C’est le charmeur aux naïvetés savantes, l’homme de Plutarque et de Longus également, Amyot, digne du regard des Muses et du sourire de Chloé ; c’est Rabelais qui relie l’Antiquité au Moyen Âge et le banquet de Xénophon ou d’Athénée aux orgies de la Mère Sotte et de la fête de l’âne, Rabelais monstrueux mais tout-puissant et qui, débordant de sagesse et de folie, paraît moins un écrivain qu’un génie et moins un génie qu’une force jaillissant du sein de la nature.
Il faut que l’auteur y réfléchisse longuement afin d’éviter ce qui pourrait écarter le public ou le laisser se méprendre sur le caractère et la nature de l’ouvrage.
Les plus beaux dévouements qui puissent honorer la nature humaine venaient consoler l’âme ; les pensées nobles et généreuses trouvaient un asile dans de grands caractères ; la religion et les croyances sociales recevaient d’illustres témoignages jusque sur les échafauds de la terreur ; de magnanimes protestations éclataient même dans les tribunes élevées par les crimes et les factions.
L’homme sera toujours à lui seul un fonds inépuisable, la nature peut être mieux connue, mais les sentiments de l’homme seront toujours immenses et sans limites.
Hédouin, avait le projet d’écrire ses Mémoires « d’une manière plus ingénieuse et plus systématique que dans Tristram Shandy », et, quoique nous connaissions trop la nature de l’esprit de Sterne pour croire qu’il voulût chausser au pied rose et aérien de sa Fantaisie, de sa libre et vagabonde Fancy, l’affreux sabot d’un système quelconque, nous ne répugnons nullement à admettre qu’il eut l’idée de ces Mémoires ; car très certainement un homme comme lui, un observateur de sa merveilleuse supériorité, qui voyait dans l’âme et dans la vie tant de nuances encore lorsque les autres hommes n’y voyaient plus rien, ne s’était pas épuisé dans le Tristram et le Voyage sentimental.
Si vous faites exactement cela, vous serez toujours prospères, et votre grandeur s’accroîtra ; car ce Dieu exterminera vos ennemis, qui maintenant dévorent à leur aise vos campagnes. » Chose remarquable, et bien conforme à la nature sérieuse et appliquée du peuple romain : ces premiers contacts de l’imagination et de la poésie grecques ne lui venaient pas en délassement et en parure de l’esprit, mais comme un secours de politique et de guerre, un encouragement à la défense, une arme du patriotisme et de la liberté.
Horace, par l’ordre d’Auguste, va grandir cet exploit pour en faire un titre à la famille impériale : « Les barbares ont compris ce que pouvait une âme, fi une nature nourrie dans un fortuné sanctuaire, et le pouvoir du cœur paternel d’Auguste sur les jeunes Nérons.
Linguet * jeune Ecrivain qui a reçu de la nature le talent de l’éloquence : talent qu’il a transporté par-tout jusques dans l’histoire. […] Hume réunit la précision & la clarté, la profondeur & l’élégance ; il peint d’après nature sans que l’art se découvre dans ses tableaux. […] VOus verrez ce que je comprends sous ce titre en vous donnant celui de l’Abrégé chronologique de l’histoire du Nord ou des Etats de Dannemarck, de Russie, de Suede, de Pologne, de Prusse, de Courlande, &c. ; avec des remarques particuliéres sur le génie, les mœurs, les usages de ces nations, sur la nature & les productions de leurs climats, ensemble un précis historique concernant la Laponie, les Tartares, les Cosaques, les Ordres militaires des Chevaliers Theutoniques & Livoniens ; la notice des sçavans & illustres, des Métropolitains & des Patriarches de Russie, des Archevêchés & Duchés de Pologne, des Princes contemporains, &c.
Elle n’est pas sans vertu, mais elle est informe, Où manque la grande poésie, nous avons besoin de musique, comme de la nature quand notre passion veille dans l’insomnie et qu’elle est irritée. […] Il sauve ainsi les hommes et la nature par une rédemption toute tendre. […] Mais c’est surtout en lisant Les Œuvres burlesques et mystiques de Frère Matorelac , parus à peu près en même temps que les deux ouvrages précédents, que l’on saisit enfin l’entière portée, la pleine signification de cette nature sans cesse en jaillissements, en fusées, en éclaboussements d’expressions rapides dont chacune se suffit, forme un tout, source transparente emplie de lueurs et de forces.
170 V Le danger de cette règle est de détruire toute règle : car dans la nature les détails sont infinis ; si l’on disait tout, l’on n’achèverait point. […] On a oublié la nature de l’imagination humaine.
Il entrait dans sa nature de chercher à montrer que rien ne lui était impossible, et qu’il réussissait là où le plus habile aurait inévitablement échoué. […] « Le cardinal Braschi répondit qu’il lui était impossible d’exprimer sa surprise et de comprendre comment Son Éminence (Antonelli) avait songé au cardinal Chiaramonti, à cause justement des difficultés extrinsèques qu’il avait indiquées sommairement ; que malgré leur nature, lui, Braschi, ne les croyait pas absolument invincibles près de ceux de son parti, tant à cause des mérites personnels du sujet qu’en vue des circonstances particulières dans lesquelles on se trouvait ; que la longueur excessive du conclave, l’inutilité des épreuves faites sur les candidats des deux partis que l’on ne pouvait parvenir à nommer, la lassitude des électeurs, aucune exception personnelle contre le sujet et une satisfaction naturelle de voir l’un d’entre eux succéder à saint Pierre, lèveraient beaucoup d’obstacles.
Puis ces caractères jetés dans l’existence, soumis à ses heurts et consommant leurs récréations, évoluent au gré des événements et de leur nature, avec toute l’unité et les inconséquences de la vie véritable, tantôt nobles, déçus et victimes comme Mme Bovary, tantôt perpétuant à travers des fortunes diverses leur permanente impuissance comme Frédéric Moreau, tantôt sages et victorieux comme Mme Arnoux. […] Voici qui montre son obséquiosité et son impersonnalité devant la nature : « Je me suis mal exprimé en vous disant qu’il ne fallait pas écrire avec son cœur ; j’ai voulu dire, ne pas mettre sa personnalité en scène.
Ils n’ont pas eu de peine à montrer que Saint-Simon exagère, en les résumant, les défauts du personnage ; nos jeunes auteurs vont trop loin toutefois quand ils font de Saint-Simon un ennemi de Dangeau : on n’est pas ennemi de ceux dont on voit les ridicules, et le seul tort de Saint-Simon est de trop voir et d’être doué par la nature d’un organe qui est comme un verre grossissant, et d’une parole de feu irrésistible : de là tant de portraits ressemblants, outrés, vrais à les bien entendre, et en tout cas ineffaçables.
On dira de sa traduction tout le mal qu’on voudra, on ne lui enlèvera pas le mérite d’avoir le premier chez nous apprécié avec élévation la nature et la qualité du génie de Dante.
C’était une nature de guerrier, tout en dehors, tout d’une venue, donnant sa mesure de pied en cap et se dessinant de toute sa hauteur ; capable d’ailleurs de plus d’un emploi, et de négociations comme de batailles ; toujours actif, toujours insatiable, audacieux et fin, aimant les richesses, le faste, avide de grandeur, adorant la gloire ; ne songeant qu’à avancer, et en toute chose à tenir la tête.
Voyez parmi nous Fauriel, qui, par la nature des études et le tour d’esprit, se rapproche de Guillaume Favre.
Frohberger était de ces artistes malheureux… » Adoucissons cependant les tons : Halévy était une nature trop riche, trop multiple, trop ouverte et communicative, il était trop bien organisé par tous les sens, il était trop accessible aux douceurs de la sociabilité et aux joies de la famille, il était trop le contraire en tout d’un homme blasé, et avait, comme on dit, trop de cordes à son arc, pour être longtemps ou profondément malheureux.
C’est là qu’en 1777 le comte Victor Alfieri, âgé de vingt-huit ans et dans toute l’énergie d’une nature âpre et sauvage, rencontra celle dont le doux regard le dompta, et auprès de laquelle il trouva enfin, dit-il, « dans des chaînes d’or dont il se lia volontairement lui-même », cette liberté littéraire sans laquelle il n’aurait jamais rien fait qui pût illustrer son nom.
Chez lui, la gaieté, l’observation fine, une sensualité spirituelle, la malice et la bonne humeur, — ce qui faisait le fonds de cette nature française, — ont triomphé.
Aujourd’hui je comprends bien ce que vous voulez appeler la responsabilité délicate qui vous est échue : il s’agit de choisir, d’élaguer, de remplir le vœu dernier d’un poëte, en n’admettant rien qui soit de nature à nuire à sa mémoire ou à affaiblir l’idée qu’on veut donner de son talent.
Sa précocité acheva de s’y développer ; sa nature offrait alors, à ce qu’il paraît, un caractère méditatif qui s’est dérobé depuis sous le positif des affaires et la bonne grâce du monde.
Aujourd’hui que l’on s’occupe beaucoup de cette question dans notre monde médical, j’ai trouvé intéressant de signaler ce fait, auquel n’ont probablement pas songé les auteurs du roman, ils ont fait mourir leur héroïne d’un rhume négligé, mais ils ont tracé les caractères et la marche du mal d’une manière que ne renierait pas l’auteur du meilleur Traité de clinique médicale que nous possédions. » Questionné à ce sujet précis par le Dr Cabanès, Ed. de Goncourt répondit textuellement dans une lettre : « Pour Germinie38 ça s’est passé ainsi dans la nature, la pleurésie a précédé la tuberculose », et une autre fois « … j’ai décrit un cas de pleurésie prétuberculeuse, c’est bien l’expression technique ?
(Telle est) l’éducation ridicule à tant d’égards que reçoivent en général les personnes de ce rang ; dès leur enfance, toujours suivies, aidées, escortées, prévenues, (elles) sont ainsi privées de la plus grande partie des facultés que leur a données la nature. » (Mme Campan, Mémoires, I, 18, 28.)
Le duc de Rohan, qui avait les goûts très-littéraires et la passion des beaux vers, lui dit qu’à ses yeux le grand seigneur était celui qui avait le plus de parenté de nature avec Racine, et qu’il n’hésiterait pas à le prouver en venant lui-même chez moi solliciter mon amitié.
Au fond, Du Bartas, qui peint la nature sortant des mains du Créateur, n’est qu’un Belleau protestant.
Un jeu aussi hardi serait choquant chez d’autres ; mais, la nature l’ayant pétrie de peu de matière et lui ayant donné l’aspect d’une princesse chimérique, sa grâce idéale et légère sauve toutes ses audaces et les fait exquises.
Molière n’avait pas seulement la profonde immoralité qui est l’attribut commun et très probablement la condition d’activité des grands observateurs de l’homme et de la nature humaine.
Et, par cela seul qu’il applique à une passion profane le vocabulaire et les images de la « mystique » chrétienne, il se trouve presque composer, sans le savoir, une sorte d’élégie idéaliste aux airs déjà vaguement lamartiniens : Ses attraits réfléchis brillent dans vos pareilles… Il a sur votre face épanché des beautés Dont les yeux sont surpris et les cœurs transportés ; Et je n’ai pu vous voir, parfaite créature, Sans admirer en vous l’auteur de la nature, Et d’une ardente amour sentir mon cœur atteint, Au plus beau des portraits où lui-même il s’est peint.
Si les comparaisons et les tortures que Dante imagine sont quelquefois horribles, elles ont toujours un côté ingénieux, et chaque supplice est pris dans la nature du crime qu’il punit.
La nature nous a donné si peu de portes par où le plaisir et l’instruction peuvent entrer dans nos âmes !
car la nature, au contraire de l’art, fait bien presque tous les yeux et mal presque tous les nez.
La science chez lui est inventive, et il la rend familière : « Un singulier bonheur d’induction, a dit sir Humphry Davy, guide toutes ses recherches, et par de très petits moyens il établit de très grandes vérités. » Il ne se retient point dans ses conjectures et dans ses hypothèses, toutes les fois qu’il s’en présente de naturelles à son imagination, et il s’en est permis de fort hardies pour l’explication de certains grands phénomènes de la nature, mais sans y attacher d’autre importance que celle qu’on peut accorder à des conjectures et à des théories spéculatives.
Il avait dans l’idée de peindre des gens de haute classe, des bourgeois, des ouvriers, des artistes, des paysans, comme tout romancier plus ou moins réaliste, et il trouvait ingénieux et de nature à donner un air scientifique à ses ouvrages, du moins aux yeux des commis-voyageurs, d’établir entre ces différents personnages des liens imaginaires et tout arbitraires de parenté et d’alliances.
De là, si l’on amplifie ces aptitudes au degré où elles deviennent géniales, le merveilleux dessin de ses personnages ; de là surtout leur caractère charnel, farouche, violent, brutal et inintelligent, que Dostoïewski dut découvrir latent dans sa nature fruste d’homme plus animal que spirituel.
Bien plus, ce n’est pas par une influence extérieure, par esprit de révolte ou par rupture soudaine qu’il s’est séparé de cette philosophie ; c’est par un progrès nature, c’est en croyant l’approfondir et la développer, c’est en y appliquant une analyse plus exacte et plus rigoureuse ; depuis longtemps il l’avait dépassée qu’il croyait y être encore.
Ce discours du vieil Horace, dit Voltaire, est plein d’un art d’autant plus beau qu’il ne paraît pas : on ne voit que la hauteur d’un Romain et la chaleur d’un vieillard qui préfère l’honneur à la nature ; mais cela même prépare le désespoir que montre le vieil Horace dans la scène suivante, lorsqu’il croit que son troisième fils s’est enfui.
Les fameux paient pour les obscurs… Mais voilà une seconde raison pour que Babou, le sceptique, exclusivement, de nature, ne fasse pas de critique dans les meilleures pages de ses Lettres » — car critique, c’est justice étroite, et vengeance, c’est large justice, disait lord Bacon, cet homme ample de toutes façons.
Lorsque dans une société la loi consacre des conditions inégales, personne n’est exempt d’insulte ; le grand seigneur, outragé par le roi, outrage le noble qui outrage le peuple ; la nature humaine est humiliée à tous les étages, et la société n’est plus qu’un commerce d’affronts.
Ce troisième 1 a la même nature que les autres.
La Nature nous jette au hasard dans le temps et dans l’espace ; et pour un qui se développe, il y en a mille qui avortent, ou qui restent à demi formés.
Il n’aura pas, comme Byron, couru le monde barbare et voluptueux de l’Asie pour y ramasser des images, et, s’il est possible, des accidents nouveaux de la nature et du cœur.
. — En effet, les grands tirent à eux comme les petits, soit en argent, soit en nature, soit en services. […] Il n’est guère d’homme qui n’ait quelque talent de salon, quelque petit moyen d’occuper son esprit ou ses mains, de remplir les heures vides : presque tous riment et sont acteurs de société ; beaucoup sont musiciens, peintres de nature morte ; tout à l’heure M. de Choiseul faisait de la tapisserie ; d’autres brodent ou font des nœuds.
Ce guide, c’est la connaissance de la nature humaine, c’est ce réalisme psychologique qui est la vertu essentielle de nos grands classiques. […] Émile Henriot Le procès intenté au xixe siècle est un procès politique ; exactement de la même nature que celui que leurs détracteurs ont instruit et continuent d’instruire contre le xviie et le xviiie .
Elle s’est passée au milieu d’une maison sans argent, sous un père changeant tous les jours d’industrie et de commerce, dans le brouillard éternel de cette ville de Lyon, déjà abominée par cette jeune nature amoureuse de soleil. […] Et l’on a devant soi, surpris sur la nature, le gracieux tortillage des mouvements et des gestes de ces petites filles-singes.
Mais, à côté de ces œuvres, qui veulent soutenir une thèse, combattre des idées, en un mot exercer une action, ne croyez-vous pas qu’il y a place pour le roman d’art, lequel ne songe qu’à divertir le lecteur, à lui faire passer une heure agréable, en lui racontant, dans la meilleure langue possible, une histoire, véridique ou non, dont tout l’intérêt est dans le beau décor d’art ou de nature qui l’enveloppent ? […] Mais quand il déclare : « La fidélité des femmes dans le mariage lorsqu’il n’y a pas d’amour, est probablement une chose contre nature » ou « la seule chose que je voie à blâmer dans la pudeur, c’est de conduire à l’habitude de mentir… » il exprime la thèse que développent le plus complaisamment nos femmes de lettres.
C’est au milieu de considérations bien particulières au cours de la résolution d’un problème poétique, à l’heure, il est vrai, où la trame morale de ce problème se laisse apercevoir, qu’André Breton, en 1919, en s’appliquant à saisir le mécanisme du rêve, retrouve au seuil du sommeil le seuil et la nature de l’inspiration. […] Où l’on traite de la Nature de l’Esprit de l’homme, & de l’usage qu’il en doit faire pour éviter l’erreur dans les Sciences (1674-75).
Cette pièce de terre semble être ainsi taillée pour être le siège du plus heureux et du plus solide empire du monde, si la prudence l’avait pu étendre jusqu’aux limites que la nature lui a posées.
voix de la nature !
Charles IX, âgé de douze ans, et ensuite de dix-huit à vingt, y est vivant et pris sur nature.
La Motte vous rejette, de dépit, dans le vrai de la poésie, et Condillac dans le vif de la nature humaine.
» Non ; la vertu, la vraie valeur consiste à être toujours en rapport avec le danger : elle change de forme, non de nature ; on est calme et immobile sous le feu, soit qu’on l’emploie et qu’on le dirige soi-même avec art, soit qu’on l’essuie sans le pouvoir éviter ; de même qu’on était ardent, l’épée ou la pique au poing.
Pour nous, et au seul point de vue littéraire, qui est le nôtre, sans accorder à Santeul plus qu’il ne mérite, en reconnaissant à ses vers les qualités qui y paraissent, la pompe, le feu, la largeur, le naturel et la clarté, mais aussi en y voyant le vide trop souvent et la bagatelle du fond, en nous disant combien sa personne avait besoin d’intervenir à tout instant pour y jeter un peu de cette originalité qui n’était qu’en elle, nous voudrions que tout ce démêlé où il est encore engagé finît par une transaction, qu’il ne fût pas tout entier sacrifié, qu’on ne lui fût point plus sévère que ne l’a été l’abbé de la Trappe, et que les honorables censeurs qui de nos jours l’ont remis en question ne le renvoyassent point hors du temple sans lui laisser au moins un fragment de couronne ; car il est bien de ceux, malgré tout, qui, à travers l’anachronisme de la forme, sont véritablement poètes de race et par nature, il est de ceux qui, comme le disait Juvénal, ont mordu le laurier.
Mais Ronsard, qui n’a plus que des rencontres et par-ci par-là de ces bons accidents, s’en prend alors de son peu d’entrain et de son ralentissement aux rois et princes qui ne l’ont pas assez récompensé ni fait assez riche : au fond, il ne devrait s’en prendre qu’à lui et à sa nature.
Voiture était né l’esprit le plus fin et le plus délicat, formé par la nature pour la compagnie la plus choisie, pour en être l’enfant gâté et les délices : il fut quelque temps avant de rencontrer ce doux climat auquel il était destiné.
C’était le moment où la nature était à la mode, où la Suisse allait le devenir : Tronchin la mettait en honneur pour le régime, et Jean-Jacques pour le paysage.
Elle a été galante, elle a été légère, elle a ébloui les yeux des princes et de ceux qui sont devenus rois ; elle n’a pas cru qu’on dût résister à la magie de sa beauté ni qu’elle dût y résister elle-même ; elle a tout naturellement cédé et sans combat, elle a triomphé des cœurs à première vue et n’a pas songé à s’en repentir ; elle a obéi à cette destinée d’enchanteresse comme à une vocation de la nature et du sang ; il lui a semblé tout simple de jouer tantôt avec les armes royales de France, et tantôt avec celles d’Angleterre qu'elle écartelait à ses panneaux : mais tout cela lui a été et lui sera pardonné, à elle par exception ; tous ses péchés lui seront remis, parce qu’elle a si bien pensé, parce qu’elle a si loyalement épousé les infortunes royales, comme elle en avait naïvement usurpé les grandeurs ; parce qu’elle est entrée dans l’esprit des vieilles races à faire honte à ceux qui en étaient dégénérés ; parce qu’elle a eu du cœur et de l’honneur comme une Agnès Sorel en avait eu ; parce qu’elle a eu de l’humanité au péril de sa vie, parce qu’elle a confessé la bonne cause devant les bourreaux, et qu'elle a osé leur dire en face : Vous êtes des bourreaux !
J’avais dit, le jour où j’eus l’honneur de succéder à Delavigne pour le fauteuil académique, que je regrettais, dans ses drames, qu’au lieu d’aller de concessions en concessions du côté du romantisme sans y atteindre jamais, le poète ne fût pas resté plus franchement ce qu’il était par nature et par goût, — classique : et quand j’exprimais publiquement ce regret ce n’était pas du tout que moi-même je fusse devenu classique, ni que je me fusse converti (comme Rigault le prétendait en me raillant agréablement) ; mais j’aime ce qui a un caractère, j’aime l’originalité et l’individualité dans la poésie et dans l’art, cette individualité ne fût-elle pas précisément la mienne ni celle de mes amis.
Les provinces étaient si épuisées qu’en quelques endroits de la Castille on était obligé pour vivre de troquer les marchandises ; on en était revenu, comme dans l’enfance des sociétés, à faire les échanges en nature.
Demander aux hommes de sa trempe d’être des libéraux par goût, par penchant et préférence, c’est trop exiger de l’humaine nature : c’est bien assez s’ils le deviennent à une certaine heure par une juste appréciation de la nécessité et par raison d’État.
Guizot48, un travail datant de 1813, réimprimé en 1852 avec corrections et additions, et dans lequel l’éminent auteur, sans tant creuser, sans tant raffiner et renchérir qu’on l’a fait depuis, a su rassembler dans un juste cadre et dans une proportion raisonnable les idées vraies, les considérations importantes et les documents intéressants qui font connaître une grande nature de poète.
Les démocraties sont de leur nature soupçonneuses et crédules ; l’accusation banale de trahison leur plaît et les trouve aisément accessibles : on ne s’en fit pas faute contre M. de Girardin ; il se vit très-promptement impopulaire, et d’une impopularité qui soulevait les passions les plus vives, les plus irritées.
Habitué comme je le suis et enclin par nature à étudier surtout les individus, et ainsi fait moi-même que la forme des esprits et le caractère des auteurs me préoccupent encore plus que le but des ouvrages, je l’ai défini et appelé tout d’abord, après avoir lu de lui quelques chapitres : « un Bonald rajeuni, progressif et scientifique. » Mais de telles désignations sommaires ne signifient rien que pour ceux qui savent déjà tout ce qu’on y met.
On objecte toujours l’usage ; mais il y a une distinction à faire, et que Dumarsais dès le principe a établie : c’est la prononciation qui est un usage, mais l’écriture est un art, et tout art est de nature à se perfectionner. « L’écriture, a dit Voltaire, est la peinture de la voix : plus elle est ressemblante, meilleure elle est. » Il importe sans doute, parmi tous les changements et les retouches que réclamerait la raison, de savoir se borner et choisir, afin de ne point introduire d’un seul coup trop de différences entre les textes déjà imprimés et ceux qu’on réimprimerait à nouveau ; il faut les réformer, non les travestir.
Mais quand on a ainsi fait preuve de largeur d’idées et d’un sentiment historique aussi impartial, aussi désintéressé qu’on le peut désirer d’une nature intelligente, on n’en est que plus à l’aise pour apprécier, pour définir à leur avantage et à leur honneur les hommes du premier mouvement, du plus manifestement légitime de tous, de celui de 89, et particulièrement ceux d’entre eux qui furent les plus irréprochables, les plus éclairés et les plus purs.
Cette théologie est sans compassion ; elle accable l’homme par la brièveté de ses jugements sommaires, à la différence de la religion, qui découvre d’une main maternelle toutes les plaies du cœur qu’elle va guérir, et qui montre, à côté des ravages du mal originel, les ressources de la nature rachetée.
D’ailleurs il avait su prendre sur nous un entier crédit par sa parole vive et imagée, sa franche et loyale nature, son obligeante assiduité.
La Champmeslé y aurait fait mal au cœur. » Si Voltaire avait eu le loisir de lire madame de Sévigné, avec l’application qu’on est en droit d’exiger d’écrivains moins occupés qui parlent d’elle, il aurait vu que les préventions de cette femme illustre, préventions qui n’ont pas été jusqu’à méconnaître le mérite de Racine et à lui préférer Pradon, tenaient à un principe moral d’une nature fort supérieure aux préceptes du goût en littérature.
En son Shakspeare qui aime avec peu de sincérité et de loyauté ; qui, sous prétexte de mieux étudier la nature, se crée d’artificiels sentiments, M.
Dans un temps où tout le monde se croit propre à la politique, il ne serait pas mal d’aller regarder en lui quelles sont les qualités requises chez ceux que la nature a destinés à cette rare science.
La princesse qui arrivait en France à l’âge de onze ans, avait déjà reçu en Savoie une certaine éducation, surtout celle qui était nécessaire aux princes, et que la nature toute seule donne aux femmes, l’envie et le soin de plaire.
Mazarin l’avait mis en méfiance du surintendant, et, en même temps, il lui avait offert le remède : « Sire, je vous dois tout, avait-il dit à son lit de mort, mais je crois m’acquitter en quelque sorte avec Votre Majesté en lui donnant Colbert. » Depuis longtemps, Colbert avait l’œil sur les procédés de Fouquet, sur ses irrégularités et ses dilapidations ; il avait adressé à Mazarin des mémoires détaillés à ce sujet ; il allait continuer plus expressément le même rôle auprès de Louis XIV et par son ordre ; et, s’il était poussé dans cette chasse ardente qu’il faisait au surintendant par tous les aiguillons de son ambition personnelle, il ne l’était pas moins par tous les instincts de sa nature exacte et rigide : intérêt à part, il devait en vouloir au surintendant de toute l’indignation et de toute la haine que peut avoir contre un magicien plein de maléfices et de prestiges le génie de la bonne administration et de l’économie.
Rien d’ailleurs, dans les bases arrêtées, n’était de nature à porter préjudice à la France : tout était bien, sauf la forme à laquelle on avait manqué.
C’est proprement, de par la nature différente des esprits, la chose impossible.
Tous les pouvoirs de la société y sont tellement balancés par leur nature même, qu’aucun d’eux ne cherche à empiéter sur les prérogatives de l’autre.
Les Destinées, quand elles parurent, frappèrent l’attention par un accent qui fit réfléchir les critiques de nature humaine.
De cet organe gonflé de sang, de cet abîme bouillonnant de vibrations et de passions, d’une liberté, d’une impulsivité, d’une richesse tout instinctive, de cette source d’action, de virilité, de cette région où la nature fait entendre ses voix chargées d’orages ou d’espoirs, de ce tumultueux abîme des plus violentes énergies et des plus authentiques clameurs humaines, l’Église catholique est parvenue à faire un triste néant mystique, un lamentable mélange de bassesse et d’absurdité, un odieux et puéril symbole autour duquel viennent s’agenouiller tous les stériles, tous les faibles, tous les déserteurs de la vie.
On y parlait d’un sénateur qu’on espérait rendre favorable à tel parti en subventionnant son écurie de course ou son journal ; on escomptait le désistement d’un autre candidat qu’on croyait prêt à accepter une indemnité, etc… Après la publication d’un document de cette nature, toute compensation aux torts qu’il a causés apparaît comme tellement impossible, que, quoique cette lettre n’ait pas été vendue mais volée, ni Pierre**, ni H** ne tentèrent la moindre poursuite. […] Elle sera frappée aussi à l’aide de l’article 1382 si, outre le préjudice de nature commerciale dont vous vous plaignez, vous établissez l’existence d’un préjudice matériel ou moral ressortissant dudit article. […] Dans bien des cas, elle constitue une réponse, un don en paiement d’un autre don de même nature ; un prêté pour un rendu.
Durant son voyage, les membres du Conseil des finances lui détachèrent de Paris mille crocs-en-jambe et mille obstacles : il ne se rebuta de rien, prit à partie les officiers qu’il inspectait, de gré ou de force se fit représenter les comptes de l’année courante et des trois précédentes, examina de près toutes les prétendues dettes et les arrérages, les titres et obligations de tous genres, tondit à son tour sur le vif au profit du roi, et fit tant qu’il rassembla bien cinq cent mille écus : De toutes lesquelles sommes ainsi par vous recouvertes vous fîtes dresser quatre petits bordereaux pour vos quatre généralités, où étaient spécifiées par recettes et natures de deniers toutes les sommes par vous voiturées, et iceux signés par les huit receveurs généraux des deux années dernières comme leur ayant été mis ès mains par les receveurs particuliers ; lesquels bordereaux vous portâtes toujours sur vous, et vous vinrent bien à propos… Vous aviez un équipage de soixante et dix charrettes chargées, pour ce que vous aviez été contraint de prendre quantité de monnaie ; à la suite desquelles étaient les huit receveurs généraux, accompagnés d’un prévôt et de trente archers pour l’escorte.
Quoi qu’il en soit, en toute occasion, et lorsqu’il rencontre des opinions de cette nature chez quelques-uns des personnages de l’histoire, Mézeray les touche évidemment avec plaisir et les fait valoir d’un mot.
Chaque trait y est net, exact, mesuré, pris sur nature : ce sont des dessins excellents de justesse et de ressemblance.
. — Appliquez-vous toujours. » Ce sont les formes ordinaires de ce démonstrateur chrétien qui, de ces trois choses proposées à l’orateur ancien, instruire, plaire, émouvoir, ne songe qu’à la première, méprise la seconde, et est bien sûr d’arriver à la troisième par la force même de l’enseignement et la nature pénétrante de la vérité.
Partout vous faites voir d’heureuses applications de l’Écriture, de doctes citations des pères ; vous les possédez tous, et s’il y en a quelqu’un qui se présente à vous plus ordinairement que les autres (Tertullien sans doute), c’est par la sympathie des imaginations sublimes que la nature n’accorde qu’à ses favoris.
Grün, le plus considérable et le plus complet entre les plus récents, à faire quelques remarques encore sur cette nature multiforme et infinie du plus curieux et du plus amusé des philosophes.
C’était un bel esprit servi à souhait par la nature et favorisé par la fortune.
Ne questionnons pas trop La Rochefoucauld, ne lui en demandons pas plus ; jouissons de cette inconséquence, ou de ce qui semble tel, et tenons-lui compte de cet hommage muet, rendu à la nature humaine92.
Cependant elle ne manque pas d’esprit ; mais la nature lui a refusé la suite dans l’esprit.
La nature n’est point avare ; il est des âges heureux et féconds, favorisés par elle, et où il règne dans l’air des courants généraux de poésie.
Le maréchal de Noailles le lui insinue aussi respectueusement que possible : « Votre Majesté me paraît frappée, autant que je puis l’être, de la stérilité des grands hommes ; ce n’est cependant pas, Sire, que je ne sois persuadé qu’il n’y ait de l’étoffe pour en faire ; il s’agit d’aider à la nature, d’exciter le zèle et l’émulation et de fournir aux bons sujets les occasions de se développer.
Il se rapporte à l’année 1776 : nous en donnerons les parties principales ; de telles esquisses d’après nature dispensent de bien des imaginations et des songes plus conformes à la poésie qu’à la réalité, et elles viennent à propos pour rompre de temps en temps la légende toujours prête à empiéter sur l’histoire : « La reine est très-bien de figure, et quoiqu’elle ait pris assez d’embonpoint, il n’y a néanmoins pas encore d’excès.
C’est un fort honnête homme, et à qui il ne manquerait rien si la nature Pavait fait aussi agréable qu’il a envie de l’être.
Le procédé poétique de Jasmin, par cela même qu’il se rapproche de la nature et qu’il s’y retrempe directement, rappelle bien souvent celui des Grecs.
C’est que la nature capricieuse n’a pas donné à tout le monde de noirs cheveux bouclés, un nez d’une fine courbure, de longs yeux, une tête charmante et toujours jeune de roi sarrasin Il y en a qui sont infirmes et cacochymes ?
C’est du pathétique spontané, si rare au théâtre, la nature saisie sur le fait et dans son élan.
Les natures simples des gens du peuple, dans les moments de passion, le prouvent assez ; ils ont le mot juste et souvent le mot unique.
C’est assez en dire pour montrer qu’en droit comme en religion, comme en politique, comme en littérature et en grammaire même, Étienne Pasquier fut d’accord avec les instincts et les données de sa nature, et qu’il remplit toute sa vocation.