/ 3767
2527. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, par M. J. Zeller. Et, à ce propos, du discours sur l’histoire universelle. (suite.) »

Dans une analyse sincère de ce célèbre Discours de Bossuet, on est aujourd’hui entre deux écueils : ou bien l’on entre absolument dans la vue de l’auteur, on se place à son point de perspective historique surnaturelle, on y abonde avec lui, et l’on choque alors l’esprit de bon sens qui prévaut généralement dans l’histoire et qui a cause gagnée chez la plupart des lecteurs ; ou bien l’on résiste, au nom de ce bon sens, on s’arrête à chaque pas pour relever les hardiesses de crédulité, les intrépidités d’assertion sortant et se succédant d’un air de satisfaction et de triomphe, on se prend à discuter cette série d’explications miraculeuses acceptées sur parole, imposées avec autorité, avec pompe, et l’on se met par là en dehors du plan de l’auteur et des conditions du monument. […] « Qui peut mettre dans l’esprit des peuples la gloire, la patience dans les travaux, la grandeur de la nation et l’amour de la patrie, peut se vanter d’avoir trouvé la constitution d’État la plus propre à produire de grands hommes. […] Après avoir exposé à si grands traits la constitution et le génie des Romains, Bossuet revient comme en arrière et se met à énumérer une série des faits principaux depuis Romulus.

2528. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « La civilisation et la démocratie française. Deux conférences par M. Ch. Duveyrier »

Duveyrier, qui est un auteur dramatique des plus distingués, qui connaît la mise en scène et l’art du dialogue, qui a excellé à faire parler des personnages naïfs et originaux, ait su donnera ce qu’il lisait l’accent, le ton, la physionomie, et que dans un seul monologue il ait diversifié les rôles. […] Il sonne violemment ; le valet de chambre, que le cocher avait mis au courant dans l’office, accourt et veut naturellement s’excuser. […] Si Lanjuinais n’avait pas exigé le titre, ses gens auraient mis leur vanité à le lui donner. — Lemercier (Népomucène) passe pour un grand caractère, à trempe républicaine ou du moins d’une teinte des plus libérales : sa femme, Édon de son nom, était fille ou nièce du restaurateur bien connu dans la rue de l’Ancienne-Comédie.

2529. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand »

Il est permis d’en douter : c’eût été mettre Tantale à même du Pactole. […] À voir ce rôle si actif de M. de Talleyrand à l’Assemblée Constituante, le biographe moraliste est amené à se poser une question : le Talleyrand de cette époque, à cet âge de trente-cinq ou trente-six ans, dans toute l’activité et tout l’entrain de sa première ambition, était-il bien le même que celui qu’on a vu plus tard nonchalant, négligent à l’excès, ayant ses faiseurs, se contentant de donner à ce qu’il inspirait le tour et le ton, et à y mettre son cachet ? […] Il a été mis sous les yeux de la Convention au moment où elle daigna s’occuper de moi, et je le montrerai à quiconque désirera le voir.

2530. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens III) Henri Rochefort »

Trop de scrupule et de timidité ne serait point ici de mise. […] Il aime, pour lui-même et pour les siens, la vie large et facile, et son humeur généreuse lui a mis sur les bras des charges de toutes sortes. […] Il sait qu’il n’a rien à mettre à la place de ce qu’il veut renverser, et il s’en moque bien !

2531. (1900) L’état actuel de la critique littéraire française (article de La Nouvelle Revue) pp. 349-362

La compétition étant énorme en regard de l’exiguïté de ces articulets, la faveur d’être nommé est vite mise aux enchères ; les directeurs ont compris, devant la foule des livres bâclés par vanité, qu’ils pouvaient affermer aussi cette colonne de leurs gazettes en prélevant un impôt sur la soif de vedette des gens qui écrivent. […] La critique impressionniste est le commencent de la fin pour la critique : et il n’y a que les médiocres, intermédiaires entre la réclame payée et les lettrés sérieux, qui se croient investis d’un pouvoir, tapagent dans des syndicats et des cercles, parlent très haut de leurs droits, et mettent à prix leurs indulgences. […] Ils mettent en coupe réglée les auteurs et bourdonnent à l’envi autour de la noble littérature française.

2532. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIX. Cause et loi essentielles des variations du gout littéraire » pp. 484-497

Non seulement le burlesque est renvoyé à la province, mais on essaie de mettre partout noblesse et solennité  ; on ne pardonne pas le sac de Scapin à l’auteur du Misanthrope ; et si Boileau s’amuse, comme Scarron, à écrire une parodie d’épopée, il compose un poème héroï-comique, où, par un procédé qui est juste l’inverse de celui de son devancier, il pare et drape d’un style pompeux une mesquine querelle de chanoines. […] En notre siècle le romantisme a été une débauche d’imagination ; l’école du bon sens qui se lève contre lui met le holà aux chevauchées de la fantaisie. […] Mais en même temps le pessimisme, qui teignait de noir les romans de Zola et de ses adeptes, leur souci du milieu où vivent les personnages qu’ils mettent en scène, leur effort pour élargir la langue littéraire jusqu’aux limites de la langue parlée, leur style même souvent si chatoyant de couleurs et de métaphores, tout cela permet de dire : C’est une queue du romantisme.

2533. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre XI. Quelques philosophes »

Nietzsche, ayant trouvé dans l’hégélianisme et le darwinisme les bornes de sa puissance destructive, se met à reconstruire. […] Je négligerai aussi quelques laideurs et quelques gestes déplaisants : la façon un peu ridicule dont l’auteur se met parfois en scène et ce qu’il y a de trop personnel, d’un peu bassement pratique, dans certaines de ses inquiétudes. […] « Le style, dit largement Buffon, n’est que l’ordre et le mouvement qu’on met dans ses pensées. » L’écriture est chose plus petite, plus multiple, uniquement curieuse du détail.

2534. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Les romans de M. Edm. de Goncourt » pp. 158-183

Par son réalisme exact, par ses notes mises sous les yeux du public, par ses déductions avec preuves à l’appui, et ses caractères établis sur leurs actes, M. de Goncourt a pu accomplir pour des milieux et une époque restreints, des livres d’enquête sociale qui flottent entre l’histoire, et le recueil de notes psychologiques. […] Dans le visage d’un clown entouré de clarté, l’enfarinement met la netteté, la régularité et le découpage presque cassant d’un visage de pierre. […] Enfin il inventera ces étranges phrases disloquées, enveloppantes comme des draperies mouillées, mouvantes et plastiques qui semblent s’infléchir dans le tortueux d’une route : « Enfin l’omnibus, déchargé de ses voyageurs, prenait une ruelle tournante, dont la courbe, semblable à celle d’un ancien chemin de ronde, contournait le parapet couvert de neige d’un petit canal gelé » ; des phrases compréhensives donnant à la fois un fait particulier et une idée générale, des phrases peinant à noter ce que la langue française ne peut rendre et devenant obscures à force de torturer les mots et de raffiner sur la sensation : Ils savouraient la volupté paresseuse qui, la nuit, envahit un couple d’amants dans un coupé étroit, l’émotion tendre et insinuante, allant de l’un à l’autre, l’espèce de moelleuse pénétration magnétique de leurs deux corps, de leurs deux esprits, et cela, dans un recueillement alangui et au milieu de ce tiède contact qui met de la robe et de la chaleur de la femme dans les jambes de l’homme.

2535. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — II. L’histoire de la philosophie au xixe  siècle — Chapitre I : Rapports de cette science avec l’histoire »

Telle science obtient tout à coup la faveur publique : on s’en occupe avec enthousiasme et ferveur, le public s’y met de moitié avec les savants, et sa sympathie est une sorte de collaboration ; mais bientôt il se refroidit et il se lasse : de nouveaux objets l’attirent, de nouveaux talents sollicitent son attention, et il va porter ailleurs le bruyant tribut de son admiration superficielle. […] C’est à la philosophie de le décider ; mais, cette question mise à part, les systèmes subsistent à titre de faits où se manifestent bien plus que dans l’histoire extérieure, et même que dans l’histoire des lettres et des arts, les lois du développement intellectuel de l’humanité. […] Les Tennemann, les Schleiermacher, les Brandis, les Ritter, les Zeller, les Trendelenbourg, ont mis l’histoire de la philosophie, surtout de la philosophie ancienne, au niveau des parties les plus avancées des sciences historiques et philologiques ; mais la France a eu aussi sa gloire dans ce grand mouvement : elle a fait aussi des efforts pour rivaliser avec l’Allemagne, ou pour lui disputer le premier rang.

2536. (1936) Réflexions sur la littérature « 6. Cristallisations » pp. 60-71

Quand il veut faire travailler à Pauline La logique de Condillac, lui faire apprendre par coeur L’art poétique de Boileau, dont il dira ensuite pis que pendre, ses conseils partent évidemment d’un fonds moins important, moins vraiment stendhalien que lorsqu’il veut lui faire prendre, en 1805, l’habitude d’analyser les personnes qui l’entourent (« l’étude est désagréable, mais c’est en disséquant des malades que le médecin apprend à sauver cette beauté touchante ») ou lorsqu’il contracte dans ses premières relations montaines l’aptitude à traduire par une algèbre psychologique les valeurs les unes dans les autres (" notre regard d’aigle voit, dans un butor de Paris, de combien de degrés il aurait été plus butor en province, et, dans un esprit de province, de combien de degrés il vaudrait mieux à Paris. " ) c’est à cette époque que Stendhal s’accoutume (héritier ici de Montesquieu qui ne paraît point, je crois, dans ses lectures) à rattacher instantanément un trait sentimental à un état social, à mettre en rapport par une vue rapide le système politique d’un pays avec ses façons de sentir. […] J’ai lu le raisonnement suivant de Mme Aurel, que je mets en syllogisme pour être plus court : « il n’y a rien de plus beau qu’une belle lettre d’amour. — Les plus belles lettres d’amour sont écrites par des femmes. — Donc le jour où les femmes feront imprimer des lettres d’amour de 300 pages in-18 sous couverture jaune-paille, elles auront écrit les plus beaux livres du monde. » Attendons. […] Mauclair devient peut-être obscure et contestable dès qu’il veut y mettre une réalité positive.

2537. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XIV. »

Celui qui a son œuvre, à cette œuvre s’applique ; il s’y met tout entier ; il y délecte son esprit et son âme. […] Il mettait à rendre le génie du poëte, non seulement tout son art, mais sa propre douleur. […] Cet ami de César, d’abord allié d’Antoine, puis accueilli par Octave et, dans sa retraite littéraire, resté du moins impartial envers le parti qu’il avait combattu, ne pouvait mettre sur la scène ni ces grands caractères romains qu’il honora dans son histoire, ni les héros plus anciens qui les auraient rappelés.

2538. (1911) Études pp. 9-261

Il met toute sa précaution à les soulever. […] Il semble qu’elle mette de l’amour à s’enfermer en elle-même. […] À ses défaites il met une lenteur infinie et se répand en extases renonçantes. […] Elle s’est mise en marche à travers les steppes. […] Imploration décidée des chœurs : à supplier ils mettent je ne sais quelle alacrité.

2539. (1895) De l’idée de loi naturelle dans la science et la philosophie contemporaines pp. 5-143

L’esprit, toutefois, n’est pas mis pour cela sous la dépendance du corps. […] Un phénomène met en saillie cette différence, c’est la mort. […] Le progrès même de ces recherches vint les mettre en péril. […] Les qualités ne peuvent pas se mettre en dehors les unes des autres comme des choses externes. […] Il représente l’instrument sur lequel s’exerce immédiatement la liberté et qui la met en relation avec la nature.

2540. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre III. Variétés vives de la parole intérieure »

Je serai seul à mourir d’ennui, comme l’an passé… » Je m’éloignai rapidement, et je me mis à penser à autre chose. […] » Ce mot me fit ressauter… Je me mis à courir vers la Seine… Je sauvai l’homme, sans difficulté… « Qu’est-ce qui m’a fait faire ma belle action ? […] Et, relevant la tête, il se trouva face à face avec un passant qui se mit à rire de cette exclamation. […] A l’instant, j’ai changé de visage et l’esprit tendu, je me suis mis à rechercher si les enfants utilisaient d’habitude dans tel ou tel genre de jeu une ritournelle semblable ; non aucun souvenir ne me revenait d’avoir entendu cela quelque part. […] rappel : la prosopopée est une figure de rhétorique consistant à mettre en scène les absents, les morts, les êtres surnaturels ou même les êtres inanimés, et les faire agir, parler, répondre.

2541. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « La religion dynamique »

Ils savouraient le miel que la nature avait mis sur le bord ; ils avalaient le reste par surcroît, sans l’avoir vu. […] Ils ont été les premiers à mettre leurs disciples en garde contre les visions qui pouvaient être purement hallucinatoires. […] Cette nature, le philosophe aurait vite fait de la définir s’il voulait mettre le mysticisme en formule. […] Qu’on se mette d’accord sur ce point, et l’on pourra sans inconvénient parler de la toute-puissance divine. […] Ils mettront du temps à comprendre que leur thèse avait été extraite telle quelle du langage courant.

2542. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Appendice » pp. 511-516

” — La seule lecture de ce paragraphe si précis a mis fin à la discussion, et la commission, à l’unanimité, n’a eu qu’à passer outre. […] Quand la société était en péril continuel de verser, il était tout naturel que l’autorité mît fortement la main du côté opposé.

2543. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXVIII » pp. 266-276

Thiers corrige et recorrige, il y met tous ses soins ; il vient de revenir à Paris pour suivre l’impression de plus près. […] L'éclectisme, qui touche à tout, n’a pas mis jusqu’ici le doigt sur le grand ressort de rien. — Quant à ce que pourrait objecter d’autre part une philosophie originale et convaincue contre cette manière de prendre un peu à un siècle et un peu à un autre pour se composer une doctrine raisonnable, nous ne nous en chargeons pas et nous laissons ce soin aux doctes Allemands de Berlin ou de Kœnigsberg, et aux professeurs comme Rosenkranz, qui sont en train de s’en acquitter à merveille.

2544. (1874) Premiers lundis. Tome I « Ferdinand Denis »

L’idée qui a présidé à l’ouvrage est celle-ci ; La poésie tire son premier charme des images qu’elle emprunte à la nature ; dans nos tièdes contrées, au sein d’une civilisation toute-puissante, cette nature a peine à se faire jour et n’est pas à l’aise pour se déployer : là seulement où un climat de feu la féconde sans relâche, et où le voisinage de l’homme ne la met point à la gêne, pleine de vie et de jeunesse, elle éclate dans toute sa solennité. C’est donc rendre service aux poètes, c’est ouvrir de nouvelles sources à leurs inspirations, que de leur mettre sous les yeux quelques scènes des tropiques envisagées sous cet aspect, et de leur montrer en même temps comme exemple la couleur particulière qu’elles répandent sur la poésie des indigènes.

2545. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section II. Des sentiments qui sont l’intermédiaire entre les passions, et les ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre II. De l’amitié. »

si l’on n’est pas content de l’activité de son ami, si l’on croit avoir à s’en plaindre, à la perte de l’objet de ses désirs viendra bientôt se joindre le chagrin plus amer de douter du degré d’intérêt que votre ami mettait à vous seconder. […] Dès qu’un homme et une femme ne sont point attachés ailleurs par l’amour, ils cherchent dans leur amitié tout le dévouement de ce sentiment, et il y a une sorte d’exigence naturelle, entre deux personnes d’un sexe différent, qui fait demander par degrés, et sans s’en apercevoir, ce que la passion seule peut donner, quelque éloigné que l’un et l’autre soit de la ressentir ; on se soumet d’avance et sans peine à la préférence que son ami accorde à sa maîtresse ; mais on ne s’accoutume pas à voir les bornes, que la nature même de son sentiment met aux preuves de son amitié ; on croit donner plus qu’on ne reçoit, par cela même qu’on est plus frappé de l’un que de l’autre, et l’égalité est aussi difficile à établir sous ce rapport que sous tous les autres ; cependant elle est le but où tendent ceux qui se livrent à ce lien.

2546. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre III. De l’étude. »

La sage modération des philosophes studieux dépend, peut-être, du peu de temps qu’ils consacrent à rêver aux événements de leur vie, autant que du courage qu’ils mettent à les supporter. […] Le pur amour de l’étude ne met jamais en relation avec la volonté des hommes, quel genre de douleur pourrait-il donc faire éprouver ?

2547. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XII. Lo Ipocrito et Le Tartuffe » pp. 209-224

Mettons immédiatement en regard de ce qui eut lieu pour Dom Juan, ce qui se passa pour Le Tartuffe, et nous aboutirons, dans le rapprochement qui s’offre à nous, à des résultats non moins curieux et non moins frappants. […] Il y met une certaine complaisance, sans se laisser oublier, bien entendu.

2548. (1890) L’avenir de la science « XI »

Habile à décomposer et à mettre à nu les ressorts secrets du langage, elle est impuissante à reconstruire l’ensemble qu’elle a détruit si elle ne recourt pour cela à l’ancien système et ne puise dans le commerce avec l’antiquité l’esprit d’ensemble et d’organisation savante. […] L’éducation philologique ne saurait consister à apprendre la langue moderne, l’éducation morale et politique, à se nourrir exclusivement des idées et des institutions actuelles ; il faut remonter à la source et se mettre d’abord sur la voie du passé, pour arriver par la même route que l’humanité à la pleine intelligence du présent.

2549. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre II. Recherche des vérités générales » pp. 113-119

On peut, si l’on veut, mettre en regard les œuvres d’une même époque, ou d’une même province, ou d’une même école. […] Suit-on, durant quelques siècles le développement du vers français de douze syllabes ; on remarque facilement que chez les poètes de la Pléiade il est souple, libre, aisé, qu’il se permet beaucoup d’enjambements et de rejets en même temps qu’il est richement rime ; qu’à partir de Malherbe et de Boileau, surtout au xviiie  siècle, une césure presque immuable le divise en deux parties égales, tandis que la rime devient souvent pauvre et banale ; que les romantiques, en disloquant, comme ils disaient, « ce grand niais d’alexandrin », rendent à la rime une plénitude de sonorité dont elle avait perdu l’habitude ; que Musset semble, il est vrai, faire exception en lançant aux partisans de la consonne d’appui cette moqueuse profession de foi : C’est un bon clou de plus qu’on met à la pensée ; mais qu’aussi ses vers, sauf dans ses poésies de jeunesse où il s’abandonne à sa fantaisie gamine, sont restés, bien plus que ceux de Victor Hugo ou de Sainte-Beuve, fidèles à la coupe classique.

2550. (1898) Le vers libre (préface de L’Archipel en fleurs) pp. 7-20

le jour où ce gamin génial de Verlaine mit un sonnet la tête en bas ! […] Tu les repousseras lors même qu’ils mettraient du génie à exalter le Dogme et l’ivresse mystique, car tu n’as pas besoin de Dogme, et ton mysticisme, tu le trouveras en toi, sans le secours des Images et des Bréviaires.

2551. (1913) Le bovarysme « Quatrième partie : Le Réel — V »

V À s’efforcer en quelques traits de marquer le centre du point de vue que toutes les considérations précédentes avaient pour objet de créer, on pense devoir mettre en évidence ce fait : l’incompatibilité absolue qu’il a fallu constater — entre l’existence d’une vérité objective fixant un terme au mouvement, — et une réalité située dans le devenir et dont l’essence est le mouvement. […] Que l’on mette en cause une conception de l’ordre moral, politique, social ou religieux, il ne s’agit plus de la comparer avec un modèle idéologique d’une valeur présumée absolue, dont on sait maintenant l’origine arbitraire, avec une idée divinisée de vérité ou de justice, dont on connaît qu’elle n’exprime autre chose qu’un état de sensibilité particulier et propre à un temps donné.

2552. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre II. Qu’il y a trois styles principaux dans l’Écriture. »

« Je dormirais dans le silence, et je reposerais dans mon sommeil93. » Cette expression, je reposerais dans mon sommeil, est une chose frappante ; mettez le sommeil, tout disparaît. […] le Seigneur est avec vous. » Marie s’en va dans les montagnes de Judée  ; elle rencontre Élisabeth, et l’enfant que celle-ci portait dans son sein tressaille à la voix de la vierge qui devait mettre au jour le Sauveur du monde.

2553. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Mes pensées bizarres sur le dessin » pp. 11-18

J’ai connu un jeune homme plein de goût qui avant de jeter le moindre trait sur sa toile, se mettait à genoux et disait, Mon Dieu, délivrez-moi du modèle. […] Que je vous plains, mes amis, s’il faut qu’un jour vous mettiez à la place de toutes les faussetés que vous avez apprises, la simplicité et la vérité de le Sueur ; et il le faudra bien si vous voulez être quelque chose.

2554. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 29, qu’il est des païs où les ouvrages sont plûtôt apprétiez à leur valeur que dans d’autres » pp. 395-408

Comme il fallut alors que les chartreux de Paris enfermassent les tableaux de Le Sueur pour les mettre à couvert des outrages que leur faisoient quelques éleves de Le Brun, il a fallu que les chartreux de Rome ne laissassent plus ouverte à tous venans la gallerie où les estampes des peintres françois sont exposées. […] Concevons-nous aujourd’hui qu’on ait mis durant un temps Monsieur Mignard à côté de Monsieur Le Brun ?

2555. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XVI. Mme de Saman »

Les femmes n’ont désappris la pudeur et la rougeur sainte, elles n’ont perdu les brûlantes beautés de la honte que parce qu’elles ont appris autre chose… Ces envieuses de l’homme ont mis, comme elles mettent un bonnet, ses vices avec ses sciences.

2556. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Philippe II »

Or, c’est justement l’étude de cette grande chose qui plane sur toute la vie de Philippe II et qui le met à part, dans l’Histoire, lui et le XVIe siècle, c’est cette grande chose qui se trouve oubliée dans le livre de Forneron, où, excepté cette grande chose, il a tout vu. […] Henri IV n’a pas le fanatisme religieux qui fut la plus honorable passion du XVIe siècle, et pour cette raison, qui n’est pas la seule, du reste, mais qui est la plus puissante, il est peut-être la seule figure de son histoire qui soit entièrement sympathique à Forneron, l’écrivain politique de ce temps, qui, au temps de Henri IV, se serait certainement rangé dans le parti des politiques, qui mirent fin à la guerre civile et tirèrent de la vieille Constitution de la monarchie catholique, qui avait été la monarchie française, une monarchie d’un autre ordre, — la monarchie des temps modernes.

2557. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Napoléon »

En effet, qu’a-t-il mis d’âme, de talent, de style, de son moi enfin, dans cette grande histoire, accablante pour la médiocrité ? […] Mettre le trait d’union qui conserve entre l’ancienne France monarchique, brisée par la Révolution, et la France moderne, qui mourait si elle ne redevenait pas une monarchie ; ôter cette proie à la Révolution, retrouvée sans cesse aux pieds de son œuvre pendant qu’il relevait et qui lui gêna tant de fois la main, quoiqu’il l’eût puissante, telle fut l’entreprise de Napoléon.

2558. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Histoire des ducs de Normandie avant la conquête de l’Angleterre »

Les individualités assez fières pour se mettre à l’écart de leur temps et se consacrer vaillamment à un travail qui n’importe qu’à quelques esprits d’un ordre élevé sont des exceptions qui, chaque jour, deviennent plus rares, et l’Histoire des ducs de Normandie n’en a pas révélé une de plus. […] Henri Martin a mis une préface fort bienveillante à la tête de l’ouvrage en question.

2559. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Lettres portugaises » pp. 41-51

On les lut comme on lisait celles de madame de Sévigné, — comme on lut aussi ces autres Petites Lettres de Louis Montalte, ce pseudonyme bientôt mis en pièces par le puissant nom de Pascal, qui passa brusquement à travers ! […] Et nous disons romances, et non pas romans ; car le romancier le plus vulgaire, avec ce sujet d’une religieuse séduite et abandonnée, apostate de Dieu par amour d’un homme, aurait mis certainement plus de sang du cœur dans les larmes qu’il eût fait verser à sa chimère qu’il n’en passa jamais sur les joues de cette religieuse, qu’on nous donne comme une réalité.

2560. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Alexandre Dumas fils » pp. 281-291

La question de la bâtardise, la possession d’état de l’enfant naturel, la position que doit faire la législation à la fille-mère, toutes ces questions sont touchées dans L’Affaire Clémenceau avec une curiosité enfantino-frémissante ; et, quoiqu’elles n’y soient pas résolues, quoiqu’elles n’y soient agitées que comme l’enfant agite la boîte où il a mis des scarabées et qu’il colle contre son oreille pour les entendre qui remuent, on sent que la partie de son livre que Dumas fils estime davantage, c’est le remuement de ces questions… Du reste, ce côté inattendu et révélé dans le nouveau roman d’Alexandre Dumas fils ne l’a pas empêché cependant de rester parfaitement le fils de son père, même à propos de cette question du bâtard qui s’étend sous les pieds de tout dans son livre, et qui en est comme le sous-sol. […] Il se fait enfin une tête de Jean-Jacques à mettre dans un cerisier pour épouvanter les oiseaux !

2561. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Avellaneda »

» s’il n’avait été enfin qu’un faiseur de pamphlets vulgaires, est-ce que le mystère qui l’enveloppe eût tourmenté longtemps l’imagination excitée qui a besoin de mettre une suscription à ses hommages ? […] Déjà le Sancho est épaissi dans l’ouvrage d’Avellaneda ; cette malice narquoise qui pétille autour de la bouche lippue et gourmande du jovial écuyer, ce rayon de finesse et de sensibilité que Cervantes a mis dans son admirable paysan et qui en fait un homme et non une brute, non une outre vivante, un ventre de cruche comme dans Avellaneda, tout cela n’est plus.

2562. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XI. Des éloges funèbres sous les empereurs, et de quelques éloges de particuliers. »

À ce mot de la sagesse de Claude, tous les Romains se mirent à rire, et l’on oublia pour un moment que l’orateur était le maître du monde. […] Quoique guerrier il fut humain, et sur le trône du monde il fut modeste ; malgré ses vertus, il fut assassiné ; Sévère ne prononça son éloge qu’après avoir terminé les guerres civiles qui le mirent sur le trône.

2563. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XVII. De l’éloquence au temps de Dioclétien. Des orateurs des Gaules. Panégyriques en l’honneur de Maximien et de Constance Chlore. »

C’est dans ces moments-là que les grêles ravagent les moissons, que la terre s’entrouvre, que les villes sont englouties ; fléaux qui désolent le monde, non par la volonté des dieux, mais parce qu’alors leurs regards ne tombent point sur la terre : voilà, grand empereur, ce qui nous est arrivé, lorsque vous avez cessé de veiller sur le monde et sur nous. » Ensuite on prouve à Maximien que, malgré son grand âge, il ne pouvait sans injustice quitter le fardeau de l’empire ; « mais les dieux l’ont permis, lui dit l’orateur, parce que la fortune, qui n’osait rien changer tant que vous étiez sur le trône, désirait pourtant mettre un peu de variété dans le cours de l’univers ». […] Nous y apprenons que ce prince, en abordant, pour se réduire à la nécessité de vaincre, fit mettre le feu à sa flotte, comme avait fait un roi de Syracuse, en portant la guerre à Carthage ; comme fit depuis Cortès, en abordant au Mexique.

2564. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre V. Du gouvernement de la famille, ou économie, dans les âges poétiques » pp. 174-185

Ce respect du foyer domestique était commun aux barbares du moyen âge, puisque même au temps de Boccace, qui nous l’atteste dans sa Généalogie des dieux, c’était l’usage à Florence, qu’au commencement de chaque année, le père de famille assis à son foyer près d’un tronc d’arbre auquel il mettait le feu, jetait de l’encens et versait du vin dans la flamme ; usage encore observé, par le bas peuple de Naples, le soir de la vigile de Noël. […] Il en fut précisément de même dans la seconde barbarie [dans celle du moyen âge] ; quarante héros normands, qui revenaient de la terre sainte, mirent en fuite une armée de Sarrasins qui tenaient Salerne assiégée.

2565. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre VI. Milton. » pp. 411-519

Ceux-là, par confiance et par sociabilité, avec un instinct d’artiste et une subite compréhension imitative, prennent involontairement le ton et la disposition des hommes et des choses qui les environnent, et leur dedans se met tout de suite en équilibre avec le dehors. […] En même temps l’homme, par habitude, s’est mis en défense ; l’attitude militante lui est naturelle, et il se tient debout, affermi dans l’orgueil de son courage et dans l’ancienneté de sa réflexion. […] Pour mettre en scène le surnaturel, il ne faut point rester dans son assiette ordinaire ; vous avez l’air de ne point croire, si vous y restez. […] De tous les personnages que l’homme puisse mettre en scène, Dieu est le plus beau. […] Bien armé, le rebelle se met en marche avec ses piquiers et ses artilleurs pour attaquer la place forte de Dieu524.

2566. (1896) Le livre des masques

Et les gens assemblés dans la grande salle sous la petite lampe se mettent à sourire et ils vont espérer. […] L’essentiel est d’avoir un jardin, d’y mettre la bêche et d’y semer des graines les fleurs qui pousseront, œillets, violettes ou pivoines, auront leur prix et leur charme, selon l’heure ou selon la saison. […] « Ils mettent longtemps à mourir, et ils gardent les morts debout jusqu’à la chute en poussière. […] Huysmans un jour se trouva converti — au mysticisme, et écrivit En Route, ce livre pareil à une statue de pierre qui tout à coup se mettrait à pleurer. […] Moréas se mit à l’école des vieux poètes et fréquenta, jusqu’à Jacot de Forest et jusqu’à Benoît de Sainte-Maure.

2567. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre IV. Des Livres nécessaires pour l’étude de l’Histoire. » pp. 87-211

Ce recueil est digne d’être mis à la suite des Révolutions de l’Abbé de Vertot. […] Vous pouvez mettre aussi au rang des ouvrages bien faits l’histoire de l’Empereur Théodose le Grand, par M. […] Je citerai les principaux sans m’astreindre à mettre des liaisons à des matieres si disparates. […] Paris 1662. deux vol. bons, mais ennuyeux avant que l’Abbé de l’Ecluse les eût mis en françois élégant. […] Ils mettent la vérité de l’histoire dans le plus grand jour.

2568. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre I. Principe des mœurs sous l’Ancien Régime. »

Des valets de garde-robe apportent le reste de l’habillement ; le grand maître de garde-robe passe au roi la veste et le justaucorps, lui attache le cordon bleu, lui agrafe l’épée ; puis un valet préposé aux cravates en apporte plusieurs dans une corbeille, et le maître de garde-robe met au roi celle que le roi choisit. […] Pourtant l’ambassadeur Mercy181, homme fort appliqué, semble trouver que cela est suffisant ; du moins il juge que Louis XVI « a beaucoup d’ordre, qu’il ne perd pas de temps aux choses inutiles » ; en effet son prédécesseur travaillait beaucoup moins, à peine une heure par jour  Ainsi les trois quarts de son temps sont livrés à la parade  Le même cortège est autour de lui, au botté, au débotté, quand il s’habille de nouveau pour monter à cheval, quand il rentre pour prendre l’habit de soirée, quand il revient dans sa chambre pour se mettre au lit […] Cinq fois par semaine, chez le duc de Choiseul, à dix heures du soir, le maître d’hôtel vient jeter un coup d’œil dans les salons, dans l’immense galerie pleine, et, au juger, fait mettre cinquante, soixante, quatre-vingts couverts197 ; bientôt, sur cet exemple, toutes les riches maisons se font gloire de tenir table ouverte à tous venants  Naturellement, les parvenus, les financiers qui achètent ou se donnent un nom de terre, tous ces traitants et fils de traitants qui, depuis Law, frayent avec la noblesse, copient ses façons. […] Il vient de « compléter son domestique », et aurait voulu qu’elle prît une seconde femme de chambre ; mais elle a tenu bon ; pourtant, dans cette maison écourtée, « les officiers, les femmes et les valets se montent au nombre de seize… Lorsque M. d’Epinay est levé, son valet se met en devoir de l’accommoder. […] Ayant trouvé à son goût un mets qu’on lui avait servi, elle y revint, et alors elle parcourut des yeux le cercle devant elle… et dit : « M. de Lowendal ? 

2569. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre I. De l’intensité des états psychologiques »

Elle consiste d’abord à se mettre par la pensée à la place des autres, à souffrir de leur souffrance. […] Nous associons alors à une certaine qualité de l’effet l’idée d’une certaine quantité de la cause ; et, finalement, comme il arrive pour toute perception acquise, nous mettons l’idée dans la sensation, la quantité de la cause dans la qualité de l’effet. […] Le résultat de cet examen ne nous paraît pas douteux : on s’apercevra bien vite que la grandeur de la sensation représentative tient à ce qu’on mettait la cause dans l’effet, et l’intensité de l’élément affectif à ce qu’on introduisait dans la sensation les mouvements de réaction plus ou moins importants qui continuent l’excitation extérieure. […] Les variations d’éclat d’une couleur donnée — abstraction faite des sensations affectives dont il a été parlé plus haut — se réduiraient donc à des changements qualitatifs, si nous n’avions pas contracté l’habitude de mettre la cause dans l’effet, et de substituer à notre impression naïve ce que l’expérience et la science nous apprennent. […] Et plus nos connaissances s’accroissent, plus nous apercevons l’extensif derrière l’intensif et la quantité derrière la qualité, plus aussi nous tendons à mettre le premier terme dans le second, et à traiter nos sensations comme des grandeurs.

2570. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. BALLANCHE. » pp. 1-51

Ballanche se mit à se construire et à s’ordonner d’elle-même, comme les philosophies antiques, comme les murs des Thèbes sacrées. — Mais tout ceci mérite d’être repris avec détail. […] philosophes ou poëtes, penseurs ou chantres, ne vous mettez pas les uns au-dessus des autres, ne vous exceptez pas, ne vous vantez pas ! […] » Un hasard heureux a mis entre nos mains une petite relation d’un pèlerinage au Mont-Cindre près Lyon, relation écrite par une jeune Languedocienne de seize ans. […] Le poëte ne s’est inquiété que d’évoquer l’esprit général de ces temps, de le faire circuler abondamment çà et là ; quant aux détails, il n’a pas cherché à les mettre en rapport exact avec les débris qui se sont conservés. […] Il lut les Neuf Livres de Coëssin dès 1809, et dans un voyage qu’il fit à Paris, il visita ce prophète d’une époque pontificale ; mais l’esprit envahissant du sectaire le mit d’abord sur ses gardes : M.

2571. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre troisième. La connaissance de l’esprit — Chapitre premier. La connaissance de l’esprit » pp. 199-245

Mais on lui a enlevé ses papiers et ses parchemins, et on a mis à la place un faux extrait de naissance qui la fait roturière et pauvre69. — Une autre femme placée dans le service de M.  […] Laissez-moi ; il pose très bien maintenant, et, si vous dites un mot, il s’en ira. » Il est clair que Blake imputait à Richard III ses théories et ses rêves ; son personnage était un écho qui lui renvoyait sa propre pensée. — Une folle jouait incessamment à pair impair avec un personnage absent qu’elle croyait le préfet de police ; avant de jouer, elle regardait toujours les pièces de monnaie qu’elle mettait dans sa main et savait ainsi leur nombre ; partant, le préfet devinait toujours mal et ne manquait jamais de perdre ; plus tard, elle négligea son examen préalable ; alors le préfet tantôt perdait et tantôt gagnait. — Il est clair que, dans la première période, elle fabriquait elle-même, sans s’en douter, l’erreur qu’elle prêtait au préfet. […] Là aussi, le point du départ de l’erreur est dans un procédé d’esprit bien connu, celui du romancier ou de l’auteur qui se met à la place de ses personnages, épouse leurs passions, éprouve leurs émotions. — Nulle part on ne voit si nettement l’opération que dans l’hypnotisme ; l’attention du patient, limitée et concentrée, ne porte alors que sur une suite d’idées ; celle-ci se déroule seule ; toutes les autres sont engourdies et, pour un temps, incapables de renaître ; partant, les souvenirs ordinaires manquent et n’exercent plus de répression ; l’illusion qui, dans l’auteur et le romancier, se trouve défaite à chaque instant, n’est plus enrayée et poursuit son cours75. […] Il faut donc une grande accumulation de forces pour lui arracher à tort quelque fragment qui lui appartient ou pour insérer en lui quelque pièce qui lui est étrangère. — En effet, ces transpositions sont rares ; on les rencontre surtout lorsqu’un changement organique, comme le sommeil ou l’hypnotisme, relâche les mailles du réseau ; lorsqu’une passion invétérée, dominatrice, fortifiée par des hallucinations psychiques ou sensorielles, finit par user un fil du tissu, lui substituer un autre fil, et, gagnant de proche en proche, mettre une toile factice à la place de la toile naturelle. […] L’esprit ressemble à un métier ; chaque événement est une secousse qui le met en branle, et l’étoffe qui finit par en sortir transcrit, par sa structure, l’ordre et l’espèce des chocs que la machine a reçus.

2572. (1856) Cours familier de littérature. II « VIIIe entretien » pp. 87-159

Nous l’avons dit dans ces vers qui nous ont été assez reprochés, et que nous ne désavouons pas, dans un temps où une mesquine politique voulait nous agacer contre l’Allemagne et nous ameuter contre l’Angleterre : Et pourquoi nous haïr, et mettre entre les races Ces bornes de nos cœurs qu’abhorre l’œil de Dieu ? […] C’est le cachet de la France mis sur le style de son plus grand siècle. […] Ce que nous aimons le mieux des grands écrivains, ce ne sont pas leurs ouvrages, c’est eux-mêmes ; les œuvres où ils ont mis le plus d’eux-mêmes sont donc pour nous les meilleures. […] « Et vous, ne viendrez-vous pas à ce triste monument, vous, dis-je, qu’il a bien voulu mettre au rang de ses amis ? […] Vous mettrez fin à tous ces discours.

2573. (1857) Cours familier de littérature. III « XIIIe entretien. Racine. — Athalie » pp. 5-80

Mettez de l’eau dans les écuelles au-dessus desquelles ils sont rangés afin que les rats ne puissent les ronger. […] À la vérité, ce n’est pas leur coutume de laisser rien imprimer pour eux qu’ils n’y mettent quelque chose du leur. […] Ainsi, quand vous voyez M. le Duc passer souvent des heures entières avec moi, vous seriez étonné, si vous étiez présent, de voir que souvent il en sort sans que j’aie dit quatre paroles : mais peu à peu je le mets en humeur de causer, et il sort de chez moi encore plus satisfait de lui que de moi. » Mme de Maintenon avait triomphé de sa rivale ; Mme de Montespan était reléguée loin de la cour, dans un de ces splendides oublis qui sont le supplice des favorites-mères. […] Un mariage secret mit en repos la conscience agitée du roi. […] Dans un lieu séparé de profanes témoins Je mets à les former mon étude et mes soins ; Et c’est là que, fuyant l’orgueil du diadème, Lasse de vains honneurs et me cherchant moi-même, Aux pieds de l’Éternel je viens m’humilier, Et goûter le plaisir de me faire oublier.

2574. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre premier. Le Moyen Âge (842-1498) » pp. 1-39

Entendez par là qu’en aucun temps l’écrivain n’a moins mis de sa personne dans son œuvre. […] On prête aux Roland, aux Guillaume, aux Renaud, des vertus qui excèdent la mesure de l’humanité ; on leur attribue des exploits dignes de leurs vertus ; on arme l’un de sa « Durandal », on met l’autre à cheval sur « Bayard ». […] Rien de plus prosaïque ni qu’il y ait moins de raisons de mettre en vers ! […] Comment leur origine explique leur succès par leur nouveauté. — Longue influence des Romans de la Table-Ronde ; — leur diffusion à l’étranger ; — la compilation de Rusticien de Pise, 1270 ; — traductions, continuations, imitations italiennes, allemandes, néerlandaises, anglaises, espagnoles et portugaises. — Le Parsifal de Wolfram d’Eschenbach, et Tristan et Iseult de Gottfried de Strasbourg. — Pénétration réciproque du Cycle d’Arthur et du Cycle de la Croisade. — On met en prose les plus anciens Romans de la Table-Ronde ; — on en compose directement en prose, tels que Merlin, le Grand Saint Graal, etc. ; — ils deviennent sous cette nouvelle forme les sources d’inspiration des Amadis ; — et rattachent ainsi, par eux, le « roman » moderne et la littérature classique à la littérature et au roman du Moyen Âge. […] 3º L’Œuvre. — Ses « négociations » mises à part, l’œuvre de Commynes se réduit à ses Mémoires, qu’il n’a pas eu le temps d’achever et qui s’arrêtent en 1498.

2575. (1840) Kant et sa philosophie. Revue des Deux Mondes

I Je ne viens pas présenter un résumé de la philosophie de Kant, tiré de ses différens ouvrages mis à contribution et comme recomposés pour servir à une exposition nouvelle ; je veux faire connaître cette philosophie plus sincèrement à la fois et plus profondément. […] Les physiciens modernes antérieurs à Galilée abandonnèrent les hypothèses, se mirent en présence de la nature, observèrent et recueillirent les phénomènes qu’elle leur présentait. […] Si l’on veut bien se rappeler la marche des sciences et réduire le principe de leurs progrès à sa plus simple expression, on trouve qu’elles avancent à condition de négliger la partie extérieure et variable des choses sur lesquelles elles travaillent, et d’en considérer exclusivement la partie invariable et constante, c’est-à-dire la partie que l’esprit humain met dans toutes ses connaissances. […] Et il indique les argumens en faveur de l’existence de Dieu, de la liberté, de l’immortalité que donnait l’ancienne métaphysique, et ceux que la nouvelle mettra à leur place ; il soutient que la critique peut bien nuire au monopole de l’école, mais non pas à l’intérêt du genre humain, puisqu’elle-même répare les ruines qu’elle opère. […] Nulle connaissance ne précède l’expérience ; toutes commencent avec elle. » Mais Kant distingue entre commencer avec l’expérience et venir de l’expérience (mit, aus).

2576. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Robert » pp. 222-249

Pendant le froid je fais comme l’ours qui se met à couvert, et l’été j’imite l’aigle qui se promène pour satisfaire sa curiosité. […] Au-dessous de ce pot il a ouvert une fenêtre et fiché dans le mur aux deux côtés de cette fenêtre des perches sur lesquelles il a mis des draps à sécher. […] Une habitude méchanique très-naturelle, surtout aux bons esprits, c’est de chercher à mettre de la clarté dans leurs idées, en sorte qu’ils exagèrent et que le point dans leur esprit est un peu plus gros que le point décrit, sans quoi ils ne l’appercevraient pas plus au dedans d’eux-mêmes qu’au dehors. […] Quand ils étaient jeunes ils se mettaient à table de bonne heure et ils y restaient longtemps. […] Cela n’a pas coûté une matinée à l’artiste, car il fait vîte : il valait mieux y mettre plus de temps et faire bien.

2577. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXVIe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 385-448

Voyons, pensez un peu ; je vous donne pour réfléchir le temps que l’ombre de cette branche mettra à se replier jusqu’à ses racines. […] CXI Ma sœur nous raconta l’amour du capitaine des sbires pour sa belle enfant, la condition que l’avocat avait mise tout bas à la vie du châtaignier et à la restitution de nos petits champs, troqués contre la cousine d’Hyeronimo. […] Quant à moi, je mis ma tête aveugle entre mes deux mains, sur mes genoux tout tremblants, et je pressentis confusément de grands malheurs. […] Et je me mis à pleurer et à prier Dieu en retombant, la tête sur mon lit, noyée dans mes larmes. […] Là, sans pouvoir être vue de personne, j’essuyai mon front tout mouillé de sueur, mes yeux obscurcis de larmes ; je repris mon haleine essoufflée et je me mis à réfléchir, trop tard, hélas !

2578. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le marquis de Lassay, ou Un figurant du Grand Siècle. — II. (Fin.) » pp. 180-203

Tout en convenant avec lui que les qualités qu’on possède sont loin de se produire toujours ; que c’est l’occasion qui nous révèle aux autres et souvent à nous-même, et que la seule pierre de touche pour bien juger du mérite est qu’il soit mis à sa place, je remarquerai que, dans l’analyse très détaillée et assez naïve qu’il nous donne de son esprit et de son caractère, il nous dit : J’ai un défaut effroyable pour les affaires, qui gâte et qui détruit tout ce que je pourrais avoir de bon : c’est une grande paresse dans l’esprit ; en de certaines occasions, je la peux surmonter par élans ; mais à la longue je prends trop sur moi et j’y retombe toujours ; si bien que je ne serais propre qu’à penser, et encore plus à choisir et à rectifier ; car ce qu’il y a de meilleur en moi, c’est le discernement : mais il faudrait qu’un autre agît. […] Mme de Maintenon avait dû plus d’une fois songer, dans les degrés divers de son élévation, à cette histoire romanesque de Marianne, et elle savait gré sans doute à Lassay d’avoir osé mettre un jour la sagesse de conduite et la vertu au-dessus du rang. […] J’indiquerai quelques-uns des passages principaux de ce portrait du beau-père par le gendre, en faisant remarquer qu’il est anonyme dans le Recueil de Lassay et qu’on n’y avait pas encore mis le vrai nom : M. le Prince n’a aucune vertu ; ses vices ne sont affaiblis que par ses défauts, et il serait le plus méchant homme du monde, s’il n’était pas le plus faible. […] Il souhaita recevoir de l’Espagne la Toison d’or et fut contrarié, et peut-être affligé, quand Louis XIV mit obstacle à son désir.

2579. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Du génie critique et de Bayle »

Dans l’autre genre de critique, que le mot de journaliste exprime assez bien, je mets cette faculté plus diverse, mobile, empressée, pratique, qui ne s’est guère développée que depuis trois siècles, qui, des correspondances des savants où elle se trouvait à la gêne, a passé vite dans les journaux, les a multipliés sans relâche, et est devenue, grâce à l’imprimerie dont elle est une conséquence, l’un des plus actifs instruments modernes. […] Il s’est mis en campagne pour son compte, comme un audacieux partisan ; tous les hasards et les inégalités du métier lui ont souri, les bigarrures et les fatigues du chemin l’ont flatté. […] Bayle, né au Carlat, dans le comté de Foix, en 1647, d’une famille patriarcale de ministres calvinistes, fut mis de bonne heure aux études, au latin, au grec, d’abord dans la maison paternelle, puis à l’académie de Puy-Laurens. […] Il se met à la fenêtre et regarde passer chaque chose ; les nouvelles mêmes l’amusent.

2580. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Introduction »

Ces différentes réflexions conduiraient enfin au principal but des débats actuels, à la manière de constituer une grande nation avec de l’ordre et de la liberté, et de réunir ainsi la splendeur des beaux-arts, des sciences et des lettres, tant vantées dans les monarchies, avec l’indépendance des républiques ; il faudrait créer un gouvernement qui donna de l’émulation au génie, et mit un frein aux passions factieuses ; un gouvernement qui put offrir à un grand homme un but digne de lui, et décourager l’ambition de l’usurpateur ; un gouvernement qui présenta, comme je l’ai dit, la seule idée parfaite de bonheur en tout genre, la réunion des contrastes. […] Dans cet ouvrage donc que je ferai, ou que je voudrais qu’on fit, il faudrait mettre absolument de côté tout ce qui tient à l’esprit de parti ou aux circonstances actuelles, la superstition de la royauté, la juste horreur qu’inspirent les crimes dont nous avons été les témoins, l’enthousiasme même de la république, ce sentiment qui dans sa pureté est le plus élevé que l’homme puisse concevoir. […] Il semble qu’on ne s’est jamais assez mis à la disposition de ceux qu’on aime, qu’on ne leur a jamais assez prouvé qu’on ne pouvait exister sans eux ; que l’occupation, les services de tous les jours ne satisfont pas assez au gré de la chaleur de l’âme, le besoin qu’on a de se dévouer, de se livrer en entier aux autres ; on se fait un avenir tout composé des liens qu’on a formés. […] J’entends par constitution démagogique, celle qui met le peuple en fermentation, confond tous les pouvoirs, enfin la constitution de 1793.

2581. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre II. Deuxième élément, l’esprit classique. »

On exclut du discours la plupart des mots qui servent à l’érudition spéciale et à l’expérience technique, les expressions trop latines ou trop grecques, les termes propres d’école, de science, de métier, de ménage, tout ce qui sent de trop près une occupation ou profession particulière et n’est pas de mise dans la conversation générale. […] L’écrivain perd le droit de mettre en tête et en vedette l’objet ou le trait qui le frappe le plus vivement et d’abord : le cadre est fait, les places sont désignées d’avance. […] Tout ce qui concerne la province et la campagne, la bourgeoisie et la boutique377, l’armée et le soldat, le clergé et les couvents, la justice et la police, le négoce et le ménage, reste vague ou devient faux ; pour y démêler quelque chose, il me faut recourir à ce merveilleux Voltaire qui, lorsqu’il a mis bas le grand habit classique, a ses coudées franches et dit tout. […] Dans un livre qui est comme le testament philosophique du siècle382, Condorcet déclare que cette méthode est « le dernier pas de la philosophie, celui qui a mis en quelque sorte une barrière éternelle entre le genre humain et les vieilles erreurs de son enfance ». — « En l’appliquant à la morale, à la politique, à l’économie politique, on est parvenu à suivre dans les sciences morales une marche presque aussi sûre que dans les sciences naturelles.

2582. (1868) Alexandre Pouchkine pp. 1-34

C’est dans les récits de cette nature que j’admire surtout sa sobriété et l’art qu’il met à choisir les traits les plus frappants en négligeant maint détail qui nuirait à l’illusion. […] La fille de la maison est d’ailleurs fort empressée à la mettre au fait et l’aide de son mieux. […] Sterne, dans son Tristram Shandy, avait déjà mis à la mode cette sorte de commentaire perpétuel inséré dans le texte d’un récit des plus simples. […] Il pourrait bien la mettre à mal : mais il est honnête homme au fond, et il éprouve quelque plaisir à se trouver dans une situation contraire à celle où il a été toute sa vie.

2583. (1894) Propos de littérature « Chapitre V » pp. 111-140

En France, rien de semblable ; il ne s’est pas trouvé de Pisistrate pour grandir jusqu’à l’œuvre d’art l’épopée magnifique de nos trouvères, et hier encore nul poète investi par l’Harmonie n’avait voulu ordonner en ses vers les chants qui naissent de la terre sous nos pas, les souvenirs qui, au temps de l’enfance, mirent à nos fronts une auréole fée ! […] Or, en cette promenade, ses émerveillements, ses émois, ses chagrins, sa frayeur ont mis sur ses cheveux la lourde couronne de la pensée ; désormais sa parole est virile : il s’adresse à l’homme ainsi qu’au frère d’une contrée voisine et d’une voix souple et franche, parlant les mots inattendus qui peuvent suggérer, il est heureux de ce qu’il chante, dit la beauté de toute la vie, même la beauté de la douleur et nous commande là saine Joie. […] Et elles se déploient doucement, vêtues de gaze comme d’ailes nacrées, en de vagues paysages aux grandes lignes qui sont de courbes et pensives. » Mais, sinon quant à la parure d’images devenue plus distante, M. de Régnier ne s’est pas assez renouvelé jusqu’ici : ce motif de mélancolie n’a guère changé depuis les poèmes qu’il désigne, sans doute parce qu’il apparut au tournant de la route où le voyageur pressentit enfin son but après des chevauchées trop vainement glorieuses ; au moins s’est-il dégagé avec plus d’évidente force en quelques pièces récentes où le songeur a mis le plus de lui-même et qui s’illuminent telles qu’un miroir propre à refléter peut-être un plus lointain essor. […] Il y a dans les œuvres de M. de Régnier, comme en sa vie elle-même, beaucoup de cet ancien précepte si complètement oublié aujourd’hui : qu’un homme bien élevé évite de se mettre en scène.

2584. (1890) L’avenir de la science « XVIII »

Or il est absurde de détruire, quand on n’a rien à mettre en place. […] C’est une tactique déloyale de rappeler aux gouvernants ce qu’ils ont dit et promis durant leur période d’opposition, et de les mettre en contradiction avec eux-mêmes ; car cette contradiction est nécessaire, et ceux qui déclarent si fermement qu’ils feraient autrement s’ils étaient au pouvoir mentent ou se trompent. […] En vérité, serait-ce la peine de sacrifier sa vie et son bon-heur au bien de la société, si tout se bornait à procurer de fades jouissances à quelques niais et insipides satisfaits, qui se sont mis eux-mêmes au ban de l’humanité, pour vivre plus à leur aise ? […] si nous nous mettions au point de vue espagnol, nous la comprendrions sans doute.

2585. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre Premier »

L’épicurisme et le stoïcisme mettent le suicide à la mode. […] Mais à peine y est-elle entrée que la vertu lui pèse et que le calme l’énerve ; elle s’ennuie de sa nouvelle existence, comme une sauvage baptisée qu’on aurait mise au couvent. […] Les portes closes et les domestiques renvoyés, la voilà qui met bas sa couronne de comtesse et son masque de femme honnête ; la fille reparaît. […] Il nous est impossible, malgré le succès, la vogue et les dix mille francs de l’Académie, d’admirer cette comédie à cravate blanche et en lunettes d’or, qui met en vers la prose de la vie, et professe l’enthousiasme de la médiocrité.

2586. (1856) Les lettres et l’homme de lettres au XIXe siècle pp. -30

Toutefois, si l’on met à part un certain nombre de grands noms, on peut dire qu’en général, l’homme de lettres du xvie  siècle adore l’antiquité, sans la bien comprendre, dédaigne le présent qu’il comprend moins encore, vit seul ou avec ses pareils, lit beaucoup, écrit assez et pense peu. […] Sans mettre officiellement la main au timon des affaires, ils sont en réalité les maîtres et les rois. […] On met en commun ses idées, et elles deviennent plus chères par le souvenir des hommes qui les partagent. […] Hegel a mis cette loi du monde moral dans tout son… développement ; je n’ose dire dans tout son jour.

2587. (1868) Curiosités esthétiques « IV. Exposition universelle 1855 — Beaux-arts » pp. 211-244

Cette dose de bizarrerie qui constitue et définit l’individualité, sans laquelle il n’y a pas de beau, joue dans l’art (que l’exactitude de cette comparaison en fasse pardonner la trivialité) le rôle du goût ou de l’assaisonnement dans les mets, les mets ne différant les uns des autres, abstraction faite de leur utilité ou de la quantité de substance nutritive qu’ils contiennent, que par l’idée qu’ils révèlent à la langue. […] On ne peut donc pas trouver mauvais que, pour expliquer la sensation de certains tempéraments artistiques mis en contact avec les œuvres de M.  […]                           Il met, comme un sculpteur, l’empreinte de son pouce Sur leurs fronts rayonnants de la gloire des cieux, Et l’ardente auréole en gerbes d’or y pousse.

2588. (1899) Le roman populaire pp. 77-112

C’est bien possible ; mettons 1 000, et admirons la variété de l’esprit humain. […] Pour peindre la fille de la malheureuse Fantine, abandonnée, livrée à un couple affreux d’aubergistes de campagne qui la maltraitent, il met presque autant de pages que pour raconter Waterloo ; il accumule des détails et des scènes d’une puérilité admirable et profonde. […] Pour m’en tenir aux Anglais, il est remarquable que leurs romanciers, à la différence des écrivains français, ne s’attachent pas, en général, à l’étude d’un cas de psychologie passionnelle, d’un scrupule, d’un doute, d’une situation intéressante sans doute, mais exceptionnelle, soit en elle-même, soit par la qualité des personnages qu’elle met en scène. […] Il les fatigue bientôt, soit que les lecteurs, comme il arrive, connaissent mieux le monde que celui qui prétend le mettre en scène ; soit qu’ils aient, de la vanité de leur vie, plus de dégoût que l’écrivain n’en affecte ; soit qu’ils sachent, encore mieux que lui, que ce qui résiste à tant d’attaques, je veux dire le raffinement de l’esprit et des mœurs, a toujours eu un fond de solidité et une raison de durer.

2589. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre III. La complication des sociétés »

L’organisme le plus parfait est celui qui est capable d’exécuter le plus d’actes divers, et de ne mettre en branle, pour exécuter chacun d’eux, que juste les muscles nécessaires. […] L’Église catholique a pu, en fait, mettre souvent ses forces organisées au service de l’absolutisme, et lui offrir l’appui de ses dogmes. […] D’ailleurs, ce n’est pas seulement la puissance effective de l’individu que la complication sociale augmente, mais encore et surtout ses prétentions ; elle est faite pour mettre en relief la valeur propre à la personne. […] Qu’un commerce constant et réglé par les usages mondains mette en présence, dans les salons du xviiie  siècle, le roturier et le gentilhomme, et ils se rapprocheront insensiblement ; c’est ainsi que, plus encore peut-être que leurs théories, la vie mondaine de nos grands écrivains préparait le succès des idées égalitaires.

2590. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « De la dernière séance de l’Académie des sciences morales et politiques, et du discours de M. Mignet. » pp. 291-307

Par exemple, on créait exprès un journal pour mettre le siège devant la dynastie et pour la faire tomber. […] Dans le dernier discours sur Jouffroy, il me semble avoir sacrifié plus que d’ordinaire à la mise en scène ; il y a mêlé un but étranger au sujet même qu’il étudiait ; il a voilé en un sens et drapé son personnage ; il a pris parti, plus finement qu’il ne convient, pour la malice et la rancune des grands sophistes et des grands rhéteurs dont l’histoire sera un jour l’un des curieux chapitres de notre temps, intolérants et ligués comme les encyclopédistes, jaloux de dominer partout où ils sont, et qui, depuis que l’influence décidément leur échappe, s’agitent en tous sens pour prouver que le monde ne peut qu’aller de mal en pis. […] Cousin lui disait devant témoins, du ton d’un chef satisfait : « Damiron, tu fais des progrès. » — Ce n’est certes pas ainsi qu’on est philosophe dans le goût de Montaigne, de La Rochefoucauld ou de Saint-Évremond ; mais ces allures servent beaucoup quand on prétend faire une école de philosophie et qu’on en met l’enseigne : dès qu’on veut accaparer les hommes, un peu de charlatanisme ne nuit pas.

2591. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — I. » pp. 19-35

Je ne saurais mieux comparer l’effet continu de ces lettres ainsi réduites qu’à un festin dans lequel, sous prétexte de retrancher des aliments et des mets toute portion inutile ou grossière, on n’aurait servi que des gelées, des consommés, des sirops et des élixirs : on en est tout aussitôt rassasié. […] Tout cela, mis ensemble, fait comme un torrent qui entraîne malgré les meilleures résolutions. […] Souvenez-vous-en bien, et n’allez plus gronder contre les gens qui me gardent comme une relique. » Fénelon n’entra donc jamais très avant ni d’une manière parfaitement suivie dans la direction de Mme de Grammont ; ses conseils tournent dans un même cercle et ne se renouvellent que par l’agrément d’expression qu’il y met : « Surtout, madame, sauvez votre matin, et défendez-le comme on défend une place assiégée.

2592. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sénac de Meilhan. — I. » pp. 91-108

Les affaires sont à l’avance examinées et discutées ; on ne les lui présente que tamisées en quelque sorte, éclaircies, mises dans un tel jour, qu’à moins d’être stupide, la décision saute aux yeux. […] C’est quelque chose en prose comme la supercherie des Poésies de Clotilde de Surville en vers ; mais ici on met un ouvrage de fabrique moderne sous un nom historique connu. […] Au lieu du loto devenu trop commun, mettez le whist, et vous avez encore l’homme du monde qui n’est que cela jusqu’à la fin, qui n’est plus même vieillard.

2593. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — I. » pp. 446-462

Ce Lenz, dont il est question dans les Mémoires de Goethe, était un Livonien de cette génération bizarre et vaguement passionnée, contemporaine de Werther, et qui en mit trop bien en pratique l’esprit et l’exaltation, jusqu’à vouloir finir par la démence et le suicide. […] Dans quelques-unes, on doit reconnaître le ton sauvage qu’inspire la vue des Alpes et de l’Apennin ; longtemps réfugié au sein de leurs glaces éternelles, je ne sais si je suis de mise au milieu d’une grande ville, et c’est avec quelque méfiance que je viens y porter un ton et des mœurs étrangères. […] J’ai souvent éprouvé que sur les montagnes on est plus entreprenant, plus fort, moins timide et que l’âme se met à l’unisson des grands objets qui l’entourent.

2594. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — III » pp. 476-491

Nulle part cet atticisme (ne vous en en étonnez pas) ne s’offre dans de meilleures conditions, avec ses qualités propres et sincères, que chez les vieilles femmes qui ont du bon sens et du monde, et qui ont eu le temps de se débarrasser des faux goûts et des fausses expressions que la mode avait mis en circulation dans leur jeunesse. […] Chaque esprit, au reste, y porte sa nuance particulière ; l’un y met le sel, la gaieté ou l’âcreté de la réplique, l’autre une fleur de raillerie et de délicatesse. […] En 1793 elle fut mise en arrestation, elle s’y attendait ; conduite au couvent des Oiseaux, qui était alors converti en prison, elle y passa tolérablement les mois de la captivité, et en sortit après le 9 thermidor.

2595. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — I » pp. 417-434

C’est aux approches de la soixantaine qu’il se mit décidément à rajeunir ; il atteignait à soixante-dix ans sa fleur, il s’y maintenait durant une douzaine d’années, et jusqu’à quatre-vingt-deux ans et même au-delà il fut dans tout son vif. […] Il avait vingt-quatre ans, d’aimables dehors, de la naissance ; il parlait l’anglais avec facilité et aimait même à l’écrire : « Car cette langue, disait-il, se prête à tout, au lieu qu’en français il faut toujours rejeter dix pensées avant d’en rencontrer une qu’on puisse bien habiller. » Il y contracta tout d’abord d’étroites amitiés, y vit le grand monde, fut présenté à la cour, et, ce qui nous intéresse davantage, fut admis, à Cambridge, dans l’intimité du charmant poète Gray. « Jamais, disait-il, je n’ai vu personne qui donnât autant que Gray l’idée d’un gentleman accompli. » Nous avons un récit de ces mois de séjour à Cambridge, par Bonstetten, qui s’est plu à mettre en contraste le caractère mélancolique de Gray avec la sérénité d’âme de son autre ami, le poète allemand Matthisson, qu’il posséda plus tard chez lui comme hôte en son château de Nyon, dans le temps qu’il y était bailli. […] À huit heures je suis éveillé par un jeune bonnet carré (un étudiant), avec lequel je me mets à suivre Satan à travers le chaos et la nuit (lecture de Milton).

2596. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Essais de politique et de littérature. Par M. Prevost-Paradol. »

Le jeune auteur a déjà son cachet et le met à tout. […] Il y mettait trop de finesse, — quand, par exemple, dans un de ses premier-Paris il disait, sans qu’on devinât tout d’abord le pourquoi : « La Gazette de Liège est poursuivie par le ministère public pour un article sur la dernière crue de la Meuse. […] Je suis là-dessus respectueux, mais positif : je ne nie pas la sincérité et la chaleur des convictions, mais j’ai besoin de me les expliquer, et je dis que le fond de ces convictions mêmes se met toujours d’accord en nous à la longue avec nos talents, nos vocations et nos désirs.

2597. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Louis XIV et le duc de Bourgogne, par M. Michelet »

La résistance le mettait en fureur : c’est ce dont j’ai été souvent témoin dans sa première jeunesse. […] Voici un portrait que son précepteur a fait de lui, et qu’il lui a mis sous les yeux pour lui faire honte de ses défauts. […] Au reste, l’abbé Proyart, dans son élégante et louable Histoire du duc de Bourgogne (1782), tout en indiquant les défauts, ne les avait pas non plus assez gravés et mis en relief.

2598. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Le Poème des champs, par M. Calemard de Lafayette (suite et fin) »

Calemard de Lafayette était, il y a une quinzaine d’années, un jeune littérateur de Paris ; il s’occupait de poésie et de critique ; il était du groupe de l’Artiste et en train de se faire un nom, tout en se livrant à ses goûts préférés, lorsque, vers ce temps, des circonstances de famille et de fortune l’enlevèrent à la vie parisienne : il avait le bonheur et l’embarras d’être propriétaire foncier ; il se retira dans ses terres aux environs du Puy, dans la Haute-Loire, et se mit à les exploiter lui-même ; il prit goût à l’agriculture, à l’amélioration du sol et des colons ; l’amour de la poésie l’y suivit, et il combina ces deux amours, celui des champs et celui des vers : il en est résulté le poème dont j’ai à parler et qui a paru il y a quelques mois. […] « Celui qui se fie à la femme se fie aux voleurs », ajoute Hésiode ; il l’appelle enjôleuse et babillarde, et d’un autre mot encore qui revient à dire que, dans son ardeur de se parer, elle se met tout « sur le dos, sur les hanches ». […] C. de Lafayette rivalise avec lui sur le même sujet, mais il y a mis un peu plus de coquetterie peut-être, un sentiment de peintre plus encore que de fermier et de paysan.

2599. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, — Antiquité et Moyen Âge — Par M. J. Zeller. »

Bossuet les dédaigne et ne s’y amuse pas ; il attend les deux autres parties pour y mettre ses pensées tout entières. […] Il s’agit des belles-lettres : Velléius, à un moment, se met à en discourir, car il ne s’interdit pas les digressions, et c’est une de ses formes ordinaires de dire : « Nequeo temperare mihi… Je ne puis m’empêcher, je ne puis me contenir… » Il vient de parler des colonies romaines établies sous la République, et, passant à un tout autre sujet, il s’adresse à lui-même une question : Pourquoi y a-t-il pour les choses de l’esprit des époques et comme des saisons exclusivement favorables, où tout se rassemble et se groupe, et passé lesquelles on ne retrouve plus le même goût ? […] Pierron, précisément en 1852, dans son Histoire de la Littérature romaine, met Florus presque au-dessous de son rang. » Il y a quelque malentendu en tout ceci.

2600. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres choisies de Charles Loyson, publiées par M. Émile Grimaud »

De même qu’une conférence sur Millevoye serait privée de son plus gracieux ornement si l’on n’y récitait la Chute des feuilles, de même un article sur Loyson serait sans sa couronne si l’on n’y mettait cette élégie du Retour à la vie ; il y répond à des amis qui, le voyant revenu d’une terrible crise, lui conseillaient d’aller respirer l’air natal :    Quelle faveur inespérée    M’a rouvert les portes du jour ? […] Publiciste et poète, la courte vie de Loyson, si amoindrie encore par la maladie, fut partagée entre ces deux vocations opposées ; il a vivement exprimé cette gênante contrariété de goûts et d’occupations dans son Épitre à M. de Biran ; Quelle étoile sinistre, à me nuire obstinée, En guerre avec mes goûts a mis ma destinée ! […] Mettez si vous voulez 1816 ou 1818, on n’en est pas à quelques mois près ; mais ce qui est certain, c’est que, de quelque point de vue qu’on prenne la Restauration, le caractère de ce régime n’était point encore prononcé et tranché à cette date.

2601. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Millevoye »

Ayant commencé très-jeune à produire et à publier, dans un temps où le peu de concurrence des talents et un goût vif des Lettres renaissantes mettaient l’encouragement à la mode, il a subi l’inconvénient d’achever et de doubler, en quelque sorte, sa rhétorique, en public, dans les concours d’académie. […] Aussitôt, pour te paraître belle, L’eau pure a ranimé son front, ses yeux brillants : D’une étroite ceinture elle a pressé ses flancs, Et des fleurs sur son sein, et des fleurs sur sa tête, Et sa flûte à la main……… La muse de Millevoye est bergère aussi, mais sans cet art inné qui se met à tout, et par lequel la fille de Chénier, sous sa corbeille, s’égale aisément aux reines ou aux déesses. […] J’avais lu la plupart de ces petits chants, j’avais lu ce Charlemagne, cet Alfred, où il en a inséré ; je trouvais l’ensemble élégant, monotone et pâli, et, n’y sentant que peu, je passais, quand un contemporain de la jeunesse de Millevoye et de la nôtre encore, qui me voyait indifférent, se mit à me chanter d’une voix émue, et l’œil humide, quelques-uns de ces refrains auxquels il rendit une vie d’enchantement ; et j’appris combien, un moment du moins, pour les sensibles et les amants d’alors, tout cela avait vécu, combien pour de jeunes cœurs, aujourd’hui éteints ou refroidis, cette légère poésie avait été une fois la musique de l’âme, et comment on avait usé de ces chants aussi pour charmer et pour aimer.

2602. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Conclusion. »

Les goûts font mettre un nouveau prix à ce qu’on possède ou à ce qu’on peut obtenir ; mais les passions ne s’attachent dans toute leur force qu’à l’objet qu’on a perdu, qu’aux avantages qu’on s’efforce en vain d’acquérir. […] Une belle cause finale dans l’ordre moral, c’est la prodigieuse influence de la pitié sur les cœurs ; il semble que l’organisation physique elle-même soit destinée à en recevoir l’impression ; une voix qui se brise, un visage altéré, agissent sur l’âme directement comme les sensations ; la pensée ne se met point entre deux, c’est un choc, c’est une blessure, cela n’est point intellectuel, et ce qu’il y a de plus sublime encore dans cette disposition de l’homme, c’est qu’elle est consacrée particulièrement à la faiblesse ; et lorsque tout concourt aux avantages de la force, ce sentiment lui seul rétablit la balance, en faisant naître la générosité ; ce sentiment ne s’émeut que pour un objet sans défense, qu’à l’aspect de l’abandon, qu’au cri de la douleur ; lui seul défend les vaincus après la victoire, lui seul arrête les effets de ce vil penchant des hommes à livrer leur attachement, leurs facultés, leur raison même à la décision du succès ; mais cette sympathie pour le malheur est une affection si puissante, réunit tellement ce qu’il y a de plus fort dans les impressions physiques et morales, qu’y résister suppose un degré de dépravation dont on ne peut éprouver trop d’horreur. […] C’est dans la crise d’une révolution qu’on entend répéter sans cesse, que la pitié est un sentiment puérile, qui s’oppose à toute action nécessaire, à l’intérêt général, et qu’il faut la reléguer avec les affections efféminées, indignes des hommes d’état ou des chefs de parti ; c’est au contraire au milieu d’une révolution que la pitié, ce mouvement involontaire dans toute autre circonstance, devrait être une règle de conduite ; tous les liens qui retenaient sont déliés, l’intérêt de parti devient pour tous les hommes le but par excellence : ce but, étant censé renfermer et la véritable vertu et le seul bonheur général, prend momentanément la place de toute autre espèce de loi : hors dans un temps où la passion s’est mise dans le raisonnement, il n’y a qu’une sensation, c’est-à-dire, quelque chose qui est un peu de la nature de la passion même, qu’il soit possible de lui opposer avec succès ; lorsque la justice est reconnue, on peut se passer de pitié ; mais une révolution, quel que soit son but, suspend l’état social, et il faut remonter à la source de toutes les lois, dans un moment où ce qu’on appelle un pouvoir légal, est un nom qui n’a plus de sens.

2603. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre I. La lutte philosophique »

Ce gentilhomme qui abhorre les « philosophicailleries modernes », qui l’ait de la religion la base de la société, qui sollicite du despotisme royal des lettres de cachet contre fils, femmes et filles, cet homme de vieille roche, ce dur, cet intraitable féodal est l’ennemi des prêtres, des commis, des financiers, des courtisans, fait des avances à Jean-Jacques, bénit Quesnay, ne rêve que progrès, améliorations sociales, bonheur du peuple, et se fait mettre à Vincennes pour le libéralisme de sa théorie de l’impôt. […] Si les écrivains se classaient selon l’honnêteté, il faudrait le mettre au premier rang : mais si notre affaire n’est pas de décerner des prix de vertu, nous devons nous contenter d’un rapide et respectueux salut. — À consulter : Vinet, ouvr. cité, t. 1. […] Sa Théorie de l’impôt le fil mettre à Vincennes en 1760, puis exiler dans ses terres.

2604. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre V. Premiers aphorismes de Jésus. — Ses idées d’un Dieu Père et d’une religion pure  Premiers disciples. »

Mais il y mettait un accent plein d’onction, qui rendait nouveaux des aphorismes trouvés depuis longtemps. […] L’hypocrisie des pharisiens, qui en priant tournaient la tête pour voir si on les regardait, qui faisaient leurs aumônes avec fracas, et mettaient sur leurs habits des signes qui les faisaient reconnaître pour personnes pieuses, toutes ces simagrées de la fausse dévotion le révoltaient. « Ils ont reçu leur récompense, disait-il ; pour toi, quand tu fais l’aumône, que ta main gauche ne sache pas ce que fait ta droite, afin que ton aumône reste dans le secret, et alors ton Père, qui voit dans le secret, te la rendra 252. […] Rabbi Iohanan allait bientôt mettre les œuvres de miséricorde au-dessus de l’étude même de la Loi 265 !

2605. (1903) Zola pp. 3-31

Zola écrivait comme le Méridional parle, par besoin naturel et sans se préoccuper de ce qu’il aurait à mettre dans ses écritures pour qu’elles eussent de la solidité et parussent au moins contenir quelque chose. […] Il était moins grand, moins puissant, moins terrible, moins monstrueux dans la réalité ; mais je l’ai vu ; ou j’ai vu tel homme qui n’avait pas grand chemin à faire pour devenir Harpagon, Tartufe, le père Grandet, le baron Hulot. » Les personnages des romantiques n’ont rien de cela (et qu’on ne m’accuse pas de mettre Balzac tantôt avec les réalistes, tantôt avec les romantiques ; on peut savoir que je le fais exprès, ayant toujours considéré Balzac comme étant moitié romantique, moitié réaliste, presque exactement), les personnages des romantiques sont des abstractions vivifiées, quelquefois magnifiquement, par le rêve. […] Il peignait les foules en mouvement d’une manière qui le met au tout premier rang.

2606. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Th. Dostoïewski »

Car de même que la souffrance des bêtes est plus douloureuse à voir que celle des hommes, parce qu’en ces êtres muets et séparés, on n’en mesure ni le degré ni la justice, pour ce témoin distant que fut Dosloïewski, la souffrance humaine parut épouvantable et énorme ; ignorant des causes, et ne sachant des hommes qu’il ne connaît pas, que leur plainte, hagard et apitoyé, il se penche sur la vie avec consternation, et il en dit toutes les horreurs et toute la fange, avec le singulier mélange d’insistance et de pitié, que l’on met à raconter quelque horrible accident, aperçu au hasard rapide d’un passage, noté en sa seule horreur, et retenu sans enquête comme cruellement immérité. […] La sordide saleté des mansardes, où rôde un solitaire, qu’empeste toute une famille, la puanteur des escaliers pauvres, la nourriture immangeable et rare, la nausée et la rage que met dans la tête le vide de l’estomac, l’existence farouche du déclassé dans l’étincellement des capitales, requièrent l’âpre insistance de son style ; et au-delà de ces choses physiques, il a vu les vices et les atroces indélicatesses auxquelles condamne l’inclémence de ce sort. […] Son peuple, ce sont les déclassés, les prostituées, les criminels, les ivrognes, les aigrefins, ou encore les simples créatures cordiales et ces impudentes canailles qui sentent parfois le besoin de mettre à l’air leur turpitude.

2607. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — I. La métaphysique spiritualiste au xixe  siècle — Chapitre I : Principe de la métaphysique spiritualiste »

On prononce sans cesse les noms de Kant et de Hegel ; mais qui donc sait, si ce n’est parmi les initiés, que la France a eu au commencement de notre siècle un penseur dont le nom doit être mis à côté de ceux-là, et qui depuis Malebranche est le plus grand et peut-être le seul métaphysicien que la France ait possédé ? […] Barthélémy Saint-Hilaire que nous avons été mis en possession d’une partie de sa correspondance philosophique avec Maine de Biran ; encore ne possédons-nous cette correspondance que par fragments, et toute une moitié précieuse nous fait défaut, à savoir les lettres de Biran lui-même. […] Cousin qui a fait pour Biran ce qu’il a fait pour Schelling et Hegel, ce qu’il a fait pour Abélard, pour Plotin et pour Proclus, c’est-à-dire qui a mis en circulation son nom et ses œuvres, et qui lui a communiqué le premier quelque chose de cet éclat qu’il prêtait à tout ce qu’il touchait ; mais la fougue de cette imagination toujours en mouvement la transportait successivement sur trop de choses pour qu’aucune pensée eût le temps de mûrir silencieusement, ce qui est la condition du progrès scientifique.

2608. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Paragraphe sur la composition ou j’espère que j’en parlerai » pp. 54-69

Un chanteur que l’exécution d’un air di bravura met à la gêne, un violon qui se démène et se tourmente, m’angoisse et me chagrine. […] Or quel est celui d’entre eux qui aura la patience de la finir ; qui est-ce qui y mettra le prix quand elle sera achevée ? […] Comme ces gens-ci sont ignorants, et qu’ils ne savent point garder de mesure, si vous leur jetez la bride sur le col, je ne désespère pas qu’ils n’en viennent à mettre un plumet sur la tête d’un soldat romain.

2609. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Préface de la seconde édition »

. — On objectera que, comme ils sont notre œuvre, nous n’avons qu’à prendre conscience de nous-mêmes pour savoir ce que nous y avons mis et comment nous les avons formés. […] Ce qu’elle réclame, c’est que le sociologue se mette dans l’état d’esprit où sont physiciens, chimistes, physiologistes, quand ils s’engagent dans une région, encore inexplorée, de leur domaine scientifique. […] C’est pourquoi il nous a paru utile de le mettre une fois de plus en relief, en le dégageant de toute question secondaire.

2610. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre VII : Théorie de la raison par M. Cousin »

À leur place, mettons des lettres ; nous les transformerons ainsi en quantités indéterminées, générales et abstraites : A ouvriers font H mètres ; combien B ouvriers en feront-ils ? […] J’analyse celle de qualité, et j’y retrouve ce que je viens d’y mettre, l’idée de substance L’axiome est formé. […] Dans les hautes mathématiques, on l’exprime, on le met en équation, on compare ses diverses formes, on le calcule, on s’en joue.

2611. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre VIII : M. Cousin érudit et philologue »

« Nous nous serions offert bien volontiers pour, mettre au jour cette correspondance, où peut-être aurait été de mise quelque connaissance des matières agitées entre les deux métaphysiciens, et surtout de la littérature philosophique de cette époque. » On lui a fait tort, on lui a pris son bien. […] Cousin devient amoureux d’un texte ; épris du manuscrit qu’il devine, il se met en campagne, il écrit à l’un, fait écrire à l’autre, et poursuit une lettre de Descartes ou un fragment de Malebranche avec une opiniâtreté et un enthousiasme que personne n’a plus.

2612. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — Oberman, édition nouvelle, 1833 »

Si, dans une année ou deux, la vie ne me paraît pas claire, j’y mettrai fin. […] (Depuis l’espèce de résurrection que nous avons tentée d’Oberman, les admirateurs n’ont pas manqué à ce morne et triste génie ; il faut mettre en tête George Sand, qui a honoré la troisième édition d’une préface.

2613. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « PENSÉES » pp. 456-468

Plus tard on sent de reste quand il fait défaut, et l’on s’étonne d’avoir pu mettre son admiration là où il n’était pas. […] Les hommes se mettent beaucoup trop en frais, ce me semble, pour admirer le génie de l’homme, c’est-à-dire pour s’admirer eux-mêmes.

2614. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Relation inédite de la dernière maladie de Louis XV. »

Il fallut monter à cet effet toute une machine : « Mon frère, écrit Mme de Tencin, ne serait pas très-éloigné de croire qu’il serait très-utile de l’engager à se mettre à la tête de ses armées. […] Plus j’y mis de discrétion et d’économie, et mieux nous nous entendîmes. » Nous ne nous sommes pas même cru en droit de nous permettre ce soin si sobre ; à part un ou deux endroits où la copie était évidemment fautive, nous en avons respecté tout le négligé.

2615. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre VI. Le charmeur Anatole France » pp. 60-71

Enfin, ménageons-nous une foi, soit dans une confession religieuse, soit dans une doctrine scientifique, ou dans un credo philosophique ; l’essentiel est de mettre un fil qui ne casse pas entre nos jours mal attachés une bonne manie suffit au besoin ; des individus trouvent une raison de vivre dans une collection de tabatières à parachever… Jérôme Coignard est un sage hardi et prudent. […] Mettons que ce soit le premier que M. 

2616. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre II. Enfance et jeunesse de Jésus. Ses premières impressions. »

Leur nom était inconnu, à tel point que quand l’évangéliste met dans la bouche des gens de Nazareth l’énumération des frères selon la nature, ce sont les noms des fils de Cléophas qui se présentent à lui tout d’abord. […] L’évangéliste, entendant appeler ces quatre fils de Cléophas « frères du Seigneur », aura mis, par erreur, leur nom au passage Matth.

2617. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIV. Rapports de Jésus avec les païens et les samaritains. »

On la mettait sur la même ligne que les païens, avec un degré de haine de plus 663. […] Jésus savait se mettre au-dessus de ces malentendus 666.

2618. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre III. Soubrettes et bonnes à tout faire »

Mais les choses qui font penser mettent en fuite le public. […] Claretie a mis au passé la plupart de ses verbes, Seulement cet homme a beaucoup de travail.

2619. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 140-155

On y voit l’imagination la plus vive & la plus féconde, un esprit flexible pour prendre toutes ses formes, intrépide dans toutes ses idées, un cœur pétri de la liberté Républicaine, & sensible jusqu'à l’excès, une mémoire enrichie de tout ce que la lecture des Philosophes Grecs & Latins peut offrir de plus réfléchi & de plus étendu ; enfin une force de pensées, une vivacité de coloris, une profondeur de morale, une richesse d’expressions, une abondance, une rapidité de style, & par-dessus tout une misanthropie qu’on peut regarder comme le ressort principal qui a mis en jeu ses sentimens & ses idées. […] Semblable à ces Athletes qui s’exercent long-temps avant de paroître sur l’arene, il a laissé croître les forces de son génie, donné à sa raison le temps de mûrir & de se développer, exercé vraisemblablement sa plume, avant de mettre au grand jour les Ecrits sur lesquels il fondoit sa réputation.

2620. (1767) Salon de 1767 « Sculpture — Pajou » pp. 325-330

Elle semble s’applaudir d’une malice qu’elle a mise sur le compte d’un autre. […] Lorsque Mouchy demanda à Pigalle sa nièce en mariage, il lui mit un ébauchoir à la main, et lui présentant de la terre glaise, il lui dit : écris-moi là ta demande.

2621. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 5, explication de plusieurs endroits du sixiéme chapitre de la poëtique d’Aristote. Du chant des vers latins ou du carmen » pp. 84-102

La tragedie met donc sous les yeux les objets mêmes dont elle prétend se servir pour exciter la terreur et la compassion, sentimens si propres à purger les passions. […] Pour être surpris de ce que dit Aristote sur l’importance de la melopée, il faudroit n’avoir jamais vû representer des tragedies, et pour être étonné qu’il charge le poëte de la composition de la melodie, il faudroit avoir oublié ce que nous avons remarqué, et promis de prouver, comme nous le ferons ci-dessous, sçavoir, que les poëtes grecs composoient eux-mêmes la déclamation de leurs pieces, au lieu que les poëtes romains se déchargeoient de ce travail sur les artisans, qui, n’étant ni auteurs ni comediens, faisoient profession de mettre au théatre les ouvrages dramatiques.

2622. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « II »

Nous soutenons que pour bien voir il faut mettre de bonnes lunettes ; on nous reproche d’enseigner que les lunettes créent la faculté de voir. […] Nous soutenons que pour bien voir il faut mettre de bonnes lunettes ; on nous reproche d’enseigner que les lunettes créent la faculté de voir.

2623. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XIV »

Brunetière déclare le conseil sans portée, et, pour montrer qu’une métaphore suivie peut être ridicule, il cite celle que Molière met plaisamment dans la bouche de Trissotin : Pour cette grande faim qu’à mes yeux on expose, ‌ Un seul plat de huit vers me semble peu de chose, Et je pense qu’ici je ne ferai pas mal De joindre à l’épigramme ou bien au madrigal ‌ Le ragoût d’un sonnet, qui, chez une princesse,‌ A passé pour avoir quelque délicatesse. ‌ […] Ce que nous demandons avant tout au style, c’est l’originalité, la vie, le relief, la création, l’image, et c’est pour cela que Molière, Sévigné et Saint-Simon restent pour nous de vrais écrivains, et que nous avons mis notamment le génie de Saint-Simon hors de pair.

2624. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre XI. Troisième partie. Conséquences de l’émancipation de la pensée dans la sphère des idées politiques. » pp. 350-362

Le système de l’utilité sera banni des relations sociales ; ce système qui engendre le machiavélisme, et qui met faussement le salut du peuple avant la justice, doit être livré au discrédit. […] Non, l’homme, tant qu’il est sur la terre, est fait pour tout mettre en commun avec ses semblables ; songez donc à perfectionner l’homme plutôt qu’à le rendre heureux, car vous n’y parviendriez pas.

2625. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « De Cormenin (Timon) » pp. 179-190

Pour continuer son cours de rhétorique, il se met à nous peindre Sieyès, qui n’est pas un orateur et qui est un morne hibou de pamphlétaire, Mirabeau, Danton, Robespierre, toutes ces figures qui ne ressortent que de l’histoire, et qu’il n’éclaire pas d’un filet de plus de lumière ajouté aux torrents de rayons dont ils sont inondés ! […] Mais des facultés pour être un pamphlétaire, il y en a trente-six, toutes différentes, pour faire des pamphlétaires différents, et Cormenin, en ses portraits, n’en a pas mis une seule de celles qu’il faudrait !

2626. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame Sand »

III Ce n’est guère que vers les trois quarts de ce premier volume d’une Correspondance qui ressemble presque à une trahison de la part de ceux qui la publient, tant elle ravale de toutes manières Madame Sand, comme talent et comme caractère, qu’elle se met à raconter son embarquement sur cette mer orageuse, où, par parenthèse, elle n’a jamais eu, elle, que du beau temps. […] Cette publication, après nous avoir découvert dans le grand Écrivain, comme ses amis l’appellent encore, le prosaïsme fondamental sous la poésie de la surface le sans esprit absolu, la nullité ou la médiocrité des aperçus, le commun insupportable de ces lettres qui tuent le poète plus ou moins artificiel qui est dans ses ouvrages, mais qui ne sort jamais ni du fond de l’âme ni du fond de la vie, cette publication met à bas, tout à coup et du même coup, le masque poétique et grandiose que Madame Sand s’était composé et sous lequel on la voyait, fantaisie errante et féconde, imagination désintéressée !

2627. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Dante »

Quoiqu’accablante par elle-même, on a trouvé que la gloire du Dante ne pesait pas assez encore, et on a mis par-dessus, dans d’incroyables commentaires, le faux poids de bien des idées chimériques ou d’admirations erronées. […] On mit même au service de cette idée folle une érudition épouvantable ; car la science est toujours de force à dévorer l’absurde, et tout savant est un père Hardouin possible, qui n’attend que l’occasion pour naître.

2628. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXIII. P. Enfantin »

Saint-Simon le prophétique, comme Fourier l’hiéroglyphique, comme Cabet, l’innocent Cabet, l’Icarique, ces grands Excentriques dans l’utopie n’étaient plus que des curiosités intellectuelles, mises au garde-meuble du dix-neuvième siècle, le plus grand marchand de bric-à-brac de tous les siècles ! […] Enfantin ne veut pas être gardé… Il y a dans cette mise en scène de jolies finesses.

2629. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Lefèvre-Deumier »

Pour notre compte, nous n’aimons pas beaucoup ces titres spirituels qu’il faut expliquer par une préface et qu’on met à la tête de ces choses si simples et qui pourraient être si grandes : — des vers. […] C’est à qui, devançant ce procès du cercueil, A s’en rire tout haut mettra le plus d’orgueil.

2630. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Victor de Laprade. Idylles héroïques. »

Il a mis, dans ce volume, héroïque et idyllin, l’ennui sous les deux espèces, et nous l’avons eu en prose comme en vers. […] Quinet, l’auteur de ce grand poème d’Ahasvérus, maintenant à peu près oublia, mit en usage, il y a trente ans !

2631. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Deltuf » pp. 203-214

… Sera-t-il le Marivaux du dix-neuvième siècle, un Marivaux inespéré, avec la couleur que le dix-huitième siècle, qui ne mit du rouge qu’aux joues de ses femmes, ne connaissait pas, et que n’avait point Marivaux, dont les grâces étaient incolores, mais qui s’en vengeait par l’expression et le mouvement. […] Paul Deltuf a mise en scène avec une rare énergie et un tour comique et attendri tout ensemble, fait pour étonner, si M. 

2632. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXII. Des panégyriques latins de Théodose ; d’Ausone, panégyriste de Gratien. »

L’orateur parle avec éloquence de tous les maux que nos ancêtres ont soufferts sous ce tyran ; il peint les brigandages et les rapines, les riches citoyens proscrits, leurs maisons pillées, leurs biens vendus, l’or et les pierreries arrachées aux femmes ; les vieillards survivant à leur fortune ; les enfants mis à l’enchère avec l’héritage de leurs pères ; le meurtre employé comme les formes de justice, pour s’enrichir ; l’homme riche invoquant l’indigence, pour échapper au bourreau ; la fuite, la désolation ; les villes devenues désertes et les déserts peuplés ; le palais impérial, où l’on portait de toutes parts les trésors des exilés et le fruit du carnage ; mille mains occupées jour et nuit à compter de l’argent, à entasser des métaux, à mutiler des vases ; l’or teint de sang, posé dans les balances, sous les yeux du tyran ; l’avarice insatiable engloutissant tout, sans jamais rendre, et ces richesses immenses perdues pour le ravisseur même qui, dans son économie sombre et sauvage, ne savait ni en user, ni en abuser ; au milieu de tant de maux, l’affreuse nécessité de paraître encore se réjouir ; le délateur errant, pour calomnier les regards et les visages, le citoyen qui de riche est devenu pauvre, n’osant paraître triste, parce que la vie lui restait encore, et le frère, dont on avait assassiné le frère, n’osant sortir en habit de deuil, parce qu’il avait un fils. […] Cette idée, comme on voit, tenait à l’ancien préjugé romain, qui mettait de la gloire dans le suicide ; erreur justement condamnée aujourd’hui par la religion et par les lois.

2633. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre premier. Des principes — Chapitre IV. De la méthode » pp. 81-92

S’il est vrai que les sciences doivent commencer au point même où leur sujet a commencé (axiome 104), la métaphysique, cette reine des sciences, commença à l’époque où les hommes se mirent à penser humainement, et non point à celle où les philosophes se mirent à réfléchir sur les idées humaines.

2634. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XIX. »

Comme l’évêque de Ptolémaïs, sous l’impression du spectacle de la nature mis en rapport avec le cœur de l’homme, il marquait par des hymnes les principales heures et les divisions du temps. […] « Ainsi notre propre nuit, l’obscurité de nos cœurs complices de la fraude, bientôt mise à découvert, pâlira devant le règne de Dieu.

2635. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Oudry  »

Oudry Si vous avez vu le Retour de chasse d’Oudri, et son Chat sauvage pris au piège, vous en mettrez ici ce que vous en savez.

2636. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — epigraph »

Chaque langue a son caractère qui se révèle par les sonorités, par les formes verbales ; c’est dans les mots qu’il met d’abord son empreinte obscure et profonde.

2637. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — F — Fabrègue, Aimée »

Frédéric Mistral Je ne doute pas de voire victoire, car vous avez une flamme de jeunesse et de foi capable de mettre le feu aux quatre coins de la ville, ou de la vie, si vous aimez mieux.

2638. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — T — Téry, Gustave (1871-1928) »

Cela est moins monotone que les paperasses documentaires par où le roman expérimental entreprit de mettre à nu, interminablement, l’humaine bestialité.

2639. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre II. Les couples de caractères généraux et les propositions générales » pp. 297-385

Nous appelons cause l’antécédent invariable, effet le conséquent invariable. » Au fond, nous ne mettons rien autre chose sous ces deux mots. […] Telle est la première méthode ; par elle, on exclut les différences des cas considérés, ce qui met à part leurs ressemblances. […] Étant donné le tintement d’une sonnette heurtée par son battant, on la met sous le récipient d’une machine pneumatique et l’on fait le vide ; aussitôt, le son cesse. […] Quand les frottements du point d’attache sont aussi faibles que possible, et quand l’air environnant est aussi rare que possible, il met trente heures, et non plus quelques minutes, à s’arrêter. […] Mais l’expérience est aisée : nous n’avons qu’à mettre un thermomètre en contact avec la substance couverte de rosée, et à en suspendre un autre un peu au-dessus, hors de la portée de son influence.

2640. (1895) Les confessions littéraires : le vers libre et les poètes. Figaro pp. 101-162

Au lieu d’en faire un exercice de prodige, on doit y mettre ou l’essor du Cantique, ou le soupire voluptueux de l’idylle, ou le cri modulé de l’élégie. […] Si j’écrivais des vers symbolistes à l’heure où mes pauvres quarante-quatre ans vont sonner, je me ferais à moi-même l’effet d’une coquette déjà dévastée, qui se met du fard. […] — Tous les passades écrits en italique, mis dans la bouche du Comte, nous furent donnés, avec la meilleure grâce du monde, par M. de Montesquiou. […] Retté ne serait-il pas d’édicter les règles que met en musique… pardon ! […] J’ai toujours rêvé d’être mon poète, de me mettre en musique.

2641. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » p. 487

Ses Ouvrages ne forment pas un grand volume ; mais il a assez bien écrit pour faire honneur à ses lumieres, à son goût, à son style, & mettre en évidence l’ineptie de ces Productions bizarres, dont le Public a eu la bonté de s’infatuer.

2642. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » p. 392

On voit, par la lecture de ses Mémoires, mis son nom à ses Ouvrages, n’est pas moins connu des Gens de Lettres.

2643. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article »

La Bruyere, en parlant de ce Journal, tel qu’il étoit alors, le met au dessous du rien.

2644. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Montoya, Gabriel (1868-1914) »

Montoya ne met guère dans ses chansons que des fleurs, des parfums, des brises, du bleu, des soupirs et des baisers… Mais ses fleurs sont entêtantes, et ses baisers sont ardents et même ils mordent.

2645. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article »

On chercheroit en vain, dans ses Sermons, cette éloquence vive & pénétrante qui captive l’esprit & subjugue le cœur ; mais ces heureuses qualités, qui ne sont pas données à tous les Orateurs, sont remplacées par une simplicité noble, un ton de douceur & d’onction, qui met ses Discours bien au dessus des fades déclamations & de la composition apprêtée de la plupart de nos Prédicateurs modernes.

2646. (1899) Préfaces. — Les poètes contemporains. — Discours sur Victor Hugo pp. 215-309

Il porte à la majesté de l’art un respect trop pur pour s’inquiéter du silence ou des clameurs du vulgaire et pour mettre la langue sacrée au service des conceptions viles. […] C’est pour cela sans doute que les lecteurs enthousiastes mettent le Lac fort au-dessus de Novissima Verba. […] Un souffle de cette vigueur mettrait en pièces les mirlitons nationaux si chers aux oreilles obstruées de refrains de guinguette. […] En admettant que le sentiment humain, c’est-à-dire moderne, doive prédominer sans cesse, à quoi bon se mettre sous l’invocation d’Homère, ici plutôt qu’ailleurs ? […] Mettre en relief et en lumière, avec vigueur, justesse et précision, les vices et les ridicules individuels ou sociaux, voilà l’unique mission du satirique.

2647. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Saint-Paul, Albert (1864-19..) »

Achille Delaroche Son œuvre, encore peu volumineuse, vaut surtout par la qualité et le met au rang des meilleurs.

2648. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bazan, Noël (18..-19..) »

Il n’eut qu’à le mettre en vers.

2649. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article »

Le long séjour qu’il fit dans le Levant, le mit sans doute à portée de s’instruire par lui-même de tout ce qui concerne les cérémonies & pratiques religieuses des Peuples qui l’habitent.

2650. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article »

Ne mettons pas, au reste, ces sortes de succès au rang des titres qui peuvent assurer une gloire solide dans quelque état que l’on soit, & encore moins dans les Lettres.

2651. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Baudry, P. »

Baudry) fit, sur la demande de quelques chansonniers, la musique de leurs chansons, puis, trouvant que ses collaborateurs ne lui donnaient pas assez d’ouvrage, il se mit à manier la rime, s’essaya dans la chanson satirique, politique et mondaine, et remporta un très bon succès.

2652. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers, Tome xix. (L’île d’Elbe, — L’acte additionnel. — Le champ de mai.) » pp. 275-284

Mais tout cela nous montre, dans un dernier exemple, la fièvre qui s’est emparée de quelques esprits sur ce chapitre de 1815, et comment chacun s’est mis à revoir et à repeindre cette époque de crise à travers ses préventions d’aujourd’hui. […] Tacite a de grandes et d’admirables parties, mais il en a dans l’ordinaire de bien dures et de bien denses ; il veut mettre partout des profondeurs ; quand la pensée est si pressée d’intervenir à tout coup, les faits s’en accommodent comme ils peuvent, et ils sont véritablement à la gêne.

2653. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — George Sand, Lélia (1833) »

Cette tentative, qui a été si impuissante pour rien édifier, a eu le mérite de mettre à nu plusieurs plaies de l’ordre social ; on a mieux senti en particulier ce qu’avaient d’irrégulier et de livré au hasard la condition de la femme, son éducation d’abord, et plus tard dans le mariage son honneur et son bonheur. […] Mais c’était peu, et une autre découverte moins innocente, ayant succédé à la première, n’a pas tardé à être mise en circulation et à tout dominer.

2654. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « en tête de quelque bulletin littéraire .  » pp. 525-535

Il nous arrive un peu comme au xvie  siècle, lorsque les procédés mis en circulation par les chefs de l’école, par Du Bellay et Ronsard, furent devenus familiers à tous et que chaque jeune cœur au renouveau se crut poëte. […] Cette autorité, pourtant, ne pouvait dépendre que de poëtes ainsi haut placés, féconds et puissants ; de leur part, un chef-d’œuvre dans l’épopée, des chefs-d’œuvre au théâtre, auraient mis ordre au débordement lyrique et assuré à notre mouvement littéraire sa consistance et sa maturité.

2655. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Virgile et Constantin le Grand par M. J.-P. Rossignol. »

Rossignol établit, avant tout, ce soin scrupuleux et presque religieux que mirent les Grecs à distinguer les genres divers de poésie, et à maintenir ces distinctions premières durant des siècles, tant que chez eux la délicatesse dans l’art subsista : La nature dicta vingt genres opposés D’un fil léger entre eux chez les Grecs divisés ; Nul genre, s’échappant de ses bornes prescrites, N’aurait osé d’un autre envahir les limites… André Chénier s’est fait, dans ces vers, l’interprète fidèle de la poétique de l’antiquité. […] Je ne suis pas un si fervent adorateur de Théocrite que l’était Huet, qui nous apprend lui-même que, dans sa jeunesse, chaque année au printemps, il relisait le poëte de Sicile ; j’ai pourtant fait plus d’une fois le charmant pèlerinage, et chaque fois, après avoir admiré la vivacité spirituelle et ingénue des personnages, la grâce piquante et naïve du dialogue, la vérité des peintures, je me suis préoccupé de la construction du vers, de ces ressorts cachés que le poëte met en jeu pour produire plusieurs de ses effets. » Le résultat de ces observations multipliées et patientes, c’est que le dactyle peut s’appeler l’âme de la poésie bucolique , et que, sans parler du cinquième pied où il est de rigueur, les deux autres places qu’il affectionne dans le vers pastoral sont le troisième pied et le quatrième, avec cette circonstance que le dactyle du quatrième pied termine ordinairement un mot, comme pour être plus saillant et pour mieux détacher sa cadence.

2656. (1874) Premiers lundis. Tome II « Des jugements sur notre littérature contemporaine à l’étranger. »

Faites la police chez vous, Messieurs ; vous avez bien commencé par Byron, Shelley, par Godwin, par plusieurs de vos vrais poètes et de vos grands hommes, que votre pruderie a mis à l’index ; ce serait trop d’exigence à nous de nous plaindre. […] Toutefois, au bruit de la réaction morale qui semble depuis quelque temps s’organiser, et à laquelle l’article reproduit par la Revue britannique vient prêter sa grosse voix, nous concevons qu’il y ait de quoi mettre hors des gonds une littérature, même un peu plus patiente que ne l’est la nôtre.

2657. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Conclusion » pp. 355-370

L’Académie française a mis au concours cette question : « De la nécessité de concilier dans l’histoire critique des lettres le sentiment perfectionné du goût et les principes de la tradition avec les recherches érudites dites et l’intelligence historique du génie divers des peuples » ; et, bien que les concurrents aient évidemment peu de foi dans cette nécessité, puis que, d’année en année, le prix ne se décerne point, nous ne pouvons-nous empêcher d’admirer avec joie la foi de l’Académie elle-même dans cette nécessité non douteuse ; car, voyez ! […] Ils sont excellents pour la plupart, et l’on n’a point coutume de demander à son maître d’écriture par quelle déduction rationnelle et en vertu de quel principe a priori, il veut qu’on étende bien ses doigts, qu’on ne mette pas son cahier de travers, qu’on ramène sa plume vers sa poitrine, et qu’on se tienne droit comme un I.

2658. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre II. La commedia dell’arte » pp. 10-30

Tous ces personnages ramassés sur la place publique, la commedia dell’arte les mit en scène et les fit servir au divertissement, non seulement du peuple, mais des cours les plus brillantes et des plus doctes académies. […] On lui mit devant et derrière son blason dans lequel figurait ordinairement un porc-épic.

2659. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XV. La commedia dell’arte au temps de Molière et après lui (à partir de 1668) » pp. 293-309

Quoi qu’il en soit de ce dernier point, il est constant que les Italiens prirent à Molière ses inventions comiques sans plus de scrupules qu’il n’en avait mis à puiser dans leur répertoire. […] Il prit un manteau qui le couvrait jusqu’aux talons, et, ayant caché son petit chapeau, il se mit dans une chaise.

2660. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « F.-A. Cazals » pp. 150-164

Elles marquent une époque curieuse dans l’histoire des lettres depuis le moment où tout Saint-Denis, révolutionné, se mettait aux fenêtres pour voir passer les « décadents » jusqu’au moment où le vagabond Verlaine recevait, dans un galetas du quartier Saint-Jacques, au milieu de l’élite de la Jeunesse, par l’organe du comte Robert de Montesquiou-Fézensac, les hommages de la Noblesse de France. […] Sans fortune, n’ayant pour vivre qu’un modeste emploi, quelque part dans un ministère, il s’était mis tout à coup en tête d’éditer à ses frais les poètes inconnus, et le plus extraordinaire c’est qu’il arrivait à vendre ses volumes, mais il voulut aller trop vite.

2661. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préfaces des « Odes et Ballades » (1822-1853) — Préface de 1824 »

C’est ce qui le détermine aujourd’hui à fortifier cette publication nouvelle d’une déclaration simple et loyale, laquelle le mette à l’abri de tout soupçon d’hérésie dans la querelle qui divise aujourd’hui le public lettré. […] En effet, si, après une révolution politique qui a frappé la société dans toutes ses sommités et dans toutes ses racines, qui a touché à toutes les gloires et à toutes les infamies, qui a tout désuni et tout mêlé, au point d’avoir dressé l’échafaud à l’abri de la tente, et mis la hache sous la garde du glaive ; après une commotion effrayante qui n’a rien laissé dans le cœur des hommes qu’elle n’ait remué, rien dans l’ordre des choses qu’elle n’ait déplacé ; si, disons-nous, après un si prodigieux événement, nul changement n’apparaissait dans l’esprit et dans le caractère d’un peuple, n’est-ce pas alors qu’il faudrait s’étonner, et d’un étonnement sans bornes ?

2662. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre XVII. Morale, Livres de Caractéres. » pp. 353-369

Ils ont mis aussi à contribution les meilleurs moralistes, & leurs recueils sont le précis de ce que chacun d’eux a dit de mieux. […] On a trouvé depuis environ cent ans un nouveau moyen de nous faire connoître nos ridicules ; c’est d’en mettre la satyre dans la bouche d’un étranger qu’on fait voyager en France.

2663. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Le Christianisme en Chine, en Tartarie et au Thibet »

Entrepris dans un but de propagande religieuse, — l’auteur était lazariste, — ces voyages, dont nous avons rendu compte avec une sympathie presque enthousiaste, car, à part de leur but, le plus grand que puisse atteindre l’homme, ils prouvaient autant de caractère, de décision, de persévérance que de curiosité élevée ; ces voyages, qu’il faudra désormais citer quand on parlera de l’Asie, ont mis pour la première fois dans la circulation des notions certaines sur ces mystérieuses populations qui vivent et meurent depuis tant de siècles comme des fourmilières d’insectes dans des boîtes fermées, sous le couvercle semé d’hiéroglyphes de leurs impénétrables civilisations. […] Toute cette partie de l’ouvrage de Huc, avec sa science très vivante et très appuyée, n’en justifie pas moins l’épigraphe chinoise pleine de tristesse qu’il a mise au frontispice de son histoire : « Oh !

2664. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Marie-Antoinette » pp. 171-184

Marie-Thérèse, la femme forte et prudente, qui mettait Dieu au-dessus des États et les intérêts immortels au-dessus de tous les intérêts terrestres, n’aurait pas désiré, avec l’ardeur qu’elle y mit, le mariage de sa fille avec le Dauphin de France, si l’idée d’une grande chose chrétienne n’avait plané sur son dessein.

2665. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XII. Marie-Antoinette, par MM. Jules et Edmond de Goncourt » pp. 283-295

Marie-Thérèse, la femme forte et prudente, qui mettait Dieu au-dessus des États, et les intérêts immortels au-dessus de tous les intérêts terrestres, n’aurait pas désiré, avec l’ardeur qu’elle y mit, le mariage de sa fille avec le Dauphin de France, si l’idée d’une grande chose chrétienne n’avait plané sur son dessein !

2666. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « W.-H. Prescott » pp. 135-148

, il ne l’ait pas mis en pièces et déchiqueté avec la violence d’un ennemi qui croit faire une justice en faisant un massacre… voilà ce qui constitue véritablement une originalité à Prescott, et ce qui produit presque la stupéfaction chez son lecteur. […] Et puisque nous sommes en pleine couleur espagnole, je me permettrai cette image : le taureau anglo-saxon a regardé sans fureur tout le rouge du règne de Philippe II, qui aurait mis hors de sens des têtes moins solides que celle de ce Front-de-Bœuf historique.

2667. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « IV. Saisset »

Y a-t-il mis le poids d’une idée de plus, et n’est-ce pas sans cesse le même ballonnage de spiritualiste et de providentiel, qui ne leste rien, n’assure rien et titube toujours ? […] L’enthousiasme du mandarin, et je dirai plus, de l’écolier, est ici plus fort que le bon sens primitif et met un défaut de proportion des plus choquants entre la critique qu’on s’est permise et l’admiration qu’on garde encore… Eh bien !

2668. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Barthélemy Saint-Hilaire »

Or, je l’avouerai, cette Histoire des Histoires de Mahomet m’a impatienté, non lorsque je la lisais, mais après coup, quand elle a été entièrement lue et que j’ai songé à ce que l’auteur aurait pu faire, s’il n’avait pas eu au cou son collier de chien d’Académie, dont l’esprit qui le met reste toujours un peu pelé, comme le cou du chien. […] La Bible et l’Évangile l’ont mis au monde et l’ont bercé, ce rêveur qui a fini sa longue rêverie par la réalité d’un monde !

2669. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Henri Heine »

C’est un Hoffmann sans fumée de pipe, un Hoffmann qui met son fantastique dans le bleu le plus pur, dans les clairs de lune les plus blancs et les plus veloutés. […] Mais si nous mettions : Et vous, charme de Dieu, qui sait si le génie, etc.

2670. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXV. Des éloges des gens de lettres et des savants. De quelques auteurs du seizième siècle qui en ont écrit parmi nous. »

L’envie debout à côté d’eux les observe ; la calomnie les outrage ; tourmentés à proportion qu’ils sont grands, on met quelquefois le malheur à côté du génie. […] On aurait cru déroger, en parlant une langue qui n’avait pas deux mille ans d’antiquité ; d’ailleurs, il fallait bien mettre un grand prix à ce qu’on avait étudié toute sa vie ; et ceux qui aspiraient à la renommée, ou qui avaient l’orgueil plus grand de la donner aux autres, se croyaient sûrs d’être immortels, parce que Cicéron, Démosthène et Tacite l’étaient.

2671. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « [Note de l’éditeur] »

[Note de l’éditeur] Nous ne pouvons mieux faire que de mettre en tête de ce volume, au lendemain de la mort de M. 

2672. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Brun, Charles »

Émile Pouvillon Votre midi n’est pas un midi quelconque, mais le midi du Languedoc, quelque chose entre l’éblouissement de la Provence et le sourire de l’Aquitaine, le midi de votre Peyrou montpelliérain qui voit la montagne et la mer, mais qui les voit sans les toucher, dans la fluidité d’un rêve ; le midi de Nîmes et de la maison Carrée, et encore, le midi de Pradier, de ce gentil statuaire qui mit un reflet de la beauté antique sur ses mièvres et voluptueuses figurines, auxquelles certaines de vos poésies font penser quelquefois.

2673. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 260

On ne peut concevoir, après cela, que son peu de fortune l’ait forcé de mettre sa plume aux gages des Libraires, ce qui a plus que vraisemblablement occasionné les défauts de ses Ouvrages.

2674. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 406

Il est facile d’en juger par plusieurs articles de l’Encyclopédie, copiés mot à mot de son Cours des Sciences, auxquels la prudence des Compilateurs n’a pas jugé à propos de mettre son nom : Sic vos non vobis, &c.

2675. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » p. 144

Ses Romans, ses Dissertations, ses Critiques, ses Traductions, ses Livres mystiques n’ont pas le sens commun, & on disoit très-bien d’un de ses Ouvrages, intitulé les Délices de l’esprit, qu’il falloit mettre à l’Errata : Délices, lisez Délires.

2676. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » p. 502

Galland en a été l’Editeur, & a mis à la tête de cette Collection, une Préface, où il expose l’utilité du travail de d’Herbelot, dont il étoit aisé de se convaincre par la seule lecture de l’Ouvrage.

2677. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Drouais  »

Je le mettrais sous une glace, afin d’en conserver longtemps la fraîcheur.

2678. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Brun, Antoine »

Horace Valbel Un jour, un après-midi, Brun et quelques amis vinrent au Chat Noir, et profitant de ce qu’ils étaient seuls, ses amis le prièrent de se mettre au piano et de chanter.

2679. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hinzelin, Émile (1857-1937) »

Mais que de jolies choses… C’est Adam chassé, le Charnier des moines, — un chef-d’œuvre pur, — c’est la délicate Fleur de tout, c’est le sonnet fantaisiste : Si Dieu se mettait en grève… [L’Année des poètes (1891).]

2680. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » p. 393

GÉRARD, [Philippe-Louis] Chanoine de Saint Louis du Louvre, né à Paris en 1732 ; Auteur d’un Roman en Lettres, intitulé le Comte de Valmont, où les principes de la Philosophie du siecle sont mis en action de la maniere la plus capable d’en faire sentir les dangers.

2681. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » p. 460

On doit être peu surpris que ses rêveries aient été bien reçues, dès qu’elles furent mises au jour.

2682. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Drouais et Voiriot »

Il leur met dans les yeux de la vie, de la transparence, et l’humide et le gras et le nageant qui y est.

2683. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — E — Évrard, Laurent (1858-1911) »

Laurent Évrard, à la fin du court avertissement où il justifie son système rythmique, ajoute : « Ce n’est donc pas de la matière sonore ni du nombre métrique que le lecteur pourra se plaindre, mais du poète qui ne sait pas, dans les entraves d’or, marcher d’un pas agile ou boiter comme un dieu. » À quoi d’aucuns objecteraient que le poète eût mieux fait de ne se mettre aux chevilles nulle entrave, même d’or… Ce poète sait voir et exprimer ; il observe la vie latente des eaux, des pierres et des plantes ; l’obscur frisson des choses inertes ne lui a pas échappé.

2684. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » p. 148

On ne la propose pas comme un modele de style ; on ne peut en regarder l’Auteur que comme ceux qui découvrent les mines, en laissant aux autres le soin d’épurer les métaux qu’on en tire, & de les mettre en valeur ; ce qui aura toujours un grand mérite aux yeux des justes appréciateurs de ce genre d’utilité.

2685. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 349

On lui a l’obligation d’avoir débrouillé divers Traités d’Archimède, & de les avoir mis à la portée des Commençans par des démonstrations plus claires & moins enchaînées.

2686. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 384

On auroit pu se dispenser de mettre au jour son commerce de Lettres avec Boileau, où l’on ne trouve qu’une répétition ennuyeuse d’excuses d’une part, & d’indulgence de l’autre.

2687. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » p. 388

La Préface qu’il a mise à la tête de son excellente Traduction de Quintilien, prouve qu’il étoit capable de très-bien écrire d’après lui-même.

2688. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » p. 159

Cette résistance donna lieu à Lafontaine, d’autres disent à Chaulieu, de faire des vers qui finissoient ainsi : Il en sera, quoi qu’on en die ; C’est un impôt que Pontchartrain Veut mettre sur l’Académie.

2689. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXVIIIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe » pp. 81-160

Dans cette conviction on nous força à coucher seuls, et lorsque, ne pouvant plus maîtriser nos terreurs, nous nous échappions du lit pour nous glisser dans la compagnie des valets et des servantes, notre père, enveloppé dans sa robe de chambre mise à l’envers, et, par conséquent, suffisamment déguisé pour nous, nous barrait le passage et nous faisait retourner sur nos pas. […] On la fit asseoir à la table de ses cousins ; elle trempa ses lèvres dans un verre de vin à notre santé ; puis elle se retira en recommandant à ses cousins de ne pas faire trop de bruit, parce que sa tante, leur mère, allait se mettre au lit. […] — « Vous avez raison, lui dis-je ; mais supposez un moment qu’un jeune homme qui vous adore mette cette déclaration de tendresse sous votre main en vous conjurant de la signer de votre nom ; que feriez-vous ? […] J’ai mis dedans bien des petites choses pour en gagner une autre. […] Ainsi tu m’as reconnu, petit ange, dès que j’ai mis le pied dans le jardin ?

2690. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIIe entretien. Vie et œuvres du comte de Maistre » pp. 393-472

Il y avait un abîme de vices et un abîme de vertus entre Rabelais et l’abbé de Maistre ; la bêtise seule, la bêtise pure, la bêtise qui s’ignore, qui s’enfle et qui jouit naïvement d’elle-même, était enregistrée dans ces pages ; le rire qui en sortait était franc, mais point méchant : l’abbé de Maistre mettait de la charité même dans le ridicule. […] Le comte de Maistre s’y met à nu tout entier à son insu, et, bien que l’homme y soit toujours brillant et charmant dans sa nature, il disparaît souvent sous le diplomate de peu de scrupule. […] Malgré sa piété très sincère, il y a une certaine impiété à se mettre au niveau de l’Infini et à parler sans cesse au nom de Dieu. […] XVII À quelques jours de là on trouve dans une lettre à son frère ces délicieuses mélancolies du regret des temps passés : « Moi qui mettais jadis des bottes pour aller à Sonaz (château près de Chambéry), si je trouvais du temps, de l’argent et des compagnons, je me sens tout prêt à faire une course à Tobolsk, voire au Kamtschatka. Peu à peu je me suis mis à mépriser la terre ; elle n’a que neuf mille lieues de tour. — Fi donc !

2691. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre premier. Causes physiologiques et psychologiques du plaisir et de la douleur »

On a objecté aussi la vive douleur du mal de dents, qui ne semble pas pourtant mettre notre conservation en danger. […] L’animal ne peut pas se contenter de réparer son système nerveux ; il faut qu’il le mette en usage pour chercher sa nourriture et se défendre, il faut qu’il se dépense pour se conserver. […] Rien de plus mobile, sans doute, rien de plus relatif que les objets et les circonstances de nos plaisirs ou de nos peines : l’impression produite par le même objet sur la sensibilité « est tantôt agréable, tantôt désagréable, tantôt indifférente ; le même mets qui me plaisait tout à l’heure excite maintenant mon dégoût » ; mais, de ce que nos plaisirs et nos peines sont en relation avec une multiplicité de circonstances, a-t-on le droit de conclure qu’ils soient eux-mêmes de pures relations ? […] Tout ce qu’on peut dire, c’est que la forme ou la qualité de l’excitation doit être mise en ligne de compte. […] Si, au moment où je goûte des mets savoureux, j’entends tout à coup une belle musique, si, en outre, mes yeux sont charmés par le spectacle inattendu de danses gracieuses, il y a là un surcroît qui ajoute un plaisir à d’autres plaisirs, sans que j’aie besoin de passer par la porte de la souffrance.

2692. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre onzième. La littérature des décadents et des déséquilibrés ; son caractère généralement insociable. Rôle moral et social de l’art. »

L’action est la mise en équilibre de tout l’organisme autour d’un centre de gravité mobile, comme l’est toujours celui de la vie. […] Au dix-septième siècle, on tenait le moi pour haïssable ; on reprochait à Montaigne de s’être mis en scène, d’avoir étalé avec complaisance ses qualités et même ses défauts. […] Il ne faut voir en soi qu’un coin de la nature à observer, le seul qui ait été mis d’une façon constante à notre portée. […] C’est ainsi que, peu à peu, en élargissant sans cesse ses relations, l’art en est venu à nous mettre en société avec tels et tels héros de Zola. […] En outre, l’art met de plus en plus en jeu la passion ; or, il y a encore là plus d’un écueil.

2693. (1856) Cours familier de littérature. II « VIIe entretien » pp. 5-85

Sans dire ici (ce n’est pas la place) ce que nous croyons entrevoir sur le résultat de cet enfantement de plusieurs siècles, nous sommes convaincu que l’Europe souffre pour mettre au monde, quoi ? […] La liberté lui mettait ces armes dans la main, mais il lui fallait un peuple soldat et vétéran de gloire comme la France pour lui en apprendre l’usage. […] Dès qu’on met le pied sur le sol italien, on entend cette voix dans tous les murmures, dans tous les arbres, dans toutes les vagues, dans tous les vents, comme dans tous les vers. […] — Je jure en toute conscience, à ces critiques, qu’il n’y a pas l’ombre de vanité ni de ridicule complaisance pour moi-même dans ce procédé de mon esprit, qui se met quelquefois ici en scène, cœur et âme, pour faire comprendre et sentir aux autres ce que j’ai senti et compris moi-même en traversant la vie, les hommes et les livres. […] Ce n’est donc pas, quoi que mes critiques en pensent, par vanité que je me mets et que je me mettrai souvent en scène dans ces entretiens : c’est par connaissance de la nature humaine.

2694. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIe entretien. Boileau » pp. 241-326

En quelque site, en quelque désert qu’il soit situé, c’est quelque chose de délicieux que de s’être fait le possesseur d’une habitation champêtre. » Et ailleurs : « Un enfant rustique, sans autre parure que le vêtement nécessaire pour le préserver du froid, nous servira, dans des plats d’argile, des mets achetés au prix de peu de pièces de cuivre. […] Dans les temps bien heureux du monde en son enfance, Chacun mettait sa gloire en sa seule innocence, Chacun vivait content et sous d’égales lois ; Le mérite y faisait la noblesse et les rois, Et, sans chercher l’appui d’une naissance illustre, Un héros de soi-même empruntait tout son lustre ; Mais enfin par le temps le mérite avili Vit l’honneur en roture et le vice ennobli, Et l’orgueil, d’un faux titre appuyant sa faiblesse, Maîtrisa les humains sous le nom de noblesse. […] C’est là, cher Lamoignon, que mon esprit tranquille Met à profit les jours que la Parque me file. […] Berriat Saint-Prix a recueilli de nos jours et a mis à leur date et à leur vraie lumière chaque syllabe de cette vie poétique ou familière. […] Enfin M. de Cambrai me paraît beaucoup meilleur poète que théologien ; de sorte que, si, par son livre des Maximes, il me semble très peu comparable à saint Augustin, je le trouve, par son roman, digne d’être mis en parallèle avec Héliodore, l’auteur du roman grec de Théagène et Chariclée.

2695. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — II. (Fin.) » pp. 36-54

Les gens que vous avez le plus écoutés autrefois sont infiniment secs, raisonneurs, critiques, et opposés à la vraie vie intérieure5 : si peu que vous les écoutassiez, vous écouteriez aussi un raisonnement sans fin, et une curiosité dangereuse qui vous mettrait insensiblement hors de votre grâce, pour vous rejeter dans le fond de votre naturel. […] Ces courtes entrevues si observées, et que chacun dévorait du regard, ont été peintes par Saint-Simon avec ce feu de curiosité et de mystère qu’il met à tout ce qu’il touche : il en a même un peu exagéré le dramatique, car, dans l’un des cas, il fait de Saumery, qui était à côté du prince, une sorte d’espion et d’Argus farouche, tandis que ce n’était qu’un ami et un homme très sûr. […] Pourtant, comme il se mêle à tout cela bien de l’irréflexion et de la mode, selon notre usage français de tous les temps, il arrivera que pendant la très courte année où le duc de Bourgogne, devenu Dauphin après la mort de son père, se mettra un peu en frais de bonne grâce et en attitude de plaire, l’opinion se retournera subitement en son honneur, célébrera en lui une transformation soudaine, et, quand on le perdra quelques mois après, il sera pleuré comme un prince irréparable, les délices trop tôt ravies du genre humain.

2696. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Œuvres complètes de Buffon, revues et annotées par M. Flourens. » pp. 55-73

Et en effet, lorsque Buffon âgé de quarante-deux ans publia en 1749 les premiers volumes de son Histoire naturelle, malgré les dix années qu’il avait mises à la préparer, il avait beaucoup à apprendre : il n’était nullement botaniste, il n’était point anatomiste ; il avait contre la méthode et contre toute classification scientifique des préventions qu’il exprime tout d’abord d’un air de bon sens, et qui soulevèrent bien des réclamations fondées. […] Quand son enfant fut né et aux moments où il poussait des cris, il suffisait pour l’apaiser, dit-on, que sa mère lui mît entre ses petites mains une fleur, et elle ne s’en étonnait pas. […] Un autre écueil, qui est celui d’esprits sérieux et élevés, ce serait de faire un Buffon plus penseur et plus prophète de l’avenir qu’il ne l’a été, de lui supposer dans l’idée nos systèmes, et de lui mettre sur le front un nuage.

2697. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Maucroix, l’ami de La Fontaine. Ses Œuvres diverses publiées par M. Louis Paris. » pp. 217-234

Dieu, par sa miséricorde, le veuille mettre dans son saint repos ! […] Ami de Tallemant des Réaux presque autant que de La Fontaine, il aimait l’historiette, l’anecdote, le bon conte, mais il s’arrêtait en chemin et n’allait pas jusqu’à le mettre en vers. […] Ce dernier vers est plus philosophique, ce semble, qu’il n’appartient à Maucroix ; il lui est venu plutôt ici par imitation de l’Antiquité, et il n’y mettait pas, on peut le croire, la force de sens et toute l’intention épicurienne qu’y aurait données Chaulieu.

2698. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Madame Swetchine. Sa vie et ses œuvres publiées par M. de Falloux. »

Elle écrivait beaucoup, mais le plus souvent pour elle seule, sur de petits papiers et au crayon : « Écrire au crayon, disait-elle ingénieusement, c’est comme parler à voix basse. » Ses amis se sont donc mis à écouter tout ce qu’elle s’était dit à elle-même à voix basse ; ils ont déchiffré ses petits papiers et ont recueilli les Pensées qu’elle y avait tracées plus ou moins distinctement. […] Tout cela, je l’avoue, mis en regard des pensées de Mme Swetchine, m’a paru plus vrai, plus naturel, plus vraisemblable, sans mener d’ailleurs nécessairement à des conclusions rigoureuses. […] « J’ai souvent pensé, dit-elle, que c’était par le cœur qu’on ne s’ennuyait jamais, les deux héros de l’ennui, M. de Chateaubriand et Benjamin Constant, m’ayant mise sur la voie de cette vérité en démontrant sibien que ce n’est pas l’esprit qui sauve d’un tel mal. » On trouve son compte avec elle par bien des pensées de ce genre, même quand on ne la suit pas dans ses plus hautes régions Enfin, sans tant épiloguer sur les mots, ceux qui se livreront à cette lecture, dussent-ils comme moi rester à mi-chemin de la sympathie, y gagneront au moins une vue intéressante sur une nature de femme très rare et très distinguée, qui fait le plus grand honneur au monde aristocratique où elle a vécu.

2699. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Études de politique et de philosophie religieuse, par M. Adolphe Guéroult. »

Il vient de parler des diverses hymnes et proses célèbres de la liturgie, le Dies iræ, le Vexilla, le Stabal, et il en a défini l’impression profonde avec largeur et vérité : « Je sais que beaucoup, dit-il, qui n’ont peut-être jamais mis le pied dans une église pour prier, qui n’ont jamais ressenti dans leur cœur la pieuse ferveur de la foi, riront de mon enthousiasme et de mon admiration ; mais je dois leur dire que depuis sept ans j’ai manqué peu de représentations au Théâtre-Italien, que j’ai suivi assidûment les concerts du Conservatoire, que Beethoven m’a donné la fièvre de plaisir, que Rossini m’a remué jusqu’au fond de l’âme, que Mme Malibran et Mlle Sontag ont été pour moi de bienfaisantes divinités ; que pendant près de deux ans je n’ai eu d’autre religion, d’autre espérance, d’autre bonheur, d’autre joie que la musique ; que, par conséquent, ils ne peuvent me regarder comme un trappiste qui ne connaît que ténèbres et matines ; mais il faut qu’ils sachent aussi que celui qui leur parle, et qui aujourd’hui est bien loin de la foi chrétienne, a été pendant cinq ans catholique fervent, qu’il s’est nourri de l’Évangile, de l’Imitation ; qu’élevé dans un séminaire, il y a entendu des chœurs de deux cents jeunes gens faire résonner sous une voûte retentissantel’In exitu. […] Les Assemblées sont faites pour mettre des bâtons dans les roues du char et pour l’enrayer, s’il va trop vite, encore plus que pour l’accélérer. […] Mais je ne mets pourtant pas le plus noble des sentiments sur ce trône un peu trop isolé où le placent les adorateurs exclusifs de la liberté.

2700. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire des cabinets de l’Europe pendant le Consulat et l’Empire, par M. Armand Lefebvre (suite et fin.) »

Si je lis l’abbé de Pradt, Marmont, Rœderer, je suis étonné du peu de profondeur que ces gens d’esprit ont mis à l’apprécier ; ou plutôt je ne devrais pas en être étonné, car c’est la condition de tout ce qui se juge au jour le jour et avant que le drame humain soit accompli. […] Les événements avaient marché plus vite que sa pensée, et son ambition ne faisait, pour ainsi dire, qu’exécuter les arrêts de sa fortune. »  Et dans le récit où il a résumé les préliminaires et les causes de la guerre de Russie en 1812, il ne voit dans cette entreprise, de la part de la France, que « le dernier terme de ce vaste système de conquête et de prééminence qui a son point de départ dans le traité de Campo-Formio et qui fut reproduit plus tard dans celui de Lunéville. » Napoléon n’avait point fondé ce système, il l’avait pris à son compte et avait mis son génie et sa gloire à le faire triompher ; la Révolution, devenue toute guerrière, voulait sa revanche sur l’Europe : la partie une fois engagée sur ce pied, de revanche en revanche l’enjeu avait grossi toujours : « Il y a un fait capital, répétait M.  […] Dans la condition où l’Europe se trouvait alors, l’Angleterre et l’Autriche devaient finir par entraîner la Prusse et la Russie, ce qui mettait la France dans l’impérieuse nécessité d’être, à elle seule, plus forte que les quatre grandes monarchies ensemble, ou de subir leur loi.

2701. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet »

Or voici ce qui ressort pour moi le plus clairement de cette longue étude multipliée, qui a mis successivement en relief tant de moments et ravivé ou réhabilité avec plus ou moins de critique tant de figures ; voici l’aperçu et le résumé total, après qu’on a rabattu les exagérations et réduit les partis de chaque historien. […] « Il m’avait reçu d’abord avec de grandes démonstrations de joie ; mais, lorsque je fus près de le quitter, son visage vénérable se couvrit de larmes ; il me retint par mon habit, et prenant ce ton de dignité qui sied si bien à la vieillesse, s’apercevant, malgré sa cécité, de ma grande émotion, il me dit : « Attendez » ; puis il se mit à genoux, pria Dieu, et, m’imposant ses mains sur la tète, il me donna sa bénédiction. » Ce vieux soldat, Jacques Des Sauts, comme on l’appelait (probablement parce qu’il habitait près de la chute de l’Oyapock), est-il réellement l’original qui a suggéré l’idée de Chactas, également aveugle, également contemporain du siècle de Louis xiv, et qui se souvenait toujours de Fénelon, « dont il avait été l’hôte ?  […] Car, si j’insiste sur les qualités de Malouet, ce n’est pas que je le mette le moins du monde en comparaison avec le grand peintre, avec le grand fascinateur de notre âge ; je sais tout ce qui lui manque.

2702. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Mathurin Regnier et André Chénier »

Il le sentait bien, et ne se livrait à elles que par instants, pour revenir ensuite avec plus d’ardeur à l’étude, à la poésie, à l’amitié. « Choqué, dit-il quelque part dans une prose énergique trop peu connue44, choqué de voir les lettres si prosternées et le genre humain ne pas songer à relever sa tête, je me livrai souvent aux distractions et aux égarements d’une jeunesse forte et fougueuse : mais, toujours dominé par l’amour de la poésie, des lettres et de l’étude, souvent chagrin et découragé par la fortune ou par moi-même, toujours soutenu par mes amis, je sentis que mes vers et ma prose, goûtés ou non, seraient mis au rang du petit nombre d’ouvrages qu’aucune bassesse n’a flétris. […] C’est alors qu’un soir, après avoir assez mal dîné à Covent-Garden, dans Hood’s tavern, comme il était de trop bonne heure pour se présenter en aucune société, il se mit, au milieu du fracas, à écrire, dans une prose forte et simple, tout ce qui se passait en son âme : qu’il s’ennuyait, qu’il souffrait, et d’une souffrance pleine d’amertume et d’humiliation ; que la solitude, si chère aux malheureux, est pour eux un grand mal encore plus qu’un grand plaisir ; car ils s’y exaspèrent, ils y ruminent leur fiel, ou, s’ils finissent par se résigner, c’est découragement et faiblesse, c’est impuissance d’en appeler des injustes institutions humaines à la sainte nature primitive ; c’est, en un mot, à la façon des morts qui s’accoutument à porter la pierre de leur tombe, parce qu’ils ne peuvent la soulever ;— que cette fatale résignation rend dur, farouche, sourd aux consolations des amis, et qu’il prie le Ciel de l’en préserver. […] Or j’ai soigneusement recherché dans ses œuvres les traces de ces premières et profondes souffrances ; je n’y ai trouvé d’abord que dix vers datés également de Londres, et du même temps que le morceau de prose ; puis, en regardant de plus près, l’idylle intitulée Liberté m’est revenue à la pensée, et j’ai compris que ce berger aux noirs cheveux épars, à l’œil farouche sous d’épais sourcils, qui traîne après lui, dans les âpres sentiers et aux bords des torrents pierreux, ses brebis maigres et affamées ; qui brise sa flûte, abhorre les chants, les danses et les sacrifices ; qui repousse la plainte du blond chevrier et maudit toute consolation, parce qu’il est esclave ; j’ai compris que ce berger-là n’était autre que la poétique et idéale personnification du souvenir de Londres, et de l’espèce de servitude qu’y avait subie André ; et je me suis demandé alors, tout en admirant du profond de mon cœur cette idylle énergique et sublime, s’il n’eût pas encore mieux valu que le poète se fût mis franchement en scène ; qu’il eût osé en vers ce qui ne l’avait pas effrayé dans sa prose naïve ; qu’il se fût montré à nous dans cette taverne enfumée, entouré de mangeurs et d’indifférents, accoudé sur sa table, et rêvant, — rêvant à la patrie absente, aux parents, aux amis, aux amantes, à ce qu’il y a de plus jeune et de plus frais dans les sentiments humains ; rêvant aux maux de la solitude, à l’aigreur qu’elle engendre, à l’abattement où elle nous prosterne, à toute cette haute métaphysique de la souffrance ; — pourquoi non ? 

2703. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre VI. De la philosophie » pp. 513-542

Or, personne, de nos jours, ne se flattant d’être éclairé par les miracles, je n’entends pas ce qu’on peut mettre à la place de la philosophie : la raison, dira-t-on ? […] Lorsque les passions intestines mettent le désordre dans toutes les idées morales, il reste encore des vérités dont la route est connue et la méthode fixée. […] Chaque progrès nouveau dans ce sens met une partie de plus du bonheur social en sûreté.

2704. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre II. L’éloquence politique »

Royer-Collard et Camille Jordan, que le 18 Brumaire mit brutalement en disponibilité, et qui se retrouveront quinze ans plus tard parmi les orateurs de la Restauration626. […] S’il sait mettre à contribution ses amis, s’il sait leur faire produire ce qu’ils n’auraient jamais fait sans lui, il en est véritablement l’auteur. » Du moins, nous sommes assurés par ses travaux antérieurs de la capacité de son esprit, de l’étendue de ses connaissances : si, accablé d’affaires, il dut recourir à des secrétaires pour la préparation de ses discours, c’était une économie de temps, et non un supplément de génie qu’il y cherchait. […] Biographie : Mirabeau (1749-1791) fut mis par son père chez l’abbé Choquard qui tenait une pension pour les enfants indisciplinés ; sous-lieutenant à Saintes, il est emprisonné à l’île de Ré par lettre de cachet pour dettes et intrigues amoureuses ; de là envoyé en Corse, puis marié en Provence (1772), interdit pour dettes, incarcéré an château d’If pour voies de fait sur un gentilhomme qui a insulté sa sœur et ne veut pas se battre ; d’If, on le transfère au fort de Joux, d’où il s’évade, et fuit avec Mme de Monnier.

2705. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre premier. La contradiction de l’homme » pp. 1-27

Ainsi, les instincts de l’homme mis en désarroi par la transformation de la vie, il a fallu subvenir à leur insuffisance. […] Telle habitude sociale, telle loi, la crainte d’un dommage ou d’un châtiment, l’espoir d’une récompense ou d’un gain, une organisation nouvelle des relations mettent mon intérêt en harmonie avec celui des autres. […] Et la crainte du gendarme met l’intérêt du possesseur d’accord avec celui du voleur possible, mais intimidé.

2706. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires et correspondance de Mallet du Pan, recueillis et mis en ordre par M. A. Sayous. (2 vol. in-8º, Amyot et Cherbuliez, 1851.) — II. » pp. 494-514

Tous les grands acteurs qui avaient jusque-là joué les premiers rôles ayant été ou massacrés ou mis en fuite et dépopularisés, « la Convention, dit-il, et ses partis se trouvent dépourvus de gens à talents et à caractère, ou possédant un degré même médiocre de capacité administrative. […] celui-là a su mettre à profit l’adversité… Je ne me suis donc pas trop avancé quand j’ai dit que Mallet du Pan, s’il avait vécu jusqu’en 1830, n’eût pas manqué d’adhérer à la tentative de monarchie constitutionnelle de Louis-Philippe ; et avec son rare pronostic, dès le 20 février 1796, dans une lettre où il est question de ce même duc d’Orléans, il écrivait : Si, par une conduite compatible avec les personnes, avec les préjugés et les intérêts du temps, avec la force impérieuse des circonstances, le roi (Louis XVIII) ne retourne et ne fixe vers lui ou vers sa branche cette multitude de révolutionnaires anciens et nouveaux, Royalisés à demi ou en chemin de se royaliser, vous les verrez prendre le premier roi qui s’arrangera avec eux. […] Son habileté et son bonheur seront au comble s’il parvient seulement à mettre en harmonie d’anciens préjugés avec les nouveaux, les intérêts qui précédèrent et ceux qui suivirent la Révolution : fragile mais désirable alliance de l’autorité monarchique et de la liberté, contre laquelle lutteront sans cesse les souvenirs, soit de la toute-puissance royale, soit de l’indépendance révolutionnaire… Il pressentait combien le génie français, toujours dans les extrêmes, et composé d’insouciance et d’impatience, était peu propre à cette lutte continuelle, à cet équilibre qui exige suite, vigilance, et modération jusque dans le conflit.

2707. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le surintendant Fouquet. (Article Fouquet, dans l’Histoire de Colbert, par M. P. Clément.) 1846. » pp. 294-312

Mazarin l’avait mis en méfiance du surintendant, et, en même temps, il lui avait offert le remède : « Sire, je vous dois tout, avait-il dit à son lit de mort, mais je crois m’acquitter en quelque sorte avec Votre Majesté en lui donnant Colbert. » Depuis longtemps, Colbert avait l’œil sur les procédés de Fouquet, sur ses irrégularités et ses dilapidations ; il avait adressé à Mazarin des mémoires détaillés à ce sujet ; il allait continuer plus expressément le même rôle auprès de Louis XIV et par son ordre ; et, s’il était poussé dans cette chasse ardente qu’il faisait au surintendant par tous les aiguillons de son ambition personnelle, il ne l’était pas moins par tous les instincts de sa nature exacte et rigide : intérêt à part, il devait en vouloir au surintendant de toute l’indignation et de toute la haine que peut avoir contre un magicien plein de maléfices et de prestiges le génie de la bonne administration et de l’économie. […] Mais le retard qu’il dut mettre à l’exécution de son projet lui coûtait beaucoup : Car, non seulement, dit-il, je voyais que, pendant ce temps-là, il pratiquait de nouvelles subtilités pour me voler, mais ce qui m’incommodait davantage était que, pour augmenter la réputation de son crédit, il affectait de me demander des audiences particulières ; et que, pour ne pas lui donner de défiance, j’étais contraint de les lui accorder, et de souffrir qu’il m’entretînt de discours inutiles, pendant que je connaissais à fond toute son infidélité. […] Je leur ai déclaré aussi que je ne voulais plus de surintendant, mais travailler moi-même aux finances avec des personnes fidèles qui agiront sous moi, connaissant que c’était le vrai moyen de me mettre dans l’abondance et de soulager mon peuple.

2708. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Portalis. Discours et rapports sur le Code civil, — sur le Concordat de 1801, — publiés par son petit-fils — I. » pp. 441-459

Je n’ai point émigré et je n’ai jamais approuvé l’émigration, parce que j’ai toujours cru qu’il était absurde de quitter la France dans l’espoir de la sauver, et de se mettre dans la servitude des étrangers pour prévenir ou pour terminer une querelle nationale. […] Il s’attache aussi à combattre l’idée que l’uniformité dans la législation soit nécessairement un bien, et ici, en se faisant l’organe des vieilles mœurs, des vieilles coutumes cantonnées sur divers points de la France, il se mettait en contradiction avec ce qu’il devait plus tard accomplir comme l’un des principaux rédacteurs du Code civil. […] Portalis qualifiait ce décret du 3 Brumaire « un véritable Code révolutionnaire sur l’état des personnes. » Il montrait que le régime révolutionnaire avait dû être détruit par la Constitution : « Et au lieu de cela, c’est la Constitution que l’on veut mettre sous la tutelle du régime révolutionnaire. » La suite et l’enchaînement régulier de la discussion s’animait chemin faisant, sur ses lèvres, d’expressions heureuses à force de justesse : « Avec la facilité que l’on a, disait-il, d’inscrire qui l’on veut sur des listes, on peut à chaque instant faire de nouvelles émissions d’émigrés. » Il demandait pour la Constitution de la patience et du temps : « Il faut que l’on se plie insensiblement au joug de la félicité publique. » Il observait que jamais nation ne devient libre quand l’Assemblée qui la représente ne procède ainsi que par des coups d’autorité : « Les institutions forment les hommes, si les hommes sont fidèles aux institutions ; mais si nous conservons l’habitude de révolutionner, rien ne pourra jamais s’établir, et nos décrets ne seront jamais que des piliers flottants au milieu d’une mer orageuse. » On entrevoit par ces passages que Portalis n’était pas dénué d’une certaine imagination sobre et grave qui convenait à la nature et à l’ordre de ses idées législatrices.

2709. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre II : Variations des espèces à l’état de nature »

Watson, auquel je suis profondément obligé du concours qu’il m’a prêté de toutes manières, m’a fourni une liste de 182 plantes anglaises qui sont en général regardées comme des variétés, mais qui ont toutes été mises par quelques botanistes au rang d’espèces. […] Parmi les animaux qui s’accouplent pour chaque parturition et qui jouissent au plus haut degré de la faculté de locomotion, les formes douteuses, mises au rang d’espèces par un zoologiste et de variétés par un autre, se trouvent rarement dans la même contrée, mais sont nombreuses en des stations séparées. […] De plus, s’il se met à étudier les formes alliées apportées de contrées actuellement discontinues, en quel cas il ne peut guère s’attendre à trouver les liens intermédiaires entre les formes douteuses, il devra s’en rapporter entièrement à l’analogie, et la difficulté croît alors à l’infini.

2710. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre V. Seconde partie. Des mœurs et des opinions » pp. 114-142

Une pareille constitution ne peut être que l’ouvrage du temps, parce que c’est le temps seul qui met en harmonie les mœurs et les opinions. […] Cette digression sur la noblesse m’a écarté un peu de ma route : je voulais seulement mettre sur la voie d’expliquer pourquoi cette différence entre les mœurs et les opinions se fait sentir avec une telle puissance. […] Le sentiment moral est tellement entré, par lui, dans tous les hommes, qu’il n’a plus autant besoin de se mettre sous la protection des institutions sociales.

2711. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XII : Pourquoi l’éclectisme a-t-il réussi ? »

Maine de Biran mettait partout des forces spirituelles, et le public souhaitait devoir la matière détruite au profit de l’âme. […] Personne ne voudrait la comparer, comme les anciennes, à un fleuve qui arrose et renverse ; point de bruit, point de mouvement, point d’effet ; c’est une baignoire bien propre, bien reposée et bien tiède, où les pères, par précaution de santé, mettent leurs enfants. […] De ce côté, toute espérance n’est pas perdue ; on est déjà bien revenu du rêve, des aspirations vagues et des grands mots ; la chute de vingt systèmes réformateurs nous a mis en défiance ; nous ne pensons plus que la poésie soit un instrument de précision, et nous commençons à soupçonner que le cœur est fait pour sentir et non pour voir.

2712. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE STAEL » pp. 81-164

Elle amassait les premiers matériaux de l’ouvrage, qu’un second voyage en 1807 et 1808 la mit à même de compléter. […] Je me mis à lui parler allemand ; elle comprenait très-bien cette langue, et ses deux enfants la comprenaient et la parlaient très-bien aussi. […] Corinne est bien l’image de l’indépendance souveraine du génie, même au temps de l’oppression la plus entière, Corinne qui se fait couronner à Rome, dans ce Capitole de la Ville éternelle, où le conquérant qui l’exile ne mettra pas le pied. […] Aussi il lui arriva souvent d’étonner, par ses empressements d’expansion et sa mise en avant, des Anglais, des Hollandais, des hommes distingués de ces races réservées et prudentes, lorsqu’ils la rencontraient dans le monde pour la première fois. […] Fauriel, celui-ci qui lui donnait le bras se mit involontairement à admirer un point de vue : « Ah !

2713. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « [Avertissement de l'auteur] » p. 1

En commençant par un morceau sur Mme de Sévigné, on n’a pas prétendu donner un portrait étudié de cette personne incomparable : ce ne sont que quelques pages légères, autrefois improvisées au courant de la plume après une lecture des Lettres, et antérieures aux recherches récemment publiées ; mais on les a replacées ici bien plutôt à titre d’hommage, et parce qu’il est impossible d’essayer de parler des femmes sans se mettre d’abord en goût et comme en humeur par Mme de Sévigné.

2714. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » p. 155

Son Plaidoyer contre les Jésuites est ce qui le fit connoître : il est vraisemblable que les circonstances dans lesquelles il fut fait, contribuerent beaucoup à le mettre en vogue chez les ennemis de la Société.

2715. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » p. 494

Ce prétendu Poëte n’étoit au fond qu’un Rimeur, dont les Vers n’ont guere été connus que de lui seul & de l’Imprimeur, qui fut forcé de les lire avant de les mettre sous presse.

2716. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hennique, Nicolette (1886-19..) »

La valeur de ce livre de Nicolette Hennique : Des rêves et des choses, est grande, car on y trouve quelque chose de nouveau ; et cette nouveauté, ce n’est ni la vigueur, ni la mélancolie, ni la beauté qui certes y abondent ; ce ne sont pas non plus les savantes expressions, ni les bons vers — toutes ces qualités ne font que mettre ce livre parmi les meilleurs — la vraie nouveauté qui ressort de l’ouvrage de Nicolette Hennique, c’est cet élément imprécis mais certain qui distingue les œuvres solides et qui, cette fois, nous dénote la naissance d’un nouveau caractère.

2717. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » p. 506

Hersan ne sont pas de la premiere force ; elles annoncent plus de goût dans l’expression, que de richesse dans l’invention ; malgré cela, on peut les mettre à côté de ce que plusieurs Modernes ont composé de mieux en ce genre.

2718. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » p. 386

O Dieux, qui d’un si rare effort, Mîtes tant de vertus en elle, Détournez un si mauvais sort ; Qu’elle ne soit point infidelle : Et faites plutôt que la Belle Vienne à soupirer de ma mort, Que non pas d’une amour nouvelle !

2719. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Boizot  »

Ah, Monsieur Chardin, si Boizot eût été de vos amis, vous auriez mis son Telemaque chez Calipso, dans l’endroit obscur à côté du Repos de la Vierge de Millet.

2720. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIe entretien. Suite de la littérature diplomatique » pp. 5-79

XIII Aucune de ces races, pas même la race grecque, n’est donc assez agglomérée dans les mêmes provinces d’Europe, d’Asie ou d’Afrique, pour s’y lever en une unité puissante et pour dire : « Je suis la population héritière des Turcs. » Il y a plus encore : c’est que toutes les races, chrétiennes ou autres, disséminées sur le sol ottoman sont mille fois plus antipathiques entre elles qu’elles ne le sont aux Turcs sous l’empire desquels ces races vivent, et que, si l’on mettait aux voix à qui l’empire, il n’y a pas une de ces tribus qui ne répondît sans hésiter : « Aux Turcs plutôt qu’aux Grecs ; aux Turcs plutôt qu’aux Arméniens ; aux Turcs plutôt qu’aux Arabes ; aux Turcs plutôt qu’à aucune de ces petites races faibles et tyranniques, assez fortes pour nous opprimer, trop peu pour nous défendre. […] C’est le cas, ou jamais, de conférer avec l’Europe ou de déchirer pour toujours le droit public, cette charte des peuples, des États, des trônes, de jouer le monde au jeu des insurrections royales, et de ne plus mettre dans les balances que des ambitions et des boulets, au lieu de droit public ! […] Ne mettons pas la main entre la Providence et son œuvre. […] Si la France met à ce prix une alliance permanente avec le cabinet de Vienne, l’Autriche donnera la main à la seule main qui peut la sauver d’immenses hasards. […] Nous le croyons avec tant de foi que, malgré notre amour de la paix, si le Piémont et l’Angleterre s’obstinaient, le Piémont par ambition, l’Angleterre par ressentiment de nos victoires et par prévision de nos embarras, à ruiner le système d’une Italie fédérale, à élever avec les débris de tant d’États un trône, italien de nom, anglais de base, antifrançais d’intention, sur toute la péninsule ; et si le Piémont et l’Angleterre mettaient l’élévation de ce trône au prix de la paix ou de la guerre avec le Piémont et avec l’Angleterre, nous dirions franchement : La guerre !

2721. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIIe entretien. Revue littéraire de l’année 1861 en France. M. de Marcellus (1re partie) » pp. 333-411

« Le mouillage de Saïde étant peu sûr, je vis la goélette mettre à la voile pour Saint-Jean d’Acre, où nous nous donnâmes rendez-vous, et je restai seul sur la côte de Syrie. […]   « Je me déclarai très pressé de partir, et je choisis la dernière alternative que m’offrait lady Stanhope ; je me mis aussitôt en route avec l’Arabe qu’elle m’avait envoyé. […] « En me voyant, elle mit la main sur son cœur, à la manière dont les Arabes saluent, et, sans se lever, elle me fit place à ses côtés. […] « Je fis de grands efforts pour me mettre en possession des manuscrits et des instruments astronomiques d’Ali-Bey ; on m’avait dit que le chef des Maugrebins en était le détenteur. […] Je la priai d’appeler ses femmes, elle se mit à rire.

2722. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIIe entretien. Socrate et Platon. Philosophie grecque. Deuxième partie. » pp. 225-303

Il met, comme partout dans ses Dialogues, ses idées dans la bouche de Socrate ; mais il est évident que c’est pour leur donner l’autorité du philosophe mort. […] Mais, lorsque la discussion s’arrêta, et que j’eus prononcé ces dernières paroles, il ne put se contenir plus longtemps, et, prenant son élan comme une bête sauvage, il vint à nous comme pour nous mettre en pièces. […] Mais, si c’est le propre de l’injustice d’engendrer des haines et des dissensions partout où elle se trouve, elle produira sans doute le même effet parmi les hommes libres ou esclaves, et les mettra dans l’impossibilité de rien entreprendre en commun ? […] « — Qu’elle la conserve, à la bonne heure. « — Telle est donc la nature de l’injustice, qu’elle se rencontre dans un État ou dans une armée, ou dans quelque autre société, de la mettre d’abord dans une impuissance absolue de rien entreprendre par les querelles et les séditions qu’elle y excite ; et ensuite de la rendre ennemie et d’elle-même, et de tous ceux qui lui sont contraires, c’est-à-dire des hommes justes, n’est-il pas vrai ? « — Oui. « — Ne se trouvât-elle que dans un seul homme, elle produira les mêmes effets : elle le mettra d’abord dans l’impossibilité de rien faire, par les séditions qu’elle excitera dans son âme, et par l’opposition continuelle où il sera avec lui-même ; ensuite elle le rendra son propre ennemi et celui de tous les justes ; n’est-ce pas ?

2723. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIe entretien. Vie du Tasse (2e partie) » pp. 65-128

Un préjugé puéril met les poètes en suspicion de démence ; ce préjugé est né assez naturellement, dans le monde, de l’opinion que l’imagination prédomine exclusivement dans les poètes, et que cette prédominance de l’imagination seule les prédispose à l’égarement d’esprit. […] Alphonse répondit de sa propre main au cardinal Albano une lettre que nous possédons, et qui prouve assez que le séquestre mis sur les papiers et sur les poésies du Tasse à Ferrare, n’avait d’autre objet que d’en prévenir la destruction par les mains d’un insensé, dans un de ses accès de mélancolie. […] Il sera préalablement nécessaire cependant de constater qu’il a été réellement affligé de mélancolie, et que ces soupçons de malice et de prétendues persécutions qu’il a semés contre nous en Italie, n’ont pas d’autre origine que cette humeur mélancolique ; en preuve de ceci est cette accusation absurde qu’il nous a imputée d’avoir eu l’intention de le mettre à mort, quoique nous l’ayons toujours caressé et traité avec la plus extrême faveur ; il m’eût été bien facile d’exécuter ce sinistre projet, si j’avais eu jamais la démence de le concevoir. […] Comment aurait-il mis des conditions si sensées et si bien stipulées d’avance à ce retour ? […] Pendant ce temps un domestique ayant apporté de l’eau, nous nous lavâmes les mains, et nous nous mîmes à table.

2724. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 novembre 1886. »

Il faut admirer et encourager l’opiniâtre et très consciencieux travailleur qui a assumé la lourde tâche de mettre en français ces sept grands drames wagnériens, et qui a jusqu’à présent réussi à nous donner en somme les plus sérieux et les plus honorables essais de traduction musicale qui aient encore été chantés sur nos théâtres. […] Un restaurant est ouvert tout auprès du théâtre, où l’on trouve, avec les mets les plus délicats de cette fine cuisine allemande, — saucisses bouillies, choucroute, lard cru de Mayence avec ou sans trichines, etc., des journaux français spirituellement rédigés, la Revue wagnérienne, par exemple. […] D’abord, il est bon que vous sachiez que « la musique de Wagner vous met dans la région des absorbantes essences, à mille lieues des hasards du vulgaire. » Va pour mille lieues. […] Gevaert a obligeamment mises à la disposition de la direction. […] André Suarès, dans son Wagner (Paris, revue d’art dramatique, 1899) met aussi en cause cet aspect mondain du voyage à Bayreuth dans une description très critique et acerbe.

2725. (1888) Petit glossaire pour servir à l’intelligence des auteurs décadents et symbolistes « Petit glossaire »

— Mettre par paire, par couple. […] — Mettre en corrélation, l. […] — Se mettre en grand deuil. […] Oui, Celle-là (serais-tu perdu en une salle, spectateur très étranger, Ami) pour peu que tu déposes avec soumission, à ses pieds d’inconsciente révélatrice, ainsi que les roses qu’enlève et jette en la visibilité de régions supérieures un jeu de ses chaussons de satin pâle et vertigineux, la Fleur de ion poétique instinct n’attendant de rien autre la mise en évidence et sous le vrai jour des mille imaginations latentes : alors, par un commerce dont son sourire paraît verser le secret, sans tarder elle te livre à travers le voile dernier qui toujours reste, la nudité de tes concepts et silencieusement écrira ta vision à la façon d’un Signe, qu’elle est. […] … Où l’on a sadinet cy pris, cy mis.

2726. (1870) La science et la conscience « Chapitre IV : La métaphysique »

Il n’y est point question de l’essence ni de la substance des choses ; la conception d’un substrat matériel, tel que nous le représente l’imagination, est mise de côté, ainsi que l’hypothèse invérifiable des atomes ; le mot de force n’y figure que comme expression d’un fait, le mouvement sous toutes ses formes. […] N’est-ce pas confondre ce que la psychologie met tant de soin à distinguer, à savoir, l’ordre des phénomènes affectifs et l’ordre des phénomènes volontaires ? […] C’est toujours l’hypothèse du mécanisme universel, avec toute la différence que la science moderne a mise entre le de Natura rerum de Lucrèce et le Système du monde de Laplace. […] En général, quand on met deux êtres en présence et en rapport, les termes par lesquels on exprime la nature de ce rapport ne donnent lieu à aucune équivoque. […] Ce que nous avions en nous avec l’impureté du vieil homme nous sera rendu avec la pureté de l’homme renouvelé, comme les métaux mis au feu ne perdent point de leur pure substance, mais sont purifiés de ce qu’ils ont de grossier.

2727. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XL » p. 166

C'est ce qu’on ne fait guère en France, précisément à cause de cette position assise qui les met hors de cause.

2728. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « [Préface] »

Cette édition a été mise au courant des travaux publiés en Angleterre depuis quatre ans.

2729. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » p. 138

On est vivement ému de la noblesse & de la chaleur qui dominent dans la plupart de ses Sermons, composés d’abord en François, & ensuite mis en Latin par l’Auteur lui-même, qui ne les a publiés que dans cette langue.

2730. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 357-358

Deux Pieces de Montfleury, la Fille Capitaine, & la Femme Juge & Partie, sont restées au Théatre ; avantage qui le met au dessus de la plupart des Poëtes comiques, venus après lui, qui ont beaucoup plus travaillé, & dont il n’est rien resté.

2731. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 391-392

Deux fils qu’il laissa, furent aussi Ministres, & écrivirent des Controverses, sans y mettre autant d’emportement que leur pere.

2732. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » p. 473

Le naturel, la délicatesse, une galanterie éloignée de toute fadeur, une facilité étonnante à s’exprimer avec autant de grace que de justesse, un ton de morale qui n’est point recherché, le mettent au dessus de la plupart des Beaux-Esprits de son temps & de ceux de notre Siecle qui se sont exercés dans le même genre.

2733. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » p. 252

Ses talens pour la prédication le mettent au dessus de tous les Orateurs de sa Secte.

2734. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » p. 356

Il a beau, dans sa Préface, prévenir le Lecteur sur cette singularité, son aveu ne le met point à l'abri de l'accusation de Plagiat, parce qu'il prend un soin marqué de cacher jusqu'à quel point il l'a poussé.

2735. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — W. — article » p. 523

Le nouveau Grammairien auroit dû au moins répandre quelque jour sur les connoissances que nous devons aux Auteurs qu'il a mis à contribution ; mais il s'en faut bien qu'il se soit donné cette peine, si indispensable quand on travaille pour les Jeunes gens.

2736. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 132-133

Fléchier à la femme d’un Président de Rennes : « A l’égard de Mlle Descartes, son nom, son esprit, sa vertu, la mettent à couvert de tout oubli, & toutes les fois que je me souviens d’avoir été en Bretagne, je songe que je l’ai vue, & que vous y êtes ».

2737. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » p. 60

La Pastorale de Titon & l’Aurore, mise en Musique par M.

2738. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » p. 390

Il a mis à la tête de plusieurs de ses Consultations imprimées : Moi, qui ne cede à personne, & à qui personne ne peut rien apprendre.

2739. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » p. 305

Le Président de Fieubet mit au bas du Portrait de Madame de la Suze, ce quatrain digne du Siecle d'Auguste.

2740. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » p. 352

Son Essai sur l'Histoire économique des mers occidentales de France, peut être mis au nombre des Ouvrages les plus utiles qui aient paru de nos jours.

2741. (1913) Le mouvement littéraire belge d’expression française depuis 1880 pp. 6-333

Telle est la vertu de notre influence, que Demolder mit dans sa peinture presque autant de mesure élégante que, jusqu’alors, de verve outrée. […] Le paysan avait mis la tête à la fenêtre, et la grâce balsamique de l’aurore l’enveloppait ; il respirait profondément. […] Mais l’idée ne manque jamais de noblesse qui met aux prises l’âme humaine impuissante avec la Fatalité. […] Les tragiques grecs, par exemple, mettent en scène une Fatalité également tyrannique. […] Henri Pirenne devait profiter de toutes ces études, les augmenter, les mettre au point.

2742. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 207

On l’a comparé à Roscius pour le naturel & la noblesse de son jeu, car il faut toujours des comparaisons ; mais personne n’a songé à le mettre à côté de Plaute ni de Térence, pour les Comédies qu’il a faites.

2743. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » p. 327

Plein de la Philosophie Platonicienne, il la mit en Vers Latins, sous le titre d’Ecole de Platon.

2744. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » p. 271

Maucomble, à moins qu’on ne lui sache encore gré de nous avoir régalé d’une Tragédie Bourgeoise, sous le titre des Amans désespérés, ou la Comtesse d’Olinval, production monstrueuse, qui n’est autre chose que l’Histoire de l’infortunée Marquise de Ganges, mise en action.

2745. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Guerin » p. 221

L’effet de l’ensemble, l’intérêt de l’action, la position, le caractère, l’expression des figures, la distribution, les groupes, l’entente des lumières, quelque chose même du dessin et de la couleur sont restés ; mais arrêtez, entrez dans les détails, il n’y a plus ni finesse, ni pureté, ni correction ; vous prenez Guerin par l’oreille, vous le mettez à genoux, et vous lui faites faire amende honorable à de grands maîtres si maltraités.

2746. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Mme Valmore, née dans la classe du peuple, était restée une âme plébéienne ; mais elle l’était sans prévention, sans parti pris, sans mettre sans cesse en avant ce qui divise et ce qui sépare. […] Heureusement que c’était à un poète lui-même qu’elle l’adressait ; car il se trouva que la Préface, mise en tête de ces humbles Essais, et qui n’était probablement pas de l’auteur des vers, se ressentait plus qu’il n’aurait fallu de l’existence de prolétaire à laquelle elle se rattachait, et avait un certain goût de doctrines sociales réputées dangereuses. […] La religion et ses ministres divins se penchent sur les blessés pour les bénir, — sur les morts pour envier leur martyre… « Ôte ton chapeau à mon intention en passant devant l’église Notre-Dame, et mets sur ses pieds les premières fleurs de carême que tu trouveras. » Cependant les conséquences ne tardent pas à se faire sentir. […] On a beau masquer et recouvrir cela ensuite, c’est à désespérer les vivants. — Je n’aurai plus maintenant qu’à mettre à la suite les plaintes sans trêve, mais toujours humbles et soumises, de celle que j’ose appeler la Mater dolorosa de la poésie : « (A sa nièce, 1er avril 1853)… Ma bonne Camille, je te remercie de la tendre compassion de ton amitié.

2747. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME ROLAND — I. » pp. 166-193

La Révolution et le mouvement expansif qu’elle communiquait à toutes les âmes patriotiques les mirent naturellement en correspondance avec diverses personnes actives de Paris, en particulier avec Brissot, dont M. […] En pratiquant les hommes influents et les meneurs, elle les avait bien vite pénétrés avec la finesse d’une femme et mis à leur place avec la fermeté d’une mâle intelligence. […] Vous ne pouvez vous représenter l’importance que nos aristocrates mettent à ces bêtises nées peut-être dans leur cerveau ; mais ils voudraient montrer l’Assemblée comme conduite par quelques étourdis excités, échauffés par une dizaine de femmes. » Mme de Staël, en revanche, n’a nulle part (que je me le rappelle) nommé Mme Roland. […] Il faut voir dans la Vie de Madame de La Fayette, par Mme de Lasteyrie (1858), les rapports et la correspondance de Mme de La Fayette avec Roland ministre, lorsqu’elle fut mise en arrestation en septembre 1792 ; il y eut là aussi une gradation marquée, depuis la première rigueur jusqu’au réveil des sentiments d’humanité et de justice.

2748. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre deuxième. Le génie, comme puissance de sociabilité et création d’un nouveau milieu social »

La religion vise au réel, l’art se contente du possible ; il n’en superpose pas moins, comme la religion, un monde nouveau au monde connu, et, de même que la religion, il nous met en rapport d’émotion et de sympathie avec ce monde ; par conséquent, il en fait un monde d’êtres animés plus ou moins analogues à l’homme ; par conséquent enfin, il en fait une société nouvelle ajoutée par l’imagination à la société où nous vivons réellement. […] On dit souvent, dans le langage courant : mettez-vous à ma place, mettez-vous à la place d’autrui, — et chacun peut en effet, sans trop d’effort, se transporter dans les conditions extérieures où se trouve autrui. […] Pareillement, « un même moment de l’esprit germanique a mis au jour Hegel et Gœthe, comme un même moment du génie anglais a produit le théâtre brutal de Wycherley, les grossières satires de Rochester et le violent matérialisme de Hobbes ».

2749. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre II : Examen critique des méditations chrétiennes de M. Guizot »

Guizot, nous mettons le christianisme à part, il nous est impossible de voir dans sa philosophie autre chose que le positivisme. […] D’un côté c’est Dieu qui parle, et de l’autre c’est l’homme ; mais on ne voit pas que la question est précisément de savoir si c’est Dieu qui parle, et, toute grâce surnaturelle mise à part, la croyance que c’est Dieu qui parle est fondée sur des raisons, c’est-à-dire sur des opinions, qui ont exactement le même caractère de certitude relative que les opinions philosophiques. […] Guizot passer entièrement sous silence le grand débat qui a mis l’Europe en feu au xvie  siècle, pour lequel, dans les deux églises, tant de grands hommes sont morts martyrs de leur foi, le débat sur la présence de Jésus-Christ dans l’hostie. […] comme sa bonté et sa justice sont mis à l’abri de toute objection !

2750. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre III. Des Livres nécessaires pour l’étude de l’Histoire sacrée & ecclésiastique. » pp. 32-86

Son histoire de la guerre des Juifs est regardée comme un chef-d’œuvre, qui a fait mettre son auteur au rang des Historiens excellens. […] On peut comparer son livre à une vieille Dame, respectable par sa vertu & par son grand âge, & qui avec cela se coëffe en cheveux, met des mouches, du rouge, & porte un mantelet blanc sur une robe couleur de rose. […] fidélement mis en françois par Mr. […] Quoique le titre ne semble annoncer qu’une narration historique des différens changemens arrivés dans la doctrine des Protestans ; leurs erreurs y sont mises dans un si grand jour, & elles y sont discutées avec tant de solidité, que l’on peut regarder cet ouvrage comme une histoire, & en même tems comme une réfutation complette du Protestantisme.

2751. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Du docteur Pusey et de son influence en Angleterre »

— elles ont divisé, morcelé, pulvérisé tout : religion, philosophie, lois, gouvernements et peuples, si bien que l’homme, resté debout avec sa personnalité isolée dans cette vaste incohérence de toutes choses, a erré, agité mais captif, jusqu’aux bords de la sphère où Dieu l’a mis, pour revenir tout à coup au centre, repoussé par d’inflexibles conséquences — comme par une enceinte d’abîmes ouverts — vers l’unité abandonnée ! […] Dans la solitude où cet ascète de la science s’est retiré, comme enveloppé d’une nuée de miséricorde, quelque chose lui dit-il tout bas que l’obéissance est plus auguste que la science qu’il aime et lui met-il le doigt, quand il ouvre sa Bible, — aux heures de la méditation et de la prière, — sur le mot de Samuel : « Obéir vaut mieux que sacrifier » ? […] En assistant au spectacle singulier et pourtant naturel qu’offre l’Angleterre depuis plusieurs années, un observateur profane dirait — et croirait avoir tout dit — qu’il y a des syllogismes au fond de toutes les situations comme au fond de toutes les pensées ; mais où l’homme met la logique des choses d’après celle de son entendement, le prêtre, plus profond, met la grâce : « C’est l’action spontanée de la grâce — dit encore Mgr Wiseman — qui explique les merveilleux résultats dont nous sommes témoins. » Et le saint évêque a raison.

2752. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » p. 386

Pour se dédommager du peu de succès de son éloquence au Barreau, & réparer les débris de sa fortune qui étoit médiocre, il prit le parti de se mettre aux gages d’un Libraire, & publia volume sur volume, ce qui n’est pas le moyen de faire de bons Ouvrages.

2753. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » p. 70

Si l'on fait attention que de son temps les premiers principes du goût étoient ignorés & la langue encore informe, on aura plus d'indulgence pour les incorrections, les rudesses, les mauvaises plaisanteries qu'on trouve dans ses Satires, & on lui saura gré de la vigueur qu'il a mise dans ses tableaux, des saillies agréables qui ont échappé à sa plume, de l'heureuse naïveté avec laquelle il a attaqué le vice & poursuivi les vicieux : plusieurs de ses Vers peuvent encore passer pour originaux, & il a plusieurs traits qui n'ont point vieilli.

2754. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Additions et appendice. — Sur le comte Dandolo. (Article Marmont, p. 51.) » p. 514

II, p. 233) : « Dandolo, homme d’un caractère vif, chaud, enthousiaste pour la liberté, fort honnête homme, avocat des plus distingués, se mit à la tête de toutes les affaires de la ville… » Son fils, le comte Tullio Dandolo, lui-même écrivain très connu, possède des lettres de Bonaparte, dans lesquelles le premier Consul parle à son père d’« affection » et de l’« estime la plus vraie ».

2755. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préface des « Chansons des rues et des bois » (1865) »

C’est d’ailleurs une sérieuse et mélancolique leçon que la mise en présence de deux âges dans le même homme, de l’âge qui commence et de l’âge qui s’achève ; l’un espère dans la vie, l’autre dans la mort.

2756. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Charles Nodier après les funérailles »

Être un esprit littéraire, ce n’est pas, comme on peut le croire, venir jeune à Paris avec toute sorte de facilité et d’aptitude, y observer, y deviner promptement le goût du jour, la vogue dominante, juger avec une sorte d’indifférence et s’appliquer vite à ce qui promet le succès, mettre sa plume et son talent au service de quelque beau sujet propre à intéresser les contemporains et à pousser haut l’auteur. […] Nodier, depuis bien des années, et même sans qu’aucune maladie positive se déclarât, ressentait souvent des fatigues extrêmes qui le faisaient se mettre au lit avant le soir, chercher le sommeil avant l’heure.

2757. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre II. Le Bovarysme comme fait de conscience son moyen : la notion »

Avant d’user de cette méthode et de la mettre à profit en l’appliquant à divers ordres de phénomènes, on peut rechercher à quelles conditions mentales est liée la faculté bovaryque ; à mieux connaître le mécanisme de cette lorgnette, il sera possible d’en faire par la suite un meilleur usage. […] La seconde part de sa richesse lui est livrée avec plus ou moins d’abondance par l’éducation qui suscite en lui, par le moyen du mot, des images-notions et le met en possession des résultats acquis par l’effort des meilleurs représentants de l’espèce au cours des âges.

2758. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre neuvième. »

Transcrivons ici cet Apologue mis en vers par Boileau, et qui termine sa seconde épître. […] Il n’y avait qu’à mettre ce qu’alors j’avançai, etc… Il est impardonnable d’être si négligent.

2759. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « La Société française pendant la Révolution »

Ils ont vraiment péché aux faits dans les trois pieds d’eau qu’ils ont pris pour un océan historique, et le fretin qu’ils ont rapporté est assez joli, et ressemble à ces poissons rouges qu’on met en bocal. […] ; supposez enfin que toute cette gourme d’esprits faussés, mais non pas faux, qui est en eux, tombe un jour comme elle doit tomber sous peine de perdre le talent dont ils ont le germe, et vous aurez deux écrivains, — ou un écrivain à deux têtes, comme l’aigle d’Autriche — d’une expression étincelante, et chez qui la race mettra son feu !

2760. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Joseph de Maistre »

Sainte-Beuve, qui était sans doute aux Antipodes quand la chose arriva, car non seulement nous avons discuté ces deux malheureux et coupables volumes dans lesquels Albert Blanc se permettait de couper et d’interrompre à sa convenance ces lettres charmantes ou magnifiques de Joseph de Maistre pour mettre, entre deux, ses énormités, à lui, Blanc, et des énormités saint-simoniennes, dans un style attaqué d’éléphantiasis, mais nous sommes allés jusqu’à soupçonner leur éditeur d’interpolation ! […] C’était quelque chose d’incomparable, — une sensibilité, une fierté, une conscience de soi, justement révoltées, et qui, armées de toutes les puissances de l’esprit, savaient s’en servir d’une manière charmante ou poignante, sans blesser une seule fois ce respect dans lequel de Maistre avait mis l’honneur de sa vie !

2761. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « César Daly »

Nous espérons que les conclusions de l’auteur, mises sous ce patronage qui les éclairera en les soutenant et les fera mieux voir encore, saisiront l’attention de l’administration supérieure et pourront devenir, sous son action souveraine, comme une médaille frappée du coup de balancier définitif, toute une législation future. […] Jusque-là, je crois, il n’avait été mis en vue que par lui-même, que par des projets plus ou moins brillants ou ingénieux, et surtout par cette Revue de l’Architecture qui est, elle aussi, un véritable monument !

2762. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Ch. de Barthélémy » pp. 359-372

Ces hommes qui se sont vantés d’avoir mis la liberté dans le monde, ces charlatans et ces menteurs, ces Tartufes de philosophie, agirent hideusement contre l’homme qui les jugea, toute sa vie, avec une indépendance lumineuse… Ils l’insultèrent ; ils le jetèrent au donjon de Vincennes ; ils finirent par faire supprimer son Année littéraire, et ils tuèrent, par là, l’œuvre et l’homme, car il en mourut… Et quand leur révolution triomphante eut passé sur cet assassinat, le xixe  siècle, qui n’avait dans ses grandes oreilles d’âne que le bruit des choses de la Révolution, Pavait oublié, et il fallut… quoi ? […] Et elle était bien due, cette exception, à l’auteur de L’Écossaise et des infamies du Pauvre Diable ; elle était bien due à Voltaire, la nature la plus scélérate qui fût parmi les scélérats qui se mettaient en troupe contre Fréron.

2763. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La révocation de l’Édit de Nantes »

Mettez par la pensée Louis XIV à la place de Henri IV, et Henri IV à la place de Louis XIV, et vous n’aurez rien changé peut-être à la politique de leur époque, tant il est des logiques de situation qui viennent modifier ces grandes individualités politiques qui sont moins des hommes que des systèmes ! […] Quand, de ce côté-ci de la Révolution française, avec des idées de liberté religieuse que cette révolution a créées, nous ne voyons qu’une passion indigne du grand roi dans la révocation de l’Édit de Nantes, une passion odieuse et payée d’un immense désastre industriel, nous ne discernons réellement que la moitié des choses, et nous mettons entre nous et les mobiles de Louis XIV l’épaisseur de nos propres conceptions.

2764. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Le comte de Fersen et la cour de France »

Les misérables princes qui gouvernaient l’Europe parlèrent beaucoup de se lever, mais ils restèrent à s’agiter et à se barbouiller dans les impuissants et sots bavardages de leurs diplomaties, et quand enfin ce lâche égoïsme se mit debout, ce fut pour le compte de la Prusse et trop tard, alors que le Roi et la Reine de France avaient terminé leur martyre du Temple par leur martyre de l’échafaud. […] Hésitations, vantardises, reculades, hypocrisies, chapeaux mis sur l’oreille et aplatis tout à coup par la peur, prétextes pour ne pas bouger, — l’un invoquant sa guerre avec l’Autriche, l’autre sa guerre avec la Porte et la Pologne, — marchandages d’usuriers qui demandent le remboursement et les intérêts de ce que leur dévouement leur coûtera.

2765. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Lettres d’une mère à son fils » pp. 157-170

. — Dans l’intention la plus sérieuse de leur auteur, les Lettres d’une mère à son fils sont évidemment un traité d’éducation mis sous une forme romanesque, comme, par exemple, l’Adèle et Théodore de madame de Genlis, à la différence près que le livre de madame de Genlis, esprit balourd, mais non sans puissance, a de vastes et imposantes proportions, tandis que celui de Corne en a d’un exigu et d’un grêle ! […] Quoique Corne mette, avec l’insolence moderne, pour laquelle il n’est pas fait, le nom de Platon avant le nom de Jésus-Christ, quand il en parle, cependant rien ne nous fait croire qu’il soit l’ennemi raisonné du Christianisme.

2766. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Abailard et Héloïse »

C’est que cette philosophie qui, au xixe  siècle, se réclame avec tant d’orgueil de Descartes et de son cogito, ergo sum, se sent des parentés certaines avec l’homme qui, clerc de l’Église de Dieu, introduisit le scepticisme là où l’Église avait mis ses sécurités sublimes, et déposé dans les esprits de son temps, comme dit Cousin : « le doute salutaire et provisoire qui préparait l’esprit à des solutions meilleures » que celles de la Foi. […] Seulement, on a mis dans le titre, comme un éclatant pavillon propre à couvrir la marchandise, ce fragment déjà ancien de Madame Guizot sur Abailard et sur Héloïse, et que Guizot, par piété conjugale, a terminé.

2767. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XIX. Abailard »

C’est que cette philosophie qui, au dix-neuvième siècle, se réclame avec tant d’orgueil de Descartes et de son cogito, ergo sum, se sent des parentés certaines avec l’homme qui, clerc de l’Église de Dieu, introduisit le scepticisme là où l’Église avait mis ses sécurités sublimes, et déposé dans les esprits de son temps, comme dit M.  […] Seulement on a mis dans le titre, comme un éclatant pavillon propre à couvrir la marchandise, ce fragment déjà ancien de Mme Guizot sur Abailard et sur Héloïse, et que M. 

2768. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXXII. L’Internelle Consolacion »

Mais le succès couvrit tout de son bruit, et il n’est pas jusqu’au nom du chancelier Gerson, sur le compte duquel on mit ce livre d’ascétisme doux, qui ne dut lui être une fière réclame, comme nous disons maintenant, après le deuxième Concile de Constance. […] Comme on voit tout ce que l’on veut dans les livres qu’on aime, l’imagination de ceux qui sont épris de l’Imitation y a mis aussi de la tendresse, mais il n’y en a pas plus que dans tous les livres d’oraison, et même il y en a beaucoup moins.

2769. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Ch. de Rémusat. Abélard, drame philosophique » pp. 237-250

Mais il y a pourtant, entre Abélard et lui, cet intégral Charles de Rémusat, des ressemblances qui expliquent son admiration ; car les hommes, ces Narcisses, se mirent toujours un peu eux-mêmes dans les admirations qu’ils ont… En philosophie, Charles de Rémusat a des parentés très visibles avec Abélard, esprit au fond plus subtil que fort, qui n’allait point — comme les grands Décidés de l’Intelligence, lesquels en sont aussi les plus puissants, — à l’extrémité de toute doctrine, mais qui se plaçait entre deux… Oui ! […] C’est très bien, très convenable, mais cela ne respire ni l’amour sacrilège, ni les affreux regrets des passions coupables, ni la rapide corruption du péché, ni la nature humaine outragée, rien enfin de ce que Shakespeare, par exemple, y aurait mis, si ce sujet d’Héloïse et d’Abélard était tombé dans ses terribles mains… Je te plains de tomber dans ses mains effroyables, Ma fille !

2770. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Caro. Le Pessimisme au XIXe siècle » pp. 297-311

Ribot publia, comme on vient de le voir, une espèce de traduction du système de l’allemand Schopenhauer, non seulement j’ai dit sur ce système les quelques mots de mépris qu’il méritait, mais je crus que ce ne serait là qu’un système de plus à mettre au tas de tous ceux que produit l’Allemagne et qui font l’effet, dans sa littérature, des amoncellements du sable, au désert. […] Caro aurait, en trois mots, mis à ses pieds ce qui doit y être foulé.

2771. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Léon Aubineau. La Vie du bienheureux mendiant et pèlerin Benoît-Joseph Labre » pp. 361-375

Tout homme qui pense, — tout moraliste, — tout physiologiste, — se sentira saisi d‘une ardente curiosité devant le phénomène de cette existence mise en dehors de l’humanité par l’énergique volonté et la passion religieuse d’un homme, et voudra la scruter et s’en rendre compte philosophiquement… Voilà pour la science et pour la pensée ! […] Et cet enfant était la perle qui devait rouler sur le fumier du siècle, sans que le fumier s’en aperçut ; et celui de ce temps-ci ne s’en apercevrait pas davantage, si l’Église, de sa main maternelle, ne l’eût pas ramassée, cette perle, et ne l’eût mise à sa couronne.

2772. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Le Docteur Favrot »

Pourquoi donc le docteur Favrot n’a-t-il pas mis une main puissante, une main d’accoucheur sur ce problème, qui n’est au fond qu’une des formes du grand problème de la civilisation présente ? […] Le docteur Favrot, qui ne trouve pas que ce soit tout à fait assez que cela, lance, vers la fin de son ouvrage, l’idée des chambres mortuaires de l’Allemagne ; mais il ne nous les décrit pas, ne les examine point, et n’ajoute rien à cette idée de chambres mortuaires, avec leur système plus ou moins ingénieux de sonnettes, correspondant, comme on le sait sans le docteur Favrot, aux doigts du mort, et mises en vibration au moindre mouvement qui s’éveillerait dans le cadavre.

2773. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Gérard Du Boulan »

Tout mettre à pied comme un postillon, — tout descendre, — tout incliner au niveau de tout, telle est la consigne donnée par les plus ignobles passions de nos cœurs ; telle la tendance des temps modernes dans la Critique et dans l’Histoire. C’étaient les postillons qui menaient mal qu’on mettait à pied autrefois.

2774. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Ronsard »

Il avait été mis à mort, ce grand poète, par un grammairien. […] Il faut se rendre compte de l’astre et de son immobile fixité… Ronsard, le Ressuscité de 1830, est peut-être la seule chose de 1830 qui soit encore debout comme elle s’y mit quand il ressuscita.

2775. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Catulle Mendès »

Catulle Mendès s’y plonge… Je sais bien qu’il n’est pas encore à l’heure de la vie où l’homme se reprend en sous-œuvre et se sent le poignet assez ferme pour mettre une martingale au cheval fou de ses facultés ! […] Catulle Mendès en met partout, comme de la moutarde.

2776. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Jules Janin » pp. 159-171

Au contraire, il y met la vie, et une vie plus intense qu’il n’y en eut jamais. […] « César et le Danger sont deux lions, mis bas le même jour, a dit Shakespeare, mais César est l’aîné… » César ici, c’est Diderot !

2777. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Les Mémoires d’une femme de chambre » pp. 309-321

Au dix-huitième siècle, on n’aperçoit encore, parmi messieurs les domestiques, que le laquais Rousseau derrière la chaise de ses maîtres, gravant dans sa mémoire, entre deux assiettes qu’il leur donne, des observations qu’il mettra plus tard dans ses Confessions. […] Il a attaché les deux siennes, dans toute leur longueur, au loup de velours noir qu’il a mis sur le visage de sa femme de chambre, pourtraite au frontispice de ce volume qui pue le faux ; et si on ne sait pas le sexe de ces deux oreilles, on en sait l’espèce, et cela suffit… L’auteur, quel qu’il soit, n’a pas même de talent littéraire… Du moins n’en a-t-il pas montré.

2778. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — J — Jhouney, Alber (1860-1926) »

Albert Jhouney a été mis au monde au bord de la Méditerranée ; mais son esprit a fleuri, j’imagine, dans la lecture de l’Ancien testament, de Lamartine et de Vigny.

2779. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » p. 147

Pour ceux qui l’annoncent en qualité de Poëte, on ne peut se dispenser de les mettre au rang des plus médiocres.

2780. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 351-352

Il eût été plus heureux de ne les avoir pas mises au jour.

2781. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 378-379

On doit rendre justice à chacune des Préfaces qu’il a mises à la tête de ces éditions.

2782. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » p. 22

Dans son Essai sur l’origine des connoissances humaines, dans son Traité des Sensations, &c. les idées les plus abstraites, les principes les plus subtils, les nuances les plus délicates sont mises à la portée de tous les esprits.

2783. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » p. 362

Cet Auteur a peu écrit, & n’a pas même mis son nom à ses Ouvrages, attention qui ne peut être que le fruit d’une timidité excessive, ou d’une très-grande modestie.

2784. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 255-256

Cet Auteur aussi avide de s’instruire, qu’infatigable à mettre au jour le résultat de ses recherches, a encore refondu presque en entier l’Introduction à l’Histoire de l’Europe, composée par le Baron de Puffendorff, & y a ajouté tout ce qui conçerne l’Histoire de l’Asie, de l’Afrique & de l’Amérique.

2785. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — N. — article » pp. 421-422

Nofiradamus, étonné de se voir érigé en Prophete, met à profit l’ignorance publique, & lui fait présent d’un nouveau fatras qu’il donne pour des prédictions.

2786. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 234-235

Alors sa ressource étoit de changer son lit de place ; en moins d’un an il lui fit faire le tour de sa chambre, en cherchant toujours un endroit pour le mettre à l’abri de la pluie.

2787. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 279-280

Il a eu la modestie de ne pas mettre son nom à ses Ouvrages ; raison pour la laquelle il est sans doute moins renommé que nos Faiseurs actuels de Contes, d'Historiettes & de Poétiques.

2788. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » p. 292

Tout le monde convient déjà qu'il est impossible de réunir plus de connoissances, de sagacité, d'érudition, plus de force & de clarté dans l'expression, qu'il en a mis dans les Discours & les Notes qui accompagnent cette Traduction.

2789. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » p. 364

Ce talent d’écrire avec promptitude s’est annoncé dans plusieurs Ouvrages de Théologie & de Morale, dont quelques-uns ont été mis à l’Index.

2790. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Chardin  » p. 143

Il s’est mis à la tête des peintres négligés, après avoir fait un grand nombre de morceaux qui lui ont mérité une place distinguée parmi les artistes de la première classe.

2791. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « À Monsieur P. Bottin-Desylles »

Je désirerais que toutes les pensées qui sont ici, fussent vos pensées, ou qu’il y en eût, au moins, quelques-unes que vous ne désavoueriez pas… Vous l’homme des sentiments exquis en toutes choses, vous devez avoir sur les femmes les idées qu’ont sur elles les esprits délicats, discernants, qui les aiment et qui ne veulent pas les voir se déformer dans des ambitions, des efforts et des travaux mortels à leur grâce naturelle, et même à leurs vertus… Vous êtes, mon cher Desylles, d’une supériorité trop vraie pour ne pas vous connaître en supériorités, et celle de la femme n’est pas où la mettent les Bas-bleus.

2792. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre II. De la reconnaissance des images. La mémoire et le cerveau »

Tantôt elle se fera dans l’action même, et par la mise en jeu tout automatique du mécanisme approprié aux circonstances ; tantôt elle impliquera un travail de l’esprit, qui ira chercher dans le passé, pour les diriger sur le présent, les représentations les plus capables de s’insérer dans la situation actuelle. […] La première, conquise par l’effort, reste sous la dépendance de notre volonté ; la seconde, toute spontanée, met autant de caprice à reproduire que de fidélité à conserver. […] Souvent, pour lui faire retrouver un mot, il suffit qu’on le mette sur la voie, qu’on lui indique la première syllabe 58, ou simplement qu’on l’encourage 59. […] Mais nous avons dit que la séparation de la perception complète et de l’image-souvenir mettait l’observation clinique aux prises avec l’analyse psychologique et qu’il résultait de là, pour la doctrine de la localisation des souvenirs, une antinomie grave. […] On comprend, d’une part, que l’image auditive remémorée mette en branle les mêmes éléments nerveux que la perception première, et que le souvenir se transforme ainsi graduellement en perception.

2793. (1904) Essai sur le symbolisme pp. -

Je m’applique à tailler dans le vif, à disséquer des principes, afin de mettre à nu le cerveau contemporain et le nœud vital de notre poésie française si tendrement aimée. […] Nous possédons des glaces à main minuscules dans lesquelles ne s’aperçoit que le sourire d’une bouche, mais il existe des psychés mobiles où tous nos gestes se mirent. — De même, si chaque époque poétique résume un aspect de la nature, il en est qui la clichent mieux que d’autres, qui sont plus amplement significatives. […] Autrement dit, la matière, donnée originellement à notre conscience, est un continu ; mettez en présence de la matière une conscience, aussitôt cette continuité se brise, apparaît sous forme de discontinuité, parce qu’on ne peut se représenter la conscience et la matière se développant avec le même rythme de durée. […] Il les mit en pratique dans Sophonisbe (1634), notre première tragédie régulière. […] Récéjac dans un excellent livre : Essai sur les fondements de la connaissance mystique, a fort bien mis ce point en valeur.

2794. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — Note relative à l’article Villehardouin. » p. 527

Voilà, ce me semble, un mea culpa par lequel je romps avec l’école de la routine et des à-peu-près et je me mets en règle avec la jeune science philologique.

2795. (1861) La Fontaine et ses fables « Préface »

On pourra vous parler en littérateur et vous dire : « Admirez combien ces petites bêtes sont adroites. » On pourra vous parler en moraliste et vous dire : « Mettez à profit l’exemple de ces insectes si laborieux. » On pourra enfin vous parler en naturaliste et vous dire : « Nous allons disséquer une abeille, examiner ses ailes, ses mandibules, son réservoir à miel, toute l’économie intérieure de ses organes, et marquer la classe à laquelle elle appartient.

2796. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Arnault, Antoine Vincent (1766-1834) »

Juvénal fabuliste ; on a reproché à Florian d’avoir mis dans ses bergeries trop de moutons ; peut-être dans les fables de M. 

2797. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » p. 109

Aussi Madame de Sevigné & M. de Bussy Rabutin ne mettent-ils pas de bornes à leurs éloges, quand ils parlent, dans leurs Lettres, de cet excellent Traité.

2798. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » pp. 145-146

On désirreoit seulement que l’Auteur eût mis plus de rapidité dans son style quelquefois traînant, & qu’il n’eût pas dénaturé certains faits, n’en eût pas hasardé quelques autres, & eût eu l’attention de présenter les circonstances telles qu’elles étoient ; ce qu’il eût fait vraisemblablement, s’il eût été moins attaché à ce qui tendoit à favoriser ses opinions particulieres.

2799. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 372-373

Brantome est néanmoins un des Historiens qui ont le plus contribué à mettre au jour les intrigues secretes de ceux qui ont joué un rôle à la Cour de ces Princes.

2800. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 381-382

Ses talens pour l’éloquence, reconnus dans l’Eloge funebre de M. le Dauphin, ses Mandemens qu’il fait lui-même, ses Lettres Pastorales qui respirent le patriotisme, & quelques autres Ouvrages où il n’a pas mis son nom, prouvent que l’Académie Françoise a moins recherché dans lui l’éclat de la naissance, que les qualités d’un Littérateur éclairé.

2801. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 140-141

Cette compilation où il a mis beaucoup du sien, est très-intéressante, & prouve qu’il étoit plus fait pour les Sciences que pour la Morale.

2802. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » p. 324

Ton sort est glorieux, & le mien est fatal : Nos aïeux, autrefois, marchoient d’un pas égal ; Cependant entre nous que je vois de distance, Et combien ton mérite y met de différence !

2803. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » p. 257

Parmi les choses senties avec esprit & exprimées avec élégance, qu’on rencontre dans son Oraison funebre Henriette d’Angleterre, on peut citer ce morceau, où, parlant des Princes, il dit : « Qu’ils s’imaginent avoir un ascendant de raison, comme de puissance ; qu’ils mettent leurs opinions au même rang que leurs personnes, & qu’ils sont bien aises, quand on a l’honneur de disputer avec eux, qu’on se souvienne qu’ils commandent à des Légions ».

2804. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 178-179

On a reproché à ce jeune Auteur de n'avoir pas mis assez de simplicité dans son style.

2805. (1763) Salon de 1763 « Sculptures et gravures — Vassé »

Pour bien juger d’une statue, c’est une règle assez sûre que de se mettre à sa place.

2806. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Préface »

Préface1 Il faudrait peut-être rappeler ici que nous avons mis le nom du xixe  siècle à la tête du livre intitulé : « Les Œuvres et les Hommes ».

2807. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « au lendemain du saint-simonisme  » p. 505

Il semble que la chute définitive de l’ancien édifice, qu’on s’obstinait à restaurer, ait, à l’instant, mis à nu les fondements encore mal dessinés de la société future que les novateurs construisaient dans l’ombre.

2808. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Calemard de Lafayette, Olivier (1877-1906) »

Sainte-Beuve J’ai parcouru jusqu’ici bien des tons, j’ai fait résonner bien des notes sur le vaste clavier de la poésie, et pourtant je n’ai pas encore abordé mon vrai sujet, celui qui m’a réellement mis cette fois en goût d’écrire, le Poème des champs, de M. 

2809. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 291-292

Sa pénétration à démêler les piéges de l’incrédulité, son courage à les mettre au grand jour, son habileté à en parer les coups, lui ont attiré les sarcasmes de ces esprits forts contre tout, excepté ce qui blesse leur amour-propre ; mais il a fait voir par ses lumieres, autant que par sa modération, combien il est facile d’être supérieur à leurs manéges, à leurs attaques & à leurs insultes.

2810. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » p. 408

Giraud sont des Chansons, des Madrigaux, des Epîtres, & d’autres Pieces fugitives qui le disputent à ce que nous avons de plus agréable dans ce genre, mais que sa modestie l’a empêché jusqu’à présent de mettre au jour.

2811. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 451-452

Doué d’une sensibilité vive & touchante, d’une imagination brillante & féconde, nourri de la lecture des Ecrivains les plus substantiels, il n’a besoin, pour cet effet, que de mettre plus de liaison dans ses idées, communément nobles & élevées, plus de naturel dans son style, souvent énergique & élégant, mais surchargé de figures parasites, de métaphores recherchées, qui le rendent quelquefois emphatique & boursoufflé.

2812. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 275-276

Le plus acharné de tous, a été celui qui avoit mis au bas de son portrait : Son sort est de fixer la figure du monde, De lui plaire, & de l’éclairer.

2813. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 393-394

On peut en juger par ce Madrigal qu’on a mis en musique, & qu’Anacréon n’eût pas désavoué.

2814. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Avant-propos »

Mais on pourrait se demander si les difficultés insurmontables que certains problèmes philosophiques soulèvent ne viendraient pas de ce qu’on s’obstine à juxtaposer dans l’espace les phénomènes qui n’occupent point d’espace, et si, en faisant abstraction des grossières images autour desquelles le combat se livre, on n’y mettrait pas parfois un terme.

2815. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gibbon. — I. » pp. 431-451

À l’âge de sept ans, on le mit aux mains d’un précepteur, d’un digne vicaire de campagne, John Kirkby, sur lequel il a laissé des paroles touchantes. […] Il le fit imprimer deux ans après (1761), en le dédiant respectueusement à son père et en le plaçant sous les auspices d’un estimable écrivain, fils de réfugié, Maty, qui y mit une lettre d’introduction. […] Qui ne sent pas son prix n’est pas digne d’elle ; mais qui l’a pu sentir et s’en détache est un homme à mépriser… — Gibbon a l’honnêteté de renvoyer à cette lettre où les noms étaient restés masqués par des initiales ; il indique que c’est à lui qu’elle s’applique, et il ajoute : « Comme auteur, je n’appellerai pas du jugement, ou du goût, ou du caprice de Jean-Jacques ; mais cet homme extraordinaire, que j’admire et que je plains, aurait pu mettre moins de précipitation à condamner le caractère moral et la conduite d’un étranger. » j.

2816. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — I. » pp. 262-280

Après sa mort, une lettre du supérieur de la maison professe, le père Martineauk ; un éloge mis en tête de ses Sermons par le religieux qui en fut l’éditeur, le père Bretonneau ; une lettre de M. de Lamoignon, son ami de tous les temps ; un autre hommage plus développé mais du même genre, par une personne de condition, Mme de Pringy, c’est tout ce qu’on a sur Bourdaloue ; et, je le dirai, quand on l’a lu lui-même et considéré quelque temps dans l’esprit qui convient, on ne cherche point sur son compte d’autres particularités, on n’en désire pas : on entre avec lui dans le sens de cette conduite égale, uniforme, qui est le caractère de la prudence chrétienne et le plus beau support de cette saine éloquence ; et l’on répète avec une des personnes qui l’ont le mieux connu : « Ce qui m’a le plus touché dans sa conduite, c’est l’uniformité de ses œuvres. » On ne sait rien ou à peu près rien non plus de la vie de La Bruyère ; mais, à l’égard de ce dernier, le sentiment qu’on apporte est, ce me semble, tout différent. […] chrétiens, notre amour-propre, tout ingénieux qu’il est, n’a plus de quoi se défendre… Il ne faut que cette cendre qu’on nous met sur la tête, et qui nous retrace l’idée de la mort, pour rabattre toutes les enflures de notre cœur… Je suivais donc ce développement plein, pressant et sans trêve, et qui vous tient en suspens jusqu’au terme, m’arrêtant à peine à ce qui m’y paraissait plus saillant (le saillant, proprement dit, y est rare), et ne pouvant cependant méconnaître ce qu’il y avait par moments d’approprié à cet auditoire de Notre-Dame, à la fois populaire et majestueux. […] Dans la préface qu’il a mise en tête de l’Oraison funèbre du prince de Condé par Bossuet, l’abbé Bourlet de Vauxcelles a dit : Voltaire donne à entendre que, deux ans avant la mort du Grand Condé, son esprit s’était totalement affaibli.

2817. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Une Réception Académique en 1694, d’après Dangeau (tome V) » pp. 333-350

Ce personnage original qu’on aimait assez, sauf à en rire, et qui s’était fait une place à part dans les assemblées du Clergé et à la Cour, s’était mis comme tout son siècle sur le pied d’admirer Louis XIV, de l’adorer passionnément, et de le lui dire. […] Mettez-y les airs et les accents, et vous avez le morceau le plus nettement français ; tout y pétille d’esprit et d’impertinence. […] Au milieu des plus heureux traits, il ne se donne pas le temps de mettre sur pied ses phrases.

2818. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Saint-Simon considéré comme historien de Louis XIV, par M. A. Chéruel »

On ne se dit point assez, lorsqu’on triomphe de prendre Saint-Simon en faute sur des points secondaires : « Où en serions-nous donc sur bien des personnages, si nous n’avions Saint-Simon pour les percer à jour et pour mettre le holà !  […] Il y a en Saint-Simon plus pour nous qu’un La Bruyère : il éclaire La Bruyère et nous aide à le mieux comprendre ; il met des noms et des personnages là où l’autre avait mis des types.

2819. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « HISTOIRE de SAINTE ÉLISABETH DE HONGRIE par m. de montalembert  » pp. 423-443

Je me figure quelquefois le jeune Siècle comme un aventureux jeune homme qui s’est mis en route de bonne heure pour faire son tour du monde, pour y bâtir un temple de Delphes ou une cathédrale de Reims incomparables. […] Un jour qu’elle descendait, accompagnée d’une de ses suivantes favorites, par un petit sentier très-rude que l’on montre encore, portant dans les pans de son manteau du pain, de la viande, des œufs, et d’autres mets pour les distribuer aux pauvres, elle se trouva tout à coup en face de son mari qui revenait de la chasse. […] C’est ainsi encore qu’à la page 256 une faute de ce genre se reproduit : « Cette mère dénaturée, au lieu d’être touchée de tant de générosité, ne songea qu’à spéculer sur sa prolongation… » Le soin que je mets à signaler en détail ces points inexacts montre combien ils sont peu nombreux ; mais il importe qu’il n’y en ait pas trace dans un si beau et si pur talent d’écrivain.

2820. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE SÉVIGNÉ » pp. 2-21

Jeune encore et belle sans prétentions, elle s’était mise dans le monde sur le pied d’aimer sa fille, et ne voulait d’autre bonheur que celui de la produire et de la voir briller5. […] Les plus petites choses tiraient du prix de la manière et de la forme ; c’était de l’art que, sans s’en apercevoir et négligemment, l’on mettait jusque dans la vie. […] Mme de Staël elle-même ne s’est-elle pas mise en frais, dit-on, pour arracher un mot et un coup d’œil au conquérant de l’Égypte et de l’Italie ?

2821. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre II. Les privilèges. »

Le plus absolu, le plus infatué de son droit, Louis XIV a eu des scrupules lorsque l’extrême nécessité l’a contraint à mettre sur tous l’impôt du dixième30. […] À Cahors, l’évêque-comte de la ville a le droit, quand il officie solennellement, « de faire mettre sur l’autel le casque, la cuirasse, les gantelets et l’épée36 ». […] Le rachat de la mainmorte, dont le roi a lui-même donné l’exemple, a été mis à un prix si exorbitant par les laïques, que les malheureux mainmortables ne peuvent ni ne pourront y atteindre. » 45.

2822. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre IV. Précieuses et pédantes »

Précieuses et pédantes [Paul Adam] Il y a l’encyclopédie Roret, il y a l’encyclopédie Zola, il y a l’encyclopédie Paul Adam… Zola a mis en romans lourdement longs tout le mécanisme moderne. […] Le malheureux est obligé de cheviller pour se mettre en prose ! […] « Trahi dans son esprit », le nouveau Christ se met bougrement en colère.

2823. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Mémoires d’outre-tombe, par M. de Chateaubriand. Le Chateaubriand romanesque et amoureux. » pp. 143-162

Ainsi, dans cette partie des Mémoires l’homme officiel a tout dérobé, le solennel est venu se mettre au-devant de la mystérieuse folie. […] Quant aux autres émotions de ses jeunes années, M. de Chateaubriand s’est contenté de les confondre poétiquement dans un nuage, et de les mettre en masse sur le compte d’une certaine Sylphide, qui est là pour représenter idéalement les petites erreurs d’adolescence ou de jeunesse que d’autres auraient décrites sans doute avec complaisance, et que M. de Chateaubriand a mieux aimé couvrir d’une vague et rougissante vapeur. […] Il l’invitait à ce voyage de Suisse, à ces scènes du Saint-Gothard, dans ce court et unique intervalle de liberté ; il lui disait : Si vous me mettez à part des autres hommes et me placez hors de la loi vulgaire, vous m’annoncerez votre visite comme une Fée : les tempêtes, les neiges, la solitude, l’inconnu des Alpes iront bien à vos mystères et à votre magie.

2824. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

L’ouvrage qui a fait sa réputation et qui a paru en 1788 semble depuis quelque temps mis de côté et jugé avec une sévérité qu’il ne faudrait pas pousser à l’injustice. […] Il est l’ouvrage d’une main habile, qui a su mettre dans sa physionomie ce mélange de douceur, de simplicité, de bonhomie et de grandeur qui rendait, pour ainsi dire, visible l’âme de cet homme rare. […] Ce fut le germe de son ouvrage, qu’il mit trente années ensuite à combiner et à écrire.

2825. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une préface abandonnée » pp. 31-76

» Vous avez les cheveux taillés en brosse, — je me suis fait raser la tête à fleur de crâne ; Chaque matin, — dans votre parterre de Nice, — vous versez, du col de votre arrosoir vert, de fraîches ondées sur vos géraniums assoiffés ; — moi, qui n’ai pas de jardin, j’ai mis un arrosoir sur ma cheminée, en guise de pendule ; Portez-vous des pantalons collants ou des pantalons à la hussarde ? […] Si vous avez des prédilections pour le pantalon collant, je mettrai un maillot ; si, au contraire, vous nourrissez des préférences pour le pantalon à la hussarde, je n’hésiterai pas à passer un jupon. […] Ils ont des maîtresses qu’ils aiment sincèrement, sinon avec constance ; — forcés de se battre continuellement avec la nécessité, ils ne trouvent pas là un motif suffisant de mettre leur conscience aux enchères comme Lousteau, ou de draper « leur gueuserie avec leur arrogance » comme d’Arthez.

2826. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Charles Baudelaire  »

L’auteur, qui est poète, entend admirablement les mises en scène de son idée. […] Comptez-le donc aussi, et mettez-le avec tous les aphorismes, tranquillement impudents, de ce sybarite plein de calme : « toute débauche parfaite a besoin d’un parfait loisir  », etc., et confessez qu’il y a là une somme de comique à défrayer une pièce de théâtre, et souhaitons même que L’Ivrogne, qui sera le prochain drame de Baudelaire, soit aussi gai, sous couleur noire, que ses Paradis artificiels. […] C’est une organisation d’artiste réfléchie qui sait plonger également dans la rêverie et la réalité à je ne sais combien de brasses, et nous en rapporter parfois des choses effrayantes ou charmantes, inconnues à la lumière des livres communs… Seulement, il n’a besoin de se mettre derrière personne : ni derrière Quincey, ni même derrière Poe.

2827. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XV. »

Et il ne faut s’en étonner, voyant qu’elles y mettent toute leur âme. […] Catulle s’inquiète peu de l’ordre à mettre dans cette richesse, et du soin qui en lierait les diverses parties : il jette des vers admirables de description ou de passion, comme autant de couleurs dérobées aux maîtres de l’art hellénique. […] Ce sont les Parques présentes à la fête qui chantent l’hymne conjugal : « Ô soutien glorieux, qui par tes vertus agrandis et protèges la puissance de l’Épire, père illustre par ton fils, apprends ce que les sœurs du Destin mettent au grand jour pour toi ; entends leur véridique oracle.

2828. (1809) Tableau de la littérature française au dix-huitième siècle

Il a erré, mais n’a pas mis d’importance à ce que les autres l’imitassent. […] On avait oublié que ce n’est jamais impunément que l’on met en fermentation les intérêts et les opinions des hommes. […] La nation fut mise en poudre, et livrée, sans défense, à toutes les tyrannies révolutionnaires. […] De tels changements passent la portée des déterminations humaines ; il faut que la destinée y mette la main. […] Tronchet se déroba au mandat lancé contre lui ; M. de Sèze fut mis en prison.

2829. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lacaussade, Auguste (1815-1897) »

Lacaussade, qui sent profondément cette nature tropicale, a mis sa muse tout entière au service et à la disposition de son pays bien-aimé.

2830. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lefèvre, André (1834-1904) »

André Lefèvre, avec cette pensée philosophique qu’il met en avant (la croyance à la vie des choses), est un artiste, un savant artiste de forme.

2831. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Marsolleau, Louis (1864-1935) »

La chair et l’âme se font entendre à la fois dans son livre très personnel et où le poète s’est mis lui-même tout entier sans arrière-pensée, avec la sincérité de sa jeunesse.

2832. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Ruyters, André (1876-1952) »

Maurice Le Blond Un des efforts, le plus estimable à mon avis, chez ce poète, est celui de mettre toujours au diapason du paysage la gamme de ses sentiments.

2833. (1882) Qu’est-ce qu’une nation ? « [Préface] »

Nous y mettrons la froideur, l’impartialité la plus absolue.

2834. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 320-321

Il nous suffira, pour le mieux prouver, de citer ce joli Madrigal, que le fameux Lambert mit en Musique, & dont un de nos Poëtes actuels s’est approprié sans façon le dernier vers.

2835. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — E. — article » pp. 252-253

De fréquens voyages dans presque toutes les contrées de l’Europe, & même sur les côtes d’Afrique & ailleurs, ont beaucoup contribué à le mettre en état de vérifier les situations des lieux, & les observations sur les mœurs & la Religion de différens Peuples.

2836. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 406-407

Il les a classés & mis dans le jour le plus propre à en faire sentir la valeur, la force, l’énergie, & les diverses acceptions qui les distinguent.

2837. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » pp. 476-477

Mais bien vertu excellente, haultaine, Qui fait des Grands la naissance florir, Qui sous le pied met l’envie & la haine, En s’attachant à ce qu’on doit chérir ; Vertu qui vient d’une source certaine De vérité, non sujette à mourir.

2838. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 73-74

C’est plus qu’il n’en faut pour nous mettre en droit de dire, qu’il étoit donc meilleur Comédien que bon Poëte dramatique.

2839. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 560-561

Elle a surtout l’art de placer l’érudition commune à propos, & de mettre en action, dans des Fables ou des Historiettes, des principes clairs & de sages leçons.

2840. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 250-251

Comme il importe à tout le monde de savoir raisonner juste, de connoître la nature & les facultés de son ame, la structure de l'Univers & l'Auteur qui l'a créé & le conserve, rien n'étoit plus nécessaire que de donner de justes idées sur tous ces objets, & ce qui n'est pas moins nécessaire, de les mettre à la portée de tous les Lecteurs.

2841. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 11, que les beautez de l’execution ne rendent pas seules un poëme un bon ouvrage, comme elles rendent un tableau un ouvrage precieux » pp. 71-72

Section 11, que les beautez de l’execution ne rendent pas seules un poëme un bon ouvrage, comme elles rendent un tableau un ouvrage precieux Il n’en est pas des poëtes, qui n’ont d’autre merite que celui d’exceller dans la versification, et qui ne sçavent pas nous dépeindre aucun objet capable de nous toucher ; mais qui, pour me servir de l’expression d’Horace, ne mettent sur le papier que des niaiseries harmonieuses, comme des peintres dont je viens de parler.

2842. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre deuxième. La connaissance des corps — Chapitre II. La perception extérieure et l’éducation des sens » pp. 123-196

Il suffit pour cela que la rétine soit mise en action par une autre cause44. […] C’est le cas dans ces apparitions qui suivent l’usage prolongé du microscope, lorsque les centres visuels de l’encéphale rentrent spontanément à plusieurs reprises dans l’état où l’action de la rétine les a mis trop souvent et trop longtemps. […] Elle avait encore beaucoup de difficulté, et il lui fallait une infinité de tentatives inutiles pour diriger son œil vers un objet ; de sorte que, lorsqu’elle essayait de le regarder, elle tournait sa tête en diverses directions, jusqu’à ce que son œil eût saisi l’objet à la recherche duquel il s’était mis ». […] Il est le seul que ma volonté mette directement en mouvement. […] Ce que je puis poser à bon droit et avec vérité, quand je touche cette bille d’ivoire, c’est un groupe de rapports entre telles conditions et telles sensations ; en vertu de ces rapports, tout être sentant qui, en un moment quelconque du temps, se mettra dans les conditions où je suis, aura la sensation que j’ai et les autres sensations que j’imagine.

2843. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre huitième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Victor Hugo »

Je puis, par un faux cercle, avec un faux compas, Le mettre hors du ciel, mais hors de moi, non pas. […] Un autre mystère est dans l’animal : Mettre un pied sur un ver est une question : Ce ver ne tient-il pas à Dieu168 ? […] Au-dessus des prêtres et des mythologues, Hugo place les ascètes, qui, perdus dans la contemplation de l’invisible, se sont mis directement en face de l’énigme sacrée du monde. […] Cette pitié, l’homme n’a pu la mettre ni dans ses lois, ni dans ses institutions sociales : c’est ce qui fait l’injustice fondamentale de notre justice. […] Mais, pour réaliser cet idéal, Hugo n’a foi ni dans le communisme, ni dans le nihilisme contemporain, dont il avait mis, dès 1862, une formule frappante dans la bouche du bandit Thénardier : « L’on devrait prendre la société par les quatre coins de la nappe et tout jeter en l’air !

2844. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre VIII. Du pathétique »

Ce qu’on met comme étant de soi pathétique, et non comme une pièce nécessaire de l’action ou du raisonnement, est faux presque toujours et se refroidit vite : c’est du mélodrame, et bon pour un jour, au boulevard.

2845. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Couyba, Charles-Maurice (1866-1931) »

Il me semble que vous avez su introduire, dans ces jolies compositions, d’une harmonie exquise, autant de poésie que le genre en comporte, et vos grands devanciers nous ont prouvé que toute inspiration peut s’y mettre à l’aise.

2846. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gineste, Raoul (1849-1914) »

Avec quelle joie émue, il les a chantés sous la triple incarnation familière, légendaire, satanique, — car, parfois, il en prend un au coin du foyer pour le conduire à la messe noire — s’attendrissant sur les vieux chats abandonnés à qui manque le mou mis en pâtée par les bonnes vieilles, donnant des conseils aux plus jeunes, prenant paradoxalement parti pour eux contre leurs victimes ordinaires, le poisson rouge et le serin, les adorant en toute candeur quand ils sont dieux, composant à leur intention des cantiques, des litanies et songeant aux chats obstinément — car la féminité ne perd jamais ses droits — pour un rire félin de brune ou un bâillement rose de blonde.

2847. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 316-317

Il y a bien plus d’adresse à suivre la méthode de certains Auteurs, dont la modestie sait se mettre à l’aise, en se fêtoyant eux-mêmes sous un nom emprunté ; ils ne courent alors de risque que quand le Panégyriste est découvert ; ce qui, à la vérité, ne tarde pas.

2848. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 48-49

« La distance qui étoit entre leurs esprits, dit M. l’Abbé de Voisenon, n’en mit aucune dans leurs cœurs.

2849. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 60-61

On a de lui des Madrigaux & d’autres petites Pieces très-ingénieuses, qu’on peut mettre au dessus de tant d’ouvrages à prétention, source de la célébrité chancelante d’un grand nombre de nos Auteurs.

2850. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 294-295

Le naturel & la délicatesse font l’agrément du petit Recueil de ses Poésies ; elles consistent en Chansons mises en musique par Couperin, en Madrigaux pleins de finesse, & en Epigrammes pleines d’enjouement & de sel.

2851. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 16-17

Etre tout à la fois plagiaires & détracteurs des Ecrivains qu’on met à contribution, c’est manquer à la reconnoissance & à l’honnêteté, mais c’est suivre une méthode assez ordinaire à plusieurs Gens de Lettres.

2852. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — N. — article » pp. 405-406

Le peu de temps ou de soin qu’il mit à composer ce Recueil, ne lui permit pas de connoître par lui-même les Originaux ; il se contenta de copier les Journalistes & les Biographes, vrai moyen de perpétuer les fautes & les erreurs.

2853. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 357-358

Il est le meilleur qu'on puisse mettre entre les mains des Etrangers qui voudront se perfectionner dans notre Langue, à cause de l'attention qu'il a de relever les fautes particulieres à chaque Nation pour la maniere de la prononcer.

2854. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre XIX. Du Jardinage & de l’Agriculture. » pp. 379-380

L’Art de bien ordonner les Jardins étant du ressort de l’Architecture, nous mettons ici la liste des livres nécessaires pour cet art.

2855. (1759) Salon de 1759 « Salon de 1759 — La Grenée » p. 97

Les étincelles dispersées sous les coups auraient écarté les Amours ; dans un coin ces enfants turbulents auraient mis en désordre l’atelier du forgeron ; et qui aurait empêché qu’un des Ciclopes n’en eût saisi un par les ailes pour le baiser ?

2856. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Richepin, Jean (1849-1926) »

Or, il me semble, sauf erreur, que c’est l’habile rhétoricien, d’une netteté d’esprit toute aryenne, qui a écrit presque entièrement les deux premiers actes, et que le Touranien a mis la main au dernier plus qu’il n’aurait fallu… On voit ici en plein ce qu’il y a d’un peu puéril parmi le beau génie naturel de M.  […] Il sait s’incarner dans les gueux qu’il peint Mais il n’a pas, malheureusement, il faut bien le dire, le seul sentiment qui l’aurait mis au-dessus de ses peintures, le sentiment qui lui aurait fait rencontrer cette originalité que Villon,

2857. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XV. Les jeunes maîtres du roman : Paul Hervieu, Alfred Capus, Jules Renard » pp. 181-195

Hervieu a mis en contact un groupe considérable de personnages, en des combinaisons d’événements. […] Il lui suffit de nous mettre constamment sous les yeux le type et le rôle pour que de leur discord surgisse le comique.

2858. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Préface »

Bien des choses ont été mises afin qu’on sourie ; si l’usage l’eût permis, j’aurais dû écrire plus d’une fois à la marge : cum grano salis. […] Il ne faut pas, pour nos goûts personnels, peut-être pour nos préjugés, nous mettre en travers de ce que fait notre temps.

2859. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre II. Filles à soldats »

Filles à soldats Nul effort ne parviendrait à mettre dans la revue que je commence un ordre réel. […] J’en prends deux, au hasard, dans Leurs figures : « Dans cette plaie panamiste, si mal soignée par des médecins en querelle, les sanies accumulées mettaient de l’inflammation. » L’autre phrase est particulièrement basse et, joyeux d’une joie de latrines, vous avez souligné vous-même deux fois le mot qui en aggrave ignominie : « Resté seul, cet homme de valeur, subitement chassé de son cadre, fit de la poésie sentimentale, tel un influenzé eût fait de l’albumine. » Je vous souhaite, Monsieur, de ne jamais faire de poésie sentimentale et d’albumine.

2860. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « VIII »

Voilà ce qu’on appelle « mettre à néant mes critiques ». […] On nous raille, parce que nous avons dit que Fénelon était « un écrivain agréable, correct et incurablement banal…, qui a voulu mettre dans son style trop de bon goût, de discrétion, d’élégance fleurie ».

2861. (1799) Dialogue entre la Poésie et la Philosophie [posth.]

Cette pièce avait pour titre, De l’Éducation d’un prince 1 : tout m’a charmé dans cet ouvrage ; pensées, sentiments, images, harmonie, facilité, noblesse, mais surtout de grandes leçons, et des vérités utiles, qui n’en ont que plus de mérite pour être mises en beaux vers, parce qu’à leur mérite propre elles en joignent deux autres, celui de la difficulté vaincue sans que l’empreinte du travail y reste, et celui d’être exprimées dans un langage sonore qui les rend plus faciles à retenir. […] je pense qu’on ne peut jamais savoir parfaitement qu’une seule langue ; c’est la sienne propre : encore cela est-il rare ; et je me souviens que Despréaux avait fait une espèce de dialogue satirique contre les versificateurs latins modernes, qu’il supprima de son vivant, pour ne point blesser trois ou quatre latinistes de ses amis, et surtout de ses admirateurs, qui avaient pris la peine de mettre en vers latins son ode sur Namur ; ouvrage d’ailleurs si faible et si défectueux, que les traductions même, toutes latines qu’elles sont, ne paraissent pas au-dessous de l’original.

2862. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XVII. Le Retour du Christ. Appel aux femmes ! »

Dumas, ce fier et malhonnête contempteur de la matrice humaine, se met à en glorifier une, qui, si elle ne renferme pas l’infini, renferme la toute-puissante triplicité du peintre, du poëte et du prophète ; des choses si grandes que les hommes les ont appelées divines ! […] Je l’ai dit déjà, mais je crois nécessaire d’insister : ce livre du Retour du Christ est d’une telle minceur, qu’il n’eût fait absolument aucun bruit sans les deux bouffettes, mises à la têtière de la bête par M. 

2863. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Tallemant des Réaux »

Si des passions de parti, si des animosités de coterie tachent çà et là les récits de ce gazetier à la petite semaine, elles n’animent jamais sa curiosité qui reste badaude, et ne lui donnent même pas l’aiguillon du taon que la haine, quand elle est vive, sait mettre dans la médisance. […] Fut-ce pour lui un pistolet de poche, toujours armé et mis sur la gorge de tous ces amours-propres que la lâcheté rend si charmants ?

2864. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Édouard Fournier »

Tout y est petit, depuis le format jusqu’à la conception première, et jusqu’à l’érudition mise au service de cette petite conception. […] un esprit qu’il n’y mettait pas, — dans l’histoire, — mais qu’il en ôtait !

2865. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Xavier Eyma » pp. 351-366

Jusqu’ici, tous ceux qui ont parlé (en France, du moins,) de l’Amérique, l’ont fait avec les sentiments qu’inspirent aux âmes vulgaires deux choses qui mettent à terre beaucoup de genoux : — la force matérielle et la réussite… Ils ont adoré le Taureau d’or. […] Mais ce n’est pas tout que de s’attendrir, il faut s’entendre ; il ne faut pas mettre des contradictions ou des confusions sous des larmes.

2866. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Armand Carrel » pp. 15-29

Littré et Paulin mettra cette statue en morceaux. […] Ce n’était qu’un journaliste comme tant d’autres, un touche-à-tout qui met audacieusement une main familière sur l’épaule des plus hautes questions, un de ces agitateurs d’une minute et demie auxquels, cette minute passée, le monde qu’ils ont troublé ne pense plus.

2867. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XII. MM. Doublet et Taine »

En voici deux pourtant qui, exceptionnellement, nous tombent sous la main et que nous pouvons mettre ensemble. […] … III Certes, quand on touche de pareils résultats, quand on lit ce livre laborieux dans le rien où l’abstraction met le monde en, poudre, on comprend que M. 

2868. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Jules Soury. Jésus et les Évangiles » pp. 251-264

Soury ne voit, lui, qu’un fou parfaitement caractérisé, délirant pendant tout le temps de sa mission sur la terre, et qui serait mort dans l’idiotisme absolu et la vie végétative, « si les juifs, MAL INSPIRÉS, avaient préféré voir mettre Barrabas en croix ». […] Renan avait mis la main sur le sujet le plus scandaleux qu’on pût toucher, dans un pays qui avait plus de quinze cents ans de Christianisme dans la poitrine et qu’il fallait en arracher !

2869. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « MM. Delondre et Caro. Feuchtersleben et ses critiques. — L’Hygiène de l’âme » pp. 329-343

Mais en France, où nous sommes juges d’idées, si nous ne sommes pas juges d’expression, nous avons véritablement le droit de nous demander, après avoir lu le livre qu’on vient de traduire, quel motif peuvent avoir des critiques français pour se mettre en dépense d’articles et faire une renommée à cette chosette ? […] Adrien Delondre, c’est d’une évidence qui saisit d’autant plus que son Étude (comme on dit) a été mise à la tête du livre par les éditeurs très intelligents, — ce qui, par parenthèse, fait un double emploi assez inattendu, et c’est même la seule chose assez inattendue qu’il y ait dans cette petite publication de lieux communs qu’on nous donne là pour un ouvrage original, neuf et pensé avec énergie.

2870. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « A. P. Floquet »

Écrasé par le sujet auquel il avait osé mettre la main, l’historien n’en avait pas moins écrit son nom à la suite du nom de Bossuet, et les rayons du nom flamboyant se projetaient sur le nom fait pour rester obscur. […] Le récit du nouvel historien s’arrête au moment où Bossuet est nommé précepteur de Monseigneur le Dauphin et met son pied sur la première marche de l’escalier de Versailles.

2871. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « José-Maria de Heredia »

a une magie qui met la vision, dans l’esprit du lecteur, à la place de la pensée. […] Ce peintre, qui s’enivre de sa peinture, ne se met, je l’ai dit, je crois, jamais à part de ce qu’il peint.

2872. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Mme Desbordes-Valmore. Poésies inédites. »

À ses yeux (et c’est bien à ses yeux qu’il faut dire) le fond importe peu, c’est la forme qui est tout, pourvu qu’extraordinairement martelée, elle atteigne à l’éclat et à la solidité ductile d’une matérialité compliquée, affinée, brillante, où l’artiste en mots que je ne méprise point, mais que je mets en second, a remplacé l’Ému ou le Rêveur, qui est le premier. […] Ce nom, comme un feu, mûrira vos pensées, Semblable au soleil qui mûrit les blés d’or, Vous en formerez des gerbes enlacées Pour les mettre un jour sous vos têtes lassées Comme un faible oiseau qui chante et qui s’endort !

2873. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Laurent Pichat »

Il l’a roulée dans ce haillon… Fanatique de démocratie, fanatique d’orgueil de lui-même, sous prétexte de respect et d’admiration pour la grandeur des facultés humaines que tous les philosophes prennent pour la grandeur de leur personne, Laurent Pichat n’a pas craint de mettre la poésie de son âme dans ce qui aurait dû la tuer, et il a osé dire à l’Imagination que le temps est venu de se taire devant la raison triomphante ! […] Laurent Pichat, ce cygne des années lointaines qui s’est mis, comme un jeune coq, à chanter l’aurore qui se lève sur un monde nouveau le poulailler de la Démocratie, aurait, assurément, plus de grâce et de profondeur dans ses chants s’il chantait les heures crépusculaires, voisines de la nuit qui nous menace.

2874. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Jules Sandeau » pp. 77-90

Jules Sandeau ricane comme un petit journal, au nez même des personnages qu’il met en scène, et, par là, tue l’émotion avant qu’elle soit née, en la tarissant dans sa source. […] « Je me dépouille pour mettre un peu d’ouate dans votre nid », dit Paul de Penarvan à la femme qui se soucie le moins de ouate et de nid.

2875. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Gogol. » pp. 367-380

Charrière, qui a pour Gogol les bontés d’un homme d’esprit pour la personne qu’il a pris la peine de traduire, n’hésite pas à mettre les Ames mortes à côté de Gil Blas, et, si cela lui fait bien plaisir, nous ne dérangerons rien à cet arrangement de traducteur, car la réputation de Gil Blas, — ce livre écrit au café entre deux parties de dominos, — a dit le plus fin et le plus indulgent des connaisseurs, — n’est pas une de ces gloires solides qui aient tenu contre le temps. […] Le tendre Mâniloff, à qui « on voudrait voir une passion, une manie, un vice, afin de lui savoir quelque chose », Mme Koroboutchine, Nozdref le hâbleur, Pluchkine l’avare, — ces tics plutôt que ces passions, — ne peuvent pas être mis à côté de la magnifique variété d’individualités qui foisonne dans La Comédie humaine, et qui sont taillées si profond que les gens qui ne voient pas à une certaine profondeur ne les croient plus vrais, les pauvres myopes !

2876. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XIX. Panégyriques ou éloges composés par l’empereur Julien. »

Tel est un autre endroit sur l’utilité de mettre de bonne heure un jeune prince en action ; de familiariser et ses yeux et son âme avec les périls, les combats, les peuples et les armées ; de lui faire connaître par lui-même, dans son empire, la situation des lieux, l’étendue des pays, la puissance des nations, la population des villes, le caractère des peuples, leur force, leur pauvreté, leur richesse. […] Il ne permettra pas plus qu’à des lois utiles et saintes, on joigne une mauvaise loi, qu’il ne permettrait qu’on mît un esclave au rang de ses enfants.

2877. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXX. De Fléchier. »

J’ai eu un peu de peine ; je vous souhaite le bon soir ; je vais me mettre dans mon lit » ; et cette humanité envers un soldat qu’il trouve au pied d’un arbre, accablé de fatigue, à qui il donne son cheval, et qu’il suit lui-même à pied. Il faut en convenir, on a regret que la dignité de l’oraison funèbre et sa marche soutenue, ou du moins le ton sur lequel le préjugé et l’habitude l’ont montée, ne permettent point d’employer ces traits d’une simplicité touchante, et qui mettraient souvent le héros à la place de l’orateur.

2878. (1831) Discours aux artistes. De la poésie de notre époque pp. 60-88

Dieu l’a mis sur la terre en lui disant : Crée, et il crée. […] M. de Chateaubriand a voyagé dans l’Amérique du Nord : il a fait Atala et René, où il est plus question de la désolation de cœur laissée par les doctrines du Dix-Huitième Siècle et par la Révolution Française que des sauvages qui y sont mis en scène. […] Nous dire cela ne peut être réservé qu’à des poètes sortis directement des trois grands peuples qui se pressent l’un contre l’autre au centre de l’Humanité, la France, l’Allemagne et l’Angleterre ; qu’à des poètes qui auront porté avec douleur les graves pensées de notre âge ; qu’à des poètes qui auront senti l’impulsion des philosophes du Dix-Huitième Siècle, ces prédécesseurs des poètes actuels ; qu’à des poètes, enfin, qui nous montreront leur ligne de parenté avec Rousseau, Diderot et Voltaire, la Révolution Française et Napoléon, soit qu’ils se soient mis en lutte ouverte ou qu’ils vivent en harmonie avec tous ou quelques-uns de ces grands colosses qui avaient dernièrement en eux la vie du monde, et qui, glacés dans leur tombeau, tiennent encore en main le sceptre de l’avenir. […] Et remarquez que ces deux grands poètes, mis en parallèle sous le rapport de leurs ressemblances comme sous celui de leurs contrastes, s’harmonisent admirablement, et forment entre eux un parfait accord : car ils ont tous deux, au plus haut degré, le même sentiment de la vie universelle, et, d’un autre côté, leurs génies sont tellement opposés qu’ils expriment cette Vie par les deux faces, l’un de l’unité, et l’autre de la variété. […] Ce qu’il y a de réel pour moi, la poésie de Byron, poésie ironique et désolante, qui soulève des abîmes où notre esprit se perd, et qui, comme les harpies, salit, à l’instant même, tous les mets qui couvrent la table du festin.

2879. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « Introduction »

Met-on la logique au niveau des découvertes récentes des sciences, comme M.  […] Ainsi, on perd en disputes oiseuses le temps qu’on devrait mettre à observer, et au lieu d’observateurs impartiaux, il se forme des partis poussant à outrance leurs hypothèses, éternellement en lutte, parce qu’ils combattent pour des chimères, et qu’on ne peut ni tuer, ni emprisonner des fantômes. […] Au lieu de décider la question, j’aime mieux mettre quelques faits sous les yeux du lecteur. […] Les premiers montrent triomphalement leurs analyses et mettent au défi leurs adversaires de deviner sans l’aide de la réflexion ce que c’est que sentir, désirer, vouloir, abstraire. […] Comme par la célébrité des noms qui la représentent, par son accord avec les tendances générales du siècle, par sa mise en harmonie avec les découvertes les plus récentes des sciences physiques et naturelles, par l’originalité de ses recherches et de ses résultats, elle semble tenir le premier rang, et qu’en France d’ailleurs elle est ignorée, ou à peu près, il nous a semblé qu’il ne serait pas inutile d’essayer d’en faire connaître les doctrines ; et que ce travail de pure exposition ne déplairait ni à ceux qui les repoussent ni à ceux qui les acceptent.

2880. (1870) La science et la conscience « Chapitre I : La physiologie »

Galien met toute sa science physiologique au service de la doctrine de Platon. […] Une école cependant pousse la nouvelle science physiologique des rapports du physique et du moral jusqu’à des conclusions contredisant certaines vérités de sens intime que l’analyse psychologique semblait avoir mises hors de débat. […] Il semble que l’auteur ait assisté à ce travail, tant il met de précision dans son langage. […] Pour l’entendement, il fait voir comment, toute grande et générale culture des facultés intellectuelles, toute occupation qui la met sérieusement et continuellement en jeu, donne si bien au cerveau une part prédominante d’oxydation, ou de fluide nerveux, que cela suffit pour troubler l’équilibre vital, et qu’il faut des dispositions spéciales pour le rétablir. […] Comment l’aurais-je, si je ne suis pour rien dans ma mise au monde, dans la composition de mes organes, dans l’époque et le lieu de ma naissance ?

2881. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Réja, Marcel (1873-1957) »

Quelques-uns, parmi ces courts chapitres, qui sont des aspects divers du Πάντα ρεῖ, atteignent une perfection rare, et chacun d’eux donne curieusement l’impression immédiate du décor fallacieux du théâtre, de l’éblouissement des verroteries et des oripeaux, de la fictive et décevante richesse des mises en scène, avec, au-delà et après, la nette perception des choses éternelles et immuables que signifient ces apparences, ces attitudes, ces gestes momentanés et incessamment changeants.

2882. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 472-473

C’est cette Pucelle si magnifiquement annoncée, si longtemps attendue, si imprudemment mise au jour, qui a précipité Chapelain du haut du Trône poétique, où ses amis l’avoient placé, dans la derniere classe des mauvais Ecrivains.

2883. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 256-257

La tristesse sombre, compagne inséparable du besoin, étouffa ou rétrécit les heureuses dispositions que l’aisance l’auroit mis à portée de cultiver & de développer.

2884. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 230-231

Il avoit encore traduit Martial d’une maniere si maussade, que Ménage mit sur l’exemplaire dont l’Abbé de Marolles lui avoit fait présent, Epigramme contre Martial.

2885. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 271-272

Sédaine ne dureront que tant qu'on jouera ses Pieces, parmi lesquelles le Public a distingué Rose & Colas, On ne s'avise jamais de tout, le Roi & le Fermier, le Déserteur, plus amusantes par quelques Ariettes, heureusement mises en musique, que par le fond de l'intrigue & l'intérêt des caracteres.

2886. (1913) Le bovarysme « Avertissement »

On n’a pas cru qu’il fût possible de se soustraire entièrement à cette fatalité de nos habitudes mentales et il a paru suffisant d’avertir que le véritable but de cette étude est ailleurs, que l’on ne s’y est proposé d’autre objet que celui-ci : mettre entre les mains de quelques-uns un appareil d’optique mentale, une lorgnette de spectacle qui permette de s’intéresser au jeu du phénomène humain par la connaissance de quelques-unes des règles qui l’ordonnent.

2887. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Venevault, Boizot, Bachelier et Francisque Millet » p. 222

Il jeta un coup d’œil rapide sur les Esquisses que Bachelier a faites d’après le poème de Gesner, et il mit sous son bras celle où l’on voit Adam soulevant le cadavre de son malheureux fils, une de ses filles éplorée à ses pieds, et sa femme échevelée sur le fond.

2888. (1763) Salon de 1763 « Peintures — La Tour » p. 223

Il se met à table.

2889. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Belle » p. 127

Le comte de Creutz, notre ami, se met tous les matins à genoux devant l’ Adonis de Taraval, et Denis Diderot, votre ami, devant une Cléopâtre de Madame Therbouche.

2890. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XVIII » pp. 74-75

Tous les libraires s’y sont mis comme sur une idée lucrative, et on a gâté ce qui pourtant est resté utile et aura pour résultat une plus grande diffusion.

2891. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXXII » pp. 131-132

Il paraît décidément que Sue, sans le vouloir, aura touché quelque fibre vive et saignante, et elle s’est mise à vibrer.

2892. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Aurier, Georges-Albert (1865-1892) »

Il ne fut jamais un chercheur de pierres précieuses ; il sertissait celles qu’il avait sous la main, plus soucieux de leur mise en valeur que de leur rareté ; mais, pêcheur de perles, il le fut aussi trop peu, et, trop confiant en sa force improvisatrice, il laissa, même en des morceaux jugés par lui définitifs, échapper des à peu près et des erreurs.

2893. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Privas, Xavier (1863-1927) »

Il excite, quand il se met au piano et que de sa belle voix, forte et bien timbrée il accompagne les notes, tout ce qu’il y a de meilleur au fond de nous-mêmes.

2894. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Valade, Léon (1841-1884) »

Sainte-Beuve Sous le titre : Avril, Mai, Juin, j’ai reçu, il y a deux ans, un recueil de sonnets ou deux jeunes amis se sent mis à chanter de concert tout un printemps et sans livrer au public leurs noms ; je ne les ai moi-même appris qu’à grand peine (Léon Valade et Albert Mérat).

2895. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 431-433

Tant de succès dans un temps où le goût subsistoit dans toute sa pureté, ne font que mettre plus en évidence le tort des Comédiens qui s’obstinent à répéter jusqu’à la satiété certaines Pieces, sans songer à faire paroître celles-ci.

2896. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 214-216

Ceux qui aiment tant à mettre au jour ce qu’on appelle des Recueils de Poésies, auroient dû puiser dans celui dont nous parlons.

2897. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — N. — article » pp. 419-420

Cet Ouvrage a eu tant d’éditions, qu’il seroit difficile de le confondre avec les Ouvrages médiocres, quand il ne réuniroit pas, dans un degré éminent, une profonde connoissance de l’Histoire, un saine critique, la clarté & la vigueur du style, à un ton de modération & d’honnêteté qui le met bien au dessus de l’Essai de l’Histoire générale, dont il a relevé supérieurement les bévues, confondu les impostures, & réfuté les impiétés.

2898. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 520-522

La Métromanie, mieux écrite & plus fine quant au choix des caracteres & à la maniere de les mettre en jeu, sera toujours regardée comme une excellente Comédie ; Moliere lui-même eût ambitionné la gloire de l’avoir faite, en même temps qu’il eût conspué cette multitude de Drames insipides qui continuent si obstinément à défigurer la Scene.

2899. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 541-542

Malgré cela on peut le mettre au nombre des hommes estimés chez notre Nation & chez l’Etranger.

2900. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Madame Vien » p. 173

Mme Vien met dans ses animaux de la vie et du mouvement.

2901. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « II » pp. 9-11

. — Ne mettez jamais trop d’épigrammes contre madame de Girardin, je vous en prie ; car je ne veux pas paraître un traître à ses sourires.

2902. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Girardin, Delphine de (1804-1855) »

Certes, je ne voudrais pas exclure de la poésie l’élégance, mais, quand je vois celle-ci mise en première ligne, j’ai toujours peur que la façon, la fashion, ne prime la nature, et que l’enveloppe n’emporte le fond.

2903. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Du Plessys, Maurice (1864-1924) »

Ernest Raynaud L’auteur a mis quelque coquetterie à parfaire ce livre : Premier Livre pastoral, en peu de mois, pour confondre ceux qui l’accusaient d’impuissance.

2904. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 374-376

S’il est défectueux en beaucoup d’endroits, ce n’est que pour s’être trop asservi au devoir rigoureux du Traducteur ; on ne connoissoit pas de son temps les Traductions libres, mises depuis si utilement en usage.

2905. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 456-458

Non véritablement : & faut, veuillez ou non, que vous desrorrillonniez, deschauvesourissiez, déretiez, c’est-à-dire, que ne portiez plus en aisles de chauvesouris ou en façon de retz, vos cheveux par lesquels soulez prendre diaboliquement & enfiler les hommes pour rassasier votre désordonné appétit, ou bien que vous soyez perdues & damnées……. par cette mondanité qui vous abuse, voire qui vous rend si laides & abominables à regarder ; que si vous saviez comme cela vous messied, vous y mettriez plutôt le feu que de les montrer par la mauvaise grace qu’ils vous donnent ; & pleust à la bonté de Dieu qu’il fust permis à toutes personnes d’appeler celles qui les portent, Paillardes & Putains, afin de les en corriger !

2906. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 75-77

Cette Traduction nous a procuré des richesses dramatiques ; & ces richesses, pour n’être pas dignes d’être mises en comparaison avec les nôtres, n’en offrent pas moins au Lecteur mille beautés à admirer, malgré l’irrégularité ordinaire aux Pieces Angloises.

2907. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 513-514

Il auroit dû sur-tout mettre plus en évidence l'ineptie des raisonnemens de nos Philosophes matérialistes, de ces esprits aussi vains qu'inconséquens, qui osent se dire les bienfaiteurs du genre humain, lorsqu'ils s'efforcent de le dégrader, en cherchant à le dépouiller de la plus précieuse de ses prérogatives.

2908. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre IX. Caractères sociaux. — Le Prêtre. »

Shakespeare, Richardson, Goldsmith, ont mis le prêtre en scène avec plus ou moins de bonheur.

2909. (1761) Salon de 1761 « Gravure —  Casanove  » pp. 163-164

Moi qui aime à mettre les choses en place, je le transporte d’imagination dans un des appartements du château de Postdam.

2910. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 8, des differens genres de la poësie et de leur caractere » pp. 62-63

Pour ne point mettre en jeu les poëtes modernes, les épigrammes de Martial, qu’on sçait communement, ne sont point celles où il a joüé sur le mot, mais bien les épigrammes où il a dépeint un objet capable de nous interesser beaucoup.

2911. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome IV pp. 5-

Il faut considérer ces passages comme une partie de l’exposition des mœurs : là le génie fait, pour ainsi dire, la revue des forces militaires qu’il va mettre en campagne. […] Ce combat de religions ennemies va mettre en présence des divinités de toute espèce. […] On ignore si l’on doit plus admirer l’art de cette invention que la judicieuse habileté de l’inventeur à mettre si exactement les choses à leur place. […] L’emprunt du Tasse est le même, le talent de le mettre en valeur n’est pas moins grand que chez l’Arioste, et l’art de le déguiser, en se l’appropriant, y ajoute un sceau d’originalité. […] fille des cieux, « Éclaire ma raison au défaut de mes yeux, « Épure tout en moi par ta céleste flamme ; « Mets tes feux dans mon cœur, mets des yeux dans mon âme « Et fais que je dévoile, en mes vers solennels, « Des objets que jamais n’aient vu des yeux mortels.

2912. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIIe entretien. Vie du Tasse (3e partie) » pp. 129-224

Vie du Tasse (3e partie) I Le Tasse, après avoir énuméré les plats, raconte comment son hôte vénérable vint à parler de ces fruits et des autres mets, produits de sa basse-cour. […] Le poète qui chante un de ces récits doit donc le chanter avec les accents et les images que la riche imagination lui prête ; mais il est tenu aussi à le chanter dans un mode sérieux, conforme à la réalité de la nature humaine à l’époque où il la met en scène, conforme surtout à la vérité des mœurs de ses héros ; en un mot, le poème épique, pour être national, humain, religieux, immortel, doit être vrai, au moins dans l’événement, dans la nation, dans le caractère et dans le costume de ses personnages. […] « Elle fuit toute la nuit ; tout le jour elle erre sans conseil et sans guide : elle ne voit que ses larmes, elle n’entend que ses cris : enfin, au moment où le soleil détèle ses coursiers et se plonge dans l’Océan, elle arrive sur les bords du Jourdain, met pied à terre et se couche sur le sable. […] Je ne désire ni les sceptres ni les trésors ; les soucis de l’ambition ou de l’avarice n’habitent point dans mon âme ; une onde pure me désaltère, et je ne crains point qu’une main perfide y mêle des poisons ; mes brebis, mon jardin, fournissent à ma table frugale des mets qui ne me coûtent que des soins. […] Là-dessus le Tasse se mit en colère, et s’écria que Muretus était un pédant, qu’il admirait l’audace d’un si mince compagnon.

2913. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « M. Jouffroy »

., s’étaient mis en devoir de lutter avec les élèves parisiens, jusque-là en possession des premiers rangs. […] En proie durant quinze années à cet inquiétant problème de la destinée humaine, il a voulu mettre ordre à ses doutes, à ses conjectures, et au petit nombre des certitudes ; il s’y est calmé, mais il s’y est refroidi. […] Dubois s’était donc mis à l’œuvre en septembre 1824, secondé de M.  […] Dubois fut mis en cause et condamné, quelques mois avant juillet 1830.

2914. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre IV. Services généraux que doivent les privilégiés. »

En 1770, Rastel, protestant, ayant ouvert une école publique à Saint-Affrique, est poursuivi à la demande de l’évêque et des agents du clergé ; on ferme son école et on le met en prison. — Quand un corps a gardé dans sa main les cordons de sa bourse, il obtient bien des complaisances ; elles sont l’équivalent de l’argent qu’il accorde. […] En ceci notre point de vue est si opposé, que nous avons de la peine à nous mettre au sien ; mais le sien était alors celui de tout le monde. […] Réduire le prince à une liste civile, mettre la main sur les neuf dixièmes de son revenu, lui interdire les acquits au comptant, quel attentat ! La surprise ne serait pas plus grande, si aujourd’hui l’on proposait de faire deux parts dans le revenu de chaque millionnaire, de lui en accorder la plus mince pour son entretien, de mettre la plus grosse à la caisse des consignations pour ne la dépenser qu’en œuvres d’utilité publique.

2915. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série «  Leconte de Lisle  »

Il mit dans ce poème ce qu’il avait de plus sincère en lui, la protestation obstinée contre le mal physique et moral, et aussi la sérénité de l’artiste paisiblement enivré de visions précises. […] Elle les enferme dans une grange et y met le feu (elle aurait pu commencer par là). […] Etre convaincu que toute émotion est vaine ou malfaisante, sinon celle qui procède de l’idée de la beauté extérieure ; regarder et traduire de préférence les formes de la Nature inconsciente ou l’aspect matériel des mœurs et des civilisations ; faire parler les passions des hommes d’autrefois en leur prêtant le langage qu’elles ont dû avoir et sans jamais y mettre, comme fait le poète tragique, une part de son cœur, si bien que leurs discours gardent quelque chose de lointain et que le fond nous en reste étranger ; considérer le monde comme un déroulement de tableaux vivants ; se désintéresser de ce qui peut être dessous et en même temps, ironie singulière, s’attacher (toujours par le dehors) aux drames provoqués par les diverses explications de ce « dessous » mystérieux ; n’extraire de la « nuance » des phénomènes que la beauté qui résulte du jeu des forces et de la combinaison des lignes et des couleurs ; planer au-dessus de tout cela comme un dieu à qui cela est égal et qui connaît le néant du monde : savez-vous bien que cela n’est point dépourvu d’intérêt, que l’effort en est sublime, que cet orgueil est bien d’un homme, qu’on le comprend et qu’on s’y associe ? […] Qu’on se rassure du reste : pas d’agir et de souffrir à certains moments — L’état d’esprit où nous met la poésie de M. 

2916. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre quatrième »

Les sonnets étaient arrivés en France à la suite et dans le cortège de Catherine de Médicis, femme de Henri II, laquelle avait mis en honneur le tour d’esprit subtil et la galanterie de tête qui fait le fond de ce genre. […] Une fois maîtres du terrain, la victoire leur montant au cerveau, la brigade se mit de ses propres mains au ciel, et s’appela la Pléiade. […] Au reste, le droit à cet égard paraissait si clair, que, parmi ses critiques, quelques-uns trouvaient qu’il y avait mis trop de scrupule, et lui reprochaient de préférer trop souvent ses conceptions à celles des anciens. […] Et pourtant il croyait y mettre du scrupule, et regrettait de ne pouvoir oser plus : Ah !

2917. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VII. Repos »

« Le genêt rajeuni balançait ses branches fleuries semblables à des rayons qui lanceraient des parfums ; et le soleil avait tant de force qu’on entendait déjà au midi, dans le pré, chanter le grillon noir dont la carapace est sculptée de signes étranges… » Mais ils se sont égarés en quelque ancien chemin abandonné, creux comme un lit de torrent, et « où les racines des vieux chênes mettaient à la hauteur du front des passants le geste menaçant de leurs griffes tortueuses, de leurs serres noires ouvertes… » Arrivés, un peu effrayés, à la forêt, ils se sont enfoncés en quelqu’une de ces « cavernes glauques que formaient les trouées de verdure où s’entassait la fraîcheur ». […] Déjà aussi on y rencontre souvent le rythme doux, et estompeur, et enveloppeur ; le rythme qui sur les images infiniment diverses met la noblesse toujours renouvelée et pourtant toujours la même d’une draperie largement flottante. […] Chaque fois qu’un juste vient, comme Jésus de Nazareth, essayer de faire du bien, la foule le met en croix. […] « Les oliviers au tronc busqué doivent à l’inclinaison du sol de paraître des êtres prêts à se mettre à genoux ou qui s’en relèvent lentement. » De crainte de m’attarder, je tourne cent pages et je rencontre cette définition à laquelle semblent avoir collaboré un mathématicien puissant et un profond théologien : « Dieu est un point minéral dont la densité est le cube de l’unité. » Je me fais violence pour ne point jeter ici à pleines mains l’or sonore des vers bien frappés et de poids.

2918. (1857) Cours familier de littérature. III « XVe entretien. Épisode » pp. 161-239

Quand j’arrivai au pied de ces montagnes, je mis la jument au petit pas. […] Je me mis à genoux dans l’herbe, le visage tourné vers cette vallée principale de ma vie, non ma vallée de larmes, mais ma vallée de paix. […] Ma fille me disait : « Le pays est mort ; il semble que la cloche pleure au lieu de carillonner. » On disait aussi que vous ne reviendriez jamais ; qu’il y avait eu du bruit là-bas ; qu’on vous avait nommé un des rois de la république ; et puis qu’on avait voulu vous mettre en prison ou en exil, comme sous la Terreur. […] Je garde l’âne, ou plutôt l’âne me garde quand les enfants n’y sont pas ; car il est vieux pour un animal presque autant que je suis vieux pour un homme ; il sait que je n’y vois pas, il ne s’écarte jamais trop des chemins ; et quand il veut s’en aller, il se met à braire, ou bien il vient frotter sa tête contre moi tout comme un chien, jusqu’à ce que nous revenions ensemble à la cabane. » — « Mais le jour ne vous paraît-il pas bien long ainsi, tout seul dans les sentiers de la montagne ? 

2919. (1870) La science et la conscience « Chapitre II : La psychologie expérimentale »

Et d’abord, si l’on se met à recueillir tous les caractères vraiment distinctifs de la nature humaine, tels que l’histoire nous les donne, pourquoi s’attacher exclusivement à la moralité et à la religiosité pour en faire le type propre de l’humanité ? […] Et quand l’ethnographie arriverait à mettre la main sur des œuvres de ce genre, elle ne pourrait pas remplacer l’observation de conscience. […] Déjà Hume avait cru mettre ce point hors de doute, et en avait fait comme le pivot de tout son système. […] Ces antécédents moraux sont des désirs, des aversions, des habitudes, des dispositions combinées avec des circonstances extérieures propres à mettre en action les mobiles internes19. » Stuart Mill en appelle, avec toute l’école qui nie le libre arbitre, à l’observation que chacun de nous fait de ses propres volitions, aussi bien que des actions volontaires de ceux avec qui nous sommes en contact.

2920. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « III — II » pp. 14-15

Ceux qui ont vu la Thessalie trouvent étonnant qu’il y ait mis pêle-mêle les Océanides, la femme-baleine, près du Pinde, en pleine terre.

2921. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XIV » pp. 58-60

La mise en scène est très-belle.

2922. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LV » pp. 213-214

Il est curieux de voir comme les Débats d’aujourd’hui (4 mai) ont baissé le ton sur cette question universitaire qu’ils épousaient avec tant de ferveur, et comme ils se mettent à ménager leur retraite depuis que M. de Montalivet n’est pas de leur premier avis.

2923. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Borel, Petrus (1809-1859) »

Le poète met souvent en tête de ses vers des épigraphes qui sentent la misère.

2924. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Préface de la seconde édition »

Le désir du mieux, quand il ne mène pas tout simplement au bien, n’est que la tentation de se laisser aller à ce que les peintres appellent empâter les couleurs, ce qui est proprement charger de fard un visage où l’on n’a pas su mettre la vie.

2925. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 157-158

M. l’Abbé Roussier y expose le principe de divers systêmes de Musique chez les Grecs, les Chinois, les Egyptiens, & y met le systême de ces derniers en parallele avec celui des Modernes.

2926. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 188-189

La morale en est d’autant plus facile à saisir, & son effet est d’autant plus assuré, qu’elle s’y trouve mise en action.

2927. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 366-368

Mais pour cela, outre la souplesse du génie, il faut de la patience : vertu qui manque plus que le génie aux François, & qui manque sur-tout aux Traducteurs ; car tout Ecrivain ne fait effort qu’à proportion de la gloire qu’il se promet de son Ouvrage ; & comme les Traducteurs savent que le préjugé du Public n’attache qu’une gloire médiocre à leur travail, aussi sont-ils sujets à ne faire que des efforts médiocres pour y réussir. » Après avoir condamné la maniere de traduire de Tourreil, on doit rendre justice aux deux Préfaces excellentes qu’il a mises à la tête de sa Traduction.

2928. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 430-432

Il n'est point de bassesses qu'ils n'aient mises en œuvre contre lui : intrigues, imputations calomnieuses, lettres anonymes, libelles de toute espece, tout a été mis en usage pour lui nuire & le décrier.

2929. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préface et poème liminaire des « Châtiments » (1853-1870) — Préface de 1853 »

Le flambeau rayonne ; si on l’éteint, si on l’engloutit dans les ténèbres, le flambeau devient une voix, et l’on ne fait pas la nuit sur la parole ; si l’on met un bâillon à la bouche qui parle, la parole se change en lumière, et l’on ne bâillonne pas la lumière.

2930. (1763) Salon de 1763 « Peintures — De Machy » pp. 242-243

Il y avait cette année à la foire un marchand de bosses ; tous ses meubles furent consumés, tous ses plâtres mis en pièces ; il n’y eut que le groupe de L’Amour et de l’Amitié qui resta intact au milieu des flammes et de la chute des murs, des poutres, des toits, en un mot de la dévastation générale qui s’étendit de tous côtés, autour de leur piédestal sans en approcher.

2931. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — VIII. Les calaos et les crapauds »

Il se mit en route avec un camarade et ils arrivèrent chez le grand-père.

2932. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Merlin de Thionville et la Chartreuse du Val-Saint-Pierre. »

La porte donnait sur un péristyle élevé de douze marches au-dessus du sol de la cour, et au-dessus s’élançait un élégant clocher renfermant l’horloge et le carillon, qui, tous les quarts d’heure, se mettait en mouvement et sonnait des hymnes. » « Telle était, pour le dehors, cette somptueuse maison… » Cela, convenons-en, est d’une parfaite et sensible vérité, d’une sobre et magnifique description ; quoique sorti d’une plume conventionnelle. […] Celui-ci, très sincère dans ses réponses, aussi libre de préjugés que de passions, essaye pourtant de le séduire par un endroit : il voudrait le décider à se faire moine, et se met en tête de lui procurer sa charge. Mais voici une impression profonde et salutaire à laquelle le jeune homme ne s’attendait pas, et qui vient mettre à néant tous ces beaux projets de népotisme : « Comme je remplaçais dom Barthélemy à la table des hôtes, je le suppléais aussi au chœur.

2933. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ALFRED DE MUSSET. » pp. 177-201

Mais ce n’est que depuis moins de quinze ans, c’est-à-dire depuis la mise au jour d’André Chénier et l’apparition des premières Méditations poétiques, ces deux portes d’ivoire de l’enceinte nouvelle, que notre poésie, à proprement parler, a trouvé sa langue, sa couleur et sa mélodie, telles que les réclamait l’âge présent, et qu’elle a pu exprimer ses sentiments les plus divers sur son véritable organe. […] On en rit ; c’est hasard s’il n’a heurté personne ; Mais sa folie au front lui met une couronne, A l’épaule une pourpre, et devant son chemin La flûte et les flambeaux, comme au jeune Romain ! […] Quand elle a quelque fonds d’artiste en elle, disions-nous, elle est promptement avertie par un tact chatouilleux de ce qui se remue de poétique alentour ; qu’elle se réjouisse donc d’avoir à le dire ; qu’elle mette sa gloire à saluer la première : sa consolation comme son devoir est de ne se lasser jamais.

2934. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « GRESSET (Essai biographique sur sa Vie et ses Ouvrages, par M. de Cayrol.) » pp. 79-103

L’observation fine de Gresset venait de prendre sur le fait un travers, un vice particulier à ce moment de société auquel il assistait ; son talent redevenu net, vif, élégant, et à la fois enhardi, avait mis l’odieux objet dans une entière lumière ; sa conscience d’honnête homme l’avait flétri. […] Aucune comédie n’a peut-être autant fourni à la mémoire du public et n’a mis en circulation pour l’usage journalier un aussi grand nombre de ces mots devenus proverbes en naissant : Les sots sont ici-bas pour nos menus plaisirs… C’est pour le peuple enfin que sont fait les parents… Il ne vous fera pas grâce d’une laitue… ………. […] La ville de province telle qu’elle était autrefois, car, on le sait, il n’y a plus de province aujourd’hui, il n’y en aura plus demain, grâce aux chemins de fer ; nous sommes à la veille d’un atticisme universel, à Paris comme ailleurs, et c’est ce qui me met à l’aise pour m’expliquer.

2935. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « DU ROMAN INTIME ou MADEMOISELLE DE LIRON » pp. 22-41

Mais tout en se promenant avec lui sous une allée de châtaigniers devant la maison, tout en prenant le frais près de l’adolescent chéri sur un banc placé dans cette allée, elle le prépare à l’arrivée de M de Thiézac qu’on attend le jour même ; elle l’engage à profiter de cette protection importante pour mettre un pied dans le monde, et elle lui annonce avec gravité et confiance qu’elle est décidée à se laisser marier avec M. de Thiézac : « car, dit-elle, mon père, qui est âgé et valétudinaire, peut mourir. […]  — Mets ton épaule près de l’oreiller, afin que je m’accote sur toi. — Dans toutes les actions de ma vie, il y a toujours eu quelque chose qui ressortissait de la maternité. » Mademoiselle de Clermont, à Chantilly, ne se fût pas exprimée de la sorte en parlant à M. de Meulan ; mais Mlle de Liron était de sa province, et l’accent qu’elle mettait à ces expressions familières ou inusitées les gravait tellement dans la mémoire, qu’on a jugé apparemment nécessaire le nous les transmettre.

2936. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série «  Paul Bourget  »

Il est trop évident (mais j’ai besoin de ces truismes pour reprendre confiance) que, comme tout autre écrivain, un critique met nécessairement dans ses écrits son tempérament et sa conception de la vie, puisque c’est avec son esprit qu’il décrit les autres esprits ; que les différences sont aussi profondes entre M.  […] Nisard et Sainte-Beuve, qu’entre…, mettons entre Corneille, Racine et Molière, et qu’enfin la critique est une représentation du monde aussi personnelle, aussi relative, aussi vaine et, par suite, aussi intéressante que celles qui constituent les autres genres littéraires. […] Mais ce qui, heureusement, met M. 

2937. (1887) Discours et conférences « Réponse au discours de M. Louis Pasteur »

L’humanité veut des noms qui lui servent de types et de chefs de file ; elle ne met pas dans son choix beaucoup de discernement. […] Vous avez mille fois raison, Monsieur, quand vous mettez au-dessus de tout pour le progrès de l’esprit humain le savant, qui fait des expériences et crée des résultats nouveaux. […] Mais sa haute vie l’a mis en rapport avec l’esprit éternel qui agit et se continue à travers les siècles ; il est immortel.

2938. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. Tome IXe. » pp. 138-158

Son génie se croyait sans cesse en droit de demander des miracles, et, comme on dit, de mettre le marché à la main à la Fortune. […] Profitant de la paix forcée de l’Europe, assuré de l’alliance de la Russie et certain d’acheter sa connivence à l’Occident moyennant un appât du côté de la Turquie, Napoléon conçoit à un moment l’idée de mettre la main sur le trône d’Espagne, d’en précipiter un roi imbécile, une reine dissolue, et de déshériter leur fils qui, au fond, ne valait guère mieux, mais à qui l’on n’avait à reprocher alors que de ne pouvoir vivre en intelligence avec ses tristes parents et avec leur scandaleux favori, le prince de la Paix. […] Ainsi le malheureux général, sans s’en douter, voulait anéantir la seule preuve qui pût mettre hors de cause sinon son habileté en ce désastre, du moins son honneur9.

2939. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « M. Necker. — I. » pp. 329-349

Necker est un fort honnête homme ; il a beaucoup d’esprit, mais il met trop de métaphysique dans tout ce qu’il écrit. […] C’était un singulier oubli et une inadvertance de l’amour-propre en ces rares intelligences : ils jugeaient l’humanité d’après eux-mêmes, et ils la mettaient très haut ; ils jugeaient des autres individus d’après eux aussi, et, sitôt qu’ils ne les trouvaient point à leur mesure et jetés dans le même moule, ils les jugeaient très inférieurs et tout à fait petits. […] Le monarque parle, tout est peuple, et tout obéit » ; c’est-à-dire que, par suite du relâchement excessif des pouvoirs, de l’affaiblissement des mœurs et d’une sorte de dissolution lente et universelle, il n’y avait plus en France alors de digue véritable et solide entre la masse entière de la nation et le roi ; que les divers corps et ordres de l’État n’avaient plus de force pour subsister par eux-mêmes et pour résister, le jour où ils seraient mis sérieusement en question, et qu’il n’y avait plus qu’un trône debout, au milieu d’une plaine immense, d’une plaine mobile.

2940. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre sixième. Genèse et action des idées de réalité en soi, d’absolu, d’infini et de perfection »

En d’autres termes, nos moyens de sentir et de connaître ne sont peut-être pas tous les moyens de connaître réels ; la science même met en suspicion la valeur objective de nos sens, et la critique met en suspicion la valeur objective de nos catégories ou formes de pensée. […] En cela le kantisme et l’évolutionnisme doivent se mettre d’accord.

2941. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre quatrième. L’expression de la vie individuelle et sociale dans l’art. »

Certainement la rareté des éléments et le poli de la surface peuvent constituer de très belles qualités, mais, si on en faisait le tout de l’art, littérature et poésie ne seraient plus que l’habileté à construire des décors ; la mise en scène primerait la vie. […] Il faut comprendre combien la vie déborde l’art pour mettre dans l’art le plus de vie. […] Léonard de Vinci conseille aux peintres de recueillir les expressions diverses de physionomie que le hasard met sous leurs yeux ; plus tard, ils les pourront rapporter au visage forcément indifférent du modèle : ils auront pris de la sorte la vérité sur le fait.

2942. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XX. Le Dante, poëte lyrique. »

Et pourtant, si nous voulons, après Pindare, après Horace, donner une image de cette poésie sublime et calme qui retraçait, pour les anciens, les révolutions capricieuses du sort et les met tait au-dessous du courage et de la vertu, c’est au poëte de la Divine Comédie qu’il faudrait demander cet exemple. […] La nécessité lui donne une course si rapide, que souvent elle atteint le vainqueur ; c’est elle qui est mise en croix par ceux-mêmes qui devraient la célébrer et qui la maudissent à tort. […] Elle flétrit Te vice, comme elle exaltait la vertu ; elle mit sur les actions des hommes le stigmate de la honte ou la lumière de la gloire, et fit elle-même, dans cette vie, les rétributions pénales qu’elle a décrites pour l’autre.

2943. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « La princesse Mathilde » pp. 389-400

Il mit, d’ailleurs, à toute cette relation beaucoup de délicatesse. […] Elle goûte les chefs-d’œuvre du pinceau en tout genre, mais elle ne les classe pas indifféremment ; elle ne met pas sur une même ligne et ne comprend pas dans une admiration égale et souveraine tout ce qui peut-être y aurait droit, je veux dire tout ce qui excelle.

2944. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Vie militaire du général comte Friant, par le comte Friant, son fils » pp. 56-68

On lit dans la premier volume des Mémoires sur les campagnes des armées du Rhin, par le maréchal Gouvion-Saint-Cyr, de bien étonnants détails sur les nominations de généraux, et même de généraux en chef, qui se faisaient alors ; il y a surtout la nomination d’un certain général Carlin ou Carlenc, mis à la tête de l’armée du Rhin sur le refus de tous les autres : c’est une véritable scène de comédie. […] Mis à la retraite le 31 août suivant à l’âge de cinquante-sept ans, exclu de tout service et de toute faveur sous la Restauration, il mourut, fidèle à ses dieux, le 24 juin 1829, à Gaillonnet, non loin de sa province natale, et voulut être enterré dans l’humble cimetière de Seraincourt. — Il ne se peut de vie militaire plus belle, plus pleine, plus simple, plus une, plus exactement enchâssée dans l’époque héroïque où son profil toujours se détachera.

2945. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Dübner »

. — Si par là l’on entend diviser le procès, mettre les parties dos à dos et partager jusqu’à un certain point les torts, je ne demande pas mieux et je n’ai rien à opposer. […] D’un dévouement et d’une complaisance à toute épreuve, il mettait sans cesse à ma disposition le secours de sa saine critique et de sa profonde érudition.

2946. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « JULES LEFÈVRE. Confidences, poésies, 1833. » pp. 249-261

Si ce volume, qui ne doit pas contenir moins de six mille vers, tombait aux mains de lecteurs qui aiment peu les vers, et ceux d’amour en particulier ; si, d’après la façon austère et assez farouche qui essaye de s’introduire, on se mettait aussitôt à morigéner l’auteur sur cet emploi de sa vie et de ses heures, à lui demander compte, au nom de l’humanité entière, des huit ou dix ans de passion et de souffrance personnelle que résument ces poëmes, et à lui reprocher tout ce qu’il n’a pas fait, durant ce temps, en philosophie sociale, en polémique quotidienne, en projets de révolution ou de révélation future, l’auteur aurait à répondre d’un mot : qu’attaché sincèrement à la cause nationale, à celle des peuples immolés, il l’a servie sans doute bien moins qu’il ne l’aurait voulu ; que des études diverses, des passions impérieuses, l’ont jeté et tenu en dehors de ce grand travail où la majorité des esprits actifs se pousse aujourd’hui ; qu’il s’est borné d’abord à des chants pour l’Italie, pour la Grèce ; mais qu’enfin, grâce à ces passions mêmes qu’on accuse d’égoïsme, et puisant de la force dans ses douleurs, en un moment où tant de voix parlaient et pleuraient pour la Pologne, lui, il y est allé ; qu’il s’y est battu et fait distinguer par son courage ; que, s’il n’y a pas trouvé la mort, la faute n’en est pas à lui ; qu’ainsi donc il a payé une portion de sa dette à la cause de tous, assez du moins pour ne pas être chicané sur l’utilité ou l’inutilité sociale de ses vers. […] N’y a-t-il pas, d’ailleurs, quelque modestie à mettre tant de pierres précieuses en regard de sa pauvreté ? 

2947. (1874) Premiers lundis. Tome I « Alexandre Duval de l’Académie Française : Charles II, ou le Labyrinthe de Woodstock »

Duval ; maintenant en voici les effets désastreux : Comme les jeunes rédacteurs d’un journal scientifique et littéraire emploient beaucoup de talent et d’esprit à prouver que tous les ouvrages français n’ont pas le sens commun et à proposer pour modèles les étrangers, qui n’ont pas d’autre théâtre que le nôtre, il s’en est suivi : 1° que, de nos jours, tout vise à l’originalité, au bizarre ; que la vraisemblance et la raison sont bannies ; et que, à force de chercher la vérité, on arrive au trivial pour tomber bientôt dans l’absurde ; 2° que les jeunes gens, égarés par les prédicateurs des nouvelles doctrines, ne sachant plus quelle est la meilleure route, de celle qu’ont suivie nos pères ou de celle qu’on leur indique, se bornent, en attendant la solution du problème, à faire des tiers de vaudevilles, ou à mettre de petits articles dans les journaux littéraires ; et que notamment l’un d’entre eux, à force d’esprit et de savoir-faire, en est venu (ô scandale !) […] Duval n’y a pas mis de malice, et il suffirait, pour justifier pleinement son intention, de rappeler un autre passage, où, parlant de cette fumée légère qu’on appelle renommée, il la trouve en effet désirable, dès qu’elle peut conduire vers la seule récompense que doit envier l’homme de lettres, l’Académie.

2948. (1875) Premiers lundis. Tome III « Nicolas Gogol : Nouvelles russes, traduites par M. Louis Viardot. »

L’armée des Zaporogues, après avoir bien ravagé le pays, va mettre le siège devant la ville de Doubno. […] La petite histoire intitulée un Ménage d’autrefois, et qui peint la vie monotone et heureuse de deux époux dans la Petite-Russie, est pourtant d’un contraste heureux avec les scènes dures et sauvages de Boulba : rien de plus calme, de plus reposé, de plus uni ; on ne se figure pas d’ordinaire que la Russie renferme de telles idylles à la Philémon et Baucis, de ces existences qui semblent réaliser l’idéal du home anglais et où le feeling respire dans toute sa douceur continue : Charles Lamb aurait pu écrire ce charmant et minutieux récit ; mais vers la fin, lorsque le vieillard a perdu son inséparable compagne, lorsque le voyageur, qui l’a quitté cinq années auparavant, le revoit veuf, infirme, paralytique et presque tombé en enfance, lorsqu’à un certain moment du repas un mets favori de friandise rappelle au pauvre homme la défunte et le fait éclater en sanglots, l’auteur retrouve cette profondeur d’accent dont il a déjà fait preuve dans Boulba, et il y a là des pages que j’aimerais à citer encore, s’il ne fallait se borner dans une analyse, et laisser au lecteur quelque chose à désirer. — En homme, le nom de M. 

2949. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XV. De l’imagination des Anglais dans leurs poésies et leurs romans » pp. 307-323

Ce n’est pas le bonheur des jouissances vives, c’est le calme qu’il met en contraste avec le crime, et l’opposition est bien plus forte ! […] La plus féconde des idées philosophiques, le contraste des qualités naturelles et de l’hypocrisie sociale, y est mise en action avec un art infini, et l’amour, comme je l’ai dit ailleurs54, n’est que l’accessoire d’un tel sujet.

2950. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre III. De l’émulation » pp. 443-462

Plus les hommes sont médiocres, plus ils mettent de soin à s’assortir ; ils repoussent loin d’eux la raison éclairée, comme quelque chose d’hétérogène avec leur nature, et qui doit être éminemment nuisible à leur empire. […] L’agitation inséparable d’un gouvernement républicain met souvent en péril la liberté, et si ses chefs n’offrent pas la double garantie du courage et des lumières, la force ignorante ou l’adresse perfide précipitent tôt ou tard le gouvernement dans le despotisme.

2951. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre IV. L’écrivain (suite) »

Quelqu’un lui souffle tout bas ce qu’il met sur son papier. […] C’est ce qui met à part et au-dessus de tous, les pauvres fous, malheureux ou naïfs, qui les trouvent ; on appellera les autres « grands hommes si l’on veut, mais poëtes, non pas. » Nous en avons eu un (ce n’est guère), un seul et qui, par un hasard admirable s’étant trouvé Gaulois d’instinct, mais développé par la culture latine et le commerce de la société la plus polie, nous a donné notre oeuvre poétique la plus nationale, la plus achevée et la plus originale ; c’est pour cela que j’en ai parlé si longuement, trop longuement Peut-être.

2952. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre III. Association des mots entre eux et des mots avec les idées »

Un champ de blé met une vision dorée dans les yeux du peintre : le paysan y voit tant de sacs qui valent tant sur le marché. […] Boileau a exprimé cette attraction que les mots exercent les uns sur les autres par l’habitude qu’ils ont d’être réunis, dans les vers si connus de sa seconde satire : Si je louais Philis en miracle féconde, Je trouverais bientôt à nulle autre seconde ; Si je voulais vanter un objet non pareil, Je mettrais à l’instant plus beau que le soleil.

2953. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre II. Le lyrisme bourgeois »

Cette affaire mettait en jeu toutes les passions du poète : l’Université et son champion Guillaume de Saint-Amour luttaient désespérément pour interdire aux religieux des ordres mendiants, aux dominicains surtout, l’accès des chaires publiques, et pour défendre les maîtres séculiers d’une concurrence redoutable. […] Au service de ces idées et de ces sentiments, le poète met un talent original.

2954. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre III. L’antinomie dans la vie affective » pp. 71-87

Car nous n’imaginons et ne désirons que des choses qui nous sont partiellement connues et que notre milieu met en partie à notre disposition. […] Chez Ibsen comme chez Nietzsche, l’amour du risque, l’effort d’intrépidité déployé par l’individu est mis au service d’une idée sociale.

2955. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre XII. L’antinomie morale » pp. 253-269

Elles lui mettent le marché à la main : « Survivre, oui : tu survivras si… tu obéis. » — L’illusion messianiste qu’on retrouve dans les morales laïque et humanitaire ne diffère guère de la précédente illusion. « Sacrifie-toi, dit-on à l’individu, ne t’insurge pas contre la société injuste ; la justice régnera un jour. » — Comme si cette promesse n’était pas une dérision et une injure à cette idée de justice que l’on invoque. […] Le grand grief qu’on a contre la casuistique, c’est moins d’avoir apporté souvent des solutions contestables, que d’avoir posé des problèmes inquiétants et d’avoir mis en honneur la discussion morale.

2956. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XI. Le royaume de Dieu conçu comme l’événement des pauvres. »

Ils les mettaient sur la mule qui le portait, ou les étendaient à terre sur son passage 533. […] Un jour qu’ils avaient entre eux une de ces querelles de préséance qui n’étaient point rares, Jésus prit un enfant, le mit au milieu d’eux, et leur dit : “Voilà le plus grand ; celui qui est humble comme ce petit est le plus grand dans le royaume du ciel 546.”

2957. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VIII. Quelques étrangères »

Moi, par exemple, je suis sans cesse étonné par la facilité et la grâce que met le hasard à seconder le développement harmonique de mes intentions. » L’inconscient applique, en effet, à l’exécution le conseil d’invention ; nous voyons le peintre ridicule faire son tableau à coups d’épongés, émerveillé à chaque instant, de la beauté de l’œuvre et du génie de l’ouvrier. […] L’auteur n’a pas su les mettre à leur place ; les membres restent bizarrement dispersés et comme hostiles.

2958. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre III, naissance du théâtre »

Le miel et l’huile découlent de vos rameaux, et les vieilles trouvent en vous de quoi remplir leurs coupes d’un pur nectar qui les endort » — Les Lénées célébraient le raisin mis sous le pressoir. […] Phrynicos avait mis en scène l’horrible désastre de Milet, l’alliée et la sœur d’Athènes ; il avait montré la ville pillée et incendiée par les Perses, ses défenseurs massacrés, l’oracle menaçant de Delphes accompli : « Les femmes de Milet laveront les pieds de beaucoup d’hommes à la longue chevelure. » Le peuple pleura à ce spectacle navrant ; mais, le lendemain, les yeux essuyés, il s’irrita contre le poète qui, par ces larmes brûlantes, avait ravivé sa plaie domestique ; il condamna Phrynicos à une amende de dix mines et interdit à jamais son drame.

2959. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre III »

Peu à peu ils se mirent à divaguer dans une langue qu’ils croyaient celle d’Hippocrate et qui n’est qu’un jargon d’officine. […] Il ne faut pas confondre cette opulence imaginative ou verbale, qui témoigne de la vitalité d’une langue, avec l’indigente richesse dont on a parlé plus haut, qui ne met en circulation que de la fausse monnaie.

2960. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre troisième. De la sympathie et de la sociabilité dans la critique. »

Mais tous les esprits ne sont pas susceptibles au même degré de vibrer au contact de l’œuvre d’art, d’éprouver la totalité des émotions qu’elle peut fournir ; de là le rôle du critique : le critique doit renforcer toutes les notes harmoniques, mettre en relief toutes les couleurs complémentaires pour les rendre sensibles à tous. […] Pour comprendre un auteur, il faut « se mettre en rapport » avec lui, comme on dit dans le langage du magnétisme ; seulement on ne peut pas juger de la valeur intrinsèque d’un auteur par la facilité avec laquelle ce rapport s’établit.

2961. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre VII. Le langage et le cerveau »

Bouillaud : « Matériellement, la main est aussi assurée qu’elle l’était en état de santé55 ; les lettres sont bien tracées, mais les lettres ne forment point de mots, et ne peuvent rendre une pensée quelconque…, et cependant, ayant pris un papier rayé, le malade se mit à composer quelques lignes, que sa femme exécuta sur le piano, toute stupéfaite de l’exactitude de la composition, exempte de toute toute ou erreur musicale. Il se mit ensuite à moduler de sa voix l’air écrit, et accompagna avec correction et harmonie les sons rendus par le piano56. » Dans la plupart des cas cités, où plusieurs des signes artificiels parole, écriture, dessin57 sont plus ou moins altérés, il semble que la faculté du geste reste intacte.

2962. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre VIII. Des romans. » pp. 244-264

On se mit donc à imprimer de petits livres, de brochures légeres, écrites d’un style aussi léger que leur forme. […] On a mis à la suite de ses contes moraux Belisaire, où l’auteur s’éleve jusqu’à la plus sublime politique.

2963. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 13, de la saltation ou de l’art du geste, appellé par quelques auteurs la musique hypocritique » pp. 211-233

Comme l’art du geste se subdivisoit encore en plusieurs especes, on ne doit pas être surpris qu’il se soit trouvé chez les anciens un nombre de danses differentes, assez grand pour mettre Meursius en état de composer de leurs noms, rangez suivant l’ordre alphabetique, un dictionnaire entier. […] L’orateur Hortensius, le contemporain et le rival de Ciceron, étoit dans ses manieres et dans la façon de se mettre, ce que nous appellons précieux.

2964. (1811) Discours de réception à l’Académie française (7 novembre 1811)

On rougit des affections les plus douces, on est honteux des liens les plus sacrés, et le Philosophe marié met à cacher son bonheur le soin que Tartuffe prenait pour dissimuler ses vices. […] On parle de modération avec orgueil, de sagesse avec arrogance ; on met tout en doute, et l’on ne souffre pas la contradiction ; la religion avait eu des sectateurs cruels ; la tolérance a des apôtres fanatiques.

2965. (1760) Réflexions sur la poésie

Le sonnet ne se montre plus, l’élégie expire, l’églogue est sur son déclin, l’ode même, l’orgueilleuse ode commence à déchoir ; la satire enfin, malgré tous les droits qu’elle a pour être accueillie, la satire en vers nous ennuie pour peu qu’elle soit longue ; nous l’avons mise plus à son aise en lui permettant la prose ; c’est le seul genre de talent que nous ayons craint de décourager. […] Cependant, pour acquérir le droit d’être plus sévère à l’avenir, elle a pris le parti, depuis quelques années, de laisser aux poètes le choix des sujets, mais elle voit avec peine que les auteurs semblent se négliger à proportion de la liberté qu’elle leur laisse, et de la rigueur qu’elle a résolu de mettre dans ses jugements.

2966. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre VI. Du trouble des esprits au sujet du sentiment religieux » pp. 143-159

Le christianisme, en outre, a mis dans le monde des idées morales qui ne peuvent plus en être exclues, qui sont la sauvegarde de la civilisation, et qui, par conséquent, serviraient encore à le conserver, indépendamment même de son origine divine, et du fait de la révélation. […] Le christianisme et les idées que le christianisme a mises dans le monde sont encore à présent notre seul salut.

2967. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXI. Mme André Léo »

Seulement, au lieu du coqueluchon du xviiie  siècle, elle a mis le bonnet rouge des tricoteuses… Mme de Genlis, tout bas-bleu qu’elle fût, échappait aux défauts de tous les bas-bleus en général, et de Mme André Léo en particulier, par sa haine du philosophisme révolutionnaire et par l’idée chrétienne qui souvent affermit son bon sens. […] Je trouve, en effet, dans son roman intitulé : le Divorce, ces paroles qu’elle met dans la bouche du personnage qui représente l’opinion philosophique de l’auteur.

2968. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Les civilisations »

Les civilisations47 I Si, au lieu d’Études sur les civilisations 48, Louis Faliés, dupe de ce grand mot moderne, qui dit moins réellement au fond qu’il ne semble dire, avait écrit sans sourciller : Histoire des civilisations, il aurait, pour les niais de ce temps, un titre de livre superbe et alléchant, et ils auraient tous mis le museau dans son panier. […] Et si l’on ne sait pourquoi — car on ne sait pourquoi — l’auteur y a mis Rome et la Grèce, il faut dire, à sa décharge, qu’il n’a pas écrit un mot sur ces civilisations qui n’ait déjà été écrit et qu’on ne sache.

2969. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le colonel Ardant du Picq »

Cette discipline transformatrice de l’homme, qui solidifie la nature humaine devant le danger et la destruction, et met une âme et une volonté à la place des frémissements et des tressaillements de la chair, tous les génies militaires qui ont paru dans le monde et y ont laissé une trace de leur passage, depuis Xénophon jusqu’à César et depuis César jusqu’à Napoléon, ont voulu la réaliser, l’exalter, la pousser jusqu’au plus haut point de perfection, — quelquefois par des moyens atroces. […] … L’homme qui les a écrites me fait l’effet d’un Montesquieu militaire, qui nous donne axiomatiquement l’Esprit des Lois des armées, comme l’autre nous a donné l’Esprit des Lois des sociétés… Il n’affirme pas, il est vrai, la nécessité des démocraties pour la destruction des armées avec l’aplomb et l’autorité qu’il met à affirmer la discipline pour leur existence et pour leur force ; mais, trempé dans l’atmosphère de son temps, il en admet l’hypothèse.

2970. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « L’Angleterre depuis l’avènement de Jacques II »

C’est, en effet, la prétention des whigs depuis qu’ils existent — et on peut dire l’année et presque le jour où ils ont été mis dans le monde — que l’Angleterre, telle que la révolution de 1688 l’a faite, est toujours la vieille Angleterre, l’Old England des premiers temps ! […] Il est vrai que, sous le dernier des Stuarts, cette théorie, qui saignait encore du coup de hache qui avait fait tomber la tête de Charles Ier, fut définitivement mise en pièces, mais elle n’était pas tombée du ciel comme un bouclier salien, et, pour qu’elle se fût si souverainement posée, il fallait qu’elle répondît à des sentiments publics, à des idées qui avaient cours.

2971. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes et la société au temps d’Auguste » pp. 293-307

Il n’est jamais pédant comme Taine, né coiffé en fait de talent et d’esprit, mais qui met trop souvent sa coiffe dans sa poche. […] Il n’a, comme les dandys, de respect pour rien, ni pour les traditions, ni pour les solennités, ni pour les témoignages de l’Histoire, appuyés par les plus grands noms… Si vous mettez, entre parenthèses, son incroyable amour pour Cléopâtre, qui détonne avec son dandysme, et qui rappelle l’amour sénile du philosophe Cousin pour la duchesse de Longueville, Blaze de Bury semble revenu de l’Histoire comme d’autre chose.

2972. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. le vicomte de Meaux » pp. 117-133

Assurément, je ne lui conteste pas sa foi, à cet écrivain qui la met cependant perpétuellement en dehors de la question d’histoire, mais il faut avouer qu’il n’a pas l’ambition de sa foi, et qu’il n’en a pas les regrets ! […] — que M. le vicomte de Meaux peut mettre au compte du Catholicisme.

2973. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Michelet » pp. 259-274

Pour l’héroïsme de Mameli, mis à la suite de ces grands noms respectés et indiscutés, je me défie de l’affirmation de Michelet et de son enthousiasme. […] Ses grenadiers adorés, qui l’adoraient, le mirent dans la terre comme toute sa vie ils l’avaient vu dessus : la face tournée vers l’ennemi.

2974. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Auguste Vacquerie » pp. 73-89

Il est trop lyrique pour s’occuper de mettre de l’ordre dans ses idées et pour s’embarrasser des contradictions. […] Comme tous les poètes dramatiques qui se sentent prêtres et dieux, Vacquerie met la main sur l’universalité des choses et parle de tout en homme qui peut jeter sur tout « la forme divine ».

2975. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Lamennais »

Lamennais, en disant pareille chose, se mettait son clocher dans l’œil. Seulement, une fois qu’il l’y avait mis, l’aveuglé reprenait son bonheur d’expression : « La monarchie — écrivait-il alors — est condamnée.

2976. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Nicolas Gogol »

Charrière, qui a pour Gogol les bontés d’un homme d’esprit pour la personne qu’il a pris la peine de traduire, n’hésite pas à mettre les Âmes mortes à côté de Gil Blas, et, si cela lui fait bien plaisir, nous ne dérangerons rien à cet arrangement de traducteur ; car la réputation de Gil Blas — ce livre écrit au café, entre deux parties de dominos, a dit le plus fin et le plus indulgent des connaisseurs, — n’est pas une de ces gloires solides qui aient tenu contre le temps. […] Le tendre Maniloff, à qui « on voudrait voir une passion, une manie, un vice, afin de lui savoir quelque chose », madame Koroboutchine, Nozdref le hâbleur, Pluchkine l’avare, — ces tics plutôt que ces passions, — ne peuvent pas être mis à côté de la magnifique variété d’individualités qui foisonnent dans la Comédie humaine, et qui sont taillées si profond que les gens qui ne voient pas à une certaine profondeur ne les croient plus vrais, les pauvres myopes !

2977. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « II. Jean Reynaud »

Seulement, pour la remplacer, cette notion inférieure et grossière, l’éminent inventeur n’a trouvé rien de plus puissant que de ramasser dans la poussière des rêves de l’humanité les plus rongés par les siècles et les plus transparents de folie le système ruminé par l’Inde, — cette vache de la philosophie, — d’une métempsychose progressive, qui met l’homme aux galères à perpétuité de la métamorphose et son immortalité en hachis ! […] Si on met l’infini à la place de l’étendue, où pose-t-on l’axe du monde et que devient pour M. 

2978. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXIX. M. Eugène Pelletan »

Pelletan justifiait l’ambition naïvement montrée de son titre (et il n’y a rien dans cette naïveté fière qui nous déplaise, qu’on le croie bien), nous aurions le symbole du dix-neuvième siècle, et nous saurions à présent quoi mettre à la place de ce vieux symbole de Nicée, tué par l’Analyse et par la Science, et qui ne peut plus satisfaire, — disent les philosophes, — les besoins de foi des peuples actuels. […] Elle pourra lui servir, à lui, car l’esprit gagne toujours à se mettre bien en face de sa pensée, en l’exprimant.

2979. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Raymond Brucker. Les Docteurs du jour devant la Famille » pp. 149-165

Il n’était pas, d’ailleurs, de vocation absolue, un romancier, quoiqu’il ait fait aussi des romans, et, entre autres, ces Docteurs du jour, qui ont un cadre romanesque dessiné pour y mettre bien autre chose que des romans, et qui pourtant en contiennent un, si ce n’est deux… Brucker avait d’autres facultés que celles-là avec lesquelles on crée des fictions intéressantes ou charmantes, et ces facultés impérieuses et précises avaient trop soif de vérité pour s’arrêter beaucoup aux beautés du rêve, qui traversèrent cependant son imagination dans la chaleur de sa jeunesse, quand, par exemple, il écrivit en collaboration ce roman des Intimes, oublié, comme s’il l’avait fait seul, malgré les diamants d’esprit qu’y jeta Gozlan et qui ne firent point pâlir les rubis que lui, Brucker, plaça à côté… La gerbe de facultés différentes qu’avait Brucker et qui se nuisaient peut-être les unes aux autres par le fait de leur nombre, avaient, au centre du magnifique bouquet qu’elles formaient, deux fleurs superbes et excessivement rares : la métaphysique, — non pas froide chez lui comme chez les autres métaphysiciens, mais de feu, — et une puissance de formule algébrique qui donnait à ses idées et à son style — même littérairement — une rigueur et une plénitude incomparables. […] Il mit, pour la première fois, devant les enfants, un père supérieur à ses enfants de toutes les manières, et par la raison, et par le caractère, et par la majesté de l’une et de l’autre, et par les grâces de l’esprit, et par la bonté, cette grâce des grâces, et on put comprendre, en le voyant, que la Famille, même atteinte par de fausses doctrines, pouvait se refaire, de par l’ascendant et l’influence de son chef, et rentrer noblement dans la vérité du respect et de l’obéissance.

2980. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Achille du Clésieux »

C’est l’accent du cœur qui le met à part des poètes d’un temps où l’âme se retire de toutes choses devant la sensation et la matière envahissantes… Naturellement, un pareil poète doit être plus ou moins méconnu à une époque vide et pédante où lord Byron lui-même paraît affecté, Lamartine vague, et Alfred de Musset négligé ; car c’est là l’opinion qui commence à courir parmi ceux qui se croient les forts de la littérature actuelle, parmi les poètes matérialistes et réalistes de notre décadence littéraire. […] selon ce critique, qui est chrétien pourtant et d’une noble race, fidèle aux anciennes traditions et aux anciennes mœurs, il fallait que l’amour d’Armelle mis dans la balance avec le serment fait à la mère l’emportât dans le cœur du fils, sous peine de disproportion entre le motif du sacrifice et son objet ; et, le pourra-t-on croire ?

2981. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Raymond Brucker » pp. 27-41

Coureurs d’idées, après qui la Forme, cette fortune des idées, se met à courir, ils ont touché à tout le clavier humain, et ils l’ont fait vibrer jusqu’à la souffrance du tympan. […] « C’est vous qui m’avez mis la plume à la main », disait Mme Sand à M. 

2982. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXI. De Mascaron et de Bossuet. »

Ainsi, dans l’oraison funèbre de Henriette d’Angleterre, il dit, en parlant des princes, « Qu’ils s’imaginent avoir un ascendant de raison comme de puissance ; qu’ils mettent leurs opinions au même rang que leurs personnes, et qu’ils sont bien aises, quand on a l’honneur de disputer avec eux, qu’on se souvienne qu’ils commandent à des légions ». […] le digne sujet de nos louanges et de nos regrets, vous vivrez éternellement dans ma mémoire ; … agréez ces derniers efforts d’une voix qui vous fut connue ; vous mettrez fin à tous ces discours.

2983. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XV » pp. 61-63

Ponsard a tort, de plus, de se mettre du parti des sots ; et Viennet n’est qu’un sot, lequel, il est vrai, a quelquefois la sottise spirituelle.

2984. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXXIX » pp. 164-165

Mirecour, Marius, Joannis, Micheau, Robert, Leroux, Laba, Riché, de la complaisance qu’ils ont mise à jouer des rôles si au-dessous de leur talent, de leur verve et de leur distinction.

2985. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXIII » pp. 291-293

Le monde politique pourtant a eu ses commotions, et quand, une fois, il se met en branle, il ne chôme jamais.

2986. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — C — Croisset, Francis de (1877-1937) »

Fernand Séverin Je regrette cependant, pour ma part, que ce livre (Les Nuits de quinze ans) où la volupté charnelle parle seule, soit dépourvu de tristesse, de mélancolie, ou, du moins, de gravité (car les pièces de la fin, où l’auteur a mis quelque chose qui ressemble à des remords, n’ont guère l’accent de la sincérité).

2987. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — F — Fuster, Charles (1866-1929) »

De fait, il s’agit d’un roman ou plutôt d’une nouvelle développée, mise en vers, tout comme le Jocelyn de Lamartine.

2988. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Magre, Maurice (1877-1941) »

« J’ai mis dans ce livre, dit-il, ma foi à la vie, à la bonté des hommes… Puisse-t-il aller à tous ceux qui cherchent comme moi les routes de l’existence future.

2989. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Ménard, Louis (1822-1901) »

Boutroux a mise à l’Histoire de la philosophie allemande, de Zeller ou les pages de Jules Soury sur la Délia de

2990. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Renaud, Armand (1836-1895) »

Sully Prudhomme, mit en tête de ces pages affamées d’idéal et de pitié une éloquente étude littéraire.

2991. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — T — Trarieux, Gabriel (1870-1940) »

Écoutez Pygmalion racontant comment sa Daphné (la Galatée antique) est devenue femme : … C’était un soir, dans la cité… Une cité lointaine en des montagnes bleues Où les maisons sont des palais… C’était un soir… J’avais sculpté dans le carrare une statue Pour le temple du dieu Soleil — si merveilleuse Que le peuple venu pour la voir s’était mis À deux genoux, ainsi qu’on fait pour les déesses, Puis, en silence, était sorti… Et j’étais seul… [Le Siècle (21 mars 1898).]

2992. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Préface de la première édition du quatrième volume »

Quand j’ai commencé à mettre la main à ce volume, la révolution de 1848 venait d’élever à la dignité de maximes d’État les plus dangereuses des doctrines du dix-huitième siècle.

2993. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 245-247

Son Commentaire sur la Henriade, qui n’a paru qu’après sa mort, est le meilleur Livre de critique littéraire qu’on puisse mettre entre les mains des jeunes gens, pour leur former le jugement & le goût.

2994. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 275-277

Bergier, avec un style simple & naturel, est parvenu à réduire en poudre cet amas d’objections, qui ne prouvent que la mauvaise foi de ceux qui les enfantent ; de détruire ces systêmes captieux, qui n’ont rien d’évident que la foiblesse des fondemens ruineux qui les appuient ; de donner aux dogmes de la Religion cette force & cette consistance qui les met à l’épreuve de la critique, & décide les hommages de la Raison, lorsqu’elle n’est pas tout-à-fait corrompue.

2995. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 88-90

Il est tant de femmes qui s’enthousiasment si mal-à-propos pour de minces Littérateurs qu’elles veulent mettre à la mode !

2996. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 184-186

A Toulouse, on le mit en prison pour un Discours qu’il eut la hardiesse de débiter contre les habitans de cette ville, & le Parlement en particulier.

2997. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 55-57

On eût pu ajouter qu’il en avoit mis au jour deux de trop, car il n’y a que ses Stances à Ménage qui vaillent la peine d’être lues.

2998. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 167-169

Tout son art consiste à altérer les bonnes choses qu’on avoit dites avant elle ; semblables aux Harpies qui vivoient de rapines, & infectoient, en y touchant, les mets servis sur la table des Sages & des Héros.

2999. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 208-210

La Postérité mettra donc une grande différence entre des hommes qui, dans tout autre Siecle, eussent excité l’admiration universelle, & des hommes qui ont besoin de toute la folie & de toute la perversité du nôtre pour trouver quelques approbateurs.

3000. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préfaces des « Orientales » (1829) — Préface de février 1829 »

Cependant il regrette que quelques censeurs, de bonne foi d’ailleurs, se soient formé de lui une fausse idée, et se soient mis à le traiter sans plus de façon qu’une hypothèse, le construisant a priori comme une abstraction, le refaisant de toutes pièces, de manière que lui, poète, homme de fantaisie et de caprice, mais aussi de conviction et de probité, est devenu sous leur plume un être de raison, d’étrange sorte, qui a dans une main un système pour faire ses livres, et dans l’autre une tactique pour les défendre.

3001. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre premier. De l’Écriture et de son excellence. »

Expliquez-la à un Tartare, à un Cafre, à un Canadien ; mettez-la entre les mains d’un bonze ou d’un derviche : ils en seront également étonnés.

3002. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre second. Philosophie. — Chapitre IV. Suite des Philosophes chrétiens. — Publicistes. »

Platon excelle à donner un tour merveilleux aux discussions les plus stériles ; il sait mettre de l’agrément jusque dans l’énoncé d’une loi.

3003. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Dumont le Romain  » pp. 115-116

comme elle est, libre de la tête, des bras et de tout le haut de son corps, si elle s’avisait de se secouer avec violence, elle renverserait le monarque, et mettrait les dieux, les échevins et le peuple en désordre.

3004. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Roslin  » pp. 149-150

Si vous m’eussiez accordé un jour de plus, j’aurais mis la moitié plus de choses, dans la moitié moins d’espace.

3005. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Introduction »

Un heureux concours de circonstances, au premier rang desquelles il est juste de mettre l’acte d’initiative qui a créé en notre faveur un cours régulier de sociologie à la Faculté des lettres de Bordeaux, nous ayant permis de nous consacrer de bonne heure à l’étude de la science sociale et d’en faire même la matière de nos occupations professionnelles, nous avons pu sortir de ces questions trop générales et aborder un certain nombre de problèmes particuliers.

3006. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LIII » pp. 206-208

Ce roman de Balzac était annoncé, il y a quelques jours, dans les Débats, par une lettre de l’auteur, la plus amphigourique, la plus affectée et la plus ridicule qui se puisse lire, tout cela afin de mettre en goût le public.

3007. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — C — Lahor, Jean = Cazalis, Henri (1840-1909) »

Après l’avoir relu, je le mets décidément à l’un des meilleurs endroits de ma bibliothèque, non loin de l’Imitation, des Pensées de Marc-Aurèle, de la Vie intérieure et des Épreuves de Sully Prudhomme, — dans le coin des sages et des consolateurs.

3008. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Monselet, Charles (1825-1888) »

Jules Barbey d’Aurevilly Je connaissais le Monselet de tout le monde, le Monselet du journal, du théâtre, du café, du restaurant, le Monselet du boulevard et de Paris, le Monselet légendaire, celui qu’on a représenté les ailes au dos, comme Cupidon, parce qu’il a écrit Monsieur de Cupidon… Je connaissais le Monselet de la gaîté, de la bonne humeur, de la grâce nonchalante, la pierre à feu qu’on peut battre éternellement du briquet pour en tirer d’infatigables étincelles…, mais je ne connaissais pas le Monselet intime, — le Monselet du Monselet, — la quintessence de l’essence, et c’est ce livre, intitulé tout uniment et tout simplement : Poésies complètes de Charles Monselet, qui me l’a fait connaître, qui m’a appris l’autre Monselet dont je ne connaissais que la moitié… Un poète, un poète de plus parmi les vrais poètes, voilà ce qu’apprend ce recueil des Poésies complètes de Monselet, réunissant tous les rayons éparpillés de son talent et nous faisant choisir entre tous celui qui plaît davantage, le plus pénétrant et le plus pur… Certes, on savait bien, bien longtemps avant ce recueil, que Monselet était un chanteur plein de verve et de fantaisie… Il était plus que cela, et ce dernier recueil le met à sa place, parmi les touchants.

3009. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Soulié, Frédéric (1800-1847) »

Dès ce moment, Soulié fut connu ; il se mit en rapport avec quelques renommées déjà établies, en même temps qu’il se lia d’intimité avec de jeunes poètes comme lui.

3010. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — X — Xanrof, Léon (1867-1953) »

L’éditeur a eu l’attention de mettre la musique, et ce sont, en général, des airs très faciles improvisés par M. 

3011. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Léon Dequillebec » pp. 165-167

Je revois ce grand garçon maigre un peu penché, à la tête fière et blonde, où la phtisie avait mis ses délicates pâleurs.

3012. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 484-486

On y voit un Philosophe Chrétien, assez ferme pour ne pas craindre de mettre dans toute leur force les argumens de ses Adversaires.

3013. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 115-117

L’autre jour chez Pigal, en contemplant Voltaire, Je disois : Qu’a donc mis ce fameux Statuaire Sous les pieds du fils d’Apollon ?

3014. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 328-331

Pour mettre nos Lecteurs en état d’en juger, il nous suffira de citer une des réflexions de l’Auteur sur la doctrine désespérante de ceux de nos Philosophes, qui n’offrent, pour toute consolation, à l’humanité souffrante ou malheureuse, que l’attente du néant & la résolution de la hâter par une mort volontaire.

3015. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 377-379

Successeur de deux habiles Ecrivains dans la composition de l’Histoire de France ; il seroit digne de marcher à côté d’eux, s’il se fût un peu moins écarté de leur plan, & s’il eût mis un peu plus de chaleur dans son style.

3016. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 380-382

D’ailleurs, aucun de ses Ecrits ne tendoit à le mettre aux prises avec les vérités de la Foi.

3017. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 2-5

La premiere raison qui se présente, est que son Ouvrage dut la plus grande partie de son succès aux anathêmes de la Sorbonne & du Parlement qui le proscrivirent, à cause des obscénités qui y sont répandues ; on peut dire ensuite, que les traits satiriques lancés contre les Moines, ne contribuerent pas peu à le mettre en vogue ; ajoutons que les Hérétiques de son temps s’empresserent de combler de louanges un Ecrivain qui sembloit s’accorder avec leurs sentimens, du côté de la phrénésie à tout blâmer & à se moquer de tout.

3018. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 207-209

On y voit la présomption & les extravagances, dont l'excès & le ridicule devroient corriger ceux qui prétendent s'élever au dessus des autres par leur savoir, & qui se mettent au dessous par leur déraison.

3019. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 392-394

Le soin d’établir leur réputation m’a mis dans l’iimpuissance d’étendre la mienne ; & quand j’ai voulu jouir de mon propre fonds, je me suis apperçu que mes profusions m’avoient réduit à l’indigence.

3020. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Challe  » pp. 141-142

Cependant il faut attendre que ce morceau soit décroché et mis sur le chevalet pour confirmer ou rétracter ce jugement.

3021. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Parocel » pp. 255-256

Parocel qui s’est mis à jouer l’esprit fort, quand il s’agissait d’être peintre.

3022. (1888) Petit glossaire pour servir à l’intelligence des auteurs décadents et symbolistes « Préface »

Or, le plus considérable reproche vise l’étrangeté des termes mis en usage par ces œuvres.

3023. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Henriette d’Angleterre » pp. 7-9

Intellectuellement, c’est tout madame de La Fayette, avec sa douceur de regard, sa pureté de style, sa lueur de perle… Quoique fort bienvenue de cette éblouissante Henriette, qui a laissé inextinguibles dans l’Histoire l’éclair de sa vie et l’éclair de sa mort ; quoique mêlée à ces intrigues, voilées de décence, d’une cour qui commençait alors de mettre la convenance par-dessus toutes ses passions, madame de La Fayette ne nous donne pas sur les hommes et les choses de son temps des lumières bien nouvelles.

3024. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Avis du traducteur » pp. -

M. le chevalier de Angelis, auteur de travaux inédits sur Vico, a bien voulu nous communiquer la plupart des ouvrages italiens que nous avons extraits ou cités ; exemple trop rare de cette libéralité d’esprit qui met tout en commun entre ceux qui s’occupent des mêmes matières.

3025. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre premier. Les caractères généraux et les idées générales. » pp. 249-295

Ce même petit garçon ayant appris les mots bon garçon les mettait toujours ensemble. […] Par conséquent, elle n’est, comme toute aptitude, propriété et capacité, qu’un caractère général de l’objet, et ce caractère peut être dégagé, retiré, mis à part par les procédés ordinaires, c’est-à-dire au moyen d’un nom, et, en général, au moyen d’un signe. — Bien mieux, il n’y en a pas de plus facile à mettre à part ; car tous les objets et tous les événements le présentent, puisque chaque objet et chaque événement contribue avec d’autres semblables à faire une collection qui est sa classe. […] Or il n’y a pas d’individu naturel ni d’événement effectif qui n’y puisse entrer ; qu’il s’agisse d’un corps ou d’un esprit, d’un changement externe ou interne, sitôt que nous apercevons une chose ou un fait, nous le mettons dans sa classe, c’est-à-dire avec d’autres semblables ; bien mieux, dès que l’objet est pensé par nous, il évoque spontanément en nous, sans que nous le voulions et par la seule loi d’association des idées, d’autres objets plus ou moins semblables. […] Or, chose admirable, les corps de la nature, si différents qu’ils soient, si différentes que soient les forces réelles par lesquelles ils sont mis en mouvement ou les circonstances réelles dans lesquelles ils se trouvent en repos, tendent tous à se conformer à cette double conception ; on s’en est assuré par l’expérience ; la matière réelle est inerte, indifférente au repos et au mouvement.

3026. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers (2e partie) » pp. 177-248

Thiers (2e partie) I À l’exception du pouvoir civil emporté à la pointe de l’épée au 18 brumaire par un général qui mettait la victoire au-dessus de la loi et qui réduisait tous les droits au droit de la force, nous avons admiré jusqu’ici la savante exposition et la profonde sagacité d’esprit de M.  […] L’Assemblée constituante avait bien fait de mettre à la place un clergé voué uniquement aux fonctions du culte, étranger aux délibérations de l’État, salarié au lieu d’être propriétaire ; mais c’était exiger beaucoup du Saint-Siège que de lui demander l’approbation de tels changements. […] En devenant monarque héréditaire, il allait être mis en comparaison avec les rois, petits ou grands, et constitué leur inférieur en un point, celui du sang. […] “Monsieur le Président, avait répondu Moreau, ne mettez pas en balance mes services et ma fortune : il n’y a pas de comparaison possible entre de telles choses. […] Rastadt, Biberach, Engen, Mœsskirch, Hohenlinden, ces beaux souvenirs mis à côté d’un peu d’argent, avaient soulevé l’auditoire et provoqué des applaudissements que l’invraisemblance de la défense commençait à rendre fort rares. » Moreau est à demi absous ; il faiblit comme tout caractère sous le poids d’une faute : il n’y a de force en pareil cas que dans l’innocence ; il écrit une lettre soumise et expiatoire à son rival triomphant.

3027. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juillet 1885. »

La mise en scène ne sera pas luxueuse, mais propre ; on ne réclamera pas un ballet. […] Il renonce à l’égoïsme, comme à une limite cruelle : il va, maintenant, mettre en ses œuvres l’Unité, ayant acquis le Charme de la vraie Science. […] Il nous incite à refaire, sans cesse, activement, notre création intérieure ; à compâtir, à mettre en ce monde l’unité, et notre vie dans un monde nouveau ; et il nous incite, le Maître Vénéré, à souffrir, à constater de cruelles énigmes, à courir vers la mort, puisqu’en ces tourments est, plus intense et plus divine, notre Joie. […] Il avait soumis son scénario à un ami, dont il mettait très haut, dit-il, l’esprit et les connaissances. […] La mise en scène avait été très améliorée.

3028. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VI »

Ainsi, quand derrière Akëdyssërilad triomphale et fabuleuse, après les cortèges endiamantés des cohortes et des escortes et des prêtres et des amazones familières, au loin, dans une innumérabilité farouche comme des sables marins et des étoiles de deux, s’avancera l’année… « … De tous côtés, là-bas, l’immense vision d’un enveloppement d’armée… » sera-t-il dit ; et les mots, simples appels d’abstractions, n’auront suscité aux yeux nulles lignes, non plus que forme aucune suite sonore analysable de musique, en leur froide idéalité ; mais avec leur signification rigoureuse d’enchaînement rationnel, ils seront des mets, des mots, des mots, d’où émergera le vague de choses autrefois contemplées et de sentimentalités obscurément senties et saisies en des mots. […] Analoguement les décorations du Rheingold et de la Walküre sont les plus achevées qu’ait rêvées Richard Wagner ; les décorations du Parsifal seront l’adjacence de beaux tableaux, hors le drame, pour la magnificence d’un spectacle ; ici c’est la netteté de sites et ce plastiques faisant drame minutieusement ; songez quelle mise en scène grandiose et subtile, en ces deux pièces, dut rêver l’esprit du maître, et qu’il nous faudrait, pour concevoir son idée, contempler autrement qu’en les ignominies organisées par les imprésarios et les histrions de conservatoires. […] X Le Gral fut mis par les anges à la garde de Titurel ; Titurel, afin de le défendre, ordonna de bons chevaliers dans le domaine du Mont-Salvat ; Amfortas, fils unique de Titurel, hérita le royaume de son père devenu vieillard ; et cela était en Espagne, de l’époque où s’y heurtaient Chrétiens et Infidèles. […] Ah, si acharné virtuose que l’on soit, l’on ne mettra pas un conte de Mère L’oye en draine lyrique ! […] D’aucune façon le Parsifal n’apparaît tel ; dans le texte, il n’y a qu’anecdote ; dans l’ensemble du texte et de la musique, il ne peut y avoir qu’illustration d’une anecdote, ou musique additionnée d’une anecdote ; car le Parsifal, Amfortas, Kundry ne sont pas personnages humains ; ils n’ont pas de psychologie ; leur nature se modifie à chaque scène, ou plutôt n’est posée en aucune ; tous falots et irréels, Kundry, Parsifal, Amfortas ne répondent à rien d’humain ; ce n’est que mise en action d’un vague romancero religieux.

3029. (1857) Cours familier de littérature. III « XIVe entretien. Racine. — Athalie (suite) » pp. 81-159

N’y mettez point de fausse discrétion ; venez souvent, venez à toute heure : Brunoy sera toujours ouvert pour vous. […] Celui qui met un frein à la fureur des flots Sait aussi des méchants arrêter les complots. […] Daigne mettre, grand Dieu ! […] Qui vous mit dans ce temple ? […] Qui vous mit dans ce temple ?

3030. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXV » pp. 97-99

On voit dans les romans chinois que les mandarins, quand ils se sont fait quelque mauvais tour, se mettent à rire au nez l’un de l’autre et boivent ensemble leurs petites tasses comme devant.

3031. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Avant-propos »

Nous voulions, adepte de sa technique, tenter l’analyse des tableaux de pathologie mentale relevés — innombrables — dans notre actuelle littérature, mettre en relief la valeur des névroses considérées comme matériaux artistiques2, esquisser, en un mot, une brève Esthétique des Idées-malades.

3032. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre XII. Dernière et nécessaire opération, qui consiste à corriger ce que l’on a écrit »

Dernière et nécessaire opération, qui consiste à corriger ce que l’on a écrit Quand on a longuement médité un sujet, et qu’on a reconnu les idées qui lui appartiennent, quand on a distribué ces idées selon leur importance particulière et leurs rapports mutuels, quand enfin on a mis par écrit tout ce qu’on avait conçu, et bien exécuté le plan qu’on avait arrêté, a-t-on fini sa tâche, et ne reste-t-il qu’à se reposer dans la joie de l’effort qui vient d’aboutir ?

3033. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gille, Valère (1867-1950) »

Paul Laur Je mets au défi tout cœur de vingt ans que la vie n’a pas encore racorni de lire la Cithare sans une émotion profonde.

3034. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Goudeau, Émile (1849-1906) »

Je veux dire les qualités certaines, l’honnête tenue littéraire, l’émotion de bel aloi que dégagent ces pages où Goudeau a mis le meilleur de son beau talent de conteur.

3035. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Millevoye, Charles (1782-1816) »

Bernard Jullien Millevoye, poète digne à plusieurs égards de l’attention de la postérité, s’est exercé assez souvent dans la narration poétique, et malheureusement il l’a toujours fait sans le moindre succès ; tellement que si l’on voulait juger de son mérite par ses travaux dans ce genre, on le mettrait avec raison au rang de ceux dont le nom est devenu ridicule.

3036. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Schuré, Édouard (1841-1929) »

Schuré de mettre en vers ses impressions et ses rêveries religieuses, que son plaisir soit respecté.

3037. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — Z — Zola, Émile (1840-1902) »

Ma seule vanité est d’avoir eu conscience de ma médiocrité de poète et de m’être courageusement mis à la besogne du siècle, avec le rude outil de la prose.

3038. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 421-423

On désire seulement qu’il s’attache, à l’avenir, à mettre des caracteres dans ses Pieces, s’il veut atteindre à la véritable gloire.

3039. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 367-370

L’Abbé Gallois s’y étoit disposé par une étude opiniâtre, qui le mit à portée de remplir sa tâche avec succès.

3040. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 445-448

Gresset le mettent également au dessus des Poëtes de nos jours, qui se sont exercés dans le même genre.

3041. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 474-476

Omer & Dijon, ont faite des moyens qu’il propose, a mis le sceau à la démonstration de ses principes, & prouvé que non seulement la France, mais l’Europe entiere, peut se préserver de ce fléau, avec les précautions indiquées.

3042. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Préface »

Le chapitre des métaphores pourrait tenir en vingt lignes, si on ôtait les exemples ; si on y mettait tous les exemples possibles, il demanderait vingt gros volumes.

3043. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre III. La Phèdre de Racine. »

mon père y tient l’urne fatale ; Le sort, dit-on, l’a mise en ses sévères mains : Minos juge aux Enfers tous les pâles humains.

3044. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Chardin » pp. 220-221

C’est que ce vase de porcelaine est de la porcelaine ; c’est que ces olives sont réellement séparées de l’œil par l’eau dans laquelle elles nagent ; c’est qu’il n’y a qu’à prendre ces biscuits et les manger ; cette bigarade, l’ouvrir et la presser ; ce verre de vin, et le boire ; ces fruits, et les peler ; ce pâté, et y mettre le couteau.

3045. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Préface »

Partout où il est passé, il s’est mis en relation avec les griots, qui forment en quelque sorte la caste littéraire chez les populations du Soudan, et il a collectionné toutes les histoires qu’il a pu se faire conter.

3046. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — XI. Le plus brave des trois. »

Ensuite il dit à la femme : « Il faut que je mette à l’épreuve la bravoure de ton amant !

3047. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Saint-Martin, le Philosophe inconnu. — II. (Fin.) » pp. 257-278

Garat, en revoyant ses leçons dans le Compte-Rendu imprimé des séances, fit comme beaucoup d’orateurs ; il recomposa à neuf sa réponse, y mit ce qu’il n’avait pas dit, et s’y donna tout l’avantage. […] Tous nos profits, tous nos revenus, devraient être le fruit de notre travail et de nos talents ; et ce renversement des fortunes opéré par notre Révolution nous rapproche de cet état naturel et vrai, en forçant tant de monde à mettre en activité leur savoir-faire et leur industrie. […] J’aurais beaucoup gagné à le connaître plus tôt : c’est le seul homme de lettres honnête avec qui je me sois trouvé en présence depuis que j’existe ; et encore n’ai-je joui de sa conversation que pendant le repas : car aussitôt après parut une visite qui le rendit muet pour le reste de la séance, et je ne sais quand l’occasion renaîtra, parce que le Roi de ce monde a grand soin de mettre des bâtons dans les roues de ma carriole.

3048. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LE COMTE XAVIER DE MAISTRE. » pp. 33-63

Dans une visite qu’il fit à son frère Joseph, à Lausanne, vers 93 ou 94, il lui porta le manuscrit : « Mon frère, dit-il, était mon parrain et mon protecteur ; il me loua de la nouvelle occupation que je m’étais donnée et garda le brouillon, qu’il mit en ordre après mon départ. […] On pourrait être longtemps avec lui dans un salon sans s’en douter ; il prend peu de part aux questions générales, et ne se met en avant sur rien ; il aime les conversations à deux : on croit sentir qu’il a longtemps joui d’un cher oracle, et qu’il a longtemps écouté. […] Son ami, le comte de Marcellus, doit être mis en possession des manuscrits qui permettront de faire un travail définitif sur cet homme sensible et ce talent aimable.

3049. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « HISTOIRE DE LA ROYAUTÉ considérée DANS SES ORIGINES JUSQU’AU XIe SIÈCLE PAR M. LE COMTE A. DE SAINT-PRIEST. 1842. » pp. 1-30

Comme le sujet général, qui est l’idée de royauté, ne prête pas à un récit continu, il devient quelquefois un prétexte ; l’auteur en profite pour se porter aux plus hautes questions historiques qui se lèvent à droite ou à gauche autour de lui : il met le siége devant tous les hauts clochers. […] La critique pourra trouver qu’il les prodigue ; ce n’est pas trop au lecteur de s’en plaindre, car cette manière de mettre un nom de notre connaissance au bout de la pensée éclaire et détermine singulièrement, même quand cela est poussé un peu loin. […] J’ai sous les yeux deux chansons des rues, en tête desquelles Napoléon sur sa colonne est mis en regard (j’en demande bien pardon) de la plus adorable et de la plus ineffable image de la mansuétude divine et humaine, et, dans le parallèle que déduit au long la complainte bien plutôt niaise que sacrilège, il est dit sérieusement : Napoléon aimait la guerre, Et son peuple comme Jésus !

3050. (1911) La valeur de la science « Première partie : Les sciences mathématiques — Chapitre III. La notion d’espace. »

Imaginons une ligne tracée sur la rétine, et divisant en deux sa surface ; et mettons à part les sensations rouges affectant un point de cette ligne, ou celles qui en différent trop peu pour en pouvoir être discernées. […] Quand on cherche à analyser ce sentiment, on constate qu’il se réduit soit à la conscience de la convergence des yeux, soit à celle de l’effort d’accommodation que fait le muscle ciliaire pour mettre l’image au point. […] Mais nous n’avons fait là pour ainsi dire qu’une expérience de physiologie ; et même comme il suffirait d’adapter sur les yeux des verres de construction convenable pour faire cesser l’accord entre les sentiments de convergence et d’accommodation, allons-nous dire qu’il suffit de mettre des bésicles pour que l’espace ait quatre dimensions et que l’opticien qui les a construites a donné une dimension de plus à l’espace ?

3051. (1890) L’avenir de la science « II »

N’étudier l’histoire que pour les leçons de morale ou de sagesse pratique qui en découlent, c’est renouveler la plaisante théorie de ces mauvais interprètes d’Aristote qui donnaient pour but à l’art dramatique de guérir les passions qu’il met en scène. […] Cela tient sans doute à ce que, chez nos voisins, la religion positive, mise sous un séquestre conservateur et tenue pour inattaquable, est considérée comme donnant encore le mot des grandes choses 17. […] Nous sommes ici à la ligne sacrée où les doctrines se séparent ; un point de divergence entre deux rayons partant du centre met entre eux l’infini.

3052. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Mme de Caylus et de ce qu’on appelle Urbanité. » pp. 56-77

Le roi convertissait alors, bon gré, mal gré, les Huguenots de son royaume, et Mme de Maintenon, à son exemple, s’était mise en devoir de convertir sa propre famille. […] Elle n’avait pas été élevée à Saint-Cyr, elle était venue trop tôt pour cela ; mais elle en vit les commencements ; et, un jour que Racine récitait à Mme de Maintenondes scènes d’Esther qu’il était en train de composer pour cette maison, Mme de Caylus se mit à les déclamer si bien et d’une voix si touchante, que Racine supplia Mme de Maintenonde demander à sa nièce d’y jouer. […] Mme de Caylus resta à Versailles jusqu’à la mort de Louis XIV (1715) ; mise de côté alors comme une personne de la vieille Cour, elle revint demeurer à Paris, dans une petite maison qui faisait partie des jardins du Luxembourg.

3053. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Hégésippe Moreau. (Le Myosotis, nouvelle édition, 1 vol., Masgana.) — Pierre Dupont. (Chants et poésies, 1 vol., Garnier frères.) » pp. 51-75

Quant à la société, c’est-à-dire à la généralité des hommes réunis et établis en civilisation, ils demandent qu’on fasse comme eux tous en arrivant, qu’on se mette à leur suite dans les cadres déjà tracés, ou, si l’on veut en sortir, qu’alors, pour justifier cette prétention et cette exception, on les serve hautement ou qu’on les amuse ; et, jusqu’à ce qu’ils aient découvert en quelqu’un ce don singulier de charme ou ce mérite de haute utilité, ils sont naturellement fort inattentifs et occupés chacun de sa propre affaire. […] Bien des jolies bouches se mirent à l’instant à répéter à pleine voix cette cantilène piquante et naïve (naïve à demi) du laboureur, et lui poète, il sentit qu’il n’avait plus qu’à continuer de chanter dans ce ton les choses de la campagne, un peu à l’usage des villes et des salons, et en se souvenant toutefois de ses origines. […] Ces sortes de chants sont, à proprement parler, le pendant et l’accompagnement du genre d’épopée rustique et d’idylle que Mme Sand, au même moment, mettait à la mode par Le Champi, La Mare-au-Diable et La Petite Fadette.

3054. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Introduction »

Ils vous invitent à cet examen et vous garantissent que, si vous vous y mettez de bonne foi, vous serez convaincu ; ils parlent contre les préjugés qui éloignent de la religion et vous recommandent de vous en affranchir ; ils tonnent contre le respect humain et font appel à la libre fierté de l’homme, qui doit s’élever contre un joug servile, humiliant. […] D’ailleurs n’est-ce pas se faire une idée bien singulière de la vérité que de se la représenter comme une chose qui passe de main en main et que l’on met sous clef pour que personne n’y touche ? […] Les excès de la raison révoltée doivent être plutôt mis à la charge de la servitude antérieure que de la liberté qui s’éveille.

3055. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Notes et éclaircissements. [Œuvres complètes, tome XII] »

C’est ici le lieu de mettre sous les yeux du lecteur un certain nombre de passages tirés de la correspondance de Voltaire, qui prouvent que je n’ai pas trop hasardé, lorsque j’ai dit qu’il haïssait secrètement les sophistes. […] Sacontala, celle qui ne buvait point l’onde pure avant d’avoir arrosé vos tiges ; celle qui, par tendresse pour vous, ne détacha jamais une seule feuille de votre aimable verdure, quoique ses beaux cheveux en demandassent une guirlande ; celle qui mettait le plus grand de tous ses plaisirs dans cette saison qui entremêle de fleurs vos flexibles rameaux ! […] Nous observerons seulement que la plupart de ces tableaux antiques sont des portraits ou des tableaux d’histoire ; et que, pour être impartial, il ne faut mettre en parallèle avec des sujets chrétiens que les sujets mythologiques.

3056. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Le Prince » pp. 206-220

Sans les brigands du Gros-Caillou, les habitants de Chaillot se seraient passés de soldats ; si ces soldats leur avaient demandé plus qu’ils ne leur économisaient, ils n’en auraient point voulu ; et à la rigueur les flûteurs leur auraient été superflus, et on les aurait envoyés jouer de la flûte et danser ailleurs, s’ils avaient mis à trop haut prix leurs chansons. […] La jeune fille est assise à gauche sur des carreaux, et on la voit de face, selon l’usage de l’artiste, parfaitement bien agencée, quoique extraordinairement chamarrée de perles et d’autres parures, mise tout à fait de goût, mais froide de visage. […] Mettez à César, Alexandre, Caton, notre chapeau et notre perruque, et vous vous tiendrez les côtes de rire ; si vous donnez au contraire l’habit grec ou romain à Louis XV, vous ne rirez pas.

3057. (1920) Action, n° 4, juillet 1920, Extraits

Adressé « À nos lecteurs », il souligne son indépendance vis-à-vis des écoles et met en avant les valeurs d’énergie et de nouveauté, la revue se voulant paradoxalement inscrite dans le présent, mais « dépassant l’actualité ». […] Dans nos vols dialogues et non mots et liberté aériens, le sexe des acteurs sera mis en relief par la forme des aéroplanes, la voix du moteur et le rythme spécial du vol.  […] L’avant-garde littéraire au Grand-Duché de Luxembourg entre 1917 et 1919 », Regards/mises en scène dans le surréalisme et les avant-gardes, textes réunis par Claude Bommertz et Jacqueline Chénieux-Gendron avec la collaboration de Myriam Blœdé, Leuven, Peeters, coll. « Pleine Marge », 2002, p. 23-44, où l’on trouvera le texte du manifeste de Pol Michels et d’Augustus Van Werveke paru en 1917 dans La Voix des jeunes : « Nous !

3058. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre X. Première partie. Théorie de la parole » pp. 268-299

Maintenant que dans la société tout change continuellement et avec une rapidité vraiment nouvelle, et que les sources de l’imitation sont, pour ainsi dire, taries ; maintenant les esprits contemplatifs n’ont pas le temps de saisir et de s’approprier les inspirations de la société : telle est la cause de la difficulté qu’ils éprouvent à se mettre en harmonie avec ce qui est, car ce qui est aujourd’hui n’était pas encore hier. […] Ils ont mis des faits en beaux vers, et les ont isolés de toute tradition. […] Agathon mit sur le théâtre des sujets de pure invention : l’art alors fut perdu.

3059. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Nisard » pp. 81-110

Nisard, comme historien, comme appréciateur d’un ordre élevé en littérature, a mieux aujourd’hui que des qualités personnelles à mettre en balance avec les autres critiques contemporains. […] Nisard a été mis un peu trop vite dans un cabinet des Antiques, sur l’étagère réservée aux puristes du xviie  siècle, et il est fait pour mieux que cela. […] Il aura été plus fort que le barbier de Midas, qui creusa la terre pour y mettre sa confidence.

3060. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — L’art et la sexualité »

Voyez agir — ou plutôt non agir — et se mouvoir ce fantastique personnage qui, mis en présence de n’importe quel aspect de notre monde, semble être tombé subitement d’une planète en décomposition. […] Conrad : Miracle d’une nuit de printemps, que je ne puis m’empêcher de mettre sous les yeux de mes lecteurs :‌ Hier j’étais souffrant, épuisé, plein de morgue. […] Panizza, avec la sincérité que nous nous sommes efforcé nous-même d’y mettre.

3061. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XX » pp. 84-86

En même temps on met en vente les portraits des deux professeurs, comme des deux héros du jour.

3062. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXII » pp. 91-93

— On vient de mettre en vente dans la Bibliothèque Charpentier les Lettres parisiennes de madame Émile de Girardin : c’est le recueil de ses anciens feuilletons de la Presse depuis 1836 jusqu’à la fin de 1839, qu’elle a légèrement revus.

3063. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « PENSÉES ET FRAGMENTS. » pp. 495-496

Chaque publication de ces volumes de critique est une manière pour moi de liquider, en quelque sorte, le passé, de mettre ordre à mes affaires littéraires.

3064. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « APPENDICE. — LEOPARDI, page 363. » pp. 472-473

Je disais que j’aurais aimé à mettre en regard des poésies si senties mais si funèbres de Leopardi, et qui serrent le cœur, quelques poésies naturelles et également vraies qui le dilatent et le consolent.

3065. (1874) Premiers lundis. Tome II « De l’expédition d’Afrique en 1830. Par M. E. d’Ault-Dumesnil, ex-officier d’ordonnance de M. de Bourmont. »

Il avait dès lors la pensée de mettre à profit cette observation de chaque jour et de chaque heure, pour écrire une histoire complète de cette grande entreprise, dont les résultats, tout négligés qu’ils sont, ne doivent pas périr.

3066. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre premier. De la stérilité d’esprit et de ses causes »

C’est là vraiment l’état de paralysie volontaire où l’on se met par le désir de laisser parler en soi la nature, et, loin de s’inquiéter de produire si peu, il faudrait plutôt s’émerveiller de produire encore quelque chose.

3067. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — C — Cladel, Léon (1834-1892) »

Cladel est très grande, c’est là sa forte qualité ; son art, minutieux et brutal, turbulent et enfiévré, se restreindra plus tard, sans nul doute, dans une forme plus sévère et plus froide, qui mettra ses qualités morales en plus vive lumière, plus à nu.

3068. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Guérin, Maurice de (1810-1839) »

Remy de Gourmont Le Centaure est à mettre parmi les plus belles et les plus précieuses pages de la langue française.

3069. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rebell, Hugues (1867-1905) »

L’ensemble est un peu trop voulu, littéraire, systématique, et l’on sent que l’écrivain met souvent ses métaphores vives au service de son esprit hésitant.

3070. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre IV. Petits Symbolards » pp. 49-52

Dès qu’on y touche, les personnages se mettent en branle.

3071. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre premier. La question de fait et la question de goût » pp. 30-31

Elle n’est pourtant que l’expression précise de cette vérité très simple, qu’il y a, quand on examine une œuvre littéraire, des faits qu’on peut mettre hors de doute, connaître de science certaine.

3072. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » pp. 179-182

Le choix du sujet, par exemple, la contexture du plan, l’art de préparer les incidens, de nouer & de dénouer l’intrigue, la nécessité de soutenir l’action, la disposition des actes, la coupe & la liaison des scènes, & cent autres particularités sur lesquelles les Anciens ne sont entrés dans presque aucun détail, sont présentés chez lui avec une clarté de principes & une sûreté de goût, qui le mettent bien au dessus de tous ceux qui se sont exercés à écrire sur la Théorie & la Pratique du Théatre.

3073. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 90-93

Un Orateur, par exemple, aura dit qu'un Ministre plénipotentiaire doit avoir ces trois qualités, la probité, la capacité, & le courage ; pour déguiser cette division, le plagiaire n'aura qu'à changer d'abord l'ordre de ces trois mots, & dire : le courage, la capacité, la probité ; mais comme ce déguisement ne suffiroit pas, il doit changer aussi les expressions, & mettre la fermeté au lieu du courage, la vertu au lieu de la probité, & à la capacité substituer la science ; enfin, pour cacher encore mieux son vol, il faudra qu'il dise que l'Ambassadeur doit être ferme, vertueux, & habile.

3074. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Rathery »

Rathery n’a point inventé cette thèse ; elle est partout ; mais il l’a mise en saillie avec beaucoup de justesse et d’agréable érudition.

3075. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. LEBRUN (Reprise de Marie Stuart.) » pp. 146-189

. — Et là-dessus on s’est mis à désirer de réentendre ces pièces immortelles, éclipsées un long moment, et dans lesquelles tant de personnes de la société recommençaient aussi à aimer les souvenirs de leur propre jeunesse. […] Sophocle dans Philoctète l’a pu faire servir à nouer l’intrigue ; mais il ne l’a pas mis au premier plan. […] La Restauration, en brisant, hâta et mit en demeure de faire. […] Lebrun dans l’art de son temps, et de rattacher à son nom l’idée qu’il y faut mettre : poëte presque formé déjà sous l’Empire, et qui sut être le semi-romantique le mieux autorisé sous la Restauration.

3076. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Introduction. » pp. -

Ces grands ressorts donnés font peu à peu leur effet, j’entends qu’au bout de quelques siècles ils mettent la nation dans un état nouveau, religieux, littéraire, social, économique ; condition nouvelle qui, combinée avec leur effort renouvelé, produit une autre condition, tantôt bonne, tantôt mauvaise, tantôt lentement, tantôt vite, et ainsi de suite ; en sorte que l’on peut considérer le mouvement total de chaque civilisation distincte comme l’effet d’une force permanente qui, à chaque instant, varie son œuvre en modifiant les circonstances où elle agit. […] L’homme, forcé de se mettre en équilibre avec les circonstances, contracte un tempérament et un caractère qui leur correspond, et son caractère comme son tempérament sont des acquisitions d’autant plus stables, que l’impression extérieure s’est enfoncée en lui par des répétitions plus nombreuses et s’est transmise à sa progéniture par une plus ancienne hérédité. […] Quoique nous ne puissions suivre qu’obscurément l’histoire des peuples aryens depuis leur patrie commune jusqu’à leurs patries définitives, nous pouvons affirmer cependant que la profonde différence qui se montre entre les races germaniques d’une part et les races helléniques et latines de l’autre, provient en grande partie de la différence des contrées où elles se sont établies, les unes dans les pays froids et humides, au fond d’âpres forêts marécageuses ou sur les bords d’un océan sauvage, enfermées dans les sensations mélancoliques ou violentes, inclinées vers l’ivrognerie et la grosse nourriture, tournées vers la vie militante et carnassière ; les autres au contraire au milieu des plus beaux paysages, au bord d’une mer éclatante et riante, invitées à la navigation et au commerce, exemptes des besoins grossiers de l’estomac, dirigées dès l’abord vers les habitudes sociales, vers l’organisation politique, vers les sentiments et les facultés qui développent l’art de parler, le talent de jouir, l’invention des sciences, des lettres et des arts. —  Tantôt les circonstances politiques ont travaillé, comme dans les deux civilisations italiennes : la première tournée tout entière vers l’action, la conquête, le gouvernement et la législation, par la situation primitive d’une cité de refuge, d’un emporium de frontière, et d’une aristocratie armée qui, important et enrégimentant sous elle les étrangers et les vaincus, mettait debout deux corps hostiles l’un en face de l’autre, et ne trouvait de débouché à ses embarras intérieurs et à ses instincts rapaces que dans la guerre systématique ; la seconde exclue de l’unité et de la grande ambition politique par la permanence de sa forme municipale, par la situation cosmopolite de son pape et par l’intervention militaire des nations voisines, reportée tout entière, sur la pente de son magnifique et harmonieux génie, vers le culte de la volupté et de la beauté. —  Tantôt enfin les conditions sociales ont imprimé leur marque, comme il y a dix-huit siècles par le christianisme, et vingt-cinq siècles par le bouddhisme, lorsque autour de la Méditerranée comme dans l’Hindoustan, les suites extrêmes de la conquête et de l’organisation aryenne amenèrent l’oppression intolérable, l’écrasement de l’individu, le désespoir complet, la malédiction jetée sur le monde, avec le développement de la métaphysique et du rêve, et que l’homme dans ce cachot de misères, sentant son cœur se fondre, conçut l’abnégation, la charité, l’amour tendre, la douceur, l’humilité, la fraternité humaine, là-bas dans l’idée du néant universel, ici sous la paternité de Dieu. —  Que l’on regarde autour de soi les instincts régulateurs et les facultés implantées dans une race, bref le tour d’esprit d’après lequel aujourd’hui elle pense et elle agit ; on y découvrira le plus souvent l’œuvre de quelqu’une de ces situations prolongées, de ces circonstances enveloppantes, de ces persistantes et gigantesques pressions exercées sur un amas d’hommes qui, un à un, et tous ensemble, de génération en génération, n’ont pas cessé d’être ployés et façonnés par leur effort : en Espagne, une croisade de huit siècles contre les Musulmans, prolongée encore au-delà et jusqu’à l’épuisement de la nation par l’expulsion des Maures, par la spoliation des juifs, par l’établissement de l’inquisition, par les guerres catholiques ; en Angleterre, un établissement politique de huit siècles qui maintient l’homme debout et respectueux, dans l’indépendance et l’obéissance, et l’accoutume à lutter en corps sous l’autorité de la loi ; en France, une organisation latine qui, imposée d’abord à des barbares dociles, puis brisée dans la démolition universelle, se reforme d’elle-même sous la conspiration latente de l’instinct national, se développe sous des rois héréditaires, et finit par une sorte de république égalitaire, centralisée, administrative, sous des dynasties exposées à des révolutions. […] Un seul homme, Stendhal, par une tournure d’esprit et d’éducation singulière, l’a entrepris, et encore aujourd’hui la plupart des lecteurs trouvent ses livres paradoxaux et obscurs ; son talent et ses idées étaient prématurés ; on n’a pas compris ses admirables divinations, ses mots profonds jetés en passant, la justesse étonnante de ses notations et de sa logique ; on n’a pas vu que sous des apparences de causeur et d’homme du monde, il expliquait les plus compliqués des mécanismes internes, qu’il mettait le doigt sur les grands ressorts, qu’il importait dans l’histoire du cœur les procédés scientifiques, l’art de chiffrer, de décomposer et de déduire, que le premier il marquait les causes fondamentales, j’entends les nationalités, les climats et les tempéraments ; bref, qu’il traitait des sentiments comme on doit en traiter, c’est-à-dire en naturaliste et en physicien, en faisant des classifications et en pesant des forces.

3077. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXIIIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (4e partie) » pp. 1-63

Elle n’aurait pas mis dans la main du tribunal révolutionnaire la hache du peuple, avec laquelle il immola toute une génération pour faire place à une idée. […] C’est dans la prévision de cette journée de sédition normale que j’avais cherché un général républicain pour le mettre à la tête d’une armée de la capitale, et que je faisais approcher, jour par jour, les différents corps de cette armée de Paris, afin que son général, venu d’Algérie, la trouvât nombreuse et prête, sous sa main, au jour prévu. […] J’ai versé dans le récit de la captivité de la famille royale tout ce que j’avais de pitié dans le cœur et de larmes dans les yeux sur ce groupe émissaire de la famille couronnée, mis hors la loi de l’humanité par une révolution faite au nom de l’humanité. […] Elle prépara ainsi une réaction contre la cause républicaine, et mit du côté de la royauté la sensibilité, l’intérêt, les larmes d’une partie des peuples.

3078. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXVe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (4e partie) » pp. 429-500

Constantin bâtit sa basilique de Saint-Pierre sur une partie de l’emplacement de ce cirque ; mais, jusqu’en 1586, l’obélisque, chose étonnante, resta debout dans le lieu où Caligula l’avait mis, c’est-à-dire à l’endroit où se trouve maintenant la sacristie de Saint-Pierre, bâtie par Pie VI. […] Est-ce Dieu, sont-ce des hommes qui ont mis la première et la dernière pierre à ce monument de la plus grande pensée du Cosmos ? […] « Laissons la divine énigme au fond des espaces, et répétons les vains mots que nous avons mis à sa place ! […] Mais cela suffit-il au malheur, qui voit effacer des astres cet astre de l’âme, cette divine providence infinie qui compte ses larmes et ses jours et qui met en réserve ses souffrances pour les changer en océan de justice, de réparation et de délices au jour éternel où elle donnera à l’insecte tout ce qu’elle a promis à l’univers pour sa seule existence ?

3079. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXIXe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 129-192

Allez, frère Hilario, et mettez-vous seulement un sceau de silence sur votre barbe ; qui sait si, en sauvant le patrimoine de ces pauvres gens, nous ne parviendrons pas aussi à découvrir quelque embûche tendue à la vie du criminel, peut-être innocent, qu’on va juger sur de si vilaines apparences ! […] Il vaut mieux te mettre la clef en main sans savoir comment on la forge ; c’est à toi de te fier à moi, et c’est à moi d’être ton père et ta mère, puisque je les remplace seule ici. […] Mettez-vous à notre place, pauvres vieux que nous étions, l’un privé de la lumière, l’autre de son mari, tous les deux de leurs chers enfants, leur unique soutien, lui allant chercher sa fille qui ne voudrait peut-être pas revenir tant elle aimait son cousin, moi allant recevoir mon fils pour lui faire le dernier adieu au pied d’un échafaud ou tout au plus à la porte d’un bagne perpétuel, la plus grande grâce qu’il pût espérer, si monseigneur le duc revenait avant le jour fatal, et tous n’ayant pour appui dans une ville inconnue qu’un vieillard chancelant avec sa besace et son bâton, demandant pour eux l’aumône aux portes. […] CCXLIX Donc il faut le tromper pour le sauver ; je lui dirai : Fuis, je t’en ai préparé les moyens pour la nuit où tu seras mis seul en chapelle et je vais te rejoindre ; ce n’est pas même un mensonge, car, morte ou vivante, je le rejoindrai bientôt.

3080. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIIe entretien. Madame de Staël »

Nous sommes convaincu qu’il n’y a pas un jeune homme cherchant une compagne de sa vie, qui ne reculât d’effroi si on lui disait d’avance : « La femme que vous recherchez pour épouse deviendra une femme célèbre ; au lieu de placer son bonheur dans son amour, et sa gloire dans sa modestie, elle placera son bonheur dans l’admiration du monde pour son génie, et sa gloire dans le vent du bruit public, et le nom modeste mais honorable que vous allez lui donner sera mis en contraste perpétuel avec la funeste célébrité du nom importun qu’elle va vous faire. […] L’un d’eux, qui avait une petite perruque ronde, prit ses mains dans les siennes, où il les retint longtemps, et se mit à faire la conversation avec elle comme si elle avait eu vingt-cinq ans. […] « On se mit à table. […] comment avez-vous osé, dans la fête du 10 août, mettre sur les pierres de la Bastille des inscriptions qui consacraient la juste horreur des tourments qu’on y avait soufferts ?

3081. (1894) Propos de littérature « Chapitre IV » pp. 69-110

Il semble qu’elle procède, chez lui comme chez nous, du désir de mettre en relief les divers membres d’une phrase et j’ajouterai, — pour le Poète, — qu’elle fournit en quelque sorte une matière à la mesure ou au rythme. […] Que le je de ses vers désigne le Porcher, l’amant d’Yeldis ou l’évocateur d’Hélène, l’auteur met en scène — sans le vouloir, je le crois bien, — un narrateur qui paraît se confondre avec lui, et l’on aperçoit ses gestes derrière la pensée qu’il déploie. […] Printanière, dans l’aube éternelle du rêve Et dans l’aurore assise, Elle tisse en rêvant Des choses qu’Elle sait, et sourit ; et, devant Elle, au gré de sa main agile, court sans trêve La navette laborieuse, et le doux vent D’avril emmêle ses cheveux qu’Elle soulève Et rejette sur son épaule ; et, relevant La tête, Elle fredonne un air qu’Elle n’achève… De l’ombre, Elle apparaît, comme en un cadre d’or : Derrière Elle l’azur et des plaines qu’arrose Un fleuve ; et, sur sa tête, un rameau de laurose Étend ses fleurs contre l’azur clair ; — et l’effort Du métier, comme un chant monotone et morose Se plaint très doucement : — on envierait le sort De celui qui baiserait la main qu’Elle pose Négligemment, parfois, et lasse de l’effort… Mais moi, la voyant rire en rappelant sans doute Quelque doux jour mort de sa joie un soir de mai, Je songeai que, peut-être, pour avoir aimé Son rire, d’autres ont repris la lente route Tristes d’un souvenir et le cœur affamé D’un mets où nulle lèvre impunément ne goûte. […] Je serais désolé si ma dénonciation devait mettre M. 

3082. (1857) Articles justificatifs pour Charles Baudelaire, auteur des « Fleurs du mal » pp. 1-33

Nos artistes mettent sur leur palette du Rubens, du Rembrandt, du Cuyp, du Van Ostade, etc., etc. […] je le déclare, la présence d’une moutonnerie si persistante, le poète qui met la main sur mon cœur, dût-il l’égratigner un peu, irriter mes nerfs et me faire sauter sur mon siège, me semblera toujours préférable à cette poésie, irréprochable sans doute, mais insipide, sans parfum et sans couleur, et qui vous coule entre les mains comme de l’eau. […] Le vers négligé, mou, le versus pedestris du dix-huitième siècle, qui convient si bien à la muse décrépite de l’abbé Delille et de ses imitateurs, n’est plus de mise dans un poème court destiné à frapper l’esprit des lecteurs par une succession rapide d’images intenses. […] Baudelaire s’est mis sous la protection de quatre vers de d’Aubigné.

3083. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre VI. L’effort intellectuel »

À quelques pas de là, nous tirions de notre poche un crayon et du papier, et nous luttions séparément à qui décrirait un plus grand nombre d’objets que nous avions pu saisir au passage… Il arrivait souvent à mon fils d’inscrire une quarantaine d’objets… » Le but de cette éducation spéciale était de mettre l’enfant à même de saisir d’un seul coup d’œil, dans une salle de spectacle, tous les objets portés sur eux par tous les assistants : alors, les yeux bandés, il simulait la seconde-vue en décrivant, sur un signe conventionnel de son père, un objet choisi au hasard par un des spectateurs. […] James mettait d’abord trois ou quatre jours à apprendre un sermon par cœur. […] Bornons-nous pour le moment à mettre sur la représentation simple, développable en images multiples, un nom qui la fasse reconnaître — nous dirons, en faisant appel au grec, que c’est un schéma dynamique. […] À ce que le travail « ne va pas tout seul », à ce qu’il éprouve une gêne ou rencontre un obstacle, enfin à ce qu’il met plus de temps qu’on ne voudrait à atteindre le but.

3084. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire de la Restauration, par M. Louis de Viel-Castel » pp. 355-368

Cependant le roi sage (et réputé plus sage encore qu’il ne l’a été), Louis XVIII, se met en marche avec lenteur. […] Avoir cette singulière mise en train de l’année 1814, vous diriez de vieux ressorts automates, depuis longtemps rouillés, qui se remettent à marcher chacun dans son sens, à tout hasard et sans se correspondre.

3085. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Étude sur la vie et les écrits de l’abbé de Saint-Pierre, par M. Édouard Goumy. L’abbé de Saint-Pierre, sa vie et ses œuvres, par M. de Molinari. — II » pp. 261-274

On ne cesse d’opposer à toute réforme de l’orthographe le vers d’Horace sur l’usage, maître absolu et seul régulateur légitime du langage : « Quem penes arbitrium est… » Cela est vrai des mots mêmes qui sont mis en circulation plus que de la manière de les écrire. […] Il dira platement du Grand Condé : « S’il eût eu la patience de M. de Turenne, et si M. de Turenne eût eu la supériorité d’esprit de M. le prince, ils n’auraient jamais pris parti contre le roi, et tous deux seraient parvenus à être de grands hommes ; au lieu qu’ayant injustement contribué à déchirer leur patrie et à lui causer de grands maux par des guerres civiles, ils ne pourront jamais être mis par les connaisseurs qu’au rang des hommes illustres. » Le bonhomme n’est pas même content de M. de Turenne, lequel n’était pas assez Aristide pour lui.

3086. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Appendice. »

Il en fit le sujet d’un mémoire, d’une véritable dénonciation (1843) adressée à l’Académie française ; il mit le feu à la matière par le zèle et le souffle qu’il y déploya. C’était le propre en tout de cette nature active et rapide : rien ne se passait avec elle tranquillement, posément, dans les termes d’une modération appropriée et proportionnée au sujet ; il ne faisait rien comme un autre ; il avait du vainqueur en lui ; il y mettait du faste et de l’éclat. « Il est vrai, j’aime à faire du bruit », disait-il un jour.

3087. (1892) Boileau « Chapitre III. La critique de Boileau. La polémique des « Satires » » pp. 73-88

Le public, d’abord étonné de voir ce jeune homme inconnu prendre plaisir à se mettre à dos toute la bande rancunière des écrivains, comprit insensiblement le sens et le but de ces attaques, en les voyant multiplier et redoubler. […] Il fallait condamner en bloc ce qu’on admirait en bloc ; il serait temps après de mettre les nuances et d’adoucir la sévérité.

3088. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre I. Les mémoires »

D’autant que la science de Palissy n’est point abstraite : ce curieux obstiné, qui vécut tant d’années pour son idée, ce sévère huguenot, qui n’échappa à la Saint-Barthélemy que pour mourir à la Bastille, s’est mis tout entier dans tous ses ouvrages ; il ne peut parler agriculture et chimie sans répandre au dehors toute son originale et forte nature, sa large intelligence, sa liante moralité, son ample expérience de l’homme et de la vie. […] Biographie : Pierre de Bourdeille (vers 1534-1614), né en Périgord ; on le trouve successivement en Italie, en Écosse, en Angleterre, dans l’armée du duc de Guise pendant la 1re guerre civile, avec les espagnols dans leur expédition contre les Barbaresques, en Espagne, en Portugal, en Italie, à Malte : il prend part à la 3e guerre civile, devient chambellan de Henri III, est exilé de la cour en 1582, et songe à passer en Espagne, quand une chute de cheval le met pour quatre ans au lit, et pour le reste de ses jours le condamne au repos. — Éditions : princeps, 1665 : ainsi le xvie s. a ignoré Brantôme ; éd.

3089. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Leconte de Lisle, Charles-Marie (1818-1894) »

Ces poèmes sont dignes du siècle de l’histoire… L’état d’esprit où nous met la poésie de M.  […] Ce lui fut l’occasion toute naturelle de revoir ses classiques anciens, et de ces études d’homme sortit une traduction de Théocrite et d’Anacréon, dont la savoureuse littéralité fut un régal pour les délicats et mit hors de l’ombre ce nom que d’incessants travaux allaient rendre glorieux.

3090. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIII. Premières tentatives sur Jérusalem. »

Hérode en avait fait commencer la reconstruction l’an 20 ou 21 avant l’ère chrétienne, pour le mettre à l’unisson de ses autres édifices. […] On ne met pas le vin nouveau dans de vieilles outres 632. » Voilà, dans la pratique, son acte de maître et de créateur.

3091. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. James Mill — Chapitre III : Sentiments et Volonté »

Nous souhaitons de prolonger les premières, de mettre fin aux secondes ; quant aux troisièmes, nous ne cherchons ni à les prolonger ni à les abréger. […] Ces causes, en s’associant dans notre esprit avec les plaisirs et peines qu’elles produisent, deviennent d’abord agréables, ou désagréables en elles-mêmes ; ensuite, en s’associant avec ceux de nos actes qui peuvent les mettre à exécution, elles deviennent des motifs d’une très grande force.

3092. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre II » pp. 12-29

En 1609, Henri mit le comble aux ressentiments de la reine, et au scandale de la cour et de la ville, par sa passion effrénée pour Charlotte de Montmorency, qu’il avait mariée au prince de Condé, son neveu, et, selon plusieurs, son fils3. […] Bientôt aussi le talent de converser devînt le but d’une émulation vive et générale : on en vint plus tard à mettre par écrit les conversations des sociétés particulières, on les livra à l’impression : on envoya ses conversations à ses amis et à ses connaissances13.

3093. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Cours de littérature dramatique, par M. Saint-Marc Girardin. (2 vol.) Essais de littérature et de morale, par le même. (2 vol.) » pp. 7-19

Pascal, en son temps, remarquait que « c’est un grand avantage que la qualité (la naissance) qui, dès dix-huit ou vingt ans, met un homme en passe d’être connu et respecté comme un autre pourrait avoir mérité à cinquante ans : ce sont trente ans gagnés sans peine ». […] Si ces auteurs, qui semblent avoir été mis au monde tout exprès pour lui procurer un facile triomphe, n’existaient pas, votre critique serait bien en peine, et elle n’aurait pas toute sa matière.

3094. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « De la question des théâtres et du Théâtre-Français en particulier. » pp. 35-48

Ordinairement la littérature et le théâtre s’emparaient des grands événements historiques pour les célébrer, pour les exprimer : ici c’est l’histoire vivante qui s’est mise à imiter la littérature. […] C’est l’art de tout dire sans être mis à la Bastille, dans un pays où il est défendu de rien dire… La contrainte de la décence et la contrainte de la presse ont été les causes de la perfection de l’esprit, du goût, de la tournure chez les Français.

3095. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre IV. Littérature dramatique » pp. 202-220

. — La tragédie Elle a été surtout mise en valeur par le théâtre de plein air dont M.  […] A. de Lorde doivent être mis à part La Dormeuse est la meilleure pièce du genre et peut-on dire le modèle, parce qu’elle est la moins compliquée.

3096. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre IV. Suite du parallèle de la Bible et d’Homère. — Exemples. »

Joseph, après avoir fait mettre une coupe dans le sac de Benjamin, ordonne d’arrêter les enfants de Jacob ; ceux-ci sont consternés ; Joseph feint de vouloir retenir le coupable : Juda s’offre en otage pour Benjamin ; il raconte à Joseph que Jacob lui avait dit, avant de partir pour l’Égypte : « Vous savez que j’ai eu deux fils de Rachel, ma femme. […] La reconnaissance est mieux amenée dans la Genèse : une coupe est mise, par la plus innocente vengeance, dans le sac d’un jeune frère innocent ; des frères coupables se désolent, en pensant à l’affliction de leur père ; l’image de la douleur de Jacob brise tout à coup le cœur de Joseph, et le force à se découvrir plus tôt qu’il ne l’avait résolu.

3097. (1912) L’art de lire « Chapitre II. Les livres d’idées »

Fort bien ; mais dès lors, si l’on peut dissoudre les vertus dans les défauts qui les avoisinent, on peut dissoudre aussi les défauts dans les vertus qui sont proches d’eux et dire : « Tel homme désire briller et pour cela se met toujours en avant ; mais au fond de cela, il y a du courage. […] Probablement cette vérité, elle aussi, nous fuit d’une fuite éternelle ; probablement les auteurs sont inépuisables en raison de ce qu’ils ont et en raison de ce qu’en les lisant, nous mettons en eux ; mais l’essentiel est de penser, le plaisir que l’on cherche en lisant un philosophe est le plaisir de penser, et ce plaisir nous l’aurons goûté en suivant toute la pensée de l’auteur et la nôtre mêlée à la sienne et la sienne excitant la nôtre et la nôtre interprétant la sienne et peut-être les trahissant ; mais il n’est question ici que de plaisir et il y a des plaisirs d’infidélité et l’infidélité à l’égard d’un auteur est un innocent libertinage.

3098. (1864) De la critique littéraire pp. 1-13

Un critique trace les règles de l’épopée ; un poète les met en pratique et « accouche lentement d’un poème effroyable » : c’est la Pucelle, de Chapelain, où nous commençons à trouver du bon. […] Vingt pages que l’on tire de soi, vingt vers où l’on met son âme, valent mieux que des volumes de critique.

3099. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « IX »

On prétend que nous confondons les corrections de mots avec les corrections d’idées, et pour montrer que je n’ai vu partout que des corrections de mots, on se met à voir partout des corrections d’idées. […] Mais pouvais-je exprimer plus simplement cette idée que Bossuet ne refond pas brutalement, et qu’il met beaucoup d’attention à conserver, à réserver et à choisir, contrairement à certains auteurs dont nous montrons le labeur un peu grossier ?

3100. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IV. Des changements survenus dans notre manière d’apprécier et de juger notre littérature nationale » pp. 86-105

N’entendez-vous pas déjà répéter de tous les côtés, et jusque dans nos chaires publiques, que nos grands écrivains du siècle de Louis XIV ne furent pas à leur aise dans les institutions de leur temps, que leur génie a manqué d’indépendance et de liberté, qu’ils ont imposé à la langue et à la littérature nationale des entraves dont elles gémissent, qu’ils nous ont mis à l’étroit dans leurs pensées trop circonscrites ? […] Pour introduire de suite le lecteur dans le sens intime d’une pareille discussion, je vais le mettre aux prises avec le plus grand nom des lettres françaises, avec Bossuet : encore ne prendrons-nous pas Bossuet tout entier.

3101. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’Empire Chinois »

Il ne sera dépassé et mis en oubli que par un livre d’égale force d’intelligence, lequel, représentant, comme celui-ci, dix ans de travaux, d’efforts, de patience inouïe, prendra les notions sur la Chine là où Huc les a prises, et nous en donnera l’équivalent en les avançant autant que l’ouvrage du courageux missionnaire les a avancées. […] Mais l’expérience de l’Orient lui avait appris qu’il serait mis plus bas que le dernier des bonzes mendiants, et promené d’avanie en avanie, s’il se départait une minute des exigences les plus altières.

3102. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VIII. Du mysticisme et de Saint-Martin »

Nous l’affirmons avec une joie qu’un regret tempère : un catholique qui se serait plus hautement avoué dans un tel livre, et qui y aurait mis bravement le crucifix sur son cœur, aurait dit davantage ; mais, sur la limite où M.  […] Lui, dont les yeux sont fins et sûrs, n’a-t-il pas senti que, s’il les avait fixés profondément sur ce qui n’est pas seulement une distinction nominale, faite par la haute sagesse gouvernementale de l’Église, il n’aurait pu s’empêcher de voir, se détachant du fond commun des idées et des phénomènes imputés au Mysticisme, pris dans son acception la plus générale et la plus confuse, un autre mysticisme, ayant ses caractères très déterminés ; l’éclatante réalité, enfin, qui contient la vérité intégrale que la Religion seule met sous les mains de nos esprits, mais dont la Philosophie les détourne ?

3103. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Conclusion »

Mettre la durée dans l’espace, c’est, par une contradiction véritable, placer la succession au sein même de la simultanéité. […] De là l’idée de faire durer les choses comme nous durons, et de mettre le temps dans l’espace.

3104. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Herold, André-Ferdinand (1865-1940) »

Ferdinand Hérold — dont les hasards du flux littéraire nous mettent, ce mois, un admirable volume sous les yeux — un écrivain fécond, étranger aux étranges scrupules de la stérilisation préméditée, un écrivain qui, suivant son instinct, procrée… Avons-nous dit tout le bien que nous pensons de M. 

3105. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hugues, Clovis (1851-1907) »

Clovis Hugues, c’est justement de quitter le point de vue où s’est mis l’auteur des Châtiments et de l’Année terrible , pour que son originalité (il en a une) puisse se dégager complètement.

3106. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lemaître, Jules (1853-1914) »

Il faudra bien qu’on rende un jour à l’auteur pleine justice à ce livre excellent, qu’on le mette tout à côté de ceux de France, pour la délicatesse et la savante simplicité de la forme, et qu’on reconnaisse en Lemaître un des plus remarquables artistes en vers de ce temps.

3107. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 7-11

Collé y a joint tout l’art dont le sujet étoit susceptible, celui de bien amener les incidens, de mettre du jeu & de la variété dans ses personnages, de développer l’ame de son Héros, de faire ressortir, pour ainsi dire, de chaque Scène un intérêt qui lui est particulier & contribue à l’effet général, de joindre enfin à l’énergie du sentiment, l’aisance & le bon ton du Dialogue, en conservant la naïveté & le costume des mœurs du siecle d’Hénri IV.

3108. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 264-267

Ce seroit toujours beaucoup pour la gloire de Madame de la Fayette, d’y avoir mis le coloris après que Segrais en eut tracé le dessein.

3109. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 5-9

On a vu, par la publicité que je lui ai donnée, qu’elle nous enjoint d’être plus circonspects ; de nous reconnoître l’un & l’autre pour gens d’honneur, qu’un zele aveugle d’un côté, & un amour-propre d’Auteur de l’autre, a écartés du vrai ; qu’elle nous fait défense à tous deux de récidiver ; qu’elle supprime les écrits respectifs qui avoient donné lieu à la plainte de mon Adversaire & à la mienne ; & que, sur le surplus, elle nous met hors de Cour & de procès.

3110. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 451-455

J’aime à trouver, quand il fait froid, Grand feu dans un petit endroit ; Les délicats font grande chere, Quand on leur sert, dans un repas, De grand vin dans un petit verre, De grands mets dans de petits plats.

3111. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 45-49

L’Abbé de Rancé a encore ajouté à ses autres travaux une Relation de la vie & de la mort de quelques Moines de la Trappe, en 4 vol. où, d’un style simple & plein d’onction, il trace des tableaux propres à édifier & à mettre les sentimens de la Religion dans tout leur jour.

3112. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Préface » pp. 1-3

Je me mis donc à faire pour la première fois de la critique nette et franche, à la faire en plein jour, en rase campagne.

3113. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre V. Suite du Père. — Lusignan. »

Sais-tu bien qu’à l’instant que son flanc mit au jour Ce triste et dernier fruit d’un malheureux amour, Je la vis massacrer par la main forcenée, Par la main des brigands à qui tu t’es donnée ?

3114. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre IX. Du vague des passions. »

L’invasion des Barbares y mit le comble, et l’esprit humain en reçut une impression de tristesse, et peut-être même une teinte de misanthropie qui ne s’est jamais bien effacée.

3115. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre XII. Des livres de jurisprudence » pp. 320-324

Collection savante, qui suffit seule pour se mettre au fait de tout ce qui concerne les matieres canoniques & bénéficiales.

3116. (1767) Salon de 1767 « Sculpture — Allegrain » p. 322

Les amateurs, dont il ne faut ni surfaire ni dépriser le jugement, les artistes, les seuls vrais juges, mettent la figure d’Allegrain sur la ligne même du Mercure de Pigalle.

3117. (1767) Salon de 1767 « Dessin. Gravure — Cochin » p. 332

Mais il n’y a point d’air entre les figures ; point de plans ; sa composition n’a que l’épaisseur du papier, c’est comme une plante qu’un botaniste met à sécher dans un livre ; elles sont applaties, collées les unes sur les autres.

3118. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 10, objection tirée des tableaux pour montrer que l’art de l’imitation interesse plus que le sujet même de l’imitation » pp. 67-70

Un peintre peut donc passer pour un grand artisan, en qualité de dessinateur élegant, ou de coloriste rival de la nature, quand même il ne sçauroit pas faire usage de ses talens pour répresenter des objets touchans, et pour mettre dans ses tableaux l’ame et la vraisemblance qui se font sentir dans ceux de Raphaël et du Poussin.

3119. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Préface de l’auteur »

C’est qu’ils commencent par mettre espace et temps sur la même ligne : alors, ayant approfondi l’un (et c’est généralement l’espace), ils s’en remettent à nous du soin de traiter semblablement l’autre.

3120. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque » pp. 2-79

Pour moi, je pense qu’il est plus aisé de s’accoutumer à une nourriture grossière qu’à des mets délicats et recherchés ; des figues, des raisins, des noix, des amandes, voilà mes délices ; j’aime les poissons dont la rivière abonde : c’est un grand plaisir pour moi de les voir briller dans les filets qu’on leur tend et que je leur tends moi-même quelquefois. […] Une montagne le met à l’abri des vents du midi ; des arbres qui l’entourent y répandent un ombrage frais. […] Honteux d’avoir reçu un honneur que je n’avais pas mérité, je résolus de mettre la dernière main à ce poème, pour faire voir que je n’étais pas tout à fait indigne de la couronne. […] Vous qui dominiez autrefois sur toutes les nations, qui voyiez les rois à vos pieds, vous avez gémi sous un joug honteux ; et (ce qui met le comble à votre honte et à ma douleur) vos maîtres étaient des étrangers, des aventuriers. […] « Le nouveau tribun, dit-il, que je regarde comme votre troisième libérateur, réunit en lui seul la gloire des deux autres, ayant fait mourir une partie de vos tyrans et mis en fuite le reste… « Homme courageux, continue Pétrarque, qui portez tout le fardeau de la république, que l’image de l’ancien Brutus vous soit toujours présente !

3121. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIVe entretien. Littérature, philosophie, et politique de la Chine » pp. 221-315

Ceux qui seront curieux de s’en convaincre n’ont qu’à jeter les yeux sur les notes qu’on a mises à la tête de chaque King dans la grande édition du palais ; ils verront avec surprise qu’on n’a jamais poussé si loin les recherches et la critique pour aucun livre profane. […] Comment se persuader que, tant de siècles avant Alexandre, ces barbares de l’extrême Orient eussent pris dans leurs livres un ton si sublime de vérité, de noblesse, d’éloquence, de majesté de pensées, dont on ne trouve que des lueurs dans les chefs-d’œuvre de Rome, et qui mettent ces livres (les Kings) au premier rang après nos livres saints pour la religion, la morale, la plus haute philosophie ?  […] C’est lui qui nous dicte ses lois par nos instincts naturels et qui a mis un juge en nous par la conscience. […] L’humanité et la justice ne sont point arbitraires ; elles sont ce qu’elles sont, indépendamment de notre volonté ; Dieu les a faites, non l’homme ; mais, pour pouvoir les mettre en pratique et pour en faire une juste application, il faut qu’il y ait des lois établies, des usages consacrés, des cérémonies déterminées. […] L’amour qu’il porte à tous les hommes le met en droit de n’en craindre aucun ; l’exactitude scrupuleuse avec laquelle il pratique les cérémonies, obéit aux lois et s’astreint à l’observation des usages reçus, fait sa sûreté, même sous les tyrans.

3122. (1909) De la poésie scientifique

Et soudain il aura mis en co-vibration les potentielles accumulations d’obscures perceptions qui, de proche en proche, selon le heurt déterminant, s’ordonneront en une aperception à large et surprenante commotion… De quoi dirons-nous le produit, cette Sub-conscience ? […] Mais, puisque, virtuellement, le Cercle est sans limites, illimitée sera l’ouverture d’ellipse vers la ligne droite, terme d’évolution, — et éternellement, sans pouvoir se résoudre, la Matière évolue et va vers un Plus, vers un Mieux… Or, par quoi est mise en mouvement, selon cette ellipse, la Matière ? […] Avant de dire quelle sanction humaine ressort de ces principes, nous remarquerons en passant qu’ils peuvent mettre un terme à la vieille et longue querelle occidentale entre le Matérialisme et le Spiritualisme, avatar de l’antique antagonisme du Mal et du Bien, de la Nuit et de la Lumière, double direction de l’esprit humain partie de l’Inde depuis la méditation de Vyasa, et l’emprise générale de Kapila qui tient la pensée évolutionniste moderne   En notre pensée les deux termes s’unissent et l’antinomie se résout : car le spiritualisme, c’est-à-dire pour moi, le plus de conscience prise du Tout, sort perpétuellement de la Matière évoluante. […] Il n’est pas possible d’entrer au détail de cette Œuvre : œuvre-une et composée harmoniquement dont toutes les parties, tous les livres et tous les poèmes se commandent  Elle se compose de douze à quinze volumes venant en leur ordre préconçu, dont un tiers environ est maintenant paru : toute la première partie (dont une Édition nouvelle, revue et mise au plan exact d’expression vient d’être publiée)31, et les deux premiers livres de la seconde partie. […] Nous n’en sommes plus aux heures où des ignare, ou des plaisantins de plus ou moins de probité, demandaient ingénument si nous mettions en vers l’histoire naturelle I S’il s’en trouve encore, c’est au dam de leur intelligence.

3123. (1857) Cours familier de littérature. IV « XIXe entretien. Littérature légère. Alfred de Musset (suite) » pp. 1-80

Un poète plus mûr et plus grand que Musset, venait de mettre l’Espagne à la mode par quelques fantaisies andalouses où l’on croyait entendre grincer les guitares sous les balcons aux lueurs de la lune de Séville. […] Murmura l’étranger, vois cette créature ; Sous les cieux les plus doux qui la pouvaient nourrir, Cette fleur avait mis dix-huit ans à s’ouvrir. […] Mais une autre l’aimait elle-même ; — et les mondes Se sont mis en voyage autour du firmament. […] Ce cœur et ce génie cherchaient à se mettre d’accord en lui comme en nous tous. […] Mon sein est inquiet, la volupté l’oppresse, Et les vents altérés m’ont mis la lèvre en feu.

3124. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers » pp. 81-176

Il est de la race de ces hommes qu’il ne faut pas prendre au premier mot, mais dont il faut attendre le développement intellectuel, politique et moral, développement qui ne s’arrête plus en eux qu’à la mort ; hommes qui grandiraient toujours en intelligence, en sagacité, en talent, si Dieu n’avait pas mis à leur développement les bornes de leur existence ici-bas. […] Mais, si Moreau avait réussi dans une partie au moins de son plan, cette armée de réserve, se portant, sous le général Bonaparte, à Genève, de Genève dans le Valais, donnant la main au détachement tiré de l’armée d’Allemagne, passant ensuite le Saint-Bernard sur les glaces et les neiges, devait, parmi prodige plus grand que celui d’Annibal, tomber en Piémont, prendre par derrière le baron de Mélas occupé devant Gênes, l’envelopper, lui livrer une bataille décisive, et, si elle la gagnait, l’obliger à mettre bas les armes… « Cette armée du Rhin, poursuit l’historien militaire, quoique portant, comme les autres armées de la République, les haillons de la misère, était superbe. […] À son exemple tout le monde se mit à dire qu’on ne pouvait plus rester en Égypte et qu’il fallait à tout prix revenir en France. […] Elle mettait de l’empressement à leur faire part de sa puissance, à leur rendre des services. […] N’imaginant pas qu’il pût mettre un pied audacieux sur les marches du trône sans tomber aussitôt sous le poignard des républicains ou des royalistes, elle voyait confondus dans une ruine commune ses enfants, son mari, elle-même ; mais, en supposant qu’il parvînt sain et sauf sur ce trône usurpé, une autre crainte assiègeait son cœur : elle n’irait pas s’y asseoir avec lui.

3125. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (1re partie) » pp. 313-408

Nous nous sommes beaucoup plu et beaucoup aimé quand en 1827 nous nous connûmes ; je connaissais déjà vos premiers vers, et je les avais mis à part dans mon souvenir et dans ma bibliothèque dépareillée de ce pauvre Saint-Point. […] « En nous efforçant d’arracher cette humble mémoire à l’oubli, continue-t-il, et en risquant aujourd’hui, au milieu d’un monde peu rêveur, ces poésies mystérieuses que Joseph a confiées à notre amitié, nous avons dû faire un choix sévère, tel sans doute qu’il l’eût fait lui-même s’il les avait mises au jour de son vivant. […] Peut-elle refleurir lorsqu’a soufflé l’orage, Et qu’en nos cœurs l’orgueil debout a, dans sa rage,                  Mis le pied sur l’autel ? […] c’est que vos Consolations ne soient pas aussi recherchées du commun des lecteurs que les infortunes si touchantes du pauvre Joseph, qui pourtant ont mis tant et si fort la critique en émoi. […] Mettez votre confiance en Dieu ; c’est ce que j’ai fait, moi, poète de cabaret et de mauvais lieux, et un tout petit rayon de soleil est tombé sur mon fumier.

3126. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXXII » pp. 328-331

Voltaire a donné sa fameuse recette pour voir si des vers français étaient bons ou mauvais : Mettez-les en prose !

3127. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Alphonse Karr. Ce qu’il y a dans une bouteille d’encre, Geneviève. »

J’achevais de le lire mercredi matin, tandis que se faisait aux faubourgs populeux cette descente anniversaire qui, d’un seul flot, refoule notre humanité perfectible aux beaux jours de l’antique Sardanapale, et je me disais, en entendant ces échos lointains : « N’est-ce donc pas une débauche aussi que tant de grâce, de sensibilité, d’esprit fin et d’observation morale, s’employant et s’affichant uniquement pour mettre du noir sur du blanc, comme on dit, et pour vider l’écritoire ?

3128. (1875) Premiers lundis. Tome III « Armand Carrel. Son duel avec Laborie »

Dès que cette odieuse prétention a été mise en avant, il s’est présenté pour la combattre.

3129. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bonnières, Robert de (1850-1905) »

Voilà un livre vers qui peu d’artistes s’orienteront, mais qu’ils mettront volontiers sous les yeux des reines familières.

3130. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Donnay, Maurice (1859-1945) »

Vous est-il arrivé de vous asseoir à une table délicatement servie, où les mets rares et excitants, les gibiers, les truffes, les sauces veloutées et légères s’arrosent des grands crus de Bourgogne, de Champagne et du Rhin !

3131. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — F — France, Anatole (1844-1924) »

Si le socialisme régnait dans la République des lettres et qu’on y fît la répartition du travail, il faudrait confier à cet artiste le soin des plus petits bijoux pour les tailler et les mettre au point.

3132. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Glatigny, Albert (1839-1873) »

Chez lui, pas de ces hésitations et de ces tâtonnements par lesquels ont passé à leurs débuts tant d’écrivains en prose et en vers, qui plus tard sont devenus célèbres ; au contraire, il sut en un moment, comme d’instinct et par révélation, ce métier laborieux, compliqué et difficile de la poésie, si divers et si inépuisable, qu’on met toute sa vie à l’apprendre.

3133. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 230-234

Recueillir, mettre en ordre, corriger, éclaircir ; telle a été la tâche que son zele infatigable a remplie ; &, ne fût-il connu que par cette seule édition, c’en seroit assez pour lui concilier la reconnoissance de tous les Savans : ajoutons que son respect pour la Religion lui a mérité l’estime des honnêtes gens, &, ce qui n’est pas moins honorable, les injures du Garasse * de la moderne Philosophie.

3134. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 104-107

Vosgien, qui n’est qu’un nom factice, mis par l’Abbé Ladvocat à la tête de son Dictionnaire Géographique ; ce dont il eût pu s’instruire dans notre Ouvrage même.

3135. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 285-289

Il sacrifia tout à ce penchant, qui l’auroit pu rendre heureux s’il ne l’eût cultivé que pour lui-même, sans y joindre la démangeaison la plus violente de mettre tout au jour, & de s’élever contre les Ouvrages d’autrui.

3136. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Préface »

La méthode expérimentale, en s’avançant de proche en proche depuis le domaine des éléments inorganiques, jusqu’à l’être organisé, et dans celui-ci même, jusqu’aux fonctions nerveuses les plus proches des facultés intellectuelles et morales, cette méthode partout accompagnée de l’infaillible nécessité, ne viendra-t-elle pas un moment mettre en péril la liberté de l’être moral ?

3137. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Pierre » pp. 200-201

D’abord quelle plate idée que d’avoir mis Hersé à sa toilette !

3138. (1763) Salon de 1763 « Sculptures et gravures — Falconet » pp. 250-251

Ô Falconet, comment as-tu fait pour mettre dans un morceau de pierre blanche la surprise, la joie et l’amour fondus ensemble.

3139. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XVIII »

Je pense très sincèrement avoir rendu service, dans une modeste mesure, non seulement aux lettrés et aux artistes, mais à tous ceux qui désirent simplement voir un peu clair et mettre un peu d’ordre dans ces matières.

3140. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Riposte à Taxile Delord » pp. 401-403

Jeune homme, qui vous destinez aux lettres et qui en attendez douceur et honneur, écoutez de la bouche de quelqu’un qui les connaît bien et qui les a pratiquées et aimées depuis près de cinquante ans, — écoutez et retenez en votre cœur ces conseils et cette moralité : Soyez appliqué dès votre tendre enfance aux livres et aux études ; passez votre tendre jeunesse dans l’etude encore et dans la mélancolie de rêves à demi-étouffés ; adonnez-vous dans la solitude à exprimer naïvement et hardiment ce que vous ressentez, et ambitionnez, au prix de votre douleur, de doter, s’il se peut, la poésie de votre pays de quelque veine intime, encore inexplorée ; — recherchez les plus nobles amitiés, et portez-y la bienveillance et la sincérité d’une âme ouverte et désireuse avant tout d’admirer ; versez dans la critique, émule et sœur de votre poésie, vos effusions, votre sympathie et le plus pur de votre substance ; louez, servez de votre parole, déjà écoutée, les talents nouveaux, d’abord si combattus, et ne commencez à vous retirer d’eux que du jour où eux-mêmes se retirent de la droite voie et manquent à leurs promesses ; restez alors modéré et réservé envers eux ; mettez une distance convenable, respectueuse, des années entières de réflexion et d’intervalle entre vos jeunes espérances et vos derniers regrets ; — variez sans cesse vos études, cultivez en tous sens votre intelligence, ne la cantonnez ni dans un parti, ni dans une école, ni dans une seule idée ; ouvrez-lui des jours sur tous les horizons ; portez-vous avec une sorte d’inquiétude amicale et généreuse vers tout ce qui est moins connu, vers tout ce qui mérite de l’être, et consacrez-y une curiosité exacte et en même temps émue ; — ayez de la conscience et du sérieux en tout ; évitez la vanterie et jusqu’à l’ombre du charlatanisme ; — devant les grands amours-propres tyranniques et dévorants qui croient que tout leur est dû, gardez constamment la seconde ligne : maintenez votre indépendance et votre humble dignité ; prêtez-vous pour un temps, s’il le faut, mais ne vous aliénez pas ; — n’approchez des personnages le plus en renom et le plus en crédit de votre temps, de ceux qui ont en main le pouvoir, qu’avec une modestie décente et digne ; acceptez peu, ne demandez rien ; tenez-vous à votre place, content d’observer ; mais payez quelquefois par les bonnes grâces de l’esprit ce que la fortune injuste vous a refusé de rendre sous une autre forme plus commode et moins délicate ; — voyez la société et ce qu’on appelle le monde pour en faire profiter les lettres ; cultivez les lettres en vue du monde, et en tâchant de leur donner le tour et l’agrément sans lequel elles ne vivent pas ; cédez parfois, si le cœur vous en dit, si une douce violence vous y oblige, à une complaisance aimable et de bon goût, jamais à l’intérêt ni au grossier trafic des amours-propres ; restez judicieux et clairvoyant jusque dans vos faiblesses, et si vous ne dites pas tout le vrai, n’écrivez jamais le faux ; — que la fatigue n’aille à aucun moment vous saisir ; ne vous croyez jamais arrivé ; à l’âge où d’autres se reposent, redoublez de courage et d’ardeur ; recommencez comme un débutant, courez une seconde et une troisième carrière, renouvelez-vous ; donnez au public, jour par jour, le résultat clair et manifeste de vos lectures, de vos comparaisons amassées, de vos jugements plus mûris et plus vrais ; faites que la vérité elle-même profite de la perte de vos illusions ; ne craignez pas de vous prodiguer ainsi et de livrer la mesure de votre force aux confrères du même métier qui savent le poids continu d’une œuvre fréquente, en apparence si légère… Et tout cela pour qu’approchant du terme, du but final où l’estime publique est la seule couronne, les jours où l’on parlera de vous avec le moins de passion et de haine, et où l’on se croira très clément et indulgent, dans une feuille tirée à des milliers d’exemplaires et qui s’adresse à tout un peuple de lecteurs qui ne vous ont pas lu, qui ne vous liront jamais, qui ne vous connaissent que de nom, vous serviez à défrayer les gaietés et, pour dire le mot, les gamineries d’un loustic libéral appelé Taxile Delord.

3141. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « La doctrine symboliste » pp. 115-119

Ils mettaient aussi moins de gravité étudiée dans leurs manifestes et ne s’embarrassaient pas de leur donner un tour scientifique, une saveur d’axiome, le piquant d’une formule algébrique.

3142. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 127-131

Si son génie inventeur ne le mit point à l’abri des méprises, il sut du moins, comme Icare, se sauver du labyrinthe avec les ailes qu’il se fabriqua, & ses erreurs mêmes sont devenues des signaux propres à diriger ses successeurs.

3143. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 424-428

On en a de lui une intitulée, Esprit des Philosophes & Ecrivains célebres de ce siecle, à la tête desquels il a mis M. d’Alembert.

3144. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des romans — Préfaces de « Han d’Islande » (1823-1833) — Préface de 1833 »

D’ailleurs, puisque l’auteur, si peu de place qu’il tienne en littérature, a subi la loi commune à tout écrivain grand ou petit, de voir rehausser ses premiers ouvrages aux dépens des derniers et d’entendre déclarer qu’il était fort loin d’avoir tenu le peu que ses commencements promettaient, sans opposer à une critique peut-être judicieuse et fondée des objections qui seraient suspectes dans sa bouche, il croit devoir réimprimer purement et simplement ses premiers ouvrages tels qu’il les a écrits, afin de mettre les lecteurs à même de décider, en ce qui le concerne, si ce sont des pas en avant ou des pas en arrière qui séparent Han d’Islande de Notre-Dame de Paris.

3145. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre troisième. Histoire. — Chapitre premier. Du Christianisme dans la manière d’écrire l’histoire. »

Mettons donc l’éternité au fond de l’histoire des temps ; rapportons tout à Dieu, comme à la cause universelle.

3146. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre XI. Des Livres sur la Politique & le Droit Public. » pp. 315-319

Le traducteur de Grotius a mis aussi en françois le Droit de la nature & des gens, par Puffendorff, in-4°. deux volumes.

3147. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Ollivier » pp. 299-300

Un meurtrier tient suspendu par un pied l’enfant d’une mère, et cette femme tend son tablier pour le recevoir précisément comme un chou qu’on lui mettrait dans son giron.

3148. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « Appendice »

MÊME CHOSE : La Mort de Dolon Traduction Hachette juxtalinéaire Mais Diomède puissant, Ayant regardé certes lui en dessous Dit à lui : « ne te mets pas certes dans l’esprit la fuite du moins, Dolon, Quoique ayant annoncé De bonnes choses, Puisque tu es venu dans nos mains.

3149. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Édouard Fleury »

Jamais, en effet, étude circonscrite plus solide et plus consciencieuse n’a mieux mérité d’être mise en regard de cette autre étude sans méthode, sans architecture, sans résistance d’érudition, négligée et en même temps précieuse, et qui a bien l’aplomb de s’appeler un livre d’histoire : Histoire de la Société Française pendant la Révolution.

3150. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Note qu’il faut lire avant le chapitre de l’amour. »

Les Italiens mettent tant de poésie dans l’amour, que tous leurs sentiments s’offrent à vous comme des images, vos yeux s’en souviennent plus que votre cœur.

3151. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre VI. Utilité possible de la conversation »

On ne mettait point de bornes à l’utilité qu’on croyait en tirer, et des érudits pensaient que de dix choses qu’ils avaient, ils en avaient appris neuf par la conversation.

3152. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Aicard, Jean (1848-1921) »

Qu’il nous met bien dans l’oreille le bruit de la petite rivière provençale, courant, limoneuse, sur les cailloux !

3153. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Parodi, D.-Alexandre (1842-1902) »

Parodi a écrit de sa meilleure plume de beaux vers dont je ne puis donner autant d’extraits que je voudrais… Adam se met à la recherche de Caïn, et c’est là qu’est l’intérêt dramatique du beau poème de M. 

3154. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Schwob, Marcel (1867-1905) »

Schwob, plus artiste à coup sûr qu’Hérodas, met dans ses récits une poésie et une mélancolie qui manquaient au poète de l’Île de Cos, lequel était volontiers jovial et « réaliste ».

3155. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Strada, José de (1821-1902) »

J. de Strada, comme Leconte de Lisle, est un témoin qui raconte le passé et qui communique aux faits un peu du phosphore que son génie lui a mis aux doigts, de ce phosphore dont parle Joubert.

3156. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 34-39

Quand les affaires publiques font le fil de l’Histoire, il est toujours suivi : quand les Rois n’y sont considérés qu’autant qu’ils ont servi à les faire changer, on les y fait entrer avec bien plus d’agrément, que lorsqu’on se met en tête de ne parler des affaires que selon qu’elles servent à relever ou diminuer la gloire des Rois.

3157. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 467-471

Il importe peu aux siecles suivans qu’un Auteur ait connu parfaitement sa langue, qu’il l’ait parlée purement & avec facilité, qu’il ait eu du goût & des connoissances, que les grands Poëtes de son temps l’aient célébré : s’il n’a laissé des Ecrits qui le rendent digne de se survivre à lui-même, on le met bientôt au rang des Auteurs oubliés.

3158. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 37, que les mots de notre langue naturelle font plus d’impression sur nous que les mots d’une langue étrangere » pp. 347-350

Enfin les françois et les étrangers, je parle de ceux qui sçavent notre langue aussi bien que nous-mêmes, et qui ont été élevez un Horace dans une main et un Despreaux dans l’autre, ne sçauroient souffrir qu’on mette en comparaison les vers latins et les vers françois considerez mécaniquement.

3159. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — VII. La fausse fiancée »

Elles se mirent en route.

3160. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre III. Les immoralités de la morale » pp. 81-134

Mais elles aussi agissent pour elles, et ne se préoccupent pas de se mettre d’accord entre elles ou avec ce qui pourrait subsister de l’ancien état de choses. […] Souvent une lutte de ruses met aux prises, dans l’individu, l’âme individuelle et l’âme sociale. […] En vérité, on peut mettre son point d’honneur où l’on veut. […] Il y a peu d’années, une crise dangereuse et extrêmement intéressante a mis aux prises — pour ne rien dire des intérêts individuels, des convoitises ou des rancunes — l’esprit de justice et le respect de la chose jugée et de l’autorité en général, l’amour de la patrie et l’aspiration vers une humanité élargie et meilleure, le zèle pour la vérité quelle qu’elle fût, et le sens des conventions nécessaires, l’amour des grandes abstractions idéalisées et le souci de réalités qui imposent à la vie des concessions parfois dures.

3161. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — III » pp. 455-479

La politesse des officiers de cette jeune armée, en opposition avec la grossièreté des représentants du peuple, lui avait paru le modèle de la politesse du nouveau régime. « L’absence des formes de convention semblait mettre dans tout son jour la bienveillance et la bonté de ces jeunes héros. » Il avait recueilli de la bouche des soldats quelques-unes de ces paroles patriotiques et simples qui leur sont familières dans les journées immortelles, et qui lui étaient allées au cœur ; aussi Bonstetten, revenant à Paris, jouissait des changements accomplis, mais ne s’en étonnait pas. […] Sa longue expérience des choses et des hommes ne l’avait pas saturé ni surchargé, mais seulement excité et mis en goût : il avait « de cette alacrité, de cette gaieté qui, en donnant du prix à toute chose, nous fait chérir les hommes non seulement comme frères, mais comme objets d’étude, dépensée, de jouissance ». […] Tous les ans d’ailleurs, un ou deux voyages servaient à convaincre l’actif vieillard « qu’il n’appartenait pas encore à la glèbe, que ses ailes n’étaient pas coupées, et que le grand livre de la nature n’était pas encore réduit pour lui à un simple feuillet. » Dans la solitude de son cabinet, quand il y trouvait la solitude, Bonstetten s’occupait continuellement de deux projets que la multitude de ses distractions et le caractère désultoire de ses goûts l’empêchèrent d’exécuter î l’un était d’écrire les mémoires de sa vie, l’autre de mettre en ordre ses papiers.

3162. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre IV. Construction de la société future »

Prenez des femmes qui ont faim et des hommes qui ont bu ; mettez-en mille ensemble, laissez-les s’échauffer par leurs cris, par l’attente, par la contagion mutuelle de leur émotion croissante ; au bout de quelques heures, vous n’aurez plus qu’une cohue de fous dangereux ; dès 1789 on le saura et de reste  Maintenant, interrogez la psychologie : la plus simple opération mentale, une perception des sens, un souvenir, l’application d’un nom, un jugement ordinaire est le jeu d’une mécanique compliquée, l’œuvre commune et finale437 de plusieurs millions de rouages qui, pareils à ceux d’une horloge, tirent et poussent à l’aveugle, chacun pour soi, chacun entraîné par sa propre force, chacun maintenu dans son office par des compensations et des contrepoids. […] « Dans toute véritable démocratie, la magistrature n’est pas un avantage, mais une charge onéreuse, qu’on ne peut justement imposer à un particulier plutôt qu’à un autre. » Nous mettons la main sur nos magistrats ; nous les prenons au collet pour les asseoir sur leurs sièges. […] D’où il suit qu’il peut mettre des conditions à son cadeau, limiter à son gré l’usage que j’en ferai, restreindre et régler ma faculté de donner, de tester. « Par nature443, le droit de propriété ne s’étend pas au-delà de la vie du propriétaire ; à l’instant qu’un homme est mort, son bien ne lui appartient plus.

3163. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre I »

On a assassiné sur les chemins des femmes qui portaient du pain… M. le duc d’Orléans porta l’autre jour au conseil un morceau de pain, le mit devant la table du roi et dit : « Sire, voilà de quel pain se nourrissent aujourd’hui vos sujets… » — « Dans mon canton de Touraine, il y a déjà plus d’un an que les hommes mangent de l’herbe »  De toutes parts la misère se rapproche ; « on en parle à Versailles plus que jamais. […] Mais ce serait en vain que l’on chercherait en France une servante d’hôtel proprement mise. » — Lisez quelques descriptions prises sur place, et vous verrez qu’en France l’aspect de la campagne et des paysans est le même qu’en Irlande, du moins dans les grands traits. […] De son côté, ce métayer ne songe qu’à vivre avec le moins de travail possible, à mettre le plus de terrain qu’il peut en dépaître ou pacages, attendu que le produit provenant du croît du bétail ne lui coûte aucun travail.

3164. (1895) La musique et les lettres pp. 1-84

Le génie, du reste, se servit de la langue, et des idées en cours, avant d’y mettre le sceau. […] Or, voici qu’à cette mise en demeure extraordinaire, tout à l’heure, révoquant les titres d’une fonction notoire, quand s’agissait, plutôt, d’enguirlander l’autel ; à ce subit envahissement, comme d’une sorte indéfinissable de défiance (pas même devant mes forces), je réponds par une exagération, certes, et vous en prévenant — Oui, que la Littérature existe et, si l’on veut, seule, à l’exclusion de tout. […] Nœud de la harangue, me voici fournir ce morceau, tout d’une pièce, aux auditeurs, sur fond de mise en scène ou de dramatisation spéculatives : entre les préliminaires cursifs et la détente de commérages ramenée au souci du jour précisément en vue de combler le manque d’intérêt extra-esthétique. — Tout se résume dans l’Esthétique et l’Économie politique.

3165. (1911) La valeur de la science « Première partie : Les sciences mathématiques — Chapitre IV. L’espace et ses trois dimensions. »

Voilà qui met bien en évidence la relativité essentielle de l’espace. […] J’ai cherché en effet à mettre en évidence le rôle de l’expérience et à analyser les faits expérimentaux qui interviennent dans la genèse de l’espace à trois dimensions. […] Les souris japonaises n’ont que deux paires de canaux ; elles croient, paraît-il, que l’espace n’a que deux dimensions, et elles manifestent cette opinion de la façon la plus étrange ; elles se rangent en cercle, chacune d’elles mettant le nez sous la queue de la précédente, et, ainsi rangées, elles se mettent à tourner rapidement.

3166. (1890) L’avenir de la science « XXII » pp. 441-461

Comment en sortiraient-ils, en effet, ces misérables qui doutent du sérieux et qui, à chaque effort qu’ils feraient pour sortir de cette paralysie intellectuelle, seraient arrêtés par l’arrière-pensée qu’eux aussi vont se mettre au nombre de ces badauds dont ils ont ri jadis ? […] Et ces penseurs se mettent-ils activement aux affaires d’État, comme le fera plus tard la première génération du XIXe siècle ? […] Jean Journet, de nos jours, a été mis à Bicêtre ; or Jean Journet ne croit pas faire de miracles, parler des langues qu’il n’a pas apprises, avoir été au troisième ciel, etc.

3167. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Appendice »

J’ai pris une chambre comme pensionnaire libre dans une institution, près du Luxembourg, et quelques répétitions de mathématiques et de littérature dont je me suis chargé me mettent à peu près, comme l’on dit, au pair. […] Je regrette de n’avoir pas le temps d’achever et de mettre en ordre cette classification. […] J’aurais pu mettre dans la classification que je faisais tout à l’heure une catégorie de plus : ceux qui ne voient rien au-dessus de l’action et prennent le christianisme comme un moyen d’action, esprits communs, si on les compare au penseur.

3168. (1913) La Fontaine « III. Éducation de son esprit. Sa philosophie  Sa morale. »

Un peu plus tard, semble-t-il, il s’est mis à Horace, puisqu’il dit avec beaucoup de netteté : Horace, un peu plus tard, me dessilla les yeux. […] Jupin, pour chaque état, mit deux tables au monde : L’adroit, le vigilant et le fort… Voilà les rois du monde. […] Le mulet succombe sous le faix, et sa charge est mise sur le dos du cheval.

3169. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LA REVUE EN 1845. » pp. 257-274

Sans entrer dans d’incroyables détails qu’il est mieux d’ensevelir, s’il se peut, comme des infirmités de famille, et en ne touchant qu’à celles que la querelle du moment dénonce, il suffira de faire remarquer que, dans une Revue où le poëte existe, il tend naturellement à dominer, et les conditions au prix desquelles il met sa collaboration ou sa seule présence (qu’il le médite ou non) sont ou deviennent aisément celles d’un dictateur. […] nous mettons là le doigt sur le point périlleux.

3170. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Le Brun »

La noble façon dont il adressa mademoiselle Corneille à Voltaire, la respectueuse indépendance qu’il maintint en face de ce monarque du siècle, le soin qu’il mit toujours à se distinguer de ses plats courtisans, l’amitié pour Buffon, qu’il professait devant lui, ce sont là des traits qui honorent une vie d’homme de lettres. […] « Je ne crois pas, écrivait Ginguené au rédacteur du journal le Modérateur (22 janvier 1790), que nous ayons beaucoup de vers à mettre au-dessus de cette strophe. » Et Andrieux, l’Aristarque, n’en disconvenait pas ; il avouait que si tout avait été aussi beau, il aurait fallu rendre les armes.

3171. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre premier. De la première époque de la littérature des Grecs » pp. 71-94

Les poètes grecs en général mettaient peu de combinaison dans leurs écrits ; la chaleur du climat, la vivacité de leur imagination, les louanges continuelles qu’ils recevaient, tout conspirait à leur donner une sorte de délire poétique qui leur inspirait la parole, comme les compositeurs italiens trouvent les airs en modifiant eux-mêmes leur organisation par des accords enivrants. […] Nos grands écrivains ont mis dans leurs vers les richesses de notre siècle ; mais toutes les formes de la poésie, tout ce qui constitue l’essence de cet art, nous l’empruntons de la littérature antique, parce qu’il est impossible, je le répète, de dépasser une certaine borne dans les arts, même dans le premier de tous, la poésie.

3172. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre VIII. De l’éloquence » pp. 563-585

de mettre enfin au service du pouvoir injuste cette sorte de talent sans conscience, qui prête aux hommes puissants les idées et les expressions comme des satellites de la force, chargés de faire faire place en avant de l’autorité ! […] Ces erreurs subsisteront tant que la langue de la logique ne sera pas fixée de la manière la plus positive, et mise à la portée du plus grand nombre.

3173. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre I. Origine des privilèges. »

Secrétaires, conseillers, théologiens, ils participent aux édits, ils ont la main dans le gouvernement, ils travaillent par son entremise à mettre un peu d’ordre dans le désordre immense, à rendre la loi plus raisonnable et plus humaine, à rétablir, ou à maintenir la piété, l’instruction, la justice, la propriété et surtout le mariage. […] Sa maison n’est qu’un camp et un refuge ; on a mis de la paille et des tas de feuilles sur le pavé de la grande salle ; c’est là qu’il couche avec ses cavaliers, ôtant un éperon quand il a chance de dormir ; les meurtrières laissent à peine entrer le jour ; c’est qu’il s’agit avant tout de ne pas recevoir des flèches.

3174. (1766) Le bonheur des gens de lettres : discours [graphies originales] « Le Bonheur des gens de lettres. — Premiere partie. » pp. 12-34

Mais s’il use de cette sage liberté qui donne tant de ressort à l’ame, & sans laquelle on ne produit rien de grand, il méconnoît cette indépendance superbe qui se met au-dessus des Loix, & veut briser les liens qui unissent les hommes ; la licence qui égare l’esprit est l’idole des scélérats, elle est l’opposé de la liberté ; peut-elle avoir des attraits pour un cœur raisonnable ? […] A ce mot je vois frémir les ames foibles qui redoutent la vie ; ames infortunées qui n’existent plus dès que les molles voluptés les abandonnent ; tristes victimes de leur lâcheté, dévouées à la crainte & nées pour l’impuissance ; sans doute elle ne sont point faites pour connoître ce courage mâle qui émousse la pointe de l’infortune, résiste aux revers, triomphe des evénemens, & met au rang des plus précieux trésors l’indépendance & l’honneur.

3175. (1842) Essai sur Adolphe

Essai sur Adolphe Si Benjamin Constant n’avait pas marqué sa place au premier rang parmi les orateurs et les publicistes de la France, si ses travaux ingénieux sur le développement des religions ne le classaient pas glorieusement parmi les écrivains les plus diserts et les plus purs de notre langue ; s’il n’avait pas su donner à l’érudition allemande une forme élégante et populaire, s’il n’avait pas mis au service de la philosophie son élocution limpide et colorée, son nom serait encore sûr de ne pas périr : car il a écrit Adolphe. […] Adolphe est las de lui-même et de sa puissance inoccupée ; il aspire à vouloir, à dominer, à parler pour être compris, à marcher pour être suivi, à aimer pour mettre à l’ombre de sa puissance une volonté moins forte que la sienne, et qui se confie en obéissant.

3176. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre I : Des sens, des appétits et des instincts. »

Bain est de leur avis ; nous avons même vu qu’il semble mettre le toucher au-dessous de l’ouïe. […] Le système nerveux peut ainsi se comparer à un orgue, dont les soufflets sont constamment pleins d’air, et se déchargent dans telle ou telle direction, selon les touches particulières qui sont mises en jeu.

3177. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXVI » pp. 279-297

Voulant être distinguée du roi, lui être agréable, parce qu’elle l’aimait, mais voulant son estime et conserver le respect d’elle-même, pouvait-elle employer des moyens à l’usage des femmes ordinaires, mettre en pratique cet art de plaire, cet art de la cour, qui comprend l’art de nuire à tout ce qui n’est pas soi ; à intriguer contre une favorite a qui et le doit sa place ; à lui tendre des pièges, à lui opposer d’autres femmes dont elle pourra avoir bon marché, à rechercher les occasions de s’introduire près du maître, de surprendre ses regards, de les attirer par des soins et des parures qui déguisent son âge ; à se faire vanter, célébrer par des prôneurs ; à se distinguer tantôt par la finesse de la louange, tantôt par son enthousiasme, toujours par l’à-propos ; à rappeler d’une dis tract ion, à faire revenir d’un caprice par des bouderies, par des querelles, par des minauderies ; en un mot, à pratiquer le manège d’une coquetterie subalterne ? […] Les nourrices ne mettaient la main à rien, de peur d’être fatiguées et que leur lait ne fût moins bon.

3178. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface du « Roi s’amuse » (1832) »

Il ne restait plus qu’a le mettre, lui poëte, à la Bastille. […] Cette immoralité, cette obscénité, la voilà mise à nu.

3179. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Ce que tout le monde sait sur l’expression, et quelque chose que tout le monde ne sait pas » pp. 39-53

Il existait en marbre ou sur la toile un modèle donné ; et celui qui aveuglé par sa passion s’avisait de comparer quelque figure commune avec la Vénus de Gnide ou de Paphos, était aussi ridicule que celui qui parmi nous oserait mettre quelque petit nez retroussé de bourgeoise à côté de madame la comtesse de Brionne : on hausserait les épaules, et on lui rirait au visage. […] Que serait-ce donc si ces figures ne se présentaient jamais à la vue sans réveiller un cortège d’idées douces, voluptueuses, agréables qui missent les sens et les passions en jeu ?

3180. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Nièces de Mazarin » pp. 137-156

Le moraliste du xixe  siècle met sa gravité à l’abri derrière l’éventail de cette commère charmante, à qui l’opinion a pardonné d’être naïvement la plus immorale des créatures. […] Et, cependant, Renée n’avait besoin de se mettre derrière personne.

3181. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre V. Les figures de lumière »

., immédiatement ceux-ci se rétracteraient en OB, puisque la ligne de lumière ne serait plus aperçue alors en imagination, mais en réalité, et que le système, jusque-là mis en mouvement par la seule pensée, revendiquerait son immobilité de fait. […] Mais le fait que, consciemment ou non, la théorie de la Relativité substitue au temps des lignes de lumière met en pleine évidence un des principes de la doctrine.

3182. (1915) La philosophie française « I »

On devait y être porté par la tendance même des philosophes à mettre leur pensée sous une forme systématique, car le « système » par excellence est celui qui a été, préparé par Platon et Aristote, définitivement constitué et consolidé par les néo-platoniciens ; et il serait aisé de montrer (nous ne pouvons entrer dans le détail de cette démonstration) que toute tentative pour bâtir un système s’inspire par quelque côté de l’aristotélisme, du platonisme ou du néo-platonisme. […] Il est temps de mettre ce penseur à sa vraie place, — une des premières, — parmi les philosophes du XIXe siècle.

3183. (1874) Premiers lundis. Tome II « Le poète Fontaney »

De même je ne conseillerais à personne de s’y confier assez pour y mettre toutes ses espérances et pour vouloir faire par là son chemin… »

3184. (1861) La Fontaine et ses fables « Conclusion »

Mais, si on l’ouvre pour examiner l’arrangement intérieur de ses organes on y trouve un ordre aussi compliqué que dans les vastes chênes qui la couvrent de leur ombre ; on la décompose plus aisément ; on la met mieux en expérience ; et l’on peut découvrir en elles les lois générales, selon lesquelles toute plante végète et se soutient.

3185. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Barbey d’Aurevilly, Jules (1808-1889) »

Émile Zola Il me semble que Cyrano de Bergerac, que Théophile Gautier a mis dans ses Grotesques, est un ancêtre de M. 

3186. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hervilly, Ernest d’ (1839-1911) »

Vous raconter la comédie d’Ernest d’Hervilly, si pimpante, si subtile, si japonaise, c’est-à-dire si parisienne, et qu’une mise en scène adorablement exotique pimente si vivement ?

3187. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mikhaël, Éphraïm (1866-1890) »

Le premier acte de cette œuvre, mis en musique par Emmanuel Chabrier, fut interprété, pour la première fois, le dimanche 31 janvier 1897, aux Concerts Lamoureux.

3188. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Pilon, Edmond (1874-1945) »

Vous ne mettez jamais pour rien le doigt sur plusieurs touches successives.

3189. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Roumanille, Joseph (1818-1891) »

Pendant les années d’agitation et d’angoisses qui suivirent la Révolution de février, et où la fièvre démocratique, chauffée au feu des imaginations méridionales, propageait, dans nos campagnes, sous leurs formes les plus brutales, toutes les théories communistes, Roumanille, fils d’un jardinier et modeste employé dans une imprimerie d’Avignon, renonçant aux douces familiarités de sa muse bien-aimée, se mit à écrire, en provençal, de petits livres populaires qui firent plus, dans nos départements, pour la cause de l’ordre et du bon sens, que toutes les publications.

3190. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Première partie. Plan général de l’histoire d’une littérature — Chapitre III. Les questions que l’historien doit se poser. » pp. 16-17

Il s’ensuit que l’historien, sous peine de se perdre dans la myriade des changements infiniment petits et infiniment nombreux qui se succèdent dans la durée, doit déterminer des points de repère, ceux par exemple où une force nouvelle intervient, où un mouvement d’esprits se met en branle, s’arrête, ou bien change de direction.

3191. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 521-526

Ce n’est certainement pas pour avoir fait celui qui termine un Quatrain à la louange du Maréchal de Saxe, où le Poëte Géometre, après avoir mis en pieces deux Héros de l’antiquité, César & Scipion, dit que Maurice eut pour sa part, La tête du premier, & le bras du second.

3192. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 145-150

On devoit pardonner volontiers des plagiats à un homme qui en convenoit d’aussi bonne grace ; mais on est doublement en droit de les reprocher à ceux qui, les multipliant sans mesure, trouvent mauvais qu’on les mette en évidence.

3193. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 202-207

On trouve du moins à s’instruire dans ses Considérations * & dans ses Mémoires ; avantage qu’on chercheroit en vain chez la plupart de ceux qui ont voulu mettre la Philosophie en belles phrases.

3194. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 220-226

La modération & l’équité sont toujours indispensables dans la critique, quand d’ailleurs le même homme n’en met point dans la louange qu’il plaît de départir.

3195. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 453-457

qu’il est aussi permis aux Journalistes & aux Esprits éclairés qui en sentent les défauts, de les mettre en évidence, pour en corriger les autres, qu’il est permis à un Juge de rappeler à l’autorité des Loix quiconque s’en écarte ?

3196. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 122-127

De là cette fureur de mettre à contribution toutes les Langues, de farcir ses Poésies de vocables Grecs, Latins, Italiens, Languedociens, Normands, Picards.

3197. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 387-391

.… Prendre un ton emphatique pour parler de la vertu, mais ne la mettre que dans vos discours & jamais dans vos actions.… voilà le grand mystere de votre Philosophie ». pag. 443.

3198. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre VII. Le Fils. — Gusman. »

L’autorité qu’emploie Alvarez est d’une autre espèce : il met en oubli son âge et son pouvoir paternel, pour ne parler qu’au nom de la religion.

3199. (1830) Cours de philosophie positive : première et deuxième leçons « Avertissement de l’auteur »

Elle ne sera mise définitivement en circulation qu’avec la seconde partie, que j’espère pouvoir faire paraître à la fin de l’année 1830.

3200. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Loutherbourg » pp. 224-226

comme je les mettrais sous mon habit si l’on ne me regardait pas !

3201. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Julliart » pp. 176-177

Mais, me dira-t-il, est-ce que celui où j’ai mis sur le devant une fuite en égypte vous déplaît ?

3202. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — V. L’avare et l’étranger »

Passe-moi un nôma (daba, pioche ou houe). » Et il se mit à creuser une fosse.

3203. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Pierre Mancel de Bacilly »

Quand on a seulement ouvert son ouvrage, on est bien vite rassuré sur le sens d’un titre que l’auteur n’a pas mis au front de ses idées sans dessein.

3204. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre premier »

Chacun dit : « Je ne me mettrai pas » fût-ce par une pensée secrète, en travers de rien qui travaille au salut de la patrie. » Le prêtre songe de l’instituteur et l’instituteur du prêtre : « Puissé-je m’être trompé, chaque fois que j’ai douté de celui qui m’a méconnu. » Et tout Français qui voit le fils de son adversaire monter dans le train et prendre le chemin de la frontière, forme dans son cœur des vœux pour le jeune soldat et salue ses parents.

3205. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Note. »

. — Mme Récamier se met en tête de me rendre amoureux d’elle.

3206. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires de madame de Genlis sur le dix-huitième siècle et la Révolution française, depuis 1756 jusqu’à nos jours — II »

Toute la société se mit du complot ; depuis longtemps, en effet, la constance du duc d’Orléans pour une courtisane l’avait retiré de la bonne compagnie des femmes, et celles-ci désiraient fort, en lui procurant une maîtresse honnête, reconquérir les avantages de son intimité.

3207. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Introduction. Origines de la littérature française — 2. Caractère de la race. »

Quant aux Francs, ce n’est pas par ce qu’ils ont mis en nous de l’esprit germanique que leur action se marque.

3208. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Daudet, Alphonse (1840-1897) »

. — Si Alphonse Daudet n’est pas resté attaché à la forme du vers, du moins il n’a pas à désavouer sa tentative, il a mis la subtile empreinte de ses premières années sur ces chansons inconsciemment chantées.

3209. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Madeleine, Jacques (1859-1941) »

Son volume intéresse ; et ceux qui connaissent la collection Lemerre comprendront tout l’éloge que je mets en ce mot.

3210. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Sainte-Beuve, Charles-Augustin (1804-1869) »

Il quitte Baïf, revient à Mme Swetchine, se repose avec Théophile Gautier, caresse l’antiquité, coquette avec la nouveauté, effleure tout, illumine tout, ne se contredit jamais, se modifie sans cesse, fait étinceler les points saillants, arrive aux profondeurs, ne s’y attarde pas, et ne s’arrête que si un scrupule de millésime ou une erreur de nom propre le met en désarroi.

3211. (1882) Qu’est-ce qu’une nation ? « III »

La sécession, me direz-vous, et, à la longue, l’émiettement des nations sont la conséquence d’un système qui met ces vieux organismes à la merci de volontés souvent peu éclairées.

3212. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 296-302

Trop de penchant à mettre de l’esprit dans ses pensées, trop d’affectation dans la symétrie du style, trop de goût pour les antithèses, ne pourroient produire & n’ont peut-être déjà que trop produit de mauvaises copies, parce qu’il est plus facile d’imiter l’esprit des grands Orateurs, que leur génie.

3213. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 381-387

Le seul défaut qu’on pourroit lui reprocher, est d’y avoir mis quelquefois trop d’esprit.

3214. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 532-537

Les Poésies sacrées de M. de Pompignan seront vengées du froid ridicule d’un bon mot, par quiconque est capable de reconnoître les vraies beautés par-tout où elles se trouvent ; ou, pour mieux dire, elles le sont déjà par l’empressement qu’on met à les rechercher.

3215. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 240-246

Comme il s'en faut que cet Auteur jouisse de toute sa célébrité, nous croyons devoir nous arrêter un peu plus sur son article, afin de donner une juste idée de ses talens, qui le mettent bien au dessus de la plupart des prétendus Beaux-Esprits, en vogue de nos jours.

3216. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préface des « Voix intérieures » (1837) »

Il faut, pour cela, qu’il jette sur ses contemporains ce tranquille regard que l’histoire jette sur le passé ; il faut que, sans se laisser tromper aux illusions d’optique, aux mirages menteurs, aux voisinages momentanés, il mette dès à présent tout en perspective, diminuant ceci, grandissant cela.

3217. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface d’« Angelo, tyran de Padoue » (1835) »

Mettre en présence, dans une action toute résultante du cœur, deux graves et douloureuses figures, la femme dans la société, la femme hors de la société ; c’est-à-dire, en deux types vivants, toutes les femmes, toute la femme.

3218. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « De la comédie chez les Anciens. » pp. 25-29

Dans la comédie de caractère, l’auteur dispose son plan de manière que les situations mettent en évidence le caractère qu’il veut peindre : expressions, sentiments, actions, incidents, épisodes, tout doit se rapporter à cet unique but.

3219. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre premier. Que le Christianisme a changé les rapports des passions en changeant les bases du vice et de la vertu. »

S’il existait une religion qui s’occupât sans cesse de mettre un frein aux passions de l’homme, cette religion augmenterait nécessairement le jeu des passions dans le drame et dans l’Épopée ; elle serait plus favorable à la peinture des sentiments que toute institution religieuse qui, ne connaissant point des délits du cœur, n’agirait sur nous que par des scènes extérieures.

3220. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre troisième. Histoire. — Chapitre IV. Pourquoi les Français n’ont que des mémoires. »

Cette coutume de mettre notre existence dans un cercle borne nécessairement notre vue, et rétrécit nos idées.

3221. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre IV. Des Ecrits sur la Poétique & sur divers autres genres de Littérature. » pp. 216-222

Justin le martyr, l’hérétique Tertullien, &c. sont mis à contribution par cet auteur pour appuyer des choses qui n’ont pas besoin d’autorité.

3222. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Hallé  » pp. 127-130

Quand un artiste introduit dans une composition un saint embrasé de l’amour de Dieu et prêchant sa loi à des peuples et qu’il lui met un bonnet carré à la main, comme à un homme qui entre dans une compagnie et qui la salue poliment, je lui dirais volontiers, Vous vous mêlez d’un métier de génie et vous n’êtes qu’un butor.

3223. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Vien » pp. 202-205

Ce sont comme autant de madrigaux de l’Anthologie mis en couleurs.

3224. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 39, en quel sens on peut dire que la nature se soit enrichie depuis Raphaël » pp. 387-392

L’inscription mise sous ces chevaux et qui nous assure que l’un est l’ouvrage de Phidias, et l’autre l’ouvrage de Praxitéle, est une imposture.

3225. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 43, que le plaisir que nous avons au théatre n’est point produit par l’illusion » pp. 429-434

Une tragedie touche ceux qui connoissent le plus distinctement tous les ressorts que le génie du poëte et le talent du comédien mettent en oeuvre pour les émouvoir.

3226. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 49, qu’il est inutile de disputer si la partie du dessein et de l’expression, est préferable à celle du coloris » pp. 486-491

Celui qui défend la superiorité du Poussin, ne conçoit pas donc qu’on puisse mettre au-dessus d’un poëte, dont les inventions lui donnent un plaisir sensible, un artisan qui n’a sçû que disposer des couleurs, dont l’harmonie et la richesse lui font un plaisir médiocre.

3227. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Law »

Par suite de ses préoccupations d’économiste, sans doute, Cochut a voulu surtout tracer l’idée nette du système, et il l’a pris à part, l’isolant de tous les faits généraux et ne l’expliquant que par l’état où les prodigalités de Louis XIV avaient mis les finances et la monarchie ; et, pour parler la langue économique, il s’est très bien tiré de ce dix-huitième d’épingle historique.

3228. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Appendice. Histoire raisonnée des poètes dramatiques et lyriques » pp. 284-285

Le mot satyre signifiaient originairement en latin, mets composés de divers aliments (Festus)94.

3229. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre cinquième. Retour des mêmes révolutions lorsque les sociétés détruites se relèvent de leurs ruines — Chapitre III. Coup d’œil sur le monde politique, ancien et moderne, considéré relativement au but de la science nouvelle » pp. 371-375

Mais sous la zone tempérée, où la nature a mis dans les facultés de l’homme un plus heureux équilibre, nous trouvons, en partant des extrémités de l’Orient, l’empire du Japon, dont les mœurs ont quelque analogie avec celles des Romains pendant les guerres puniques ; c’est le même esprit belliqueux, et si l’on en croit quelques savants voyageurs la langue japonaise présente à l’oreille une certaine analogie avec le latin.

3230. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIVe entretien. Alfred de Vigny (1re partie) » pp. 225-319

Il accompagna, à cheval, le roi et les princes jusqu’à Béthune ; fut licencié avec nous, le 31 décembre de la même année, après le retour du roi, qui fit le sacrifice de ces corps privilégiés à sa réconciliation avec l’armée de Bonaparte ; il entra, comme sous-lieutenant d’abord, dans la légion de Seine-et-Oise, et un an après avec le même grade dans la garde royale, au 5e régiment d’infanterie : devenu capitaine après treize ans de service, sa faible constitution le fit mettre au traitement de réforme. […] Puis il s’alla jeter de bonne grâce à genoux devant le bloc, embrassa le poteau, mit le cou dessus, leva les yeux au ciel, et demanda au confesseur : — Mon Père, serai-je bien ainsi ? […] Ouvrir son cœur pour le mettre en étalage sur un comptoir ! […] Il jette la boîte. — Il court après, se met à genoux et pleure. […] Elle se met en marche et vient s’asseoir lisant sa Bible et balbutiant tout bas des paroles qu’on n’entend pas.

3231. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 juin 1886. »

Cette représentation, qui se fera pendant l’été de 1873, aura lieu à Bayreuth, Dans ce but un théâtre spécial doit être exigé ; les arrangements intérieurs répondront à mes buts spéciaux, la solidité et l’extérieur seront selon les moyens qui auront été mis à ma disposition. […] La Fontaine n’a pas été mise en librairie ; elle est destinée par l’auteur uniquement à ses amis. […] La Fontaine, en faisant une traduction rhythmique adaptée à la musique, a pris un système de transposition littéraire totale » il n’a point voulu reproduire en un équivalent français le vers allemand avec ses allitérations, cadences et rimes ; il a négligé la littéralité minutieuse ; et, au lieu du très spécial style Wagnérien, il a mis le style de notre langage courant. […] Wagner est loin de prêter le flanc à une calomnie semblable à celle qui voulut attribuer à Gluck, un mot impie, prétendant qu’on entendait le grand maître s’écrier avant de se mettre à composer : « Mon Dieu, faites-moi la grâce d’oublier que je suis musicien !  […] Le sujet, l’attribut, nous avons mis ces choses aux mêmes cas : nous avons adopté une syntaxe ridicule, où s’étale, innombrable et monstrueuse, l’exception.

3232. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XII : Distribution géographique (suite) »

Des échassiers qui fréquentent les rivages marécageux des étangs, venant soudain à être mis en fuite, sont les plus exposés à avoir souvent les pieds terreux. […] Il faut aussi mettre en compte que parmi les productions d’eau douce plusieurs, et même un grand nombre, sont peu élevées dans la série des organismes ; et comme nous avons des raisons de croire que les êtres inférieurs changent et se modifient moins vite que d’autres plus élevés, il doit on résulter que les espèces aquatiques jouissent en moyenne d’un temps plus long que les autres pour accomplir leurs migrations. […] J’ai compulsé avec soin les plus anciens voyages, et n’ai pas encore fini mes recherches ; mais jusqu’ici, à l’exception des quelques animaux domestiques que possèdent les indigènes, la Nouvelle-Zélande mise à part, je n’ai pas trouvé un seul témoignage certain de l’existence d’un mammifère terrestre sur des îles éloignées de plus de 300 milles d’un continent ou d’une grande île ; et beaucoup d’îles, situées à une distance beaucoup moindre, en sont de même totalement dépourvues. […] L’affinité étrange constatée entre la végétation du sud-ouest de l’Australie et du cap de Bonne-Espérance s’expliquerait de la même manière par l’immigration facile des formes tempérées et tropicales sur ces deux continents, rattachés à la zone turride, l’un par des terres continues et l’autre par de nombreuses chaînes d’îles, et peut-être mis en communication réciproque par quelque terre émergée à une époque où le renflement équatorial, formant un angle considérable avec sa direction actuelle, devait porter la masse principale des eaux depuis la Chine, par le centre de l’Afrique, jusqu’à l’Amérique du Sud.

3233. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. »

Appelé au printemps de cette année 1807 à rejoindre la partie du Corps diplomatique de Paris qui avait suivi le quartier général de Napoléon, il nous dit un mot des moyens et des ressorts qui furent mis en jeu auprès du ministre des Affaires étrangères, M. de Talleyrand. […] M. de Senfft se décida, en cette occasion, à mettre sa maison sur un plus grand pied que par le passé et à représenter, à proprement parler, ce qu’il n’avait pas fait encore.

3234. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « GLANES, PÖESIES PAR MADEMOISELLE LOUISE BERTIN. » pp. 307-327

Pour eux n’épargnez rien ; mettez à toute branche Et l’ombre de la feuille, et la fleur, et le fruit, Et l’ivresse à la coupe où leur lèvre se penche, Sans la tristesse qui la suit ! […] Nous voilà bien loin de notre point de départ et des Glanures qui nous ont mis en train.

3235. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Léonard »

Il mettait le pied sur le vaisseau qui devait l’y ramener encore, lorsqu’il expira. […] L’intérêt des Pays-Bas était de mettre un mur entre la France et Liège pour fermer cette voie d’écoulement à notre commerce.

3236. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre IV. De l’amour. »

Une sorte de ridicule s’est attaché à ce qu’on appelle des sentiments romanesques, et ces pauvres esprits, qui mettent tant d’importance à tous les détails de leur amour propre, ou de leurs intérêts, se sont établis comme d’une raison supérieure à ceux dont le caractère a transporté dans un autre l’égoïsme, que la société considère assez dans l’homme qui s’occupe exclusivement de lui-même. […] Sans doute, celle qui a rencontré un homme dont l’énergie n’a point effacé la sensibilité ; un homme qui ne peut supporter la pensée du malheur d’un autre, et met l’honneur aussi dans la bonté ; un homme fidèle aux serments que l’opinion publique ne garantit pas, et qui a besoin de la constance pour jouir du vrai bonheur d’aimer ; celle qui serait l’unique amie d’un tel homme, pourrait triompher au sein de la félicité, de tous les systèmes de la raison.

3237. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre VII. De l’esprit de parti. »

On doit d’abord distinguer l’esprit de parti de l’amour propre, qui fait tenir à l’opinion qu’on a soutenue ; il en diffère tellement qu’on peut même quelquefois mettre ces deux penchants en opposition. […] Ce sont des esprits crédules, soit qu’ils se passionnent pour ou contre les vieilles erreurs ; et leur violence, sans arrêt, leur donne le besoin de se placer à l’extrême de toutes les idées, pour y mettre à l’aise leur jugement et leur caractère.

3238. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre IV. Poésie lyrique »

Il y en avait qui mettaient en scène les deux amants, ou bien la fille avec sa mère, la femme avec son mari : d’autres, comme celles d’Aalis ou de Robin, qui furent très populaires, étaient des histoires en couplets, des contes chantés, des romances. […] Avec cette strophe et la pièce qui la contient ce sont les idées générales qui font leur entrée dans notre littérature : nous mettons le pied dans la voie qui mène à Malherbe.

3239. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Gaston Paris et la poésie française au moyen âge »

Mais le chef-d’œuvre de son art, c’est peut-être le morceau où il en a mis le moins, je veux dire la leçon sur Paulin Paris. […] Il n’a point les ardeurs naïves, les admirations intolérantes de tel romanisant qui, parce qu’il a consacré sa vie à cette littérature, ne voit rien au monde de plus beau et, pour peu qu’on le pousse, vous met la Chanson de Roland au-dessus de l’Iliade et le Mystère de la Passion au-dessus des tragédies de Racine.

3240. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre VIII. Les écrivains qu’on ne comprend pas » pp. 90-110

Seulement — il faut bien mettre les pieds dans le plat, et prendre à notre tour l’offensive, — seulement pour l’ordinaire, on ne sait pas le français, mon cher confrère3. […] Et comme son retard le met de plain-pied avec les écrivains immédiatement antérieurs, dont vous êtes immédiatement jaloux, vous clamez qu’il ne suit plus et qu’il ne sait plus.

3241. (1890) L’avenir de la science « XII »

Ne serait-il pas urgent de mettre à profit les cinq ou six hommes de la génération actuelle qui seuls seraient compétents pour mettre en lumière ces précieux documents ? […] On conçoit d’après cela un état où écrire ne formerait plus un droit à part, mais où des masses d’hommes ne songeraient qu’à faire entrer dans la circulation telles ou telles idées, sans songer à y mettre l’étiquette de leur personnalité.

3242. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre II : L’intelligence »

Mais cette tentative se détruit elle-même, car cette contemplation est un effort de l’esprit174. » Que l’on remarque d’ailleurs ce que nous mettons de nous-mêmes dans l’acte de la perception. […] Bain, autant qu’on peut l’entrevoir à travers ces remarques, ne mécontenterait pas un idéaliste puisqu’elle aboutirait à mettre dans l’esprit une partie de la réalité du monde : le sentant et le senti étant pour lui, non pas deux termes, mais deux parties complémentaires d’un même tout.

3243. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXII » pp. 355-377

Vous verrez de quelle manière se tournera cette amitié. » Le 28 juin, « Vous jugez très bien de Quantova (madame de Montespan) ; si elle peut ne point reprendre ses vieilles brisées, elle poussera sa grandeur au-delà des nues ; mais il faudrait qu’elle se mît en état d’être aimée toute l’année sans scrupule111 ; en attendant, sa maison est pleine de toute la cour ; les visites se font alternativement, et la considération est sans bornes. » Une autre lettre, du 3 juillet, porte : « Ah ! […] Une de nos folies a été de souhaiter de découvrir tous les dessous de cartes des choses que nous croyions voir et que nous ne voyions point, tout ce qui se passe dans les familles où nous trouverions de la haine, de la jalousie, de la rage, du mépris, au lieu de toutes les belles choses qu’on met au-dessus du panier ; et qui passent pour des vérités115.

3244. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre troisième. L’idée-force du moi et son influence »

L’unité que nous mettons dans nos sensations, l’ordre que nous leur imposons, cette fameuse « fonction synthétique » de la pensée, c’est en grande partie une fonction « sociale », un effet de l’action et de la réaction mutuelles entre l’individu et tous les êtres plus ou moins semblables à lui-même avec lesquels la nécessité de vivre le met en constante relation.

3245. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre III. Le cerveau chez l’homme »

En définitive, Gratiolet résume sa pensée en ces termes significatifs : « Au-dessus du poids nous mettons la forme, au dessus de la forme nous mettons l’énergie vitale, la puissance intrinsèque du cerveau. » M. 

3246. (1876) Du patriotisme littéraire pp. 1-25

Les autres nations peuvent mettre en ligne à tel ou tel moment des prosateurs de premier ordre comme des tirailleurs isolés : chez nous seulement, depuis le narrateur de la conquête de Constantinople jusqu’au romancier de Mauprat, la Prose s’appelle légion et se présente comme une armée toujours accrue de renforts et continuellement en marche. […] elles ne le sont que pour les rimeurs maladroits qui ne savent pas user des ressources infinies que le clavier de la langue poétique française met à leur disposition, « ce clavier immense » comme a dit Sainte-Beuve, dans une introduction à un recueil de « poètes français ».

3247. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Essai, sur, les études en Russie » pp. 419-428

On étudie aussi un peu sa langue maternelle ; et enfin, dans les hautes classes, après avoir exercé la rhétorique et tous ses tours de passe-passe, on prend une teinture de philosophie, avec laquelle on se met en chemin pour l’université. […] On voit, du reste, par son Voyage en Hollande, que, s’il n’était pas ami du déplacement, lorsqu’il se déplaçait, il mettait son temps à profit pour se rendre compte, non des particularités pittoresques, mais des choses utiles : mœurs, coutumes, produits, revenus, industrie, établissements publics, etc.

3248. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Première partie — Chapitre III. Les explications anthropologique, idéologique, sociologique »

Est-ce dans nos nations modernes où chaque recherche met au jour des couches ethniques différentes ? […] Mais ce ne serait encore qu’une loi empirique. — Supposons donc que nous ayons montré comment, lorsque les sociétés affectent une forme centralisée, les esprits qui les composent se trouvent naturellement amenés, en vertu des lois de la formation des idées, à penser, non par classes, mais par individus, et à mettre, vis-à-vis du centre unique, tous les individus sur le même plan, alors nous aurions pleinement compris la relation établie.

3249. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXIII. Des éloges ou panégyriques adressés à Louis XIV. Jugement sur ce prince. »

C’est à elle que Louis XIV dut les principales qualités de son âme ; cette droiture, ennemie de la dissimulation, et qui ne sut presque jamais s’abaisser à un déguisement ; cet amour de la gloire qui, en élevant ses sentiments, lui donnait de la dignité à ses propres yeux, et lui faisait toujours sentir le besoin de s’estimer ; cette application qui, dans sa jeunesse même, fut toujours prête à immoler le plaisir au travail ; cette volonté qui savait donner une impulsion forte à toutes les volontés, et qui entraînait tout ; cette dignité du commandement qui, sans qu’on sache trop pourquoi, met tant de distance entre un homme et un homme, et au lieu d’une obéissance raisonnée, produit une obéissance d’instinct, vingt fois plus forte que celle de réflexion ; ce désir de supériorité qu’il étendait de lui à sa nation, parce qu’il regardait sa nation comme partie de lui-même, et qui le portait à tout perfectionner ; le goût des arts et des lettres, parce que les lettres et les arts servaient, pour ainsi dire, de décoration à tout cet édifice de grandeur ; enfin, la constance et la fermeté intrépide dans le malheur, qui, ne pouvant diriger les événements, en triomphait du moins, et prouva à l’Europe qu’il avait dans son âme une partie de la grandeur qu’on avait cru jusqu’alors n’être qu’autour de lui. […] Il répandit sur toute sa personne, et mit dans ses regards même, une affectation de grandeur qui avait un peu besoin de sa réputation et de son rang pour ne pas étonner, et semblait vouloir commander le respect plutôt que l’attendre.

3250. (1889) La littérature de Tout à l’heure pp. -383

Et c’est ainsi qu’autour des palais et des temples, les maisons mettent quelque pudeur à n’être point trop offensantes pour l’auguste voisinage. […] En toutes choses on met, — l’image populaire est si juste !  […] La foule est effrayante des ouvriers en rimes qui font le vers à merveille : mais qu’y met-on ? […] Les pêcheurs, que le flux a mis en fuite, croient volontiers et disent que le reflux est la conséquence du flux. […] Il voudrait mettre « tout un livre dans une page, toute une page dans une phrase et cette phrase dans un mot ».

3251. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XLVIII » pp. 188-192

Peu s’en faut qu’il ne les mette sur le chemin d’Athalie et n’y voie des degrés au temple.

3252. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXI » pp. 281-285

Lorsque nous exposions, dans notre dernier numéro, les inconvénients pour la littérature de ces achats à l’enchère, de ces taux prodigieux, disproportionnés, qu’on met aux œuvres, nous ne faisions que pressentir ce qui éclate aujourd’hui.

3253. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXIV » pp. 294-298

Villemain ; la médecine, cette fois comme tant d’autres, a été mise en défaut, mais dans un sens plus favorable que d’ordinaire : elle pronostiquait au plus grave, et la nature l’a déjouée.

3254. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXXI » pp. 323-327

M. de Barante a mis en tête du volume une notice qui est un chapitre intéressant d’histoire.

3255. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Appendice. »

» Il fut ou parut être la dupe de cette espièglerie, reprocha à Vignon d’avoir omis ce texte important, reçut ses excuses et mit le manuscrit dans sa poche… » En prenant sur moi de citer cette jolie lettre qui vaut mieux que tous les commentaires et qui en dispense, je ne puis m’empêcher de nommer et de remercier M. 

3256. (1874) Premiers lundis. Tome I « Charles »

Dans l’entraînement, et pour ainsi dire la superstition de l’amour, il semble que tout ce qui nous environne se mette en harmonie avec notre pensée, et sympathise avec nos joies et nos peines.

3257. (1874) Premiers lundis. Tome II « Théophile Gautier. Fortunio — La Comédie de la Mort. »

Théophile Gautier notre rôle de juge et de donneur de conseils puisse sembler encore plus délicat, puisqu’on a bien voulu mêler de loin notre nom et notre exemple à son talent, il y a quelque chose qui met à Taise, c’est un sentiment envers lui et envers ses mérites poétiques, un sentiment de bon vouloir équitable, dont nous sommes sûr et dont nous espérons, malgré quelque sévérité, qu’il ne doutera pas.

3258. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Objections d’un moraliste contre l’exposition de 1900. » pp. 162-167

On va nous éventrer nos Champs-Élysées, mettre à bas ce bon vieux Palais de l’Industrie auquel nous étions faits et qui semblait la grande serre de ce beau jardin.

3259. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Augier, Émile (1820-1889) »

Que, dans Gabrielle, qui est une comédie d’une haute moralité, il mît hardiment, dans la bouche des personnages contemporains, le ferme alexandrin du xviie  siècle ; que, dans l’Aventurière, il fît passer, à travers ce même vers classique le souffle du lyrisme et de la fantaisie ; que, pris d’une vertueuse indignation, il marquât, dans le Mariage d’Olympe, la fille triomphante avec le fer rouge de la satire ; qu’après un regard épouvanté sur les progrès d’un luxe corrupteur, il dénonçât la courtisane mariée, la lionne pauvre ; — toujours il nous faisait admirer et applaudir des œuvres d’une composition solide et harmonieuse, d’un intérêt poignant et irrésistible.

3260. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bataille, Henry (1872-1922) »

Ce sont les impressions, que l’enfant garde, d’une heure vague pendant laquelle il n’était ni endormi, ni éveillé, cette heure au bout de laquelle sa mère l’emportait pour le mettre dans son petit lit.

3261. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Ghil, René (1862-1925) »

Vignier met aussi un peu d’eau claire dans le vin mystérieux de l’école.

3262. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Vicaire, Gabriel (1848-1900) »

Vicaire de mettre au service de cette chanson vivace une technique trop immobile, on peut se plaire et beaucoup à l’histoire de Fleurette, à celle du Joli Rossignol qui languit pour une rose et renaquit à la joie grâce à une jolie clochette, et surtout goûter le curieux travail d’art de Rainouart au Tinel, un exemple de fabliau renouvelé, alerte et neuf, volontairement exhaussé de quelques expansions lyriques peut-être, un peu bien brèves ; mais enfin, cela, en son but, tel quel, est réussi.

3263. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XVI » pp. 188-192

Les sociétés formées des débris de l’hôtel Rambouillet, les femmes de bonne compagnie, voient sans déplaisir Molière ramener au naturel les affectations de pruderie et de bel esprit ; mais elles continuent à mettre en honneur l’honnêteté, la décence des mœurs, la pureté et l’élégance du langage, et elles parviennent à en assurer le triomphe.

3264. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 189-194

Ce sera donc pour ne s’être pas assez défié de lui-même, pour avoir négligé les bons modeles, pour avoir embrassé trop de genres, pour s’être trop pressé de mettre au jour ce qui exigeoit encore du travail & des soins, qu’on ne tardera pas de voir les couronnes poétiques de M.

3265. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre XI. Le Guerrier. — Définition du beau idéal. »

Nous arrêterons un peu le lecteur sur ce sujet : il importe trop au fond de notre ouvrage, pour hésiter à le mettre dans tout son jour.

3266. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre troisième. Histoire. — Chapitre VIII. Bossuet historien. »

« Ce fut après le déluge que parurent ces ravageurs de provinces que l’on a nommés conquérants, qui, poussés par la seule gloire du commandement, ont exterminé tant d’innocents… Depuis ce temps, l’ambition s’est jouée, sans aucune borne, de la vie des hommes ; ils en sont venus à ce point de s’entretuer sans se haïr : le comble de la gloire, et le plus beau de tous les arts a été de se tuer les uns les autres179. » Il est difficile de s’empêcher d’adorer une religion qui met une telle différence entre la morale d’un Bossuet et d’un Tacite.

3267. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Doyen  » pp. 153-155

Il fallait pour cela leur donner encore plus de transparence, plus de légèreté, moins de corps et de solidité ; mais en revanche leur chercher un caractère divin, et les mettre dans une activité incroyable ; comme on les voit dans le morceau de Bouchardon où Ulisse évoque l’ombre de Tiresias, et où cette foule de démons étranges accourent à son sacrifice.

3268. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 14, qu’il est même des sujets specialement propres à certains genres de poësie et de peinture. Du sujet propre à la tragedie » pp. 108-114

L’épigramme peut tout au plus relever et mettre en son jour quelque circonstance brillante de ces évenemens ; elle peut nous en faire admirer quelque trait, mais elle ne peut nous y interesser. à peine en compte-t-on cinq ou six bonnes parmi les anciennes et les modernes qui roulent sur de pareils sujets.

3269. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — XII. L’homme touffu »

» Aïssata, en l’entendant, se mit à pousser des cris.

3270. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Gérard de Nerval »

Quelle académie, en Europe, mettra sérieusement au concours la question de savoir si l’illuminisme est un développement définitif de l’être mental, ou bien si c’en est une aberration ?

3271. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Furetière »

Prétendre qu’il a voulu forcer le trait jusqu’à le faire crier, et convulser la vérité jusqu’à la caricature, c’est le rapetisser comme artiste sans pouvoir historiquement légitimer la prétention qu’on met en avant.

3272. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « M. de Fontanes »

On mit en arrestation les envoyés lyonnais ; on se demandait qui les avait inspirés, qui avait pu faire à la Convention, par leur bouche, cette étrange et pathétique surprise. […] Plusieurs membres de l’Institut, dont j’étais le confrère avant le 18 fructidor, pourront vous attester que j’ai toujours mis, dans mes opinions et mon style, de la mesure, de la décence et de la sagesse. […] En vain le scrupule s’irrite, Dans ma retraite favorite, J’ai mis le buste de Vénus. […] Ce qui met M. de Fontanes au-dessus et à part de cette époque littéraire de l’Empire, c’est moins la puissance que la qualité de son talent, surtout la qualité de son goût, de son esprit ; et par là il était plus aisément retenu, dégoûté, qu’excité. […] On n’en finirait pas, si l’on voulait tout rechercher : il serait presque aussi aisé de savoir le compte des journaux où Charles Nodier a mis des articles, et il y faudrait l’investigation bibliographique d’un Beuchot.

3273. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXIXe entretien. Œuvres diverses de M. de Marcellus (2e partie) » pp. 5-63

Il y met en corps ce qui était en pages. […] XVIII Quoi qu’il en fût, M. de Marcellus, par esprit littéraire, et par esprit sérieusement chrétien, se mit à parcourir la Grèce nouvelle et l’Albanie, ni littéraire ni chrétienne, mais tour à tour, et selon le goût des Albanais, chrétienne ou mahométane comme son héros Scanderbeg, pour y chercher un nouvel Homère. […] Ils m’ont pris l’écuelle où je mettais mon lait ; ils ont pris ma flûte jusque dans mes mains.

3274. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVe entretien. Chateaubriand, (suite) »

« Prenez le René réel, ôtez-lui ce léger masque chrétien que M. de Chateaubriand lui a mis tout à la fin pour avoir droit de le faire entrer dans le Génie du Christianisme, revenez au pur René des Natchez, et la pièce de Lamartine pourra s’adresser à lui non moins justement qu’à lord Byron. » M.  […] ………… Ainsi, quand je partis tout trembla dans cette âme ; Le rayon s’éteignit et sa mourante flamme Remonta dans le ciel pour n’en plus revenir ; Elle n’attendit pas un second avenir, Elle ne languit pas de doute en espérance, Et ne disputa pas sa vie à la souffrance : Elle but d’un seul trait le vase de douleur, Dans sa première larme elle noya son cœur, Et, semblable à l’oiseau, moins pur et moins beau qu’elle Qui le soir, pour dormir, met son cou sous son aile, Elle s’enveloppa d’un muet désespoir, Et s’endormit aussi, mais, hélas ! […] Sa fortune ayant été compromise par son ambition inquiète en 1821, il mit en loterie son domaine de la Vallée-aux-Loups, à mille francs le billet.

3275. (1824) Observations sur la tragédie romantique pp. 5-40

Vous prétendez que les premiers offrent des situations touchantes, de grands caractères, des scènes pathétiques, où pour nous enchanter et nous instruire, tout est mis en usage, l’élégance et l’énergie du style, la profondeur et la clarté des idées, la vivacité des images, la sublimité des sentiments, la nature enfin habilement imitée dans tout ce qu’elle a de vrai et de noble à la fois ; voilà le mal : mais nous avons aussi des farces tragi-comiques que nous appelons mélodrames ; là, rien ne nous manquera bientôt des meilleures pratiques, fables compliquées, personnages gigantesques, préceptes moraux d’un aussi fort poids que les bons mots et les jeux d’esprit qui s’y entremêlent. […] car je m’y méprends toujours ; et de plus, il y a si peu de différence entre elle et le Banquo que vous m’avez montré vivant, que j’hésite d’abord à dire si c’est elle ou lui qui se met à table. […] Il se garde bien surtout de recourir aux périphrases : il eût dit crûment un espion, plutôt Qu’un mortel dont l’État solde la vigilance 10 ; et nommé peut-être la poule au pot, s’il n’y avait eu moyen de s’en abstenir qu’en écrivant : Je veux enfin qu’au jour marqué pour le repos L’hôte laborieux des modestes hameaux, Sur sa table moins humble ait, par ma bienfaisance, Quelques-uns de ces mets réservés à l’aisance11.

3276. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre premier »

Avant d’entrer dans cette grande matière, il importe d’être fixé sur le sens du mot littérature, et de se mettre d’accord avec l’opinion générale sur l’objet de cette histoire. […] Pour faire l’histoire de l’esprit français, il faut connaître ce que c’est que cet esprit ; il faut s’être mis d’accord avec l’opinion qu’on en, a ou qu’on en doit avoir en France, après plus de trois siècles d’écrivains supérieurs. […] Certains écrivains sont pleins d’images ; tout reluit, tout brille ; tout étincelle ; mettez tout cela au creuset pour quelques parcelles d’or, que de cendre !

3277. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre troisième. La reconnaissance des souvenirs. Son rapport à l’appétit et au mouvement. »

L’action réflexe, à son tour, décrit un arc de cercle plus ou moins étendu : une petite impression, comme un léger coup sur la tête, provoque une petite réaction, qui ne dépasse guère le cerveau ; une autre plus forte va jusqu’aux membres ; un coup violent met tout le corps en mouvement dans l’espace, etc. […] Étant donnés les éléments d’un problème, l’intelligence le résoudrait avec autant de précision que les cellules contenues dans l’intérieur d’un œuf en mettent à se réunir pour former les diverses parties de l’animal, « opération bien autrement compliquée que le plus difficile de tous les problèmes que l’intelligence peut résoudre »87. […] Richet hypnotise une femme et lui dit : « Quand vous serez réveillée, vous prendrez ce livre qui est sur la table et vous le remettrez dans ma bibliothèque. » Une fois réveillée, la femme se frotte les yeux, regarde autour d’elle d’un air étonné, met son chapeau pour sortir, puis, avant de sortir, jette un coup d’œil sur la table : elle voit le livre en question, le prend, lit le titre : « Tiens, vous lisez Montaigne.

3278. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre IV. Comparaison des variétés vives et de la forme calme de la parole intérieure. — place de la parole intérieure dans la classification des faits psychiques. »

Ce qui fait la principale valeur de cette distinction, c’est qu’elle met en pleine lumière une vérité importante, à savoir que la parole intérieure n’est pas un simple écho de la parole extérieure, un fait de répercussion ou de continuation sans but. […] L’étude de la parole intérieure met donc en lumière une fonction qui appartient virtuellement à toute la pseudo-sensation, qui, en fait, appartient toujours à quelqu’une de ses espèces, et que, néanmoins, les psychologues ont généralement négligé de lui attribuer. […] La mémoire sensible fournit comme le premier fonds de cette construction originale, de cette œuvre homogène et distincte ; mais la parole intérieure, une fois créée, une fois mise en train à titre d’écho de la sensation sonore, semble oublier ses origines ; on la dirait vivante par elle-même ou par un autre principe que celui qui l’a fait naître.

3279. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXI. »

et attendris-les… — Vous à qui la fortune a mis en main le gouvernement de ces belles contrées, dont il semble que vous n’ayez nulle pitié, que font ici tant d’épées étrangères ?  […] Ils ont osé promettre d’incendier nos frontières, de mettre à mort par l’épée notre jeunesse, de prendre nos jeunes enfants et nos vierges, et de souiller la gloire, la pureté de celles-ci. […] La Fontaine eût-il mieux dit que ces vers du poête orgueilleux trébuché de si haut  : Quand le bœuf est, au soir, du labeur deslié, Il met près de son joug le travail oublié, Et dort sans aucun soin, jusqu’à tant que l’aurore Le réveille, au malin, pour travailler encore ; Mais nous, pauvres chétifs, soit de jour, soit de nuit, Tousjours quelque tristesse épineuse nous suit.

3280. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre I. De l’évolution de la vie. Mécanisme et finalité »

quoi, dira-t-on, en affirmant que l’état d’un système artificiel dépend exclusivement de son état au moment précédent, ne faites-vous pas intervenir le temps, ne mettez-vous pas le système dans la durée ? […] La nature met les êtres vivants aux prises les uns avec les autres. […] Bref, la théorie des causes finales ne va pas assez loin quand elle se borne à mettre de l’intelligence dans la nature, et elle va trop loin quand elle suppose une préexistence de l’avenir dans le présent sous forme d’idée. […] Le spermatozoïde, qui met en mouvement le processus évolutif de la vie embryonnaire, est une des plus petites cellules de l’organisme ; encore n’est-ce qu’une faible portion du spermatozoïde qui prend réellement part à l’opération. […] J’entends par là que le fabricant retrouve exactement dans son produit ce qu’il y a mis.

3281. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — Post-scriptum » pp. 154-156

Mettons-en ici un passage en regard de celui qu’a publié M. 

3282. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Académie française — Réception de M. Émile Augier » pp. 317-321

Il a été le premier à mettre en saillie ce contraste d’un simple homme de lettres comme lui, succédant à un homme politique qui avait joué un si beau rôle.

3283. (1874) Premiers lundis. Tome II « La Comtesse Merlin. Souvenirs d’un créole. »

Née à la Havane dans cet opulent climat qui plus tard lui faisait paraître l’Andalousie si chétive, et où les mouches volantes seraient seules des clartés suffisantes de la nuit, la jeune Mercedès Jaruco, élevée d’abord et très gâtée chez sa grand-mère, puis mise au couvent où elle ne peut tenir et d’où elle s’échappe un matin, puis auprès d’une tante de chez laquelle elle s’échapperait non moins volontiers, nous apparaît dans sa beauté native, sachant lire à peine, souvent sans bas, un peu sauvage, ne s’arrêtant jamais entre un désir et son but, courant à cheval et tombant, grimpant à l’arbre et s’évanouissant au toucher d’une couleuvre, bonne pour les nègres, dévouée au premier regard pour ce qui souffre ; on se plaît à admirer une enfance si franche et si comblée des plus riches dons, racontée avec finesse et goût par la femme du monde.

3284. (1874) Premiers lundis. Tome II « Revue littéraire »

Demesmay, et où il a mis sa forme élégante aux souvenirs poétiques de sa patrie, on reconnaît un disciple souvent heureux de l’école de 1828, un lecteur enthousiaste des Odes et Ballades.

3285. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre III. De la comédie grecque » pp. 113-119

Nous nous livrons trop peu à l’admiration, pour n’avoir pas tout à craindre de la calomnie ; les amis, en France, abandonnent trop facilement, pour qu’il ne soit pas nécessaire de mettre une borne à la violence des ennemis.

3286. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre premier. Du rapport des idées et des mots »

Il s’agit de substituer, par des approximations successives des expressions de plus en plus explicites à ces signes qui étaient plutôt l’étiquette que le miroir de la pensée : on ne peut plus se contenter de marquer la place des choses, c’est le temps de les y mettre effectivement.

3287. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Stéphane Mallarmé »

Stéphane Mallarmé a mis en tête de sa traduction des poèmes d’Edgar Poe8 ce sonnet préliminaire : LE TOMBEAU D’EDGAR POE Tel qu’en Lui-même enfin l’éternité le change Le Poète suscite avec un glaive nu Son siècle épouvanté de n’avoir pas connu Que la Mort triomphait dans cette voix étrange Eux comme un vil sursaut d’hydre oyant jadis l’ange Donner un sens plus pur aux mots de la tribu Proclamèrent très haut le sortilège bu Dans le flot sans honneur de quelque noir mélange Du sol et de la nue hostiles ô grief Si notre idée avec ne sculpte un bas-relief Dont la tombe de Poe éblouissante s’orne Calme bloc ici-bas chu d’un désastre obscur Que ce granit du moins montre à jamais sa borne Aux noirs vols du Blasphème épars dans le futur Qu’est-ce que cela veut dire ?

3288. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Laforgue, Jules (1860-1887) »

Paul Adam Il faut mesurer notre effort à l’étalon de son art (de Gustave Flaubert) ; à celui encore de deux octrois œuvres comme le Satyre, de Victor Hugo, l’Ève future, de Villiers de l’Isle-Adam, les Moralités légendaires, de Laforgue ; et puis courageusement mettre les mains au travail de synthèse.

3289. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Saint-Georges de Bouhélier (1876-1947) »

Tout un réveil met debout la jeunesse ; elle refuse de s’enfermer davantage dans la tour d’ivoire, où ses aînés se sont morfondus si longtemps, en attendant que sœur Anne, la vérité de demain, parût à l’horizon.

3290. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 512-518

Ce sera toujours en vain qu’un Auteur médiocre prétendra se mettre à l’abri de la critique.

3291. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 92-99

Quelque heureusement qu’on soit né, l’étude de soi-même, celle des hommes, l’attention à se former sur de bons modeles, sont absolument nécessaires pour se mettre en état de devenir un modele à son tour.

3292. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Avant-Propos. » pp. -

Elles peuvent être mises au nombre de ces maux qui produisent quelquefois un grand bien.

3293. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre VII. Suite du précédent. — Paul et Virginie. »

Tu la mettras la nuit près de ton lit.

3294. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre V. Histoire littéraire. » pp. 212-219

Ce titre étoit le seul convenable ; & l’auteur n’auroit pas dû mettre à son livre un frontispice qui promet plus qu’il ne donne.

3295. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Vernet » pp. 227-230

S’il met des hommes en action, vous les voyez agir.

3296. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 31, de la disposition du plan. Qu’il faut diviser l’ordonnance des tableaux en composition poëtique et en composition pittoresque » pp. 266-272

Aucun peintre n’a sçu mieux que lui bien arranger dans une même scene un nombre infini de personnages, placer plus heureusement ses figures, en un mot bien remplir une grande toile sans y mettre de la confusion.

3297. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 27, qu’on doit plus d’égard aux jugemens des peintres qu’à ceux des poëtes. De l’art de reconnoître la main des peintres » pp. 382-388

L’interêt acheve de mettre de l’incertitude dans les décisions d’un art qui ne laisse pas de s’égarer, même quand il opere de bonne foi.

3298. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XIII »

. — Mise au point.

3299. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Remarque finale. Le Temps de la Relativité restreinte et l’Espace de la Relativité généralisée »

Le physicien les met tous sur le même plan, les appelle du même nom, les traite de la même manière.

3300. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre IV : Sélection naturelle »

De ce que nous avons vu concernant les rapports étroits et complexes qui unissent les uns aux autres les habitants d’une même contrée, nous pouvons inférer que tout changement dans les proportions numériques des individus de quelques espèces affecterait sérieusement la plupart des autres, toute influence du nouveau climat mise à part. […] Réciproquement, les modifications chez l’adulte affecteront probablement fort souvent la structure de la larve ; mais, en tous les cas, la sélection naturelle mettra obstacle à ce que ces modifications, qui peuvent se produire ultérieurement et à une autre époque de la vie par suite de modifications premières, soient en quelque chose, et si peu que ce soit, nuisibles à l’espèce : car, sans cela, elles en amèneraient l’extinction. […] Ils seront ainsi protégés, élus, pourvu toutefois qu’avec leur agilité nouvellement acquise ils conservent assez de force pour terrasser leur proie et s’en rendre maîtres, à cette époque de l’année ou à toute autre, lorsqu’ils seront mis en demeure de se nourrir d’autres animaux. […] Si la réversibilité des caractères n’a pas empêché l’homme de créer d’innombrables races héréditaires dans le règne animal et dans le règne végétal, pourquoi mettrait-elle une entrave absolue aux procédés sélectifs de la nature ? […] Sommes-nous sûrs encore qu’une longue trompe n’entraînerait pas, en vertu de la corrélation de croissance, l’accroissement des autres parties de la bouche, et ne mettrait pas obstacle au travail si délicat de la construction des cellules ?

3301. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIe entretien. Littérature latine. Horace (1re partie) » pp. 337-410

Ô délicieux déclin des jours, repas divin, où, en présence des dieux de mon humble foyer, je me restaure avec mes amis, au milieu d’heureux serviteurs auxquels je fais distribuer les mets de la même table à mesure qu’on les dessert, et dont la rustique joie me réjouit moi-même ! […] « Vantez-vous, lui dit-il dans ce billet, d’un grand crédit sur moi comme si vous étiez de ma maison ; vous en avez bien le droit, car il n’a pas dépendu de moi que cela ne se réalisât ; c’est la délicatesse seule de votre santé qui y a mis obstacle. […] Soigneux de sa santé morale après quelques débauches de jeunesse, il s’était mis au régime des sentiments qui n’ont point de lie. […] ……………………………………………………… ……………………………………………………… Tes vers en tout pays sont cités d’âge en âge ; J’ai vécu plus que toi, mes vers dureront moins ; Mais au bord du tombeau je mettrai tous mes soins À suivre les leçons de ta philosophie, À mépriser la mort en savourant la vie, À lire tes écrits pleins de grâce et de sens, Comme on boit d’un vin vieux qui rajeunit les sens.

3302. (1860) Cours familier de littérature. IX « XLIXe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier » pp. 6-80

Malgré mon extrême timidité, qui ne m’a jamais permis de me mettre en avant que dans les grandes circonstances publiques, je vivais dans son intimité la plus journalière. […] Seulement ma mère, élevée dans une cour, transportée ensuite très jeune dans un noble chapitre de chanoinesses, mariée pendant la Révolution, retirée ensuite dans la modeste obscurité d’une vie de campagne, entourée de la nombreuse famille qu’elle avait mise au monde, était une madame Récamier d’intérieur qui n’avait brillé que pour quelques cœurs et qui n’avait eu d’autre célébrité que celle de sa bienfaisance dans des hameaux. […] Elle ne mettait aucune diplomatie féminine dans le gouvernement de son salon d’élite ; ce salon n’en était que plus attachant ; quand on était le bienvenu de sa porte on était sûr d’être le désiré de son cœur ; elle avait pour moi une amitié d’instinct qui ne me faillit jamais, malgré l’absence. […] La révolution de 1830 était évidemment pour lui un remords ; il voulait mettre au plus vite entre cette révolution et lui des hommes anciens qui lui masqueraient l’usurpation et qui lui représenteraient la légitimité du trône.

3303. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIIIe entretien. Fior d’Aliza » pp. 177-256

C’était un mince petit volume d’une magnifique impression, édité à cinq ou six cents exemplaires, et qui paraissait plus fait pour être offert par un auteur timide à un petit nombre d’amis d’élite et de femmes de goût, qu’à être lancé à grand nombre dans le rapide courant de la publicité anonyme ; je n’avais pas même permis à M. de Genoude et au duc de Rohan, mes amis, qui s’en occupaient à mon défaut, d’y mettre mon nom. « Si cela réussit, leur disais-je, on saura bien le découvrir, et si cela échoue, l’insaisissable anonyme ne donnera qu’une ombre sans corps à saisir à la critique. » III Le volume ne fut mis en vente que la veille de mon départ de Paris. […] Les chuchotements de la maison lui avaient fait connaître la secrète intelligence qui existait entre la jeune Anglaise et moi, les obstacles que sa mère mettait par religion à ce penchant de sa fille, et les difficultés qu’elle apportait à nos entretiens. […] Quand lord Byron faisait parler Manfred, le Corsaire ou Lara ; quand il mettait dans leur bouche les imprécations les plus affreuses contre l’homme, contre les institutions sociales, contre la Divinité ; quand ils riaient de la vertu et divinisaient le crime, a-t-on jamais confondu la pensée du poète et celle du brigand ?

3304. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le buste de l’abbé Prévost. » pp. 122-139

Était-ce pour l’auteur de Cleveland, du Doyen de Killerine et de Manon Lescaut, que ces dignes gens se mettaient en fête, ou bien par reconnaissance pour la famille d’administrateurs municipaux, d’échevins, de magistrats héréditaires, dont le souvenir se lie dans leur idée à celui d’une bienveillance constante et d’une équitable protection ? […] Mais, même dans ces besognes obligatoires que la nécessité lui imposait, une fois la plume à la main, que ce soit la grande compilation de l’Histoire générale des voyages qu’il entreprenne (1746) que ce soit un simple Manuel lexique ou Dictionnaire portatif des mots français obscurs et douteux (1750), un de ces vocabulaires comme Charles Nodier en fera plus tard par les mêmes motifs ; que ce soit le Journal étranger, ce répertoire varié de toutes les littératures modernes, dont il devienne le rédacteur en chef (1755) ; de quelque nature de travail qu’il demeure chargé, remarquez le tour noble et facile, l’air d’aisance et de développement qu’il donne à tout ; il y met je ne sais quoi de sa façon agréable et de cet esprit de liaison qui est en lui.

3305. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Œuvres de Maurice de Guérin, publiées par M. Trébutien — I » pp. 1-17

Les fruits ont noué, ils aspirent l’énergie vitale et reproductrice qui doit mettre sur pied de nouveaux individus. […] C’est comme un avare qui se met en frais ; il y a de la ladrerie dans sa magnificence.

3306. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mémoires pour servir a l’histoire de mon temps. Par M. Guizot »

Guizot avait donc mis, du premier jour, sa raison et son talent au service du système de résistance. […] Guizot, dans son récit animé ; ne dissimule rien de tout cela, et il nous aide vivement à nous en ressouvenir ; il réitère même, à un endroit (tome IV, page 292), un mea culpa qui ne laisserait rien à désirer, si, par un singulier retour, il ne le rétractait formellement dans les toutes dernières lignes du chapitre ; car, faisant remarquer que c’était en vue d’obtenir un gouvernement pleinement d’accord avec la majorité de la Chambre des députés qu’il s’était mis si fort en avant, dans une ligne d’opposition inaccoutumée, au risque de déplaire à plusieurs de ses amis conservateurs, il ajoute : « Dans mon élan vers ce but, ma faute fut de ne pas tenir assez de compte du sentiment qui dominait dans mon camp politique, et de ne consulter que mon propre sentiment et l’ambition de mon esprit plutôt que le soin de ma situation (que de ma et que de mon !) 

3307. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La Grèce en 1863 par M. A. Grenier. »

Byron, qui avait pour la première fois, non-seulement traversé, comme Chateaubriand, mais parcouru en tous sens et habité la Grèce et l’Orient en 1809, 1810, 1811, en avait rapporté, déjà écrits ou en germe, cet immortel Childe Harold, dont les deux premiers chants parurent en 1812, le Giaour et tous ces poëmes bientôt populaires en Europe, qui mirent le feu aux imaginations à partir de 1816, et qui bientôt consacrèrent dans une même admiration, dans un intérêt commun, à demi mystérieux, les noms de Byron et de la Grèce. […] Grenier, et je me suis mis à lire ou à relire ces trois ouvrages, j’avoue que le premier seul a justifié pleinement l’éloge.

3308. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Racine — II »

Le jeu de Talma, c’était tout le style dramatique mis en dehors et traduit aux yeux. — Les personnages du drame, vivant de la vie réelle comme tout le monde, doivent en rappeler à chaque instant les détails et les habitudes. […] Le pittoresque épique, le descriptif pompeux sied mal au style du drame ; mais sans se mettre exprès à décrire, sans étaler sa toile pour peindre, il est tel mot de pure causerie qui, jeté comme au hasard, va nous donner la couleur des lieux et préciser d’avance le théâtre où se déploiera la passion.

3309. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Notes sur l’Ancien-Régime »

On lui servait aussitôt une bonne volaille au riz et plusieurs autres mets succulents. » (Journal de Dumont d’Urville, commandant du navire sur lequel Charles X quitta la France en 1830. […] Il ne reste donc plus qu’à multiplier par 2,53 le chiffre qui représentera la part que la taille prélève sur le revenu net, pour savoir ce que les quatre impôts mis ensemble prélèvent sur ce revenu.

3310. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre III. Madame de Staël »

Si elle a raison, le suffrage universel aurait détruit le régime parlementaire, et mis en danger la propriété : mais alors cette opinion justifierait les attaques des socialistes contre le « parlementarisme bourgeois ». […] Elle écrit, au début de sa Littérature ces lignes funestes: « L’égalité politique, principe inhérent à toute constitution philosophique, ne peut subsister que si vous classez les différences d’éducation avec encore plus de soin que la féodalité n’en mettait dans ses distinctions arbitraires ».

3311. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. James Mill — Chapitre I : Sensations et idées. »

« Les noms substantifs sont des marques d’idées ou de sensations ; les noms adjectifs sont des marques mises sur les noms substantifs ou des marques sur des marques, dans le but de limiter la signification du substantif, et au lieu de marquer une grande classe, de marquer une subdivision de cette classe. » Ex. : homme grand. […] Au contraire une pierre mise en l’air ne va pas aussi bien de bas en haut que de haut en bas, elle suit une direction invariable.

3312. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Madame la duchesse d’Angoulême. » pp. 85-102

C’est en songeant à ces scènes douloureuses du Temple que M. de Chateaubriand, qu’il ne faut pourtant pas confondre ici (comme on l’a fait trop souvent) avec Bossuet, a dit dans Atala, par la bouche du père Aubry : « L’habitant de la cabane et celui des palais, tout souffre, tout gémit ici-bas ; les reines ont été vues pleurant comme de simples femmes, et l’on s’est étonné de la quantité de larmes que contiennent les yeux des rois. » Un poète populaire, faisant allusion à cette phrase célèbre, mais continuant de mettre en opposition les classes, a dit : De l’œil des rois on a compté les larmes ; Les yeux du peuple en ont trop pour cela ! […] La religion avec la charité y a mis le sceau sublime.

3313. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — III. (Suite et fin.) » pp. 47-63

Le maréchal lui ayant répondu qu’il était allé au-devant de sa pensée et que rien ne faisait obstacle, il fut convenu de se mettre au travail sans retard, et dès le surlendemain vendredi 28. […] En effet, après le premier moment passé, il dédaigna toujours les justifications et les apologies : « Je ne puis paraître vouloir me justifier, disait-il ; je ne veux surtout pas laisser croire que j’en sens le besoin. » Le gouvernement de Juillet ne fut jamais bien pour Marmont ; d’anciens camarades maréchaux mirent peu d’empressement et de bonne volonté à le servir.

3314. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Madame, duchesse d’Orléans. (D’après les Mémoires de Cosnac.) » pp. 305-321

Quand la Cour était ailleurs, il aimait à revenir faire de petits voyages et des séjours dans la capitale ; il y mettait même une sorte de malice à l’égard du roi, à qui il se flattait que ces voyages déplaisaient : Mais c’est qu’en effet, nous dit Cosnac, ils lui donnaient à lui la joie d’avoir une cour particulière ; car il était ravi lorsqu’il voyait dans le Palais-Royal une grande affluence de beau monde, qui venait pour l’amour de lui, à ce qu’il disait, quoique ce ne fût que pour Madame. […] Mme de La Fayette, qui nous donne ainsi le cadre du roman, nous met aussi dans les mains quelques-uns des fils qui agitaient et mêlaient entre eux ces jeunes cœurs : le roi plus touché qu’un beau-frère ne doit l’être, Madame plus sensible peut-être qu’il n’est permis à une belle-sœur ; entre eux deux ce goût vif, précurseur presque assuré de l’amour ; La Vallière naissante qui vient bien à point pour détourner le charme ; le comte de Guiche, en même temps, qui fait auprès de Madame quelque chose du même chemin que La Vallière faisait auprès du roi.

3315. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Les regrets. » pp. 397-413

Mais plutôt mettez votre honneur et votre supériorité à n’avoir ni dépit ni colère, à garder de vos idées ce que vous en croyez juste et durable, sauf à les confronter perpétuellement avec l’état de la société, à les corriger sans cesse par l’observation de ce monde qui marche et qui change, et qui de nos jours tourne si vite à l’indifférence du passé. […] Le comte d’Argenson, bien qu’il fût caustique d’esprit, était de ceux, on le voit, qui dans le malheur tournent à l’élégie et à l’attendrissement ; il en est d’autres qui, de colère, auraient montré le poing à cette statue du roi, et l’auraient peut-être mise à bas s’ils l’avaient osé : « Je ne suis plus ministre, donc tu ne seras plus roi. » C’est ainsi que quelques-uns ont raisonné.

3316. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre II. Marche progressive de l’esprit humain » pp. 41-66

J’ai donc seulement voulu dire que les générations humaines sont toutes héritières les unes des autres ; que le genre humain, dans son ensemble, ne forme en quelque sorte qu’un seul tout, ce qui nous mettrait sur la voie de fournir quelques épreuves de plus à la doctrine de la solidarité. […] Ne sortons point de ce qui fait la matière de ce chapitre ; et, après les considérations générales auxquelles nous venons de nous livrer, entrons dans quelques développements et quelques remarques de détail : ne mettons pas trop de soin à faire des applications particulières ; elles se montreront d’elles-mêmes par la suite.

3317. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IX. Seconde partie. Nouvelles preuves que la société a été imposée à l’homme » pp. 243-267

Bernardin de Saint-Pierre remarque avec raison que l’usage du feu accordé à l’homme et refusé aux animaux mettait seul entre lui et eux une distance infinie. […] Les anciens, qui avaient mis en symboles toutes les puissances de la nature, n’avaient pas manqué d’établir des divinités conservatrices des lieux.

3318. (1900) Le lecteur de romans pp. 141-164

En un mot quelle valeur faut-il accorder, esthétiquement, à la fameuse formule du roman « qui peut être mis entre toutes les mains » ? […] Ils pressentent, ils voient d’avance qu’à un tout petit passage qu’ils écrivent avec plus d’émotion, où ils mettent un peu plus de leur âme, le livre se fermera entre les mains pieuses d’un homme ou d’une femme, et qu’il y aura de longs rêves autour d’une seule ligne, comme on voit d’une seule graine s’élever et s’épanouir tout un buisson en fleur.

3319. (1903) Considérations sur quelques écoles poétiques contemporaines pp. 3-31

Leurs contentions étoient s’il falloit dire : il eût été mieux ou il eût mieux été ; de scavants hommes ou les scavants hommes ; s’il falloit mettre en rime main avec chemin (déjà !) […] Enfin, il y en eut un, plus hardi que tous, qui conclut qu’il falloit mettre en règne, tout ensemble, des rimes anciennes que l’on renouvelleroit, ou d’autres que l’on inventeroit, selon que l’on connoitroit qu’elles seroient nécessaires. » J’arrête ici la citation.

3320. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Académie française — Réception de M. Biot » pp. 306-310

Témoin ému et acteur courageux dans les scènes de la Révolution, journaliste éloquent, il a toujours mis sa plume et toute sa personne au service des bonnes causes, de celles qui lui paraissaient telles dans son amour du bien et son indulgence pour l’humanité.

3321. (1874) Premiers lundis. Tome I « Œuvres de Rabaut-Saint-Étienne. précédées d’une notice sur sa vie, par M. Collin de Plancy. »

Plus tard, lorsqu’après être allé étudier en Suisse, il revint en France en qualité de ministre de l’Évangile, la première nouvelle qu’il apprit en remettant le pied dans sa patrie fut l’exécution du ministre Rochette, condamné à mort par le Parlement de Toulouse, pour avoir fait la cène, baptisé et marié des protestants ; il ne recula pas néanmoins devant le péril de son ministère, et se mit à prêcher dans les campagnes.

3322. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Donec eris felix… »

» les billets parfumés des grandes dames, les enveloppes à cachets rouges où les cuisinières enthousiastes mettaient leurs économies ?

3323. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bornier, Henri de (1825-1901) »

Henri de Bornier attendait son heure, trente ans qu’il avait publié son premier ouvrage, un volume de vers, maintenant introuvable, disparu comme tous ces volumes de début, où les nouveaux venus mettent parfois le meilleur de leur âme.

3324. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre III. Des moyens de trouver la formule générale d’une époque » pp. 121-124

Je crois, en un mot, qu’il importe de renverser les procédés dont je viens de parler : j’entends que l’historien de la littérature doit mettre les données de la sociologie et de la psychologie au service de l’histoire particulière qu’il élabore, et non pas faire le contraire pour le plus grand avantage peut-être de la philosophie, mais au détriment certain de la tâche qui lui incombe.

3325. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre IX » pp. 77-82

Il retient prisonnière à Compiègne la reine-mère, et la force peu après à chercher un asile en terre, étrangère ; il exile ou fait arrêter les amis et les domestiques de cette reine proscrite et met Bassompierre à la Bastille, Il fait décapiter Henri de Montmorency.

3326. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXVII » pp. 298-304

Le roi avait légitimé les enfants qu’il avait de madame de La Vallière ; madame Scarron était donc fondée à prévoir le même sort pour ceux de madame de Montespan ; et elle s’était mis dans l’esprit que les fils de Louis XIV, confiés à ses soins, ne devaient pas être les tourments de la France comme l’avaient été les bâtards de Henri IV, et qu’elle devait rendre ses élèves dignes de leur haute destinée, par leur moralité et leur esprit.

3327. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « La course à la mort » pp. 214-219

S’aidant de Schopenhauer, il s’efforce de mettre sa mélancolie en système et de se faire illusion sur les causes de son humeur par un exposé didactique, qui démontre en toutes choses la cause nécessaire du mal.

3328. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre XI. Suite des machines poétiques. — Songe d’Énée. Songe d’Athalie. »

Ce fantôme qui regarde Énée en silence, ces larges pleurs, ces pieds enflés, sont les petites circonstances que choisit toujours le grand peintre, pour mettre l’objet sous les yeux.

3329. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 5, que Platon ne bannit les poëtes de sa republique, qu’à cause de l’impression trop grande que leurs imitations peuvent faire » pp. 43-50

Selon lui les loüanges des dieux et celles des heros mises en vers en deviennent plus capables de plaire et de se faire retenir.

3330. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Bathild Bouniol »

nous le répétons, c’est là une originalité essentielle, qui met à part, d’emblée, ces poésies plus grandes par l’ensemble que par le détail.

3331. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Champfleury ; Desnoireterres »

Cette école, qui a sa petite cohérence, mettrait-elle de l’imagination dans ses théories contre l’imagination, et ne les dresserait-elle que par précaution contre de trop fougueux tempéraments d’artiste dont elle redouterait les ardeurs ?

3332. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — III »

Hallays, mettait à la porte de sa maison les reporters.

3333. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre VI. Des éloges des athlètes, et de quelques autres genres d’éloges chez les Grecs. »

De là tous ces jeux et l’importance qu’on y mettait.

3334. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins » pp. 185-304

A-t-on jamais vu une seule nation (excepté les Abdéritains, peuple fou qui voulait rire) mettre sa jeunesse dans son sénat, demander leurs lumières à ceux qui n’ont rien appris, et leur expérience à ceux qui n’ont pas encore vécu ! […] Son ministre de la maison du roi lui ayant mis sous les yeux mon poème, au milieu des nombreux écrits en vers ou en prose dont on voulait récompenser les auteurs par quelque faveur de cour, et mon nom ayant été ainsi prononcé devant le roi : « Ah ! […] Le même courrier m’apportait une lettre de M. de Pansey, président du conseil du duc d’Orléans, sur un ton différent de celui de la prière à laquelle j’avais accédé. « Dites à M. de Lamartine, me faisait écrire le prince, que, s’il persiste à insérer ce passage dans son poème, il saura ce que c’est que le ressentiment du premier prince du sang. » XXIII À la lecture de l’article du Constitutionnel, et surtout à la lecture de cette injonction comminatoire du président du conseil du duc d’Orléans, je sentis que ma concession de la veille serait une lâcheté, et que, si j’avais dû au duc d’Orléans et aux larmes de ma mère d’obtempérer à l’instant à une demande secrète, je me devais à moi-même de révoquer ma concession confidentielle, et de maintenir contre une menace ce que j’avais effacé devant une prière, du moment surtout où la publicité injurieuse du Constitutionnel, qui ne pouvait venir que du Palais-Royal, avait mis le public dans la confidence. […] Delessert subsiste et atteste que je mis moi-même une barrière entre la majorité reconnaissante et moi, et que je ne consentis à briguer ni ministère, ni présidence. […] Ce caractère bien connu de l’opinion publique en France, qu’allez-vous faire en lui renvoyant ses représentants de la coalition, hommes sans doute très égarés et très coupables en ce moment, mais que vous allez mettre sous la sauvegarde de ceux qui les ont envoyés comme des victimes de leur dévouement au peuple et de leur résistance au despotisme de la couronne et de votre ressentiment à vous ?

3335. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « [Appendice] » pp. 417-422

Cependant Fléchier sentit bientôt qu’il convenait de mettre fin à ces tendres jeux, bien qu’ils fussent purement platoniques ; car, ainsi qu’il en convient lui-même dans un dialogue en vers entre Climène et Tircis, À force de le dire en vers.

3336. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XLV » pp. 176-182

Il suffisait d’une étincelle pour mettre le feu : l’incident de la séance de vendredi 26 est venu faire l’explosion.

3337. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mort de M. Vinet »

En fait, ç’a été dans le canton de Vaud le triomphe brutal de la force et des cupidités grossières mises en lieu et place de l’esprit, du droit et de la liberté.

3338. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. Tissot. Poésies érotiques avec une traduction des Baisers de Jean Second. »

Après qu’enfin on eut retrouvé le calme et le loisir, on se mit à rappeler le temps passé ; on le rêva dans le présent, on le chanta avec ses joies sans retour évanouies.

3339. (1874) Premiers lundis. Tome II « L. Bœrne. Lettres écrites de paris pendant les années 1830 et 1831, traduites par M. Guiran. »

Parmi les raisons nombreuses et d’ordre divers qu’on peut mettre en avant contre ces patelines espérances, la sienne n’est pas la moins convaincante à mon gré, et elle a l’avantage d’être courte : « L’image de Napoléon, dit-il, est revenue après quinze ans, et les Bourbons resteront à jamais bannis. — Bien certainement à jamais : car, à la troisième attaque d’apoplexie, l’homme meurt, fût-il roi. »

3340. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Introduction. Origines de la littérature française — 4. Physionomie générale du moyen âge. »

La peur du diable qui guette, la crainte de Dieu qui punit, la vision hallucinante de l’enfer qui s’ouvre, il ne fallait pas moins que cela pour brider la violence des passions, et mettre un peu de bonté dans les actes, sinon encore dans les cœurs.

3341. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Les brimades. » pp. 208-214

Les anciens de l’École polytechnique ayant fait subir aux nouveaux d’excessives « brimades », et l’administration étant intervenue pour y mettre fin, toute l’École, en guise de protestation, s’est consignée deux dimanches de suite.

3342. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bergerat, Émile (1845-1923) »

Émile Bergerat est né à Paris, rue de la Vieille-Monnaie, près le Pont-Neuf, en 1845, au mois d’avril, alors que les arbres du boulevard poussaient leurs premières feuilles et que les moineaux francs pépiaient au bord des toits, secouant dans un rayon de soleil leur plumage lustré d’une dernière averse… Lorsqu’il étrenna sa première culotte, ses parents, d’excellents bourgeois, décidèrent qu’il irait l’user sur les bancs d’un collège et le mirent en pension, à Vaugirard, chez les jésuites.

3343. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rollinat, Maurice (1846-1903) »

Rollinat a mis, en son œuvre macabre, beaucoup de lui.

3344. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre V. Un livre de Renan et un livre sur Renan » pp. 53-59

Untel (je pourrais mettre ici des noms respectables), n’est pas de l’histoire, parce que ne peut être scientifiquement établie.

3345. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre V. Suite des précédents. — Héloïse et Abeilard. »

On conçoit les transports de ces hommes saints, qui, retirés sur le sommet des montagnes, mettaient toute leur vie aux pieds de Dieu, perçaient à force d’amour les voûtes de l’éternité, et parvenaient à contempler la lumière primitive.

3346. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre XIV. Parallèle de l’Enfer et du Tartare. — Entrée de l’Averne. Porte de l’Enfer du Dante. Didon. Françoise de Rimini. Tourments des coupables. »

Harris) ; tout ce qui est de nature à contenir se met en anglais au féminin, et cela par une logique simple, et même touchante, car elle découle de la maternité ; tout ce qui implique faiblesse ou séduction suit la même loi.

3347. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Deshays  » pp. 134-138

Rappelons-nous les vers que Corneille a mis dans la bouche de Polyeucte.

3348. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 12, qu’un ouvrage nous interesse en deux manieres : comme étant un homme en general, et comme étant un certain homme en particulier » pp. 73-80

Qu’on se mette en la place de Cesar, et l’on trouvera sans peine cet endroit.

3349. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 6, des artisans sans génie » pp. 58-66

La nature les met au monde pour suppléer à la disette des hommes de génie, destinez à faire des prodiges dans une sphere hors de laquelle ils n’auront point d’activité.

3350. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Méry »

Nous ne connaissons pas de meilleure réponse que Méry à cette affirmation des jugeurs qui mettait en furie Chateaubriand, le vieux enfant colère, quand ils lui disaient qu’un poète n’est jamais capable de rien que de poésie ; car, en dehors de ses poésies écrites et de la poésie de sa nature, il n’y eut jamais, du moins dans notre époque, d’homme capable intellectuellement de plus de choses que Méry.

3351. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre ii »

Cornet-Auquier, à Chalon-sur-Saône, et non mises dans le commerce.

3352. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — I »

Assurément, il serait malaisé de la mettre en formules, car c’est moins de l’habileté raisonnée qu’une part même de son souple génie.

3353. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Argument » pp. 93-99

La Providence a mis dans l’instinct des premiers hommes les germes de civilisation que la réflexion devait ensuite développer.

3354. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Jocelyn (1836) »

Jocelyn a seize ans au 1er mai 1786, et il se met depuis lors à se raconter à lui-même en chants naïfs ses pensées adolescentes. […] Après les horreurs des massacres, après les angoisses de la fuite, et celles même d’une route si escarpée, au moment où Jocelyn met le pied, par delà le précipice, dans la haute et douce vallée dont il s’empare, oh ! […] Qu’on mette aussi en regard l’intérieur de Jocelyn à Valneige : Le jardin, le verger, quelques arpents de prés, Les châtaignes, les noix, de petits coins de terre  Que je bêche moi-même autour du presbytère ; Tout abonde ; le pain y cuit pour l’indigent, Et Marthe dans l’armoire a même un peu d’argent.

3355. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « George Farcy »

On le mit de bonne heure en pension chez M. […] Et moi, ma belle amie, vous m’avez mis à une école trop sévère pour que je ne tremble pas de paraître fier d’une faveur. » « Eh bien ! […] C’est tout à fait le même raisonnement généreux qui anime, dans Homère, Sarpédon s’adressant à Glaucus au moment de l’assaut du camp (Iliade, XII) : « Ô Glaucus, pourquoi sommes-nous entre tous honorés en Lycie et par le siége, et par les mets et les coupes d’honneur ?

3356. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIIe entretien. Poésie lyrique » pp. 161-223

On l’appelait la Jumelle, parce que sa mère l’avait mise au monde le même jour qu’un frère qui ne la quittait jamais, et qui venait habituellement avec elle faner ou moissonner pour le château. […] Va dire à Didier qu’il remette son aiguillon à son petit frère, que je lui donne une charrue à conduire, cent vingt francs de gage, quatre paires de sabots, une paire de souliers, six chemises de toile, et que de plus je me charge de faire la noce au château, et que tu y danseras tant que tu voudras avec la Jumelle. » Tout fut fait avec la promptitude et l’entrain que cet excellent homme, toujours pressé du bonheur d’autrui, mettait à une bonne action. […] Ce qui se dit dans cette entrevue entre le petit Didier et le père de sa future on ne peut que le deviner ; mais tout se passa sans doute de bon accord et de bonne grâce, car la nuit était déjà tombée toute noire sur la montagne et sur la vallée que le père et le prétendu, le visage ouvert par la confiance et par la bonne amitié, étaient encore assis chacun sur un coin du banc, la table entre eux deux et la nappe mise devant une bouteille de vin, un morceau de pain et un fromage blanc, pendant que la Jumelle, rappelée du verger, debout et modeste derrière son père, était invitée par lui et résistait longtemps à boire un doigt de vin dans le verre de son fiancé.

3357. (1860) Cours familier de littérature. X « LXe entretien. Suite de la littérature diplomatique » pp. 401-463

» Je vais mettre en scène ce dialogue du mort avec les vivants, et faire parler cet oracle du fond de son sépulcre, autant du moins que ma faible intelligence et ma sagesse bornée peuvent interpréter les pensées présumées de cette forte tête et de cette grande vue sur les affaires humaines. […] L’Europe aventureuse briserait à la fois l’Europe, l’Afrique et l’Asie, si elle écoutait ces publicistes de fantaisie ; qui, déistes à Paris, se proclament chrétiens en Chine, en Cochinchine, en Australie, en Syrie, à Constantinople, à Ispahan, à Calcutta, et qui mettent hors la loi de la diplomatie et de l’indépendance un grand tiers du globe, sous le prétexte d’un christianisme diplomatique qu’ils ne professent que dans leurs protocoles. […] Et pour moyen, l’équilibre ; L’équilibre, maintenu, autant que possible, par la force relative propre, ou par la force des alliances qui mettent le poids des petits États à côté des grands pour égaliser les systèmes.

3358. (1839) Considérations sur Werther et en général sur la poésie de notre époque pp. 430-451

Nous mettions au-dessus de ces vaines tentatives de l’art de renaissance et de l’art pour l’art, la poésie véritablement inspirée par le sentiment de notre époque ; et nous montrions le concert unanime des diverses nations de l’Europe pour entrer, à l’insu souvent les unes des autres, dans cette phase de la poésie. […] M. de Chateaubriand a voyagé dans l’Amérique du Nord : il a fait Atala et René, où il est plus question de la désolation de cœur laissée par les doctrines du Dix-Huitième Siècle et par la Révolution Française que des sauvages qui y sont mis en scène. » Une autre exception, c’est la chanson de Béranger. […] Ce qu’il y a de réel pour moi, c’est la poésie de Byron, poésie ironique et désolante, qui soulève des abîmes où notre esprit se perd, et qui, comme les harpies, salit, à l’instant même, tous les mets qui couvrent la table du festin..

3359. (1902) Le culte des idoles pp. 9-94

Taine avec non moins de force que le groupe nationaliste ; et, je ne sais pourquoi, les philosophes de la monarchie le mettent à côté de Maistre, qu’il ne pouvait souffrir. […] Il se mit à écrire ses Origines de la France contemporaine pour faire quelque lumière dans son esprit et celui de ses contemporains. […] Mis en goût d’invention par ces publications de documents, ou peut-être poussé par son frère, Edmond de Goncourt s’adonna au roman moderne.

3360. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 avril 1886. »

  Les Forces jaillissantes, d’où comme les coursiers qui s’élancent, Bondissent les puissances du sol, du feu et des airs, Les mers qui refluent et les fleuves qui s’écoulent   Prirent voix, — transformés en chant … oui, toutes choses Avec toutes leurs œuvres reçurent de par son art magistral Un verbe pareil à celui des Forces dont la voix met à nu Le grand cœur de la Terre. […]   L’œil ne pouvait l’endurer, mais l’oreille et le cœur, avec une extase de délices ténébreuses, Avec une terreur et un émerveillement dont les racines étaient la joie et la force de la pensée mise en liberté, Percevait le surgissement d’un arrêt divin, comme une aube ensoleillée surgissante aux regards,       Des profondeurs de la Mer. […] Wagner est alors loin de son projet premier ; on entend les œuvres tronquées, en français, sans mise en scène… avec une sonorité qu’il ne souhaitait pas.

3361. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 septembre 1886. »

Bien que l’éminent chef d’orchestre n’ait d’autre souci que de faire œuvre d’art et que toute idée de spéculation lui soit étrangère, on conçoit aisément qu’il ait voulu mettre de son côté toutes les chances de succès. […] Costumes et décors, confiés aux plus réputés de nos décorateurs, seront aussi exacts que somptueux ; l’Eden se prête, d’ailleurs, admirablement aux exigences de la mise en scène. […] Mais les romantiques ne surent point mettre ces progrès au service de l’art.

3362. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre premier. La sélection et la conservation des idées dans leur relation à l’appétit et au mouvement. »

Rappelons qu’en parlant d’idées-forces, nous ne considérons pas les idées, ainsi que l’a fait parfois l’école de Herbart, comme des espèces d’entités ayant chacune une existence à part, agissant l’une sur l’autre à la façon d’un acide et d’une base mis en présence : les idées ou images sont pour nous des états de conscience qui s’accompagnent de sentiments et aboutissent à des mouvements66 ; ces sentiments et ces tendances motrices n’ont pas toujours des formes déterminées, des limites et des contours précis : ce sont des états continus et reliés à d’autres états par des transitions souvent insensibles. […] S’il est vrai, comme nous l’avons dit, que l’émotion et la réaction motrice soient les deux « facteurs » principaux de la mémoire, ils devront disparaître en dernier lieu du souvenir ; or, c’est ce qui nous paraît ressortir de cette loi des amnésies indiquée par Spencer et par Maudsley, et que Ribot a mise en pleine lumière. […] Supposez qu’une boîte à musique, capable de jouer plusieurs airs, tombe à terre pendant qu’elle en joue un et que le cylindre garni de pointes se mette à rouler avec une très grande rapidité, de manière à briser ou à altérer ses pointes : un air entier pourra disparaître sans que les autres soient atteints, Tous les mouvements réflexes qui répondent à l’association des mots grecs entre eux et avec les mots français correspondants peuvent se trouver paralysés, tandis que les systèmes de réflexes répondant au français, appris dès l’enfance et solidement imprimés dans le cerveau, peuvent résister à la commotion.

3363. (1856) Cours familier de littérature. II « IXe entretien. Suite de l’aperçu préliminaire sur la prétendue décadence de la littérature française » pp. 161-216

La France doit à ce grand coloriste sa langue littéraire mise au service de la science de la nature. […] Vous auriez donné, par toutes ces petites réformes, satisfaction à chacun de ces misérables intérêts purement civils ou administratifs de la France, que vous n’auriez pas apaisé la commotion de l’esprit moderne, auquel la littérature et la philosophie françaises avaient mis le feu. […] Les Machiavel, les Robespierre, les Danton ne sont au fond que des dupes qui ont mis leur génie à la torture pour chercher dans le crime ce que Dieu a caché dans la conscience et dans la vertu.

3364. (1833) De la littérature dramatique. Lettre à M. Victor Hugo pp. 5-47

Non, Monsieur, bien loin de mettre de l’amertume dans mes récriminations, j’emploierai avec vous ce ton paternel que peut me permettre mon âge ; et dans la critique même de votre conduite, j’écarterai cette ironie amère plus déchirante que l’injure, et cette fausse pitié plus insultante que le mépris. […] Avec vous notre jeune France s’est mise à l’œuvre ; avec vous elle a voulu détruire ces grands monuments littéraires auxquels nous autres auteurs de l’empire avions enchaîné notre gloire et notre fortune. […] Vous trouvez peut-être que dans mes récriminations je me mets trop en cause, que je parle trop de moi.

3365. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Troisième partie de Goethe. — Schiller » pp. 313-392

c’est une épouse chérie, c’est une mère fidèle que le démon des ténèbres arrache aux bras de son époux, aux tendres enfants qu’elle mit au monde avec bonheur, qu’elle nourrit sur son sein avec amour. […] Ô vous, sa mère, je vous remercierai éternellement d’avoir mis au monde celui que j’aime ! […] ” Je me dirigeai vers la fenêtre pour cacher mes larmes et contenir les battements de mon cœur irrité ; elle s’était mise à l’autre fenêtre et ne disait mot. […] Je me mis à sourire, à pleurer, à sangloter tout à la fois ; mais sa frayeur augmenta ; elle se coucha sur le canapé.

3366. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIIIe entretien. Littérature politique. Machiavel (2e partie) » pp. 321-414

Machiavel (2e partie) [Avertissement] Une indisposition rhumatismale, très longue, à laquelle je suis assujetti sans gravité mais non sans supplice depuis trente ans, a mis un intervalle inusité entre le 52e et les 53e-54e Entretiens. […] Ils avaient deux religions dans leur cœur, leurs princes et leurs prêtres ; superstitieux chez eux, héroïques dehors, bons et honnêtes partout, aussi propres à subir le joug de la conquête sans le secouer qu’à imposer ce joug à leurs voisins, quand l’inquiétude de la maison de Savoie les mettait à la solde des grands alliés auxquels on inféodait leur sang pour des causes toutes personnelles à ces princes. […] Il prêta devant la junte révolutionnaire, comme régent, le serment de soutenir la constitution espagnole ; puis, pressé d’échapper à la responsabilité de son double rôle, il se mit à la tête de deux régiments de cavalerie et d’artillerie, et se rendit à Novare dans une intention équivoque et non expliquée. […] soyez délivrés et non annexés, mettez l’indépendance sous la garde de la liberté républicaine, ou monarchique, ou représentative, et groupez-vous en fédération italique, confédération mille fois plus conforme à vos natures que l’unité piémontaise qui se disloquera au premier choc après vous avoir dénationalisés. » Voilà ma réponse à Charles-Albert et ma pensée sur l’Italie annexée au Piémont.

3367. (1856) Cours familier de littérature. II « XIIe entretien » pp. 429-507

« Les flèches ne le mettent pas en fuite ; les pierres de la fronde sont pour lui comme l’herbe des champs. […] Comment, en effet, mettre, comme il le fait, en parallèle avec ce drame, ceux de Sophocle ou d’Eschyle que le docteur Lowth semble même préférer au drame de Job comme une œuvre d’art ? […] » est-ce que cette exclamation désespérée du poète grec peut être mise en parallèle avec ce flux blasphématoire du cœur de Job, quand il s’écrie, dans une apostrophe aussi intarissable que les douleurs de l’humanité : « Périsse le jour où il a été dit : Un homme a été conçu !  […] « Les orateurs suspendaient leur discours et se mettaient le doigt sur la bouche !

3368. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIe entretien. Littérature italienne. Dante. » pp. 329-408

Le génie n’est pas un jouet mis au service de nos petites colères ; c’est un don de Dieu qu’on profane en le ravalant à ces petitesses. […] Sa petite épigramme imméritée (car nous ne nous sommes jamais mis, comme poète, au niveau seulement d’un vers du Dante) ne nous empêchera pas de remercier cet écrivain de son excellente interprétation. […] Dieu s’est réservé le pouvoir de créer ; mais il a communiqué aux grands hommes ce second trait de sa toute-puissance, de mettre l’unité dans le nombre et l’harmonie dans la confusion. » XXIX Je ne peux quitter ce beau travail d’un esprit aussi philosophique que tolérant sans déplorer la mort précoce qui brisa la plume dans la main de ce jeune disciple du Dante. […] Je ne sais quel sort attend ce livre, ni s’il s’achèvera, ni si j’atteindrai la fin de cette page qui fuit sous ma plume ; mais j’en sais assez pour y mettre le reste, quel qu’il soit, de mon ardeur et de mes jours.

3369. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre II. De la multiplicité des états de conscience. L’idée de durée »

Vous ne tirerez jamais d’une idée par vous construite ce que vous n’y aurez point mis, et si l’unité avec laquelle vous composez votre nombre est l’unité d’un acte, et non d’un objet, aucun effort d’analyse n’en fera sortir autre chose, que l’unité pure ou simple. […] Cette dernière, nettement conçue par l’intelligence humaine, nous met à même d’opérer des distinctions tranchées, de compter, d’abstraire, et peut-être aussi de parler. […] Pour mettre cette argumentation sous une forme plus rigoureuse, imaginons une ligne droite, indéfinie, et sur cette ligne un point matériel A qui se déplace. […] Ainsi, quand je mange d’un mets réputé exquis, le nom qu’il porte, gros de l’approbation qu’on lui donne, s’interpose entre ma sensation et ma conscience ; je pourrai croire que la saveur me plaît, alors qu’un léger effort d’attention me prouverait le contraire.

3370. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre III. De la survivance des images. La mémoire et l’esprit »

Nous avons conscience d’un acte sui generis par lequel nous nous détachons du présent pour nous replacer d’abord dans le passé en général, puis dans une certaine région du passé : travail de tâtonnement, analogue à la mise au point d’un appareil photographique. […] Le mettre, à l’état de modification moléculaire, dans la substance cérébrale, cela paraît simple et clair, parce que nous avons alors un réservoir actuellement donné, qu’il suffirait d’ouvrir pour faire couler les images latentes dans la conscience. […] Par quelle heureuse chance mettrions-nous justement la main sur un nombre croissant de souvenirs intercalaires ? […] Nous ne voyons pas comment la mémoire se logerait dans la matière ; mais nous comprenons bien, — selon le mot profond d’un philosophe contemporain, — que « la matérialité mette en nous l’oubli 92 ».

3371. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le marquis de Lassay, ou Un figurant du Grand Siècle. — I. » pp. 162-179

Il avait en lui un ressort qui dérangeait le train de vie où il s’était mis et qui empêchait la suite, la persévérance nécessaire au plein succès. […] Les grâces et les qualités rares de cette jeune personne, sa distinction naturelle, l’avaient mise, même dans ce monde de cour, sur un pied tout différent de celui où la plaçaient sa condition et sa naissance.

3372. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

À la fin de la préface d’un de ses recueils à propos d’un travail sur la Poésie des races celtiques, qu’il y a inséré, il se plaît à revenir en arrière, à repasser sur les souvenirs, les piétés et même les mystiques superstitions de ses pères ; il se met tout à coup à regretter que les humbles marins, ses aïeux, n’aient pas tourné leur gouvernail, n’aient pas laissé dériver leur barque vers d’autres rivages ; il se suppose un moment enfant attardé, fidèle, de la pauvre et poétique Irlande ; écoutez ! […] Un critique pur est entièrement à la merci de son examen, du moment qu’il y a apporté toutes les conditions d’exactitude et toutes les précautions nécessaires ; il trouve ce qu’il trouve, et il le dit tout net : le chimiste nous montre le résultat de son expérience, il n’y peut rien changer : Letronne, dans sesleçons, appliquait son esprit d’analyse à une question archéologique, biblique quand il avait bien prouvé l’impossibilité de telle ou telle solution qu’il combattait, quand il avait mis l’opinion de son adversaire en pièces et en morceaux, — en tout petits morceaux comme avec un canif, — il n’en demandait pas davantage, il se frottait les mains d’aise et il s’en allait content.

3373. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. PROSPER MÉRIMÉE (Essai sur la Guerre sociale. — Colomba.) » pp. 470-492

Soit qu’il fit choix d’époques encore neuves à l’étude, soit qu’il se jetât sur des pays à mœurs franches et sauvages, soit même qu’il se tînt à des cas singuliers du cœur, toujours, en tout sujet, il se retranchait, pour ainsi dire, au début ; il mettait une portion de sa vigueur à ne pas sortir du cercle tracé ; il faisait comme le soldat romain qui, à chaque halte, avant toute chose, traçait le fossé et posait le camp. […] En comparant, j’ai mieux apprécié le soin achevé du narrateur et son art de mettre en scène sans en avoir l’air.

3374. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Pierre Loti »

Il est d’abord dans les choses même que l’écrivain nous met sous les yeux. […] Et dehors, dans les jardins, des jeunes filles vêtues de mousseline chantent des choeurs, comme dans l’île d’Utopie ou dans les Atlantides ; puis les danses commencent, lascives, furieuses, qui finissent vers l’aube par la fête universelle de la chair… Mettez toutes ces impressions ensemble, et d’autres encore, indéfinissables, que j’oublie, et vous comprendrez qu’il n’y a rien de plus sensuel, de plus languissant, de plus mélancolique que le Mariage de Loti.

3375. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres inédites de la duchesse de Bourgogne, précédées d’une notice sur sa vie. (1850.) » pp. 85-102

Au milieu de tous ces noms, dont quelques-uns des plus doctes et appartenant à l’Académie des inscriptions, mais dont aucuns ne sont des noms en us, on rencontre avec plaisir deux femmes, l’une que le génie de l’art a douée en naissant, et qui, entre mille grâces naturelles, a celle du crayon et du pinceau ; l’autre qui vient de montrer qu’elle n’a qu’à vouloir, pour mettre une plume nette et fine au service de l’esprit le plus délicat. […] La moralité à tirer de cette première lettre ne me semblerait pas complète toutefois, si l’on ne mettait en regard une page des plus mémorables de Saint-Simon.

3376. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre V. Le génie et la folie »

On retrouvera dans la conséquence ce qu’on aura déjà mis dans le principe. […] « Bossuet se mettait dans une chambre froide la tête chaudement enveloppée. » J’en conclus qu’il n’était pas frileux, mais qu’il craignait de s’enrhumer du cerveau.

3377. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre II : Philosophie politique de Tocqueville »

Au nombre de ces biens chaque jour répandus sur un plus grand nombre d’individus, il faut mettre au premier rang le développement de l’intelligence, la diffusion des lumières. […] « Les institutions communales, disait-il, sont à la liberté ce que les écoles primaires sont à la science : elles la mettent à la portée du peuple, elles lui en font goûter l’usage paisible et l’habituent à s’en servir. » Il conseillait donc de reprendre les choses par la base et d’assurer le sous-sol, au lieu de construire des édifices magnifiques qui tombent par terre l’un après l’autre avec fracas après les plus belles promesses.

3378. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Sur le Louis XVI de M. Amédée Renée » pp. 339-344

S’étant chargé, il y a quelques années, de mettre la dernière main à la grande œuvre de Sismondi, « ce monument de la science historique que sa mort avait laissé inachevé », M. 

3379. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Appendice à l’article sur Gabriel Naudé »

Je mets de mes pensées où je puis, et à chaque édition nouvelle d’un ouvrage j’en profite comme d’un convoi qui part pour envoyer au public, à mes amis et même à mes ennemis (dussent-ils se servir de cette clé comme d’une arme, selon leur usage) quelques mots qu’il m’importe de dire sur moi-même et sur ce que j’écris.

3380. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires du marquis d’Argenson, ministre sous Louis XV »

Glaire en effet à cette simplicité bourgeoise, à ce phlegme incorruptible, qui mieux que la philosophie du grand monde le garantissait des illusions, qui lui faisait dire à Voltaire dont, à la lecture de Pellisson, les yeux se remplissaient de la splendeur de Louis XIV : « Mon cher, vous n’êtes qu’un enfant, qui aimez les babioles et rejetez l’essentiel ; vous faites plus de cas des pompons qui se font chez mesdemoiselles Duchappe que des étoffes de Lyon et des draps de Van-Robais. » ou bien encore qui lui faisait comparer un état épuisé qui donne des fêtes pour mettre l’argent en circulation à une vieille comtesse ruinée qui ouvre brelan et donne à souper avec l’argent des cartes !

3381. (1874) Premiers lundis. Tome I « Anacréon : Odes, traduites en vers française avec le texte en regard, par H. Veisser-Descombres »

Il jette les yeux sur sa coupe, et le voilà qui se met à en célébrer les élégantes ciselures.

3382. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre VIII. De la clarté et des termes techniques »

Un philosophe écrivant pour des philosophes, un archéologue écrivant pour des archéologues, un savant écrivant pour des savants, n’ont qu’à appliquer aux choses les termes techniques de leur science spéciale : ils ne veulent pas être compris de tout le monde, et il leur suffit d’être entendus de ceux qui connaissent ces vocabulaires particuliers, et plus ils mettront de rigueur dans cet emploi des mots techniques, plus ils préciseront leur pensée et éclairciront leur sujet.

3383. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Philosophie du costume contemporain » pp. 154-161

Mais un ouvrier proprement mis se rapproche beaucoup d’un bourgeois négligé.

3384. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Moréas, Jean (1856-1910) »

Tout de suite, au contraire, il met la main sur le terme exact, sur l’image nette, sur la forme précise.

3385. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Lutèce » pp. 28-35

  « Un soir, il rentra chez lui un livre sous le bras, — un livre vêtu de jaune et d’un aspect inoffensif ; et quand il eut regagné son cinquième étage, allumé sa lampe à pétrole, il s’étendit dans son fauteuil de cuir, jeta un coup d’œil satisfait sur l’ameublement d’acajou de sa chambre et, prenant un coupe-papier, celui qu’il appelait familièrement : “dit des bonnes lectures”, il se mit à lire, et lut : À Rebours.

3386. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXIV » pp. 251-258

Une circonstance déjà remarquée favorisa cette influence : à la tête du parti des mœurs était madame de Montausier, appelée à la cour de Louis XIV comme la représentante de la société des honnêtes femmes, avec laquelle le jeune monarque avait voulu se mettre en bonne intelligence, dont il voulait être l’allié, en attendant qu’il se sentit la force d’en devenir l’ami.

3387. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXIV » pp. 394-401

Madame de Montespan avait remarqué que madame de Soubise mettait des pendants d’oreille d’émeraude les jours que M. de Soubise allait à Paris ; elle fit suivre le roi un de ces jours-là, et il se trouva que c’était effectivement le signal d’un rendez-vous L’intrigue du roi avec madame de Soubise inquiéta madame de Montespan : une lettre de madame de Sévigné nous apprend le 7 août que madame de Montespan redoublait de soins pour sa parure, qui y dit-elle, est extrême comme sa beauté et sa gaîté, ajoute-t-elle, est extrême comme sa parure.

3388. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 181-190

Malebranche, le talent de mettre à la portée de tous les esprits, les idées les plus profondes & les plus abstraites.

3389. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre septième. Les sentiments attachés aux idées. Leurs rapports avec l’appétition et la motion »

Le plaisir causé par un mets savoureux est sensitif ; le plaisir causé par une pensée, par un raisonnement, par la compréhension d’un rapport de cause à effet, de moyen à fin, de tout à parties, est intellectuel ; les plaisirs causés par l’exercice de l’activité volontaire et motrice, par exemple le plaisir de vouloir, le plaisir de résister à la volonté d’autrui ou, au contraire, de coopérer à cette volonté, le plaisir de mouvoir ses muscles, ses membres, etc., sont des plaisirs volitifs.

3390. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre IX »

Je formulerais donc volontiers ainsi les mots suivants, bien connus sous leur aspect barbare ; je mets à côté un des mots qui peuvent servir d’étalon analogique : Higuelife — High LifeCalife Fivocloque — Five o’clockColloque Vaterprouffe — Water-proofEsbrouffe Starteur — Starter84 Stimeur — SteamerRameur Autoresse 85 — authoressMaîtresse Blocausse — Block-hauss86 Chausse Groume — Groom87 Doume88 Spline — Spleen89 Discipline Smoquine — SmokingMolesquine Yaute — Yacht90 Faute Docart — Dogcart ou Doquart Trocart, Trois-quarts91 Snobe — SnobRobe Bismute — Bismuth92 Jute Zingue — Zinc93 (Voyez Chirtingue) Malte — Malt94 Malte Boucmacaire — Book-maker95 Valcovère — Walk-over Sévère Macaire Chirtingue — Shirting Métingue — Meeting Cotingue — Coating Poudingue 96 — Pudding Clube — Club Tube Quirche — Kirsch97 Spiche — Speech Niche Colbaque — Kolbak98 Codaque — Kodak99 Chabraque Railoué — Railway Tramoué — Tramway Avoué Ponche — Punch100 Bronche Grogue — GrogDogue Copèque — Kopeck101 Quipesèque — Keepsake Bifetèque, Romestèque 102 Chèque Sloupe — SloopChaloupe Spencère — SpencerSincère Stoque — StockToque Stope — Stop103 Chope Lunche — Lunch104 Embrunche Chacot — ShakoTricot Coltare — CoaltarTare Stoute — StoutToute Strasse — StrassStrasse105 Carrique — CarrickBarrique On sait que le français du Canada a subi l’influence de l’anglais.

3391. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Dédicace, préface et poème liminaire de « La Légende des siècles » (1859) — Préface (1859) »

Ces deux volumes d’ailleurs, qu’on veuille bien ne pas l’oublier, sont à l’ouvrage dont ils font partie, et qui sera mis au jour plus tard, ce que serait à une symphonie l’ouverture.

3392. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface d’« Hernani » (1830) »

Peut-être ne trouvera-t-on pas mauvaise un jour la fantaisie qui lui a pris de mettre, comme l’architecte de Bourges, une porte presque moresque à sa cathédrale gothique.

3393. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Troisième faculté d’une Université. Faculté de droit. » pp. 506-510

Surtout qu’il soit défendu, sous des peines rigoureuses, à un vieux professeur qui se retire, de mettre à contribution celui qui lui succède, comme il arrive parmi nous ; la raison en est évidente.

3394. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 3, que le merite principal des poëmes et des tableaux consiste à imiter les objets qui auroient excité en nous des passions réelles. Les passions que ces imitations font naître en nous ne sont que superficielles » pp. 25-33

Voilà pourquoi nous regardons avec contentement les peintures dont le merite consiste à mettre sous nos yeux des avantures si funestes, qu’elles nous auroient fait horreur si nous les avions vûës veritablement, car comme le dit Aristote dans sa poëtique : des monstres et des hommes morts ou mourants que nous n’oserions regarder ou que nous ne verrions qu’avec horreur, nous les voïons avec plaisir imitez dans les ouvrages des peintres.

3395. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 4, objection contre la proposition précedente, et réponse à l’objection » pp. 35-43

L’histoire des peintres, des poëtes et des autres gens de lettres, est remplie de faits qui convaincront pleinement que rien ne sçauroit empêcher les enfans, nez avec du génie, de franchir la plus grande distance que la naissance puisse mettre entr’eux et les écoles.

3396. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 39, qu’il est des professions où le succès dépend plus du génie que du secours que l’art peut donner, et d’autres où le succès dépend plus du secours qu’on tire de l’art que du génie. On ne doit pas inferer qu’un siecle surpasse un autre siecle dans les professions du premier genre, parce qu’il le surpasse dans les professions du second genre » pp. 558-567

Je ne sçai par quelle fatalité tous les grands poëtes des nations modernes s’accordent à mettre ce que les anciens ont composé si fort au-dessus de ce qu’ils composent eux-mêmes.

3397. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre V. Première partie. Les idées anciennes devenues inintelligibles » pp. 106-113

La Providence, qui lui a donné la magistrature des civilisations modernes, tantôt suscite Charles Martel pour écraser d’un seul coup les formidables armées des Sarrasins au milieu même de leurs immenses triomphes ; tantôt met dans les mains d’une jeune vierge l’étendard des lis, pour faire sacrer à Reims le fils de nos rois ; tantôt convoque à Paris tous les souverains de l’Europe, pour assister à la restauration de la monarchie conservatrice de leurs propres droits.

3398. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — II »

Entre tant de mérites qu’à cette date chacun, selon son tour d’esprit, va lui attribuer, je crois mettre le doigt sur l’essentiel : M. 

3399. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — VI »

Et il me semble intéressant de mettre, dans ce moment, sous les yeux du public, une page puissante et inédite, où le grand écrivain examine quelle est, en France, la condition des sociétés autres que l’État et marque la qualité morbide d’un tel régime.‌

3400. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Massillon. — P.-S. » pp. 38-40

Il le met au-dessus de tous pour la solidité, pour l’onction, pour la vertu chrétienne qui est dans toute sa vie et qui passe dans ses discours.

3401. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXVI » pp. 256-263

Il a même emprunté à Millevoye ce trait malicieux qui termine une Épitre à un poëte amateur ; ce dernier avait demandé bonnement à Latouche une préface en vers pour mettre en tête de son recueil de poésies, et le malin introducteur mystificateur lui disait : Imprimez-les vos vers et qu’on n’en parle plus !

3402. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre I »

J’avais mis la malade dans la position de “Trendelenburg”.

3403. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Un grand voyageur de commerce »

Ses récits en seraient beaucoup plus émouvants ; et nous aurions beaucoup plus de plaisir, nous mettrions plus de promptitude à y croire.

3404. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « La Solidarité »

de première classe), vous aurez maintes occasions d’être secourables aux pauvres gens, de faire payer pour eux les riches, de réparer ainsi, dans une petite mesure, l’inégalité des conditions et d’appliquer pour votre compte l’impôt progressif sur le revenu  Notaires (car il y en a ici qui seront notaires), vous pourrez être, un peu, les directeurs de conscience de vos clients et insinuer quelque souci du juste dans les contrats dont vous aurez le dépôt  Avocats ou avoués, vous pourrez souvent par des interprétations d’une généreuse habileté, substituer les commandements de l’équité naturelle, ou même de la pitié, aux prescriptions littérales de la loi, qui est impersonnelle, et qui ne prévoit pas les exceptions  Professeurs, vous formerez les cœurs autant que les esprits ; vous… enfin vous ferez comme vous avez vu faire dans cette maison  Artistes ou écrivains, vous vous rappellerez le mot de La Bruyère, que « l’homme de lettres est trivial (vous savez dans quel sens il l’entend) comme la borne au coin des places » ; vous ne fermerez pas sur vous la porte de votre « tour d’ivoire », et vous songerez aussi que tout ce que vous exprimez, soit par des moyens plastiques, soit par le discours, a son retentissement, bon ou mauvais, chez d’autres hommes et que vous en êtes responsables  Hommes de négoce ou de finance, vous serez exactement probes ; vous ne penserez pas qu’il y ait deux morales, ni qu’il vous soit permis de subordonner votre probité à des hasards, de jouer avec ce que vous n’avez pas, d’être honnête à pile ou face  Industriels, vous pardonnerez beaucoup à l’aveuglement, aux illusions brutales des souffrants ; vous ne fuirez pas leur contact, vous les contraindrez de croire à votre bonne volonté, tant vos actes la feront éclater à leurs yeux ; vous vous résignerez à mettre trente ou quarante ans à faire fortune et à ne pas la faire si grosse : car c’est là qu’il en faudra venir  Hommes politiques, j’allais dire que vous ferez à peu près le contraire de presque tous vos prédécesseurs, mais ce serait une épigramme trop aisée.

3405. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Des avantages attachés à la profession de révolutionnaire. » pp. 200-207

Ce qu’ils s’assuraient les uns aux autres par la mise en commun de leur pauvreté, ce n’était point leur part intégrale des jouissances terrestres, telle que la peut concevoir un ouvrier, et qui comporte, très naturellement, une nourriture copieuse et les plaisirs qu’on trouve chez le marchand de vin et ailleurs : ce n’était que quelques figues sèches et la douceur d’attendre ensemble le royaume de Dieu.

3406. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Delavigne, Casimir (1793-1843) »

Édouard Fournier Tandis qu’il multipliait au grand jour, en s’en faisant gloire, les éditions de ses Messéniennes, si peu lisibles aujourd’hui, avec leur versification de l’Empire, où la phraséologie du rhéteur parle plus haut que le cœur du patriote, il cachait obscurément dans un recueil son admirable ballade l’Âme du Purgatoire ; dans le coin d’une note, sa romance de la Brigantine où Mme Pauline Duchambge la découvrit pour la mettre en musique ; et je ne sais où, son adorable pièce de Néra, que Scudo ramassait de même pour y appliquer une de ses plus pures mélodies.

3407. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « La réforme prosodique » pp. 120-128

« Combien d’entre nous n’eussent pas mis choisir pour la rime, c’est le cas de le dire ?

3408. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXVI. Jésus au tombeau. »

La pierre était déplacée de l’ouverture, et le corps n’était plus à l’endroit où on l’avait mis.

3409. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « Hartley »

Rappelons seulement que par sa théorie des vibrations, il s’est mis en opposition avec les hypothèses courantes de son époque.

3410. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre VIII » pp. 70-76

La pureté du goût est une qualité de l’esprit ; c’est un tact qui peut, bien que difficilement, s’acquérir par l’affinage de l’intelligence : au lieu que la pureté des mœurs est le résultat d’habitudes sages, dans lesquelles tous les intérêts de l’âme sont entrés et se sont mis d’accord avec les progrès de l’intelligence, C’est pourquoi l’accord du bon goût et des bonnes mœurs est plus ordinaire que l’existence du goût sans mœurs, ou des mœurs sans goût.

3411. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préfaces des « Odes et Ballades » (1822-1853) — Préface de 1826 »

S’il n’y avait beaucoup trop de pompe dans ces expressions, l’auteur dirait, pour compléter son idée, qu’il a mis plus de son âme dans les Odes, plus de son imagination dans les Ballades.

3412. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre cinquième. »

Il m’a dit qu’il ne faut jamais Vendre la peau de l’ours qu’on ne l’ait mis par terre.

3413. (1887) La Terre. À Émile Zola (manifeste du Figaro)

Ce que je sais, c’est que je n’ai jamais songé à y mettre les saletés qu’y découvrent les gens moraux ; c’est que j’en ai décrit chaque scène, même les plus fiévreuses, avec la seule curiosité du savant. » On ne demandait pas mieux que de croire, et même quelques jeunes avaient, par le besoin d’exaspérer le bourgeois, exagéré la curiosité du savant.

3414. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre VI. Autres preuves tirées de la manière dont chaque forme de la société se combine avec la précédente. — Réfutation de Bodin » pp. 334-341

Dans cette hypothèse, qu’on explique l’établissement de la monarchie par la force ou par la ruse, les fils auraient été les instruments d’une ambition étrangère, et auraient trahi ou mis à mort leurs propres pères ; en sorte que ces gouvernements eussent été moins des monarchies, que des tyrannies impies et parricides.

3415. (1865) La crise philosophique. MM. Taine, Renan, Littré, Vacherot

Il s’y met de très-bonne foi, et il donne même à M.  […] Taine avait d’abord proposé un critérium littéraire qu’il mettait à l’abri du nom de Spinoza : c’était ce qu’il appelait la faculté maîtresse. […] Le premier aime les descriptions accentuées, burinées, individuelles ; il aime qu’un fait soit distinct d’un autre fait ; il tranche les différences, les rend saillantes, les met en relief, comme un physiologiste qui fait gonfler un vaisseau invisible pour le rendre visible. […] Vacherot soutient les doctrines spiritualistes, à sa manière à la vérité, mais sans qu’aucun grand principe soit mis en péril. […] Il est un point de doctrine qui, dans l’école cartésienne et dans l’école spiritualiste contemporaine, n’a jamais été mis en discussion : c’est qu’en Dieu l’infini et le parfait sont une seule et même chose.

3416. (1856) Cours familier de littérature. II « Xe entretien » pp. 217-327

II La Convention avait mis la France bien près de cette extinction des lettres. […] Je n’avais encore mis le pied dans aucun salon de Paris ; j’étais trop inconnu, trop étranger dans cette capitale, trop peu entreprenant, trop timide, trop indépendant, trop fier et trop humble pour chercher à m’introduire entre deux portes dans un monde où je n’étais pas né. […] … il a mis le poignard dans le sein de tous, qu’il soit traîné ! […] … il a mis les têtes à prix, qu’il soit traîné ! […] … Depuis cinq mois nous nous sommes mis à la ration pour payer la liberté ce qu’elle vaut !

3417. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre II. La parole intérieure comparée à la parole interieure »

Le même fait se présente également chez les jeunes gens et les adultes, quand ils se mettent à l’étude des langues étrangères136. […] Il y a de grandes analogies, toute métaphysique mise à part, entre la psychologie de Bain et celle de Maine de Biran ; grâce à cette double influence, le toucher et son complément, sens musculaire, ont pris dans les théories psychologiques modernes une place exagérée, au détriment de la vue et de l’ouïe [ch. […] Se mettre une idée dans la tête, une tête faible, une pauvre tête, la forte tête de l’endroit, etc. […] Voir dans la deuxième partie de notre présentation le commentaire de l’intérêt de ce passage extrêmement riche p. 70-71 si on le met en rapport avec la nouveauté formelle future du monologue intérieur du point de vue littéraire. […] Victor Egger compte parmi les nombreux émules des deux professeurs au Collège de France (Maury et Hervey de Saint-Denys, sinologue, ayant publié en 1867 Les Rêves et les moyens de les diriger) qui se mettent à tenir plus ou moins régulièrement des recueils de leurs rêves (voir J.

3418. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLVe entretien. Vie de Michel-Ange (Buonarroti) »

« Giorgio, disait-il un jour avec enjouement à son ami Vasari, à l’époque où il remplissait déjà l’Italie de son nom et de ses œuvres, si j’ai eu quelque grandeur et quelque bonheur dans le génie, cela m’est venu d’être né dans la pauvreté et dans l’élasticité de votre air des collines d’Arezzo ; et c’est ainsi que je tirai, pour ainsi dire, du lait de ma nourrice, à Settignano, le ciseau et le maillet avec lesquels je fais mes figures. » III La famille de Ludovico Buonarroti devenue plus nombreuse avec les années, par la fécondité de sa femme, le père de Michel-Ange, pour élever ses fils, fut obligé de les mettre en apprentissage dans les manufactures de laine et de soie de Florence, qu’on appelait en Toscane les Arts, et qui, dans un pays gouverné par des artisans devenus princes, ne dérogeaient point à la noblesse des familles. […] Quant au rayonnement de la face ; quant à cette terreur d’intelligence qu’elle inspire au regard ; quant à ce reflet de divinité que le visage semble avoir contracté dans le commerce divin avec le feu du buisson, tout cela est tellement surhumain qu’on est tenté de s’écrier, comme le commentateur italien de cette statue, avec les Hébreux éblouis : « Mettez un voile sur votre face, car nous ne pouvons en supporter l’éclat !  […] Mais Michel-Ange l’affermit, le simplifia, l’éclaira, donna à ses piliers les muscles qui leur manquaient pour porter un Panthéon dans le ciel, le décora de son unité, de sa lumière, de son harmonie, ces trois attributs de la Divinité qu’il renferme, et mit, pour ainsi dire et pour la première fois, le christianisme en plein jour et en plein firmament ; enfin il fit le modèle, il commença les premières courbes de cette immense et sublime coupole qui écraserait le sol, si elle ne paraissait soutenue par le miracle de la pensée qui l’éleva dans les airs ; il attacha à jamais ainsi son nom et sa mémoire au plus grand acte de foi que l’humanité moderne ait construit en pierres.

3419. (1890) L’avenir de la science « XXIII »

Je ne saurais approuver les lieux communs que l’on a coutume de débiter contre les conquérants ; il faut être bien superficiel pour ne voir dans Alexandre qu’un écervelé, qui mit l’Asie en cendres. La guerre et la conquête ont pu être, dans le passé, un instrument de progrès ; c’était une manière, à défaut d’autre, de mettre les peuples en contact et de réaliser l’unité de l’humanité. […] Il ne faut donc pas craindre d’y mettre tout ce qu’on peut imaginer de bonté et de beauté.

3420. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — CHAPITRE IX »

Cependant la bande joyeuse se met à table. […] Alexandre Dumas a mise en scène, dans sa pièce. […] Ces anges-là mettent à se perdre je ne suis quelle ardeur d’étourdissement et de vertige, inconnue aux femmes vulgaires.

3421. (1830) Cours de philosophie positive : première et deuxième leçons « Deuxième leçon »

Bien loin de mettre en évidence la véritable histoire de la science, il tendrait à en faire concevoir une opinion très fausse. […] La construction de cette échelle encyclopédique, reprise ainsi successivement en partant de chacune des cinq grandes sciences, lui fera acquérir plus d’exactitude, et surtout mettra pleinement en évidence sa solidité. […] Je ne dois point passer à une autre considération sans mettre le lecteur en garde à ce sujet contre une erreur fort grave, et qui, bien que très grossière, est encore extrêmement commune.

3422. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Les frères Le Nain, peintres sous Louis XIII, par M. Champfleury »

A la manière dont il en parle d’abord et dont il les envisage, il est évident qu’il a vu en eux, qu’il a rencontré ou transporté en leur image et sous leurs traits comme un idéal de ses qualités et de ses défauts : tant il est vrai que l’idéal est aussi un produit de nature, et que ceux même qui s’en passent le mieux dans la pratique journalière le mettent quelque part en dehors et au-dessus d’eux ! […] Je ne puis guère, sans sortir de mon domaine qui est déjà bien assez étendu et assez vague comme cela, me mettre à mon tour à décrire en détail les principaux tableaux des frères Le Nain et m’appesantir sur le caractère de leurs œuvres.

3423. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat. »

Dans la plupart des cas, à mon sens, il y a mieux à faire : c’est de profiter de l’accroissement de connaissances et des nouvelles lumières en chaque chose, sans mettre à néant ce qui nous a été transmis de longue main et qui a ses raisons de subsister, ses racines cachées et qu’on ne sait plus bien toujours. […] Mémoires et Correspondance du maréchal de Catinat, mis en ordre et publiés par M. 

3424. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DISCOURS DE RÉCEPTION A L’ACADÉMIE FRANÇAISE, Prononcé le 27 février 1845, en venant prendre séance à la place de M. Casimir Delavigne. » pp. 169-192

Je vois devant moi les hommes qui, à des degrés divers, ont donné à la scène française son éclat et ses nuances de nouveauté depuis plus de vingt ans ; ce n’est pas devant ces juges du camp, qui ont pratiqué l’arène, ce n’est pas devant le grand poëte qui me fait l’honneur de me recevoir en ce moment au nom de l’Académie, glorieux champion dans bien des genres, et lui-même l’un des maîtres du combat, que je viendrais étaler et mettre aux prises des théories contradictoirement discutables, tour à tour spécieuses, mais qui n’ont jamais de meilleure solution ni de plus triomphante clôture que ce vieux mot d’un vainqueur parlant à la foule assemblée : Allons de ce pas au Capitole remercier les Dieux !  […] A partir de 1828, un temps d’arrêt se présente : il se trouve en face de générations plus inquiètes, plus enhardies, qui se mettent à contester et qui réclament dans les conceptions dramatiques, et même dans le style, certaines conditions nouvelles, plus historiques, plus naturelles, que sais-je ?

3425. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre troisième. Les sensations — Chapitre premier. Les sensations totales de l’ouïe et leurs éléments » pp. 165-188

Il y en a soixante et plus en chimie ; il y en a bien davantage, pour tel sens, l’odorat par exemple ou le goût ; car il n’est presque pas de matière volatile odorante qui ne forme un type à part ; à côté de la sensation qu’elle provoque, on en peut mettre parfois deux ou trois autres tout au plus, comme l’odeur de l’ail et de la vapeur d’arsenic à côté de l’odeur de l’étain ; ainsi les espèces sont innombrables, et les genres presque nuls ; à cet égard, comptez les odeurs des plantes parfumées dans un parterre, et des gaz désagréables dans un laboratoire de chimie. — En sorte qu’au commencement de la psychologie nous sommes obligés, ce semble, de poser un nombre très grand de données mutuellement irréductibles, comme les corps simples en chimie, comme les espèces animales en zoologie, comme les espèces végétales en botanique, mais avec ce désavantage particulier qu’en chimie, en botanique, en zoologie, les différences et les ressemblances sont constituées par des éléments homogènes et précis, le nombre, la force et la forme, tandis que, dans les sensations, nul élément pareil ne pouvant être isolé, nous sommes réduits à l’affirmation brute de quelques ressemblances grossières et à la constatation sèche de différences indéfinissables en nombre indéfini. […] Mais si la roue se met à tourner avec une vitesse suffisante, une sensation nouvelle s’élève, celle d’un son musical.

3426. (1829) De la poésie de style pp. 324-338

Il faut, disait-il, que nos poètes et prosateurs français dits romantiques y pensent mûrement avant de se mettre en besogne ; car il ne s’agit de rien moins que de refaire ou de défaire la langue française ; et ce projet mérite attention. […] Hugo dans cette pièce et celle de ses devanciers, il suffit de mettre en regard le Mazeppa et le beau début de l’ode au comte du Luc.

3427. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Lettres de la marquise Du Deffand. » pp. 412-431

Mme Du Deffand eut cela de particulier du moins, entre les esprits forts de son siècle, de n’y point mettre de bravade, de sentir que la philosophie qu’on affiche cesse d’être de la philosophie, et elle se contenta de rester en parfaite sincérité avec elle-même. […] Ce qu’on peut dire, c’est que l’union ne pouvait guère subsister entre ces deux femmes, y eussent-elles chacune beaucoup mis du leur.

3428. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Frédéric le Grand littérateur. » pp. 185-205

Mais quand Frédéric admirait dans Voltaire le grand poète par excellence, quand il voyait dans La Henriade le nec plus ultra des épopées, et qu’il la mettait bien au-dessus des Iliade et des Énéide, il prouvait seulement son manque d’idéal, et à quel point il avait borné de ce côté ses horizons. […] Tous les bons côtés de Frédéric sont mis en saillie dans ce récit, et d’Alembert, circonspect d’ailleurs, n’a garde de voir autre chose durant ces trois mois de séjour.

3429. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre deuxième. La force d’association des idées »

Dans le centre visuel dorment toutes les images de la vue, triées et mises à part ; dans le centre auditif sommeillent toutes les images de l’ouïe. […] Ferri, dans son étude sur la psychologie de l’association, ne dit rien de cette loi et cite pourtant lui-même un exemple qui aurait pu le mettre sur la voie.

3430. (1900) La province dans le roman pp. 113-140

Il est de quelque province dont il n’a quitté que fort tard le village ou les champs ; il en garde l’accent ; il en garde l’esprit de clocher, les jalousies, les rancunes, toutes les tares originelles qui faisaient de lui une médiocrité de la province, et sur lesquelles la fréquentation des milieux parisiens n’a mis qu’un léger vernis, bien facile à reconnaître, bien facile à briser. […] Et madame de Sévigné, malgré les grands airs qu’elle prend d’aimer les Rochers et leurs habitants, bien qu’on puisse voir en elle une aïeule des bergères patriciennes de la fin du xviie  siècle, n’est au fond qu’une Parisienne parisianisante, qui regrette Paris dès qu’elle a mis le pied en Bretagne.

3431. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — [M. de Latena, Étude de l’homme.] » pp. 523-526

Je demanderai à citer ici quelques-unes de ces pensées, en les isolant de manière à les mettre plus en saillie.

3432. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « I » pp. 1-8

M. de Noailles prépare donc lentement ce travail auquel il mettra un volume ou plus d’introduction, de biographie et d’histoire.

3433. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « SUR ANDRÉ CHÉNIER. » pp. 497-504

Les plus grandes places de poëtes sont dues, à coup sûr, à ceux qui ont mis de puissantes facultés d’imagination, de sensibilité et d’intelligence, au service des intérêts et des sentiments d’un grand nombre de leurs concitoyens et de leurs contemporains ; qui les ont soutenus, animés, récréés, ennoblis ; qui les ont aidés à pleurer, à espérer, à croire, soit dans un ordre purement héroïque et humain, soit par rapport aux choses immortelles.

3434. (1874) Premiers lundis. Tome I « Deux révolutions — I. L’Angleterre en 1688 et la France en 1830 »

Jusque-là donc rien de mieux que de comparer et de mettre en regard les termes des rapports.

3435. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre V. Résumé. »

Ceux qui vous traiteront ainsi seront tous des philosophes, auront à tout moment à la bouche les phrases que vous débitez depuis une heure, répéteront toutes vos maximes, citeront comme vous les vers de Diderot et de la Pucelle  Et quand tout cela n’arrivera-t-il   Six ans ne se passeront pas que tout ce que je vous dis ne soit accompli  Voilà bien des miracles, dit Laharpe, et vous ne m’y mettez pour rien  Vous y serez pour un miracle tout au moins aussi extraordinaire ; vous serez alors chrétien  Ah !

3436. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre III. De la sécheresse des impressions. — Du vague dans les idées et le langage. — Hyperboles et lieux communs. — Diffusion et bavardage »

Ce sont comme de vagues indications qu’on donne au prochain de la direction qu’il doit prendre pour atteindre notre pensée : s’il a plus d’esprit que nous, il ira plus loin, et il verra dans nos paroles tout ce que nous n’y avons pas mis.

3437. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Une âme en péril »

» « Les vierges sentent le lys. » Et voici une pensée religieuse : « La Théologie est une reine qui a les Arts pour chambellans et les Sciences pour dames d’atours. » Je vous jure que tout est de cette force, sauf une douzaine de pensées que j’ai mises à part et que je ne citerai pas, crainte d’aggraver l’état d’âme inquiétant que nous révèle la Préface   Cette préface est un morceau bien curieux.

3438. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Rêveries sur un empereur »

Il ne cachait point sa haine de la France et des choses françaises ; il proscrivait de sa table les mets et les vins de notre pays et pourchassait notre langue jusque dans les menus de ses dîners.

3439. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Les derniers rois »

Mais, pour avoir accompli trop brusquement ce grand acte de justice, je mis dans l’embarras beaucoup de propriétaires ; et la plupart des esclaves affranchis ne surent que faire de leur liberté inopinée.

3440. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Les snobs » pp. 95-102

On peut mettre de la vanité et de la suffisance, même dans la soumission au passé, même dans le culte de la tradition, même dans la routine.

3441. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Pour encourager les riches. » pp. 168-175

Puis elle donnait aux pauvres… mettons un million.

3442. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Saint-Pol-Roux (1861-1940) »

Même aux esquisses qu’il s’amuse à rendre, Saint-Pol-Roux met toute sa palette, et quelle palette !

3443. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Silvestre, Armand (1837-1901) »

… Jean-Jacques raconte que, tout enfant, il allait se poster, à la promenade, sur le passage des femmes et que, là, il trouvait un plaisir obscur, mais très vif, à mettre bas ses chausses.

3444. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Sully Prudhomme (1839-1907) »

De plus, un vrai souci du rythme et de la rime éclatait partout dans le compact volume qui avait mis immédiatement hors de page l’auteur et ses livres suivants.

3445. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre VIII. Les Fedeli » pp. 129-144

La mise en scène, comme on voit, devait offrir de grandes difficultés ; elle exigeait des masques bien étranges, même à côté des masques fantastiques de la comédie italienne.

3446. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre II. « Faire de la littérature » » pp. 19-26

Ils mettent leur pensée en régie.

3447. (1911) La valeur de la science « Introduction »

Les progrès de la Science ont semblé mettre en péril les principes les mieux établis, ceux-là mêmes qui étaient regardés comme fondamentaux.

3448. (1911) La valeur de la science « Deuxième partie : Les sciences physiques — Chapitre VII. L’Histoire de la Physique mathématique. »

On renonça à pénétrer dans le détail de la structure de l’univers, à isoler les pièces de ce vaste mécanisme, à analyser une à une les forces qui les mettent en branle et on se contenta de prendre pour guides certains principes généraux qui ont précisément pour objet de nous dispenser de cette étude minutieuse.

3449. (1882) Qu’est-ce qu’une nation ? « I »

Voilà des points sur lesquels un esprit réfléchi tient à être fixé, pour se mettre d’accord avec lui-même.

3450. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXX » pp. 330-337

Il les raya et mit 2 000 écus. » Il est évident que ce certain homme c’était le roi, et que celle des amies de madame Scarron, chez qui se trouvait ce certain homme, c’était madame de Montespan ; et que les absences que le certain homme souffrait impatiemment, celaient celles de madame Scarron quand elle retournait dans la maison de Paris94.

3451. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » pp. 124-134

Plusieurs Critiques respectables & éclairés nous ont reproché d’avoir traité avec trop d’indulgence ses Mélanges de Littérature : de n’avoir pas assez insisté sur les défauts de sa métaphysique souvent obscure, imperceptible, entortillée ; sur les inégalités de son style, tantôt foible, tantôt plein de morgue, & presque toujours froid & bourgeois ; de n’avoir pas mis sous les yeux du Lecteur le contraste qui résulte de la médiocrité de ses productions, & du ton de mépris qu’il affecte, dans toutes les occasions, pour ce qu’il appelle le bas peuple des Poëtes, des Orateurs, des Historiens.

3452. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre V. La Henriade »

Du moins, le chantre d’Achille n’a pas mis l’Iliade en harangues.

3453. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 7, que les genies sont limitez » pp. 67-77

On peut mettre en quelque façon Teniers au nombre des peintres dont je parle, quoiqu’il fût né en Brabant, parce que son génie l’a déterminé à travailler plûtôt dans le goût des peintres hollandois que dans le goût de Rubens et de Vandick ses compatriotes, et même ses contemporains.

3454. (1912) L’art de lire « Chapitre VII. Les mauvais auteurs »

Ceci est très dangereux ; mais, si l’on y met de la discrétion, très salutaire encore.

3455. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Les dîners littéraires »

Gauchie dans ses voies, mise hors des règles, qui sont la force, et hors des idées morales, qui sont l’honneur, la littérature de l’individualisme et de l’indépendance a tué l’esprit, qui, comme la mousse des vins pétillants, est toujours le résultat d’une compression.

3456. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Léon Cladel »

Cladel, qui est un paysan et qui s’en vante, et qui a raison de s’en vanter ; Cladel, qui s’est voué à les peindre à fond, et qui les a peints une seconde fois dans sa Fête votive de saint Bartholomée Porte-glaive 51, avec une énergie plus grande encore que la première fois (dans le Bouscassié), s’est bien gardé, tout républicain qu’il puisse être, d’écrire sur ses deux volumes : « Mes ruraux » , qui serait ridicule, mais il a mis : « Mes paysans » , qui dit nettement que dans ses livres il ne s’agit exclusivement que des paysans de son pays.

3457. (1893) Du sens religieux de la poésie pp. -104

Nous mettrons notre orgueil à chanter ses louanges. […] Alors des solitudes lointaines, fabuleuses du mystérieux Orient, se mettent en voyage vers le Nouveau-Né trois personnages sacrés, trois royaux et immémoriaux vieillards. […] En sorte, comme le disait avec l’accent délicieux qui lui était propre, Théodore de Banville, en sorte que « Grâce à l’égalité du luxe que nous avons tristement conquise, nous voilà revenus au temps du paradis terrestre où il n’y avait qu’un homme et qu’une femme : un veston en vaut un autre, et la première dame venue, honnête ou frivole, n’a pas plutôt dépensé trente billets de mille francs qu’elle est mise comme tout le monde et de façon à ne pas se faire remarquer ». […] Ou bien au contraire elle envahit le domaine plastique, hérisse le style écrit de termes arides et qui ne font pas image, encombre la peinture et la musique de théories réputées infaillibles, de procédés qui suppriment l’émotion et l’instinct et prétendent mettre l’artiste à même de produire à coup sûr des œuvres irréprochables.

3458. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Herbert Spencer — Chapitre II : La psychologie »

Mais s’il est certain que de la simple action réflexe par laquelle l’enfant tette, jusqu’aux raisonnements compliqués de l’homme adulte, le progrès se fait chaque jour par degré infinitésimal ; il est certain aussi qu’entre les actes automatiques des êtres les plus bas et les plus hautes actions conscientes de la race humaine, on peut disposer toute une série d’actions manifestées par les diverses tribus du règne animal, de telle façon qu’il soit impossible de dire à un certain moment de la série : Ici commence l’intelligence. » Si du savant qui poursuit ses recherches avec la pleine conscience des procédés de raisonnement et d’induction qu’il emploie, nous descendons à l’homme d’une éducation ordinaire, qui raisonne bien et d’une manière intelligente, mais sans savoir comment ; si de là nous descendons au villageois, dont les plus hautes généralisations ne dépassent guère les faits locaux ; si de là nous tombons aux races humaines inférieures qu’on ne peut considérer comme pensantes, dont les conceptions numériques dépassent à peine celles du chien ; si nous mettons à côté les plus élevés des primates, dont les actions sont tout aussi raisonnables que celles d’un petit écolier ; si de là nous arrivons aux animaux domestiques ; puis des quadrupèdes les plus sagaces à ceux qui le sont de moins en moins, c’est-à-dire qui ne peuvent plus modifier leurs actions selon les circonstances et sont guidés par un immuable instinct ; puis si nous remarquons que l’instinct, qui consistait d’abord en une combinaison compliquée de mouvements produits par une combinaison compliquée de stimulus, prend des formes inférieures dans lesquelles stimulus et mouvements deviennent de moins en moins complexes ; si de là nous en venons à l’action réflexe et « si des animaux chez qui cette action implique l’irritation d’un nerf et la contraction d’un muscle, nous descendons encore plus bas chez les animaux dépourvus de système nerveux et musculaire, et que nous découvrions qu’ici c’est le même tissu qui manifeste l’irritabilité et la contractilité, lequel tissu remplit aussi les fonctions d’assimilation, sécrétion, respiration et reproduction ; et si, finalement, nous remarquons que chacune des phases de l’intelligence, énumérées ici, se fond dans les voisines par des modifications trop nombreuses pour être distinguées spécifiquement, et trop imperceptibles pour être décrites, nous aurons en une certaine mesure montré la réalité de ce fait : qu’on ne peut effectuer de séparation précise entre les phénomènes de l’intelligence et ceux de la vie en général. » L’autre base de la doctrine, c’est la corrélation nécessaire de l’être et de son milieu, que l’auteur exprime en disant que la vie est une correspondance, « un ajustement continu des rapports internes aux rapports externes. » L’être vivant quel qu’il soit, arbre, infusoire ou homme, ne peut subsister s’il n’y a harmonie entre son organisme et son milieu ; et si à la vie physique s’ajoute la vie psychique, l’ajustement deviendra plus complexe. […] Un examen de couches superficielles, d’où il infère la présence de charbon au-dessous, lui permet de mettre en correspondance ses actions avec des coexistences situées à mille pieds en dessous. […] Nul n’ignore les luttes célèbres que la nature de la raison a soulevées, et comment depuis l’antiquité jusqu’à nos jours cette question a mis aux prises l’empirisme et l’idéalisme. […] La vérité la plus large que les recherches des physiologistes aient mise au jour, est parallèle à la vérité que nous venons justement d’atteindre.

3459. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre quatrième. Éléments sensitifs et appétitifs des opérations intellectuelles — Chapitre deuxième. Les opérations intellectuelles. — Leur rapport à l’appétition et à la motion. »

Tout jugement d’expérience est d’abord, nous l’avons dit, l’aperception d’une nouveauté, d’une différence ; par exemple, un rocher que l’animal avait toujours vu immobile au-dessus de sa retraite se met à tomber et le blesse. […] Quand il la posera plus tard, il ne fera, pourrait-on dire, que mettre des idées et représentations nouvelles en conflit avec la première, et la résultante sera toujours la direction imprimée par la représentation la plus forte ou par l’ensemble de représentations le plus fort. […] Cette vision peut même aller jusqu’à l’hallucination : elle ne fait alors que mettre mieux en lumière les lois mécaniques qui la régissent. […] En un mot, elle met à notre disposition une sorte d’univers intérieur, de monde abrégé sur lequel nous réagissons par des mouvements cérébraux, au lieu de réagir par des mouvements musculaires de translation effective.

3460. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gibbon. — II. (Fin.) » pp. 452-472

On a su, depuis, que cette traduction à laquelle Septchênes mit son nom était en partie de Louis XVI. […] Il apprit, au printemps de 1793, que la femme de son ami lord Sheffield venait de mourir ; il n’hésita pas à voler vers lui, à se mettre en route pour l’Angleterre par l’Allemagne, et à faire ce voyage depuis quelque temps différé, que les circonstances présentes et la guerre engagée rendaient alors plus difficile.

3461. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire de la maison royale de Saint-Cyr, par M. Théophile Lavallée. » pp. 473-494

Dans le bien qu’elle avait fait à Saint-Cyr, elle comptait pour beaucoup les soins qu’elle avait pris de la récréation : C’est là, disait-elle, ce qui met l’union dans une maison et en ôte les partialités ; c’est là ce qui lie les maîtresses avec leurs élèves ; c’est là qu’une supérieure se fait goûter et épanouit le cœur de ses filles en leur donnant quelques plaisirs ; c’est là qu’on dit des choses édifiantes sans ennuyer, parce qu’on les mêle avec de la gaieté ; c’est là qu’en raillant on jette de bonnes maximes. […] Pendant la paix, au retour des chasses, il vient souvent trouver Mme de Maintenon en ce lieu de retraite, mais toujours après s’être donné le temps de mettre, par respect pour les Dames, un habit décent.

3462. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIIIe entretien. Chateaubriand, (suite) »

D’ailleurs, la raison trop dure ne fait qu’aigrir celui qui souffre, comme la garde maladroite qui, en tournant l’agonisant dans son lit pour le mettre plus à son aise, ne fait que le torturer. […] Comme si l’on craignait que quelqu’un ne vînt ravir ce trésor, fermant mystérieusement la porte sur soi, on se met à faire l’analyse de sa récolte, blâmant ou approuvant Tournefort, Linné, Vaillant, Jussieu, Solander.

3463. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre IX, les mythes de Prométhée »

Il réchauffe et il éclaire la famille, il cuit son pain et ses mets, content des touffes d’herbes sèches dont on rassasie sa faim diminuée. […] Il l’accuse encore de mettre tout « le bien de son mari sur ses hanches ».

3464. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — II. L’histoire de la philosophie au xixe  siècle — Chapitre II : Rapports de l’histoire de la philosophie avec la philosophie même »

On dira peut-être que les systèmes ne correspondent pas aux choses telles qu’elles sont en soi, mais qu’ils ne sont que les divers points de vue que la raison humaine découvre ou plutôt met elle-même dans les choses. […] Par quel moyen les mettre d’accord ?

3465. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre III : Concurrence vitale »

— Les causes qui mettent obstacle à la tendance naturelle des espèces à se multiplier sont fort obscures. […] En quelques cas on peut prouver que dans des districts différents ce sont de très différentes causes qui mettent obstacle à l’existence d’une même espèce.

3466. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XI : M. Jouffroy moraliste »

Ici la nature même des choses est convaincue de méchanceté ; le cœur de l’homme et toutes les félicités de la vie mis en présence, le cœur de l’homme n’est point satisfait. » De là un découragement profond, un désenchantement incurable, et cette question mélancolique : « Pourquoi suis-je ici ?  […] La nature brisa encore cette création, comme elle avait fait des autres, et d’essai en essai, allant du plus imparfait au plus parfait, elle arriva à cette dernière création qui mit pour la première fois l’homme sur la terre… Pourquoi le jour ne viendrait-il pas aussi où notre race sera effacée et où nos ossements déterrés ne sembleront aux espèces vivantes que des ébauches grossières d’une nature qui s’efface ?

3467. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre X. »

Comment, dirons-nous, si le grand poëte lyrique, né sur ce territoire thébain, qui a tant fourni à l’horreur tragique, avait composé lui-même ce grand nombre de tragédies, comment, si Pindare avait été l’émule d’Eschyle, avait mis comme lui sur la scène des chœurs de Danaïdes ou de captives persanes, pas un souvenir anecdotique n’en serait-il resté ? […] Quel oubli de tout, hormis l’orgueil de la patrie commune et la joie de sa gloire, dans cette distraction du poëte qui met le mot de barbares à la bouche même des Perses, comme se reconnaissant une race inférieure et vaincue !

3468. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXIX » pp. 117-125

Dans l’exaltation où ils sont de leur importance sociale et de l’appui qu’ils apportent au pouvoir civil et politique, les catholiques, par l’organe de Veuillot, s’écrient à la fin de cette Épître outrecuidante à Villemain : « Si vous savez l’heure de notre défaite ou de notre avilissement, mettez en sûreté vos trésors.

3469. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Bossuet. Œuvres complètes publiées d’après les imprimés et les manuscrits originaux, par M. Lachat. (suite et fin) »

Il est en effet sorti de chaire sans aucune fatigue, et néanmoins, par précaution, il s’est mis au lit jusqu’au soir pour se reposer, et chacun l’est venu voir dans son lit. » Voilà Bossuet au naturel deux ans avant sa mort et à l’âge de soixante-quinze ans, édifiant encore ses diocésains et visité d’eux sans façon dans son lit après sa journée dominicale et pastorale.

3470. (1874) Premiers lundis. Tome I « Madame de Maintenon et la Princesse des Ursins — II »

Dans un siècle où la dévotion était de mise, au moins dans les manières, elle n’en a que l’indispensable ; son esprit purement ambitieux et humain croit à la vertu de M. de Vendôme bien plus qu’à celle d’une oraison, et juge les débats théologiques avec une supériorité tout à fait mondaine.

3471. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIV. De la plaisanterie anglaise » pp. 296-306

La plupart des hommes, absorbés par les affaires, ne cherchent, en Angleterre, le plaisir que comme un délassement ; et de même que la fatigue, en excitant la faim, rend facile sur tous les mets, le travail continuel et réfléchi prépare à se contenter de toute espèce de distraction.

3472. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section II. Des sentiments qui sont l’intermédiaire entre les passions, et les ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre III. De la tendresse filiale, paternelle et conjugale. »

La conclusion que j’ai annoncée, c’est que les âmes ardentes éprouvent par l’amitié, par les liens de la nature, plusieurs des peines attachées à la passion, et que par-delà la ligne du devoir et des jouissances qu’on peut puiser dans ses propres affections, le sentiment, de quelque nature qu’il puisse être, n’est jamais une ressource qu’on trouve en soi, il met toujours le bonheur dans la dépendance de la destinée, du caractère, et de l’attachement des autres.

3473. (1823) Racine et Shakspeare « Chapitre III. Ce que c’est que le Romanticisme » pp. 44-54

La tragédie racinienne dit bien plus noblement : Je veux enfin qu’au jour marqué pour le repos, L’hôte laborieux des modestes hameaux Sur sa table moins humble ait, par ma bienfaisance, Quelques-uns de ces mets réservés à l’aisance.

3474. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Préface »

En effet, il s’agit de la découvrir, si elle existe, et non de la mettre aux voix.

3475. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre III. Buffon »

Tandis que d’autres réduisaient l’homme à l’animalité, il se faisait, lui, une haute idée de l’homme ; il le mettait à part dans la nature, au-dessus de tous les êtres vivants ; il l’élevait, grandissait sa puissance et sa noblesse.

/ 3767