C’est le parfait usage de ce mystère qui constitue le symbole : évoquer petit à petit un objet pour montrer un état d’âme, ou, inversement, choisir un objet et en dégager un état d’âme, par une série de déchiffrements. […] À Loti : continuez à débiter votre solde exotique de « rêves » à l’usage de bourgeois et caillettes. […] — Trois ou quatre foutriquets qui gagnent un pain quotidien par l’usage raisonné de la psychologie. […] La langue, épuisée par trois cents ans d’usage classique, avait besoin d’être retrempée dans le lyrisme, il fallait refondre les moules à images, inventer de nouveaux panaches. […] ces règles d’amour à l’usage des comtesses et des marquises qu’on dirait apprises dans les brasseries de femmes du quartier Latin !
Et vous, prêtres dociles à la loi, ne calomniez pas la philosophie ; c’est de ce nom qu’on appelle le plus digne usage de la raison de l’homme ; c’est un nom sacré, ne le prononcez qu’avec respect ; le plus sûr moyen de discréditer vos doctrines religieuses et d’accélerer la chute de vos autels serait de renouveler le scandale de ces déclamations fanatiques devenues si ridicules, depuis un demi-siècle, dans la bouche de vos prédécesseurs. […] Ceux qui ne l’ont vu et connu que comme académicien des Inscriptions, et dans ses travaux littéraires des dernières années, ont pu goûter ses meilleurs fruits et les mieux élaborés à notre usage ; mais l’arbre tout entier, le tronc, les racines sont là-bas. […] « …… Aussi, l’excessif et profane usage de ces anathèmes, les a-t-il discrédités à tel point, qu’il serait aujourd’hui presque aussi ridicule de les craindre que de les renouveler. » Daunou avait écrit cela dan la conclusion de son Essai ; il put voir à ce sourire si le maitre était tout à fait de cet avis indifférent. […] Fidèle à sa méthode, l’auteur y adopte trois grandes divisions : 1° l’examen et le choix des faits, premier travail préalablement nécessaire à l’historien, et qui comprend la question de la certitude et des sources, celle des usages et du but de l’histoire ; 2° la classification des faits, quant aux lieux, quant au temps, c’est-à-dire géographie et chronologie ; 3° l’exposition des faits, ce qui aboutit à l’histoire proprement dite, telle qu’elle se dessine aux lecteurs ; les deux autres branches sont plutôt un travail de cabinet pour l’historien.
André Gide n’avait même pas mis sa signature, selon l’usage, à titre d’éditeur des papiers d’un ami défunt. […] Il écrit : « Son classicisme même n’est qu’une feinte suprême pour masquer la révolte de son âme où les démons assemblés se disputent. » Il ajoute : « Il n’y a qu’un mot pour définir un tel homme, mot réservé et dont l’usage est rare, car la conscience dans le mal, la volonté de perdition ne sont pas si communes : c’est celui de démoniaque. […] André Gide qui viennent de paraître, et dont l’un est spécialement à l’usage de cette jeunesse qu’on l’accuse de vouloir corrompre. […] Il a publié franchement les Faux monnayeurs, en se conformant à tous les usages de la profession.
C’est qu’il n’y a que deux façons de s’accommoder au monde : la médiocrité d’esprit et la supériorité d’intelligence ; l’une à l’usage du public et des sots, l’autre à l’usage des artistes et des philosophes ; l’une qui consiste à ne rien voir, l’autre qui consiste à voir tout. […] It is good to see what a lamentable confession the whigs all make of my ill usage. […] Petit livre à l’usage des enfants, ainsi que Whittington et son chat, nommé plus loin.
Les flèches empoisonnées et le curare ne se trouvent plus aujourd’hui que chez les tribus les plus farouches de l’Amérique du Sud, et il pourrait bien se faire que d’ici à un demi-siècle l’usage de ce poison et les procédés de préparation fussent complétement perdus. […] L’homme, qui a le droit de se servir des animaux pour ses usages domestiques et pour son alimentation, a également le droit de s’en servir pour s’instruire dans une science utile à l’humanité. […] Toutes les sciences qui font usage de la méthode expérimentale doivent tendre à devenir anti-systématiques. […] Les lobes cérébraux ayant été enlevés chez un pigeon par exemple, l’animal perd immédiatement l’usage de ses sens et la faculté de chercher sa nourriture. […] Peu à peu, le cerveau se régénère avec ses éléments anatomiques spéciaux, et, à mesure que cette régénération s’opère, on voit les usages des sens, les instincts et l’intelligence de l’animal revenir.
C’est à Oxford, s’il faut l’en croire, qu’il a fait la première fois usage de l’opium. Il paraît vraisemblable, en tout cas, qu’il en faisait alors et qu’il en a toujours fait un usage des plus modérés, s’offrant à peine de loin en loin à la débauche d’une soûlerie. […] Et il ajoute « qu’on n’aurait pas eu de peine à en faire un usage plus fâcheux encore pour la mémoire de Poe ». […] Cette voix les rendait indifférents aux usages du monde : quand elle commandait, ils obéissaient ; et de ce qui se passait au dehors ils n’en voulaient rien savoir. […] Couperus lui ont longtemps reproché ses tendances au cosmopolitisme, l’usage qu’il faisait trop volontiers de mots, de tours de phrase français.
Ajoutez qu’à mesure qu’on s’éloigne de ces temps anciens et de ce régime aboli, il devient d’un intérêt historique sérieux d’en bien connaître les mœurs, les usages, les particularités, les excès ; de voir toute une province et des plus rudes, saisie au vif et prise sur le fait dans ses éléments les plus saillants et les plus heurtés, dans sa noblesse, son clergé, son tiers état et ses paysans, d’assister à l’enquête et à la justice, souvent bien expéditive, qu’on y fait au nom de l’autorité royale, treize ans seulement après les rébellions de la Fronde. […] Je vois qu’en 1669, M. de Montausier avait songé à appliquer Fléchier à une interprétation et à un commentaire d’Horace, sans doute pour l’édition à l’usage du dauphin.
Il nous a raconté comment il traita d’elle, en quelque sorte, avec Miossens129, qui avait les devants : « J’eus sujet de croire que je pourrois faire un usage plus considérable que Miossens de l’amitié et de la confiance de Mme de Longueville ; je l’en fis convenir lui-même. […] Le tond en est de morale chrétienne ou de pure civilité et usage de monde ; mais la forme surtout fait défaut ; elle est longue, traînante ; rien ne se termine ni ne se grave.
Il n’ose pas philosopher en docteur, il demande permission ; il hasarde son idée, comme une supposition timide, il essaye d’inventer une âme à l’usage des rats et des lapins. […] 134 Il attend apparemment que les chiens viennent l’étrangler. « On assomme la pauvre bête » ; un manant lui coupe le pied droit et la tête ; on les cloue à la porte du seigneur, avec un avertissement en style picard, à l’usage « des biaux chires leups » encore novices, et qui apprennent leur métier aux dépens de leur peau.
Ainsi dans cette histoire poétique des Mérovingiens, dont on parlait tout à l’heure, se laissent entrevoir des vestiges de vieux poèmes francs ; dans les chansons de gestes, certains récits, certains personnages, des traits de mœurs, des usages de la vie guerrière et civile sont des résidus manifestes de la plus ancienne poésie et de la plus ancienne civilisation des Francs. […] Du vie au xe siècle, comme du xie au xive , le procédé constamment mis en usage a été l’extension par remaniement total ; c’est par étirement, non par suture, que peu à peu ce qui pouvait avoir quelques centaines de vers au ixe siècle, s’est trouvé être, quatre siècles plus tard, un poème de dix mille ou vingt mille vers.
C’est un politique, et de quelle force, nous le devinons par le prix dont Louis XI le paya, par l’usage qu’il en fit. […] Positif comme il l’est, s’il garde la religion, c’est qu’elle est d’un usage pratique.
Sa marque, comme critique, c’est d’être, avant tout et presque uniquement, préoccupé et amoureux des idées ; d’être un pur « cérébral », un pur « intellectuel », dirais-je, si ces mots étaient mieux faits et si un mauvais usage n’en avait corrompu et obscurci le sens. […] Jamais on ne fit un tel usage de toutes les « figures de grammaires » abréviatives : anacoluthe, ellipse, ablatif absolu.
Le règlement, les usages et l’esprit de la maison font tout ; les hommes sont passifs, ils sont là seulement pour conserver. […] Au xviie et au xviiie siècle, la Sorbonne compose, pour l’usage des écoles, des traités commodes, qui ne sont le plus souvent que la Somme remaniée et amoindrie.
Il était aussi question de travaux, je ne sais lesquels par exemple, de travaux que pouvaient faire des gens n’ayant presque plus l’usage de leurs membres. […] Le peintre japonais était muni, cette fois, d’un morceau de soie gommée presque transparente, se fabriquant seulement au Japon pour cet usage ; et la soie était tendue sur un petit cadre en bois blanc.
Si l’on ne tient pas compte dans l’usage de la loi de cette progression nécessaire, on rencontrera souvent des difficultés qui paraîtront insurmontables, car il est clair que l’état théologique ou métaphysique de certaines théories fondamentales a dû temporairement coïncider et a quelquefois coïncidé en effet avec l’état positif de celles qui leur sont antérieures dans notre système encyclopédique, ce qui tend à jeter sur la vérification de la loi générale une obscurité qu’on ne peut dissiper que par la classification précédente. […] C’est donc la science mathématique qui doit constituer le véritable point de départ de toute éducation scientifique rationnelle, soit générale, soit spéciale ce qui explique l’usage universel qui s’est établi depuis longtemps à ce sujet, d’une manière empirique, quoiqu’il n’ait eu primitivement d’autre cause que la plus grande ancienneté relative de la science mathématique.
Les usages les plus bizarres, comme la couvade, le lévirat, l’exogamie, etc., s’observent chez les peuples les plus divers et sont symptomatiques d’un certain état social. […] Il y a, il est vrai, un certain nombre de faits qu’il est d’usage d’attribuer à l’influence de la race.
Un jour d’Aubigné brûla ces papiers de peur d’être jamais tenté d’en faire usage, surtout à l’égard de L’Hôpital qui avait depuis désavoué le parti : « J’ai brûlé ces pièces, disait-il, de peur qu’elle ne me brûlassent. » Mais il les avait montrées auparavant à plusieurs personnes de marque.
D’autres, à la suite de ce Grec retrouvé qui se nomme André Chénier, eussent voulu recréer et former, à leur usage, dans un coin de notre société industrieuse, une petite colonie de l’ancienne Grèce ; ils aimaient les fêtes, la molle orgie couronnée de roses, les festins avec chants, les pleurs de Camille, et la réconciliation facile ; chaque matin une élégie, chaque soir une poursuite et une tendresse.
Et il en avait fait lui-même une paraphrase en vers : Passant, quand le soleil brille à ce méridien, Contemple le temps vrai, mais n’en fais point usage ; Le bon sens et la loi suivent le temps moyen.
Avec des êtres arrivés à un certain degré d’expérience, de versatilité, de sophisme à la fois et d’imagination dans la passion, on est sur les sables mouvants ; il n’y a pas de raison pour qu’un résultat sorte plutôt que l’autre, pas de base où asseoir un intérêt moral, une conclusion à l’usage de tous.
Entré dans l’idée de la vie privée, non point par l’humble porte, si l’on peut dire, mais par la brèche, il y a dans sa prise de possession une chaleur de débat et un air de triomphe qui ne disparaîtront qu’avec un peu de long usage.
Plus le langage courtisan devenait le type de l’usage littéraire, plus il était nécessaire de le soustraire à la corruption de ce jargon d’outre-monts qu’apportaient les reines et les aventuriers d’Italie, et que la servilité de nos raffinés s’empressait d’imposer à la mode.
Il étudiait infatigablement les débris de l’art antique, les procédés, les matériaux, la signification, l’usage, etc. : toutes ces études partielles tendaient à restaurer dans les esprits une représentation plus fidèle de la vie antique.
L’extension de la propriété littéraire, telle que l’entend la jurisprudence des tribunaux français, telle surtout que la désire imprudemment, et contre le véritable intérêt de la littérature, un certain nombre de gens de lettres, voilà ce qui menace de resserrer à l’excès notre droit de citation et interdire à nos études pour de très longues années l’usage des sources manuscrites.
Le style de ces monuments était le style grec, mais approprié aux usages des Juifs, et considérablement modifié selon leurs principes.
Chaque fois qu’une jeune femme est présentée à Voltaire, devenu le patriarche de Ferney, il est d’usage qu’elle pâlisse, tremble, frissonne, se trouve mal en l’apercevant.
Les enfants, les jeunes animaux, les personnes privées de quelque sens, ceux qui nés aveugles ont recouvré la vue, les gens élevés dans la séquestration, comme Gaspard Hauser76 : ce sont là de nombreuses sources d’information dont malheureusement on a fait très rarement usage.
Et ce temps n’est pas le seul où les poètes aient donné un nom poétique aux femmes qu’ils ont chantées ; depuis Horace jusqu’à nos jours, cet usage a été pratiqué.
Les deux volumes de son Cours, qui traitent De l’usage des passions dans le drame, se composent d’une suite de chapitres plus curieux et plus variés les uns que les autres.
Or, pour créer ces apparences, le moi ou l’esprit fait un usage constant des deux procédés que l’on a décrits ; il utilise à son service ces deux forces que l’on a montrées modelant la matière objective par les rapports qu’elles soutiennent entre elles.
Comme celles de la syntaxe, de la grammaire, et de la langue elle-même, elles ont leurs origines dans l’usage, c’est-à-dire dans la tradition.
C’est assez l’usage ici de faire doubler la troisième classe de l’étude des langues et la classe de rhétorique.
C’est l’usage seul et non pas la nature qui en ont décidé.
Quand on l’écrit au-delà, on l’écrit du dehors au dedans, on est dupe de la perspective, on ne sait qu’à peu près les choses ; on l’écrit à l’usage d’un dauphin quelconque (ad usum Delphini).
le bas-bleu est bien loin de la femme qui a écrit, par exemple, comme moi je l’écrirais : « Les femmes doivent tout ignorer pour tout apprendre, et tout sentir pour tout deviner. » Le bas-bleu est bien loin quand elle écrit, comme moi aussi je l’écrirais encore : « Le génie et le talent ne sont pas à l’usage des femmes.
Cet homme de tempérament et de tournure, qui a l’usage des femmes perdues, et qui n’est qu’un vrai drôle au fond, a trouvé la femme du médecin jolie, et à la première vue, à une séance de Comices agricoles, il lui débite toutes les bêtises et toutes les vulgarités dont se compose cette chose facile, dont les hommes devraient être moins fiers : la séduction.
L’usage des éloges funèbres à Rome était aussi ancien, mais ce fut d’abord une récompense.
Non que ma vanité s’abaisse à recevoir De l’encens pour un trait qui ne fut qu’un devoir ; Mais enfin, dans un siècle égoïste et barbare, Où le crime est d’usage et la vertu si rare, Je prétends qu’un arrêt en termes solennels Cite mon innocence en exemple aux mortels. […] Toujours disciple de Plutarque, il ne tient pas pour vertu véritable celle qui n’est pas un peu mêlée d’héroïsme, et l’héroïsme, si rien ne le force à être provoquant et provocateur, tranche un peu, malgré lui, sur les communs usages, et c’est précisément ainsi que Rousseau aime la vertu. […] Par quelles lois, par quels édits, par quels rescrits leura-t-on défendu d’ouvrir les yeux et de lire… Ne se sont-elles pas au contraire établies elles-mêmes dans cet usage de ne rien savoir… » De même Rousseau écrit : « Les femmes ne cessent de croire que nous les élevons pour être vaines et coquettes, que nous les amusons sans cesse à des puérilités pour rester plus facilement les maîtres. […] Cet usage était plus raisonnable et maintenait mieux les mœurs. […] Donc, il faut exercer la psychologie mondaine de la jeune fille par l’usage du monde, après et avec de salutaires avertissements.
» Une telle modestie n’est pas l’usage ancien de la littérature. […] Même dans les circonstances anormales d’une guerre, ils agissent conformément à l’âme que leur a lentement élaborée l’usage de toute leur existence et un usage qui est plus ancien qu’eux. […] Il faut choisir et, en choisissant, ne pas oublier qu’une littérature de langue française, florît-elle hors de chez nous, a le devoir de ne se point émanciper outre mesure, de suivre l’usage ancien de la langue et de trouver sa liberté dans la juste connaissance de cet usage. […] Dimoff ose faire subir au texte de Chénier, le voici : l’orthographe assez capricieuse du poète, il la conforme à notre usage d’aujourd’hui. […] Voilà pourquoi il faut retourner aux anciens, non pour les copier, mais pour recevoir leur enseignement de naïveté, pour copier, selon leur naïf usage, la nature en sa vérité franche.
Leurs confessions forment un manuel de confession à l’usage de la communauté tout entière. […] Le sens de cet usage ne saurait être exactement précisé. […] Ce ne pouvait être qu’un usage religieux. […] Antoine y recouvra peu à peu l’usage de ses sens. […] Les clercs, qui presque seuls lisaient et écrivaient, gardèrent l’usage du latin.
Ce ne sont là qu’objets, ou, si je puis ainsi dire, ce ne sont que denrées de consommation, dont le propre est de périr par l’usage qu’on en fait. […] Maîtres de nos actions, ou supposés tels — ce qui est tout un dans l’usage de la vie — nous le sommes bien plus encore de nos pensées, dès que nous les exprimons, et surtout quand nous les imprimons. […] et nous pouvons bien préférer, pour notre usage personnel, un roman qui nous amuse à celui qui nous ennuie, mais d’ailleurs nos jugements n’ont rien de commun avec nos préférences. […] L’abus de la rhétorique en doit-il faire condamner l’usage ou méconnaître l’utilité, je dirai tout à l’heure le prix ? […] Car il n’importe pas qu’on en puisse faire un mauvais usage.
C’est ce que je répondrais sur l’usage que M. […] Les hommes alors se formaient au contact et par l’usage des hommes. […] Ce qui ne se peut exprimer qu’aux dépens de la clarté du discours, du bon usage de la langue, et de la manière générale de parler, vaut-il vraiment la peine d’être exprime ? […] Le curé le fit déposer dans son église, en attendant la justice, qui fut appelée, comme c’est l’usage lorsqu’un cadavre a été trouvé. […] L’usage naturel des moellons et leur cause finale ne sont pas d’encombrer la voie publique, mais de servir tôt ou tard à bâtir des maisons, — sinon des monuments.
Elle reçoit auprès de son lit un homme qui vient lui faire visite, joue avec lui toute une après-midi au piquet, se promène avec lui deux ou trois heures au clair de la lune, devient familière avec un étranger dès la première vue, et n’a pas l’étroitesse d’esprit de regarder si la personne à qui elle parle a des culottes ou des jupons910. » Il combat en prédicateur l’usage des robes décolletées, et redemande gravement la chemisette et la décence des anciens jours : « La modestie donne à la jeune fille une beauté plus grande que la fleur de la jeunesse, répand sur l’épouse la dignité d’une matrone, et rétablit la veuve dans sa virginité911. » Vous trouverez plus loin des semonces sur les mascarades qui finissent en rendez-vous ; des préceptes sur le nombre de verres qu’on peut boire et des plats qu’on peut manger ; des condamnations contre les libertins professeurs d’irréligion et de scandale ; toutes maximes aujourd’hui un peu plates, mais nouvelles et utiles, parce que Wycherley et Rochester avaient mis les maximes contraires en pratique et en crédit. […] Ils ne veulent que des termes clairs, de l’usage commun, où l’esprit entre de prime-saut comme dans les sentiers de la causerie ordinaire ; en effet, pour eux, la lecture n’est qu’une causerie et meilleure que l’autre. […] Nous ne trouvâmes rien de remarquable dans l’œil, sinon que les musculi amatorii, ou, comme on peut traduire, les muscles qui lorgnent, étaient fort diminués et altérés par l’usage, tandis que l’élévateur, c’est-à-dire le muscle qui tourne l’œil vers le ciel, ne paraissait pas avoir du tout servi. » Ces détails anatomiques, qui nous dégoûteraient, amusent un esprit positif ; la crudité n’est pour lui que de l’exactitude ; habitué aux images précises, il ne trouve point de mauvaise odeur dans le style médical.
Le langage ordinaire, dans son évolution, transforme les mots en vue de l’usage le plus commode ; la poésie les transforme dans le sens de la représentation la plus vive et la plus sympathique ; l’une a pour but la métaphore utile qui « économise l’attention » et rend plus facile l’exercice de l’intelligence ; l’autre la métaphore proprement esthétique, qui multiplie la faculté de sentir et la puissance de sociabilité. […] C’est ainsi que Lamartine, pour se moquer des volumes de sonnets, où chaque pièce, selon l’usage, vient se condenser dans le vers final, disait qu’il était plus court de ne lire que le dernier vers de chacune : Noble et pur, un grand lys se meurt dans une coupe276. […] Mettez au commencement du siècle une littérature de purs savants, pondérée, exacte, logique, et la langue, affaiblie par trois cents ans d’usage classique, restait un outil émoussé, sans vigueur. « Il fallait une génération de poètes lyriques pour faire de la langue un instrument large, souple et brillant.
La loi morale a encore ceci de particulier qu’elle parle plus volontiers à la seconde personne qu’à la première : tu dois, au lieu de je dois ; dans le cas de reproche, elle emploie quelquefois le vous au lieu de tu, parce que le vous, dans nos usages modernes, est méprisant quand il n’est pas cérémonieux. […] On ne peut en dire autant des apartés ; presque toujours nécessaires à la clarté du drame, souvent comiques, rarement vraisemblables, ils sont, à tout le moins, beaucoup plus fréquents sur la scène que dans la vie réelle ; leur usage, sinon leur essence, en fait une véritable machine dramatique, une convention. […] L’aparté est vraisemblable dans la comédie bouffonne, comme élément du ridicule de certains personnages ; partout ailleurs, il ne l’est pas, et pourtant il est d’un usage constant dans toutes les variétés du drame, à l’exception peut-être de la tragédie.
Il appela les étrangers, disent les vieux auteurs, « et fit un seul peuple de tant de gens de natures diverses. » Ce ramassis de barbares, de réfugiés, de brigands, de colons émigrés, parla si promptement roman ou français, que le second duc voulant faire apprendre à son fils la langue danoise, fut obligé de l’envoyer à Bayeux où elle était encore en usage. […] Pendant deux cents ans « les enfants à l’école, dit Hygden100, contre l’usage et l’habitude de toute nation, furent obligés de quitter leur langue propre, de traduire en français leurs leçons latines et de faire leurs exercices en français. » Les statuts des universités obligeaient les étudiants à ne converser qu’en français ou en latin. « Les enfants des gentilshommes apprenaient à parler français du moment où on les berçait dans leur berceau ; et les campagnards s’étudiaient avec beaucoup de zèle à parler français pour se donner l’air de gentilshommes. » À plus forte raison la poésie est-elle française. […] Pareillement ici, la machine à la mode, l’allégorie du roman de la Rose, est mise en usage : on voit s’avancer, Bien-Faire, Corruption, Avarice, Simonie, Conscience, et tout un peuple d’abstractions parlantes. […] « Dès l’an 652, dit Warton, l’usage commun des Anglo-Saxons était d’envoyer leurs enfants dans les monastères de France pour y être élevés ; et l’on regardait non-seulement la langue, mais encore les manières françaises, comme un mérite et comme le signe d’une bonne éducation. » 99.
Ce qu’on jette à la face de Sainte-Beuve tourne par un côté à son honneur, et l’on montre, en s’en servant à cet usage, qu’on ne l’a point senti. […] La belle courtisane vénitienne lui a déconseillé, le voyant faire, l’usage des dames, et l’a renvoyé à l’étude des mathématiques. […] D’après lui, il n’eût dépendu que de Moussorgsky de devenir aussi fort et même aussi malin que n’importe quel autre dans l’usage de la technique traditionnelle. […] Rien de plus patriarcal que leurs usages. […] Nul n’a mieux réfuté par sa personne cette prétendue affinité du désordre et du génie dont les ratés du romantisme avaient fait un dogme à l’usage des petits bourgeois.
Mais je fus vite confondu, et je ne saurais depuis m’étonner que l’usage des pseudonymes soit si courant… Comme la plupart des écrivains de la Maison de la Presse étaient de simples soldats, on s’avisa de leur trouver un chef qui fût officier et blessé. […] On ne pouvait jamais prendre le thé rue François-1er pour cette raison que, voulant jouer aux soldats, les écrivains qui y étaient employés se servaient de réchauds en usage aux armées et d’alcool solidifié. […] Ne savez-vous pas que votre prénom figure depuis un mois aux devantures des librairies ; que nous tenons beaucoup à faire de votre petite gloire le plus décent usage ; enfin que nous vous avons choisi ; que vous êtes le secrétaire adjoint du Grammaire-Club ! […] Le dadaïsme, à cette époque, avait un revolver en poche ; c’est à peine croyable qu’il n’en fit pas usage ! […] Ne se font-ils pas jour dans ses ouvrages d’histoire comme dans ceux qu’il appelle romans, parce que c’est l’usage, mais qui sont plus exactement, des recueils de méditations et de portraits imaginaires ?
L’usage est venu d’appeler poétiques tous les objets qui produisent sur nous une impression analogue à celle que produisent les beaux vers ; en eux tous nous disons qu’il y a de la poésie. […] Il est certain que dans l’usage courant on ne désigne pas tout à fait la même chose par les deux mots de poésie et de beauté. […] Telle est la fonction des métaphores, dont le poète fait constamment usage et dont il tire ses plus magnifiques effets de poésie. […] L’usage trop constant de cette licence poétique aurait l’inconvénient de faire perdre à l’écrivain tout souci de précision dans l’expression de sa pensée. […] La poésie s’est donné une forme qui est bien à elle, qu’elle se réserve pour son usage particulier, et dans laquelle elle s’enferme plus volontiers que dans toute autre.
aussi renouvelé de nos jours par des hommes qui ne se croient philosophes que quand ils ont cessé d’être hommes : « Les hommes, nés et élevés comme nous avons dit, n’ont rien de mieux à faire, selon moi, touchant la possession et l’usage des femmes et des enfants, qu’à suivre la route que nous avons tracée en commençant. […] XXXIV La philosophie est absolue, la politique est relative : république, fédération, aristocratie, théocratie, démocratie, oligarchie, monarchie, dictature, tyrannie même, tout cela est bien ou mal selon les circonstances, les convenances, les nécessités du peuple, qui adopte ou qui répudie tour à tour ces formes bien ou mal appropriées à l’usage que le peuple veut en faire.
Ce n’est rien, bien que ce soit aussi vil que contre nature ; il ôte ses souliers pour n’être pas entendu, il s’arme d’un levier de fer bien aiguisé qu’il tire de son sac, pouvant servir au triple usage, dit l’auteur, de forcer la porte de l’armoire où l’on a eu l’imprudence héroïque de serrer sous ses yeux l’argenterie, de percer le sein ou d’assommer le crâne de l’évêque. […] Ces déclamations contre le luxe, c’est-à-dire contre l’usage de l’aisance, sont donc tout simplement des décrets contre la vie du peuple, ouvriers ou propriétaires, c’est le maximum terroriste contre ceux qui commandent le travail et contre ceux qui vivent du salaire.
Le poète s’adorait trop lui-même pour brûler un méchant sonnet si peu respectueux pour la comtesse, et la comtesse, de son côté, libre de publier ou d’anéantir ce sonnet, preuve de la légèreté d’Alfieri envers elle, ne le laissait évidemment imprimer que pour en faire usage à son tour, en donnant au public la preuve qu’Alfieri lui laissait désormais la liberté de son cœur en se vantant de la licence du sien. […] « J’ignore encore le moment, monsieur, où je pourrai faire usage de votre excellente notice.
« Lorsque les sauvages mettent le feu à des cabanes, l’on dit qu’ils se chauffent avec plaisir à l’incendie qu’ils ont allumé : ils exercent alors du moins une sorte de supériorité sur le désordre dont ils sont coupables, ils font servir la destruction à leur usage ; mais, quand l’homme se plaît à dégrader la nature humaine, qui donc en profitera ? […] Les poëtes pourraient trouver dans les sciences une foule de pensées à leur usage, si elles communiquaient entre elles par la philosophie de l’univers, et si cette philosophie de l’univers, au lieu d’être abstraite, était animée par l’inépuisable source du sentiment.
Ajoutez-y tant de vues profondes sur la vie, tant d’idées tirées du monde extérieur, des usages, des mœurs, pour appeler notre mémoire et notre imagination à l’aide de notre esprit, et qui sont comme le connu dont se sert Descartes pour rechercher l’inconnu. […] L’usage d’une langue étant de rendre universelle la communication des idées, et les hommes ne communiquant point entre eux par leurs différences, mais par leurs ressemblances, dont la principale est la raison, une langue est arrivée à sa perfection quand elle est conforme à ce que nous avons de commun, la raison.
J’ai quelquefois écrit suivant l’art, que très peu de gens connaissent ; mais quand je vois les monstruosités auxquelles accourent le vulgaire et les femmes, je me fais barbare à leur usage. […] Outre ses impatiences contre les incorrections d’une langue où Corneille semble créer, par la façon dont il les fait siennes, jusqu’aux expressions que lui fournissait l’usage, on peut reprocher au Commentaire sur le théâtre de Corneille le trop facile avantage que Voltaire s’y donne sur certains défauts de ce théâtre dont il n’a pas toujours su préserver le sien.
Dans son enfance, il s’était habitué, selon un usage auquel il était dangereux de se soustraire, à dire « citoyen ». […] Dans son cours, son vieux manteau et les manches de sa soutane servaient à essuyer les instruments et en général à tous les usages du torchon ; sa calotte, rembourrée pour préserver son vieux crâne des névralgies, formait autour de sa tête un bourrelet hideux.
Dans notre temps, où ce qu’on appelait autrefois le sens commun est si peu d’usage en littérature et se trouve le plus souvent remplacé par le caprice, M. de Sacy en est un des derniers représentants utiles ; je ne sais même si l’on trouverait aujourd’hui personne qui le représentât aussi nettement et aussi distinctement que lui, qui en offrît un exemplaire vivant aussi authentique et aussi sensible.
Au fur et à mesure qu’il s’appliquait à un sujet, selon sa méthode d’examen étrangère à toute considération historique, il était frappé de ce que les idées, les plus raisonnables selon lui, étaient le moins en usage, et que, sur chaque point, le genre humain semblait encore dans l’enfance.
C’est de l’excellente, de l’éloquente rhétorique à l’usage de l’école de Sorèze ; mais j’ajouterai qu’on sent à chaque ligne que ce n’est que de la rhétorique.
Le premier semble avoir renoncé bien vite à ses tentatives : « Qu’il ait essayé une ou deux fois du haschisch55 comme expérience physiologique, cela est possible et même probable ; mais il n’en a pas fait un usage continu… Il ne vint que rarement et en simple observateur aux séances de l’hôtel Pimodan, où notre cercle se réunissait pour prendre le “Dawamesk”, séances que nous avons décrites autrefois dans la Revue des Deux-Mondes, sous ce titre “le Club des Haschischins” en y mêlant le récit de nos propres hallucinations ».
Les usages communs de la vie étaient ennoblis par des pratiques religieuses ; notre luxe commode, nos machines combinées par les sciences, nos relations sociales simplifiées par le commerce, ne peuvent se peindre en vers d’un genre élevé.
L’imperfection humaine laisse toujours un côté sans défense ; et la raison n’a d’autre usage que de nous décider pour la majorité des avantages contre telle ou telle objection partielle.
Pour aimer et posséder la gloire, il faut des qualités tellement éminentes, que si leur plus grande action est au dehors de nous, cependant elles peuvent encore servir d’aliment à la pensée dans le silence de la retraite ; mais la passion de l’ambition, les moyens qu’il faut pour réussir dans ses désirs, sont nuls pour tout autre usage : c’est de l’impulsion plutôt que de la véritable force ; c’est une sorte d’ardeur qui ne peut se nourrir de ses propres ressources ; c’est le sentiment le plus ennemi du passé, de la réflexion, de tout ce qui retombe sur soi-même.
« Les interruptions, les repos, les sections, dit excellemment Buffon, ne devraient être d’usage que quand on traite des sujets différents, ou lorsque, ayant à parler de choses grandes, épineuses et disparates, la marche du génie se trouve interrompue par la multiplicité des obstacles, et contrainte par la nécessité des circonstances : autrement, le grand nombre de divisions, loin de rendre un ouvrage plus solide, en détruit l’assemblage ; le livre paraît plus clair aux yeux, mais le dessein de l’auteur demeure obscur ; il ne peut faire impression sur l’esprit du lecteur, il ne peut même se faire sentir que par la continuité du fil, par la dépendance harmonique des idées, par un développement successif, une gradation soutenue, un mouvement uniforme, que toute interruption détruit et fait languir. » La constitution essentielle du sujet marque à l’écrivain les reposoirs naturels, où il peut reprendre haleine, et son lecteur avec lui ; elle délimite les portions où le regard peut successivement s’arrêter, quand le champ total est trop vaste et ne se laisse pas embrasser d’une seule vue.
Et voilà l’origine du document humain : de là les carnets de notes que remplissent fiévreusement nos romanciers, et qui se déversent dans leurs œuvres ; de là l’usage du fait divers, judiciaire ou médical, et ce reportage acharné qui est la forme vulgaire de la chasse aux petits faits.
Il réussit à faire croire à la partie oisive et riche de la société que d’innover en fait d’usages mondains, de conventions élégantes, d’habits, de manières et d’amusements, c’est aussi rare, aussi méritoire, aussi digne de considération que d’inventer et de créer en politique, en art, en littérature.
On entend par loix inutiles, ces loix d’usage & de convention reçues dans le monde, & qui sont aussi fatiguantes qu’elles sont ridicules.
Ce n’est pas pour vous que je parle ames froides & bornées qui n’avez jamais fait usage de vos facultés intellectuelles ; il faut frapper vos sens pour réveiller votre langueur.
Hermite, par exemple, que je citais tout à l’heure, ne peut être classé parmi les géomètres qui font usage de l’intuition sensible ; mais il n’est pas non plus un logicien proprement dit.
Le titre de « Fils de Dieu », ou simplement de « Fils 704 », devint ainsi pour Jésus un titre analogue à « Fils de l’homme » et, comme celui-ci, synonyme de « Messie », à la seule différence qu’il s’appelait lui-même « Fils de l’homme » et qu’il ne semble pas avoir fait le même usage du mot « Fils de Dieu 705. » Le titre de Fils de l’homme exprimait sa qualité de juge ; celui de Fils de Dieu sa participation aux desseins suprêmes et sa puissance.
Elle ne peut être l’effet d’une ambition vulgaire, ni d’aucun des secrets qui sont à son usage, de l’hypocrisie, de l’intrigue, de la coquetterie, il faut en chercher la noble cause ailleurs.
Qu’il doit rendre le mal pour le mal, comme c’est l’usage chez les hommes ?
Ne craignoit-il point qu’on ne lui parlât de mademoiselle Desvieux de Mauléon *, & qu’on ne fît usage contre lui des bruits qui couroient sur leur compte ?
Plus tard, les phrénologues ont fait usage de l’anatomie comparée ; mais, si l’on en croit l’un d’entre eux, ce serait avec une grande inexpérience.
Ce divertissement passager devint un usage annuel, puis sacrifice public, ensuite cérémonie universelle, enfin spectacle public profane : car, comme tout était sacré dans l’antiquité païenne, les jeux et les amusements se tournèrent en fêtes, et les temples à leur tour se métamorphosèrent en théâtres ; mais cela n’arriva que par degrés.
La méthode dite des résidus, si tant est d’ailleurs qu’elle constitue une forme du raisonnement expérimental, n’est, pour ainsi dire, d’aucun usage dans l’étude des phénomènes sociaux.
Nous devrons maintenant définir d’une manière générale certains termes dont le sens nous avait paru suffisamment indiqué jusqu’ici, dans chaque cas particulier, par l’usage même que nous en faisions.
À la méthode habituelle d’observation intérieure le XIXe siècle en a adjoint deux autres : d’un côté, l’ensemble des procédés de mensuration dont on fait usage dans les laboratoires, et, d’autre part, la méthode qu’on pourrait appeler clinique, celle qui consiste à recueillir des observations de malades et même à provoquer des phénomènes morbides (intoxication, hypnotisme, etc.).
L’usage se maintint et s’adoucit ; et les pénitents de l’amour, ceux que cette passion conduisait à Leucade, avaient fini par tenter cette épreuve célèbre, avec des secours qui préservaient la vie et ramenaient au rivage la victime guérie de son mal ou de son désespoir.
Mais cette langue-là n’est pas à l’usage de la jeunesse ; elle demande, avec une rare justesse d’esprit et un sincère amour de la vérité et des hommes, de longs efforts, le commerce du monde, et un art qui sait effacer sa trace. […] Descartes rencontra devant lui le scepticisme répandu de tous côtés à la suite de tant de révolutions, des hypothèses ambitieuses, nées du premier usage d’une liberté mal réglée, et les vieilles formules échappées à la ruine de la scolastique. […] Il arrive même quelquefois qu’après avoir admiré la beauté d’un objet, nous n’en pouvons deviner l’usage, bien qu’il en ait un. […] La parole est l’instrument de la poésie ; la poésie la façonne à son usage et l’idéalise pour lui faire exprimer la beauté idéale. […] Ce n’est pas la société qui a fait ces principes à son usage ; ils lui sont bien antérieurs, ils sont contemporains de la pensée et de l’âme, et c’est sur eux que repose la société avec ses lois et ses institutions.
Ce sont petits prestiges de dialectique à l’usage des écoliers qui ont beaucoup argumenté en baralipton. […] Il badinait encore, et plein de souvenirs classiques, tournait à son usage l’épigramme d’Hadrien : « animula, vaguta, blandxda… » Amelette ronsardelette, Mignonnelette, doucelette, Très chère hotesse de mon corps, Tu descends là-bas faiblelette, Pâle, maigrelette, seulette. […] Style et langue ils voulaient ennoblir à l’usage des poètes l’une et l’autre.
Notre économiste se fit « bandolier », comme il entamerait de nos jours une polémique dans les journaux ou bien interpellerait le ministre à la Chambre : chaque époque a ses usages. […] De ce goût asservi au « bel usage », qui insensiblement écarte la littérature de la nature et lui interdit d’exprimer la vie, trop vulgaire en ses manifestations, de ce choix exclusif des mots qu’un usage trivial ne déshonore pas est sorti le pseudo-classicisme du xviiie siècle et la soi-disant « langue noble », si pompeuse, si vague et si pauvre, qu’aucun de nos grands écrivains, n’a parlée, non pas même Racine, avec son élégance, ni Bossuet, avec sa sublimité. Mais voici un effet plus curieux de l’assujettissement de la littérature au goût du monde : comme la langue fut appauvrie et la moitié de ses mots mis hors du bel usage, la littérature aussi vit son domaine circonscrit et diminué. […] Cela me rappelle les romans d’éducation à l’usage de la jeunesse, où le héros prend l’une après l’autre toutes les mauvaises habitudes dont on veut purger le lecteur, toutes les qualités qu’on y veut greffer. […] Les idées de Diderot valent mieux que l’usage qu’il en fit.
Et si la nature avait doué cet ambitieux aussi magnifiquement qu’elle a doté Dumas, nous nous permettrions de lui souhaiter de faire de ces dons un meilleur usage. […] About l’abus de la verve, il en est beaucoup qui n’en ont jamais connu l’usage. […] Ses mœurs, ses ridicules, ses usages ont été retracés. […] Zola à l’extrémité de la rue Montmartre pour parvenir à se pénétrer ainsi des habitudes, des mœurs, des moindres usages de cette population spéciale ! […] Elle épousseta ces linges roussis par l’usage, promena vigoureusement le plumeau le long du gradin, contre lequel elle releva les cartons liturgiques.
Ils se proposaient « d’adapter aux usages de la poésie le langage ordinaire de la conversation, tel qu’il est employé dans la moyenne et la basse classe », et de remplacer les phrases étudiées et le vocabulaire noble par les tons naturels et les mots plébéiens. […] Quand ils mentionnent un usage, ils mettent leurs autorités en note ; ils ne se présentent au public que munis d’attestations ; ils établissent par certificats valables qu’ils n’ont pas commis une faute de topographie ni de costume. […] Il employa les sommes énormes que ses vers et sa prose lui avaient gagnées à se bâtir un château à l’imitation des anciens preux, « tours et tourelles, copiées chacune d’après quelque vieux manoir écossais, toits et fenêtres blasonnés avec les insignes des clans, avec des lions rampants sur gueules », appartements « remplis de hauts dressoirs et de bahuts sculptés, décorés de targes, de plaids et de grandes épées de highlanders, de hallebardes, d’armures, d’andouillers disposés en trophées1210. » Pendant de longues années, il y tint, pour ainsi parler, table ouverte, et fit à tout étranger « les honneurs de l’Écosse », essayant de ressusciter l’antique vie féodale avec tous ses usages et tout son étalage : « large et joyeuse hospitalité ouverte à tous venants, mais surtout aux parents, aux alliés et aux voisins, — ballades et pibrochs sonnant pour égayer les verres qui trinquent, — joyeuses chasses où les yeomen et les gentlemen peuvent chevaucher côte à côte, — danses gaillardes et gaies où le lord n’aura pas honte de donner la main à la fille du meunier1211. » Lui-même, ouvert, heureux, au milieu de ses quarante convives, nourrissait l’entretien par une profusion de récits épanchés de sa mémoire et de son imagination prodigues1212, conduisait ses hôtes dans son domaine élargi à grands frais, parmi les plantations nouvelles dont l’ombrage futur devait abriter sa race, et pensait avec un sourire de poëte aux générations lointaines qui reconnaîtraient pour ancêtre sir Walter Scott, premier baronnet d’Abbotsford. […] Pour soutenir son hospitalité princière et ses magnificences féodales, il était devenu l’associé de ses éditeurs ; châtelain en public et négociant en secret, il leur avait engagé sa signature, sans surveiller l’usage qu’ils en faisaient.
L’usage en était venu des Romains, chez qui c’était un passe-temps fort goûté, sous les Césars, de berner les chiens et les ivrognes93. […] Ces vers, que chacun de nous sait par cœur, que l’usage a rendus communs sans les rendre vulgaires, paraissaient inouïs aux contemporains de Boileau, et aux poètes qui ne se sentaient pas en règle sur ce point. […] On l’a si bien senti, qu’il est d’usage de dire : la vérité des genres. […] Nos quatre amis discutaient sur l’usage des aparté au théâtre132.
Le jaloux, à Paris, est peut-être plus malheureux encore qu’ailleurs parce qu’il n’a pas l’usage de toutes les petites précautions qui, en province, gênent une femme et la font réfléchir. […] Ce n’est pas le premier avaricieux que l’on a trouvé mort exténué sur le tas de ses écus, et vraiment l’idée que l’on possède tant d’or, mais que l’on se sent incapable de mettre en usage une seule des possibilités qu’il contient, est bien faite pour vous mettre la cervelle à l’envers ! […] C’est un usage, bien plus, c’est un rite. […] Il y a bien l’hypothèse des deux langues, l’une réservée aux hommes, l’autre aux femmes, et qui se seraient mêlées à l’usage.
Mais, comme il est fait d’une matière inorganisée, il peut prendre une forme quelconque, servir à n’importe quel usage, tirer l’être vivant de toute difficulté nouvelle qui surgit et lui conférer un nombre illimité de pouvoirs. […] L’intelligence fait donc naturellement usage des rapports d’équivalent à équivalent, de contenu à contenant, de cause à effet, etc., qu’implique toute phrase où il y a un sujet, un attribut, un verbe, exprimé ou sous-entendu. […] Adoptons donc ici les mots consacrés par l’usage. […] Qu’il s’agisse de traiter la vie du corps ou celle de l’esprit, elle procède avec la rigueur, la raideur et la brutalité d’un instrument qui n’était pas destiné à un pareil usage.
Non seulement Strachey préfère à tout le mot juste ; mais la justesse même, il la veut attendue, ayant passé par tous les frottements de l’usage. […] La prose la plus liquide, — un glissement perpétuel, et perpétuellement rattrapé, de la cadence, — un usage de l’allitération presque aussi subtil que dans les vers, — bref un instrument de tout point accordé à la nature du thème : l’Âme et la Danse. […] Une syntaxe sur laquelle tout a été dit, la plus experte et la plus libre, qui joue pour elle-même, comme les draperies dans certains dessins de maîtres semblent soulevées par une brise matinale ; des suspensions, des reprises, des changements de ton ; un usage infiniment subtil de tous les signes de ponctuation, et par-delà les signes mêmes il n’est rien dans la phrase qui ne soit intérieurement ponctué. […] Ouvert à toutes les manifestations du talent, Jaloux pratique envers elles l’hospitalité la plus large et la plus désintéressée : il fut le premier à témoigner publiquement, et sans les restrictions d’usage, en faveur de la prodigieuse signification de l’œuvre d’un Marcel Proust : dès l’origine il sut apprécier un Giraudoux, un Larbaud, un Morand. […] Sous l’Ancien Régime l’usage voulait que chaque chef de famille tînt un livre de raison.
Mettez, mettez hardiment la musique moderne parmi les narcotiques d’importation récente ou d’usage nouveau si chers à nos contemporains, à côté du tabac, de l’opium et du haschisch. […] Quel est l’homme qui, ayant pris goût à la douce musique de Mozart, pourrait se complaire désormais dans l’habitude des blasphèmes stupides et persister dans l’usage d’un argot qui fait frémir ? […] Figurez-vous un homme qui se fendrait comme une croûte sèche, comme une enveloppe qui bientôt sera hors d’usage, et dont les fissures laisseraient voir un autre homme encore replié sur lui-même. […] Ils ont la générosité qui tient à une grande existence, et la bonté qui doit toujours accompagner le privilège et la puissance ; mais il leur manque je ne sais quelle douceur familière et d’un usage journalier et commun, comme aurait dit Montaigne. […] Sous ce rapport, Wilhelm Meister est une véritable école d’initiation à l’usage des classes moyennes.
C’est un scepticisme à l’usage des géants. Celui de Renan est à l’usage des nains, de nains déliés et de bossus retors, bien entendu. […] Flaubert, je le répète, est, dans tous les sens, un homme de Lilliput, un génie à l’usage du vulgaire. […] Ainsi qu’il est d’usage, au désert des doctrines et des preuves correspondait, à droite comme à gauche, l’outrecuidance des affirmations. […] Il ne peut ne pas survenir ; et contrairement à l’usage, les obstacles, même académiques, auxquels il se heurtera seront faibles.
On me verra toujours pratiquer cet usage. […] Voilà ce que peut inspirer l’usage de l’antithèse. […] Elle doit mouler voire façon dépenser, parce que son usage en littérature n’est pas accidentel, mais général, comme va le prouver l’exemple de tous nos grands prosateurs. […] La force de l’âme qui l’inspire est d’usage dans tous les temps : elle met toujours la vertu au-dessus des événements, et ne consiste pas à se battre, mais à ne rien craindre. […] Pour nous qui voulons profiter de nos connaissances, nous ne les amassons point pour les revendre, mais pour les convertir à notre usage ; ni pour nous en charger, mais pour nous en nourrir.
L’incohérence et l’opposition de tous les objets, la constante contradiction entre leur forme et leur usage, l’étrangeté de la plupart d’entre eux, tout vise à provoquer l’ahurissement. […] L’usage de l’alcool s’est, pendant le même temps, élevé en Allemagne de 5, 45 quart (1844), à 6, 86 quart (1867), en Angleterre de 2,01 litres à 2,64 litres, en France de 1,33 litre à 4 litres52. […] Chez Victor Hugo, à côté des seuls Burgraves, dont l’action se passe au xiiie siècle, il y a tous les autres drames, Cromwell, Marie Tudor, Lucrèce Borgia, Angelo, Ruy Blas, Hernani, Marion Delorme, Le Roi s’amuse, qui se déroulent dans le xvie et le xviie siècle, et à son unique roman moyen âge, Notre Dame de Paris, on peut opposer tous les autres, depuis Han d’Islande, qui a pour scène une Thulé de rêve, jusqu’aux Misérables, qui se passent dans un Paris apocalyptique, et à Quatre-vingt-treize, histoire de la Révolution à l’usage des fumeurs de haschisch. […] C’est le parfait usage de ce mystère qui constitue le symbole ; évoquer petit à petit un objet pour montrer un état d’âme, ou, inversement, choisir un objet et en dégager un état d’âme par une série de déchiffrements ». […] Le truc rusé à l’aide duquel Moréas veut engendrer ici, par l’évocation des trois tableaux associés de fleurs foulées aux pieds et houspillées par le vent, d’une croix renversée et vermoulue et d’un idiot dont personne ne déplore la mort, une disposition d’âme désolée, fait de cette pièce un modèle de poésie à intentions profondes, à l’usage des Petites-Maisons.
Je ne lui demanderai pas s’il a renoncé à tout espoir de redevenir ministre, lui qui reproche à des hommes politiques de vouloir conquérir le pouvoir, ce qui est pourtant le seul moyen à leur usage d’appliquer les idées politiques qu’ils croient justes. […] Dans le pays où je vis, il est d’usage, la nuit de Noël, de faire fondre du plomb dans une cuiller de fer et de jeter le métal liquide dans de l’eau glacée : les formes capricieuses qu’il prend en se solidifiant trahissent les mystères de l’avenir pour qui sait regarder. […] Ainsi, sous la Restauration, Manuel fut chassé comme indigne et séditieux par une majorité servile et empoigné par des soldats, parce qu’il avait osé dire du bien de la Révolution précédente, qui, étant vaincue provisoirement, était, suivant l’usage, calomniée et honnie. […] Je ne saurais non plus blâmer l’auteur de l’Esprit des lois d’avoir condamné l’usage de brûler les hérétiques, quoiqu’il ne fût en vigueur qu’au-delà des Pyrénées, ou d’avoir plaidé la cause des esclaves, quoiqu’ils ne fussent ni Européens ni Français. […] Il y a tant de gens qui préféreraient ainsi un bon petit Voltaire de poche, revu, corrigé et considérablement diminué, à l’usage des âmes pieuses et des Instituts bien pensants !
Il n’oublie pas de donner à sa femme le titre d’usage ; il est furieux en termes officiels et choisis ; il ne se commettra jamais avec un insolent. […] Pareillement le lion de La Fontaine sait les affaires ; il est prévoyant, calculateur ; il administre, enrégimente, organise, et sait même se passer d’un Louvois. « Il tient conseil de guerre, envoie ses prévôts39 », assigne à chacun son poste, « connaît les divers talents et tire usage de ses moindres sujets. » La Fontaine dresse un catalogue de l’armée, comme il y en avait au ministère ; la fable imite à l’occasion le style40 de la chancellerie et le vieux langage officiel, copie les passe-ports comme tout à l’heure les circulaires, parle de défrayer « les députés eux et leur suite. » Il est vrai que le passe-port ne les protégera guère, et que les convives au lieu de manger le souper le fourniront. […] Il est devenu mythologue consommé et fait usage de tous les dieux.