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1180. (1908) Jean Racine pp. 1-325

Et Taxile vient la relancer ; et Axiane, très convenablement cornélienne, lui dit son fait : (Tu veux servir ; va, sers, et me laisse en repos) et qu’elle adore Porus. […] Je respire, je sers. […] J’étais né pour servir d’exemple à ta colère, Pour être du malheur un modèle accompli. […] Mais Racine s’est surtout servi de Gautier la Gueule, qui venait de publier deux volumes de ses plaidoyers. […] Et ainsi, non seulement le roi de Comagène sert à reculer le choc décisif entre les deux amants, à accroître, par là, le tragique de ce heurt inévitable, si longtemps souhaité et redouté des spectateurs ; non seulement il sert à nous faire connaître Bérénice et Titus en recevant tour à tour leurs confidences : mais, comme ces confidences le crucifient, il nous émeut aussi par lui-même ; que dis-je !

1181. (1803) Littérature et critique pp. 133-288

Mirabeau se servit avec art de tous les esprits et de tous les travaux étrangers. […] Il ne voulut se servir, contre ses compatriotes égarés, que des armes de la persuasion. […] Si ces guerriers illustres n’ont pas servi la même cause pendant leur vie, la même renommée les réunit quand ils ne sont plus. […] je te servirai contre les Romains, comme je les ai servis contre toi : donne-moi une épée, et marchons contre Rome. » Les hommes les plus rapprochés de la nature, les hommes les plus passionnés ont toujours employé cette langue des signes, cette éloquence muette, dont la parole ne peut égaler toute l’énergie. […] Louis « L’a trop récompensé de servir son pays, « Et d’un si grand honneur son âme est satisfaite.

1182. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — chapitre VI. Les romanciers. » pp. 83-171

À force de vouloir servir la morale, vous lui faites tort. […] il me servira joliment quand j’aurai perdu ma seule enfant, ma pauvre Sophie, qui était la joie de mon cœur, et toute l’espérance, et toute la consolation de mes vieux jours ; mais je suis décidé à la mettre à la porte : elle mendiera, elle crèvera de faim, elle pourrira dans la rue. […] Les murs en dedans étaient soigneusement blanchis à la chaux1089… Quoique la même chambre nous servît de parloir et de cuisine, cela ne faisait que la rendre plus chaude. […] À peine servi, il se précipitait sur sa nourriture « comme un cormoran, les yeux fichés sur son assiette, ne disant pas un mot, n’écoutant pas un mot de ce qu’on disait autour de lui », avec une telle voracité que les veines de son front s’enflaient et qu’on voyait la sueur en découler. […] Ce nez tortu, ces bourgeons sur une joue vineuse, ce geste hébété de la brute somnolente, ces traits grimés, ces formes avilies, ne servent qu’à faire saillir le naturel, le métier, la manie, l’habitude.

1183. (1936) Histoire de la littérature française de 1789 à nos jours pp. -564

Mais La Marck sert ici plutôt de prête-nom. […] L’ouvrage est destiné moins à montrer, à exposer le christianisme, qu’à le servir, en dégageant de lui des richesses encore insoupçonnées. […] Schiller, servi par les échos du théâtre, avait acquis toute la sienne, et plus que de droit. […] Très peu ont plus efficacement servi à entretenir la légende napoléonienne, l’image d’Épinal de la Grande Armée. […] Il arrive qu’aujourd’hui elle lui nuise plutôt que de le servir.

1184. (1912) Chateaubriand pp. 1-344

Je m’en servirai avec la prudence qui convient : car, lorsqu’il nous raconte son enfance, il a déjà quarante ans. […] À quoi ont servi ces révolutions dont il vient de retracer l’histoire ? […] Ces deux voix sorties du tombeau, cette mort qui servait d’interprète à la mort m’ont frappé. […] Et il avait raison, et cela même servait l’Église. […] Les royalistes croyaient qu’il jouait le rôle de Monck et s’empressaient de le servir.

1185. (1858) Du roman et du théâtre contemporains et de leur influence sur les mœurs (2e éd.)

Bornons-nous à citer Ursule Mirouët : là, c’est le magnétisme animal et ses merveilles qui servent à voiler cette triste philosophie. […] La plaisanterie y manque de grâce, l’observation de délicatesse ; si bien que l’ennui et le dégoût servent un peu de préservatif contre la corruption. […] La passion ne se sert pas d’antidote à elle-même. […] La fameuse poétique du laid semble avoir ici encore servi de point de départ. […] Voilà les êtres que tu sers, que tu crains, que tu respectes… Ramasse donc les outils de ton travail, ces boulets de ton bagne éternel, et frappe !

1186. (1864) Corneille, Shakespeare et Goethe : étude sur l’influence anglo-germanique en France au XIXe siècle pp. -311

Tel a été le point de départ du cours sur les influences germaniques, que nous avons professé à Berlin, et qui a servi de noyau au livre que nous publions aujourd’hui. […] L’un de ces deux grands écrivains servit de complément à l’autre et ce fut ensemble qu’ils poursuivirent l’œuvre commencée par Diderot et Rousseau. […] Shakespeare se sert du monde comme d’un champ sans borne et sans horizon où il fauche, et récolte en maître. […] Il faut le découvrir dans ses ouvrages, examiner de quels moyens il se sert, à quels résultats il aspire. […] Mais que sert de lutter contre sa destinée ?

1187. (1863) Causeries parisiennes. Première série pp. -419

les Deux Amours, sous-titre du roman de Marguerite, pourrait servir à presque toute la collection. […] Presque toutes les découvertes remarquables qu’il a faites, au sujet des compagnies de chemins de fer pourraient lui servir dans cette nouvelle croisade. […] C’est là la morale de mon histoire : puisse-t-elle servir à mes lecteurs ! […] Pour me servir des termes mêmes de l’arrêté de M. le ministre de l’instruction publique, M.  […] On nous l’a servi de nouveau au sujet de la visite de la reine de Hollande, devant qui on a imprimé une petite adresse en hollandais.

1188. (1905) Pour qu’on lise Platon pp. 1-398

Et même leur existence peut servir à résoudre ou à adoucir certaines difficultés que nous rencontrerons plus tard. […] C’est une opinion que nous pouvons accepter pour nous en servir selon nos desseins. […] Et donc, il fait aux artistes la question ordinaire : À quoi servez-vous ? Ils répondent qu’ils servent à faire de la beauté. Il demande : À quoi sert-il de faire du beau ?

1189. (1930) Physiologie de la critique pp. 7-243

La bouteille d’encre rouge qui sert à annoter des copies d’écolier se révèle fort insuffisante devant le monde des livres, qui est d’un autre ordre. […] La précision sert à l’art d’agir. […] La création a d’abord besoin de verve et le goût ne sert que de contrôle à la verve. […] Ceux-ci ne se servent de l’analyse que provisoirement, en vue de leur opération principale qui est de créer des cœurs humains, vivants, synthétiques. […] Il s’en servait, mais sa lucidité le conduisait à reconnaître en elle une faculté inférieure à celle de création artistique, qui lui manquait.

1190. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Docquois, Georges (1863-1927) »

Par la vigueur et la variété de son tempérament littéraire, que sert à merveille une volonté d’acier, Georges Docquois demeure dès à présent marqué sur la liste des victorieux.

1191. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — N — Normand, Jacques (1848-1931) »

La langue est aussi trop facile, trop quelconque ; on voit là des marquises avoir « l’œil sympathique et fin », par exemple, et ne pas craindre de se servir, à la rime, de l’adjectif « incontestable ».

1192. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — Z — Zola, Émile (1840-1902) »

Si donc mes vers doivent servir ici à quelque chose, je souhaite qu’ils fassent rentrer en eux les poètes inutiles, n’ayant pas le génie nécessaire pour se dégager de la formule romantique, et qu’ils les décident à être de braves prosateurs, tout bêtement.

1193. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 421-423

Dave, il est vrai, fait tout dans l’Andrienne de Térence, il est l’ame de la Piece jusqu’au cinquieme acte : mais n’est-on pas forcé de convenir que ses démarches & ses ruses ne servent à rien, puisqu’il faut faire venir à grands frais d’Andros, un nouvel Acteur pour dénouer l’intrigue ?

1194. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 472-474

de Voltaire, pour servir de suite à ses Ouvrages, & de Mémoires à l’Histoire de sa Vie, à Paris, chez le Jay, Libraire, rue S.

1195. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 459-462

La Critique du Philosophe n’a ainsi servi qu’à faire sentir la supériorité du Génie, qu’il vouloit ravaler.

1196. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 419-421

Une chaîne continuelle de généalogies, de noms de Princes, destinés, par leur peu de mérite, à ne servir qu'à établir les dates de la Chronologie, des portraits de Généraux, de Ministres, tracés d'imagination, sans aucune vraisemblance, l'Esprit de Parti toujours prompt à répandre la louange & le blâme, sans aucun discernement, formoient le tissu principal de leur narration.

1197. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre I. Des Livres qui traitent de la Chronologie & de la maniere d’écrire l’Histoire. » pp. 2-4

Griffet, Jésuite, sur les différentes sortes de preuves qui servent à établir la vérité de l’Histoire, à Liége 1770.

1198. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Chardin » pp. 220-221

Pour regarder les tableaux des autres, il semble que j’aie besoin de me faire des yeux ; pour voir ceux de Chardin, je n’ai qu’à garder les yeux que la nature m’a donnés, et m’en bien servir.

1199. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Chardin » pp. 128-129

On dit de celui-ci qu’il a un technique qui lui est propre et qu’il se sert autant de son pouce que de son pinceau.

1200. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Millet Francisque » p. 168

Est-ce pour servir de repoussoirs qu’ils envoient au comité, et que le comité les admet au sallon ?

1201. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Saint-Martin, le Philosophe inconnu. — II. (Fin.) » pp. 257-278

Peu de temps après avoir été sur la bruyère de Chanteloup, il servit de témoin, et, comme on dirait en temps ordinaire, de parrain à un enfant mâle qui naquit à un brave homme d’Amboise. Il nomma le petit nouveau-né André-Régulus : « le premier nom pour ses parents, dit-il, et le second pour la République, ne connaissant pas dans l’histoire un patriote plus grand et plus fait pour servir de modèle que ce citoyen romain ». […] Son optimisme ici et cette espèce de béatitude que nous lui avons vue en quelques moments expire ; et avec cela il ne désespère jamais, il n’abdique pas son idée d’avenir et ne laisse pas échapper ce qu’il estime le fil conducteur : J’ai vu la plupart de mes concitoyens très alarmés aux moindres dangers qui à tout moment menacent l’édifice de notre Révolution ; ils ne peuvent se persuader qu’elle soit dirigée par la Providence, et ils ne savent pas que cette Providence laisse aller le cours des accessoires qui servent de voile à son œuvre, mais que quand les obstacles et les désordres arrivent jusqu’auprès de son œuvre, c’est alors qu’elle agit et qu’elle montre à la fois ses intentions et sa puissance ; aussi, malgré les secousses que notre Révolution a subies et qu’elle subira encore, il est bien sûr qu’il y a eu quelque chose en elle qui ne sera jamais renversé.

1202. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — III » pp. 132-153

Y travaillant, l’entendant bien, il sert au prochain autant qu’il doit ; n’y nuisant pas, c’est beaucoup ; le mal ôté, le bien reste. » Ce système de bonheur, qui mènerait aisément à l’égoïsme, est vivifié chez lui par une nature active et une cordialité qui s’étend à l’entour. […] Avec cela les sens l’ont bien servi, et il a joui des plus grandes délices de la vie et de l’humanité. Ces sens, qui ont bien servi Saint-Évremond et que d’Argenson lui enviait, jouent ici, jusque dans ces extraits de lectures, un rôle bien plus important qu’on ne le croirait.

1203. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire de la querelle des anciens et des modernes par M. Hippolyte Rigault — II » pp. 150-171

Mme Dacier, par sa traduction de L’Iliade, ayant fourni le moyen de la lire à ceux qui n’entendaient pas le grec (et c’était alors l’immense majorité, même des gens réputés instruits), La Motte s’en était servi à loisir pour mettre en ordre ses arguments et tirer ses conclusions. […] Le divin poète, impénétrable aux autres hommes, revit en lui ; il est juste qu’on le respecte en lui… Voilà la folle illusion qui allume le zèle des homéristes ; mais le plaisant est que le public ait si longtemps servi cette même illusion… Combien peu de gens savent la langue grecque ! […] A-t-elle mal servi, à ces differents égards, Corneille, Racine, Molière, Despréaux, La Fontaine ? 

1204. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe, et d’Eckermann »

Un grand écrivain, observe à ce propos Eckermann, peut nous servir de deux manières : en nous révélant les mystères de nos propres âmes, ou en nous rendant sensibles les merveilles du monde extérieur. […] N’oublions pas sa belle-fille, Mme de Gœthe, Ottilie : elle lui sert volontiers de lectrice ; elle a fondé un Journal polyglotte à Weimar, le Chaos, où toute la société weimarienne écrit ; les jeunes gens anglais ou français qui y séjournent, surtout les dames, tout ce monde collabore et babille dans cette Babel, chacun dans sa langue. […] « La partie n’est pas égale, disait-il ; elle n’est pas loyale de la part de ces yeux armés qui sont tout occupés à m’observer et qui se dérobent. » Le fait est que les lunettes dont se servait, même dans les circonstances solennelles, un Charles-Quint, se concevraient mal sur le nez d’un Sophocle ou d’un Périclès.

1205. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Histoire de la Restauration par M. Louis de Viel-Castel. Tomes IV et V. (suite et fin) »

quelle que fût, au point de vue de la théorie parlementaire, la valeur spécieuse des arguments développés par M. de Villèle, devenu vers la fin de la session le meneur et le tacticien habile du parti, la sincérité et la raison n’étaient pas de son côté et ne résultaient pas de tous ses beaux raisonnements : que me fait la rectitude des formes, si elle ne sert qu’à couvrir et à protéger la tortuosité des intentions ! […] Pasquier, de tout temps et en sachant très-bien se passer de théorie absolue, vit toujours plus clair, et nul régime, de tous ceux qu’il a servis, n’eût péri si vite, si on l’avait écouté. […] Il se garda bien de donner dans aucune de ces théories absolues, de ces professions de foi excessives, qui ne servent qu’un jour et qu’une heure, et qui embarrassent dans toute la suite de la vie publique.

1206. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite.) »

Il se sert des noms de Gros, de Géricault et même de Charlet, pour en accabler le brillant et valeureux talent dont l’originalité, précisément, est de ne pas leur ressembler. […] Un jour, Horace le vit en passant et dit : « Il pourra me servir ; qu’on « me le porte à Versailles. » Et il le mit dans son tableau. […] Il revint donc à moi, me fit passer dans une pièce voisine, et me demanda si j’avais du temps à perdre. « J’ai là, ajouta-t-il, une toile toute tendue et toute prête à servir ; j’y veux peindre votre portrait que vous conserverez en souvenir de cette journée.

1207. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [V] »

il en est le malheureux fils, et, pour me servir de l’expression allemande qui dit que le temps présent est gros (enceinte) de l’avenir, je vous assurerai que, si la progéniture va ainsi en dégénérant, nous ne perdrons pas grand’chose à quitter le monde sans faire connaissance avec elle. […] Désenchanté de toutes les illusions humaines, je ne désire qu’une retraite que je ne puis pas décemment demander, ayant si peu servi depuis ma démarche ; je traînerai donc par reconnaissance et par devoir ma triste carcasse sur le premier champ de bataille où il me sera possible de courir au-devant d’un boulet bienfaiteur. […] Si d’autre part il la faisait sévère et trop peu bienveillante, il ne manquerait pas moins à son passé et au grand capitaine qu’il avait servi.

1208. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo en 1831 »

Table toujours servie au paternel foyer ! […] Telle est la pièce inédite qui doit servir de préface au prochain recueil lyrique de M. […] Il s’agissait seulement de rallier quelques âmes perdues qui ignoraient cette chartreuse, de nourrir quelques absents qui la regrettaient, et la Muse française servit en partie à cela.

1209. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ULRIC GUTTINGUER. — Arthur, roman ; 1836. — » pp. 397-422

Guttinguer parut en 1824, avec une Épître de M. de Latouche, qui servait d’épilogue. […] En les regardant, en les écoutant, je suis arrivé à goûter une indicible joie, rien qu’à voir rayonner ce beau et doux soleil sur un arbre que j’ai planté, et à trouver le strict nécessaire proprement servi sur ma table ; rien qu’à jouir du silence, de la retraite, de la lecture, ou d’une innocente occupation ; et je m’écrie vingt fois le jour, comme les Pères des déserts : « Seigneur, c’est assez ! […] Puisque j’ai remué des feuilles oubliées, j’en tirerai encore un seul passage qui servira à encadrer une autre élégie : la passion qui va saisir le héros en est déjà aux préliminaires ; c’est lui toujours qui raconte : « … Le dimanche, elle recevait volontiers du monde de la ville ; j’y fus invité, par un petit mot de sa main, pour le second dimanche qu’elle y passa : il ne devait y avoir que moi, m’écrivait-elle.

1210. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « M. Joubert »

Les écrivains illustres, les grands poëtes, n’existent guère sans qu’il y ait autour d’eux de ces hommes plutôt encore essentiels que secondaires, grands dans leur incomplet, les égaux au dedans par la pensée de ceux qu’ils aiment, qu’ils servent, et qui sont rois par l’art. […] aurait été commis à la gabelle sous quelque intendant de Normandie, ou aurait servi de poignet laborieux à Pussort. […] Quant à ce que l’on nomme force, vigueur, nerf, énergie, élan, je prétends ne plus m’en servir que pour monter dans mon étoile.

1211. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (6e partie) » pp. 129-176

Il la servit comme le vent sert la tempête, en soulevant l’écume et en jouant avec les flots. […] Il permet que son nom serve pendant dix-huit mois d’enseigne à l’échafaud et de justification à la mort.

1212. (1892) Boileau « Chapitre II. La poésie de Boileau » pp. 44-72

Il faut prendre garde aussi de ne pas confondre la poésie avec la technique qui sert à la réaliser, avec les procédés de versification et de style. […] Alors chaque morceau nous plaît en soi, détaché de l’ensemble où il n’est logé que par accident et par artifice, comme nous nous amusons des originaux que Lesage fait défiler devant nous dans son Diable boiteux, sans nous soucier de la fiction qui lui sert à les amener. […] Boileau de la Grande Encyclopédie ; l’Esthétique de Boileau, dans la Revue des Deux Mondes du 1er juin 1889 (article destiné à servir de préface à l’édition de luxe des Poésies de Boileau publiée par la librairie Hachette) ; Histoire de l’évolution de la critique, chap. 

1213. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre quatrième »

Il a pu préférer le vrai au faux, soit souvenir de Boileau, soit éclair de justesse ; il ne l’a pas aimé d’affection, et la vertu qui lui a servi de « premier docteur » est la vertu du lieu commun. […] Le Racine des enfants peut servir à faire mieux goûter le Racine des hommes faits. […] André Chénier y servit.

1214. (1900) Poètes d’aujourd’hui et poésie de demain (Mercure de France) pp. 321-350

J’emprunte à l’écrivain déjà cité la définition du sens et de la portée de cet Idéalisme « Une vérité nouvelle est entrée récemment, dans la littérature, nous dit-il, et dans l’art, et c’est une vérité toute métaphysique et vraiment neuve puisqu’elle n’avait pas encore servi dans l’ordre esthétique. […] La poésie semble donc résigner son vieux pouvoir oratoire dont elle s’est servie si longtemps. […] Hugo, par exemple, et Leconte de Lisle, pour ne nommer qu’eux, s’en servirent.

1215. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVIII. Formule générale et tableau d’une époque » pp. 463-482

Loin d’imiter les étrangers, ils se flattent de leur servir de modèles. […] Descartes, à force d’abstraction, n’est pas loin de réduire l’homme à n’être plus qu’une intelligence servie par des organes, une âme qui a rencontré un corps par hasard, qui se trouve accouplée avec lui on ne sait comment et qui, en attendant d’en être délivrée, peut et doit raisonner comme si elle était seule. […] Il faut, à côté d’eux, placer les hommes et les ouvrages secondaires, qui a défaut d’autre mérite servent du moins à montrer, soit réduites au niveau moyen les qualités, soit portés à outrance les défauts des maîtres et de leurs productions géniales.

1216. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « V »

une fois Lohengrin mis de côté sans danger de retour, à quoi pouvait bien servir Benvenuto ? […] » Cette année-ci, le coup de Benvenuto ayant déjà servi, on a préféré celui des Troyens. […] « Mon seul désir, en toute cette affaire, est d’obtenir la satisfaction à laquelle j’ai droit : celle d’entendre proclamer que je suis seul à supporter le poids de la responsabilité que j’ai assumée en montant Lohengrin, dans le but unique de servir la cause de l’art dans mon pays.

1217. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — CHAPITRE VII »

Décidément ce Satan moderne est un pauvre diable ; il rabâche et il se répète ; ses fourberies montrent la corde et ses trucs ont déjà servi. […] Certes, le Rodin du Juif errant est une laide et grossière figure, taillée en épouvantail et coloriée des tons crus dont les peintres des enseignes foraines se servent pour enluminer leurs serpents de mer. […] Ce n’est pas le jésuite cruellement mais sérieusement combattu par Quinet et par Michelet ; c’est celui que les journalistes prêtrophobes de la Restauration servaient, chaque matin, au gros appétit des abonnés de l’ancien Constitutionnel.

1218. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Huet, évêque d’Avranches, par M. Christian Bartholmèss. (1850.) » pp. 163-186

Écoutons le raisonnement : Si l’on veut bien considérer, nous dit d’Olivet, qu’il a vécu quatre-vingt-onze ans moins quelques jours, qu’il se porta dès sa plus tendre enfance à l’étude, qu’il a toujours eu presque tout son temps à lui ; qu’il a presque toujours joui d’une santé inaltérable ; qu’à son lever, à son coucher, durant ses repas, il se faisait lire par ses valets ; qu’en un mot, et pour me servir de ses termes, ni le feu de la jeunesse, ni l’embarras des affaires, ni la diversité des emplois, ni la société de ses égaux, ni le tracas du monde, n’ont pu modérer cet amour indomptable de l’érudition qui l’a toujours possédé, une conséquence qu’il me semble qu’on pourrait tirer de là, c’est que M. d’Avranches est peut-être, de tous les hommes qu’il y eut jamais, celui qui a le plus étudié. […] Si j’osais, je lui offrirais ma plume pour soutenir ses intérêts et pour vous servir de second, et je répandrais très volontiers pour un si juste et si digne sujet jusqu’à la dernière goutte de mon encre et de mon sang. […] [NdA] On cite quelquefois une phrase de Huet comme ayant un air de prophétie ; elle est dans son Histoire du commerce et de la navigation des anciens, qu’il écrivait sous le ministère de Colbert ; il parle des Russes, qu’on appelait encore Moscovites : « Que s’il s’élevait parmi eux quelque jour, dit-il, un prince avisé qui, reconnaissant les défauts de cette basse et barbare politique de son État, prît soin d’y remédier en façonnant l’esprit féroce et les mœurs âpres et insociables des Moscovites, et qu’il se servît, aussi utilement qu’il le pourrait faire, de la multitude infinie de sujets qui sont dans la vaste étendue de cette Domination qui approche des frontières de la Chine, et dont il pourrait former des armées nombreuses ; et des richesses qu’il pourrait amasser par le commerce, cette nation deviendrait formidable à tous ses voisins. » Je ne donne pas la phrase comme bien faite, mais elle est curieuse et prouve que Huet, avec un tour très latin en français, est capable, plus qu’on ne croirait, d’un sens très moderne.

1219. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Hégésippe Moreau. (Le Myosotis, nouvelle édition, 1 vol., Masgana.) — Pierre Dupont. (Chants et poésies, 1 vol., Garnier frères.) » pp. 51-75

Quant à la société, c’est-à-dire à la généralité des hommes réunis et établis en civilisation, ils demandent qu’on fasse comme eux tous en arrivant, qu’on se mette à leur suite dans les cadres déjà tracés, ou, si l’on veut en sortir, qu’alors, pour justifier cette prétention et cette exception, on les serve hautement ou qu’on les amuse ; et, jusqu’à ce qu’ils aient découvert en quelqu’un ce don singulier de charme ou ce mérite de haute utilité, ils sont naturellement fort inattentifs et occupés chacun de sa propre affaire. […] Mais insensiblement il se rappelle le temps où, dans sa première enfance, il priait, et où il servait même le prêtre à l’autel : Autrefois pour prier, mes lèvres enfantines D’elles-mêmes s’ouvraient aux syllabes latines, Et j’allais aux grands jours, blanc lévite du chœur, Répandre devant Dieu ma corbeille et mon cœur. […] Ces documents qui ont servi à mon ami, M. 

1220. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « L’abbé Maury. Essai sur l’éloquence de la chaire. (Collection Lefèvre.) » pp. 263-286

Il se lia fort avec M. de Lamoignon, garde des Sceaux, et le servit de ses avis et de sa plume dans ses plans hardis de réforme, relativement aux corps judiciaires et aux parlements. […] » — Et à un homme qui le menaçait de l’envoyer dire la messe à tous les diables, il tira de sa poche deux pistolets qu’il portait par précaution, en lui disant : « Tiens, voilà deux burettes pour la servir !  […] Certes, ce n’était pas au cardinal Maury, héros de l’Ancien Régime, et par suite comblé des récompenses du Saint-Siège, d’aller servir d’instrument au pouvoir nouveau, et de faire œuvre d’évêque à demi constitutionnel, pendant la captivité et l’oppression du pontife.

1221. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La Harpe. Anecdotes. » pp. 123-144

J’ai mangé d’un succulent potage, deux côtelettes panées à la minute, l’œil et les abat-joues de cette tête de veau si blanche, ce morceau de brochet du côté de l’ouïe que vous m’avez servi vous-même : je n’ai rien refusé parce qu’il faut que la volonté de Dieu et des jolies femmes soit faite ; j’ai fait honneur aux trois services : en un mot, j’ai dîné, moi indigne, comme aurait pu le faire un ancien prélat, et voilà cependant (ici les pleurs redoublent) que je songe à quelles cruelles privations sont exposés tant de pauvres prêtres sans dîmes, de chanoines sans bénéfices, qui n’ont peut-être pas une omelette au lard, et qui dîneront mal d’ici à l’éternité, si la Providence ne vient à leur secours. […] il faudra boire peut-être de ces malheureux vins (vous en avez des meilleurs crus), tandis que ces pauvres prêtres… — Mais le Seigneur n’abandonnera pas les siens. — Vous me forcerez peut-être à prendre le café (c’est du moka, sans doute) : au moins qu’il soit servi bien chaud… Les malheureux, s’ils savaient combien je partage leurs peines ! […] J’ai été trompé de toutes manières par celle à qui je ne voulais faire que du bien, et Dieu s’est servi d’elle pour me punir du mal que j’avais fait à d’autres.

1222. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — II. (Suite.) » pp. 23-46

Marmont, aux heures habituelles, aimait à résumer ainsi le sens de toute sa conduite avec Napoléon : « Tant qu’il a dit : Tout pour la France, je l’ai servi avec enthousiasme ; quand il a dit : La France et moi, je l’ai servi avec zèle ; quand il a dit : Moi et la France, je l’ai servi avec dévouement.

1223. (1899) Esthétique de la langue française « Le cliché  »

Cela est peut-être d’un degré au-dessous de l’aphasique qui, pour « couteau », dit « ce qui sert à couper » ; c’est un bruit, mais à peine labial, le soufflement de l’asthmatique. […] A peine. « Expression tirée de l’Énéide, affirme un guide-âne populaire, et qui sert à faire entendre que la vue d’une grande infortune excite la pitié : les choses elles-mêmes arrachent des larmes. […] Expression dont Virgile se sert pour rendre plus touchante la douleur d’un jeune guerrier qui meurt loin de sa patrie.

1224. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre premier. La solidarité sociale, principe de l’émotion esthétique la plus complexe »

C’est que le caractère agréable ou pénible d’une émotion provient, non du premier état mental qui lui sert de prélude, mais de l’activité de la réaction intérieure consécutive. […] L’art peut, pour cela, se servir seulement des sensations, qu’il gradue d’une manière plus ou moins ingénieuse, des saveurs, des odeurs, des couleurs. […] Par cette fiction dont se servent les arts, nous devenons accessibles non seulement à toutes les souffrances et à toutes les joies des êtres réels vivant autour de nous, mais à toutes celles d’êtres possibles.

1225. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre II. Shakespeare — Son œuvre. Les points culminants »

Alors à quoi sert-elle ? […] Mercure, c’est tout le vice possible, plein d’esprit ; Mercure, le dieu vice, sert Jupiter, le dieu crime. […] Cette admirable création humaine, Lear, sert de support à cette ineffable création divine, Cordelia.

1226. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre III : La science — Chapitre II : De la méthode expérimentale en physiologie »

J’avoue que se servir de la force vitale comme d’un moyen pour expliquer tel ou tel phénomène en particulier, c’est faire appel aux qualités occultes, à un deus ex machina. […] A quoi sert-elle donc ? […] Cette cause ne sert à rien physiquement parlant, elle est une qualité occulte ; mais elle répond à cette loi de l’esprit qui nous fait passer du phénomène à l’être, et qui est la raison d’être de la métaphysique.

1227. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Plan, d’une université, pour, le gouvernement de Russie » pp. 433-452

— Ils ont perdu moins de temps, ils ne savent rien, mais rien du tout qui puisse leur servir ; cependant ils ne sont pas incapables de quelques professions utiles, et c’est leur ressource. […] J’en dis autant des orateurs, des érudits et des autres professions qui ne souffrent pas de médiocrité, et à qui l’instruction ne sert de rien sans le génie ; d’ailleurs peu nécessaires dans une société, même quand on y excelle. […] Mais heureusement cette contradiction ne se présente qu’une fois ; encore la science que l’enseignement des connaissances amène dans un endroit d’où le motif d’utilité la transpose n’estelle pas d’une longue étude et ses éléments servent-ils de base à plusieurs conditions importantes.

1228. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « V. M. Amédée Thierry » pp. 111-139

Probablement et d’après ce qui se pratiquait par une sorte d’échange entre la Barbarie et la Civilisation, tandis que Aétius faisait ses premières armes chez les Huns, Attila faisait les siennes chez les Romains, étudiant les vices de cette société comme le chasseur étudie les allures d’une proie : faiblesse de l’élément romain et force de l’élément barbare dans les armées, incapacité des empereurs, corruption des hommes d’État, absence de ressort moral sur les sujets, en un mot, tout ce qu’il sut si bien exploiter plus tard et qui servit de levier à son audace et à son génie. » La phraséologie moderne à part, il y a l’éclair du vrai dans ces paroles. […] Mais, outre que les Romains sous Aétius, Bélisaire et Narsès, ne se sont pas si aisément dissous sous la poussée barbare et ont prouvé une fois de plus que les nations, toujours faites pour servir, n’existent jamais que par leurs chefs, on oublie trop que les Barbares sont en réalité aussi corrompus que leurs ennemis. […] Moderne, délicat, il ne trempa que l’extrémité de son pinceau dans le cuvier de couleur barbare ou de couleur mystique et légendaire qui aurait pu lui servir de palette, s’il avait été le peintre géant qu’il fallait, et par cela seul qu’il ne voulut pas être barbare, comme n’aurait pas manqué de l’être tout grand artiste qui aurait eu à peindre un sujet barbare comme le sien, il resta de fait au-dessous, comme effet d’impression, de tous ces moines qui avaient moins de goût que lui, mais qui avaient plus d’énergie, et dont son histoire, pour ceux qui savent les lire, ne remplacera pas les chroniques et le mauvais latin, si sublime dans son incorrecte grandeur !

1229. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « X. M. Nettement » pp. 239-265

Ce burin de l’histoire qui coupe dans le bronze, et qui quand on écrit sur les choses contemporaines, trouve sous ce bronze le sang des amours-propres qui se met subitement à couler, ce burin tranchant, il ne s’en sert pas, et ce sang des amours-propres l’épouvante. […] Il y a bien pis que l’ignorance qui ne sait pas les faits et que l’étourderie qui les fausse : c’est l’absence d’idées qui serviraient à les mesurer. […] Nettement est faite de manière à ce qu’elle ne puisse pas servir beaucoup à cette histoire future, même à titre de renseignement !

1230. (1853) Portraits littéraires. Tome II (3e éd.) pp. 59-300

Quand l’hyperbole, interprète de la colère, se sert du langage ordinaire, comme dans Juvénal, par exemple, elle est forcée d’envahir successivement tous les éléments de la pensée. […] Je ne pense pas que ces paroles servent à dessiner le caractère de Latréaumont, et je suis sûr qu’elles exciteront un dégoût universel. […] Sue à quoi sert ce duel. […] Il nous serait plus doux d’avoir à louer les œuvres dramatiques de notre temps ; mais pour les louer, il faudrait nous résoudre à parler contre notre pensée, et ce mensonge ne servirait personne. […] Ne craindra-t-il pas à chaque instant que ce confident dont il voulait faire un disciple ne livre le mot d’ordre, et ne révèle les secrets de la royauté qu’il a refusé de servir ?

1231. (1889) La littérature de Tout à l’heure pp. -383

Il semble que cette femme conclut la défaite d’un parti devenu mauvais depuis qu’elle le sert. […] Elles les servaient plus qu’elles ne les gênaient. […] Le désespoir se sert de but à lui-même et ne peut produire que la mort. […] Peut-être est-il resté trop fidèle à l’école qu’il avait si bien servie. […] Qui paye veut être considéré, obéi, servi.

1232. (1885) Le romantisme des classiques (4e éd.)

Les servants d’armes, et un berger qui sert de guide aux trois voyageurs, n’osent approcher de ce malheureux : ils craignent la contagion de son mal horrible. […] Je vais vous le servir tout épluché. […] Il désigne par ce nom un de ses amis qui lui avait, à ce qu’il dit, demandé des vers à mettre en musique ; du moins est-ce là le prétexte dont il se sert. […] Sylvie Le seul émail des fleurs me servait d’entretien : Je rêvais, comme ceux qui ne pensent à rien. […] Genès se présente habillé de vêtements blancs, monte sur un socle qui avait servi à porter une statue de Vénus, et fait le discours suivant : « Écoute, Empereur, et vous tous, écoutez, armée, sages et peuple de cette ville.

1233. (1903) Propos de théâtre. Première série

Elle sert, le plus souvent, à tirer de l’oubli plus ou moins profond un écrivain français, estimé de second ou de troisième ordre. […] Athalie peut se porter contre vous à quelque violence. — Pourquoi les honnêtes gens la servent-ils ? […] Il faut bien servir quelqu’un. — Mais si le roi légitime revenait ?  […] S’il songe à quelque chose, c’est à l’ingratitude d’Athalie, qu’il a toujours fidèlement servie, et qui le frappe sans raison. […] Il le dressera sans y réfléchir, croyant encore servir tout le monde.

1234. (1769) Les deux âges du goût et du génie français sous Louis XIV et sous Louis XV pp. -532

Balzac fut traduit en ridicule, & aurait pu servir de modele s’il avait eu le tact aussi sûr qu’il eut le génie élevé. […] Je le répete encore ; la Poésie a toujours précédé les autres Arts, & servi d’aliment à l’éloquence. […] Il s’appuyait sur une foule d’exemples, autant que des exemples peuvent servir de point d’appui. […] On eût dit qu’ils voulaient s’en servir pour escalader le double mont, comme les Titans se servirent des montagnes pour escalader les Cieux. […] Elle n’est ici que pour servir d’ombre à Jeanne d’Arc.

1235. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « PENSÉES ET FRAGMENTS. » pp. 495-496

J’ai réuni, dans les pages qui suivent, quelques fragments de jugements et quelques pensées qui pourront servir à éclaircir, à modifier d’autres points de vue antérieurs.

1236. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rebell, Hugues (1867-1905) »

— et pourtant ses argumentations me plaisent toujours, surtout quand elles servent une assertion qui m’irrite.

1237. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Première partie. Plan général de l’histoire d’une littérature — Chapitre II. Pourquoi il faut préférer la méthode inductive » pp. 13-14

C’est même, si l’on veut, l’idéal pour une science de pouvoir se tirer tout entière de deux ou trois principes féconds, comme le sont les axiomes qui servent de base à la géométrie.

1238. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » pp. 163-165

De tels Ecrivains doivent être regardés comme d’adroits Legislateurs, qui se servent des passions pour les combattre ou les diriger vers le bein public, qui, par le sentiment, menent à la vertu, & nous font aimer nos devoirs.

1239. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 465-468

D’après cette analogie si caractérisée, le savant Auteur prétend que les Prêtres Egyptiens ayant eu connoissance des Livres Hébreux, & que, s’étant apperçus qu’ils contenoient des détails sur leur patrie, ils s’en servirent pour se fabriquer des Annales & une longue suite de Rois, dont les noms, altérés à la vérité, se trouvent dans l’Historien sacré.

1240. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 308-311

Cet Auteur a publié récemment des Mémoires politiques & militaires, pour servir à l’Histoire de Louis XIV & de Louis XV, qu’il a composés sur les Pieces originales, recueillies par un Duc de Noailles, qui fut Maréchal de France & Ministre d’Etat.

1241. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre premier. Musique. — De l’influence du Christianisme dans la musique. »

De là toute institution qui sert à purifier l’âme, à en écarter le trouble et les dissonances, à y faire naître la vertu, est, par cette qualité même, propice à la plus belle musique, ou à l’imitation la plus parfaite du beau.

1242. (1882) Hommes et dieux. Études d’histoire et de littérature

La faute en est aux Dieux qui se servent de sa beauté pour éblouir le monde et pour l’embraser. […] Ils s’imaginent nuire par leurs blâmes, servir par leurs louanges. […] La main sur son poignard, tenant de l’autre une de ces boules d’or qui servaient à contenir des parfums, il vous regarde en face, avec une sérénité impassible. […] Lucrèce a une livrée d’évêques ; des prélats la servent à table ; il n’est permis qu’aux cardinaux de célébrer la messe devant elle. […] L’ambassadeur de France servait d’interprète.

1243. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « L’abbé Fléchier » pp. 383-416

Fléchier aimait à faire des vers latins : il songea à s’en servir pour sa réputation et pour sa fortune littéraire ; cette ancienne littérature scolastique, qui a encore eu, depuis, quelques rares retours, n’avait pas cessé de fleurir à cette date, avant que les illustres poètes français du règne de Louis XIV eussent décidé l’entière victoire des genres modernes, Fléchier avait adressé au cardinal Mazarin une pièce de félicitation en vers latins (Carmen eucharisticum) sur la paix des Pyrénées (1660) ; il en fit une autre l’année suivante, sur la naissance du Dauphin (Genethliacon). […] À quoi, monsieur, ne servirait pas peu encore quelque autre ouvrage latin ou français sur la nouvelle largesse du roi dans la liberté qu’il a procurée par la terreur de ses armes et par l’effusion de ses trésors aux chrétiens captifs en Barbarie, qu’on n’attend que l’heure de voir revenir délivrés… L’estimable Chapelain suggérait là à son jeune ami un nouveau sujet de poème officiel et ennuyeux, pour trouver occasion de le faire valoir en Cour et auprès de Colbert. […] Nous ne devons désirer de vivre que pour accomplir ce que Dieu demande de nous, et la tranquillité de la vie doit être regardée comme une grâce et une bénédiction de douceur qu’il répand sur nous, et qui nous engage à le servir avec plus de fidélité. […] [NdA] Ce morceau a servi d’introduction à l’édition des Grands Jours, publiée chez M. 

1244. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. LEBRUN (Reprise de Marie Stuart.) » pp. 146-189

Le jeune poëte servait mieux la pensée impériale par deux odes sur les campagnes de 1806 et de 1807, par une autre Au Vaisseau de l’Angleterre, qui a de l’énergie dans la menace : Il n’a pas lu clans les étoiles Les malheurs qui vont advenir ; Il n’aperçoit pas que ses voiles Ne savent plus quels airs tenir ; Que le ciel est devenu sombre… Un jour, en 1808, à Fontainebleau, l’Empereur, qui se souvenait de la méprise de Schœnbrunn et de la visite de Saint-Cyr, et pour qui l’auteur était devenu très-distinct, dit à une dame du palais, qui s’intéressait à M. […] Le style en général était assez pauvre sous l’Empire et servait mal l’aspiration de la pensée. […] Sophocle dans Philoctète l’a pu faire servir à nouer l’intrigue ; mais il ne l’a pas mis au premier plan. […] Lebrun, l’un des premiers, ressentit en poésie ce besoin de nouveau, surtout de naturel, et travailla de son point de vue à le servir.

1245. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre II. Les bêtes »

Voilà à quoi sert d’être Gaulois et poëte : il ne se dégoûtait pas comme les beaux esprits, il osait être paysan, campagnard, comme il avait été homme de cour et galant. […]          Le misérable ne s’en sert          Qu’à dépouiller sa bienfaitrice          De ses principaux ornements,          Elle gémit à tous moments :          Son propre don fait son supplice. […] Rien de plus plaisant que de les observer un jour de pluie, plongeant leurs cols à chaque instant dans la mare, et frétillant à grand bruit avec un refrain nasillard, comme de bons compagnons qui chantent accoudés sur une table bien servie. — Le mulet parle de sa mère la jument, se prélasse, marche d’un pas relevé, fait sonner sa sonnette et se croit un personnage ; c’est qu’avec ses longues oreilles et son air solennel d’âne manqué, il a la mine d’un président. — Voyez le boeuf. […] Cela sert à comprendre ce qu’est la poésie.

1246. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre I. Polémistes et orateurs, 1815-1851 »

Pour la politique même et le gouvernement, ni les plus hauts esprits, ni les volontés les plus efficaces n’ont été toujours servis par le talent oratoire, et les partis eux-mêmes seront loin d’être représentés ici selon leur force ou leur influence. […] Cette clairvoyance aiguë ne lui a pas servi à mettre plus d’unité dans sa vie : mais, en dépit de ses incohérences, il avait des principes très arrêtés. […] Courier de Méré (1772-1825), lieutenant d’artillerie en 1703, servit sur le Rhin, puis en Italie ; chef d’escadron démissionnaire en 1809, il rentre au service presque aussitôt, et le quitte de nouveau au milieu de la campagne d’Autriche. […] Du gouvernement représentatif et de l’état actuel de la France, 1816, in-8 ; Washington. 1841, in-18 ; De la démocratie en France, 1849, in-8 ; Mémoires pour servir à l’histoire de mon temps, 1858-67, 8 vol. in-8 ; Discours académiques, 1861, in-8 : Histoire parlementaire de la France (discours prononcés aux Chambres de 1819 à 1848), 5 vol. in-8, 1863 ; Méditations sur l’état actuel de la religion chrétienne, 1866, in-8 ; Lettres de Guizot à sa famille et à ses amis,1884, in-8.

1247. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Mme Desbordes-Valmore » pp. 01-46

Je me servirai pour cela de cette extraordinaire lamentation en deux cent quatre-vingt-trois lettres, qui est la Correspondance intime de Marceline Desbordes-Valmore, récemment parue chez Alphonse Lemerre. […] Sans doute, « Joseph » était un des prénoms de Latouche, et « Josèphe » un des prénoms de Mlle Desbordes ; mais ce n’étaient point ceux dont on les appelait ni qui leur servaient de signature. […] Il t’aime et t’honore, et fera tout dans des circonstances indiquées pour te servir… » — « M.  […] Sainte-Beuve fait des vœux bien sincères pour ton retour et s’ingère pour te servir.

1248. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre cinquième »

Le spectateur veut bien ne pas regarder de trop près aux moyens dont se sert le poète pour faire rencontrer ses personnages au même lieu et dans le même temps ; mais il ne consent ni à s’intéresser à plusieurs personnages à la fois, ni à s’intéresser médiocrement au principal. […] Si nous n’avons pas le plaisir de voir la passion se former au fond du cœur de ses personnages, croître et s’exalter par sa lutte même avec l’intérêt ou le devoir, Se servir de l’esprit, de la raison, de la bonne foi même, pour se justifier, nous voyons des actions qui se précipitent, des péripéties imprévues, des coups d’épée qui tranchent les situations. […] Quand Polyphonte la force de choisir entre sa main et la mort d’Égisthe, je regrette qu’elle n’ait rien de l’innocente habileté d’Andromaque, faisant servir au salut de son fils la passion qu’elle inspire à Pyrrhus. […] Je n’entends pas par là l’authenticité de l’événement qui sert de sujet à une tragédie, ni cette notoriété qui résiste au scepticisme d’un Niebuhr.

1249. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VIII, les Perses d’Eschyle. »

Ce Roi qui leur manque, les vieillards l’exaltent pour raffermir leur espoir, ils se le retracent sous la figure surhumaine des colosses postés aux avenues du palais : — Il est semblable à un dieu, « Fils de la Pluie d’or » : il a « l’œil sanglant du Dragon » ; des chefs inexpugnables lui servent d’appui. […] On sert un oiseau appelé Ryndacki, gibier exquis, presque fabuleux : il passait pour ne se nourrir que de rosée et de vent. […] Dans son adieu mélancolique aux Fidèles, il leur conseille de cueillir les jours sans prendre souci de leurs lendemains. — Omnia fui nihil prodest : « J’ai été tout, rien ne sert », disait un César expirant. C’est à peu près le mot final de Darius : — « A quoi peut servir la richesse aux morts ? 

1250. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Edgar Allan Poe  »

Il n’emploie pas les conversations, le minutieux récit des antécédents, les aventures amenées pour causer une décision caractéristique, expédients qui servent aux romanciers psychologues à faire entrevoir la complexité de leurs créatures. […] Tous les détails de la description de la maison Usher servent, à la catastrophe. […] Ni dans ses contes, ni dans la plupart de ses poèmes, il ne se sert pour produire l’émotion, du spectacle de l’amour normal, qui est pourtant le contenu principal de tous les romans, de tous les drames et de presque tous les vers. […] Ayant séparé les éléments de son esthétique et les composants des émotions qu’elle sert à provoquer, nous avons discerné un style varié et adapté au ton de chaque conte et poème, des descriptions de lieux et d’états d’âme également détaillées, une psychologie à la fois menue, autobiographique et imperturbable, des plans combinés merveilleusement, l’habile brièveté de tout écrit, la nouveauté des visions présentées, 1 ’artificiosité générale des moyens.

1251. (1830) Cours de philosophie positive : première et deuxième leçons « Première leçon »

De là, trois sortes de philosophies, ou de systèmes généraux de conceptions sur l’ensemble des phénomènes, qui s’excluent mutuellement : la première est le point de départ nécessaire, de l’intelligence humaine ; la troisième, son état fixe et définitif ; la seconde est uniquement destinée à servir de transition. […] Sans les attrayantes chimères de l’astrologie, sans les énergiques déceptions de l’alchimie, par exemple, où aurions-nous puisé la constance et l’ardeur nécessaires pour recueillir les longues suites d’observations et d’expériences qui ont plus tard servi de fondement aux premières théories positives de l’une et l’autre classe de phénomènes ? […] La théologie et la physique sont si profondément incompatibles, leurs conceptions ont un caractère si radicalement opposé, qu’avant de renoncer aux unes pour employer exclusivement les autres, l’intelligence humaine a dû se servir de conceptions intermédiaires, d’un caractère bâtard, propre, par cela même, à opérer graduellement la transition. […] Tels sont les quatre points de vue principaux sous lesquels j’ai cru devoir indiquer dès ce moment l’influence salutaire de la philosophie positive, pour servir de complément essentiel à la définition générale que j’ai essayé d’en exposer VII.

1252. (1830) Cours de philosophie positive : première et deuxième leçons « Deuxième leçon »

On en peut citer un exemple bien remarquable dans les belles spéculations des géomètres grecs sur les sections coniques, qui, après une longue suite de générations, ont servi, en déterminant la rénovation de l’astronomie, à conduire finalement l’art de la navigation au degré de perfectionnement qu’il a atteint dans ces derniers temps, et auquel il ne serait jamais parvenu sans les travaux si purement théoriques d’Archimède et d’Apollonius ; tellement que Condorcet a pu dire avec raison à cet égard : « Le matelot, qu’une exacte observation de la longitude préserve du naufrage, doit la vie à une théorie conçue, deux mille ans auparavant, par des hommes de génie qui avaient en vue de simples spéculations géométriques. » Il est donc évident qu’après avoir conçu d’une manière générale l’étude de la nature comme servant de base rationnelle à l’action sur la nature, l’esprit humain doit procéder aux recherches théoriques, en faisant complètement abstraction de toute considération pratique ; car nos moyens pour découvrir la vérité sont tellement faibles que, si nous ne les concentrions pas exclusivement vers ce but, et si, en cherchant la vérité, nous nous imposions en même temps la condition étrangère d’y trouver une utilité pratique immédiate, il nous serait presque toujours impossible d’y parvenir. […] Elle me semble, en effet, exiger préalablement un travail très important et d’une nature toute particulière, qui n’a pas encore été fait, celui de former, d’après les théories scientifiques proprement dites, les conceptions spéciales destinées à servir de bases directes aux procédés généraux de la pratique. […] La philosophie des sciences fondamentales, présentant un système de conceptions positives sur tous nos ordres de connaissances réelles, suffit, par cela même, pour constituer cette philosophie première que cherchait Bacon, et qui, étant destinée à servir désormais de base permanente à toutes les spéculations humaines, doit être soigneusement réduite à la plus simple expression possible. […] L’importance de notre loi encyclopédique pour servir de base à l’éducation scientifique ne peut être convenablement appréciée qu’en la considérant aussi par rapport à la méthode, au lieu de l’envisager seulement, comme nous venons de le faire, relativement à la doctrine.

1253. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — II » pp. 161-173

Je communiquai mes craintes à Masséna, qui était d’autant moins tranquille qu’il est du comté de Nice, quoique ayant toujours servi en France. […] Le brave La Noue, cet excellent homme de guerre du xvie  siècle, a soutenu dans ses Paradoxes militaires « qu’il est profitable à un chef de guerre d’avoir reçu une route », c’est-à-dire d’avoir, une fois dans sa vie, essuyé une déroute ou du moins un échec qui lui est une leçon ; Joubert essuya une première défaite à Corona, et cela dut lui servir : il paraît bien, d’ailleurs, qu’il avait reconnu tout d’abord, et mieux que Masséna son chef, l’importance de ce poste de Corona, qui est la clef, le point stratégique des opérations dans cette contrée du Montebaldo : Pour ce qui me regarde, dit-il, je n’osais, après ma défaite de Corona, me présenter à Bonaparte ; mais tous les volontaires avaient parlé de ma défense.

1254. (1874) Premiers lundis. Tome II « Hippolyte Fortoul. Grandeur de la vie privée. »

Lorsque l’auteur de Simiane nous montre Juliette s’enivrant des douces paroles amoureuses dont la musique se môle à l’oscillation du bateau, quand il nous murmure un peu longuement quelques-unes de ces tendresses infinies : « A quoi servirait au ciel d’être la plus étincelante merveille qui soit sortie  des mains du créateur, s’il ignorait lui-même sa beauté ? […] Le jeune Steven de Travendahl, fils d’un général de Charles XII, qui a péri à Pultawa, s’est retiré dans ce pays de Hartz avec sa mère, avec sa sœur ; devenu le chef respecté des intrépides mineurs, il n’a, d’ailleurs, qu’une pensée : servir sa mère, lui obéir, consoler sa triste sœur Mina, qu’une langueur secrète dévore.

1255. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIII. Des tragédies de Shakespeare » pp. 276-294

Le rang des femmes, dans les tragédies, était donc absolument livré à la volonté de l’auteur : aussi Shakespeare, en parlant d’elles, se sert, tantôt de la plus noble langue que puisse inspirer l’amour, tantôt du mauvais goût le plus populaire. […] Elle est en scène avec elle-même ; les amis lui servent de cortège, et les ennemis de témoins.

1256. (1861) Cours familier de littérature. XI « Atlas Dufour, publié par Armand Le Chevalier. » pp. 489-512

— Secondement, pour servir et pour honorer le nom ami de M.  […] Sans géographie l’histoire n’existe pas, la politique est aveugle, la guerre ne sait ni attaquer ni défendre, la paix ignore sur quels fleuves, sur quelles mers, sur quelles montagnes il faut construire ses forteresses ou asseoir ses limites ; la navigation ne peut se servir de ses boussoles, le commerce s’égare sur les océans, inhabile à découvrir quelles sont les productions ou les consommations qu’il doit emprunter ou porter aux climats divers dont il ne connaît ni la route, ni les richesses, ni les besoins, ni les langues, ni les mœurs, ni les philosophies, ni les religions.

1257. (1892) Boileau « Chapitre III. La critique de Boileau. La polémique des « Satires » » pp. 73-88

Nommer Despréaux Desvipéreaux, lui reprocher d’avoir fait servir des alouettes au mois de juin dans son Repas ridicule, glorifier Pelletier de recevoir chaque jour vingt-cinq personnes à sa table, traiter l’auteur des Satires de « bouffon » et de « faussaire », ou de « jeune dogue » qui aboie autour de lui, et lui dire agréablement qu’il ne fait rien « que les mouches ne fassent sur les glaces les plus nettes », le menacer du bâton ou faire entendre que les cotrets ont déjà pris le contact de ses épaules, trouver dans ses vers des insultes au parlement, à la cour, au clergé, au roi, et un athéisme digne du sort de Vanini, le reprendre tantôt d’user « de quolibets des carrefours, de déclamations du Pont-Neuf qui ne peuvent être souffertes que dans un impromptu de corps de garde », et tantôt de piller Horace, Juvénal ou Molière : voilà ce que la rancune venimeuse des victimes de Boileau invente pour le confondre. […] C’est ce que disait Chapelain, mais il le disait de la Pucelle : et c’est un argument qui ne vaut que par l’occasion où l’on s’en sert.

1258. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre II » pp. 12-29

Il était éclairé du côté du jardin par de grandes croisées qui s’ouvraient dans toute la hauteur de l’appartement ; construction alors extraordinaire, et qui, dît Sauvai, servit à la suite de modèle à beaucoup d’autres. […] Rien que mariée à l’un de ces fidèles d’Angennes qui servaient Henri IV et ne le jugeaient pas, il lui était difficile de ne pas s’intéresser au prince de Condé dont l’éducation avait été confiée au marquis de Pisani, son père, et qui était indignement persécuté par le roi, follement l’amoureux de la femme qu’il lui avait donnée avec l’intention de la lui ravir9.

1259. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre IV. Littérature dramatique » pp. 202-220

Les auteurs dramatiques ont même inventé une expression : Ce n’est pas du théâtre pour dire « voilà une pièce littéraire, originale, morale, qui ne fera pas d’argent », et une autre expression, « C’est du théâtre » pour dire « voilà une pièce banale, faite avec des ficelles qui ont déjà servi et dont on est sûr, évocatrice d’émotions mille fois soulevées, d’une morale sans élévation, d’une gaieté vulgaire, d’une langue prétentieuse ou peu sûre, mais cette pièce ira à la centième ». […] Nous avons eu les pièces à terreur, les pièces à surprises macabres, de la parade italienne de Ruzzante nous descendons au drame chirurgical, l’ancienne scène à effet du mélodrame servie, seule, avec beaucoup d’épices et sans sauce.

1260. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre IV. Suite du parallèle de la Bible et d’Homère. — Exemples. »

Et après s’être lavé le visage, il revint, et, se faisant violence, dit à ses serviteurs : Servez à manger116. » Voilà les larmes de Joseph en opposition à celles d’Ulysse ; voilà des beautés semblables, et cependant quelle différence de pathétique ! […] » Joseph embrassa aussi tous ses frères, et il pleura sur chacun d’eux118. » La voilà, cette histoire de Joseph, et ce n’est point dans l’ouvrage d’un sophiste qu’on la trouve (car rien de ce qui est fait avec le cœur et les larmes n’appartient à des sophistes) ; on la trouve, cette histoire, dans le livre qui sert de base à une religion dédaignée des esprits forts, et qui serait bien en droit de leur rendre mépris pour mépris.

1261. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 4, de l’art ou de la musique poëtique, de la mélopée. Qu’il y avoit une mélopée qui n’étoit pas un chant musical, quoiqu’elle s’écrivît en notes » pp. 54-83

Suivant Bryennius la déclamation se composoit avec les accens, et par conséquent on devoit se servir pour l’écrire en notes, des caracteres mêmes qui servoient à marquer ces accens. […] On s’est même servi des caracteres inventez par les anciens, pour écrire les chants musicaux jusques dans le onziéme siecle, que Gui D’Arezzo trouva l’invention de les écrire, comme on le fait aujourd’hui, avec des notes placées sur differentes lignes, de maniere que la position de la note en marque l’intonation.

1262. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IV. Des changements survenus dans notre manière d’apprécier et de juger notre littérature nationale » pp. 86-105

Pour me servir d’une métaphore déjà employée plus haut, c’est une dynastie qui a fini de régner. […] À quoi serviraient, en effet, de timides ménagements ?

1263. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’empire russe depuis le congrès de vienne »

… Ce n’était pas là un livre d’histoire, mais c’était un livre qui devait servir à l’Histoire, et quelle histoire, du reste, avant ou depuis cette époque, nous renseigna plus que ces magnifiques tablettes d’un observateur ? […] On peut donc affirmer, sans même toucher à l’amour-propre de ces messieurs, que la Russie, « le fruit pourri avant d’être mûr » de Diderot, — éclair de bon sens qui avait passé dans son génie à travers les fumées grisantes du moka de Catherine II, — n’a pas encore un grand artiste, un grand poète, un grand penseur, un homme, enfin, qui se soit une seule fois servi en maître d’une langue que de Maistre (qui s’y connaissait) comparait à celle d’Homère, et qui pourrait devenir un des plus merveilleux instruments dont l’imagination des hommes put jouer.

1264. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’Empire Chinois »

Il devient même une théorie. « Les Chinois — dit Huc — ont une « expression dont ils se servent à tout propos… Au « milieu des difficultés et des embarras, ils se disent « toujours : Siaosin, c’est-à-dire : Rapetisse ton cœur. » Et ils l’ont si bien rapetissé qu’il n’y en a plus. […] L’homme qui l’a provoquée et qui la dirige n’est rien de plus qu’un grand voleur à la mode orientale, lequel se sert du drapeau de toutes les idées et de tous les intérêts qu’il trouve sous sa main, comme les corsaires déploient tous les pavillons pour tromper l’ennemi qu’ils veulent aborder.

1265. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VIII. Du mysticisme et de Saint-Martin »

Saisset et Jules Simon, n’est-ce pas là un otage au Rationalisme qu’ils représentent et qu’ils servent, au Rationalisme qui est la mauvaise fortune de ce temps ? […] En les lisant, on est surtout frappé de cette idée que le dix-huitième siècle, dans sa haine contre le catholicisme, n’a pas seulement trouvé, pour la servir, des raisonneurs et des impies, comme l’affreuse société qui soupait contre Dieu chez d’Holbach, mais aussi des âmes d’élite, des cœurs tendres, aux intentions pures, de nobles esprits qui croyaient au ciel.

1266. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « IX. L’abbé Mitraud »

Révolutionnaire, quoiqu’il dise pour s’en défendre, l’auteur de la Nature des Sociétés humaines a écrit « que les révolutions sont les suprêmes efforts du genre humain pour découvrir les vraies conditions de sa vie, pour les définir exactement et s’y soumettre » ; ce qui revient positivement à dire que toutes les ivrogneries de la colère doivent servir à clarifier la vue ; singulier collyre, il faut en convenir ! […] Il est évident, en effet, qu’au-dessous de toute cette battologie philosophique, l’auteur de la Nature des sociétés humaines ne sait pas ce qu’on doit entendre par ce mot de société dont il se sert, et qu’il en confond la notion métaphysique avec la notion historique des différents peuples qui se sont agités sur la terre et se sont efforcés de réaliser cet idéal de société qui, pour l’incrédule, n’est qu’une ironie et pour le chrétien qu’une aspiration ?

1267. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Théodore de Banville »

Mais l’Hérodiade moderne, plus stupide et plus sordide que la courtisane de Judée, n’a pas pris plus garde à la tête qu’on lui servait qu’au travail merveilleux du plat sur lequel elle était servie.

1268. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre X. Des Romains ; de leurs éloges, du temps de la république ; de Cicéron. »

Un homme à qui il avait servi de protecteur et de père, vendit son sang ; un homme à qui il avait sauvé la vie, fut son assassin. […] Avec cette vigueur de caractère, il devait avoir une éloquence pleine de hauteur et de force ; aussi trouvait-il que Cicéron manquait de reins , pour me servir de son expression13.

1269. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre VII. »

Son exemple dut recommander d’autant plus l’art nouveau dont il s’était servi avant qu’Hérodote, cet Homère de la prose, vînt charmer les Hellènes par sa grâce ionienne et la peinture de leurs exploits. […] Les monuments de ce génie furent négligés et s’oublièrent, et sa renommée servit seulement de prétexte à des jeux frivoles de rhéteurs grecs.

1270. (1910) Rousseau contre Molière

L’horreur et le mépris qu’y nourrit cette même passion pour tous les vices qui l’ont irritée sert encore à les écarter du cœur qu’elle agite. […] Votre devoir est de les inventer merveilleux, pour qu’ils servent de modèles aux hommes réels. […] Ne laissez pas de songer du reste que vous avez désormais en moi un ami chaud et de qualité à vous pouvoir servir. […] Vous savez que je ne manque pas de cœur et que je sais me servir de mon épée quand il le faut. […] Quoi qu’en disent les philosophes, cet amour est inné dans l’homme et sert de principe à la conscience.

1271. (1930) Les livres du Temps. Troisième série pp. 1-288

Qu’on ne dise pas que la critique ne sert à rien ! […] Suzanne disparaît et ne servira plus à rien. […] À quoi cela servirait-il ? […] Barrès eut bien la passion de servir, et il a réellement servi son pays, surtout dans ses dernières années. […] Souvent, l’étude sur un même auteur est servie en plusieurs portions, à de longues distances.

1272. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LIX » pp. 227-230

Le grand événement de ces derniers jours a été le procès Donon-Cadot (ce fils qui avait fait assassiner son père et qui est absous) : voilà ce qui fait diversion au roman-feuilleton, et ce qui lui sert d’inspiration aussi.

1273. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hugues, Clovis (1851-1907) »

Il a voulu seulement sur ce fond constant, éternel, et qui pourra servir bien souvent encore, tracer quelques caractères intéressants et jeter quelques beaux discours d’une brillante facture et d’une langue riche… Je serais donc content des « beaux discours », n’était qu’il y en a de trop et qu’ils sont trop longs.

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