La typographie est le vestibule de la littérature ; elle suppose dans la classe très lettrée qui l’exerce une instruction assez universelle, car elle suppose la connaissance minutieuse de la langue, et la langue est la clef de tout savoir. […] Pourrait-on supposer un copiste de musique qui ne comprendrait pas les notes ? Pourrait-on supposer un graveur de tableaux qui ne saurait pas le dessin ?
Le plan & la conduite en sont admirables, & supposent un Poëte qui avoit autant de jugement que d’imagination. […] Supposé qu’il y eût des défauts, ce ne sont pas au moins des défauts qui viennent du fond vicieux ou de la mauvaise construction de la fable ; mais uniquement du tems qui a manqué à l’auteur pour finir son ouvrage. […] On peut donc supposer qu’il n’existoit, à l’usage des gens du monde, qu’une traduction des Métamorphoses, celle de l’Abbé Bannier : à Amsterdam 1732. […] M. de Moyvre a pris tout le fond de l’histoire de Properce dans l’histoire même : mais il a cru que Properce, Ovide & Virgile, vivant dans le même tems, il pouvoit supposer que ces trois fameux Poëtes se consultoient mutuellement, & qu’ils étoient très-unis.
» En le citant, on a quelquefois supposé que c’est à Boyer, ancien évêque de Mirepoix, et qui tenait la feuille des bénéfices, que Bernis l’avait plus tard adressé ; c’est une erreur, et qui ôte au mot de son piquant et de sa vengeance. […] On a supposé que Bernis connaissait cette épître, et que ç’avait été le motif qui lui avait fait conseiller à Versailles d’abandonner le roi de Prusse et de s’allier avec l’impératrice.
Il l’aurait voulu avoir sur le Génie du christianisme le lendemain de la publication ; plus tard, sur les grandes œuvres poétiques qui ont fait schisme (je suppose toujours un Richelieu permanent et immortel) ; il aurait exigé, en un mot, que les doctes parlassent, n’attendissent pas l’arrêt du temps, mais le prévinssent, le réglassent en quelque sorte, et qu’ils donnassent leurs motifs ; qu’ils fendissent le flot de l’opinion et ne le suivissent pas. […] Mais je m’aperçois que cette vue suppose et demande toujours une suite ou au moins une fréquence de Richelieux historiquement impossibles.
Oscar de Vallée sur Antoine Le Maître, et il supposera qu’on a dit à ce pieux solitaire des injures quand on ne lui a rendu que des hommages. […] Je le suppose entrant dans un salon ; un livre nouveau vient de paraître, personne ne l’a lu encore ; on l’interroge : Qu’en pense-t-il ?
On la rencontre à Versailles, en 1750, y allant faire une révérence à l’occasion de la mort de M. de Rouverel son beau-père, ce qui doit faire supposer qu’à cette date elle n’était point encore séparée de son mari et qu’il n’y avait pas eu éclat ; le moment toutefois approchait. […] Si vous avez été assez heureuse pour mettre votre projet à exécution, vous êtes presque dans le même état que moi ; vous êtes présentement à errer sur les bords de la même belle rivière, peut-être avec les mêmes livres à la main, un Racine, je suppose, ou un Virgile, et vous méprisez tout autre plaisir et amusement.
L’amour des Lettres, aux âges de belle culture, suppose loisir, curiosité et désintéressement ; il suppose aussi une latitude de goût et même de caprice, une liberté d’aller en tous sens.
On tira parti à Turin de leur division ; on était aux dernières limites de l’atermoiement en face de Louis XIV ; on supposa, pour couper court, que l’émigration était chose décidée, et un édit fut rendu en conséquence le 9 avril. […] La retraite des vaincus se fit avec assez de fermeté ; Catinat suppose qu’elle était conduite par le prince Eugène, et il lui en fait honneur.
La question de gout ce qui reste en dehors de la science25 Supposons scientifiquement faite l’étude des œuvres littéraires qui remplissent une période. […] Supposons après cela qu’une œuvre appartenant à un ordre supérieur soit supérieure elle-même dans cet ordre et qu’elle ait de plus à un degré élevé ou du moins suffisant les qualités d’ordre inférieur qui lui sont nécessaires ; nous pouvons dire qu’elle aura une valeur plus haute que les œuvres les plus parfaites dont la beauté serait purement sensorielle, sentimentale ou intellectuelle.
L’auteur, selon la mode du moment qui encourageait ces sortes de pastiches, suppose qu’un cadet de Gascogne, venu à Paris au début du règne de Louis XIII, et pendant la faveur du maréchal d’Ancre, raconte ses premières aventures. […] En un endroit du récit, on trouve un chapitre intitulé « Les Poètes » : c’est un dîner supposé entre gens de lettres et beaux esprits du temps de Louis XIII ; le fameux poète Théophile y préside.
Et parlant du grand ouvrage que Montesquieu préparait depuis vingt ans, M. d’Argenson ajoutait : J’en connais déjà quelques morceaux qui, soutenus par la réputation de l’auteur, ne peuvent que l’augmenter ; mais je crains bien que l’ensemble n’y manque, et qu’il n’y ait plus de chapitres agréables à lire, plus d’idées ingénieuses et séduisantes, que de véritables et utiles instructions sur la façon dont on devrait rédiger les lois et les entendre… Je lui connais tout l’esprit possible ; il a acquis les connaissances les plus vastes, tant dans ses voyages que dans ses retraites à la campagne ; mais je prédis encore une fois qu’il ne nous donnera pas le livre qui nous manque, quoique l’on doive trouver dans celui qu’il prépare beaucoup d’idées profondes, de pensées neuves, d’images frappantes, de saillies d’esprit et de génie, et une multitude de faits curieux, dont l’application suppose encore plus de goût que d’étude. […] Le public voit les choses plus dans leur ensemble, et quand il y a un souffle supérieur et une haute empreinte dans une œuvre, il suppose à l’auteur de la raison sur tous les points, et il se prête à l’impulsion qu’il en reçoit.
Je pourrais, en citant, donner de jolis mots qui s’y rencontrent ; mais c’est le sens même et la suite qui fait le prix de ce délicieux morceau ; voici quelques traits pourtant : Son esprit, dit-il de Montaigne, a cette assurance et cette franchise aimable que l’on ne trouve que dans ces enfants bien nés, dont la contrainte du monde et de l’éducation ne gêna point encore les mouvements faciles et naturels… Les vérités (dans son livre) sont enveloppées de tant de rêveries, si j’ose le dire, de tant d’enfantillages, qu’on n’est jamais tenté de lui supposer une intention sérieuse… Sa philosophie est un labyrinthe charmant où tout le monde aime à s’égarer, mais dont un penseur seul tient le fil… En conservant la candeur et l’ingénuité du premier âge, Montaigne en a conservé les droits et la liberté. […] Rousseau prétend toujours ramener l’homme à je ne sais quel âge d’or primitif auquel il regrette que l’espèce ne se soit point arrêtée : Supposons avec M.
Il y a des anachronismes frappants : il introduit jusque sous Louis XIV ce règne de l’opinion qui était en France une des puissances nouvelles du xviiie siècle, et il a l’air de supposer que Louis XIV n’a fait son choix que parce que « ce petit nombre d’hommes qui regardent et qui jugent, et dont l’opinion fait le mouvement public, avaient les yeux fixés sur Colbert ». Mêlant ses idées religieuses si honorables à ses combinaisons de finance, il suppose que Colbert devait à son génie politique d’être plus religieux qu’un autre : « Un grand administrateur s’attache plus fortement qu’un autre à l’idée d’un Dieu. » Dieu, quelque part, est appelé, par un singulier rapprochement de termes, « l’Administrateur éternel ».
Cette modestie chez Frédéric est sincère ; on sent qu’il rougit, en effet, d’être si loué, si admiré par son ami ; il se rabat toujours, en lui parlant, à n’être qu’un individu marqué au coin de la plus commune humanité, digne de lui pourtant par le cœur, et capable d’apprécier un ami « qui fait revivre les temps sacrés d’Oreste et de Pylade, du bon Pirithoüs, du tendre Nisus… » À la manière et à l’accent dont tout cela est dit, on ne peut supposer que ce soient des lieux communs. […] On ne peut supposer que Frédéric, en parlant ainsi, dissimule, ni qu’il veuille donner le change à son ami, et il en faut conclure qu’à cette date M. de Suhm lisait plus nettement en lui que lui-même.
Le blâme peut être bon, mais la raison sur laquelle on l’appuie est fort mauvaise, à moins qu’on ne suppose une doctrine perverse dans ses citations. […] Un ouvrage si bien digéré, & dont toutes les parties tiennent par un fil presque imperceptible, suppose la méditation la plus profonde, la parfaite connoissance des vraies beautés de l’Eloquence, & l’attention la plus sérieuse aux principes & aux conséquences qui en résultent.
Je crois avoir déjà remarqué dans quelques-uns de mes papiers, où je m’étais proposé de montrer qu’une nation ne pouvait avoir qu’un beau siècle, et que dans ce beau siècle un grand homme n’avait qu’un moment pour naître, que toute belle composition, tout véritable talent en peinture, en sculpture, en architecture, en éloquence, en poésie, supposait un certain tempérament de raison et d’enthousiasme, de jugement et de verve, tempérament rare et momentané, équilibre sans lequel les compositions sont extravagantes ou froides. […] Je gage que son effet vous fatiguera ; qu’il n’y a point de plans, mais point ; rien de décidé ; qu’on ne sait toujours où posent les figures du parvis ; que cette grosse suivante à énorme derrière rouge, au lieu d’être large, continue d’être monstrueuse et mal assise ; qu’il n’y a point de repos, que vous y ressentez partout la furia francese ; qu’à juger de la figure qui tient le petit enfant, par le plan qu’on lui suppose, elle est d’une grandeur colossale, etc., etc.
Quelquefois, il est vrai, on l’y suppose, comme fit Saint-Chéron dans sa traduction du livre très politique et très peu catholique de Ranke, qui clama, mais assez vainement, car ceux qui lisent la supposition ne liront peut-être pas la réclamation, et, par un côté du moins, le coup est porté à cette opinion publique qui voit juste, mais à la longue, et qu’il faut d’autant plus se hâter de tromper qu’il est bien sûr qu’un jour ou l’autre elle reviendra de son erreur. […] cela ferait-il que toute transaction ne suppose pas la reconnaissance d’une nécessité supérieure aux principes jusque-là maintenus, et qu’enfin, d’une façon comme d’une autre, on ne revint pas toujours à la question politique, brisant la question religieuse et s’établissant sur ses débris ?
Ne suppose pas que je fais des efforts d’intelligence pour voir les choses et les hommes à leur place dans le tout ; aucun vraiment. […] On peut hardiment supposer que ce petit recueil de lettres exprime une manière de penser qui fut à peu près unique dans les ravins de la Fille Morte.
La France entière regretta Cinq-Mars ; sa jeunesse, sa bonne mine, son ambition si naturelle à cet âge et dans cette position, l’amour caché qu’on lui supposait pour une grande princesse (Marie de Gonzague), et qui conviait son cœur à de vastes desseins, tout répandait sur lui un charme que relevait encore l’atrocité du vieux prêtre moribond.
S’il s’agissait de bien entendre et de goûter l’ancien français de Villehardouin, dont je suppose qu’on eût été séparé par quelque grande catastrophe sociale et quelque conquête, le plus sûr serait encore d’être Français, et, un peu d’étude aidant, on se trouverait aisément en avance à cet effet sur le plus docte des Germains. » Il semble que le résultat indiqué par ces considérations diverses, c’est qu’une École française , instituée à Athènes pour un certain nombre de jeunes architectes et de jeunes philologues , concilierait à la fois les intérêts de l’art et ceux de l’érudition.
d, que ne pourrait le faire supposer le petit nombre d’articles, que l’on a réunis à cette date.
La gaieté qui sert à faire une bonne comédie, suppose une observation très fine des caractères.
Quand les parents aiment assez profondément leurs enfants pour vivre en eux, pour faire de leur avenir leur unique espérance, pour regarder leur propre vie comme finie, et prendre pour les intérêts de leurs enfants des affections personnelles, ce que je vais dire n’existe point ; mais lorsque les parents restent dans eux-mêmes, les enfants sont à leurs yeux des successeurs, presque des rivaux, des sujets devenus indépendants, des amis, dont on ne compte que ce qu’ils ne font pas, des obligés à qui on néglige de plaire, en se fiant sur leur reconnaissance, des associés d’eux à soi, plutôt que de soi à eux ; c’est une sorte d’union dans laquelle les parents, donnant une latitude infinie à l’idée de leurs droits, veulent que vous leur teniez compte de ce vague de puissance, dont ils n’usent pas après se l’être supposé ; enfin, la plupart ont le tort habituel de se fonder toujours sur le seul obstacle qui puisse exister à l’excès de tendresse qu’on aurait pour eux, leur autorité ; et de ne pas sentir, au contraire, que dans cette relation, comme dans toutes celles où il existe d’un côté une supériorité quelconque, c’est pour celui à qui l’avantage appartient, que la dépendance du sentiment est la plus nécessaire et la plus aimable.
Comme elle naît toujours de la profondeur de la réflexion, et qu’elle est souvent inspirée par le besoin de résister à ses passions, elle suppose des qualités supérieures, et donne une jouissance de ses propres facultés tout à fait inconnue à l’homme insensible ; le monde lui convient mieux qu’au philosophe ; il ne craint pas que l’agitation de la société trouble la paix dont il goûte la douceur.
Elle a tout dit sur son propre compte, sauf ce qu’elle supposait banal et familier aux contemporains, sauf ce qui lui semblait technique, ennuyeux et mesquin, sauf ce qui concernait la province, la bourgeoisie, le paysan, l’ouvrier, l’administration et le ménage.
III Maintenant, supposons qu’au lieu de m’appesantir sur ce mot Tuileries et d’évoquer les diverses images qui lui sont attachées, je lise rapidement la phrase que voici : « Il y a beaucoup de jardins publics à Paris, des petits et des grands, les uns étroits comme un salon, les autres larges comme un bois, le Jardin des Plantes, le Luxembourg, le bois de Boulogne, les Tuileries, les Champs-Élysées, les squares, sans compter les nouveaux parcs qu’on arrange, tous fort propres et bien soignés. » Je le demande au lecteur ordinaire qui vient de lire cette énumération avec la vitesse ordinaire : quand ses yeux couraient sur le mot Tuileries, a-t-il aperçu intérieurement comme tout à l’heure quelque, fragment d’image, un pan de ciel bleu entre une colonnade d’arbres, un geste de statue, un vague lointain d’allée, un miroitement d’eau dans un bassin ?
Elle suppose beaucoup de science et de désenchantement et beaucoup de pudeur et d’orgueil.
Il est vrai que leurs horribles coiffures se défaisaient peut-être quelquefois, et l’on peut supposer qu’elles ne dormaient pas toujours avec leurs robes.
Et aujourd’hui même… je suppose que vous avez tous assisté à une séance de la Chambre ?
Mais il serait absurde de supposer qu’il est incompréhensible ; le jeu de citer tels vers, obscurs par leur isolement, n’est pas loyal, car, même fragmentée, la poésie de M.
On le supposa parent de Jésus 574.
Et pourtant il faut qu’il dispose De s’en aller en aultre terre ; Car la court, ainsi que suppose, Entreprent de lui mener guerre.
Point d’entassement, point de figures, point de pathos, point d’émotion empruntée, disoit-il ; ou, si l’on y a recours, c’est se rendre indigne de sa profession, c’est gâter sa propre cause & supposer les juges malhonnêtes gens.
Enfin, à son départ, on lui fait de riches présents, si mince qu’ait paru d’abord son équipage ; car on suppose que c’est un dieu qui vient, ainsi déguisé, surprendre le cœur des rois, ou un homme tombé dans l’infortune, et par conséquent le favori de Jupiter.
La faute, réelle ou supposée, se répand avec éclat : le reproche circule de bouche en bouche avec une feinte pitié ; la ville en retentit de toutes parts.
Ce bras droit qu’il tient étendu en l’air est vraiment hors de la toile ; l’autre bras ainsi que la main sont bleuâtres, ce qui suppose, contre la vérité, de la durée dans une position contrainte.
On va voir en foule un spectacle des plus affreux que les hommes puissent regarder, je veux dire le supplice d’un autre homme qui subit la rigueur des loix sur un échaffaut, et qu’on conduit à la mort par des tourmens effroïables : on devroit prévoir néanmoins, supposé qu’on ne le sçut pas déja par son experience, que les circonstances du supplice, que les gemissemens de son semblable feront sur lui, malgré lui-même, une impression durable qui le tourmentera long-tems avant que d’être pleinement effacée ; mais l’attrait de l’émotion est plus fort pour bien des gens que les reflexions et que les conseils de l’experience.
Or, tel je supposais M.
On peut supposer aussi qu’Alphonse lui-même ne s’opposa pas sérieusement à une évasion qui le délivrait de l’apparence, toujours odieuse, d’être le geôlier du génie. […] Il faudrait supposer Alphonse plus insensé que sa victime ! […] C’est peu connaître l’Italie et les mœurs de ses cours voluptueuses, que de supposer qu’un amour chevaleresque entre un gentilhomme de haute naissance, devenu le plus grand homme d’Italie, et une princesse libre de sa main et de son cœur, chérie de son frère, honorée de toute la cour, eût été un crime si monstrueux et si irrémissible aux yeux d’Alphonse.
Le plus grand nombre est allemand, mais il y a quantité de spectateurs venus de toutes les parties du monde, des Russes d’abord, et aussi beaucoup d’Américains, force Anglais et quelques Français, plus que notre renommée d’ennemis des voyages ne le ferait supposer. — Mais c’est encore là une vieille observation que tous répètent sans la vérifier, et, défait, les Français sont devenus, depuis la guerre, un des peuples les plus cosmopolites qui soient. — Les costumes les plus variés se rencontrent dans cette vaste salle de restaurant où les délices de la bière et du tabac alternent avec ceux de la musique. […] Un dialogue supposé entre un Wagnérophobe spirituel et un Wagnériste niais. […] Au lieu de peindre avec une précision impossible à obtenir des sons, les motifs intérieurs qu’il supposait agir dans l’âme de ses héros, il a tout simplement rendu leurs mouvements extérieurs et l’amoureux transport qui les saisit.
cela suppose l’audace du joueur, l’énergie de la lutte, le vaste coup d’œil de la spéculation transcendante ; cela se gagne dans l’océan des affaires, avec le harpon du baleinier financier qui pousse droit aux monstres d’or massif de la fortune ; et, à voir le vieux Poirier, vous diriez qu’il les a péchés à la ligne, dans quelque industrie stagnante et routinière, avec des morceaux de fromage et des sardines à un liard la pièce pour asticots. […] Et même je suppose qu’à ces antipodes de son ancien monde, elle eût rencontré, non pas l’honnête et larmoyant comédien que vous faites asseoir à sa table, mais quelque cabotin roué, dépravé, nomade, qui aurait roulé par hasard sa bosse postiche jusque sur les tréteaux de l’Armorique… Eh bien, j’aurais admis qu’en haine de son servage féodal et de ces mœurs antédiluviennes, et des vieux portraits à perruque, et des vertus en vertu-gadin, elle se fût amourachée de cet histrion. […] Le sacrifice que l’on fait à une courtisane, en s’excommuniant du monde avec elle, doit supposer une passion profonde, fatale, infinie.
Mais supposez qu’Egisthe ait un fils : ce fils n’aura-t-il pas le droit et même le devoir de venger son père ? […] Sarcey ne devrait pas échapper tout à fait aux gens d’intelligence moyenne, dont je suppose que je suis. […] … si vous supposiez que Brétigny a un petit frère qui suit les cours de Condorcet, et à qui Rousseau donne des leçons… — Toto, alors ? […] Là, plus que partout ailleurs, il faut que l’écrivain devine, suppose, choisisse et combine. […] Ainsi, la passion étant supposée égale des deux parts, l’amant trahi souffrira plus que le mari trompé.
Lavedan n’a pas voulu nous la donner), il a donc commencé, je suppose, par être l’homme d’affaires d’une femme galante. […] A supposer que le prédicateur leur enseigne l’Evangile et la doctrine chrétienne bravement et ingénument, elles ont des oreilles pour ne pas entendre. […] Ceci, je suppose. — Rose Morgan devait absolument être condamnée, ne fût-ce qu’à un minimun de peine, douze ou quinze ans de réclusion. […] Comment n’a-t-il pas vu le mal que leur ferait, et de toutes façons, la folie supposée de leur mère ? […] Ne pouvait-on supposer, par exemple, qu’Anna de Grécourt a cherché à ravoir ses filles et qu’elle y a renoncé plutôt que de se soumettre aux conditions humiliantes que lui faisait son mari ?
Si le monde est une manifestation de beauté, il suppose un artiste, au-dessus de lui, au-dessous de lui, en lui, mais encore quelque part ; ou il suppose le monde lui-même artiste, artiste de lui-même. […] Pourquoi un être naturel, sans doute, qui fait partie de la nature, aurait-il pour devoir, pour règle de vie, de vivre contrairement à la nature et, à supposer qu’il le puisse, en dehors d’elle ? […] Prêtre ou savant, je suppose, Vincent de Paul ou Pasteur, allons-nous imaginer que ces gens-là ne sont pas heureux ? […] Supposez un homme qui, pour se rendre agréable, ait pris un masque qui lui a communiqué un cancer. […] Vous appelez bonnes et belles et admirables « les vertus d’un homme, non en raison des effets qu’elles ont pour lui-même, mais en regard des effets que vous leur supposez pour vous et pour la société ».
Mais cette imagination du dialogue en suppose une seconde. […] Ç’a été là un passage beaucoup plus facile et plus naturel que la première impression ne le ferait supposer. […] Ce sont des analyses techniques et consciencieuses qui supposent un regard d’ouvrier. […] D’excellents esprits, et très épris de littérature, ne peuvent en supposer l’énervante impression. […] Qui dit exactitude absolue dit absence de style, et qui parle de style suppose une part nécessaire d’inexactitude.
Et ne pourois-je pas dire que j’ai pû sans excès supposer au fondateur de Rome autant de force et de courage qu’en fit paroître dans la suite un simple citoyen. […] La nouveauté supposée, qui seroit toûjours d’un grand mérite, quand les passions ne seroient pas si vives, il faut encore faire attention à l’importance des intérêts. […] Il se trouve parmi les sabines la fille d’un roi que j’ai droit de supposer la plus belle princesse du monde, et la plus propre à s’attirer du respect. […] Ce qui fait qu’on n’est pas blessé d’un monologue au théatre, c’est que quoique le personnage qui parle soit supposé seul, il y a cependant une assemblée qui nous frappe. […] Il reste pourtant à étudier l’art de les amener, ce qui suppose bien des réflexions que l’excès même de la sensibilité empêche souvent de faire : il faut du sens froid pour refléchir.
Un dilemme suppose deux hypothèses. […] On est tenté de le supposer quand on apprend que la confédération que formait l’Étrurie au sixième siècle avant l’ère chrétienne, n’a pu durer faute d’unité. […] Que suppose-t-il, le geste de cet opérateur dont je parlais tout à l’heure ? […] Cette conclusion intellectuelle que Balzac exigeait de l’ouvrier de la plume suppose un parti pris de la volonté, et pour qu’elle soit valable, il faut qu’elle soit fondée, comme vos décisions à vous, sur des observations vraies. […] Car ce journal suppose une attitude de réflexion égotiste qui supprime du coup tout contrôle des faits.
Bernis arrivé à Rome en mars 1769, et entré au conclave qui était ouvert depuis un mois, n’y eut point d’abord l’influence capitale qu’on suppose, et dont on l’a plus d’une fois félicité. […] Il connaissait à peine ce pape ; il se méfiait même de lui dans les premiers temps ; il lui supposait des engagements formels et mystérieux contractés avec l’Espagne sur la fin du conclave, au sujet de l’abolition des Jésuites.
Duclos a fait quelques ouvrages qui prouvent ou supposent de l’érudition : comme membre de l’Académie des inscriptions et belles-Lettres, il y lut plusieurs mémoires sur des points d’Antiquité ou de Moyen Âge ; mais la première production importante, par laquelle il rompit avec les romans et se déclara un écrivain tout à fait sérieux et solide, fut son Histoire de Louis XI, publiée en 1745 avec la nouvelle année. […] Ne trouvant pas, apparemment, assez de vivacité à ce récit de Saint-Simon et à ce discours indirect, il le met en scène, en dialogue ; il suppose les paroles mêmes des deux personnages et leur prête à tous deux de sa familiarité.
Langeron (le colonel) ; j’étais même obligé de jouer au fin avec lui et avec mon père pour cultiver mes grands objets dans ce pays-là, comme si j’eusse eu de mauvais desseins : témoin l’affaire des recrues pour lesquelles je supposai une mission. […] [NdA] Ce serait à croire, si les dates permettaient de le supposer, qu’en répondant ainsi à son père, Saint-Martin faisait allusion à un événement très présent en Touraine, à la situation de M. de Choiseul exilé à son château de Chanteloup à la porte d’Amboise : mais il fit cette réponse plusieurs années auparavant, et pour se rendre si bien compte des temps divers d’une carrière ministérielle, il lui suffisait des disgrâces récentes et des exils de M. de Machault, de M. d’Argenson et du cardinal de Bernis.
Les adversaires s’emparèrent de ce mot échappé à sa plume, pour mettre l’abbé dans son tort ; on supposa malignement qu’en écrivant cela il songeait à Mme Dacier. […] Pour mieux raisonner, il se plaît à supposer (anticipant sur l’invention de la statue de Condillac) que les hommes sont nés sourds, créés sans l’organe de l’ouïe : « Comment auraient-ils fait ?
Il supposait qu’on l’avait mise au four pour la cuire et la dorer. […] Il ne s’y trouve de trace humaine que quelques pierres, reste de monuments antiques qu’on suppose des fortifications.
Supposez que, du premier ou du second étage, vous regardiez dans la cour deux personnes qui causent : vous voyez leurs gestes, leur jeu de physionomie, et vous n’entendez qu’imparfaitement leurs paroles ; elles ne vous arrivent qu’en bruit confus. […] Le siècle avait deux ans… En ceci on suppose que le XIXe siècle commence au premier janvier 1800.
Je crois que M. de Feuquières pourra bien jouer des siennes et faire valoir des sentiments fondés sur des raisons bonnes pour ceux qui ne voient pas les choses… » Je ne me fais pas juge entre Catinat et Feuquières, ce serait une grande impertinence ; je ne me fais point le défenseur de Feuquières, ce n’est point mon rôle, et il y aurait à ceci de l’impertinence encore et, qui plus est, de l’injustice ; mais enfin, pour voir le double côté de la question, pour l’envisager à sa juste hauteur et la dégager autant que possible des personnalités dont elle est restée masquée jusqu’à ce jour, qu’on veuille supposer un instant ceci : il y a dans l’armée de Catinat un militaire, incomplet dans la pratique, mais d’un génie élevé, qui a, dès 1690, l’instinct et le pressentiment des grandes opérations possibles sur cet admirable échiquier de la haute Italie ; ce militaire, à tout moment, conçoit ce qu’on pourrait faire et ce qu’on ne fait pas ; il blâme, il critique, il raille même, il hausse les épaules, il est ce qu’on appelle un coucheur, et ce qu’on appelait alors être incompatible : tel était Feuquières, qui à des vues supérieures joignait, il faut en convenir, une malignité particulière. […] Il vaut mieux hasarder que les ennemis fassent quelques petites courses dans mon pays ou dans la Savoie que d’abandonner les lieux les plus importants. » Le dernier cas prévu arriva, et au-delà de ce qu’on supposait.
Eugène Véron (par des articles récents de la Revue de l’Instruction publique)… ; j’y suis moi-même entré depuis bien des années, et en affichant si peu d’intention systématique que beaucoup de mes lecteurs ou de mes critiques ont supposé que j’allais purement au hasard et selon ma fantaisie. […] Deschanel, semble avoir tenu en effet à me réfuter presque aussitôt, et quelques mots de bienveillance, que j’ai surpris un matin sous sa plume, m’ont prouvé que, même dans ses sévérités habituelles de ton, il n’avait pas autant de parti pris que je l’avais supposé.
Au bout d’une quinzaine, il partit avec un passe-port sous un nom supposé ; il arriva sans accident à Boulogne100, où il s’embarqua pour l’Angleterre. […] Comment un homme qui a vécu si longtemps chez les Anglais, et à qui je dois supposer des relations très étendues dans ce pays, au lieu de reconnaître tous les bienfaits dont je l’ai comblé, de prendre leçon de tout ce qu’il a vu depuis trente ans, au lieu de marcher droit, se mêle-t-il de pratiques et de menées qui ne le regardent pas ?
» La campagne d’Iéna, comme celle d’Ulm, « devait servir de modèle un jour pour apprendre aux généraux l’art de réunir à propos leurs forces, et de les diviser ensuite quand elles ont frappé : je dis modèle, si tant est qu’il y en ait à pareil jeu ; car tout jeu savant suppose le joueur, tout art suppose essentiellement l’artiste ; et la variété, la nouveauté dans l’application, qui se différencie et recommence sans cesse à chaque cas imprévu, c’est l’habileté souveraine, c’est le génie35.
Elle ne devait pourtant pas être tout à fait sans se rendre compte et sans jouir déjà de son premier succès dans cette vie de Venise ; et lorsque son biographe nous l’y représente entourée, encensée du monde, mais sans s’en apercevoir , il la suppose un peu trop absorbée, je le crois, par son affection pour son mari. […] Eynard me suppose plus d’imagination que je n’en ai en réalité ; il se croit trop sûr de m’avoir réfuté à l’aide du Journal de Mme Armand.
Partout cette tendresse et cette ironie s’accompagnent, car elles ont les mêmes origines ; elles sont l’une et l’autre d’une telle sorte qu’elles ne supposent pas seulement une disposition naturelle de l’esprit et du cœur, mais une science étendue, l’habitude de la méditation, de longues rêveries sur l’homme et sur le monde et la connaissance des philosophies qui ont tenté d’expliquer ce double mystère. […] Un autre dirait, je suppose, en parlant du jardin où son enfance s’est écoulée : « C’est dans ce jardin que j’ai joué tout enfant. » M.
Ce mot suppose au contraire des pensées raffinées d’extrême civilisation, une haute culture littéraire, une âme capable d’intensives voluptés. […] On suppose bien qu’avec si peu de ressources, Baju devait rogner sur sa nourriture pour subvenir aux frais de son journal.
La France est trop portée à supposer qu’on peut suppléer à l’impul-sion intime de l’âme par des mécanismes et des procédés extérieurs. […] D’ailleurs, le pas n’est plus à faire : l’humanité s’est définitivement émancipée, elle s’est constituée personne libre, voulant se conduire elle-même, et supposé qu’on profite d’un instant de sommeil pour lui imposer de nouvelles chaînes, ce sera un jeu pour elle de les briser.
Supposez un homme instruit et noble de cœur exerçant un de ces métiers qui n’exigent que quelques heures de travail ; bien loin que la vie supérieure soit fermée pour cet homme, il se trouve dans une situation mille fois plus favorable au développement philosophique que les trois quarts de ceux qui occupent des positions dites libérales. […] Cela fait, accordez au corps ses jouissances ; car les lui refuser, ce serait supposer que ces misères ont quelque valeur.
Il s’est défié des sceaux de l’État, et il a pensé qu’il ne fallait mettre en mouvement l’autorité préfectorale que pour des vertus qui ne supposent pas un petit cercle d’initiés. […] On vous regarde comme des connaisseurs en fait de vertu, on suppose que vous en avez des réserves, si bien que, quand on en veut, c’est à vous qu’on s’adresse.
On peut employer deux méthodes de démonstration : partir des faits particuliers, en accumuler un grand nombre et voir à quelle vérité générale ils aboutissent ; ou bien supposer établie cette vérité, la prendre elle-même pour point de départ et voir si elle conduit, par voie de conséquences, à des faits prévus qui la confirment. […] Supposez au contraire une époque où la presse rencontre des barrières à son expansion.
Elle m’a répondu qu’elle connaissait mes artifices… Elle m’a reproché ses bienfaits, ses présents, ceux du roi… Je l’aime, et ne puis me persuader qu’elle me haïsse… » Pendant que madame de Montespan s’inquiétait des prétentions qu’elle supposait à madame de Maintenon, elle ne se doutait pas que le roi, déjà las de madame de Fontanges, faisait la cour à madame de Grammont ; ce qui est le sujet d’une lettre plaisante de madame de Sévigné à sa fille, en date du 24 novembre. […] Le roi se fit un titre de cette déclaration pour interdire toute observation à cette femme qu’on supposait toute-puissante.
Le temps n’est-il pas venu de dégager un peu toutes ces tendresses, toutes ces complaisances, de payer à l’homme, à l’honnête homme qui a, comme tous, plus ou moins, ses faibles et ses faiblesses, au poète qui, si parfait qu’on le suppose, a aussi ses défauts, de lui payer, dis-je, une large part, mais une part mesurée au même poids et dans la même balance dont nous nous servons pour d’autres ? […] Supposez une lecture touchante ou sublime faite à haute voix dans la loge du portier, un peu comme dans la scène d’Henri Monnier.
Après le dîner, et le café pris, l’abbé s’assied dans un fauteuil, ses jambes croisées en tailleur, c’était sa manière ; et, comme il faisait chaud, il prend sa perruque d’une main, et gesticulant de l’autre, il commence à peu près ainsi : « Je suppose, messieurs, celui d’entre vous qui est le plus convaincu que le monde est l’ouvrage du hasard, jouant aux trois dés, je ne dis pas dans un tripot, mais dans la meilleure maison de Paris, et son antagoniste amenant une fois, deux fois, trois fois, quatre fois, enfin constamment, rafle de six. […] Cette théorie, très vraie peut-être, se trouve en défaut par rapport à lui dès qu’il est en présence d’une perte vive et qui lui tient réellement au cœur ; il n’en est pas venu encore à l’insensibilité qu’il suppose : « Le temps, remarque-t-il, efface les petits sillons, mais les profondes gravures restent.
On n’y sent rien, en effet, de cette action vivifiante et féconde qui suppose un foyer véritable. […] Vous verrez cette enfant gâtée de soixante ans et plus, à qui l’expérience n’a rien appris, car l’expérience suppose une réflexion et un retour sur soi-même ; vous la verrez jusqu’à la fin appeler la foule et la presse autour d’elle ; et à ceux qui s’en étonnent elle répondra : « J’ai le malheur de ne pouvoir me passer des choses dont je n’ai que faire. » Il faut que chaque chambre de ce palais d’Armide soit remplie, n’importe comment et par qui ; on y craint, avant tout, le vide : Le désir d’être entourée augmente de jour en jour, écrivait Mme de Staal (de Launay) à Mme Du Deffand, et je prévois que, si vous tenez un appartement sans l’occuper, on aura grand regret à ce que vous ferez perdre, quoi que ce puisse être.
Il est à croire que, s’il avait été dans l’action, il y aurait apporté plus de modération qu’on ne suppose. […] Il ne lui reconnaît pas la marque royale dans le sens où il la conçoit ; il le trouve un homme rare, extraordinaire, épuisant volontiers à son sujet toutes les épithètes et ne lui refusant que celle de grand, « laquelle, dit-il, suppose une moralité qui lui manque ».
La Harpe suppose que quelqu’un lui demande si cette prédiction est véritable, si tout ce qu’il vient de raconter est bien vrai. […] Vous vous trompez. » Et, en effet, le miracle là-dedans, le prodige réel (selon La Harpe), ce n’est pas la prophétie de Cazotte qui est supposée, c’est cet amas de faits inouïs et monstrueux qui se sont accomplis à la lettre, et qui doivent faire rentrer en soi quiconque en a été témoin : Si vous en êtes encore (conclut La Harpe) à ne voir dans tout ce que nous avons vu que ce qu’on appelle une révolution, si vous croyez que celle-là est comme une autre, c’est que vous n’avez ni lu, ni réfléchi, ni senti.
Ainsi les rapports que l’autorité supposait exister entre la feuille janséniste et Rollin purent bien être exagérés, mais ils n’étaient pas absolument controuvés. […] Sans vouloir déprécier cette modestie et sans prétendre nier que, chez quelques natures délicates, un sentiment de réserve et de pudeur excessive ne fasse tort au mérite et aux facultés réelles dont ces natures sont pourvues, je dirai pourtant qu’une habitude de modestie et d’humilité, au degré où l’avait Rollin, suppose toujours aussi un sentiment d’une secrète faiblesse qui évite le développement où elle se trahirait.
Hennin, qui vient d’aider Bernardin de sa bourse, a le droit de lui donner ces bons conseils ; il lui parle le langage d’un esprit juste qui suppose à son correspondant le désir réel de fixer sa fortune et sa destinée. […] Il suppose que le gouvernement lui doit réparation et indemnité pour ses aventures de Pologne et pour ses diverses entreprises avortées, même pour les mémoires qu’il a adressés à plusieurs ministères sans qu’on les lui demandât.
Volney, ami de Jefferson et de l’école de Franklin, se trouva avoir contre lui John Adams, élu président en 1797 ; on le rendit suspect comme Français, comme agent supposé du Directoire ; et, dans le même temps, un savant chimiste qui se mêlait ardemment de théologie, le Priestley, le dénonçait, pour le livre des Ruines, comme coupable d’incrédulité. […] Ce que je viens de dire doit faire supposer que l’impression de ses œuvres est soignée, que le choix du papier et des caractères n’a point été l’affaire d’un instant.
On suppose que dans la formation des langues l’ordre d’apparition des mots a été inverse de l’ordre de disparition constaté dans certaines maladies, les mots précis ayant été trouvés ou fixés les derniers, quand les esprits ont été capables d’idées nettes bien délimitées, tandis que les mots abstraits, appris d’abord, tels grands mots de la religion, de la philosophie, de la politique, restent dans les lobes, et témoignent jusqu’à la dernière heure de la puérilité d’une intelligence. […] Cela est impossible, du moment qu’on suppose que l’écrivain est sincère et qu’il est doué, comme cela fut d’abord convenu, des deux mémoires, visuelle et verbale.
Toute réussite pratique et toute œuvre admirée, toute gloire de tout ordre, littéraire, artistique, militaire, religieuse, politique, industrielle, comprend donc les mêmes éléments, le même accord entre esprits supérieurs et inférieurs : l’œuvre, l’entreprise, est d’abord une conception, résultant, de plus en plus profondément, de l’intelligence acquise et originelle de son auteur, de la constitution de son cerveau, de tout son corps, des influences obscures encore qui l’ont formé tel : elle est ensuite cette conception détachée pour ainsi dire de son auteur et y tenant, comme un germe issu d’un être, passée de ce cerveau à d’autres, où elle se répercute, se reproduit, renaît, redevient efficace et cause des actes ou des émotions analogues à ceux qui existent dans l’âme primitive : cette reproduction, son degré marquent la similitude entre l’âme réceptrice et l’âme émettrice, en vertu du fait que les phénomènes psychiques d’un individu forment une série cohérente, en vertu encore du fait qu’une conception suppose la coopération de toute une série de rouages mentaux et qu’ainsi le fait de partager pleinement une conception montre ta similitude de ces rouages. […] Dans l’esthopsychologie des littérateurs, dans la psychologie biographique des héros, ces hommes sont mis debout analysés et révélés par le dedans, décrits et montrés par le dehors, reproduits à la tête du mouvement social dont ils sont les chefs, érigés, eux et leurs exemplaires, un et plusieurs, individus et foules, en des tableaux qui, basés sur une analyse scientifique nécessitant le recours à tout l’édifice des sciences vitales, et sur une synthèse qui suppose l’aide de toute la méthode historique et littéraire moderne, peuvent passer pour la condensation la plus haute et la plus stricte de notions anthropologiques que l’on puisse accomplir aujourd’hui.
Un tel droit suppose au contraire implicitement que ma pensée bien conduite est capable d’atteindre à la vérité, et qu’il n’y a qu’à la laisser faire pour qu’elle la rencontre naturellement. […] Tout droit suppose un devoir, le devoir d’écarter toutes les causes d’erreur et d’illusion qui nous captivent et nous égarent, les passions, l’imagination, les affections mêmes, de dégager en un mot de tous les nuages qui la couvrent la pure lumière de l’évidence.
J’observai qu’à la plaine des sablons, un jour de revue, que la curiosité badaude y rassemble cinquante mille hommes, le nombre des masses y seroient infinis en comparaison des grouppes ; qu’il en seroit de même à l’église, le jour de pâques ; à la promenade, une belle soirée d’été ; au spectacle, un jour de première représentation ; dans les rues, un jour de réjouissance publique ; même au bal de l’opéra, un jour de lundi gras ; et que pour faire naître des grouppes dans ces nombreuses assemblées ; il fallait supposer quelque événement subit qui les menaçât. […] Supposez, mon ami, devant ce tableau un artiste, et un homme de goût.
Un des moyens les plus sûrs pour juger si le style a cette simplicité si précieuse et si rare, c’est de se mettre à la place de l’auteur, de supposer qu’on ait eu la même idée à rendre que lui, et de voir si, sans effort et sans apprêt, on l’aurait rendue de même : Ô malheureux Phocas ! […] Mais, dans une langue morte, le mérite de ces deux qualités disparaît en grande partie : on le suppose plutôt qu’on ne le sent3.
Ainsi les onomatopées sont déjà une décadence des langues, car les sons ne peuvent jamais être assez imitatifs pour ne pas supposer nue convention. […] Tant que dura la liberté chez les Grecs, ces peuples menaient une vie publique, qui supposait peu le loisir de la lecture.
Prenez un chef-d’œuvre de chacun de ces deux genres : Matteo Falcone, je suppose, et la Cousine Bette. […] Le romancier, lui, ne peut que les supposer. […] De même l’Éducation sentimentale, de Gustave Flaubert, suppose la révolution de 48 et le second Empire à ses débuts. […] Elles supposent l’histoire, et cette science ne s’est, elle aussi, constituée que de nos jours. […] Aussi l’enfant, sur les bancs du collège, rêve-t-il d’un métier qui suppose la paix.
« Il paraîtrait, remarque sir Walter Scott, que les allusions classiques sont familières aux soldats français, ou bien que, sans être plus savants que d’autres, ils sont flattés qu’on les suppose capables de les comprendre.
La comparaison jusqu’ici est fort belle, mais elle n’est juste encore que si l’on suppose la critique, dans toute sa profondeur et sa continuité, s’appliquant aux grands monuments des âges anciens.
Gerfaut, homme célèbre d’aujourd’hui, a tué à la chasse le baron de Bergenheim ce matin ; madame de Bergenheim s’est jetée à rivière ; on a supposé qu’en épouse passionnée elle n’avait pu survivre à son mari, que Gerfaut lui-même était au désespoir de son coup de fusil maladroit : les journaux ont inséré l’article nécrologique en ce sens.
Du moins en parlant de bonheur, il est impossible de supposer une situation qui exige des efforts perpétuels ; et la bonté donne des jouissances si faciles et si simples que leur impression est indépendante du pouvoir même de la réflexion.
On peut supposer que les Gelosi n’étaient pas sans exploiter plaisamment cette situation.
Je veux bien que dans l’examen des faits on ne suppose rien d’avance ; mais la condition doit être égale de part et d’autre.
La perspective rapproche les parties des corps ou les fait fuir, par la seule dégradation de leurs grandeurs, par la seule projection de leurs parties vues à travers un plan interposé entre l’œil et l’objet, et attachées ou sur ce plan même, ou sur un plan supposé au-delà de l’objet.
Je ne connais guère sur la connaissance de l’homme qu’elle suppose que le petit traité d’Hobbes intitulé : De la Nature humaine, que j’ai déjà recommandé.
Plusieurs passages d’Horace supposent les ruës de Rome pleines de neiges et de glaces.
Notre auteur rapporte aussi quelques autres définitions de la musique un peu differentes de la sienne, mais qui supposent toutes également que cette science avoit l’étendue que nous lui donnons.
On a beau vouloir faire une description, il faut d’abord la sentir ; et, pareillement, un changement d’expression suppose un changement dans la façon de voir et de sentir ; et dans ce sens on a raison de dire que « le style est une spécialisation de la sensibilité ».
Il ne rêve pas, sous la toque verte de Gabrielle, l’ébouriffante capacité politique qu’il a naguère supposée sous la cornette de madame de Pompadour.
Le sentiment de la gloire suppose le retranchement des passions communes.