflotant, et, par les hautes fenêtres, le soir tombe en pluie de cendres… Tout à coup, un charme, une grâce, un rayon.
On conçoit difficilement aujourd’hui que l’interrogatoire qu’on vient de lire ait passé à la représentation.
Que penser de l’audace Philosophique, qui a osé lui attribuer l’assemblage de tous ses délires, en essayant de le faire passer pour l’Auteur du Systême de la Nature ?
Aussitôt à bas de nos lits, et bien vite, nous étions dans la rue, notre vieille rue Saint-Georges, où déjà le petit hôtel du journal Le National était occupé par la troupe… Et dans la rue, de suite nos yeux aux affiches, car égoïstement nous l’avouons, — parmi tout ce papier fraîchement placardé, annonçant la nouvelle troupe, son répertoire, ses exercices, les chefs d’emploi, et la nouvelle adresse du directeur passé de l’Élysée aux Tuileries — nous cherchions la nôtre d’affiche, l’affiche qui devait annoncer à Paris la publication d’En 18..
Son vocabulaire technique comprenait les mots : passe, débutter, archet, roüet, boule, ais, mettre au beau ; boule fendue, dérobée, qui tient de la pierre, du fer, etc. ; crocheter, lever, lève, porte-lève, etc.
Après avoir passé la plus grande partie de sa vie à dévorer le Grec & le Latin, il ne craignoit pas d’être récusé pour juge ni soupçonné dè n’avoir rejetté ces langues que parce qu’il les ignoroit.
Sous la tente d’Abraham, la réception se passe autrement.
Qui passera de nous deux ?
Nous nous écrivons souvent, mon cher Héliodore ; nos lettres passent les mers, et à mesure que le vaisseau fuit, notre vie s’écoule : chaque flot en emporte un moment185. » De même que saint Ambroise est le Fénélon des Pères, Tertullien en est le Bossuet.
Les hommes riches et ruinez par le jeu passent en nombre les gens robustes que les medecins ont rendus infirmes.
La crainte de la mort intimide ceux qui ne s’animent point à la vûë de l’ennemi, et ceux qui s’animent trop, perdent cette présence d’esprit, si nécessaire pour voir distinctement ce qui se passe, et pour découvrir ce qu’il conviendroit de faire.
Ces exemples, dont ont sçait les circonstances plus distinctement, frapperont mieux que les exemples tirez des siecles passez ; et l’on croira facilement que ce qui est arrivé à nos poëtes, est arrivé aux poëtes de tous les temps.
Le joueur de trictrac, qui de vingt parties qu’il joüe avec la même personne en gagne dix-neuf, passe constamment pour sçavoir le jeu mieux qu’elle, quoique le caprice des dez puisse faire gagner deux parties de suite au joüeur malhabile contre le joueur habile.
Aussi dès que le temps de la nouveauté s’est écoulé, dès que la conjoncture qui soutenoit la piece est passée, le public oublie pleinement ces farces, et les comédiens qui les ont joüées ne s’en souviennent plus, ce qui prouve, olim cùm stetit nova, … etc. .
Mais, enfantillage et contradiction, tout ceci a cela de bon, pourtant, qu’un philosophe, de la grande bande des philosophes qui croient au progrès et qui y travaillent, déclare, dans un livre entrepris à ce dessein, que l’humanité ne peut se passer de religion et qu’il n’y en a pas d’autre pour elle que la religion chrétienne et catholique, — aussi peu catholique et chrétienne qu’on voudra, mais encore, pourtant, catholique et chrétienne jusque dans son dernier débris, son dernier vestige et sa dernière flétrissure !
Dessins du temps et des époques qui ont suivi, gravures noires, gravures coloriées, portraits, éclaircissements sur la géographie et le costume de la guerre en 1430, théâtre des événements, histoire littéraire où l’on passe en revue les livres et les poèmes inspirés par Jeanne d’Arc, tout est là de ce qui se rattache à sa gloire, depuis le mystère du siège d’Orléans jusqu’au drame de Jules Barbier et de Gounod.
Il n’a pas mis servilement son pied dans l’ornière lumineuse d’un sujet où le char de feu d’un grand talent avait déjà passé.
Le père et le fils, l’automne venu, passaient des après-midi dans la forêt voisine.
D’un esprit né pour spéculer ou pour rêver je pourrais admettre qu’il reste extérieur à la réalité, qu’il la déforme et qu’il la transforme, peut-être même qu’il la crée, comme nous créons les figures d’hommes et d’animaux que notre imagination découpe dans le nuage qui passe.
Ces chants se conservaient par la mémoire, et passaient d’âge en âge ; on les répétait dans les familles ; on les chantait dans les fêtes ; la veille des batailles ils servaient de prélude aux combats ; ils animaient le guerrier et servaient de consolation aux vieillards ; le héros qui ne pouvait plus combattre, assis sous le chêne, entendait chanter les exploits de sa jeunesse, et il était entouré de ses fils et de ses petits-fils, qui, appuyés sur leur lance, écoutaient en pleurant les actions de leurs pères.
Chez nous donc la musique a toujours été et, en dépit de tout ce qu’on peut dire, est toujours un article de luxe ; elle n’entre nullement dans la vie ordinaire de notre peuple, et il y a des milliers d’excellents citoyens qui passent à travers l’existence sans jamais entendre une seule note de musique. Les uns trouvent leur distraction dans la politique, les autres dans le sport, un nombre bien plus petit dans le drame, la littérature et les beaux-arts ; mais l’Anglais type est tellement absorbé dans ses affaires qu’il ne s’intéresse guère à ce qui se passe hors de son bureau. […] Quand il arrive qu’un Anglais est vraiment musicien, il demanda à ses compositeurs de rester dans un chaste et tranquille milieu : ils ne doivent pas passer les limites des convenances en lui offrant des mets nouveaux auxquels son palais n’est pas déjà accoutumé.
— Passer à la géhenne, torturer. […] Aux passés les jeunes désirs mantelés de paroles au vent. […] Nué — Part. passé du verbe actif nuer, assortir des couleurs.