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668. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre II. Quelques traditions sur Pindare. »

La faveur qu’il trouvait chez ces princes, la conserva-t-il au même degré dans les villes libres de la Grèce et parmi ses propres concitoyens ?

669. (1875) Revue des deux mondes : articles pp. 326-349

Le degré de vitalité des animaux et la rapidité de la circulation qui en est la conséquence agissent dans le même sens. […] Quand on chauffe à 100 degrés du chlorure d’azote et qu’il s’ensuit une explosion qui devient à la fois une source puissante de mouvement et de chaleur, on n’agit pas sur l’explosion elle-même, on ne fait qu’apporter une température de 100 degrés qui est la condition déterminante de l’explosion. […] Quand on a mis par exemple des globules de levure de bière dans un liquide sucré, qu’on maintient à une température inférieure à − 10 degrés, rien ne se passe dans le liquide ; la levure engourdie reste sans action sur le sucre, et il ne se forme ni acide carbonique ni alcool ; mais si on élève la température à + 30 degrés, on voit bientôt la fermentation marcher avec une très grande activité. […] Comme notre cellule de levure de bière, la cellule de l’œuf reste engourdie au-dessous d’une certaine température, et ce n’est qu’à + 35 degrés que l’idée organique manifestera son activité. […] D’abord est-il vrai que les corps de la nature inorganique soient éternels et que les corps vivants seuls soient périssables ; n’y aurait-il pas entre eux de simples différences de degrés qui nous font illusion par leur grande disproportion ?

670. (1900) La culture des idées

Traduits par Mallarmé, les poèmes d’Edgard Poe acquièrent une vie mystérieuse à la fois et précise qu’ils n’ont pas au même degré dans l’original. […] L’homme arrivé au degré vraiment humain limite à son gré sa fécondité ; c’est un de ses privilèges, mais un de ceux qu’il n’atteint que pour en mourir. […] Il semble même que, selon le degré de culture intellectuelle, le même mot n’atteigne que des états échelonnés d’abstraction. […] Ils n’ont à aucun degré le sens de la loi ; ils vivent dans l’accident. […] Il est dénué d’humanité à un degré presque douloureux.

671. (1848) Études critiques (1844-1848) pp. 8-146

Ainsi, les mille degrés du désespoir ne trouvent déjà pour leur correspondre que peu de formes du langage, et quant à ses caractères aussi divers que ses causes, il est bien difficile sinon impossible de les faire ressortir. […] Théophile Gautier ne s’est jamais trouvé mal à l’aise au plus fort de la mêlée romantique ; au contraire, il s’y est porté de préférence, estimant volontiers la rudesse à l’égal du courage ; il faut donc en quittant Namouna pour Fortunio s’attendre à descendre au moins d’un degré. […] » Le poète ne se le fait pas dire à deux fois et le voilà, escaladant les degrés étroits et sombres qui mènent à la chambrette de la déesse. […] Il a certainement et à un haut degré l’amour du beau et du bien dans les productions de la littérature, de la peinture, de la musique. […] Janin est plus artiste que le grand nombre de ceux qui l’attaquent ; il a, dans un degré bien supérieur, la sensation du beau qui est tout autre chose que le jugement ; la nature l’a doué de sens exquis sous ce rapport : c’est un malheur qu’elle ait oublié aussi complètement de le pourvoir des facultés sérieuses de l’écrivain.

672. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 3665-7857

Le degré des passions ne distingue pas mieux la comédie de la tragédie. […] Les anciens n’avoient pas l’idée de ce degré d’expression ; & tel est parmi nous l’avantage des salles peu vastes, & du visage découvert. […] Chaque genre a son degré d’intérêt & de pathétique : celui de l’églogue ne doit être qu’une douce émotion. […] Virgile a un exemple admirable du degré de chaleur auquel peut se porter l’amour, sans altérer la douce simplicité de la poésie pastorale. […] ainsi par degré la perfidie est plus atroce, à mesure que la confiance violée étoit mieux établie.

673. (1882) Types littéraires et fantaisies esthétiques pp. 3-340

Un degré de plus ou de moins dans l’éducation ou le génie, et les hommes ne se comprennent plus. […] D’où vient le degré de terreur poétique qui accompagne cet acte ? […] Voilà à quel degré d’intime concorde vivent ces deux esprits, partout ailleurs frères rivaux ou soumis à ces lois ordinaires de la primogéniture, qui séparent les frères en aînés et cadets. […] Réfléchissez un instant et vous cesserez de vous étonner que des hommes en qui cette alliance existe au degré où elle existe chez Dante et Goethe échappent à toute classification de secte et de parti. […] Un des traits de cette bonté est le sentiment profond du respect que l’homme doit à l’homme, sentiment que personne n’a eu au même degré que lui.

674. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre III. Ben Jonson. » pp. 98-162

Prenez mille débauchés, vous trouverez mille manières d’être débauché ; car il y a mille routes, mille circonstances et mille degrés dans la débauche ; pour que sir Épicure Mammon fût un être réel, il fallait lui donner l’espèce de tempérament, le genre d’éducation, la nature d’imagination qui produisent la sensualité. […] Si nous l’ignorons, c’est qu’aujourd’hui nous sommes régularisés, alanguis, amortis, et que par degrés, à force de frottements et de redressements, notre mouvement intérieur s’est accommodé à demi au mouvement des choses. […] Si réduite et si disciplinée qu’elle soit, elle a encore un reste de couleur sensible par lequel elle est voisine d’une hallucination, un degré de persistance personnelle par lequel elle est voisine d’une monomanie, un réseau d’affinités singulières par lequel elle est voisine des conceptions délirantes. […] Quelle distance il y a entre cette conception et l’objet, combien elle le représente imparfaitement et mesquinement, à quel degré elle le mutile, combien l’idée successive, désarticulée en petits morceaux régulièrement rangés et inertes, ressemble peu à la chose simultanée, organisée, vivante, incessamment en action et transformée, c’est ce que nulle parole ne peut dire.

675. (1858) Cours familier de littérature. V « XXIXe entretien. La musique de Mozart » pp. 281-360

Le mâle se mit à chanter et fit entendre six sons ; la femelle, lui répondant, en articula six autres, et il se trouva que les douze sons réunis ensemble formaient les douze degrés de l’échelle chromatique. Le ministre, profitant de la leçon qu’on venait de lui donner, coupa douze bambous et en fixa la longueur nécessaire pour produire les douze demi-tons ou degrés chromatiques qui sont contenus dans l’unité de l’octave. […] Quant à moi, je ne sais pas au juste à quel degré d’exaltation, d’ivresse ou d’héroïsme, ne me porterait pas la musique, si je ne m’en sevrais par sobriété de sensation. […] » VI Il y a des hommes qui naissent avec une organisation innée pour entendre, comprendre, parler et inventer à un degré infiniment supérieur au reste des hommes cette langue de la musique, plus puissante encore sur leurs propres sens que sur les sens d’autrui : ce sont les poètes du son.

676. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 juin 1886. »

Ainsi l’art restitue, par degrés, une vie de notions plus détaillée : il prend un sujet total sans cesse plus restreint, afin d’en mieux tracer les éléments. […] Aujourd’hui nous pouvons constater, à l’état statique, dans le monde actuel, les différents degrés de l’évolution chronologique. […] Elle leur dut ses formes successives ; elle leur doit aujourd’hui la conservation de ces formes, correspondantes aux degrés divers de l’hétérogénéité intellectuelle. […] J’indiquerai, plus tard, dans un troisième article, comment la musique fut amenée, par Beethoven et Wagner, à ne pouvoir plus exister sans le concours des autres arts : comment, aussi, l’union ne peut être décisive, les différents arts n’étant point parvenus au même degré de développement.

677. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Granier de Cassagnac » pp. 277-345

En entrant dans cette phase nouvelle et définitive de la Révolution, on était obligé de descendre plus bas que le dernier degré de l’échafaud, on était tenu de soulever plus infect que la boue des corps, mais la boue des âmes. […] En restant dans cette voie, s’il y fût resté, Granier de Cassagnac n’aurait été qu’un homme de lueur et d’à peu près, un esprit ingénieux plus ou moins profond, une intelligence à l’allemande, n’importe sous quel degré de longitude et de latitude cette intelligence fût-elle née, enfin un de ces esprits qui s’appellent Niebuhr dans l’en-haut, Boulainvilliers dans l’en-bas, et dans le bleu tout à fait (comme dit Tieck), si on peut jusque-là, Vico ou Ballanche. […] En se montrant peintre à ce degré, en prenant si particulièrement les hommes à partie dans le sujet qu’il abordait, Cassagnac n’obéit pas seulement à l’inspiration naturelle de son esprit, à cette projection intérieure qui est l’impulsion du talent. […] « Parce qu’il y a — dit l’auteur des Origines de la langue française — dans le français, l’espagnol et l’italien, des mots usuels qui sont aussi dans le latin, la solution explicative qu’on adopta fut d’affirmer qu’après avoir soumis les peuples de l’Italie, de la Gaule et de l’Espagne, les Romains les avaient obligés de remplacer leur langue nationale par la latine, ce qui choque violemment, — ajoute-t-il, — et à un égal degré, le bon sens, l’histoire et la philologie. » La thèse, du reste, posée ainsi, fut plus tard modifiée.

678. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « L’abbé de Bernis. » pp. 1-22

Jusque-là il était abbé comme on l’était volontiers alors, ayant le titre et quelques bénéfices ; mais il n’était point lié à son état, il n’était prêtre à aucun degré ; et en 1755, à l’âge de quarante ans, on le voit hésiter beaucoup avant de franchir ce pas dont il sent le péril, et d’où sa délicatesse d’honnête homme l’avait tenu éloigné jusque-là : « Je me suis lié à mon état, écrit-il à Pâris-Duverney (le 19 avril 1755), et j’ai mis moi-même dans cette démarche tant de réflexions que j’espère ne m’en repentir jamais1. » Quant aux petits vers galants, ils sont de sa première jeunesse ; il cessa d’en faire à l’âge de trente-cinq ans : J’ai abandonné totalement la poésie depuis onze ans, écrit-il à Voltaire en décembre 1761 ; je savais que mon petit talent me nuisait dans mon état et à la Cour ; je cessai de l’exercer sans peine, parce que je n’en faisais pas un certain cas, et que je n’ai jamais aimé ce qui était médiocre ; je ne fais donc plus de vers et je n’en lis guère, à moins que, comme les vôtres, ils ne soient pleins d’âme, de force et d’harmonie ; j’aime l’histoire… Il y a donc, avant tout, quand on parle de Bernis, à bien marquer les époques, si l’on veut être juste envers un des esprits les plus gracieux et les plus polis du dernier siècle, envers un homme d’une capacité réelle, plus étendue qu’on ne pense, et qui sut corriger ses faiblesses littéraires ou ses complaisances politiques par une maturité décente et utile, et par une fin honorable. […] [NdA] Cela veut dire en termes ecclésiastiques que Bernis prit le premier des ordres majeurs en avril 1755 : il en était encore à ce simple degré de sous-diacre, lorsqu’il fut promu au cardinalat en octobre 1758.

679. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Sully, ses Économies royales ou Mémoires. — I. » pp. 134-154

Et au moment de la chute ou de la retraite contrainte, il dit encore : « La disgrâce de cet homme était plainte de peu de personnes à cause de sa gloire (de son orgueil). » Chose singulière, l’homme le plus éloigné à tous égards de L’Estoile, le cardinal de Richelieu, en ses Mémoires, parlant de Sully et de sa chute qui fut toute personnelle, dit à peu près la même chose : On a vu peu de grands hommes déchoir du haut degré de la fortune sans tirer après eux beaucoup de gens ; mais, la chute de ce colosse n’ayant été suivie d’aucune autre, je ne puis que je ne remarque la différence qu’il y a entre ceux qui possèdent les cœurs des hommes par un procédé obligeant et leur mérite, et ceux qui les contraignent par leur autorité. […] Quand Tallemant des Réaux, par exemple, s’appuyant du manuscrit d’un ancien secrétaire de Du Plessis-Mornay, c’est-à-dire d’un témoignage ennemi, s’amuse à nous conter que tous les soirs, à l’Arsenal, jusqu’à la mort de Henri IV, Sully, déjà arrivé à la cinquantaine, continuait d’aimer si fort la danse « qu’il dansait tout seul avec je ne sais quel bonnet extravagant en tête, qu’il avait d’ordinaire quand il était dans son cabinet », une telle anecdote, qui n’a aucun rapport prochain ni éloigné avec les actes publics de Sully et qui ne saurait être contrôlée, est indigne d’être recueillie par un historien et n’est propre (fût-elle exacte à quelque degré) qu’à déjouer et à dérouter le jugement général, bien loin d’y rien apporter de nouveau.

680. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — I. » pp. 325-345

J’insiste sur ces jours intérieurs qu’il nous ouvre, parce que l’histoire secrète de Roederer fut celle alors de beaucoup d’autres, parce qu’il ne fut pas le seul à avoir ce qu’on peut appeler sa période de Rousseau, et pour qu’on voie aussi à quel degré primitif de chaleur mûrirent tant de qualités solides et fortes que plus tard on apprécia en lui. […] Mais lorsque ces sentiments qui, à des degrés différents, sont plus ou moins ceux de toute jeunesse, continuent de s’exalter à des époques où il suffirait d’améliorer et de vivre sans avoir à régénérer, il importe qu’on les contienne et qu’on les détourne sans y trop abonder et sans y donner jour en tous sens : autrement la vie sociale ne serait qu’une révolution continuelle, et chaque génération, en y entrant, ferait explosion à son tour.

681. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — I » pp. 432-453

Il y a plus, et, indépendamment des questions de dates, on arriverait, rien qu’avec les lettres qu’on publie et dont j’ai les originaux sous les yeux, à être assuré que les prétendus mémoires ne sont, à aucune degré, de la marquise de Créqui elle-même. […] Il demeurera prouvé pour nous, et pour tous ceux qui examineront désormais l’ouvrage, que les prétendus Souvenirs de la marquise de Créqui ne sont d’elle, à aucun degré, ni pour les faits, ni pour les sentiments, ni pour le ton.

682. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Vie de Maupertuis, par La Beaumelle. Ouvrage posthume » pp. 86-106

Peut-être n’y a-t-il que la proposition 48e d’Euclide à laquelle on puisse trouver le degré d’évidence qui convient à la vérité. […] Peut-être n’y a-t-il que les propositions d’Euclide à qui l’on puisse trouver le degré d’évidence qui devrait caractériser la vérité.

683. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « L’abbé de Marolles ou le curieux — II » pp. 126-147

Quand Chapelain eut été à son tour enterré par Boileau, on voit d’ici ce qu’il advint de celui que Chapelain avait sous ses pieds : il se trouva tombé plus bas d’un degré encore, descendu au fond d’un second puits. […] Causant donc un jour avec Marolles et dans son cabinet, il le mit sur son sujet favori, et, lui parlant de sa collection que l’heureux possesseur prétendait aussi complète que possible, il éleva un doute, et, ayant excité l’étonnement du bonhomme, il en vint par degrés à lui conter l’histoire : « Je suis bien sûr, concluait-il, que vous n’avez pas cette estampe des Scieux de long 32. » — « Je suis bien vieux, lui répondit Marolles après un court moment de réflexion, et je ne puis guère bouger de mon fauteuil ; mais soyez assez bon pour monter sur ce petit gradin et pour prendre là-haut sur cette tablette (la première ou la seconde) ce grand in-folio que voilà. » Jean Rou fit ce qu’il lui disait, et Marolles n’eut pas plutôt le volume entre les mains qu’il lui montra, à la troisième ou quatrième ouverture de feuillet, la petite estampe si mystérieuse et si désirée dont lui, le petit-fils de Toutin, avait toujours ouï parler sans la voir· — Si vous concevez chez un homme de quatre-vingts ans une plus vive et plus délicieuse satisfaction que celle que Marolles dut éprouver à ce moment, dites-le-moi.

684. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Merlin de Thionville et la Chartreuse du Val-Saint-Pierre. »

qui peut répondre de son courage moral et du degré de trempe de son âme, s’il n’a pris part à une retraite de Russie, ou à une campagne de l’Inde, comme celle des Anglais et de l’intrépide Havelock en 1857 ? […] Mais en même temps, et malgré ses instincts militaires prononcés, il n’eut jamais l’idée de franchir le degré qui eût fait de lui un homme de guerre régulier, un officier général comme le devinrent ses trois frères.

685. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Lettres inédites de Michel de Montaigne, et de quelques autres personnages du XVIe siècle »

Nous arrivons ainsi par degrés à tant de collecteurs et amateurs d’autographes qui, dès qu’ils ont réuni un certain nombre de pièces ou de bagatelles auxquelles ils s’amusent, ont hâte de les publier, et, qui, s’ils n’éclairent pas grand’chose, aident du moins à orner ou à égayer parfois des points de biographie littéraire. […] Montaigne aimait et admirait fort son père, « l’âme la plus charitable et la plus populaire qu’il eût connue. » Mais lui, il n’est point tel ni débonnaire de nature et d’humeur à ce degré ; il n’est point disposé à être, comme son père, perpétuellement agité et tourmenté des affaires de tous ; il confesse ne pouvoir le suivre et l’égaler en cela ; il n’est pas homme à se jeter à tout moment, comme un Curtius, dans le gouffre du bien public.

686. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Dominique par M. Eugène Fromentin »

Fromentin a un privilège que je n’ai encore vu personne posséder à un degré égal : il a deux muses ; il est peintre en deux langues ; il n’est pas amateur dans l’une ou dans l’autre, il est artiste consciencieux, sévère et fin dans toutes deux. […] Je me pénètre ainsi, par tous mes sens satisfaits, du bonheur de vivre en nomade… » Il a, en toute occasion, de ces définitions du silence, lequel sous un seul mot (comme celui de l’ombre) sous-entend et comprend tant de nuances à tous les degrés imaginables, depuis la douceur et l’atténuation fugitive des sons jusqu’à l’absence totale des bruits28.

687. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par. M. le Chevalier Alfred d’Arneth »

C’est le monde ; cela arrive à nous tous, plus tard ou plus tôt ; mais il faut donc se tenir dans une assiette telle que cela ne puisse arriver par notre faute. (30 novembre 1774.) » Parole sage et vraie pour tous ceux qui sont acteurs, à quelque degré, sur ce vaste théâtre où chacun joue son rôle, grand ou petit, et doit avoir à cœur de le jouer de son mieux ! […] Le destin, ou ce qu’on appelle ainsi, ne vient jamais seul : on en est toujours, à quelque degré, complice.

688. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ALFRED DE MUSSET. » pp. 177-201

En un mot, M. de Musset, dans toute la crudité de l’adolescence (proterva zelas), se comporta comme un bachelier impétueux qui brise, chaque matin, ses adorations de la veille, et talonne, un peu injurieusement peut-être, en le quittant, le degré où il s’accoudait tout à l’heure. […] Quand on a soi-même des portions de l’artiste, qu’on l’a été un moment, ou du moins qu’on a désiré de le devenir à quelque degré, la vigilance sur les créations naissantes est extrême ; le clin d’œil est rapide et peu trompeur ; on reconnaît avec un instinct vif, presque jaloux, ces lumières qui pointent à l’horizon et vont à mesure éteindre les anciennes.

689. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « UN DERNIER MOT sur BENJAMIN CONSTANT. » pp. 275-299

A la bonne heure ; mais je puis dire qu’une de ces expressions de Benjamin Constant à Mme de Charrière passe tout et ne se pourrait représenter qu’en latin, comme lorsque Horace, par exemple, parle d’Hélène : Nam fuit ante Helenam… Le principal tort, sans doute, en ces incidents, est à la femme qui souffre de tels oublis de plume ; pourtant cette affectation de cynisme sert à juger aussi les qualités de jeunesse et le degré de conservation de celui qui se donne licence. […] A un certain degré, cette mêlée, cette lutte de diverses natures en une seule, aurait pu paraître intéressante, et elle a certainement paru telle à quelques personnes qui l’ont connu ; je sais une femme distinguée qui a écrit : « On sent dans Benjamin Constant un besoin d’être aimé, dirigé, soigné, qui charme à côté de si grandes facultés… » Pourtant, à moins d’être femme peut-être, et avec la meilleure volonté du monde, il n’y a pas moyen de n’être point ici frappé de ce choc d’éléments inconciliables et d’un désaccord qui crie.

690. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIe entretien. Sur la poésie »

Dans toutes les langues, au contraire, l’homme a chanté généralement en vers la nature, le firmament, les dieux, la pitié, l’amour, cette autre pitié des sens et de l’âme, les fables, les prodiges, les héros, les faits ou les aventures imaginaires, les odes, les hymnes, les poëmes enfin, c’est-à-dire tout ce qui est d’un degré ou de cent degrés au-dessus de l’exercice purement usuel et rationnel de la pensée.

691. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Victor Duruy » pp. 67-94

Il se dit encore que l’accession possible de tous au pouvoir avait pour naturel corollaire l’accession possible de tous à la science, et à tous les degrés de la science. […] Et il comprit aussi que l’enseignement supérieur, plus qu’à tout autre régime, importe au démocratique, lequel est plus visiblement fondé sur la raison ; que d’ailleurs tous les ordres d’enseignement se tiennent secrètement et influent les uns sur les autres, soit que l’ordre supérieur fasse descendre dans les autres son esprit et leur fournisse leurs méthodes, soit qu’il se recrute continuellement et se renouvelle en eux, par la facilité offerte à tous ceux que ces méthodes ont éveillés de s’élever à un degré plus haut de la connaissance.

692. (1887) Discours et conférences « Réponse au discours de M. Louis Pasteur »

Il y a quelque chose que nous savons reconnaître dans les applications les plus diverses ; quelque chose qui appartint ou même degré à Galilée, à Pascal, à Michel-Ange, à Molière ; quelque chose qui fait la sublimité du poète, la profondeur du philosophe, la fascination de l’orateur, la divination du savant. […] En lui s’est montré au plus haut degré ce que « le peuple gallican », comme on disait au moyen âge, a de droiture, de sincérité, d’honnêteté, et, sous apparence révolutionnaire, de sage réserve et de prudente raison.

693. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVII. Rapports d’une littérature avec les littératures étrangères et avec son propre passé » pp. 444-461

Il faut discerner la façon dont chaque auteur a su profiter des modèles qu’il a choisis ou rencontrés ; il y a cent degrés dans cet art ; on ne saurait confondre le copiste qui abdique son indépendance, et se fait le docile esclave d’un devancier avec l’adaptateur habile qui crée en imitant, qui prend un grain de semence chez autrui, le fait lever, fleurir, fructifier en pousses vigoureuses et nouvelles ; ni surtout avec l’inventeur qui ne puise guère qu’une noble émulation et un encouragement dans la contemplation des chefs-d’œuvre offerts à ses regards. […] C’est ainsi que la lumière, qui met des années et des années à nous arriver des étoiles lointaines, nous en révèle l’histoire ancienne et peut même nous apporter des nouvelles de mondes qui ne sont plus… » Je suis heureux de pouvoir ajouter que la cause de méprise, signalée ici, n’existe plus au même degré qu’en ce temps-là.

694. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Herbert Spencer — Chapitre I : La loi d’évolution »

La doctrine de l’évolution, au contraire, montre qu’entre la science et les prévisions du vulgaire, toute ligne de démarcation est impossible ; qu’elles diffèrent en degré, non en nature, et qu’entre elles toute séparation absolue est illusoire et chimérique. […] Par un progrès naturel, la classification va des ressemblances grossières à d’autres plus cachées ; dans les classes se forment les sous-classes suivant les degrés de dissemblance ; et l’esprit éliminant toujours le dissemblable, cherchant des ressemblances de plus en plus rigoureuses, tend finalement vers la notion de ressemblance complète qui suppose la non-différence.

695. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XI, les Suppliantes. »

Mais les filles d’Io prouvent leur descendance degré par degré, elles disent leur horreur de l’inceste permis par les lois barbares, et leur fuite à travers la mer pour échapper aux lits des fils d’Égyptos.

696. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XII »

Personne, au théâtre, ne possède à un degré aussi vif le don de dessiner, en quelques lignes, des portraits vivants et frappants sous lesquels chacun place un nom. […] A ce degré d’enfantillage, l’innocence touche à l’insignifiance : ce n’est plus une personne, c’est un âge que nous avons sous les yeux.

697. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. Tome IXe. » pp. 138-158

Il y a un certain degré de talent dans le peintre, qui peut sans doute donner à celui-ci la tentation de créer ou d’achever quelquefois son objet. […] Mais, pour l’ordre civil, pour l’administration, pour la guerre, il a poussé l’exposition au dernier degré d’éclaircissement et d’évidence où elle peut aller.

698. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Œuvres de Barnave, publiées par M. Bérenger (de la Drôme). (4 volumes.) » pp. 22-43

C’est alors que, voulant montrer tout le danger qu’il y avait pour la liberté même à rendre la personne du monarque responsable à ce degré soit en mal, soit en bien, il s’écria : « À ceux qui s’exhalent avec une telle fureur contre l’individu qui a péché, je dirai : Vous seriez donc à ses pieds si vous étiez contents de lui ! […] Le consul, qui fit placer la statue de Barnave à côté de celle de Vergniaud dans le grand escalier du palais du Sénat, lui en aurait fait monter, vivant, les degrés.

699. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame de La Tour-Franqueville et Jean-Jacques Rousseau. » pp. 63-84

Il a seulement senti durant toute sa vie ; et, à cet égard, sa sensibilité est montée à un degré qui passe tout ce que j’ai vu jusqu’ici ; mais elle lui donne un sentiment plus aigu de peine que de plaisir. […] Pour nous, quoi que la raison nous dise, pour tous ceux qui, à quelque degré, sont de sa postérité poétiquement, il nous sera toujours impossible de ne pas aimer Jean-Jacques, de ne pas lui pardonner beaucoup pour ses tableaux de jeunesse, pour son sentiment passionné de la nature, pour la rêverie dont il a apporté le génie parmi nous, et dont le premier il a créé l’expression dans notre langue.

700. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) «  Mémoires et correspondance de Mme d’Épinay .  » pp. 187-207

Les conversations où il est représenté par Mme d’Épinay sont des plus amusantes et des plus comiques, assaisonnées d’un sel des plus piquants et colorées d’une verve bretonne qui ne se retrouve au même degré dans aucun de ses écrits. […] Peu d’hommes, disait le grand Frédéric, connaissent les hommes aussi bien que Grimm, et on en trouverait moins encore qui possèdent au même degré que lui le talent de vivre avec les grands et de s’en faire aimer, sans compromettre jamais ni la franchise ni l’indépendance de leur caractère.

701. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Diderot. (Étude sur Diderot, par M. Bersot, 1851. — Œuvres choisies de Diderot, avec Notice, par M. Génin, 1847.) » pp. 293-313

Diderot, né à Langres en 1713, fils d’un père coutelier (comme l’était le père de Rollin), eut dès l’enfance le sentiment de famille à un haut degré, et il le tenait des siens : c’était une race d’honnêtes gens. […] L’abbé Arnaud disait à Diderot : « Vous avez l’inverse du talent dramatique ; il doit se transformer dans tous les personnages, et vous les transformez tous en vous. » Mais si Diderot n’était rien moins qu’un poète dramatique, s’il n’était nullement suffisant à ce genre de création souveraine et de transformation tout à fait impersonnelle, il avait en revanche au plus haut degré cette faculté de demi-métamorphose, qui est le jeu et le triomphe de la critique, et qui consiste à se mettre à la place de l’auteur et au point de vue du sujet qu’on examine, à lire tout écrit selon l’esprit qui l’a dicté.

702. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Histoire des travaux et des idées de Buffon, par M. Flourens. (Hachette. — 1850.) » pp. 347-368

Buffon pourtant ne devint ce philosophe et ce sage que par degrés. […] Le plus parfait écrit de Buffon, je l’ai dit, est son discours ou tableau des Époques de la nature qu’il publia en 1778, à l’âge de soixante-et-onze ans, et qu’il avait fait recopier, assure-t-on, jusqu’à dix-huit fois (rabattez-en, si vous le voulez) avant de l’amener au degré de perfection qui le pût satisfaire.

703. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Monsieur de Bonald, (Article Bonald, dans Les Prophètes du passé, par M. Barbey d’Aurevilly, 1851.) » pp. 427-449

Pour montrer le degré de rigueur et d’absolu de la vérité qui se mesure à l’étendue même des lumières et de la certitude, il a pu écrire : « L’homme le plus éclairé sera l’homme le moins indifférent ou le moins tolérant ; et l’Être souverainement intelligent doit être, par une nécessité de sa nature, souverainement intolérant des opinions 56. » Voilà Dieu compromis, dans la bouche d’un homme pieux, par une expression malheureuse. […] Ce n’est donc que hors de lui et par la société que l’homme s’instruit et s’élève ; il importe donc que ce fonds premier de vérité sociale ne soit point altéré, ou, s’il l’a été, qu’il soit réintégré et rétabli dans sa pureté primitive, comme il le fut, et même à un plus haut degré de perfection, lors de la venue de Jésus-Christ.

704. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires et correspondance de Mallet du Pan, recueillis et mis en ordre par M. A. Sayous. (2 vol. in-8º, Amyot et Cherbuliez, 1851.) — I. » pp. 471-493

On lit cela dans un article de Mallet, inséré au tome II, p. 342, du Mercure britannique, et qui a pour titre : « Du degré d’influence qu’a eue la philosophie française sur la Révolution ». Je recommande cet article à tous ceux qui tiennent à classer avec précision et sans injustice les écrivains du xviiie  siècle selon leur degré de parenté avec la Révolution.

705. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Mémoires du cardinal de Retz. (Collection Michaud et Poujoulat, édition Champollion.) 1837 » pp. 40-61

Sobre sur le manger, il était extrêmement libertin, mais surtout ambitieux, menant de front toutes choses, ses passions, ses vues, et des desseins même dans lesquels entrait à quelque degré la considération de la chose publique. […] Ce qui suit nous fait assister à tous les degrés de ce réveil si imprévu, bientôt changé en effroi, en consternation et en fureur.

706. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — I. » pp. 1-22

Sans trop serrer de près les questions qui se rattachaient aux deux époques critiques de la vie du maréchal, j’avais entendu causer quelques-uns de ses amis, et j’avais été frappé du degré de chaleur et d’affection que tous mettaient à le défendre et à continuer de l’aimer. […] Dans le beau portrait qu’il a tracé d’un général qui remplit toutes les conditions du commandement, il n’oublie pas celle-ci : « Un général doit être aussi magnifique que sa fortune le lui permet. » Ce n’est pas mon fait ici de suivre pas à pas Marmont dans tous les degrés de sa carrière.

707. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — II. (Fin.) » pp. 63-82

Partagé entre les vieux Romains de la résistance et celui qui passa le premier le Rubicon, Montesquieu ne comprend donc pas César au même degré qu’il a fait pour les autres grands hommes ; il ne le suit qu’avec une sorte de regret. […] On peut arrêter à chaque pas Montesquieu sur ses divisions générales de gouvernement, sur le principe qu’il assigne à chacun d’eux, sur les climats et le degré d’influence qu’il leur attribue, sur les citations de détail dont il a semé son ouvrage.

708. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Arnault, de l’Institut. » pp. 496-517

Né à Paris, le 22 janvier 1766, d’une famille qui tenait à la riche bourgeoisie, il eut de bonne heure ce que de tout temps on trouve si aisément dans la bourgeoisie de Paris à tous les degrés, son franc-parler, de la malice, de la gaieté et de l’indépendance. […] ils siffleront bien plus fort tout à l’heure. » Et comme on s’étonnait de ce calme, il offrit de donner son pouls à tâter à un médecin qui s’assurerait s’il battait d’un degré de plus.

709. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre II : La littérature du xviie  siècle »

Nisard semble en avoir imité le procédé en nous montrant l’idée de l’esprit français s’enrichissant successivement dans chaque nouvel écrivain, d’un trait nouveau, d’un caractère nouveau qui manquait au type ; il nous montre cette idée passant par degrés de l’abstrait au concret, du simple au composé ; il nous en montre l’éclosion au xvie  siècle, l’épanouissement au xviie  siècle, la décadence, coïncidant toutefois avec un nouvel enrichissement, au xviiie. […] Cette philosophie, nous l’avons vu, serait la nôtre, s’il ne s’y mêlait pas deux points de vue de nature opposée et presque contradictoire : l’un, vraiment philosophique, qui ramène le beau à la part de généralité et de raison que contiennent les ouvrages d’esprit : l’autre, que je me permets d’appeler peu philosophique, et qui mesure la beauté et la vérité des écrits au degré de leur conformité avec les opinions moyennes, qui composent ce qu’on appelle à tort ou à raison le sens commun.

710. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre III : Concurrence vitale »

Grâce au combat perpétuel que tous les êtres vivants se livrent entre eux pour leurs moyens d’existence, toute variation, si légère qu’elle soit, et de quelque cause qu’elle procède, pourvu qu’elle soit en quelque degré avantageuse à l’individu dans lequel elle se produit en le favorisant dans ses relations complexes avec les autres êtres organisés ou inorganiques, tend à la conservation de cet individu et, le plus généralement, se transmet à sa postérité. […] Il en est de même si nous avançons vers le nord, mais en un degré un peu moindre : car le nombre total des espèces de toutes sortes, et par conséquent des concurrents, diminue quand la latitude s’élève.

711. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Saint-Simon »

On lui accordait, il est vrai, le génie du plus grand peintre d’histoire qu’ait eu la langue française, mais on avait toujours méconnu en lui le génie politique qu’il avait pourtant au même degré, mais qui, avec les vices et l’esprit de son temps, était resté et devait rester sans emploi. […] C’est tout cela enfin qui donne au Mémoire de Saint-Simon un pathétique et une grandeur que je n’avais jamais vus au même degré, même dans lui, dans Saint-Simon !

712. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Ernest Hello » pp. 207-235

Dans les écrits que nous avons de lui, mêlés, à grandes doses, de lumière et d’ombre, sa supériorité n’existe pas toujours au même degré ; mais quand elle existe, elle est absolue, et nul, parmi les moralistes chrétiens qui retournent le cœur et l’esprit de l’homme dans leurs mains curieuses, n’a montré plus d’acuité que cet homme tyrannisé par ses facultés et préoccupé tellement de voir, que, pour lui, l’absence de seconde vue est le caractère irrémissible de ce qu’il haïssait le plus au monde, — la Médiocrité ! […] Seulement, comme ici le sujet change en tournant les pages et que toutes ces physionomies de Saints s’entresuivent, l’inconvénient de cette brièveté, de cette percussion d’une lumière incessante et interrompue, n’existe plus au même degré que dans l’Homme, où le sujet demeure immobile sous le regard du lecteur et la plume de l’écrivain qui doit le creuser.

713. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre v »

De degré en degré, nous nous sommes élevés ; ici la fraternité trouve spontanément son geste parfait : le vieux rabbin présentant au soldat qui meurt le signe immortel du Christ sur la croix, c’est une image qui ne périra pas.‌

714. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre III. “ Fantômes de vivants ” et “ recherche psychique ” »

Mais lorsque, suivant de haut en bas les manifestations de l’esprit, traversant la vie et la matière vivante, elle fût arrivée, de degré en degré, à la matière inerte, la science se serait arrêtée brusquement, surprise et désorientée.

715. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XX. Le Dante, poëte lyrique. »

Il avait, peut-être à un plus haut degré, les mêmes études de langue latine, de poésie provençale et de philosophie ; il composait une thèse sur la terre et l’eau considérées comme premiers éléments ; il était venu écouter dans Paris, rue du Fouarre, un grand maître de scolastique, et il avait lui-même discuté contre tout venant. […] Je ne m’étonnerais donc pas que le chef-d’œuvre de la poésie lyrique, l’hymne religieux, ou même l’ode philosophique au plus haut degré d’enthousiasme et de grandeur se retrouvât dans les chants de la Divine Comédie du Dante.

716. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XIX » pp. 76-83

C'est de mauvais goût de rappeler qu’un jour, au bal de la cour, invité par la duchesse de Berry à s’asseoir près d’elle sur une espèce de trône, il refusa humblement : On dit qu’un jour de bal, du temps de Charles dix, Sur les degrés du trône il s’arrêta jadis.

717. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXIX » pp. 117-125

Les ambitions sont excitées au plus haut degré, toutes les cupidités (irritamenta) fermentent.

718. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Bossuet. Œuvres complètes publiées d’après les imprimés et les manuscrits originaux, par M. Lachat. (suite et fin) »

Il s’épura par degrés et ne tarda pas à paraître dans toute sa magnificence : semblable à un fleuve qui en s’éloignant de sa source dépose peu à peu le limon qui troublait son eau, et devient aussi limpide vers le milieu de son cours qu’il est profond et majestueux.

719. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « [Addenda] »

On avait en main désormais un instrument précis pour mesurer le degré de l’artifice.

720. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Sur l’École française d’Athènes »

Celle-ci pourtant n’est pas là à ce degré de pureté et de simplicité première qui constitue la perfection classique ; cette perfection sans trace d’effort et sans surcharge aucune, il faut la chercher sous le ciel d’Athènes, dans la beauté idéale et légère des temples, dans l’admirable et discret accord des lignes monumentales avec les lignes naturelles du paysage et des horizons.

721. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre V. Figures de construction et figures de pensées. — Alliances de mots et antithèses »

On comprendra aisément que l’emploi en est délicat, puisqu’il faut que le lecteur soit en état d’ajouter et de retrancher, en qualité et en quantité, au sens rigoureux des mots, précisément ce qui leur manque pour équivaloir à la pensée de l’écrivain, dont il n’a point de connaissance directe, et dont il faut lui faire deviner le degré précis et la nuance exacte.

722. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « George Sand. »

Elle eut, à un degré éminent, toutes les vertus de l’honnête homme !

723. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Laurent Tailhade à l’hôpital » pp. 168-177

Laurent Tailhade à l’hôpital C’est à visiter les poètes que j’ai connu tous les hôpitaux de Paris : Laennec avec ses toits de prieuré, sa façade d’ancienne abbaye ; Broussais, qui semble, bâti sur pilotis, une bourgade de l’époque lacustre ; Necker aux murs nus et froids de caserne, mais où chante dans la cour une éternelle eau plaintive ; Saint-Louis, dont les tourelles Louis XIII pointent si joliment derrière les feuillages de l’avenue ; l’Hôtel-Dieu, qui ordonne parmi les colonnades et les degrés de pierre, la pompe païenne d’un décor antique… C’est précisément à l’Hôtel-Dieu que je viens de voir Laurent Tailhade, à peine remis d’une douloureuse et grave opération.

724. (1890) L’avenir de la science « VII »

Il y a, je le sais, dans la curiosité des degrés divers ; il y a loin de cet instinct mesquin de collection, qui diffère à peine de l’attachement de l’enfant pour ses jouets, à cette forme plus élevée, où elle devient amour de savoir, c’est-à-dire instinct légitime de la nature humaine et peut constituer une très noble existence.

725. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 372-383

Je déteste un traité dogmatique Qui m’avilit, qui m’ôte tout espoir, Et qui sur-tout veut me faire entrevoir Que la vertu, l’honneur sont des chimeres, Fantômes vains, foiblesses de nos peres, Liens adroits, dont la Société A par degrés connu l’utilité.

726. (1888) La critique scientifique « Appendice — Plan d’une étude complète d’esthopsychologie »

5° Par le caractère exagérant des mots, c’est-à-dire par le fait que le mot contient les caractères principaux d’une classe de choses portés à leur plus haut degré : L’effet exaltant.

727. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Dédicace, préface et poème liminaire de « La Légende des siècles » (1859) — La vision d’où est sorti ce livre (1857) »

Blanchissant par degrés sur l’horizon lointain, Cette vision sombre, abrégé noir du monde, Allait s’évanouir dans une aube profonde, Et, commencée en nuit, finissait en lueur.

728. (1867) Le cerveau et la pensée « Avant-propos »

Enfin un excellent musicien ayant un excellent instrument atteindra au plus haut degré de l’exécution musicale.

729. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre VIII. La religion chrétienne considérée elle-même comme passion. »

Corneille, qui se connaissait si bien en sublime, a senti que l’amour pour la religion pouvait s’élever au dernier degré d’enthousiasme, puisque le chrétien aime Dieu comme sa souveraine beauté, et le Ciel comme sa patrie.

730. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre second. Philosophie. — Chapitre VI. Suite des Moralistes. »

C’est le même Pascal qui a dit encore : « Trois degrés d’élévation du pôle renversent toute la jurisprudence.

731. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 2, de l’attrait des spectacles propres à exciter en nous une grande émotion. Des gladiateurs » pp. 12-24

Les vierges vestales avoient leur place marquée sur le premier degré de l’amphithéatre dans les tems de la plus grande politesse des romains, et quand un homme passoit pour barbare, s’il faisoit marquer d’un fer chaud son esclave qui avoit volé le linge de table, crime pour lequel les loix condamnent à mort dans la plûpart des païs chrétiens, nos domestiques qui sont des hommes d’une condition libre.

732. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Wallon »

Il en fait tour à tour le plus grand poète et le plus pathétique vulgarisateur de choses abstraites qui ait jamais existé Cette faculté d’assimilation, ou d’imprégnation, qui est à un degré si déplorable dans Cousin, — et qui le transforme tour à tour en éponge qui boit tout ou en cuvette dans laquelle on mêle tout, idées et systèmes, — cette faculté d’être un Grec, deux Écossais, trois Allemands à la fois, et de ne pouvoir parvenir à être un homme, exalte l’admiration effrayante de Wallon et lui inspire ces incroyables arabesques de louanges et ces perfides lacs d’amour de l’éloge qu’il trace autour de son nom… C’est là ce qui lui fait verser sur cette grande tête, dévouée aux… flatteries, assez de couronnes pour l’accabler.

733. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — III »

On n’y trouve point le degré de perfection où M. 

734. (1878) La poésie scientifique au XIXe siècle. Revue des deux mondes pp. 511-537

Tout le monde est d’accord sur ce point, que l’exemple de Lucrèce ne résout rien ; à ce degré de la science naissante qui n’était encore qu’un amas d’hypothèses et où la formule exacte des lois n’était ni trouvée ni pressentie, le mélange, l’union était possible : la science n’était à ce moment qu’une sorte de poésie abstraite. […] Arrivée à un certain âge, à un certain degré de complication, la science échappe au poète ; le rythme devient impuissant à enserrer la formule et à appliquer les lois. […] Il est bien vrai qu’au degré de complication et de rigueur où la science est arrivée, la formule de ses lois, qui n’admet plus d’à peu près, échappe au rythme et à la langue poétique.

735. (1903) Hommes et idées du XIXe siècle

Le fait est que Chateaubriand n’est qu’un poète ; Mme de Staël a, au plus haut degré, les facultés qu’exige l’action. […] Il a, mais à un degré extraordinaire, la sensation de tout cet inconnu qui nous entoure, et il en a l’effroi. […] Il n’était pas l’un des plus profonds parmi les « écrivains penseurs » de son temps, il n’était à aucun degré un « écrivain artiste », et pourtant c’est l’un de ceux dont l’influence a été le plus réelle. […] Après quoi ce n’est pas à lui, c’est à une autorité supérieure qu’il importe de décider du degré de vérité auquel il aura pu atteindre. […] Pasteur ne se distingue du commun des hommes que parce qu’il porte à un plus haut degré les qualités d’honnêteté, de droiture, de conscience scrupuleuse, de volonté tenace, de saine et d’harmonieuse raison.

736. (1925) Promenades philosophiques. Troisième série

Il en est de même, à un degré moindre, des racines floconneuses du pas-de-lion. […] « Entre ces deux degrés extrêmes, dit M.  […] Le jeu est partout et comporte tous les degrés. […] Il n’y a pas de douleur, il y a des êtres qui la ressentent à des degrés divers. […] C’est logique, mais à quel degré de l’échelle faut-il placer le chiffre maximum de la sensibilité ?

737. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre II. Le Roman (suite). Thackeray. »

Un degré ajouté à l’ironie sérieuse produit la caricature sérieuse. […] Comptez les détails de mœurs, de géographie, de chronologie, de cuisine, la désignation mathématique de chaque objet, de chaque personne et de chaque geste, la lucidité d’imagination, la profusion de vérités locales ; vous comprendrez pourquoi sa moquerie vous frappe d’une impression si originale et si poignante, et vous y retrouverez le même degré d’étude et la même énergie d’attention que dans les ironies et dans les exagérations précédentes : son enjouement est aussi réfléchi et aussi fort que sa haine ; il a changé d’attitude, il n’a point changé de faculté. […] Nous le pouvons en ce moment ; nous venons d’étudier un esprit, Thackeray lui-même ; nous avons considéré ses facultés, leurs liaisons, leurs suites, leur degré ; nous avons sous les yeux un exemplaire de la nature humaine. […] Notre véritable essence consiste dans les causes de nos qualités bonnes ou mauvaises, et ces causes se trouvent dans le tempérament, dans l’espèce et le degré d’imagination, dans la quantité et la vélocité de l’attention, dans la grandeur et la direction des passions primitives. […] Vous trouverez le même défaut dans leur critique toujours morale, jamais psychologique, occupée à mesurer exactement le degré d’honnêteté des hommes, ignorant le mécanisme de nos sentiments et de nos facultés ; vous trouverez le même défaut dans leur religion, qui n’est qu’une émotion ou une discipline, dans leur philosophie, vide de métaphysique, et si vous remontez à la source, selon la règle qui fait dériver les vices des vertus et les vertus des vices, vous verrez toutes ces faiblesses dériver de leur énergie native, de leur éducation pratique et de cette sorte d’instinct poétique religieux et sévère qui les a faits jadis protestants et puritains.

738. (1905) Études et portraits. Sociologie et littérature. Tome 3.

Suë et Hugo ne le possèdent à aucun degré, au lieu qu’il s’unit chez Zola aux plus hardies facultés de visionnaire et d’écrivain. […] En outre, si la volonté précède la pensée, elle la dépasse aussi, et c’est l’intuition, sorte d’inconscience d’un autre degré. […] Elle doit enfin convenir à des âmes parvenues au plus haut degré d’intuition, puisque ce stade supérieur de la vie psychique n’est que le terme des deux autres. […] Nous entendons que cet enfant, si bas placé soit-il par sa condition, ne reçoive pas une instruction différente en essence de celle du petit bourgeois ou du petit noble, Cette instruction ne sera différente qu’en degré. […] Sur ces trois exemples, comme sur celui de Pasteur et de Guizot, je pourrais vous répondre aussi que le talent, quand il est d’un certain degré, échappe aux lois générales.

739. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome II

Que ces deux phénomènes, d’un caractère ethnique à ce degré, se soient déclenchés sous l’influence déterminante d’une doctrine élaborée dans la banlieue parisienne par un solitaire qui n’a jamais agi, c’est une aventure qui dénonce, dit encore M.  […] Ils n’ont pas su défendre la civilisation dont ils étaient les bénéficiaires, mais l’auraient-ils pu, étant donné que, degré par degré, de la Restauration à la monarchie de Juillet, puis de cette Monarchie à l’Empire, la démocratie grandissante n’a cessé de cerner toutes les supériorités de naissance et de fortune, pour leur interdire de s’employer au service de la communauté ? […] Feuillet eut d’ailleurs, au suprême degré, le don d’animer des créatures féminines d’une délicatesse d’autant plus prenante qu’elles sont réelles, plus mêlées au quotidien de l’existence mondaine et sachant y garder un sanctuaire de mysticisme intérieur qui les défend et les ennoblit. […] C’est le premier degré du travail utile, cette intelligence ; le second, c’est la volonté de conformer son acte à cette vérité, c’est la décision suivant la réflexion, et le voilà cet accord des deux vertus dont vous nous donnez le modèle chaque jour. […] Il la distinguait, cette psychiatrie, de la neurologie qu’il connaissait très bien, mais qui ne l’intéressait pas au même degré que cette recherche des phénomènes psychopatiques, leur conditionnement, leur évolution, leurs différences d’espèces.

740. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre IV. La philosophie et l’histoire. Carlyle. »

Voilà la grande particularité, l’incommensurable, —  celle qui distingue à un degré effectivement infini le plus pauvre fait historique de toute espèce de fiction quelle qu’elle soit. […] Nulle nation et nul âge ne l’a possédée à un si haut degré que ces Allemands. […] Ajoutez un degré à votre imagination et à votre enthousiasme, vous direz que cet esprit, situé hors du temps et de l’espace, se manifeste par le temps et par l’espace, qu’il subsiste en toute chose, qu’il anime toute chose, que nous avons en lui le mouvement, l’être et la vie. […] Vous voyez à quel degré et avec quel excès Carlyle a le sentiment germanique, pourquoi il aime les mystiques, les humoristes, les prophètes, les écrivains illettrés et hommes d’action, les poëtes primesautiers, tous ceux qui violentent la beauté régulière par ignorance, par brutalité, par folie ou de parti pris. […] Quel est ce sentiment, comment il se lie aux autres, quel est son degré, sa source, son effet, comment il transforme l’imagination, l’entendement, les inclinations ordinaires, quelles passions l’alimentent, quelle proportion de folie et de raison il renferme, ce sont là les questions capitales.

741. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Étienne de La Boétie. L’ami de Montaigne. » pp. 140-161

Ainsi, il proclame hardiment cet homme de mérite mort à trente-deux ans, et qui n’avait été promu qu’à des charges locales et aux dignités de son quartier, il le proclame le plus grand homme, à son avis, de tout le siècle : il a connu, dit-il, bien des hommes qui ont de belles parties diverses, l’un l’esprit, l’autre le cœur, tel la conscience, tel autre la parole, celui-ci une science, celui-là une autre ; « mais de grand homme en général et ayant tant de belles pièces ensemble, ou une en tel degré d’excellence qu’on le doive admirer ou le comparer à ceux que nous honorons du temps passé, ma fortune ne m’en a fait voir nul40 ; et le plus grand que j’aie connu au vif, je dis des parties naturelles de l’âme, et le mieux né, c’était Étienne de La Boétie. […] Il y a toujours un degré de vivacité qui ne se trouve point entre les personnes du même sexe ; de plus, les défauts qui désunissent, comme l’envie et la concurrence, de quelque nature que ce soit, ne se trouvent point dans ces sortes de liaisons.

742. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sénac de Meilhan. — II. (Fin.) » pp. 109-130

L’espérance ou la crainte, excitées par les gestes et les mouvements d’une multitude agitée, pressaient de tous côtés l’âme et l’esprit, les élevaient au dernier degré de puissance et d’expression. […] L’homme n’a qu’une mesure de sensibilité, et son langage qu’un degré d’énergie ; son cœur est-il oppressé par le poids accablant d’un sentiment profond, son imagination ravagée par des spectacles d’horreur multipliés, il désespère d’y proportionner son langage ; et un geste, un regard, un morne silence lui tiennent lieu alors de paroles et sont plus expressifs.

743. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — II » pp. 112-130

Joignant à cela une grande application, qui amène nécessairement quelque intelligence, il est impossible qu’on ne soit pas recherché de degrés en degrés pour les premiers emplois, car on a besoin de vous.

744. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — III » pp. 81-102

Il serait pénible de discuter le degré des torts de Villars sur une matière aussi délicate que celle des deniers provenant des contributions forcées, et il serait certainement difficile de le justifier. […] Il analyse très bien le fanatisme à ses divers degrés, et distingue le véritable du faux.

745. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite.) »

Un jour, après juillet 1830, comme il en était venu à un degré de gêne extrême ou plutôt de détresse qui sautait aux yeux, et qui s’accusait même d’une façon cynique, un de ses amis lui dit : « Que n’écris-tu ce que tu dis tout le long du jour ? […] Horace Vernet aimait que ce fût une convention le moins possible, que le convenu ne s’y aperçût qu’au moindre degré.

746. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Don Carlos et Philippe II par M. Gachard Don Carlos et Philippe II par M. Charles de Mouy »

comme ils ne sont pas nés dans les hauteurs métaphysiques de l’âme et descendus par degrés des nuages de la pensée ! […] Ce portrait, qui se compose tout entier de mots et de traits originaux rapportés, me donne au plus haut degré le sentiment de la vérité et de l’équité historique, et ceux qui ont une fois goûté à ce genre sobre et sain sont guéris à jamais du clinquant, du flambant, du faux enthousiaste, du faux pittoresque, du faux lyrique.

747. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid (suite.) »

Et puis, à notre point de vue dramatique, le dialogue et le duel de paroles à deux se détache mieux ainsi ; la querelle est mieux tranchée ; on n’arrive que par degrés à l’extrême insulte. […] Mais ne voyez-vous pas comme chaque peuple apporte aux représentations de la scène un degré de dureté ou de susceptibilité qui répond à son genre de tournoi national et qui peut se mesurer au caractère de ses jeux favoris ?

748. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. » p. 232

Ces noms se rencontrent plus d’une fois, et à des degrés différents, dans la correspondance. […] Quand on écrit la biographie de certains poètes, on peut dire que l’on montre l’envers de leur poésie ; il y a disparate de ton : ici, dans cette longue odyssée domestique, on a simplement vu le fond même et l’étoffe dont la poésie de Mme Valmore est faite, et à quel degré, dans cette vie d’oiseau perpétuellement sur la branche, — sur une branche sèche et dépouillée, — près de son nid en deuil, toute pareille à la Philomèle de Virgile, elle a été un chantre sincère.

749. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine »

Les poëtes et artistes, s’inspirant moins à la source de toute vie et de toute création, déchurent du premier rang où ils siégeaient dans la personne de Dante, et la plupart finirent par retomber à ce sixième degré où Platon les avait relégués au bas de l’échelle des âmes, un peu au-dessus des ouvriers et des laboureurs. […] Là, l’élégie, la scène circonscrite, la particularité individuelle, n’existent presque plus ; je n’entends qu’une voix générale qui chante pour toutes les âmes encore empreintes, à quelque degré, de christianisme.

750. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo en 1831 »

Amour, politique, indépendance, chevalerie et religion, pauvreté et gloire, étude opiniâtre, lutte contre le sort en vertu d’une volonté de fer, tout en lui apparut et grandit à la fois à ce degré de hauteur qui constitue le génie. […] Chaque degré vers le temple a son autel, et quelquefois double ; chaque année dans ses domaines a plus d’une moisson.

751. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. EUGÈNE SCRIBE (Le Verre d’eau.) » pp. 118-145

au degré de mérite qu’ils vous supposent. […] Il ne faut peut-être pas lui en faire trop d’honneur : il y a un certain degré de fécondité heureuse qui ne permet pas de s’inquiéter des critiques et des aiguillons du dehors.

752. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. CHARLES MAGNIN (Causeries et Méditations historiques et littéraires.) » pp. 387-414

Il y a pourtant à ajouter, et ils le savent, que, sans viser à aucune gloire ni même à ce sceptre du genre qui a toujours plus ou moins l’air d’une férule, il est aussi un degré d’estime très-sûr qu’on parvient peu à peu à obtenir, et qui se perpétue. […] Tout en respectant du mieux possible les portions sacrées, on a fait sauter plus d’un degré du temple, plus d’une colonne du vestibule.

753. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE PONTIVY » pp. 492-514

La souffrance de Mme de Pontivy se changea par degrés en une délicieuse rêverie qui elle-même, à la fin, disparut dans une joie charmante. […] Je veux remonter en vous pas à pas les degrés de mon trône.

754. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Le comte de Ségur »

Effacé à son arrivée par les ministres d’Angleterre et d’Allemagne, il n’avait dû qu’à lui-même, à cet heureux accord de décision et de bonne grâce qui ne se rencontre qu’aux meilleurs moments, de se conquérir de plain-pied une considération dont l’effet s’étendit par degrés jusque sur ses démarches politiques. […] Est-ce avant, est-ce après ce voyage, qu’il eut à poser lui-même une limite dans les degrés de cette faveur personnelle qu’il avait ambitionnée auprès de l’illustre souveraine, faveur précieuse et qu’il ne voulait pourtant pas épuiser ?

755. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIIe entretien. Fénelon, (suite) »

Dans ce livre était une terrible accusation : il la réservait pour l’époque où le duc de Bourgogne atteindrait à la maturité des années et s’approcherait des degrés du trône. […] Les courtisans qui ne voyaient plus de degrés entre le trône et le duc de Bourgogne, commencèrent à tourner leurs regards vers celui-ci, et à apercevoir de nouveau Fénelon devant lui.

756. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre II. Corneille »

Elle reste « la volonté », admirable par le degré d’intensité, abstraction faite de la qualité, de la forme des actes. […] La mécanique et le style Si la psychologie de Corneille n’est pas dramatique, cela n’empêche point que peu de gens aient eu à un plus haut degré le sens du théâtre : car il a admirablement masqué, ou mieux, admirablement utilisé sa psychologie.

757. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Octave Feuillet »

Faculté bienfaisante ou funeste, selon les cas, mais plutôt bienfaisante si elle est portée à un tel degré que nulle expérience ne la décourage — ou si elle est tempérée par assez de bon sens et par assez de nécessités matérielles pour qu’on ne lui lâche la bride qu’à bon escient et en manière de divertissement passager. […] Par deux fois il est amoureux, je dis follement amoureux, et ce n’est guère le fait d’un homme qui vit les yeux fixés sur le féroce testament de son père et que l’exercice de l’esprit critique, le détachement supérieur et le scepticisme transcendental auraient dû empêcher d’aimer de cette façon et à ce degré.

758. (1890) L’avenir de la science « II »

Bien que ce premier degré de conscience soit un immense progrès, l’état qui en est résulté a pu sembler par quelques faces inférieur à celui qui avait précédé, et les ennemis de l’humanité ont pu en tirer avantage pour combattre avec quelque apparence plausible le dogme du progrès 24. […] C’est une raison pour pousser à bout la réflexion, en se tenant assuré que la réflexion parfaite reproduira les mêmes œuvres, mais avec un degré supérieur de clarté et de raison.

759. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — CHAPITRE XIV »

N’exagérez pas la vertu ; à ce degré d’excentricité, elle devient presque ridicule. […] Trahir, en quelques heures, son bienfaiteur et son maître, lorsqu’il vient d’être si solennellement averti, lorsqu’on lui a montré la queue de la sirène, les griffes du vampire, c’est descendre un peu brusquement les degrés du mal.

760. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Mme de Caylus et de ce qu’on appelle Urbanité. » pp. 56-77

Elle n’avait qu’un défaut, c’était de faire trop bien, de trop aller au cœur par certains accents : « On continue à représenter Esther, écrivait Mme de Sévigné à sa fille (11 février 1689) : Mme de Caylus, qui en était la Champmeslé, ne joue plus ; elle faisait trop bien, elle était trop touchante : on ne veut que la simplicité toute pure de ces petites âmes innocentes. » Mme de Caylus passe pour avoir été la dernière personne, la dernière actrice qui ait conservé la déclamation pure de Racine, le degré de cadence et de chant qui convenait à ce vers mélodieux, tout fait exprès pour l’organe d’une Caylus ou d’une La Vallière. […] Il est vrai que Mme de Caylus est si parfaite, si respectueuse à la fois et si familière ; elle sait si bien la mesure qu’il faut garder en lui écrivant, le degré d’information qu’il faut tenir, les tristes nouvelles du monde, les vérités fâcheuses qu’il ne faut pas lui cacher, et celles sur lesquelles il est inutile de s’étendre ; elle sait si bien être sérieuse en courant : « Je ne vous dis rien de la beauté de vos lettres, lui écrivait Mme de Maintenon(1716) ; je vous paraîtrais flatteuse, et, à mon âge, il ne faut pas changer de caractère. » On prendrait pourtant de Mme de Caylus, si l’on s’en tenait à ses lettres, une idée un peu trop sérieuse.

/ 1943