avec cette érudition de troisième main qu’on nous donne pour de l’érudition de première, la Chine restera donc ce qu’elle a été jusqu’ici : une espèce de rêve, entrecoupé de réalités étonnantes pour les penseurs et pour les poètes, et, pour les curieux, les historiens et les observateurs, une espèce de mystification colossale en permanence dans l’Histoire… Olla podrida morale de toutes choses, depuis la piété filiale jusqu’à l’infanticide, attendant toujours, mais vainement encore, pour cette fois, son chimiste et son analyse, la Chine va continuer d’être la pierre de scandale dans Israël, le sujet pris, quitté et repris, des vaines disputes de nos sagesses.
… Et c’est ainsi que, dès le commencement de ces Études, — qui, si elles ne nous racontent pas et ne nous expliquent pas clairement et péremptoirement, comme elles devraient le faire, les civilisations et leurs origines, et leurs développements et leurs disparitions, ont au moins la prétention de les éclairer par quelque côté, — l’auteur, si ferme aux premiers mots, défaille tout à coup sous le principe qu’il a soulevé et qui fait craquer sa faiblesse.
Nous sommes son fourrier aujourd’hui et nous déballons ses premiers bagages.
Une pareille éducation, qui commençait même avant que la tête de l’enfant fût ouverte aux premières impressions de l’existence, mais dont il devait plus tard recevoir, en apprenant cela, l’enseignement, n’a peut-être agi qu’à la mort sur l’âme de Montesquieu.
Renée est si littéraire qu’il semble regretter que madame de Montmorency n’ait pas été une des lionnes (c’est le mot de ce temps-là comme du nôtre) de l’hôtel de Rambouillet, et il écrit, pour s’en consoler : « Il est vrai que les beaux jours de cette société n’étaient pas venus encore, et que l’histoire s’est médiocrement occupée de ces premières années. » Ah !
Mais on n’avait pas de récit complet, asservi aux dates, allant, comme une chaîne qui a tous ses anneaux, du premier fait jusqu’au dernier de nos annales.
Dans cet essai de son début, il avait replacé la misère humaine, trop souvent oubliée, dans le fond éblouissant de plus d’une grandeur, et justement risqué sur Voltaire une de ces anecdotes cruelles qui firent peut-être sur son propre esprit, altéré de vérité, l’effet des premières gouttes de sang sur la soif du tigre, qu’elles rendent bientôt inextinguible.
IV Car voilà la qualité première du polémiste Crétineau, dans tous ses écrits : c’est l’ardeur dans l’attaque comme dans la défense, c’est l’ardeur, l’ardeur du sanglier en chasse.
Sa légèreté première le reprit-elle pour faire souffrir à nouveau la femme que les grâces sorcières de son esprit avaient comme envoûtée ?
Lacordaire, n’est pas d’aujourd’hui ; et l’Académie, qui, comme toutes les douairières, a toujours aimé les très petits jeunes gens et qui les fait tout de suite académiciens à leurs premiers vers de comédie ou de tragédie, aurait pu, il y a vingt-cinq ans, avoir un jeune homme de plus dans son écrin de jeunes hommes, et un jeune homme qui lui aurait apporté une renommée éclatante.
Ermite là, espèce de Timon enragé dans la carapace d’obscurité qui l’écrasait, il publia, en 1836, un nouveau livre, qui tomba à pic dans l’oubli avec la précision des premiers : La volonté dans la nature. — Il n’en démordait pas, de la volonté !
D’abord, — première raison !
About, leur première condition est d’être taillés sur la durée moyenne d’un voyage, et cette condition impérieuse étranglerait net le talent le plus vigoureux.
… Les Dévotes ont bien évidemment la prétention d’être des caractères, et les Dévotes, si j’en crois les éditions que j’ai sous les yeux, furent son premier livre.
L’hymne sacré, d’abord inculte comme la forêt dont il avait frappé les voûtes sauvages, puis longtemps rude et simple comme les pierres massives des premiers temples, s’embellit avec eux et déploya toutes les variétés, tous les calculs de l’harmonie.
Son visage reprit le calme et l’uniformité d’expression que les outrages de la multitude avaient troublés au premier moment. […] À l’exception des premières agitations populaires de Paris, on n’aperçoit clairement ni son nom, ni sa main, ni son or dans aucune des journées décisives.
XCI Dès qu’il fit jour, nous sortîmes tous ensemble, y compris les bêtes et le chien ; nous allâmes reconnaître de l’œil, aux beaux premiers rayons du soleil d’été rasant les montagnes, dont il semblait balayer les longues ombres et sécher la rosée, le dommage que la journée de la veille nous avait fait. […] … XCVI Jamais je ne vous dirai le chagrin de la cabane à ces cris des deux enfants qui pleuraient ces berceaux de leur enfance, ces feuilles de leur ombre, ces grappes de leur soif, ce crépissage vivant et aimant de leur pauvre toit ; et les lézards qui couraient si joyeux parmi leurs feuilles ; et les merles qui picotaient si criards, comme des oiseaux ivres, les grains premiers mûrs ; et les abeilles qui bourdonnaient si allègrement dans les rayons du soleil entre les grappes plus miellées que le miel de leurs ruches ; et le soleil couchant le soir sur la haute mer, et la lune tremblante à terre, quand les pampres à travers lesquels elle passait tremblaient eux-mêmes au vent de la nuit !
Je ne sais trop pourquoi Ganelon trahit ; par orgueil, je suppose : mais je lui sais gré de devenir traître, et de ne pas l’être par destination première, par emploi, comme tant de traîtres des chansons de geste, ancêtres de ceux des mélodrames. […] On pourrait dire même que Bertolai (si jamais Bertolai a vécu et mis le poème en sa première forme), on pourrait dire que Bertolai avait l’instinct du développement épique, au meilleur sens du mot : il savait faire rendre à une situation ce qu’elle contenait d’émotion et d’intérêt.
C’est une sorte de Balzac du xve siècle, mais ce Balzac, comme l’autre, fait faire à notre prose sa première rhétorique, et par ses exercices l’assouplit et l’élève. […] Commynes eut pour département les affaires de Bourgogne, de Suisse, des Allemagnes, et celles de Madame de Savoie : en somme, tout ce dont son premier état lui avait donné une expérience particulière.
Même aux jours de premières les salles de spectacle sont pleines de riches fermiers des Pampas — de gros industriels de Saxe et de petites femmes bien parisiennes. […] Nous ne sommes pas plus naturels en France, mais comme nous sommes moins beaux que les citoyennes du Sud, nous avons tous l’air de vieux comiques jouant les jeunes premiers.
On lui imputait à crime tout, jusqu’à sa bonne grâce envers les jeunes poètes qui lui offraient respectueusement leurs premières couronnes ; il est curieux de voir ce reproche reparaître toujours ; Pezay et Saint-Lambert le répètent au dix-huitième siècle : Pourquoi, Voltaire, à ces auteurs Qui t’adressent des vers flatteurs, Répondre, en toutes les missives, Par des louanges excessives ? […] Ce répertoire de la connaissance humaine, formé sous les yeux d’Euclide, et par les soins de Callimaque, de Diodore Cronos, de Théodore l’Athée, de Philétas, d’Apollonius, d’Aratus, du prêtre égyptien Manéthon, de Lycophron et de Théocrite, eut pour premier bibliothécaire, selon les uns Zénodote d’Éphèse, selon les autres Démétrius de Phalère, à qui Athènes avait élevé trois cent soixante statues, qu’elle mit un an à construire et un jour à détruire.
Frissonnant sous son deuil, la chaste et maigre Elvire, Près de l’époux perfide et qui fut son amant, Semblait lui réclamer un suprême sourire Où brillât la douceur de son premier serment. […] Baudelaire d’avoir compris ces conditions nouvelles de la poésie, car c’est assurément une preuve de force que de se trouver du premier coup à la hauteur de son temps.
Telle fut, en l’abordant, mon impression première et de jeune homme il y a plus de vingt-cinq ans ; ce qui me faisait dire avec Virgile parlant du laboureur qui découvre de grands ossements dans le sillon : Grandisque effossis mirabitur ossa sepulcris.
Il y a dans Shakespeare des beautés du premier genre, et de tous les pays comme de tous les temps, des défauts qui appartiennent à son siècle, et des singularités tellement populaires parmi les Anglais, qu’elles ont encore le plus grand succès sur leur théâtre.
Dans sa pratique comme dans sa doctrine, ce poète-là prenait tout justement, comme Gorgibus, « le roman par la queue » : il appelait « un chat un chat », et du premier coup allait à la nature, au lieu de mener l’esprit à l’idée par de petits chemins tortueux et fleuris.
Ronsard se compléta par la Franciade ; le large torrent de la Pléiade se réduisit à un mince filet ; Desportes hérita de Ronsard, et Malherbe même écrivit ses premiers vers.
Il avait dans le sang, il reçut parmi ses premières impressions d’enfance, quelque chose qui lui permit de comprendre la beauté antique : il la sentait toute voisine de lui et dans une parfaite harmonie avec son intime organisation ; où les autres ne voyaient que des souvenirs de collège ou des décors d’opéra, il saisissait sans effort les réalités concrètes.
Je l’ai demandé aussi à l’un de ses intimes amis, le fidèle témoin et associé de ses premiers efforts, M.
Mais l’opinion finale sera de le mettre enfin au premier rang, où régnent Lamartine et Victor Hugo, qu’on cite toujours en l’omettant.
. ; mais la perspective ordinaire, au milieu de laquelle se déroulaient les événements de la comédie, c’était cette piazetta ou ce carrefour, doré de soleil, divisé en coins et recoins mystérieux, qui, avec une plus grande simplicité d’architecture, a servi également à nos premiers poètes comiques.
Il ne faut pas croire que l’autorité dispense d’obéir ni même qu’elle diffère de l’obéissance autant qu’il peut sembler au premier abord.
Ces voyages, d’ailleurs, étaient essentiels à son dessein ; car il sentait déjà que, pour jouer un rôle de premier ordre, il fallait sortir de Galilée, et attaquer le judaïsme dans sa place forte, qui était Jérusalem.
Ces hommes-là, ces grands artisans de la civilisation, sans lesquels on en serait resté pendant quelques siècles de plus aux glands du chêne, Virgile les a placés au premier rang, et à bon droit, dans son Élysée ; il nous les montre à côté des guerriers héroïques, des chastes pontifes et des poètes religieux, Inventas aut qui vitam excoluere per artes.
C’est par l’explication des œuvres du premier ordre que ce large enseignement intellectuel doit se couronner.
Avant l’apparition du premier animal doué de vision, il n’y avait point de lumière, et c’est seulement alors que l’on a pu dire que la lumière fut.
Les deux premiers n’ont pas fourni encore toute leur mesure, mais comptent déjà, le dernier a écrit peut-être les seules comédies de ce temps qui ont chance de survivre avec celles de M.
Nous prendrons l’ordre inverse de nos premières bases ; c’est-à-dire, que nous commencerons par les lieux d’oraison dont on peut citer des traits courts et détachés (tels que le sublime et les comparaisons), pour finir par la simplicité et l’antiquité des mœurs.
Au premier abord, ils semblent inséparables des formes qu’ils prennent dans les cas particuliers.
Nous aurons des littérateurs : De première classe, De deuxième classe, De troisième classe.
Il y a un monde d’autres choses ; mais comptez en premier l’influence du principe qui commande au siècle, et qui, comme tout principe, doit se vider, un jour ou l’autre, intégralement de tout ce qu’il contient.
Spirituel comme il l’était, homme d’aperçu, distingué, sagace, amoureux des idées qu’il poursuit, mais aimé des images qui lui viennent, il pouvait recommencer une autre campagne contre la fortune littéraire, écrire un autre livre, ramener au premier par le second.
II Vers la fin de 1854, au milieu des préoccupations inquiètes de l’Europe, à peine rassise des coups terribles que lui avaient portés les révolutions, on apprit qu’un Français venait d’être fusillé, comme un pirate, par le gouvernement mexicain, et que ce Français, ce jeune homme, qu’on appelait au Mexique le vainqueur d’Hermosillo, du nom de sa première bataille, gagnée avec deux cent cinquante hommes contre une armée et contre une ville, avait été jusqu’au dernier moment l’honneur de la France et avait donné d’elle la grande idée qu’elle n’a pas cessé de donner au monde quand, se détournant de ses misères intérieures, elle s’est retournée vers les autres nations et leur a montré un bout d’épée.
La Revue de Paris était comme le vestibule de la Revue des Deux Mondes, une espèce de salle d’attente où les postulants à la Revue des Deux Mondes faisaient leurs premiers exercices.
Nous sommes les disciples des premières sociétés de l’Église… » ce qui n’est pas facile à comprendre.
Il n’a pas, il est vrai, cette spontanéité de malice du premier, qui faisait dire à un grand critique étranger : « Le trait frappe avant qu’on ait pu même soupçonner que l’arc a été tendu », ni la causticité mordante et l’ampleur d’événements du second.
Les qualités musicales sont, à la vérité, en première ligne chez Banville.
Mais dans les autres livres de Gozlan faits par l’imagination et les autres facultés de l’auteur, à chaque ligne ne se rencontre pas moins l’esprit, sa faculté première, et quelle que soit la page, — qu’elle soit chauffée par la passion ou noyée dans les larmes de la tristesse !
Mais ce n’est pas à dire pour cela que ces dernières lettres soient une imitation des premières.
Pâris, le beau ravisseur d’Hélène, sort de la ville et rencontre au premier rang des Grecs Ménélas, dont il a ravi l’épouse. […] Hector, rentré tout sanglant dans Ilion, au lieu d’aller d’abord embrasser Andromaque et son fils, commence par accomplir son premier devoir de citoyen envers sa patrie : il va gourmander Pâris et l’appeler au secours de la ville menacée. […] Mais dans ces premiers jours, où d’un limon moins vieux La nature enfantait des monstres ou des dieux, Le ciel t’avait créé, dans sa magnificence, Comme un autre Océan, profond, sans rive, immense ; Sympathique miroir qui, dans son sein flottant, Sans altérer l’azur de son flot inconstant, Réfléchit tour à tour les grâces de ses rives, Les bergers poursuivant les nymphes fugitives, L’astre qui dort au ciel, le mât brisé qui fuit, Le vol de la tempête aux ailes de la nuit, Ou les traits serpentants de la foudre qui gronde, Rasant sa verte écume et s’éteignant dans l’onde !
IV Clio est le titre de son premier livre. […] Il voulait seulement, par cette première consultation, s’assurer de la science des oracles ; et, dans le cas où il lui serait prouvé qu’ils connussent réellement la vérité, il se proposait d’y recourir une seconde fois pour savoir s’il devait entreprendre la guerre contre les Perses. » V La guerre tourna contre Crésus. […] Lorsqu’ils furent en sa présence, Astyage, regardant Cyrus, lui dit : « C’est donc toi, toi, fils de cet homme, qui as osé traiter avec tant d’indignité le fils d’un des premiers de ma cour ?
Premièrement j’ai tâché de trouver en général les principes ou premières causes de tout ce qui est ou qui peut être dans le monde, … … De tout ce qui est ou qui peut être, là est exactement la fissure. […] De même que Hugo est classique au premier temps et romantique au deuxième, de même une philosophie peut être à plusieurs temps et elle est généralement à plusieurs temps.
Nous nous sommes assez appesanti sur cette première image, celle du diable à ressort, pour faire comprendre comment la fantaisie comique convertit peu à peu un mécanisme matériel en un mécanisme moral. […] Négligez cet arrangement, vous abandonnez le seul fil conducteur qui puisse vous guider dans le labyrinthe du comique, et la règle que vous aurez suivie, applicable peut-être à quelques cas convenablement choisis, reste exposée à la mauvaise rencontre du premier exemple venu qui l’anéantira.
Elle lui donnait les meilleurs conseils pour son Holstein ; c’est même par là qu’elle fit son premier apprentissage en politique, traitant les affaires de ce petit État avec l’ambassadeur de Vienne qui était à Pétersbourg et qui disait au grand-duc : « Votre femme a raison ; vous feriez bien de l’écouter. » Il suivit le conseil et n’eut pas à s’en repentir.
Les peines de la carrière de l’ambition commencent dès ses premiers pas, et son terme vaut encore mieux que la route qui doit y conduire.
Il raconte à Mme de La Fontaine que son premier soin, en entrant dans un pays, est de s’enquérir des jolies femmes : « Je m’en fis nommer quelques-unes, à mon ordinaire. » Il entre dans une allée profonde et couverte, et explique (toujours à Mme de La Fontaine) « qu’il se plairait extrêmement à avoir en cet endroit une aventure amoureuse. » Il insiste pour plus de clarté (toujours dans une lettre à Mme de La Fontaine) : « Si Morphée m’eût amené la fille de l’hôte, je pense bien que je ne l’aurais pas renvoyée.
Je pourrai les admirer ; ils me communiqueront peut-être ou me suggéreront des idées des sentiments que je n’aurais pas eus sans eux ; mais j’ai, du premier coup, la certitude que je ne les aimerai jamais, que je n’aurai jamais avec eux aucune intimité, aucun abandon, et qu’ils seront éternellement pour moi des étrangers.
Chapitre premier.
L’individualisme aristocratique semble compatible au premier abord avec le souci d’une culture humaine et d’une civilisation progressive.
C’est du premier qu’il s’agit (II Paral.
Comme, d’ailleurs, une des idées fondamentales des premiers chrétiens était que la mort de Jésus avait été un sacrifice, remplaçant tous ceux de l’ancienne Loi, la « Cène », qu’on supposait s’être passée une fois pour toutes la veille de la Passion, devint le sacrifice par excellence, l’acte constitutif de la nouvelle alliance, le signe du sang répandu pour le salut de tous 1078.
Bossuet, après s’être longtemps regardé comme le maître & l’ami du second des hommes pour l’éloquence, & du premier pour les qualités du cœur , en étoit devenu le rival.
A l’aide de ce nouveau point de vue, toutes les contradictions apparentes que nous avons signalées dans nos premiers chapitres peuvent s’expliquer facilement.
Entre le matérialisme, qui réduit tout à la pluralité, et le panthéisme, qui réduit tout à l’unité, se place le spiritualisme, qui admet les unités secondaires entre l’unité première et la pluralité infinie.
Ainsi l’artifice, joint à la nature, justifie assez la conduite des premiers poètes tragiques, qui n’ont passé que de fort peu la durée de la représentation dans l’espace qu’ils ont donné à l’action de leurs tragédies.
Voilà tout ce qu’on peut demander à un très bon élève de première.
Non, quand même nous ne saurions pas que Vollichon est le procureur Rollet, que Charroselles est Charles Sorel, et la plaideuse Collantine Mme de Cressé, le roman de Furetière n’en serait pas pour cela dépourvu de charme et d’intérêt ; il y resterait, indépendamment du mérite aléatoire de sa caricature, l’observation des mœurs intimes d’une époque importante et curieuse comme toute époque de transition ; il resterait la lutte du vieil esprit frondeur, égoïste et sournois des corporations, avec les mœurs d’une société plus polie et plus cordiale ; il resterait la fusion de l’élément bourgeois et de la noblesse, s’effectuant par l’ambition de l’une et par la corruption de l’autre ; il resterait enfin de précieux enseignements pour l’histoire judiciaire et pour l’histoire littéraire, au moment où, en raison de révolutions inattendues, le métier d’hommes de lettres, le métier d’avocat, allaient monter au premier rang des fonctions sociales.
Une surtout nous a beaucoup frappé, et nous la citerons parce qu’elle grandit, dans un aperçu juste, celle des Mancines à qui l’histoire attache l’intérêt romanesque du premier amour de Louis XIV.
Il faut croire que cette première opinion est basée sur une foi intense, puisque les événements les plus terribles, ceux d’il y a vingt-sept ans, par exemple, n’ont pu réussir à l’ébranler.
Le petit chant sonore du pouillot se fait entendre une dernière fois au-dessus de votre tête ; le cri plaintif du loriot lui a répondu dans le lointain ; au fond du bois, un rossignol vient de lancer rapidement sa première note ; l’impatience vous dévore. […] Il en jouait avec plaisir, et passait alternativement des notes les plus aiguës aux plus basses : mais il s’arrêtait de préférence aux premières, qu’il s’efforçait de soutenir avec une étonnante flexibilité de gosier. […] un chasseur seul peut apprécier le bonheur que l’on éprouve à errer dans les buissons aux premières lueurs de l’aube.
C’est un pêle-mêle cacophonique où notre premier devoir est de discerner le vrai du faux, le bon du mauvais, et surtout de ne point nous laisser prendre au spécieux ; car toutes ces manifestations de l’intelligence et de la conscience concourent à la formation ou à la déformation de l’esprit. […] Quand la pensée est à la recherche des causes premières, elle va au-delà des phénomènes tangibles, visibles, pondérables ; et, graduellement par l’enchaînement des observations, des réflexions, des jugements, autant d’opérations de l’esprit, elle arrive aux concepts les plus élevés de la raison, prenant toujours, néanmoins, son point d’appui sur la terre. […] Cette première impression passée, nous commençons à analyser.
Premier Entretien. […] Ce qu’on peut ajouter, c’est que les importans sont toujours aux premiers loges pour tout savoir, c’est qu’on ne leur apprend jamais aucune nouvelle, parce qu’ils prétendent les savoir avant tout autre, & qu’enfin rien de ce qui donne de l’orgueil, ne leur est étranger. […] Autrement il abuseroit de sa place pour faire un personnage odieux, & chacun auroit droit de le dénoncer aux premiers juges de la littérature. […] Il y avoit une course de chevaux à Vincennes ; nous nous y rendîmes au milieu de mille & mille clochers posés sur deux roues, & qui, sans doute au premier moment, vont être remplacés par des voitures qui auront l’air de ramper, tant elles seront basses. […] Nos premiers peres vécurent selon la maniere que j’expose : ils étoient contens lorsqu’ils avoient la nourriture & le vêtement, & encore ces habits étoient-ils des haillons comparés à ceux qu’on porte aujourd’hui… Il me paroît que la philosophie ne vous a point encore empêché de vous mettre en colere.
Quant à moi (toujours toute religion à part), cette condition de la vie physique, cette anthropophagie de toute la nature aurait suffi à elle seule pour me faire rejeter l’existence à un tel prix, et si jamais un doute impie effleura mon âme sur l’existence ou sur la nature du premier principe, c’est en réfléchissant à cette dépravation véritablement surhumaine, à cette méchanceté préméditée et sanguinaire de la nature ; c’est en me demandant avec une horreur éperdue, mais logique : Qui a donc inventé cette loi suprême de destruction ? […] Nous vivons très peu de temps, aucun temps même, si nous comparons ce clignement d’œil appelé une vie à l’incommensurable durée des éternités sans premier et sans dernier jour.
Cette loi de corrélation des facultés psychiques et des forces organiques ne détruit point la spontanéité des premières : M. […] Alors même qu’il verrait dans les phénomènes physiques des phénomènes physiologiques transformés, il lui serait impossible de se refuser à reconnaître qu’il y a au moins entre eux cette différence que le moi a conscience des premiers et non des derniers.
Indépendamment de ce qu’il avait de singulier et d’original dans l’humeur et dans le ton, un tel homme, dans la littérature d’une époque, est ce qu’on peut appeler une spirituelle et essentielle activité, une utilité de premier ordre.
Le nouveau volume que vient de publier M. de Laprade, et où se trouve son discours de réception, est un recueil de prose ; il se compose d’une douzaine de morceaux de diverse provenance et dont plusieurs paraissent avoir été de premières leçons, des discours d’ouverture de Faculté.
La Messiade de Klopstock, à travers une foule innombrable de défauts, de longueurs, de mysticités, d’obscurités inexplicables, contient des beautés du premier ordre.
Mais quand c’est au premier objet de ses affections que la vie est consacrée, tout est positif, tout est déterminé, tout est entraînant, il le veut, il en a besoin, il en sera plus heureux ; un instant de sa journée pourra s’embellir au prix de tels efforts.
Cet esprit est, comme on l’a dit souvent, celui d’un vaudevilliste de premier ordre, rien de moins.
En notre siècle, l’école réaliste semble, au premier abord, avoir été en complète opposition avec l’école romantique.
La force du sujet a même obligé La Fontaine à suivre l’intention du premier auteur, jusqu’au dénouement, où il l’abandonne.
Les deux premiers instituteurs du nouvel art furent donc Pylade et Batylle, qui ont rendu leurs noms aussi célebres dans l’histoire romaine, que le peut être dans l’histoire moderne le nom du fondateur de quelque établissement que ce soit.
Nos littérateurs trouveraient surtout un avantage considérable à traduire ainsi par morceaux détachés certains ouvrages qui renferment assez de beautés pour faire la fortune de plusieurs écrivains, et dont les auteurs, s’ils avaient eu autant de goût que d’esprit, effaceraient ceux du premier rang.
L’œuvre du premier est issue de la superstition et du mensonge ; c’est une fleur de décadence.
Il fallait oublier beaucoup de la vie première d’Auguste ; et ce qu’on pouvait louer dans la suite avait plus d’utilité que d’éclat : c’était le repos dans la servitude.
Nous en retrouvons la tradition dans les plus puérils récits et ses fictions jolies ont, dès l’enfance, enguirlandé nos premiers rêves Cette religion nous paraît désormais toute naturelle. […] Il faudrait l’assimiler à l’antique révolution que fut, par exemple, aux temps immémoriaux du sublime Prométhée, le passage de la vie nomade à la vie sédentaire, nécessité par l’édification du premier foyer. […] Il est né avec un atavisme de mélancolie et, j’en suis sûr, Hamlet, Rolla et Werther sont de sa famille, Schopenhauer fut son maître d’école et Baudelaire causa ses premières délices.
Mon premier mouvement a été d’aller sur le tombeau de mon père lui dire les derniers adieux et mêler mes larmes aux vôtres ; mais, depuis que j’explique ici en public la Divine Comédie du Dante, il y a dix mois, je suis attaqué d’une maladie de langueur qui m’a tellement affaibli et changé que vous ne me reconnaîtriez plus. […] Nous nous retrouvâmes à la fin dans un chemin creux bordé d’un côté de peupliers qui, en frissonnant aux brises d’automne, laissaient pleuvoir déjà sur nos têtes leurs premières feuilles jaunies ; nous étions ombragés de l’autre côté par une rangée de chênes très élevés qui, par l’opacité ténébreuse de leurs branches, faisaient contraste avec le pâle et doux feuillage des peupliers.
Chapitre premier La sensation I. […] Kant raisonne un peu à la manière de Condillac, qui introduisait tout d’un coup dans sa statue une odeur de rose, de sorte que la conscience de cette statue eût été, à ce premier moment, tout entière odeur de rose, puis, si on veut, à un second moment, odeur de lis ou d’œillet, puis son de cloche, puis vision d’éclair, etc.
Elle était des premières à s’y plaire ouvertement et à y applaudir.
Mais aussi il y a un historien des plus heureusement doués dont le procédé est autre : il lit, il étudie, il se pénètre pendant des mois et quelquefois des années d’un sujet, il en parcourt avec étendue et curiosité toutes les parties même les plus techniques, il le traverse en tous sens, s’attachant aux moindres endroits, aux plus minutieuses circonstances ; il en parle pendant ce temps avec enthousiasme, il en est plein et vous en entretient constamment, il se le répète à lui-même et aux autres ; ce trop de couleur dont il ne veut pas, il le dissipe de la sorte, il le prodigue en paroles, en saillies et en images mêmes qui vaudraient souvent la peine d’être recueillies, car, plume en main, il ne les retrouvera plus : et ce premier feu jeté, quand le moment d’écrire ou de dicter est venu, il épanche une dernière fois et tout d’une haleine son récit facile, naturel, explicatif, développé, imposant de masse et d’ensemble, où il y a bien des négligences sans doute, bien des longueurs, mais des grâces ; où rien ne saurait précisément se citer comme bien écrit, mais où il y a des choses merveilleusement dites, et où, si la brièveté et la haute concision du moraliste font défaut par moments, si l’expression surtout prend un certain air de lieu commun là où elle cesse d’être simple et où elle veut s’élever, les grandes parties positives d’administration, de guerre, sont si amplement et si largement traitées, si lumineusement rapportées et déduites, et la marche générale des choses de l’État si bien suivie, que cela suffit pour lui constituer entre les historiens modernes un mérite unique, et pour faire de son livre un monument.
Il se sentit bientôt atteint de ce mal d’ennui qui fut celui des individus distingués dans les jeunes générations des trente premières années du siècle.
Bonstetten, en son premier temps, aux belles années du xvie siècle, avait eu, il est vrai, une jeunesse fervente, enthousiaste, engouée, selon la forme d’idées et de sentiments qui régnaient alors, avec des teintes de Jean-Jacques et des reflets de Werther ; mais cela lui avait passé : il s’était rassis ; il était devenu vieux ; vers l’âge de trente-cinq à quarante ans, il était redevenu Bernois ou avait tâché de le redevenir, de se faire un homme sérieux, un homme politique, un bailli, un syndic ou syndicateur (comme ils disent), un aspirant au conseil souverain de son canton ; il s’acclimatait petit à petit à l’ennui ; en un mot, à l’exemple du commun des hommes, il était en train de vieillir, et il y réussissait par le cours naturel des ans et des choses, quand les événements qui, à la suite du grand mouvement de 89, bouleversèrent son pays, vinrent le secouer lui-même et le déranger, le déconcerter et l’affliger d’abord ; mais bientôt il se remit, il voyagea, il trouva des oasis et des asiles, des cercles heureux où l’amitié lui vint rendre la joie, l’espérance et l’harmonie de sentiments à laquelle il aspirait par sa nature : et c’est alors qu’il rajeunit tout de bon.
Racine a fait les Plaideurs ; et, dans cette admirable farce, il a tellement atteint du premier coup le vrai style de la comédie, qu’on peut s’étonner qu’il s’en soit tenu à cet essai.
Elle ne paraît qu’en 1572 : je ne dis pas au milieu des pires tourmentes religieuses et politiques, mais, ce qui est plus grave, à la veille des Premières Amours de Desportes (1573), et le recueil de Desportes, c’est la fin des grandes ambitions, c’est la banqueroute en quelque sorte de la Pléiade.