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1612. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 48-49

CORNEILLE, [Thomas] Frere de Pierre, de l’Académie Françoise & de celle des Inscriptions, à Rouen en 1625, mort à Andely en 1709.

1613. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 60-61

COTIN, [Charles] Abbé, de l’Académie Françoise, à Paris, mort dans la même ville en 1682.

1614. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 294-295

FEUTRY, [Amé-Ambroise-Joseph] Avocat au Parlement de Douai, à Lille en Flandres, en 1720.

1615. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 363-365

GAILLARD, [Gabriel-Henri] Avocat au Parlement, de l’Académie Françoise & de celle des Inscriptions, à Soissons en 17.., Littérateur moins célebre que plusieurs de ses Confreres de l’Académie, quoiqu’il leur soit supérieur, à bien des égards, par ses talens & le mérite de quelques-uns de ses Ouvrages, ce qui ne suppose pas qu’ils soient excellens.

1616. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 421-422

GOMBERVILLE, [Marin le Roi, sieur de] de l’Académie Françoise, dans le Diocese de Paris en 1600, mort en 1674.

1617. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 461-462

GUENEBAULD, [Jean] Médecin, à Dijon, mort dans la même ville en 1630.

1618. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 463-464

GUENÉE, [Antoine] Abbé, ci-devant Professeur de Rhétorique au Collége du Plessis, dans le Diocese de Sens, est principalement connu par un Ouvrage intitulé,Lettres de quelques Juifs Portugais & Allemands à M. de Voltaire, où l’on venge la Nation Juive des calomnies de cet Ecrivain.

1619. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — J. — article » pp. 527-528

JAUCOURT, [Louis, Chevalier de] de la Société Royale de Londres, des Académies de Berlin, Stockholm, Bordeaux, &c. en 17..

1620. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 16-17

LADVOCAT, [Jean-Baptiste] Docteur, Bibliothécaire & Professeur de Sorbonne, à Vaucouleurs, dans le Diocese de Toul, en 1709, mort à Paris en 1765.

1621. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 52-53

LAINEZ, [Alexandre] à Chimai en Hainault en 1650, mort à Paris en 1710.

1622. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 92-93

LATTAIGNANT, [Gabriel-Charles de] Chanoine de Reims, à Paris au commencement de ce siecle, mort dans la même ville en 1778.

1623. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 126-127

LENFANT, [Jacques] Ministre Protestant, dans la Beauce, en 1661, mort en 1728.

1624. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 156-157

LONGUEVAL, [Jacques] Jésuite, près de Péronne en 1680, mort à Paris en 1735.

1625. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 232-233

MAROT, [Clément] à Cahors en 1495, mort à Turin en 1544 ; le plus ancien des Poëtes François, dont la lecture soit capable de procurer encore quelque plaisir.

1626. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 283-284

MÉHÉGAN, [Guillaume-Alexandre de] à la Salle en Cevennes, en 1721, mort en 1766.

1627. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 295-296

MERCIER, [Louis-Sébastien] à Paris en 1740.

1628. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — N. — article » pp. 405-406

NICÉRON, [Jean-Pierre] Barnabite, à Paris en 1645, mort dans la même ville en 1738.

1629. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 487-488

PERNETY, [Jacques] Abbé, Historiographe de la ville de Lyon, & Membre de l’Académie de cette ville, dans le Forez, mort en 1777, âgé de 81 ans.

1630. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 105-106

Robinet, [Jean-Baptiste] Censeur Royal, à Rennes en 1735.

1631. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 130-131

Rotrou, [Jean] à Dreux en 1609, mort dans la même ville en 1650, le meilleur, après Corneille, des cinq Poëtes choisis par le Cardinal de Richelieu, pour exécuter les sujets de Tragédie ou de Comédie que ce Ministre leur fournissoit lui-même.

1632. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 159-160

Michel, de l’Académie des Inscriptions, à Paris en 1683, mort en 1763 ; Poëte de nos jours qui a eu du succès à l'Opéra, ce qui suppose dans lui un certain degré de talent.

1633. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » p. 225

de Galtier de] Avocat au Parlement de Paris, à S.

1634. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 357-358

Touche, [Claude Guymond de la] en 1726, mort à Paris en 1760.

1635. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 384-385

Tresseol, [Pierre-Ignace de] ci-devant Professeur d’Histoire à l’Ecole Militaire, à Avignon en 1742.

1636. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 415-416

Vaugelas, [Claude Favre, Seigneur de] de l'Académie Françoise, à Bourg-en-Bresse, en 1545, mort en 1650.

1637. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XIII » pp. 109-125

Au contraire, les lettres qui nous manquent nous montreraient madame de Sévigné livrée à elle-même, jetant ses premiers regards sur la société, sur ses connaissances, sur ses amis ; réglant son esprit à mesure qu’il se développe, sa conduite, à mesure qu’elle avance entre les écueils du grand monde ; répandant l’admiration, faisant naître l’amour dans tout ce qui l’entoure, et restant attentive et vigilante sur elle-même. […] Madame Cornuel, née en 1609, en 1650 avait quarante-un ans.

1638. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean-Baptiste Rousseau, et Joseph Saurin. » pp. 28-46

De la discorde naquirent des animosités durables, & bientôt des crimes. […] Ce poëte, si fameux par ses talens & par ses malheurs, naquit à Paris en 1669.

1639. (1889) La critique scientifique. Revue philosophique pp. 83-89

Mais une fois le génie , développé, productif, commence un jeu d’attractions et de répulsions qui nous est accessible. […] Tarde une généralisation plus haute encore ; on pourra remarquer que tous ces principes de ressemblance, de l’hérédité à l’adhésion, sont des ressemblances actives, des ressemblances de force, des ressemblances de vibration ; le type de tout le développement animal, humain et social, sera donc la vibration et la consonance qui, l’une, naît, l’autre, répète et perpétue. » Je note, sans la discuter (on ne peut le faire en quelques lignes), cette idée maîtresse de l’ouvrage.

1640. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Si j’avais une fille à marier ! » pp. 215-228

Et voici Alexandre Weill, qui n’est pas Allemand, mais qui ne doit pas être très loin de l’Allemagne si j’en crois certains reflets gardés sur sa pensée, qui pense à son tour qu’en disant sans biaiser à mademoiselle sa fille ses idées, à lui, sur les femmes et sur le gendre qui doit lui agréer, il trouvera ce merle blanc, comme il l’appelle, qui n’est blanc souvent que parce qu’il s’est fourré de la poudre de riz quand il allait faire la cour à sa femme, mais qui finit toujours par redevenir l’autre merle que nous connaissons. […] qu’un être qui l’a formé, qui l’a nourri de son sang, sa mère, ou bien qu’un être de ses entrailles, sa fille, lui soit inférieur. » On pourrait peut-être rétorquer à Weill le sang et les entrailles de sa phrase, et lui demander de quoi donc il est infatué, lui qui reproche à l’homme l’infatuation de son sexe ?

1641. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVII. Mémoires du duc de Luynes, publiés par MM. Dussieux et Soulier » pp. 355-368

Voulez-vous la preuve de cette honnêteté, compromise par le rire qu’elle fait naître ? […] Et si nous disons, nous, chrétiens, qu’un jour nous aurons à répondre devant Dieu de nos actions et paroles oiseuses, nous demandons ce que ceux-là qui étaient nés et faits pour gouverner les hommes et qui passèrent ainsi toute leur vie dans des méditations ou des souvenirs de maîtres à danser, répondront, en attendant le jugement de Dieu, devant l’histoire… ?

1642. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Byron »

Il n’est pas . […] Pour qu’il naquît, il fallait que son génie rencontrât le génie grec qu’il n’avait pas trouvé à Harrow, où il n’étudia point, par cet esprit de contradiction et de paresse qui est souvent l’esprit des gens de génie.

1643. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Alfred de Musset »

Demain, la Postérité s’en va naître, la Postérité qui n’entendra rien aux considérations et aux discrétions d’un monde éphémère, la Postérité qui sait que tout grand poète ressort de l’histoire, et, par conséquent, doit apparaître dans l’histoire avec le cortège de toute sa vie. […] dans les premières années du siècle, quand le canon de Wagram fêtait le baptême de ceux-là qui pouvaient avoir l’espérance de mourir un jour en héros, et qui, l’Empire tombé, ne surent que faire de la vie, Alfred de Musset se jeta aux coupes et aux femmes de l’orgie comme il se serait jeté sur une épée si on lui en eût offert une, et il a peint cette situation dans les premières pages qui ouvrent les Confessions d’un enfant du siècle, avec une mélancolie si guerrière !

1644. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Alfred de Vigny »

En vain, les femmes, ces flatteuses nées de tous les poètes, ont-elles appelé Alfred de Vigny le printemps éternel en voyant ses cheveux si longtemps d’un blond invincible, le poète d’Éloa n’a pas plus impunément vieilli que nous tous. […] Eh bien, je dis que voilà un Alfred de Vigny nouveau, un Alfred de Vigny qui vient de naître, au bout de vingt ans de solitude et de silence, lequel, génie tendre, s’est élaboré douloureusement en génie stoïque contre l’incompréhensible et exécrable fatalité !

1645. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Jules Sandeau » pp. 77-90

Il n’était pas véritablement passionné ; du moins, la passion, qu’on ne tue point, quoique nous le disions, stupides vantards ! […] Jules Sandeau ricane comme un petit journal, au nez même des personnages qu’il met en scène, et, par là, tue l’émotion avant qu’elle soit née, en la tarissant dans sa source.

1646. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXX. De Fléchier. »

Ne pouvant encore s’autoriser contre l’usage, il fit connaître à ses amis qu’il allait à l’armée faire sa cour qu’il lui coûtait moins d’exposer sa vie que de dissimuler ses sentiments, et qu’il n’achèterait jamais ni de faveurs, ni de fortune aux dépens de sa probité. » Je pourrais encore citer d’autres endroits qui ont une beauté réelle ; mais le discours en général est au-dessous de son sujet ; on y trouve plus d’esprit que de force et de mouvement ; on s’attendait du moins à trouver quelques idées vraiment éloquentes sur l’éducation d’un dauphin, sur la nécessité de former une âme d’où peut naître un jour le bonheur et la gloire d’une nation ; sur l’art d’y faire germer les passions utiles, d’y étouffer les passions dangereuses, de lui inspirer de la sensibilité sans faiblesse, de la justice sans dureté, de l’élévation sans orgueil, de tirer parti de l’orgueil même quand il est , et d’en faire un instrument de grandeur ; sur l’art de créer une morale à un jeune prince et de lui apprendre à rougir ; sur l’art de graver dans son cœur ces trois mots, Dieu, l’univers et la postérité, pour que ces mots lui servent de frein quand il aura le malheur de pouvoir tout ; sur l’art de faire disparaître l’intervalle qui est entre les hommes ; de lui montrer à côté de l’inégalité de pouvoir, l’humiliante égalité d’imperfection et de faiblesse ; de l’instruire par ses erreurs, par ses besoins, par ses douleurs même ; de lui faire sentir la main de la nature qui le rabaisse et le tire vers les autres hommes, tandis que l’orgueil fait effort pour le relever et l’agrandir ; sur l’art de le rendre compatissant au milieu de tout ce qui étouffe la pitié, de transporter dans son âme des maux que ses sens n’éprouveront point, de suppléer au malheur qu’il aura de ne jamais sentir l’infortune ; de l’accoutumer à lier toujours ensemble l’idée du faste qui se montre, avec l’idée de la misère et de la honte qui sont au-delà et qui se cachent ; enfin, sur l’art plus difficile encore de fortifier toutes ces leçons contre le spectacle habituel de la grandeur, contre les hommages et des serviteurs et des courtisans, c’est-à-dire contre la bassesse muette et la bassesse plus dangereuse encore qui flatte.

1647. (1902) Le critique mort jeune

Faguet n’était point pour la spéculation hautaine et solitaire. […] « Les sectes, disait Voltaire, ne naissent que chez la canaille. » M.  […] Mais il n’est pas moraliste. […] Où sont les belles résolutions et les grands espoirs que fit naître, après la « Terre », le fameux manifeste du « Figaro » ? […] Camille Maugien, née dans une famille de parvenus — des parvenus au très petit pied — a vécu une enfance à peu près privée d’éducation morale.

1648. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 5482-9849

L’Eloquence, dit M. de Voltaire, est née avant les regles de la Rhétorique, comme les langues se sont formées avant la Grammaire. […] La raison en est qu’un principe, un sujet, une méthode, produisent des idées qui naissent les unes des autres comme des êtres successivement enfantés, ce qui a rapport à la génération. […] Elle est aujourd’hui certaine, de cette certitude qui naît de la disposition unanime de mille témoins oculaires de différentes nations, sans que personne ait réclamé contre leur témoignage. […] On n’ose exprimer ce qu’ils firent sur la peau du boeuf qu’Hirée leur avoit servi à manger ; ils couvrirent ensuite cette peau d’un peu de terre, & de-là naquit Orion au bout de neuf mois. […] Cette paix fut un bien qui naquit d’un mal de l’erreur même : car chaque nation reconnoissant plusieurs dieux inférieurs, trouvoit bon que ses voisins eussent aussi les leurs.

1649. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIIe entretien. Littérature politique. Machiavel » pp. 241-320

Il était à Florence d’une haute lignée étrusque et féodale, les Machiavelli. […] La littérature politique, illustrée en Grèce par Aristote, n’était pas née en Italie ; elle y naquit forte et souveraine avec Nicolas Machiavel. […] L’occasion ne peut rien sans l’homme, l’homme rien sans l’occasion ; c’est du mariage de la fortune avec le génie que naît la puissance ; sans cela, rien. […] « L’Italie antique est morte, disait-il, le jour où l’empire a été transporté à Constantinople ; la Rome des Césars est morte le jour où le christianisme est .

1650. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre VI. Bossuet et Bourdaloue »

Jacques-Bénigne Bossuet est à Dijon le 27 septembre 1627, d’une famille de magistrats provinciaux : il avait six ans quand son père fut nommé conseiller au Parlement de Metz. […] Il sentait monter la révolte du sens individuel contre l’Eglise : il la devinait de tous côtés, il voyait naître les germes de ce qui fera le caractère intellectuel du xviiie  siècle. […] Biographie : Antoine Lemaistre, neveu d’Arnauld d’Andilly et d’Antoine Arnauld, en 1608, se fit une grande réputation au barreau ; sa retraite à Port-Royal en 1638 fit grand bruit. Il mourut en 1638. — Olivier Patru, en 1604, mort en 1681, fut de l’Académie en 1640. […] à Bourges en 1633, Bourdaloue entre chez les Jésuites ; ses supérieurs l’appliquent à l’enseignement jusqu’en 1659 ; de 1659 à 1669 il prêche en province.

1651. (1831) Discours aux artistes. De la poésie de notre époque pp. 60-88

Les philosophes, disions-nous, ont engendré le doute ; les poètes en ont senti l’amertume fermenter dans leur cœur, et ils chantent le désespoir ; ils chantent, glorieux mais tristes, entre une tombe et un berceau, entre un ordre social qui achève de s’écrouler et un nouveau monde qui va naître : et nous leur reprochions de tenir plutôt les yeux tournés vers le passé que vers l’avenir. […] Voyez, le siècle débute par le Génie du Christianisme ; et à la suite de ce livre naît toute une génération d’auteurs qui vivent de son inspiration. […] Et voilà, pour le dire en passant, ce qui condamne la foule des imitateurs que Scott et Cooper ont trouvés, et qui, nés sur le sol volcanisé par les Philosophes, les Jacobins et Napoléon, ont eu la maladresse de vouloir contrefaire l’allure qui sied si bien à ces enfants de l’Amérique et de l’Écosse, peignant d’après nature et selon leur propre nature. […] Comment, nés dans le pays qui a produit la philosophie la plus audacieusement sceptique, et qui a presque entièrement accompli la destruction du Moyen-Âge social et religieux, ont-ils moins que ces fils de l’Angleterre et de l’Allemagne cette affreuse tristesse d’un rêve qui ne s’achève pas, et en même temps cette fierté de Satan et cette vie du désespoir, cette vitalité du poison, comme parle Byron2 ? […] C’est au contraire parce qu’ils sentaient profondément la ruine du monde social et religieux du Moyen-Âge, et parce que d’un autre côté ils ne pouvaient concevoir comment il naîtrait de cette ruine un monde nouveau à la fois social et religieux, qu’ils sont revenus vers le Christianisme.

1652. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre II. Le rôle de la morale » pp. 28-80

D’étranges compromis naissent et se multiplient. […] Ainsi naissent une « morale de la sympathie », une « morale de la justice », même une « morale de la concurrence », ainsi se dessinent des mouvements d’opinions comme le nationalisme et comme le pacifisme. […] Les circonstances qui nous font citoyen d’un pays, membre d’une famille, qui nous font naître catholique ou musulman, riche ou pauvre, vigoureux ou faible, enfin notre choix même sur un certain nombre de points, viendront ensuite compléter, préciser et développer ce premier système d’obligations. […] S’il ne crée pas tout à lui seul, il se sert de tout ce qui naît, de tout ce qui passe dans l’esprit. […] On comprend les luttes continuelles qui s’engagent, les associations qui se font et se défont, les synthèses qui naissent, se divisent, se développent, se désagrègent, meurent, cependant que leurs éléments s’engagent, plus ou moins transformés, en de nouvelles combinaisons.

1653. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 14 mars 1885. »

Voltaire écrivant à Cideville. « Quant à moi, ajoute Beaumarchais, qui suis très sensible aux charmes de la bonne musique, j’ai bien longtemps cherché pourquoi l’opéra m’ennuyait, malgré tant de soins et de frais employés à l’effet contraire ; et pourquoi tel morceau détaché qui me charmait au clavecin, reporté du pupitre au grand cadre, était près de me fatiguer s’il ne m’ennuyait pas d’abord ; et voici ce que j’ai cru voir. […] si l’on pouvait, s’écrie-t-il, couronner l’ouvrage d’une grande idée philosophique ; même en faire naître le sujet ! […] Aujourd’hui même et dans cette église aura lieu le concours de chant ; Walter, à ce mot, se sent naître à une vie nouvelle. […] Sachs, l’alène et le marteau à la main, s’interroge lui-même, comme s’il avait la vision d’un art nouveau tout prêt à naître. […] Wagner annonce la femme authentique (amante et mère), et ses noces avec le poète d’où naîtra le drame.

1654. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 269-271

Berardier de Bataut, [François-Joseph] Licencié en Théologie, Prieur-Commendataire de Notre-Dame de Serqueux, & ancien Professeur d’Eloquence dans l’Université de Paris, à Paris en 1720.

1655. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 472-473

Chapelain, [Jean] de l’Académie Françoise, à Paris en 1595, mort dans la même ville en 1674 ; Poëte justement estimé, tant qu’il se borna au genre qui lui convenoit.

1656. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 490-491

Chaulieu, [Guillaume Anfrie de] Abbé d’Aumale, au Château de Fontenai, dans le Vexin-Normand, en 1639, mort à Paris en 1720.

1657. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 74-75

] Abbé, des Académies de Nancy, de Rome & de Londres, à Baume-les-Nones, dans la Franche-Comté, en 17..

1658. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 80-81

CRÉBILLON, [Claude-Prosper Jolyot de] fils du précédent, à Paris en 1707, mort dans la même ville en 1777.

1659. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 208-209

DUFRESNOY, [Charles-Alphonse] à Paris en 1611.

1660. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 18-19

LAFARE, [Charles-Auguste, Marquis de] Capitaine des Gardes de Monsieur, puis du Duc d’Orléans, Bégent, dans le Vivarais en 1644, mort en 1712.

1661. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 230-231

MAROLLES, [Michel de] Abbé de Villeloin, en 1600, mort à Paris en 1681 ; Traducteur peu estimé, mais digne d’éloge à beaucoup d’égards.

1662. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — N. — article » pp. 403-404

NEUVILLE, [Charles Frey de] Jésuite, à Vitré en Bretagne, en 1693, mort à St.

1663. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — O. — article » pp. 427-428

OLIVET, [Joseph Thoulier d’] Abbé, de l’Académie Françoise, à Salins en 1682, mort à Paris en 1768.

1664. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 523-524

PITHOU, [Pierre] à Troies en Champagne en 1539, mort à Nogent-sur-Seine en 1596 ; célebre Jurisconsulte, dont l’éloquence & les grandes lumieres furent également utiles aux Citoyens & à l’Etat.

1665. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — Q. — article » pp. 570-571

QUILLET, [Claude] à Chinon en Touraine en 1602, mort à Paris en 1661.

1666. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 120-121

Rollin, [Charles] Recteur de l'Université, Professeur d'Eloquence au Collége Royal, de l'Académie des Inscriptions, à Paris en 1661, mort dans la même ville en 1741 ; le plus grand Littérateur, & un des meilleurs Ecrivains qu'ait produits l'Université.

1667. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 271-272

Sédaine, [Michel-Jean] de l'Académie d'Auxerre, en 17..

1668. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 282-284

Serre, [Jean Puget de la] à Toulouse vers l'an 1600, mort en 1666.

1669. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 362-363

Tourneur, [Pierre le] Censeur Royal, & ancien Secrétaire général de la Librairie, à Valognes en 17..

1670. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre II. Dryden. »

Pour qu’une belle poésie naisse, il faut qu’une race rencontre son siècle. […] Il ne lui a manqué que de naître cent ans plus tôt. […] Les scrupules modernes n’étaient pas nés. […] Les noms de whigs et de tories venaient de naître, et les plus hauts débats de philosophie politique s’agitaient, nourris par le sentiment d’intérêts présents et pratiques, aigris par la rancune de passions anciennes et blessées. […] Un nouvel esprit naissait et renouvelait l’art avec le reste ; désormais et pour un siècle, les idées s’engendrent et s’ordonnent par une loi différente de celle qui jusqu’alors les a formées.

1671. (1848) Études critiques (1844-1848) pp. 8-146

Que signifierait ce format en trois volumes, et ces chapitres coupés à des intervalles significatifs, et ces nombreuses conclusions partielles nées de la poétique imposée par les circonstances, aux productions destinées à paraître par fragments quotidiens ? […] Pourtant si ces inventions n’avaient animé qu’un livre ou deux, traversé qu’un drame, on pourrait les accepter, cela ne fait pas de doute ; il serait injuste de les dépouiller de toute valeur et leur premier aspect fait certainement naître de l’intérêt. […] En vérité cette méthode peut produire quelques petits résultats, mais il faut convenir que bien restreinte dans ses ressources, elle n’est pas non plus sans faire naître les opinions les plus monstrueuses. […] Et enfin Octave, cet homme sans courage, énervé dès longtemps par la plus complète fainéantise, ne saurait réussir à faire naître la sympathie, car il n’y a pas trace dans cette âme d’un sentiment tant soit peu élevé. […] On lui a voulu un mal de mort de ce latin ; ce latin-là a fait naître plus de colères, certes, qu’il ne valait.

1672. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 193-194

Baillet, [Adrien] dans un village voisin de Beauvais, en 1649, mort à Paris en 1706, est un des Auteurs que les Encyclopédistes ont mis le plus à contribution.

1673. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 385-387

Brotier, [Gabriel] Abbé, ci-devant Jésuite, de l’Académie des Inscriptions & Belles-Lettres, dans le Nivernois en 1723.

1674. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 431-433

Campistron, [Jean Galbert de] Secrétaire des Commandemens de M. le Duc de Vendôme, de l’Académie Françoise & de celle des Jeux Floraux, à Toulouse en 1656, mort dans la même ville en 1723 ; Poëte tragique, inférieur à ceux qui tiennent le premier rang parmi nous, mais supérieur à beaucoup d’autres qui prétendent en occuper un sur notre Théatre.

1675. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 52-53

COSSON, [Pierre-Charles] Professeur au Collége des Quatre Nations, à Mezieres-sur-Meuse en 1736.

1676. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 102-104

DANCHET, [Antoine] de l’Académie Françoise & de celle des Inscriptions, à Riom en Auvergne, en 1671, mort à Paris en 1748 ; est, parmi les Poëtes, ce qu’est dans un Régiment un Lieutenant qui a beaucoup de Soldats au dessous de lui, & plusieurs Officiers au dessus.

1677. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 362-361

Gacon, [François] Prieur de Baillon, à Lyon en 1666, mort en 1755, Versificateur satirique, qu’on surnomma le Poëte Sans fard, & qui auroit eu besoin d’en employer pour relever la platitude de ses Satires.

1678. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 131-133

LIGER, [Louis] à Auxerre en 1658, mort à Guerchi, à trois lieues d’Auxerre, en 1717.

1679. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 214-216

MARIGNY, [Jacques Charpentier de] à Nevers, mort à Paris en 1670.

1680. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — N. — article » pp. 419-420

NONOTE, [Claude-Adrien] Abbé, à Besançon en 1711.

1681. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 541-542

PORÉE, [Charles] Jésuite, près de Caen en 1675, mort à Paris en 1741.

1682. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 174-175

Sabliere, [Antoine Rambouillet de la] Secrétaire du Roi, à Paris en 1615, mort dans la même ville en 1680.

1683. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 286-288

Sévigné, [Marie de Rabutin, Marquise de] née en 1626, morte en 1696.

1684. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 316-318

Tencin, [Claudine-Alexandrine Guerin de] sœur du Cardinal de ce nom, née à Grenoble, morte à Paris en 1749.

1685. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 427-429

Aubert de] Abbé, de l'Académie des Inscriptions & Belles-Lettres, en Normandie en 1655, mort à Paris en 1735.

1686. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 438-439

Villars, [N.ABCD de Montfauçon de] Abbé, en Languedoc, mort en 1673, âgé de 35 ans.

1687. (1924) Critiques et romanciers

Les livres nés de cette race ne peuvent me plaire, puisque j’appartiens à l’autre. […] Est-ce une autre syntaxe qui naît ? […] Nées des mêmes parents, élevées de même, Cécile et Céline sont bien différentes. […] » En vérité, Cécile est née de parents pauvres à Belleville ; sa vertu n’a subi aucun dommage. Lui, de parents opulents, mériterait qu’on l’appelât bourgeois infâme, si l’on était en colère.

1688. (1890) Les princes de la jeune critique pp. -299

Pourrait-il sans cela comprendre les déviations qu’un livre à trois cents lieues de nos frontières fait parfois subir au génie national ? […] Autant lui reprocher de n’être pas un siècle ou deux plus tard ! […] Brunetière est vers 1850, et, à moins qu’il ne soit venu au monde à l’âge de quarante ans, il faut bien croire que mon ami se trompait. […] Ganderax est sous une heureuse étoile. […] Ô la jolie variété dramatique qui ne pouvait naître et fleurir qu’à Paris !

1689. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Valéry, Paul (1871-1945) »

Paul-Ambroise Valéry, qui est à Cette (Hérault) le 30 octobre 1871, jusqu’ici n’a guère écrit que pour ses amis et dans des Revues fermées, comme La Conque, de M. 

1690. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » pp. 175-177

Aubert, [Jean-Louis] Abbé, Professeur de Langue Françoise au Collége Royal, à Paris en 1731.

1691. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 374-376

Brebeuf, [Guillaume de] à Rouen en 1618, mort en 1661.

1692. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 388-389

Brueys, [David-Augustin] à Narbonne, où son pere, natif de Montpellier, étoit Directeur de la Monnoie, mort à Montpellier en 1723, âgé de 84 ans, plus connu par ses Pieces de Théatre que par son Histoire du Fanatisme, & par ses Ouvrages de controverse, qui ne sont pourtant pas mal écrits.

1693. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 407-409

Buffon, [George-Louis le Clere de] Intendant du Jardin Royal des Plantes, de l’Académie Françoise & de celle des Sciences, dont il est Trésorier perpétuel, à Montbart en Bourgogne, en 17..

1694. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 456-458

Caures, [Jean des] Principal du Collége d’Amiens, à Montreuil en Picardie, mort en 1586.

1695. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 475-476

Chapelle, [Claude-Emmanuel Luillier, surnommé] dans le village de la Chapelle, près de S.

1696. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 259-261

FAVART, [Charles-Simon] à Paris en 17..

1697. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 334-336

FRANÇOIS DE SALES, [Saint] Evêque & Prince de Geneve, sa patrie, en 1567, mort à Lyon en 1622 ; Ecrivain au dessus de son siecle, & que le caractere de son génie ne rendra jamais inférieur aux siecles qui le suivront.

1698. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 374-375

GARASSE, [François] Jésuite, à Angoulême, mort en 1631, âgé de 46 ans.

1699. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 75-77

LAPLACE, [Pierre-Antoine de] de l’Académie d’Arras, à Calais en 1709, Traducteur du Théatre Anglois, Ouvrage qui manquoit à notre Langue, & par lequel M. de Laplace s’est rendu utile à notre Littérature.

1700. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 89-91

LARUE, [Charles de] Jésuite, à Paris en 1643, mort en 1725.

1701. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 113-114

LELONG, [Jacques] Bibliothécaire & Prêtre de la Maison de l’Oratoire, à Paris en 1665, mort en 1721 ; Auteur laborieux & utile, à qui nous devons deux Bibliotheques, l’une sacrée, écrite en Latin, l’autre historique & écrite en François, dans laquelle il a rassemblé tous les Ouvrages qui ont rapport à notre Histoire.

1702. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 361-363

MONTREUL ou MONTEREUL, [Mathieu de] Abbé, à Paris en 1620, mort à Aix en Provence en 1692 ; Poëte assez agréable, qu’il ne faut pas confondre avec Jean Montereul, son frere, qui n’a rien fait imprimer, quoiqu’il fût de l’Académie Françoise.

1703. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 63-64

Reboulet, [Simon] à Avignon en 1687, mort dans la même ville en 1725.

1704. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 171-172

Sabbathier, [François] de l'Académie Etrusque de Cortonne, Professeur au Collége de Châlons-sur-Marne, & Secrétaire perpétuel de l'Académie de cette derniere ville, à Condom en 17..

1705. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 319-320

Terrasson, [Jean] de l'Académie Françoise, de celle des Sciences, &c. à Lyon en 1670, mort à Paris en 1750.

1706. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 406-407

Valois, [Henri De] Historiographe de France, à Paris en 1603, mort dans la même ville en 1676 ; Savant habile, & un des meilleurs Critiques du Siecle dernier.

1707. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 424-425

Vernes, [Jacob] Pasteur d'une Eglise de Geneve, en Languedoc en 17..

1708. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 513-514

Vouglans, [Pierre-François Muyart de] Conseiller au Grand Conseil, à Morance, en Franche-Comté, en 1713.

1709. (1813) Réflexions sur le suicide

L’excès du malheur fait naître la pensée du Suicide, et cette question ne saurait être trop approfondie ; elle tient à toute l’organisation morale de l’homme. […] Mais il faut encore ranger sous deux classes principales les causes du déshonneur : celles qui tiennent à des fautes que notre conscience nous reproche, ou celles qui naissent d’erreurs involontaires et nullement criminelles. […] Quel est l’homme malheureux qui par sa patience et sa résignation ne donnera pas un exemple qui émeuve les âmes et fasse naître des sentiments que jamais les meilleures leçons ne suffiraient pour inspirer ? […] Des malheurs positifs ont déterminé quelques Français à cet acte, et ils l’ont commis avec l’intrépidité mais aussi avec l’insouciance qui souvent les caractérise ; néanmoins cette foule d’émigrés que la révolution a fait naître, a supporté les plus cruelles privations, avec une sorte de sérénité dont aucune autre nation n’eût été capable. […] Votre père a rassemblé vos partisans pour s’opposer à Marie et cette Reine justement détestée s’en prend à vous de tout l’amour que votre nom fait naître. — Ses sanglots l’interrompirent. — Continuez, lui dis-je, oh !

1710. (1893) Du sens religieux de la poésie pp. -104

Une œuvre d’art naît à l’état de projet dans un esprit par suite d’une certaine vive commotion sentimentale et cérébrale. […] Un enfant vient de naître. […] Il est , il mourra. […] Aussi naît-il à l’ombre des révélations, les manifestant vivantes par son intime union avec elles et témoignant de leur mort en les quittant. […] L’Art civil, dont nous trouverions peu de vestiges personnels et libres durant tout le moyen âge, est le même jour que le libre examen, le même jour que l’esprit philosophique et se développe parallèlement, concurremment avec lui.

1711. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre I. Des poëtes anciens. » pp. 2-93

Brumoi paroît faire trop de cas des plaisanteries fades & puériles qui naissent des jeux de mots, lesquelles sont ordinairement très-froides. […] à Rouen, il entra jeune dans la Congrégation de St. […] Ce Poëte à Vérone, a des graces & de la délicatesse. […] Virgile près de Mantouë de parens obscurs, fut chassé de sa maison & d’un petit champ, son unique patrimoine, par la distribution qu’on fit aux soldats vétérans d’Auguste, des terres du Mantouan & du Cremonois. […] Le Cardinal de Polignac racontoit volontiers ce qui lui avoit fait naître l’idée de cet ouvrage.

1712. (1753) Essai sur la société des gens de lettres et des grands

Des successeurs ou trop bornés ou trop despotiques, semblèrent négliger les vues sages de Charles V ; mais le mouvement imprimé subsista, quoique faiblement, jusqu’à François Ier, qui donna aux esprits engourdis et languissants une nouvelle impulsion, Ce prince fut, ou assez bien pour aimer les savants, ou du moins assez habile pour les protéger ; car sans les aimer on les protège quelquefois, et l’intérêt ou la vanité les rend aisément dupes sur les motifs des égards qu’on a pour eux. […] J’aimerais autant qu’on prétendît qu’il ne fallait pas réformer les Russes, parce que le Czar était parmi eux. […] Ce n’est pas que j’approuve le fanatisme de quelques-uns de ses admirateurs ; l’estime du sage est plus tranquille ; mais c’est le propre des grands talents de faire des fanatiques, et il faut s’attendre à en rencontrer dans un siècle ou c’est une espèce d’héroïsme que de célébrer les génies supérieurs ; comme on doit s’attendre à faire naître des enthousiastes, des flagellants et des convulsionnaires dans les sectes qu’on persécute. […] Aussi est-ce pour une âme bien née le plus grand obstacle à l’opulence, que de jouir de l’étroit nécessaire. […] Elle se joue également de l’injustice de la fortune et de celle des hommes ; elle produit des génies rares au milieu d’un peuple barbare, comme elle fait naître des plantes précieuses chez des peuples sauvages qui en ignorent la vertu.

1713. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Charles Magnin ou un érudit écrivain. »

Charles Magnin, mort le 8 octobre 1862, à l’âge de soixante-neuf ans, naquit à Paris le 4 novembre 1793, à quelques pas de la bibliothèque de l’Arsenal, où son père avait un emploi, et où son grand-père maternel, M.  […] Pour peu que Minerve sourît ou n’y mît pas d’obstacle, il naissait presque de toute nécessité avec le goût des livres et déjà lettré. […] Ramée, jeune statuaire, plein de chaleur et d’enthousiasme, touchés l’un et l’autre du feu sacré, s’étaient mis en campagne ; ils avaient visité en pèlerins fervents et infatigables les monuments, les églises, les restes d’abbayes, et la théorie fondée sur l’observation était née ; elle avait apparu, un matin, lumineuse et manifeste. […] Magnin, pas plus que Fauriel (et, s’il se peut, encore moins que lui), n’était pour la chaire et l’enseignement oral ; il n’avait rien de ce qui fait l’orateur ni même le professeur, tel que des talents élevés et brillants nous ont appris de nos jours à le considérer.

1714. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIIe entretien. Poésie lyrique » pp. 161-223

Le vieux Joseph, qui m’avait vu naître et qui voyait en moi l’héritier présomptif du château, m’aimait presque comme une nourrice aime son nourrisson. […] Il était à Lons-le-Saulnier, dans ce Jura, pays de rêverie et d’énergie, comme le sont toujours les montagnes. […] Le froid le saisit ; il rentra chancelant dans sa chambre solitaire, chercha lentement l’inspiration, tantôt dans les palpitations de son âme de citoyen, tantôt sur le clavier de son instrument d’artiste, composant tantôt l’air avant les paroles, tantôt les paroles avant l’air, et les associant tellement dans sa pensée qu’il ne pouvait savoir lui-même lequel de la note ou des vers était le premier, et qu’il était impossible de séparer la poésie de la musique et le sentiment de l’expression. […] L’infortuné Dietrich marcha peu de mois après à l’échafaud, au son de ces notes nées, à son foyer, du cœur de son ami et de la voix de sa femme.

1715. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXIXe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin (2e partie) » pp. 321-384

On enveloppe presque de même façon ceux qui naissent et ceux qui sont morts : un berceau a quelque idée d’un sépulcre, et c’est la marque de notre mortalité qu’on nous ensevelisse en naissant. » XV Le 14 février. […] Aussi quelqu’un me disait : “Vous êtes heureusement née pour habiter la campagne.” […] « Vous avez raison de dire que je suis heureusement née pour habiter la campagne. C’est mon endroit ; je souffrirais bien plus ailleurs ; je reconnais en ceci un soin de la Providence, qui fait tout avec amour pour ses créatures, qui ne fait pas naître la violette dans les rues.

1716. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 257-320

Elle était née grande tragédienne par le geste. […] — Avant cette mort et avant celle de mon mari, poursuivit-elle d’une voix affaissée par de tristes souvenirs, nous étions trop heureux ici, mon mari, moi, Hyeronimo, mon fils, que je portais encore à la mamelle, Antonio, ma sœur et la petite Fior d’Aliza, qui venait de naître. […] C’est ainsi que nous ne restâmes plus que six à la cabane : notre vieille mère, qui ne comptait plus les années de sa vie que par les pertes de son mari, de ses frères, de ses sœurs, de ses filles mariées bien loin dans la plaine ; Antonio, que vous voyez déjà aveugle et ne pouvant plus sortir qu’avec son chien de la cabane, pour aller à la messe au monastère de San Stephano deux fois par an ; Hyeronimo, mon fils unique, et Fior d’Aliza, dont la mère était morte la semaine où elle était née ; c’était la chèvre blanche qui l’avait nourrie. […] Il n’y avait pas six mois d’âge entre eux deux, Hyeronimo étant la même année que Fior d’Aliza avait vu le jour.

1717. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxive Entretien. Réminiscence littéraire. Œuvres de Clotilde de Surville »

La Révolution de 89 n’y pouvait rien, la démocratie industrielle n’était pas encore née. […] Les chances de la guerre ayant soumis la Belgique à Custine ou à Dumouriez, il était venu plus récemment chercher asile et sécurité à Lauzanne ; il se nommait M. de Surville, il était dans le Vivarais, sur une de ces montagnes qu’arrose et ravage l’Ardèche. […] Il n’y avait point d’art, non, c’était la nature faite art ; l’image et le son, cette musique de l’âme, y naissaient ensemble indivisibles comme la voix et la sensation. […] Lisez : À MON PREMIER .

1718. (1892) Boileau « Chapitre I. L’homme » pp. 5-43

Nicolas Boileau est Parisien : il est le 1er novembre 1636, dans une maison de la cour du Palais, en face de la Sainte-Chapelle : une de ces vieilles maisons ayant pignon sur rue, comme on en voit dans les estampes du temps, haute et étroite comme une tour, avec une ou deux fenêtres de façade, et trois ou quatre étages. […] Mais tous ces Boileau, à en juger par les trois ou quatre individus de la famille que nous connaissons bien, tous ces Boileau n’étaient pas tendres, et notre poète, en particulier, n’était assurément pas très sensible ni très délicat : aussi ne s’étiola-t-il pas, pas plus qu’il ne se renfrogna, dans le délaissement de ses premières années. […] S’il n’est pas dans cette maison, comme on l’a cru longtemps, on ne saurait douter qu’il y soit venu souvent. […] On trouvait au fond des pots les idées hardies ou plaisantes ; d’insolentes facéties, comme le Chapelain décoiffé, et la Métamorphose de la perruque de Chapelain en astre, naissaient comme d’elles-mêmes après boire ; et si l’on examinait souvent quelque point de doctrine, la raison d’un usage ou d’une règle, si ce fut vraisemblablement dans ces conversations autour de la table que nos écrivains prirent conscience de leur rôle, et que Boileau exerça sur leur génie une sorte de direction salutaire par la droiture de son sens critique, il ne faut pas oublier que ces bons compagnons faisaient une besogne sérieuse très peu sérieusement, sans morgue dogmatique, sans tapage et sans pose, n’ayant l’air de songer et ne songeant en effet qu’à se divertir.

1719. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série «  Leconte de Lisle  »

Il ne faut pas oublier que Leconte de Lisle est à l’île Bourbon et qu’il y a passé son enfance. […] pourquoi suis-je    Tu le sauras demain. […] V Kaïn est un poème non de désespoir, mais d’espoir violent de l’intensité même du désir. […] Sophocle pense que le meilleur est de n’être pas ou de vivre peu8.

1720. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série «  M. Taine.  »

Je doute qu’un homme de la femme la puisse soutenir. […] Il s’est bien conduit avec Marie-Louise, peut-être parce qu’elle était « née ». […] Quand vous croyez rêver le bonheur, vous ne rêvez tout au plus que la suppression de la souffrance ; encore vous ne la rêvez pas longtemps : bientôt votre songe vous paraît insignifiant et vain, et vous vous hâtez de rappeler la douleur, d’où naît l’effort et le mérite, et par qui seul se meut  vers quel but ? […] C’est au moment où les deux bienheureux vont s’enlacer : L’âme, vêtue ici d’une chair éthérée, Sœur des lèvres, s’y pose, en paix désaltérée, Et goûte une caresse où, sans déshonneur, Le plaisir s’attendrit pour se fondre en bonheur.

1721. (1841) Matinées littéraires pp. 3-32

Les hommes d’un vrai génie ne nous semblent pas naître au hasard sur la terre. […] L’art de combiner ces sons, au moyen d’articulations distinctes, est pour nous du besoin de vivre en société : le langage est une convention des hommes. […] Mais quand on lui a dit que là, au moment où naît un enfant, on lui déprime le sommet de la tête pour l’aplatir, et qu’ici on la lui moule en forme de pain de sucre, d’après une fausse idée de la beauté, il ne s’étonne plus que de la folie des hommes qui adoptent des coutumes si absurdes. […] Les plus graves difficultés de la lecture à haute voix naissent de l’écriture que nous ont transmise les Grecs et les Romains.

1722. (1902) Le culte des idoles pp. 9-94

Ce serait infiniment douloureux si ce n’était si comique ; nul, en effet, ne le détrompa ; il parvint à faire croire qu’il était pour découvrir les plus secrètes délicatesses d’une âme féminine ; et après le livre ridicule de la Fille Élisa parurent ces œuvres extravagantes, La Faustin, Chérie, où quelques bécasses prétendirent se reconnaître, subissant la suggestion d’une enfant devant son maître d’école. […] Or l’invention du style doit être spontanée, sous peine de ne rien valoir, les images doivent naître avec la pensée et ne point venir en étrangères et à sa suite pour la rendre pompeuse. […] Ceux-là sont des écrivains nés ; ceux-là ont écrit parce que l’ivresse des choses qui était en eux les rendait généreux et avides de se prodiguer, parce qu’ils avaient à faire part à tous de leur joie. […] C’est sans doute pour ces mauvais lecteurs que Nietzsche avait écrit cette page : « Une culture supérieure ne peut vraiment naître que là où la société forme deux classes distinctes : celle des travailleurs et celle des oisifs, capables d’un véritable loisir ; ou, pour mieux dire, la classe du travail forcé et la classe du travail libre.

1723. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — CHAPITRE VI »

Madame Lecoutellier, née de Valtaneuse, et mariée à un bourgeois enrichi, vous représente une grande coquette, vaniteuse, plus compliquée que la serrure d’un coffre-fort à secret. […] Il sait que son fils aime madame Lecoutellier, née de Valtaneuse ; il sait aussi que la veuve convoite ardemment le château qui lui permettrait de reprendre ce nom patricien. […] Elles sortent d’un seul jet, elle naissent d’un seul germe qui contient d’avance tous leurs développements. […] Il y a longtemps qu’un grand poète l’a dit : « Votre drame est boiteux ; croyez-moi, ne lui mettez pas de jambe de bois. » Et puis quelle foi l’auteur dramatique veut-il que le public garde dans son œuvre, si, d’un mois à l’autre, il en modifie le fond ou la forme ?

1724. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « III — II » pp. 14-15

Et l’ordre teutonique qu’il dit mort ou dégénéré et qui alors, me dit-on, n’était pas  : — vérifiez, historiens !

1725. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXV » pp. 299-300

C'est là de la fermeté qui tient peut-être à un faible, et un genre d’audace bien que née d’une peur.

1726. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — Q — Quinet, Edgar (1803-1875) »

C’est un Allemand, en France, dont l’érudition est allemande, la science allemande et qui a la naïveté allemande de croire nous donner des poèmes épiques en français.

1727. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 298-300

Bitaubé, [Paul-Jérémie] de l’Académie de Berlin, en Gascogne en 17..

1728. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 105-106

DANCOURT, [Florent Carton] à Fontainebleau en 1661, mort à Courcelles-le-Roi en Berry, en 1725.

1729. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 337-339

3 FRANÇOIS, [Laurent] Abbé, en Franche-Comté, vers le commencement de ce Siecle.

1730. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 371-373

GAMACHES, [Etienne-Simon] Chanoine Régulier de Sainte-Croix de la Bretonnerie, de l’Académie des Siences, à Meulan en 1672, mort à Paris en 1756.

1731. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 128-130

LENGLET DUFRESNOY, [Nicolas] Abbé, à Beauvais en 1674, mort à Paris en 1755.

1732. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 6-7

Racan, [Honorat de Beuil, Marquis de] l’un des premiers reçus à l’Académie Françoise, à la Roche-Racan en Touraine en 1589, mort en 1670.

1733. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 157-158

Roussier, [Pierre-Joseph] Abbé, Chanoine d’Econis en Normandie, Correspondant de l’Académie Royale des Inscriptions & Belles-Lettres, à Marseille en 17..

1734. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 188-189

Mazarelli, née en 1731.

1735. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 322-324

Théophile, [surnommé Viaut,] à Clérac, dans l'Agénois, en 1590, mort à Paris en 1626.

1736. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 366-368

Tourreil, [Jacques de] de l’Académie Françoise & de celle des Inscriptions, à Toulouse en 1656, mort en 1714.

1737. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 430-432

Correspondant des Académies de Metz, de Dijon, de Madrid, &c. à Valogne en 1748.

1738. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — W. — article » pp. 524-526

Wetelet, [Claude-Henri] Receveur-Général des Finances, de l'Académie Françoise, de celle de Berlin, &c. en 17..

1739. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Contes — VIII. Les calaos et les crapauds »

Un fils était de cette union.

1740. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « L’abbé de Bernis. » pp. 1-22

Il était à Saint-Marcel d’Ardèche en Vivarais, le 22 mai 1715, d’une race ancienne et de la meilleure qualité. […] L’expérience m’apprend aussi que le mérite des grandes choses n’est jamais mieux connu que de ceux qui ne les ont pas vues naître. […] [NdA] J’ai dit là une grande légèreté ; j’ai reconnu depuis, en ouvrant les Œuvres de Nivernais, que Délie n’est autre que la duchesse de Nivernais elle-même, célébrée par son mari sous ce nom élégiaque ; elle était née de Pontchartrain et sœur du comte de Maurepas.

1741. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gibbon. — II. (Fin.) » pp. 452-472

Il n’a pas compris qu’il y eût en ce moment une vue morale, une vertu toute nouvelle qui naissait. […] En un mot, s’il nous a très bien démontré et expliqué le genre de tolérance d’un Cicéron, d’un Trajan, d’un Pline, cette disposition humaine sans doute, née toutefois ou accompagnée d’une indifférence profonde et d’un secret mépris pour les objets d’un culte qui, chez les anciens, était une affaire de coutume et de forme extérieure, non d’opinion ni de croyance, il n’a pas également compris le sentiment nouveau qui combattait et affrontait cette tolérance, et qui devait, vers la fin, la lasser. […] Un homme qui s’exprime comme il vient de le faire n’est point versatile ; il est ministériel, et, s’il se trouve un moment jeté dans l’opposition, ce n’est qu’à son corps défendant, Cette place de lord du Conseil de commerce à laquelle Gibbon aspirait, il l’obtint et la conserva trois ans (1779-1782) avec un traitement annuel de sept cent cinquante livres sterling ; mais le Conseil de commerce ayant été supprimé, Gibbon, qui se trouvait gêné dans ses revenus, songea à sortir de la vie publique pour laquelle il était si peu fait, à recouvrer son indépendance, et à se retirer en Suisse pour y achever son Histoire.

1742. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Nouvelles lettres de Madame, mère du Régent, traduites par M. G. Brunet. — I. » pp. 41-61

Élisabeth-Charlotte, qui épousa en 1671 Monsieur, frère de Louis XIV, naquit à Heidelberg en 1652. […] L’ambition ni la légèreté n’eurent point de part à son changement ; le respect et la tendresse qu’elle conservait pour Mme la princesse Palatine, sa tante, qui était catholique, ne lui permirent pas de refuser l’instruction : elle écouta le père Jourdan, jésuite ; née avec cette droiture qui l’a si fort distinguée pendant sa vie, elle ne résista pas à la vérité. […] Il semblait que ce fût une ironie du sort d’avoir donné pour seconde femme à Monsieur, à ce prince si mou et si efféminé, une personne qui par ses goûts ressemblait le plus à un homme et qui avait le regret de ne pas être née garçon.

1743. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Vie de Maupertuis, par La Beaumelle. Ouvrage posthume » pp. 86-106

La Beaumelle, qui eut le malheur d’être un de ces ennemis que Voltaire passa vingt-cinq ans de sa vie à stigmatiser, était en 1726 dans le Languedoc, d’une famille protestante honorable. […] La Beaumelle convient de tous les avantages de M. de Voltaire, et il attaque très malignement les faiblesses et les travers dont il n’y a point de grand homme qui ne soit susceptible, mais qui, présentés par une main ennemie, forment un tableau de ridicule. » Il ne lui conteste point que ses ouvrages ne soient d’un très bel esprit, il s’attache à y relever les traits de petit esprit. « Naître avec de l’esprit, dit-il quelque part, c’est naître avec de beaux yeux.

1744. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Madame Swetchine. Sa vie et ses œuvres, publiées par M. de Falloux. »

Mme Swetchine était une dame russe, née à Moscouen 1782, qui mourut à Paris en 1857. […] On dira tout ce qu’on voudra de M. de Falloux comme homme de parti politique et religieux, mais il est de sa personne le plus gracieux des catholiques et le plus avenant des légitimistes : il semble pour les fusions, pour les commissions mixtes, pour faire vivre ensemble à l’aise, dans le lien flexible de sa parole, un protestant et un jésuite, un universitaire et un ultramontain, un ligueur et un gallican. […] Si j’avais jamais osé demander quelque chose, née avec une impétuosité toujours prête à m’entraîner au-delà, n’aurais-je pas été exigeante dans toutes mes relations ?

1745. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Merlin de Thionville et la Chartreuse du Val-Saint-Pierre. »

dans cette cité dont le nom ne se sépare plus du sien, en septembre 1762, fils d’un procureur au bailliage, destiné d’abord à l’état ecclésiastique (comme on le verra), puis changeant de robe, avocat plaidant et bientôt estimé des anciens, il avait vingt-cinq ans à l’époque où s’ouvrait l’Assemblée des Notables : il reçut vivement, lui et ses frères, le souffle embrasé qui traversait l’air à ce moment. […] Le canon surtout était son arme favorite ; il savait le pointer ; il semblait artilleur. […] Cette sorte de vie, née dans l’Orient et propagée dans toute l’Europe chrétienne où elle prospéra, a eu son long temps et son règne, son âge d’or, son âge angélique, son âge héroïque et militant.

1746. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance »

Sismondi est à Genève, il est Italien de race et aussi un peu de tempérament, il ne vient à Paris que tard et en passant ; et pourtant, à travers bien des interpositions et des obstacles, il nous aime : non-seulement il écrit ses ouvrages en français, mais toute la seconde moitié de sa vie sera consacrée à écrire l’Histoire des Français dans la plus copieuse compilation qui ait été faite ; mais dans son premier ouvrage de jeunesse, publié en 1801, et tout entier relatif à l’Italie, il ne se sépare pas de notre nation, de celle à laquelle il avait alors l’honneur d’appartenir ; il dit nous. […] Pour le reprendre à ses origines plus positives, il était en 1773 à Genève, et avait fait de bonnes études au collège de sa ville natale. […] comme par miracle hors de son siècle, il appartenait tout entier à des temps qui ne sont plus, et il avait été donné à l’Italie comme un monument de ce qu’avaient été ses enfants, comme un gage de ce qu’ils pouvaient être encore.

1747. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres inédites de F. de La Mennais »

Félicité ou Fèli de La Mennais fut le quatrième de six enfants ; il naquit le 16 juin 1782. […] Il a écrit cette boutade : « L’ennui naquit en famille, — une soirée d’hiver. » — Il avait dix-huit ans, plusieurs projets lui traversaient la tête. […] J’étais pour vivre et mourir dans une cellule, et encore des plus étroites : in angulo cum libello.

1748. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Marceline-Félicité-Josèphe Desbordes, qui est morte à Paris le 23 juillet 1859, était née à Douai le 20 juin 1786, au nº 32 de la rue Notre-Dame (aujourd’hui rue de Valenciennes, 36). […] Les souvenirs de cette première vie d’enfance se reproduiront plus loin sous la plume de la jeune Marceline, née la dernière et la mieux douée. […] Mme Branchu (Rose-Timoléone-Caroline), née Chevalier de Lavit, à Saint-Domingue ; morte à Passy le 14 octobre 1850.

1749. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MME DESBORDES-VALMORE. (Les Pleurs, poésies nouvelles. — Une Raillerie de l’Amour, roman.) » pp. 91-114

Si ce talent n’a pas cessé de gémir et de grandir, c’est que l’âme elle-même, après tant de flots versés, s’est trouvée inépuisable : Car je suis une faible femme ; Je n’ai su qu’aimer et souffrir ; Ma pauvre lyre, c’est mon âme… Tout enfant, aux environs de Douai où elle est née, sur les rives de cette Scarpe, accoutumée, ce semble, à moins de rêverie, la jeune Hélène aimait déjà36. […] Les poésies de Mme Desbordes-Valmore, qui, nées ainsi du cœur, n’ont aucun souci d’art ni d’imitation convenue, réfléchissent pourtant, surtout à leur source, la teinte particulière de l’époque où elles ont commencé, et rappellent un certain ensemble d’inspirations environnantes. […] Les métaphores elles-mêmes, les images prolongées qui ne sont en jeu que pour traduire une pensée ou une émotion, n’ont pas toujours besoin d’une rigueur, d’une analogie continue, qui, en les rendant plus irréprochables aux yeux, les roidit, les matérialise trop, les dépayse de l’esprit où elles sont nées et auquel, en définitive, elles s’adressent ; l’esprit souvent se complaît mieux à les entendre à demi-mot, à les combler dans leurs négligences ; il y met du sien, il les achève.

1750. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « DU ROMAN INTIME ou MADEMOISELLE DE LIRON » pp. 22-41

DU ROMAN INTIME ou MADEMOISELLE DE LIRON11 Quelque agités que soient les temps où l’on vit, quelque corrompus ou quelque arides qu’on les puisse juger, il est toujours certains livres exquis et rares qui trouvent moyen de naître ; il est toujours des cœurs de choix pour les produire délicieusement dans l’ombre, et d’autres cœurs épars çà et là pour les recueillir. […] Il y a des exemples de toutes ces formes diverses parmi les productions nées du cœur ; et ces formes, nous le répétons, sont assez insignifiantes, pourvu qu’elles n’étouffent pas le fond et qu’elles laissent l’œil de l’âme y pénétrer au vif sous leur transparence. […] Mlle de Liron est blanche comme le lait ; elle a de beaux cheveux noirs et des yeux d’un bleu de mer, genre de beauté assez commun parmi les femmes du Cantal où sa mère était née.

1751. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Victor Duruy » pp. 67-94

Victor Duruy naquit en 1811 d’une bonne race d’ouvriers-artistes employés à la manufacture des Gobelins depuis sept générations. […] du peuple et dans le plus large courant de l’esprit de la Révolution française — en sorte qu’il n’eut ni à changer ni à se contraindre pour être « avec son temps », — la vie de Victor Duruy, exemplaire, tout unie dans son fond, mais avec un air de merveilleux, et, au milieu de son cours, un coup de baguette des fées, ressemble à quelque beau récit de la « morale en action », à mettre entre les mains des écoliers, de ces écoliers de France pour qui il a tant travaillé. […] Il se dit que depuis un demi-siècle, la classe dirigeante, par égoïsme ou par hypocrisie, avait trahi sa mission d’une façon générale en limitant à elle-même le bienfait de la Révolution d’où elle était née, et particulièrement en laissant languir l’enseignement public.

1752. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XI, les Suppliantes. »

Nées sous la verge des Pharaons, dans la vallée de l’esclavage éternel, les Danaïdes ne comprennent rien aux scrupules honnêtes du vieux roi. […] Qu’est-ce pour lui que ce Zeus grec d’hier, auprès d’Ammon-Ra, l’Éternel qui vogue sur les eaux célestes, « debout dans la barque des millions d’années », entouré des quatre grands Singes en prière, et ceint des anneaux du serpent Mehem ? […] vous êtes des enfants, il n’y a pas de vieillards parmi vous ; vous êtes tous jeunes d’esprit. » Cette momie vivante ne croyait pas si bien dire : la Grèce naquit et elle resta jeune ; et c’est cette jeunesse qui lui donna la Beauté, qui versa sur ses œuvres la fleur de la vie, et lui fit cueillir légèrement les prémices de toutes les moissons, le laurier-rose de toutes les victoires.

1753. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) «  Mémoires et correspondance de Mme d’Épinay .  » pp. 187-207

Mlle Louise-Florence-Pétronille Tardieu d’Esclavelles, qui, dans le roman, s’appelle du joli nom d’Émilie, fille d’un officier mort au service du roi, dut naître vers 1725. […] Je suis née tendre et sensible, constante et point coquette. […] que vous êtes heureusement née !

1754. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de lord Chesterfield à son fils. Édition revue par M. Amédée Renée. (1842.) » pp. 226-246

Philipb Dormer Stanhope, comte de Chesterfield, naquit à Londres le 22 septembre 1694, la même année que Voltaire. […] Je vous avouerai naturellement qu’il n’est pas légitime ; mais sa mère est une personne bien née, et qui a eu des bontés pour moi que je ne méritais pas. […] Presque tous les hommes sont nés avec toutes les passions à un certain degré ; mais il n’y a presque point d’homme qui n’en ait une dominante, à laquelle les autres sont subordonnées.

1755. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame Geoffrin. » pp. 309-329

Bourgeoise et très bourgeoise de naissance, née à Paris dans la dernière année du xviie  siècle, Marie-Thérèse Rodet avait été mariée le 19 juillet 1713 à Pierre-François Geoffrin, gros bourgeois, un des lieutenants-colonels de la Garde nationale d’alors, et l’un des fondateurs de la Manufacture des glaces. […] Mon éducation était continuelle… J’ai dit que Mme Geoffrin était née à Paris : elle n’en sortit jamais que pour faire en 1766, à l’âge de soixante-sept ans, son fameux voyage de Varsovie. […] Tout ce que j’ai vu depuis que j’ai quitté mes pénates me fera remercier Dieu d’être née Française et particulière.

1756. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Fontenelle, par M. Flourens. (1 vol. in-18. — 1847.) » pp. 314-335

Fontenelle, à Rouen en février 1657, était, comme on sait, neveu des Corneille par sa mère. Il semble, au premier abord, que ce soit une ironie de la nature de l’avoir fait naître neveu de celui qui créa ces âmes héroïques de Polyeucte, du vieil Horace, et de tant d’autres personnages au cœur impétueux et sublime ; car il était l’âme la plus égale, la plus froide, la plus exempte de passion et de flamme qui fut jamais. […] dans une famille poétique et bourgeoise, dont l’illustration datait d’avant Louis XIV, Fontenelle resta un peu arriéré au point de vue littéraire, en même temps qu’on va le voir singulièrement en avance pour le point de vue philosophique.

1757. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Saint-Évremond et Ninon. » pp. 170-191

Il a éprouvé les passions, il les a laissées naître, et les a, jusqu’à un certain point, cultivées en lui, mais sans s’y livrer aveuglément ; et, même lorsqu’il y cédait, il y apportait le discernement et la mesure. […] Saint-Évremond, en 1613, était de trois années plus âgé que Ninon, qui était de 1616 ; il mourut en 1703, à l’âge de plus de quatre-vingt-dix ans, et elle en 1705, au même âge moins quelques mois. […] Mlle Anne de Lenclos (car Ninon n’est qu’un diminutif galant), née à Paris, le 15 mai 1616, d’un père gentilhomme, grand duelliste, cabaleur, esprit fort, musicien et homme de plaisir, et d’une mère exacte et sévère, se trouva orpheline à quinze ans, et très disposée à jouir de sa liberté avec une hardiesse assaisonnée d’esprit et tempérée de goût, qui allait rappeler l’existence des courtisanes de la Grèce.

1758. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Mémoires du cardinal de Retz. (Collection Michaud et Poujoulat, édition Champollion.) 1837 » pp. 40-61

en octobre 1614, d’une famille illustre, destiné malgré lui à l’Église avec « l’âme peut-être la moins ecclésiastique qui fût dans l’univers », il essaya de se tirer de sa profession par des duels, par des aventures galantes ; mais l’opiniâtreté de sa famille et son étoile empêchèrent ces premiers éclats de produire leur effet et de le rejeter dans la vie laïque. […] Je ne sais pas de plus belle page historique que celle où il nous peint ce soudain passage du découragement et de l’assoupissement des esprits, qui leur fait croire que le mal présent ne finira jamais, à l’extrémité toute contraire par laquelle, loin de considérer les révolutions comme impossibles, on arrive à les trouver chose simple et facile : Et cette disposition toute seule, ajoute-t-il, est quelquefois capable de les faire… Qui eût dit, trois mois devant la petite pointe des troubles, qu’il en eût pu naître dans un État où la maison royale était parfaitement unie, où la Cour était esclave du ministre, où les provinces et la capitale lui étaient soumises, où les armées étaient victorieuses, où les compagnies paraissaient de tout point impuissantes, qui l’eût dit eût passé pour insensé, je ne dis pas dans l’esprit du vulgaire, mais je dis entre les d’Estrées et les Senneterre. […] L’on chercha, en s’éveillant, comme à tâtons, les lois : on ne les trouva plus, l’on s’effara, l’on cria ; on se les demanda ; et, dans cette agitation, les questions que leurs explications firent naître, d’obscures qu’elles étoient et vénérables par leur obscurité, devinrent problématiques ; et de là, à l’égard de la moitié du monde, odieuses.

1759. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le Brun-Pindare. » pp. 145-167

Ponce-Denis Escouchard Le Brun naquit à Paris le 11 août 1729 à l’hôtel de Conti (aujourd’hui l’hôtel de la Monnaie). […] avec un caractère violent, infatué de son propre mérite, il comptait pour rien tout ce que sa femme faisait pour lui : c’était une dette dont il recevait le paiement sans reconnaissance ; et, à la plus légère contradiction, il s’irritait comme d’un attentat à son autorité. […] Mais on n’a pas même besoin d’en venir à cette conjecture infamante pour juger Le Brun bien sévèrement ; il ressort du factum et des dépositions des témoins que, quels qu’aient pu être les torts de la femme, ceux du mari furent tels qu’aucun honnête homme, aucun homme bien ne s’en permettra jamais de semblables, soit en paroles, soit en actes.

1760. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — II. (Fin.) » pp. 63-82

sous un gouvernement doux, vivant dans une société éclairée où le souvenir des factions était lointain, et où le despotisme qui les avait réprimées n’était plus présent ou du moins sensible, il accommoda légèrement l’humanité à son désir. […] L’Esprit des lois est un livre qui n’a plus guère d’autre usage que ce noble usage perpétuel de porter l’esprit dans la haute sphère historique et de faire naître une foule de belles discussions. […] Sa figure maigre et longue, élégante, a bien le type du pays où il est , le type bordelais ; son profil bien dessiné est d’un beau caractère et semble fait pour la médaille.

1761. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — I. » pp. 127-148

Benjamin Franklin y naquit le 17 janvier 1706, le dernier garçon de sa nombreuse famille ; il n’avait que deux sœurs plus jeunes que lui, et en tout seize frères ou sœurs de deux lits différents. […] Ici une réflexion commence à naître. […] Plus tard, dans les relations diplomatiques, lord Shelburne, traitant avec Franklin, observait que son caractère principal en affaires était « de ne point s’embarrasser de faire naître les événements, mais seulement de bien profiter de ceux qui arrivaient » ; et il lui reconnaissait la science de la médecine expectative.

1762. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le cardinal de Richelieu. Ses Lettres, instructions et papiers d’État. Publiés dans la Collection des documents historiques, par M. Avenel. — Premier volume, 1853. — I. » pp. 224-245

Richelieu, le 5 septembre 1585, cadet d’une ancienne famille du Poitou, avait été d’abord destiné aux armes. […] Pour ceux du dehors, je les baptiserai d’un autre nom, s’ils nous font naître les occasions d’accroître nos limites et de nous combler de gloire aux dépens des ennemis de la France. […] Il est l’âme de ce premier petit ministère, composé d’hommes assez obscurs, mais fortement unis entre eux ; cabinet vigoureux, énergique, auquel il ne manqua, pour accomplir de grandes choses, que de durer plus longtemps, et de n’être pas à l’ombre du patronage du maréchal d’Ancre et avec cette enseigne qui le rendait impopulaire.

1763. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Grimm. — I. » pp. 287-307

Quand la réputation des auteurs est établie, il est aisé d’en parler convenablement, on n’a qu’à se régler sur l’opinion commune ; mais à leurs débuts, au moment où ils s’essayent et où ils s’ignorent en partie eux-mêmes, et à mesure qu’ils se développent, les juger avec tact, avec précision, ne pas s’exagérer leur portée, prédire leur essor ou deviner leurs limites, leur faire les objections sensées à travers la vogue, c’est là le propre du critique pour l’être. […] à Ratisbonne, en décembre 1723, d’un père qui occupait un rang respectable dans les Églises luthériennes, il fit ses études à l’université de Leipzig ; il y eut pour professeur le célèbre critique Ernesti et profita de ses leçons approfondies sur Cicéron et sur les classiques. […] vingt-cinq ans avant Goethe, Grimm appartenait à cette génération antérieure au grand réveil de la littérature allemande, et qui essayait de se modeler sur le goût des anciens, ou des modernes classiques de France et d’Angleterre.

1764. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « M. Necker. — I. » pp. 329-349

Cet homme distingué était à Genève, le 30 septembre 1732, d’un père professeur de droit public qui, à Custrin en Prusse, était venu s’établir dans la ville de Calvin, et qui tirait lui-même son origine d’une famille irlandaise. […] « Il était penseur, et les pensées d’autrui ne pouvaient se mêler avec les siennes. » Ce qu’il devait être un jour, ce n’était que par un long travail intérieur qu’il était destiné à le devenir.

1765. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre I. Shakespeare — Sa vie »

III § I William Shakespeare naquit à Stratford-sur-Avon, dans une maison sous les tuiles de laquelle était cachée une profession de foi catholique commençant par ces mots : Moi John Shakespeare. […] Il aimait Stratford-sur-Avon où il était , où son père était mort, où son fils était enterré. […] Il avait ce jour-là juste cinquante-deux ans, étant le 23 avril 1564.

1766. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XI : M. Jouffroy moraliste »

Trempez le bout de l’œuf dans l’huile, la force est vaincue, le développement s’arrête, l’organisation se renverse et vous voyez naître un monstre : l’être n’est point allé à sa fin, sa destinée n’a point correspondu à sa nature. — Il y avait dans le bœuf une force vitale et une force reproductive ; le couteau du vétérinaire et la massue du boucher en ont empêché l’effet ; les tendances existaient, la destinée ne s’est point accomplie. — Il y a en nous un besoin infini de science, de sympathie et de puissance ; la supériorité des forces voisines, l’infinité de l’univers, l’imperfection de notre société nous condamnent à des misères sans nombre, et à des contentements médiocres ; nous avons la tendance, nous n’avons pas la puissance. […] L’attitude de l’esprit les fait naître ; ils ont pour cause un point de vue ; la conscience n’est qu’une manière de regarder. […] IV Il naquit en 1680, dans le comté de Kent, en Angleterre.

1767. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Vie militaire du général comte Friant, par le comte Friant, son fils » pp. 56-68

Louis Friant, sous le chaume à Villers-Morlancourt en Picardie, le 18 septembre 1758, se sentant du goût pour les armes, s’engagea dans les gardes françaises à vingt-deux ans, le 9 février 1781. […] J’aime mieux essayer de les faire sentir que de repasser sèchement toutes les grandes batailles où il fut un des vigoureux artisans, Austerlitz, Auerstaedt, Eylau, Eckmuhl, Wagram, Smolensk, la Moskowa : — une intrépidité de premier ordre, cela va sans dire ; — l’affection de ses troupes qui lui permettait de tirer d’elles de merveilleux surcroîts de fatigue et des combats acharnés au sortir des marches les plus rudes : — « Cet homme me fera toujours des siennes », disait l’empereur, en apprenant une de ces marches sans exemple à la veille d’Austerlitz ; — l’habileté des manœuvres et le coup d’œil sur le terrain, le tact qui lui faisait sentir l’instant décisif, ce talent pratique qui est du tacticien et du capitaine, et qui montre l’homme pour son art (cela se voit surtout dans sa conduite à Auerstaedt, à Eckmuhl) ; — oser prendre, au besoin, la responsabilité de ses mouvements dans les circonstances critiques, sans se tenir à la stricte exécution des ordres ; et, quand il se bornait à les exécuter, une activité sans trêve.

1768. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire de la littérature française, par M. D. Nisard. Tome iv. » pp. 207-218

Nisard est une de ces rares constructions qui sont nées d’une idée, d’un dessein médité, et dont toutes les parties unies et conjointes, en parfait rapport entre elles, attestent la force de la conception, une exécution aussi ferme qu’ingénieuse, de grandes ressources de vues et d’aperçus, et une extrême habileté de style, enfin une forme originale de la critique. […] Il en est de même des peuples célèbres : la plupart ont vu naître dans leur sein des hommes profondément empreints de la physionomie nationale, comme si la nature les eût destinés à en offrir le modèle. — Et c’est ainsi, ajoute-t-il, que la nature produisit dans Voltaire l’homme le plus éminemment doué de toutes les qualités qui caractérisent et honorent sa nation, et le chargea de représenter la France à l’univers. » Et il énumère les qualités nombreuses et les quelques défauts essentiels qui font de lui l’image brillante du Français accompli.

1769. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Appendice — II. Sur la traduction de Lucrèce, par M. de Pongerville »

« Lucrèce dit qu’en un cœur coupable sont tous les fouets, tous les aiguillons de l’enfer ; et que le méchant, ne voyant aucun terme à ses tortures, les prolonge et les aggrave en idée après cette vie : d’où naît la crainte chimérique du Tartare : ……………………… At mens sibi conscia facti, Præmetuens », adhibet stimulos torretque flagellis Mec videt interea, qui terminus esse malorum Possit, nec quæ sit pœnarum denique finis ; Atque eadem metuit magis hæc ne in morte gravescant Hinc Acherusia fit stultorum denique vita. […] des maux d’où naquirent nos pleurs, Le premier il connut, il nomma les auteurs Et dénonça devant l’humanité proscrite De Calchas et des rois l’alliance hypocrite.

1770. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, romans (1832) »

La maturité vint à son génie comme à son humeur, du moins une maturité relative ; dès lors le roman s’ouvrit véritablement pour lui, non pas le roman, sans doute, pris dans le milieu de l’expérience habituelle, dans le courant ordinaire des mœurs, des passions et des faiblesses, non pas le roman familier à la plupart, mais le sien, un peu fantastique toujours, anguleux, hautain, vertical pour ainsi dire, pittoresque sur tous les bords, et à la fois sagace, railleur, désabusé : Notre-Dame de Paris put naître. […] Tant qu’on reste en effet sur le terrain moyen des aventures humaines dans la zone mélangée des malheurs et des passions d’ici-bas, comme l’ont fait Le Sage et Fielding, on peut garder une neutralité insouciante ou moqueuse, et corriger les larmes qui voudraient naître par un trait mordant et un sourire ; mais dès qu’on gravit d’effort en effort, d’agonie en agonie, aux extrémités funèbres des plus poétiques destinées, le manque d’espérance au sommet accable, ce rien est trop, ce ciel d’airain brise le front et le brûle.

1771. (1874) Premiers lundis. Tome I « Alexandre Duval de l’Académie Française : Charles II, ou le Labyrinthe de Woodstock »

Aujourd’hui que la victoire semble décidée et que bientôt la sécurité va naître, la politique et l’art se sépareront sans s’isoler ; l’art, retiré du tourbillon, jeune encore et déjà mûr d’expérience, tracera dans la solitude son œuvre pacifique, qu’il animera de toutes les couleurs de la vie, de toutes les passions de l’humanité. […] Mais quoique la critique en pareil cas ne soit nullement tenue de susciter le génie d’un trait de plume et de l’exhiber à l’heure précise, quoique ce soit là l’affaire du génie lui-même, et de Dieu qui l’a fait naître, on ne serait pas embarrassé, si on l’osait, de compter d’avance et de nommer par leur nom un bon nombre des soutiens et des ornements de cet art nouveau ; tant l’œuvre a déjà mûri dans l’ombre, et tant les choses sont préparées.

1772. (1874) Premiers lundis. Tome II « Chronique littéraire »

Les volontaires irlandais ne se disposent pas non plus à se dissoudre : le bill pour la réforme de l’église d’Irlande qu’a présenté lord Altorp, à la Chambre des communes, avait fait naître des espérances de conciliation que le bill de répression, présenté par lord Grey à la Chambre des lords, a promptement dissipées. […] Les temples sont déserts et les trônes s’en vont ; à toi de saluer dans le linceul immense Le siècle nouveau qui porte un signe au front !

1773. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XV. De l’imagination des Anglais dans leurs poésies et leurs romans » pp. 307-323

Les romans des Anglais ne sont point fondés sur des faits merveilleux, sur des événements extraordinaires, tels que les contes arabes ou persans : ce qu’il leur reste de la religion du Nord, ce sont quelques images, et non une mythologie brillante et variée, comme celle des Grecs ; mais leurs poètes sont inépuisables dans les idées et les sentiments que fait naître le spectacle de la nature. […] Elles seules choisissent leur genre de vie ; les autres sont forcées de se résigner à celui que la destinée leur impose ; et quand on est amené à l’exercice d’une vertu par la privation de quelques avantages personnels, ou par le joug des circonstances, on n’a jamais toutes les idées et tous les sentiments que peut faire naître cette vertu librement adoptée.

1774. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre III. De l’émulation » pp. 443-462

Mais dans ce libre échange, d’où résulte la gloire des écrivains et des philosophes, les idées naissent, pour ainsi dire, de l’approbation même que les hommes sont disposés à leur accorder. […] Combien n’admire-t-on pas dans l’éloquence antique les sentiments respectueux que faisaient naître les regrets consacrés aux morts illustres, les hommages rendus à leur mémoire, les exemples offerts en leur nom à leurs successeurs !

1775. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre II. Le lyrisme bourgeois »

Mais ces pièces ont en général ceci de commun, qu’elles sont d’actualité, nées des circonstances et d’une particulière émotion des esprits. […] On ne sait où il naquit.

1776. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre VII. La littérature française et les étrangers »

Melchior Grimm, en 1723 à Ratisbonne, mort en 1807 à Gotha. […] L’abbé Ferdinand Galiani (1728-1787), à Chieti, secrétaire d’ambassade à Paris, écrivit contre les économistes ses Dialogues sur les blés qui enchantaient Voltaire.

1777. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Baudelaire, Œuvres posthumes et Correspondances inédites, précédées d’une étude biographique, par Eugène Crépet. »

C’est vraiment une âme née malheureuse, tourmentée de désirs toujours indéterminés, toujours inassouvis, toujours douloureux. […] C’est le chef-d’œuvre de la Volonté (je mets, comme Baudelaire, une majuscule), le dernier mot de l’invention en fait de sentiments, le plus grand plaisir d’orgueil spirituel… Et l’on comprend qu’en ce temps d’industrie, de science positive et de démocratie, le baudelairisme ait dû naître, chez certaines âmes, du regret du passé et de l’exaspération nerveuse, fréquente chez les vieilles races… Maintenant il va sans dire que le baudelairisme est antérieur à Baudelaire.

1778. (1888) Demain : questions d’esthétique pp. 5-30

Heureusement qu’ils sont bien inutiles à ceux qui naissent avec un beau génie. […] Dans les besognes écrites auxquelles la vie réduit ceux d’entre nous qui ne sont pas nés avec des rentes ou qui n’ont pas su les garder, nous n’ignorons pas ce qu’il faut, improprement d’ailleurs, entendre par simplicité : c’est le fameux « style coulant », Vous ne parlez pas de cette simplicité-là.

1779. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « La Plume » pp. 129-149

Les esprits saturés de naturalisme sentaient naître un besoin d’idéal. […] Il ramène sur l’auditoire enfiévré la douceur fleurie et tranquille du ciel d’Hellas, et tandis qu’il récite, il semble qu’on entende le bruissement des lauriers-roses au long des rives harmonieuses… Je naquis au bord d’une mer dont la couleur Passe en douceur le saphir oriental… On attendait les chansonniers de Montmartre.

1780. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre I. Place de Jésus dans l’histoire du monde. »

Mais du moment qu’il aura offert sa vie, il verra naître une postérité nombreuse, et les intérêts de Jéhovah prospéreront dans sa main. » De profondes modifications s’opérèrent en même temps dans la Thora. […] La formation toute récente de l’Empire exaltait les imaginations ; la grande ère de paix où l’on entrait et cette impression de sensibilité mélancolique qu’éprouvent les âmes après les longues périodes de révolution, faisaient naître de toute part des espérances illimitées.

1781. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. John Stuart Mill — Chapitre III : Théorie psychologique de la matière et de l’esprit. »

Elles naissent et cessent dans des conditions où notre présence n’a rien à voir, en général. […] Le contraste entre nos sensations actuelles et les possibilités de sensations est donc clair : et quand l’idée de cause est née en nous, rien de plus naturel que de l’étendre à ces possibilités permanentes, que de les considérer comme des existences de nos sensations, mais dont nos sensations sont les effets.

1782. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre III, naissance du théâtre »

C’est du chœur dansant, mené et rythmé dans ces pompes par le Dithyrambe, que la tragédie et la comédie naquirent en même temps. […] Le rire roula vers les groupes et les dialogues populaires, vers les chariots pleins de gestes moqueurs et de huées joviales, qui ramenaient les buveurs et les vendangeurs à la ville ; les larmes grossirent la source d’émotions et de commémorations douloureuses formée par les adorateurs exaltés du dieu, et d’où la tragédie allait naître.

1783. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — I. La métaphysique spiritualiste au xixe  siècle — Chapitre III : Le présent et l’avenir du spiritualisme »

De ce double esprit naissent deux sortes de dispositions, non pas contraires, mais différentes, soit à l’égard des croyances traditionnelles, soit à l’égard des doctrines nouvelles. […] Enfin, nés et élevés dans le christianisme, ils conservent et conserveront toujours pour cette grande religion des sentiments filiaux ; mais ils ont aussi pour la philosophie des sentiments filiaux, et ils ne sont pas disposés autant que leurs amis à mettre au service d’une puissance rivale leur liberté intellectuelle.

1784. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre VI. Du trouble des esprits au sujet du sentiment religieux » pp. 143-159

Fichte a dit, avec autant de profondeur que de raison, que nous naissons tous dans la croyance. […] Ne voyez-vous pas ces hommes nés dans le siècle de l’incrédulité, et élevés dans l’absence de toute crainte religieuse ?

1785. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XV. Mme la Mise de Blocqueville »

Je ne sais point l’âge de Mme Blocqueville, mais elle me fait l’effet d’avoir une bien longue lecture, et peut-être a-t-elle tué sous cette longue lecture quelque petite fleur d’originalité qui voulait naître. […] Mme de Blocqueville, qui fut belle, dit-on, — qui est grandement née, — qui est peut-être aimable dans son salon, — et je suis sûr qu’elle l’est, car il est impossible qu’on y parle comme dans sa Villa des Jasmins ; elle n’y aurait plus personne, — Mme de Blocqueville n’aurait pas du tout de talent littéraire qu’elle aurait dix raisons pour pouvoir très bien s’en passer ; et d’ailleurs, ce n’est pas un si grand malheur que de n’avoir point de talent, quand on sent le talent des autres !

1786. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXI. Mme André Léo »

Elle avait le bonheur et l’honneur d’être petitement née. […] Mme André Léo, probablement née avec cet instinct religieux qui fait tendre en haut la créature humaine, y tend encore, dans les idées qu’elle vient d’exprimer ; mais tendance vaine !

1787. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le colonel Ardant du Picq »

L’auteur des Études sur le Combat excepte, il est vrai, un très petit nombre d’âmes, nées impassibles comme le bronze, et rares comme des aérolithes, car elles semblent venir directement du ciel ; mais cet homme de batailles, qui a pratiqué les batailles et qui n’est dupe d’aucune poésie faite après coup, ne croit guère aux héros que sous bénéfice d’inventaire, et sous l’action déterminée et décisive d’une discipline qui crée l’énergie et fait d’un homme cette force qu’on appelle un soldat… Observateur aiguisé par toutes les expériences de sa vie, le colonel Ardant du Picq sait que la puissance des armées est toujours en raison, non seulement directe, mais unique, de la puissance de leur discipline, et il le prouve, par tous les témoignages de l’histoire, chez les peuples que la guerre a le plus illustrés. […] Elles sont ennemies nées ; l’une sans cesse menace la juste influence, sinon l’existence de l’autre.

1788. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Joubert » pp. 185-199

Depuis Fontenelle, qui n’était pas viable, comme on sait, et qui mit cent ans à expirer, on ne vit jamais rien de plus fragile que Joubert, cette porcelaine fêlée et raccommodée dans du lait, et tenue dans la ouate de la vie la plus douce pendant soixante ans. […] Il y a dans cette notion d’ange quelque chose de beau, de jeune, de guerrier, de dominateur et de rapide qui n’allait point à l’idée de cet être sénile et resté enfant, de cette âme qui se débattait dans un homme et qui avait la voix d’androgyne de la Sagesse, car la voix de la Sagesse n’a point de sexe, comme dit Joubert lui-même en parlant de Fénelon… Intellectuellement, Fénelon serait peut-être la figure à laquelle Joubert, après Platon, ressemblerait le plus.

1789. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Femme et l’Enfant » pp. 11-26

… Mais si la philosophie du xviiie  siècle a péri, il est d’elle une fille qui la continue, tout en dégénérant de sa mère, selon la loi qui inflige à l’Erreur comme au Vice de se dégrader et de s’appauvrir à chaque génération nouvelle ; et cette fille de la philosophie du xviiie  siècle est l’Économie politique. […] Sans croire, comme Alphonse Jobez, que la terre, avec toutes les richesses qu’elle pourrait donner, renferme assez de biens pour assouvir cette âme de l’homme qui n’a point été faite avec une si grossière substance, mais avec un souffle de Dieu ; sans avoir cette mysticité du sol, nous croyons aussi, pourtant, que les peuples et les hommes dépendant de leurs besoins et de leur bien-être, — quoique ces besoins et ce bien-être soient le plus petit et le plus bas côté de leur destinée, — la voie de prospérité la meilleure est encore la culture du morceau de globe sur lequel ils sont nés.

1790. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Madame de Montmorency » pp. 199-214

Née des Ursins, de race pontificale, et Montmorency par mariage, cette femme, qui ne fut jamais qu’une épouse et une veuve chrétienne, a plus attiré son délicat biographe que les gloires tapageuses d’une époque où les femmes se dessinaient, avec plus ou moins de prétentions ambitieuses, des rôles politiques et littéraires. […] Il n’a pas d’esprit, et peu importe pour nous, d’ailleurs, qu’on l’eût trouvé sans conversation à l’hôtel de Rambouillet, s’il avait eu la délicatesse, cette fleur des âmes bien nées qui vaut mieux que l’intelligence !

1791. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Auguste Vacquerie » pp. 73-89

Vacquerie, qui est trop tard de quelques années, était un romantique attardé et violent, un romantique de la dernière heure et passé l’heure, aussi violent, aussi bruyant que les romantiques de la première. […] Il est chez la littérature.

1792. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Lamennais »

Je suis avec cela. » Comme tous les tristes, il était doux : « Bossuet —  écrit-il — nous dit que la princesse Palatine fut douce avec la mort.

1793. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « III. Donoso Cortès »

quoique tous ces écrits portent à des degrés différents la marque de ce catholicisme qui finît par s’emparer complètement de Donoso Cortès, et le fît naître à force de le féconder, il saute aux yeux que les plus faibles catholiquement de ces écrits sont, au point de vue du talent seul, d’une faiblesse plus que relative… On voit clair comme le jour, à travers ces écrits, ce qu’aurait été toute sa vie Donoso Cortès, sans ce catholicisme maîtrisant et transfigurateur qui fut le ciel pour son talent. […] Cet esprit, brillant, n’aurait bientôt plus résisté à la tentation d’une seule antithèse.

1794. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XVI. Buffon »

en 1707, sous Louis XIV, le Roi réglé et éclatant comme le soleil, qu’il avait pris pour son symbole, Buffon devait garder sur tout lui-même un impérissable reflet de ce grand règne, qui expira sur son berceau, et montrer ce reste de grandeur par la règle, comme pour faire leçon en sa personne à la société déréglée au sein de laquelle il ne vécut pas. […] Il l’aima comme il aima sa femme, comme il aima son fils, comme il aima sa province qu’il ne quitta jamais ; la province où l’on est , patrie concentrée, patrie dans la patrie, peut-être plus profonde et plus chère encore que l’autre patrie !

1795. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XVII. Saint-Bonnet »

Saint-Bonnet ne s’est pas contenté de poser une question d’histoire et d’établir superficiellement un rapport de cause à effet entre la moralité des auteurs païens, dont les œuvres sont livrées trop tôt à de sympathiques admirations, et la moralité des hommes nés dans le sein du christianisme et qu’a lavés, même intellectuellement, le baptême. […] Aux yeux de ce double penseur, l’Anarchie, fille de la Révolution française, née dans le sang affreusement fécond qu’avait essuyé pourtant un grand homme, l’Anarchie, vaincue une seconde fois dans l’État, se réfugie actuellement dans la pensée, dans la philosophie, dans cette partie immatérielle et abstraite de l’homme, d’où, au premier jour, elle redescendra dans les faits, plus forte que jamais, plus armée et plus menaçante !

1796. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Agrippa d’Aubigné »

Ce partisan, qui le plus longtemps combattit pour la royauté, naquit au pays où devait naître, deux siècles plus tard, Charette, un autre partisan.

1797. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Hector de Saint-Maur »

Elle ne renaissait pas : elle naissait ! […] Sa Muse est née à la même place que la Muse d’Hégésippe Moreau, qui eut aussi l’impérissable accent gai au milieu de toutes les misères de sa vie.

1798. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Xavier Aubryet et Albéric Second » pp. 255-270

Le roman d’Albéric Second est l’histoire d’un amour dans les circonstances les plus inattendues et les moins propres, semble-t-il, à faire naître l’amour dans une âme… Il faut être, en effet, un écrivain très sûr et très maître de soi pour avoir osé la circonstance, et l’état mental et physique, et l’immonde costume dans lequel, dès les premières pages de son livre, l’auteur fait apparaître son héros, attaqué de folie, fuyant son cabanon, se présentant, effaré, aux yeux de tout Paris, en plein théâtre Italien, dans la loge de la comtesse Alice.

1799. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Arsène Houssaye » pp. 271-286

Il est beau, spirituel, riche, grandement , étranger et bizarre, deux conditions de séduction essentielles pour les femmes françaises. […] ce Boucher et ce Fragonard littéraire a des pages terribles, que je signalerai quand je m’occuperai de son œuvre entière… Quant aux femmes qui ne tombent pas, et qui semblent nées tombées, tant leur innocence dure peu et se perd dans les lointains !

1800. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Raymond Brucker » pp. 27-41

Brucker, sur le fumier de l’incrédulité, qui ne vaut pas celui de Job, a longtemps été philosophe, mais est devenu un chrétien, avant de recevoir son coup de lumière dans l’intelligence. […] Raymond Brucker est quelques années avant le siècle.

1801. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Prosper Mérimée. » pp. 323-336

Prosper Mérimée a eu le bonheur de naître à la littérature en cet instant, qui sera probablement unique dans l’histoire du dix-neuvième siècle, où la France, lasse de guerre et de politique, sembla vouloir changer de gloire, et se retourna vers les choses de l’esprit avec cette furie française qui n’a d’égale que les mollesses qui la suivent. […] Le bon moment pour naître, l’étonnant fanatisme, cela allait jusque-là, d’un critique célèbre, sans enthousiasme, mais, au contraire, habituellement difficile et hargneux, l’influence de la Revue des Deux-Mondes, aussi réelle alors qu’elle est nulle maintenant, tout, jusqu’à la rareté de ses publications, — rareté qui tenait même à la nature de son talent, — facilita la fortune littéraire de M. 

1802. (1868) Curiosités esthétiques « VIII. Quelques caricaturistes étrangers » pp. 421-436

Ces prestigieuses petites créatures ne sont pas toujours nées viables. […] Ses monstres sont nés viables, harmoniques.

1803. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre IV. »

dans l’île de Paros, vers la dix-septième olympiade, six siècles avant notre ère, Archiloque courut toutes les aventures de la vie civilisée d’alors, tout ensemble poëte et guerrier, diffamé dans ses mœurs, redouté pour ses vers, implacable ennemi domestique, faible défenseur de ses concitoyens, et couvrant de son impudence encore plus que de son génie sa désertion dans le combat, et la perte de ce bouclier avec lequel ou sur lequel un Spartiate devait revenir du champ de bataille. […] sous une date certaine, attestée par les marbres officiels de Paros, sa patrie, Archiloque fut un témoin immortel de la corruption précoce, comme de l’éclat du génie grec.

1804. (1894) La bataille littéraire. Septième série (1893) pp. -307

Au milieu de son agonie, il apprend que cet enfant tant souhaité, le but, l’excuse de son amour, est sur le point de naître. […] libre, il a toujours dit ce qui lui passait par la tête, dans la forme qui lui plaisait, et, comme il était écrivain, personne n’a eu à s’en plaindre, ni lui ni les lecteurs. […] D’ailleurs il est heureusement et naturellement appliqué. […] Pourquoi ne puis-je m’attacher à ce qui naît et à ce qui meurt ? Pourquoi ne puis-je aimer que l’invisible qui ne naît et ne meurt jamais, mais qui est toujours ? 

1805. (1887) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Troisième série pp. 1-326

Tout laquais, valet de chambre ou secrétaire qu’il soit, il n’est pas ennemi de son maître, ni de ses semblables. […] Gil Blas est dans une condition modeste, humble même et presque misérable, mais toutefois honnête, et nous rentrons avec lui dans la vérité de la vie. […] Car il n’est pas rigoureusement vrai qu’autrefois, comme on le répète, un homme «  chrétien et français » ne fût pas en voie d’arriver à tout ; seulement, pour y arriver, ce qu’on doit dire, c’est qu’il fallait, s’il était «  peuple », qu’il passât par le canal de la domesticité. […] Le Spectateur d’Addison avait préparé justement les voies à quelque chose de nouveau, mais qui n’était pas encore . […] Il n’importe que le citoyen de Genève, comme on l’a dit, fût de famille bourgeoise : les aventures de sa triste jeunesse l’avaient assez tôt déclassé.

1806. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Barbusse, Henri (1873-1935) »

Les Pleureuses viennent l’une après l’autre ; tous leurs yeux n’ont pas les mêmes larmes, mais c’est le même convoi qu’elles suivent, le convoi, dirait-on, d’une âme morte avant de naître… C’est bien une âme, oui, plutôt même qu’un cœur, qui se désole en ce poème, tant tous les sentiments, l’amour, les désespoirs, et les haines aussi, s’y font rêve… Les Pleureuses pleurent en des limbes, limbes de souvenance où se serait reflété le futur.

1807. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 198-200

Balzac, [Jean-Louis Guez, Seigneur de] de l’Académie Françoise, à Angoulême en 1594, mort en 1654, a rendu à l’Eloquence Françoise le même service que Malherbe venoit de rendre à la Poésie.

1808. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 227-229

Batteux, [Charles] Abbé, Professeur de Philosophie au Collége Royal, de l’Académie Françoise & de celle des Inscriptions, dans le Diocese de Reims, mort à Paris en 1780.

1809. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 245-247

Beaumelle, [Laurent Angliviel de la] à Valleraugue, Diocese d’Alais, en 1727, mort à Paris en 1773.

1810. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 252-254

Beauvais, [Jean-Baptiste-Charles-Marie de] Evêque de Senez, en Basse-Normandie en 1733.

1811. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 266-268

Benserade, [Isaac de] de l’Académie Françoise, à Lyons, petite ville de la Haute-Normandie, en 1612, mort à Paris en 1691.

1812. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 275-277

Bergier, [Nicolas-Silvestre] Docteur en Théologie & Chanoine de Notre-Dame, de l’Académie de Besançon, à Darnay en Lorraine, en 1718.

1813. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 344-346

Bougeant, [Guillaume-Hyacinthe] Jésuite, à Quimpert en 1690, mort à Paris en 1743.

1814. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 400-402

Bruyere, [Jean de la] de l’Académie Françoise, dans un village de l’Isle de France, en 1639, mort en 1696.

1815. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 414-416

Bussy, [Roger de Rabutin, Comte de] de l’Académie Françoise, à Epiri dans le Nivernois en 1618, mort à Autun en 1693 ; Bel-Esprit de la Cour de Louis XIV, & un des plus polis Ecrivains de son siecle ; nous ne disons pas des meilleurs, parce qu’avec de la vivacité dans l’esprit, de la facilité pour écrire, il a peu de littérature, trop de penchant à la satire, plus de finesse que de justesse dans le raisonnement, & sur-tout un ton de prétention qui dépare toutes ses bonnes qualités.

1816. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 418-420

Les Pieces qu’il a composées en ce genre, annoncent une adresse heureuse pour ajuster le merveilleux au fond du sujet, & le faire naître des circonstances amenées sans effort .

1817. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 88-90

Dacier, née à Saumur en 1651, morte à Paris en 1720, a été la femme la plus savante ou la plus érudite que la France & peut-être les autres pays aient produite.

1818. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 134-135

DESFONTAINES, [Pierre-François Guyot] à Rouen en 1685, mort à Paris en 1745 ; le Boileau de notre siecle, qui auroit arrêté la décadence de la Littérature Françoise, si Pergama dextrâ defendi posset.

1819. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 397-399

GIBERT, [Baltazar] ancien Recteur de l’Université, Professeur de Rhétorique au Collég Mazarin, parent du précédent, , comme lui, à Aix en 1662, mort en 1741.

1820. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — J. — article » pp. 531-533

IMBERT, [Barthelemi] de l’Académie de Nîmes, sa patrie, en 1747.

1821. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 167-169

Bonnot de] Abbé, de l’Académie de Lyon, frere de M. l’Abbé de Condillac, , comme lui, à Grenoble en 1720.

1822. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 208-210

MARCHE, [Nicolas Maréchal de la] Abbé, dans la Franche-Comté en 1746.

1823. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 235-237

MARSAIS, [César Chesneau du] Avocat au Parlement de Paris, à Marseille en 1676, mort à Paris en 1756 ; un des plus habiles & des plus profonds Grammairiens de notre Nation.

1824. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 328-330

MOINE D’ORGIVAL, [Henri le] Curé de Gouvieux, près de Chantilly, où il est vers l’an 1719, Auteur de quelques Ouvrages de Littérature, qui annoncent plus de talens naturel & d’érudition, que de goût & de solidité.

1825. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 378-380

MOTHE LE VAYER, [François de la] Précepteur du Duc d’Orléans frere de Louis XIV, de l’Académie Françoise, à Paris en 1588, mort en 1672.

1826. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — N. — article » pp. 408-410

NICOLE, [Pierre] parent du précédent, à Chartres en 1625, mort à Paris en 1695 ; savant Théologien, habile Controversiste, bon Moraliste, Critique partial.

1827. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 84-86

Richelieu, [Jean-Armand Duplessis, Duc de] Cardinal & Ministre d'Etat, à Paris en 1585, mort en 1642.

1828. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 180-182

Sage, [Alain-René le] à Ruis en Bretagne en 1677, mort à Boulogne-sur-mer en 1747.

1829. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 219-221

Saint-Pierre, [Charles-Irénée Castel de] Abbé, en Normandie en 1658, mort à Paris en 1743.

1830. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 253-255

Saurin, [Bernard-Joseph] Avocat, de l'Académie Françoise, à Paris en 17..

1831. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 260-261

Sauvigny, [Edme de] ancien Lieutenant de Cavalerie, Censeur de la Police, de l'Académie de Rouen, en Bourgogne en 17..

1832. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 353-355

Titon du Tillet, [Evrard] Commissaire Provincial des Guerres, de plusieurs Académies de Province & des Pays étrangers, à Paris en 1677, mort dans la même ville en 1762.

1833. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 369-371

Toussaint, [François-Vincent] Avocat, de l’Académie de Berlin, à Paris en 1715, mort à Berlin en 1772, où il étoit Professeur de Belles-Lettres Françoises.

1834. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Mystères. » pp. 35-37

Alors naquit la comédie profane, qui, livrée à elle-même et au goût peu délicat de la nation, tomba, sous Henri III, dans une licence effrénée, et ne prit le masque honnête qu’au commencement du siècle de Louis XIV.

1835. (1837) Lettres sur les écrivains français pp. -167

Karr qui est en Bavière, a été professeur et maître d’études dans un collège. […] Jal, le littérateur maritime, qui, m’a-t-on assuré, est à l’âge de trois ans, ex-officier de marine. […] Jal, , dit-on, à l’âge de trois ans, ex-officier de marine. […] Il a gagné la croix de la Légion-d’Honneur à être avec la bosse de la marine. […] Née entre les mains libérales de M. 

1836. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — F — Fabié, François (1846-1928) »

François Fabié est dans le Rouergue, d’une mère paysanne et d’un père bûcheron.

1837. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Monselet, Charles (1825-1888) »

— Mon dernier (1883). — L’Argent maudit (1884). — Petits mémoires littéraires (1885). — Oubliés et dédaignés (1886). — Les Amours du temps passé (1887). — De A à Z (1888). — Poésies (1889).

1838. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — X — Xanrof, Léon (1867-1953) »

Il y a du Murger dans Xanrof, dont la muse a passé les ponts mais naquit au quartier latin, comme Mimi-Pinson et Musette.

1839. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 249-251

Beausobre, [Isaac de] à Niort en 1659, mort à Berlin en 1738, où il s’étoit réfugié.

1840. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 484-486

Charron, [Pierre] Théologal de la Cathédrale de Condom, à Paris en 1541, mort subitement dans une rue de la même ville, en 1603 ; génie profond & facile qui tenoit de celui de Montagne, son ami.

1841. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 115-117

DAQUIN de Chateau-Lyon , Docteur en Médecine, fils du célebre Organiste, à Paris en 17..

1842. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 179-181

Benoît, de l’Académie des Arcades de Rome, à Amiens en 1716 ; successivement Poëte Latin, Poëte François, Traducteur, Commentateur, Historien, Compilateur, Journaliste, sans qu’on puisse dire qu’il ait réussi dans aucun genre.

1843. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 328-331

FRANC, [Jean-George le] ci-devant Evêque du Puy, aujourd’hui Archevêque de Vienne, à Montauban en 1714.

1844. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 340-342

FRANÇOIS, [Louis] Avocat au Parlement de Paris, des Académies de Nancy, de Lyon, de Marseille & de Dijon, à Neuf-Château en 1752.

1845. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 377-379

GARNIER, [N] Abbé, Professent d’Hébreu au College Royal, de l’Académie des Inscriptions & Belles-Lettres, en 17..

1846. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 412-415

GODEAU, [Antoine] Evêque de Grasse, à Dreux en 1605, mort à Vence en 1672.

1847. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 416-419

Honoré, dans le Diocese de Rouen en 1728.

1848. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — J. — article » pp. 544-546

IVETEAUX, [Nicolas Vauquelin des] Abbé, fils du Poëte la Fresnaye, dans un Château près de Falaise, mort en 1649 ; est plus connu par son goût pour les plaisirs, que par ses Ouvrages, quoiqu’il écrivît dit-on, purement en Latin, en Italien & en François, soit en Prose, soit en Vers.

1849. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 277-279

MAURY, [Jean-Siffrein] Abbé, Prédicateur ordinaire du Roi, de l’Académie des Arcades de Rome, en 1746.

1850. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 301-304

METTRIE, [Julien-Offroi la] Médecin, de l’Académie de Berlin, à Saint-Malo en 1709, mort à Berlin en 1751 ; Auteur éclairé de plusieurs bons Ouvrages sur la Médecine & contre les Médecins, & Auteur frénétique de plusieurs Livres de Philosophie, qui font également tort aux Lettres & à la Raison.

1851. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — N. — article » pp. 412-415

Duc de] Chevalier des Ordres du Roi, de l’Académie Françoise, &c. en 17..

1852. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 2-5

Rabelais, [François] Cordelier, puis Bénédictin, puis Chanoine, ensuite Médecin, & enfin Curé de Meudon, à Chinon en 1483, mort en 1553.

1853. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 115-117

Rochon de Chabannes, [N.ABCD] à Paris en 17..

1854. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 266-268

Scudery, [George de] Gouverneur de Notre-Dame de la Garde, de l'Académie Françoise, au Havre de Grace en 1603, mort à Paris en 1667, est celui à qui Boileau adressoit autrefois ces Vers : Bienheureux Scudery, dont la fertile plume, Peut tous les mois, sans peine, enfanter un volume.

1855. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre premier. Que la poétique du Christianisme se divise en trois branches : Poésie, Beaux-arts, Littérature ; que les six livres de cette seconde partie traitent spécialement de la Poésie. »

D’ailleurs, la tragédie même n’est-elle pas née de l’Iliade, comme la comédie est sortie du Margitès ?

1856. (1763) Salon de 1763 « [À mon ami Monsieur Grimm. » pp. 171-182

C’est que la musique faisait partie de l’éducation libérale : on présentait une lyre à tout enfant bien .

1857. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Henriette d’Angleterre » pp. 7-9

La tragédie de cette mort, que Bossuet raconte avec des éclats de tonnerre, madame de La Fayette nous la dit avec cette émotion contenue de grande dame de son temps, où le cœur ne rompait pas le busc, et où la Convenance, sœur de l’Opinion et reine comme elle, n’empêchait pas les larmes de naître, mais les empêchait de tomber.

1858. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXVe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (1re partie) » pp. 337-416

Mille fois plus éloquent que Platon, mille fois plus passionné que Fénelon, aussi poétique que le sophiste grec, aussi religieux que l’archevêque français, à une époque où le vieux monde féodal mourait, où la France sentait déjà remuer dans ses flancs l’embryon d’une révolution radicale, l’enfant de Genève, J. […] Ceux-là naissent avec leur rhétorique dans leur cœur ; ils allument parce qu’ils sont allumés. […] « Il y avait six ans qu’elle y était quand j’y vins, et elle en avait alors vingt-huit, étant née avec le siècle. […] Mais, tout jeune que j’étais, et tout poète qu’on me reprochait d’être, j’avais un puissant sentiment du vrai ou du faux dans la politique ; quoique très dévoué aux progrès rationnels des idées et des institutions sociales, j’étais un ennemi des utopies, ces mirages qu’on présente aux peuples comme des perspectives, et qui les égarent sur leur route, dans des déserts sans fruits et sans eaux. […] voilà un enfant dans la boutique d’un artisan, le point de vue le plus étroit pour voir le monde tout entier ; car le défaut de l’artisan est précisément de ne rien voir d’ensemble, mais de tout rapporter à son seul outil, et à sa seule fonction dans la société : gagner sa vie, travailler de sa main, recevoir son salaire, se plaindre de sa condition, si rude en effet, et envier si naturellement les heureux oisifs ; Voilà un enfant qui, dégoûté de l’honnête labeur paternel avant de l’avoir même essayé, se prend à rêver au lieu de limer, s’évade de l’atelier et de la boutique de son père, va de porte en porte courir les aventures, préférant le pain du vagabond au pain de la famille et du travail ; vend son âme et sa foi avec une hypocrite légèreté au premier convertisseur qui veut l’acheter pour trois louis d’or, qu’on lui glisse dans la main, en le jetant, avec sa nouvelle religion, à la porte ; Voilà un adolescent qui se prostitue volontairement de domesticité en domesticité dans des maisons étrangères, se faisant chasser de tous ces foyers honnêtes pour des sensualités ignobles, ou pour des larcins qu’il a la lâcheté de rejeter sur une pauvre jeune fille innocente et déshonorée !

1859. (1890) L’avenir de la science « III » pp. 129-135

Il faut dire du surnaturel ce que Schleiermacher disait des anges : « On ne peut en prouver l’impossibilité ; cependant, toute cette conception est telle qu’elle ne pourrait plus naître de notre temps ; elle appartient exclusivement à l’idée que l’antiquité se faisait du monde 32. » La croyance au miracle est, en effet, la conséquence d’un état intellectuel où le monde est considéré comme gouverné par la fantaisie et non par des lois immuables. […] C’est la règle étroite qui fait naître l’équivoque. […] Il y a, je le sais, une génération d’égoïstes, qui a grandi à l’ombre d’une longue paix, génération sceptique, née sous les influences de Mercure, sans croyance ni amour, laquelle, au premier coup d’œil, a l’air de mener le monde. […] Observez d’abord que les esprits superficiels, qui en appellent sans cesse au bon sens, désignent par ce nom la forme très particulière et très bornée de coutumes et d’habitudes où le hasard les a fait naître. […] Voulez-vous un type de cette manière irrévérencieuse de traiter la science, de la prendre comme un jeu d’esprit, bon à délasser d’une vie défleurie ou à faire naître ce rire inepte, si recherché de ceux à qui est interdit le rire de bon aloi, lisez le Journal de Trévoux et en général les ouvrages scientifiques sortis de la même Compagnie, laquelle, pour le dire en passant, n’a pu produire un seul savant sérieux (Kircher peut-être excepté, lequel a bien aussi ses folies ; mais ces folies étaient celles de son siècle) et a produit par contre quelques types incomparables du charlatanisme scientifique, Bougeant, Hardouin, etc.

1860. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre VIII. La littérature et la vie politique » pp. 191-229

Il écrivait : « Quand verra-t-on naître des poètes ? […] Cette vue, nous l’avons acquise par nos propres expériences, nous la devons aux prodigieuses mutations du pouvoir et de la société qui se sont opérées sous nos yeux ; et, chose singulière, une nouvelle intelligence de l’histoire semble naître en nous, à point nommé, au moment où se complète la grande série des renversements politiques, par la chute de l’empire élevé sur les ruines de la République française, qui avait jeté à terre la monarchie de Louis XVI. » En même temps que le sens historique s’aiguisait ainsi, des idées inconnues surgissaient ; des émotions nouvelles, matière littéraire s’il en fut, sollicitaient les écrivains. […] C’est en vain que Néron prospère ; Tacite est déjà dans l’Empire ; il croît inconnu auprès des cendres de Germanicus et déjà l’intègre Providence a livré à un enfant obscur la gloire du monde. » Dès lors c’est un ennemi qu’il faut frapper. […] Il a jeté une teinte de ridicule sur les œuvres nées loin de lui ; il a dédaigné, ignoré les hommes qui n’ont pas pu ou voulu entrer dans son orbite. […] Or, ainsi que l’a dit un écrivain moderne73, « les grands poètes naissent comme les bluets dans les blés ; mais dans les moissons humaines que faisait Napoléon, les bluets tombaient avec les épis »

1861. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre deuxième. L’idée de l’espace. Son origine et son action »

D’autre part, le mouvement seul de la main ne nous donnerait pas l’idée d’espace si les diverses positions du membre mû n’avaient entre elles d’autres différences que celles qui naissent du mouvement même, s’il n’y avait pas encore en elles des différences de coloris produites par le rapport vaguement senti de chaque position à l’ensemble de notre corps et à son extension vaguement sentie. […] L’animal naît avec le besoin héréditaire de cette position, et il est averti des changements de position par des sensations spécifiques de poids, sensations dont les relations mutuelles se trouvent alors altérées. […] Enfin cette organisation de tout l’objectif en choses diversement situées dans l’espace se transmet en s’accroissant par l’hérédité, et l’enfant naît avec le cerveau hanté des figures d’espace comme l’oiseau avec l’image du nid. […] Lachelier distingue trois idées pures de l’être, dont « la plus haute, naît d’un libre vouloir et n’est réellement que liberté ». « Cette idée, ajoute-t-il, n’a pas, à proprement parler, d’image sensible ; mais elle se réalise dans la pensée appliquée ou empirique, qui réfléchit sur la conscience sensible et affirme l’existence des éléments qui la constituent. » Ainsi naissent les formes à priori.

1862. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 3665-7857

Oui, comme on naît poëte, historien, orateur, c’est-à-dire avec des dispositions à le devenir par l’exercice & l’étude. […] Un esprit chagrin, plaît par son chagrin même. […] Socrate n’étoit pas sage, & son naturel en se redressant ne s’étoit pas estropié ». […] Or quel vrai bien d’un monstre peut-il naître ? […] Que d’un intérêt puissant naissent des divisions cruelles ; on a dû s’y attendre, & l’exemple est infructueux.

1863. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — chapitre VI. Les romanciers. » pp. 83-171

En vain la captivité chez les Maures et la possession d’une plantation fructueuse lui conseillent le repos : l’instinct indomptable se réveille ; « il est pour être son propre destructeur », et il se rembarque. […] Mon héros est l’homme qui naît généreux, comme le chien naît affectueux, et comme le cheval naît brave. […] Poussez à l’excès cette étude des particularités humaines, vous verrez naître le talent de Sterne. […] On y voit les sources de cette vertu, née du christianisme et de la bonté naturelle, mais alimentée longuement par la réflexion intérieure. […] Détestables Yahous que vous êtes, et qui prétendez usurper la lumière bénie, dans quel cerveau avez-vous pu naître, et pourquoi un peintre est-il venu salir les yeux de votre aspect ?

1864. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLe entretien. L’homme de lettres »

Duval était loin d’approuver les projets de son jeune ami ; mais il ne les blâmait pas ouvertement, car il sentait que les dégoûts de l’ambition ne peuvent naître que des mécomptes de l’ambition. […] M. de Villebois était Français, et ne démentait pas cette noble origine. […] Elle était née à Madagascar, d’où elle avait apporté quelque industrie, surtout celle de faire des paniers et des étoffes appelées pagnes, avec des herbes qui croissent dans les bois. […] On ne les avait jamais effrayés en leur disant que Dieu réserve des punitions terribles aux enfants ingrats: chez eux, l’amitié filiale était née de l’amitié maternelle. […] Il naquit de ces deux fruits deux cocotiers, qui formaient toutes les archives de ces deux familles: l’un se nommait l’arbre de Paul, et l’autre, l’arbre de Virginie.

1865. (1880) Goethe et Diderot « Diderot »

Il n’était pas plus métaphysicien qu’il n’était poète, mais il avait des aptitudes métaphysiques comme il avait des facultés poétiques. […] Il est toujours le fils du coutelier de Langres, éduqué, littéraire, un monsieur du tiers, — de ce tiers qui va naître. […] Mais le crime de Diderot et de ses théories c’est de nous avoir gâté un homme plus fort que lui en nous gâtant Beaumarchais, — car il faut bien mettre au compte de Diderot Eugénie, les Deux Amis et la Mère coupable ; c’est d’avoir retardé l’avènement et hâté la fin d’un homme d’esprit et de génie, qui s’est débattu longtemps dans le pathos de Diderot avant de naître à des chefs-d’œuvre, et qui, ténacité des influences premières, a fini par y retomber ! […] S’il n’était pas un homme de génie ni même de talent dramatique, il était comédien et gesticulateur. […] très sincèrement, je le crois, il eût pu en être un ; mais, pour cela, il fallait d’abord avoir dans la tête une notion juste de la Critique, et il l’avait pas.

1866. (1920) Impressions de théâtre. Onzième série

En somme, je lui reproche de dire : « La tragédie ne pouvait plus vivre », au lieu de « La tragédie ne vivait plus », et : « Le drame devait naître », au lieu de : « Le drame naquit. » Je veux croire que ce n’est qu’une nuance. […] Il a semé sur la mer le sang qui ruisselait de ses blessures, et, de cette écume rouge, Vénus est née. […] Elle n’entend rien, elle ne raisonne pas : « Reine je suis née ; reine je mourrai. […] L’aube naît ! […] Où est-elle née ?

1867. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Soumet, Alexandre (1788-1845) »

Avec un sentiment plus juste, plus raisonnable de sa vocation, il n’eût pas causé à ceux qui l’ont connu et aimé — c’est presque un pléonasme — le chagrin de le voir, malgré une somme considérable d’efforts, de savoir-faire et de mérite, placé, en fin de compte, au-dessous d’écrivains qui, nés avec moins d’ambition et dans des circonstances plus propices, ont su, quoique très moins doués sous beaucoup de rapports, acquérir des titres plus réels, plus durables à l’estime de la postérité.

1868. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 285-288

Berruyer, [Isaac-Joseph] à Rouen en 1681, mort à Paris en 1758, seroit sans contredit le meilleur de nos Historiens, si les Histoires qu’il a écrites portoient un autre titre que celui de Peuple de Dieu.

1869. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 421-423

Cailhava, [Jean-François] à Toulouse en 17..

1870. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 76-79

CRÉBILLON, [Prosper Jolyot de ] de l’Académie Françoise, à Dijon en 1674, mort à Paris en 1762.

1871. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 111-114

DANIEL, [Gabriel] Jésuite, Historiographe de France, à Rouen en 1649, mort à Paris en 1728.

1872. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 210-213

DUFRESNY, [Charles Riviere] Valet-de-Chambre de Louis XIV, & Contrôleur de ses Jardins, à Paris en 1648, mort dans la même ville en 1724.

1873. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 367-370

GALLOIS, [Jean] Professeur en Grec au Collége Royal, de l’Académie Françoise & de celle des Sciences, à Paris en 1632, mort dans la même ville en 1707.

1874. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 445-448

GRESSET, [Jean-Baptiste-Louis] de l’Académie Françoise & de celle de Berlin, à Amiens, mort en 1777.

1875. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 459-462

PASCAL, [Blaise] à Clermont en Auvergne, en 1623, mort à Paris en 1662, Génie qui a su allier l’énergie des pensées avec l’élégance & la pureté du langage, ce qui le place, sans contredit, parmi les meilleurs Ecrivains du Siecle de Louis XIV.

1876. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 474-476

PAULET, [Jean-Jacques] Docteur en Médecine de la Faculté de Paris & de celle de Montpellier, à Anduse, dans le Bas-Languedoc, en 1740.

1877. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 480-482

PELISSON, [Paul] de l’Académie Françoise, à Beziers en 1624, mort à Paris en 1693.

1878. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 544-547

POSTEL, [Guillaume] à Baranton dans la Basse-Normandie, mort à Paris, âgé de 107 ans, en 1581, & non en 1582, comme l’ont assuré plusieurs Auteurs.

1879. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 548-551

POULE, [Louis] Abbé de Notre-Dame de Nogent, Prédicateur du Roi à Avignon en 1711.

1880. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 419-421

Vély, [Paul-François] Abbé, à Crugni, en Champagne, en 1709, mort en 1759.

1881. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 453-456

Voiture, [Vincent] de l’Académie Françoise, à Amiens en 1598, mort à Paris en 1648.

1882. (1835) Critique littéraire pp. 3-118

C’est leur faute, suivant nous, bien plus que celle de la nature, qui n’a jamais manqué aux grandes époques de l’humanité ; alors les hommes de génie naissent en foule. […] d’une révolution qui a versé des bienfaits sur le monde, mais qui a laissé de grands maux à réparer, il n’a pas cette extrême confiance d’une subordination traditionnelle à des lois immuables ; mais il n’a pas non plus cette crainte d’une dissolution prochaine, qui caractérise les époques de décadence ; il sait que les barbares sont encore loin ! […] Il n’obéit pas à la langue, il l’asservit, il la domine ; il la conduit par des chemins qu’elle n’a jamais pris ; il lui apprend un métier qu’elle n’a jamais fait, pour lequel elle n’est pas née. […] L’occasion s’en offrit bientôt ; les Anglais la firent naître. […] Ceux de nos compatriotes qui chercheront sa tombe sur cette plage lointaine où il mourut, la reconnaîtront à cette modeste inscription : Victor Jacquemont, à Paris le 28 août 1801, est mort à Bombay, le 7 décembre 1832, après avoir voyagé pendant trois ans et demi dans l’Inde.

1883. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Saint-Martin, le Philosophe inconnu. — II. (Fin.) » pp. 257-278

Peu de temps après avoir été sur la bruyère de Chanteloup, il servit de témoin, et, comme on dirait en temps ordinaire, de parrain à un enfant mâle qui naquit à un brave homme d’Amboise. […] Après avoir parlé, puisqu’il le faut, de Condillac, de ce fameux Traité des sensations, de cette statue « où tous nos sens naissent l’un après l’autre, et qui semble être la dérision de la nature, laquelle les produit et les forme tous à la fois », il en vient à la lecture qu’il a faite également de Bacon : Quelle impression différente j’en ai reçue ! […] [NdA] Si l’on en veut une preuve que j’ose dire inimaginable, on n’a qu’à lire la pensée suivante où l’illusion pacifique, jointe à la préoccupation de soi et à la confiance qu’on a d’être l’objet spécial de la prédilection divine, passe tous les degrés : Je me suis senti tellement pour la paix et pour le bonheur, et j’ai eu de si fréquentes expériences que l’on m’avait même dès ce monde comme environné du lieu de repos, que j’ai eu la présomption de croire que dans tous les lieux que j’habiterais il n’arriverait jamais de bien grands troubles ni de bien grands malheurs.

1884. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — II » pp. 454-475

Dans une trentaine de pages qui seraient aussi bien un fragment de mémoires historiques, il montre comment cette Révolution est née sans qu’on le voulût, et avec quel zèle imprudent on y poussait dans les hautes sphères qui devaient le plus terriblement s’en ressentir. […] Dès qu'elle est née et produite, il la reconnaît comme une puissance sans arrêt et une sorte de fatalité irrésistible. […] L’ambition est une passion dangereuse et vaine, mais ce serait un malheur pour la plupart des hommes que d’en être totalement dénués ; elle sert à occuper l’esprit, à préserver de l’ennui qui naît de la satiété ; elle s’oppose dans la jeunesse à l’abus des plaisirs, qui entraînerait trop vivement ; elle les remplace en partie dans la vieillesse, et sert à entretenir dans l’esprit une activité qui fait sentir l’existence et ranime nos facultés.

1885. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni. »

Gavarni n’est qu’un nom de guerre ; il s’appelle de son nom de famille Chevallier (Sulpice-Guillaume), à Paris, mais, du côté de son père, originaire de Bourgogne ; du village de Saint-Sulpice, aux environs de Joigny. […] Il ne reçut pas l’éducation classique et de collège, et il se trouvera ainsi plus tard libre et affranchi de toute tradition, garanti contre l’imitation qui naît du souvenir. […] Peu d’hommes, indépendamment de toute éducation et de tout acquit, sont nés aussi instinctivement distingués ; j’entends par distinction « une certaine hauteur ou réserve naturelle mêlée de simplicité. » Dans tout ce qui sort de son crayon, de même : il est toujours élégant, aussi peu comme il faut que possible quand il le faut et que ses personnages l’y forcent, aussi bas que le ton l’exige ; il n’est jamais commun.

1886. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Josèphe de Saxe, dauphine de France. »

Je naquis dans l’île de Moene, sur les côtes de la Livonie, le 28 d’octobre de l’année 1696. » Non tout d’abord, ce n’est pas dans l’île de Moene, c’est à Goslar, qu’il est  ; peu importe. […] Les lettres et les pièces données par le comte Vitzthum, et qui sont d’une date antérieure au grand rôle que joua le maréchal de Saxe à la tête des armées françaises, nous le font voir comme un esprit, de vaste étendue, de haute visée, de capacité ouverte et multiple, qui ne se circonscrit nullement aux choses de la guerre, bien qu’il soit pour y exceller.

1887. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [I] »

Joachim Du Bellay avait vingt-cinq ans alors : au bourg de Lire, à douze lieues d’Angers, il appartenait à l’illustre famille des Du Bellay, dont les deux frères, le capitaine Langey et le cardinal Du Bellay, s’étaient signalés dans les armes et dans les négociations pendant la première moitié du siècle. […] On le sait maintenant, grâce aux travaux qui se poursuivent avec ardeur et qui ne remontent guère au-delà de ces trente dernières années : dans le haut moyen âge, époque complète, époque franche, qui, sortie d’un long état de travail et de transformation sociale, avait rempli toutes ses conditions et s’était suffi à elle-même, la langue, la littérature française qui était née dans l’intervalle, qui était sortie de l’enfance, qui était arrivée à la jeunesse (de même que l’architecture, que la théologie, que la science en général et que les arts divers), avait eu son cours de progrès et de croissance, une sorte de premier accomplissement ; elle avait eu sa floraison, son développement, sa maturité relative : poétiquement, une belle et grande végétation s’était produite sur une très-vaste étendue, à savoir l’épopée historique, héroïque. […] Comment ne pas respirer l’air où l’on est et où l’on vit ?

1888. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. EUGÈNE SCRIBE (Le Verre d’eau.) » pp. 118-145

Elle n’aurait qu’à répondre pour toute explication : « Je suis esprit, et rien de ce qui tient aux choses de l’esprit ne me paraît étranger. » Villon était enfant de Paris, et vers la place Maubert, je pense. Molière est sous les piliers des halles ; Boileau dans la Cité, à l’ombre du Palais de Justice ; et Béranger a joué avec les écailles d’huîtres de la rue Montorgueil. […] Il est le 24 décembre 1791, en pleine rue Saint-Denis66, dans le magasin de soieries à l’enseigne du Chat Noir, où son père fit une honorable fortune : depuis lors, la maison, en gardant l’enseigne de bon augure, s’est convertie, me dit-on, de magasin de soieries en boutique de confiseur.

1889. (1892) Boileau « Chapitre II. La poésie de Boileau » pp. 44-72

Hugo : Les mots bien ou mal nés vivaient parqués en castes : Les uns nobles, hantant les Phèdres, les Jocastes, Les Méropes ; ayant le décorum pour loi, Et montant à Versailles aux carrosses du roi… Et il est vrai pourtant que les deux images s’équivalent, si l’on tient compte de la différence des temps. […] Du moins il aurait pu le représenter : et ce qui lui manque pour être un grand poète, c’est d’avoir été purement et simplement le poète qu’il était pour être. […] Il était pour faire des vers sonores et colorés, notations d’images et de sensations physiques.

1890. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre II. Clément Marot »

Née en 1492, en un temps où il fallait encore vouloir s’instruire, et le vouloir fortement, elle s’est instruite, et toute sa vie elle a continué de s’instruire ; elle apprit l’italien, l’espagnol, l’allemand, le latin ; Paradis lui donna des leçons d’hébreu, et à quarante ans elle poursuivait encore l’étude du grec avec Duchâtel. […] Née en 1492, mariée en 1509 au duo d’Alençon. veuve en 1525, remariée en 1527 avec Henri d’Albret roi de Navarre, elle meurt en 1519. […] Biographie : en 1496 ou 1497 à Cahors, il est page de Villeroy, puis pensionnaire de la duchesse d’Alençon, ensuite, en 1527, valet de chambre du roi.

1891. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Anatole France »

Il est , je pense, dans quelque vieille maison de la rue de Seine ou du quai Malaquais, dans le quartier des bouquinistes et des marchands d’estampes et de bric-à-brac. […] J’y trouve une vive intelligence de l’histoire, une sympathie abondante, une forme digne d’André Chénier ; et je doute qu’on ait jamais mieux exprimé la sécurité enfantine des âmes éprises de vie terrestre et qui se sentent à l’aise dans la nature divinisée, ni, d’autre part, l’inquiétude mystique d’où est née la religion nouvelle. […] Sois bénie pour le don que tu mis sur mon berceau en t’y penchant seulement ; sois bénie pour m’avoir révélé, quand je naissais à peine à la pensée, les tourments délicieux que la beauté donne aux âmes avides de la comprendre ; sois bénie par celui qui fut l’enfant que tu soulevas de terre pour chercher la couleur de ses yeux !

1892. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIII. Retour de Molière à Paris » pp. 225-264

Par cupidité, il publia qu’il lui était un garçon. […] « Vous avez grand tort de vous plaindre, répond Lelio, car le fruit que vous verrez prochainement naître de moi vous montrera que je n’ai pas perdu le temps, ainsi que vous le dites. » ACTE QUATRIÈME. […] Molière reprend et calme la douleur qu’il a fait naître en faisant attester au brave milicien son inaltérable fidélité, et en lui faisant annoncer qu’il presse de tous ses vœux le jour de leur mariage.

1893. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre premier »

La Réforme dissipa l’ignorance, dégagea la religion de la philosophie, chassa la scolastique née de leur confusion, et l’antiquité chrétienne apparut dans toute sa beauté31. […] Les hommes de génie naissent à propos, pour exploiter toutes les parties de ce domaine conquis sur la barbarie. […] La Réforme, qui la trouva et la laissa catholique, lui inspira l’esprit de tolérance, de l’esprit d’examen et perfectionna ses sentiments religieux, au prix toutefois d’un peu de jargon théologique dans ses écrits.

1894. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les poètes décadents » pp. 63-99

Baju, dans la Charente, était venu depuis peu à Paris, poussé par l’ambition de s’y faire un nom. […] Voici ce que disait le maître dans la notice des Hommes d’aujourd’hui qu’il lui a consacrée : « Anatole Baju, littérateur français, à Confolens (Charente), le 8 mars 1861, fils de meunier, fut élevé au moulin de Saint-Germain-sur-Vienne. […] « Bref, dès ce moment précis, “décadents” — un mot vaguement où ?

1895. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre IX. La littérature et le droit » pp. 231-249

Ils ont fait observer que Voltaire77 a répondu par avance à ceux qui ont faussé, en la tirant hors de l’histoire naturelle, la pensée de Darwin. « Tous les animaux, écrivait le philosophe du xviiie  siècle, sont perpétuellement en guerre ; chaque espèce est née pour en dévorer une autre. […] A quel total n’arriverait-on pas, pour peu qu’on voulût compter celles qu’ont fait naître tant d’autres des prescriptions qu’il contient ! […] Pas plus que la gloire future de l’écrivain, la langue et le style ne se trouvent bien de ces perpétuelles improvisations ; en revanche, certains genres naissent ou prospèrent  ; la polémique sur les affaires publiques prend une intensité et aussi une violence extrêmes ; la critique au jour le jour, le roman débité en tranches, la nouvelle, l’essai, en un mot l’exposé, le commentaire et la discussion de tout ce qui est actuel, susceptible d’être présenté en peu d’espace et compris sans effort, croissent et fleurissent avec énergie.

1896. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XII. La littérature et la religion » pp. 294-312

Il peut sauver qui il lui plaît ; il peut avoir damné dès l’éternité des pécheurs encore à naître ; c’est le mystère de la grâce et de la prédestination sur lequel le xviie  siècle a entassé tant de volumes. […] On est souvent étonné que le xviie  siècle, siècle de foi, surtout si on le compare au nôtre, n’ait pas inspiré d’éloquentes méditations religieuses comme celles de Lamartine et que la plupart des vers dévots, nés alors, soient d’une glaciale froideur ou même d’une remarquable platitude. […] L’opposition acharnée qu’elle a faite au développement de l’instruction populaire prouverait, à elle seule, la défiance et peut être la rancune qu’elle nourrit contre la vertu émancipatrice contenue dans les œuvres littéraires, du moment qu’elles se dérobent à sa tutelle et se proclament libres de toucher à ces grands sujets qui étaient jadis, au dire de La Bruyère, interdits à un homme chrétien et français.

1897. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Condorcet, nouvelle édition, avec l’éloge de Condorcet, par M. Arago. (12 vol. — 1847-1849.) » pp. 336-359

Condorcet, le 17 septembre 1743, en Picardie, d’une famille noble, dont les membres étaient avantageusement placés dans l’armée et dans l’Église, sentit de bonne heure une vocation irrésistible pour les sciences et les lettres. […] Mais ce qui me frappe surtout chez Condorcet, et ce qui constitue sa plus grande originalité, c’est l’abus, c’est la foi aveugle dans les méthodes, c’est cette idée, si contraire à l’observation, que toutes les erreurs viennent des institutions et des lois, que personne ne naît avec un esprit faux, qu’il suffit de présenter directement les lumières aux hommes pour qu’à l’instant ils deviennent bons, sensés, raisonnables, et qu’il n’y a rien de plus commun, de plus facile à procurer à tous, que la justesse d’esprit, d’où découlerait nécessairement la droiture de conduite. […] André Chénier, témoin des mêmes actes, et jugeant Condorcet dans la mêlée comme un transfuge de sa cause, de la cause des honnêtes gens, s’écriait : C…, homme pour la gloire et le bien de son pays, s’il avait su respecter ses anciens écrits et su rougir devant sa propre conscience ; homme dont il serait absurde d’écrire le nom parmi cet amas de noms infâmes, si les vices et les bassesses de l’âme ne l’avaient redescendu au niveau ou même au-dessous de ces misérables, puisque ses talents et ses vastes études le rendaient capable de courir une meilleure carrière ; qu’il n’avait pas eu besoin, comme eux, de chercher la célébrité d’Érostrate, et qu’il pouvait, lui, parvenir aux honneurs et à la fortune, dans tous les temps où il n’aurait fallu pour cela renoncer ni à la justice, ni à l’humanité, ni à la pudeur.

1898. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Madame de La Vallière. » pp. 451-473

Françoise-Louise de La Baume Le Blanc de La Vallière fut baptisée le 7 août 1644, en la paroisse Saint-Saturnin de Tours ; elle était née la veille probablement. […] Née modeste et vertueuse, elle eut une grande confusion de son amour, tout en s’y abandonnant, et elle résista le plus qu’elle put à tous les témoignages d’honneur et de faveur qui tendaient à le déclarer. […] Les deux premiers enfants qui naquirent de cette liaison, deux garçons qui vécurent peu, furent présentés au baptême par d’anciens domestiques, de pauvres gens, parmi lesquels un vrai pauvre de paroisse.

1899. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Hégésippe Moreau. (Le Myosotis, nouvelle édition, 1 vol., Masgana.) — Pierre Dupont. (Chants et poésies, 1 vol., Garnier frères.) » pp. 51-75

Hégésippe Moreau, à Paris en avril 1810, était fils d’un homme qui devint professeur au collège de Provins, et il fut conduit, tout enfant, dans cette ville. […] Lebrun, l’auteur de Marie Stuart, et notre confrère à l’Académie, n’est pas à Provins, mais il en est depuis de longues années par les habitudes et par les liens de famille. […] Pierre Dupont est à Lyon le 23 avril 1821, d’un père provinois, d’une mère lyonnaise.

1900. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame Necker. » pp. 240-263

Mlle Suzanne Curchod était née vers 1740, dans le pays de Vaud, à Crassier, commune frontière de la France et de la Suisse. […] C’est dans le salon de Mme Necker, et sous son inspiration, que naquit d’abord, en 1770, l’idée d’élever une statue à Voltaire. […] En un mot, on sent beaucoup trop que les comparaisons, chez cette femme d’esprit, ne s’offrent point d’elles-mêmes, qu’elles ne naissent point sous ses pas et du sein même du sujet qu’elle traite, qu’elles ne sont point inspirées par l’à-propos du discours, mais qu’elle les tire de quelque magasin plus ancien, de quelque cahier de conversation où elle les avait en réserve.

1901. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — II. (Suite.) » pp. 220-241

Il y eut là pour lui cinq ou six années uniques (1771-1776) où, sous le coup de la lutte et de la nécessité, et dans le premier souffle de la faveur, il arriva à la pleine expansion de lui-même, et où il se sentit naître comme des facultés surnaturelles qu’il ne retrouvera plus jamais à ce degré. […] ………………… J’étais pour être courtisan. […] Bref, il est bien , on ne l’oublie pas malgré ses fautes, et, si Beaumarchais avait songé à faire par lui une critique de son Figaro, il y aurait réussi.

1902. (1888) La critique scientifique « La critique et l’histoire »

La théorie de la sélection se sert, — pour relier le principe des variations dans une espèce déterminée à celui des répétitions du type ainsi fortuitement, — de l’hérédité qui n’est en somme qu’une constatation de ressemblance par origine. […] Tarde20 une généralisation plus haute encore ; on pourra remarquer que tous ces principes de ressemblance, de l’hérédité à l’adhésion, sont des ressemblances actives, des ressemblances de force, des ressemblances de vibration ; le type de tout le développement animal, humain et social, sera donc la vibration et la consonance qui, l’une, naît, l’autre, répète et perpétue. […] Par ces points, l’art touche à la morale sociale et à la morale individuelle, et si ce qui le constitue, les propriétés générales mêmes de ce qui est esthétique, contribuent à modifier la conduite des individus et des masses, la sorte particulière d’émotions et de pensées que chaque ouvrage tend à faire naître chez ses lecteurs et ses admirateurs peut de même exercer une action bonne ou mauvaise sur le cours de leur caractère.

1903. (1694) Des ouvrages de l’esprit

naît-il des figures, ou du moins de quelques figures ? […] Je conseille à un auteur copiste, et qui a l’extrême modestie de travailler d’après quelqu’un, de ne se choisir pour exemplaires que ces sortes d’ouvrages où il entre de l’esprit, de l’imagination, ou même de l’érudition : s’il n’atteint pas ses originaux, du moins il en approche, et il se fait lire. […] Un homme chrétien et Français se trouve contraint dans la satire, les grands sujets lui sont défendus, il les entame quelquefois, et se détourne ensuite sur de petites choses qu’il relève par la beauté de son génie et de son style.

1904. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre X. Des Livres nécessaires pour l’étude de la Langue Françoise. » pp. 270-314

Comme l’auteur (l’Abbé Feraud de Marseille) n’est pas à Paris, il n’est pas étonnant que ses observations ne soient pas toujours justes ; mais il n’a rien oublié pour rendre son Dictionnaire complet en son genre, & pour qu’il fût imprimé correctement. […] Ce sont tous ces défauts du Dictionnaire de Trévoux qui ont fait naître l’idée du Grand Vocabulaire françois, contenant l’explication de chaque mot considéré dans ses diverses acceptions grammaticales, propres, figurées, synonimes & relatives ; les loix de l’orthographe, celles de la prosodie ou prononciation, tant familiere qu’oratoire ; les principes généraux & particuliers de la Grammaire ; les regles de la versification, & généralement tout ce qui a rapport à l’éloquence & à la poésie ; la géographie ancienne & moderne ; le blason, ou l’art heraldique ; la mythologie ; l’histoire naturelle des animaux, des plantes & des minéraux ; l’exposé des dogmes de la Religion & des faits principaux de l’histoire sacrée, ecclésiastique & profane ; des détails raisonnés & philosophiques sur l’œconomie, le commerce, la marine, la politique, la jurisprudence civile, canonique & bénéficiale ; l’anatomie, la médecine, la chirurgie, la chymie, la physique, les mathématiques, la musique, la peinture, la sculpture, la gravure, l’architecture, &c. […] L’auteur étoit au désespoir d’avoir vu naître le mot brocanteur, & de mourir sans en avoir pu découvrir l’origine.

1905. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 35, de la mécanique de la poësie qui ne regarde les mots que comme de simples sons. Avantages des poetes qui ont composé en latin sur ceux qui composent en françois » pp. 296-339

J’en tomberai d’accord, et qu’il faut encore être poete pour les concilier. […] Ainsi ces vers reciproques et liez ensemble par une rime commune perdront toute la cadence qui pourroit naître de l’égalité de leur mesure. […] Je ne crois pas même qu’aucun poëte moderne de ceux qui ont composé dans les langues qui se sont polies depuis trois siécles, ait mis plus de cadence et de mélodie que Malherbe en a mis dans les siens, apparemment au prix d’une peine et d’une perseverance dont il avoit obligation au païs où il étoit .

1906. (1894) Dégénérescence. Fin de siècle, le mysticisme. L’égotisme, le réalisme, le vingtième siècle

Que l’on songe maintenant à la façon dont naissent ces chiffres formidables. […] A des degrés modérés naissent les obsessions, que la conscience reconnaît comme maladives. […] Au degré le plus haut enfin naît l’extase, que M.  […] De même qu’en l’absence d’attention ne naît pas d’idée raisonnable, de même, avec le manque de coordination, ne naît pas de mouvement utile. […] Plus belles jeunes filles ne naquirent jamais ; pommes d’or pour la fille du roi !

1907. (1925) Proses datées

Alphonse Allais était à Honfleur quelques années avant que j’y naquisse moi-même. […] Il était le 9 avril 1821, à Paris, rue Hautefeuille. […] Les Stendhaliens conservent à Grenoble la maison de la rue des Vieux-Jésuites, où naquit Henri Beyle. […] Mon bisaïeul François de Régnier avait alors dix-huit ans, étant à Craonne, en 1745. […] Il est à Beaune, en Bourgogne, en 1765.

1908. (1887) George Sand

C’est dans une conception poétique que naissent ces récits si riches, si variés, qui souvent s’altèrent dans la suite des événements, mais qui toujours ont des commencements merveilleux. […] Soit ; mais plus loin, dans le même livre, Laurent développe un thème analogue, et conclut hardiment, devant la noble Alice, que la société n’a pas donné d’autre issue aux facultés de la femme, belle et intelligente, mais née dans la misère, que la corruption. […] Une femme née dans un rang élevé, entourée de ce luxe et de cet éclat qui sont comme le cadre naturel des hautes existences sociales, pourra-t-elle, de cette région où elle vit, distinguer dans la foule humaine ce noble déclassé qu’elle doit remettre à son vrai niveau ? […] Ni l’un ni l’autre ne furent des artistes de travail et de volonté ; ils furent des artistes de nature ; ils étaient nés grands écrivains, ils l’étaient dès la première page. […] Il n’est pas douteux que sa vocation littéraire, d’ailleurs assez discutable, pour le théâtre, ne fût née et ne se fût développée au contact de ses marionnettes.

1909. (1884) Propos d’un entrepreneur de démolitions pp. -294

Premier de la Douleur, l’Amour intense appelle donc l’Enthousiasme et l’Enthousiasme, à son tour, appelle la Beauté suprême. […] Les livres nés de cette race ne m’ont jamais plu et ne peuvent me plaire, puisque j’appartiens à l’autre. […] Oui, Vallès, vous étiez pour donner des assiettes et pour frotter les appartements. […] Ils étaient nés, comme vous, pour le pourboire et le coup de botte. […] Le trèfle magique du succès semble y naître sous les bottes vergogneuses de maint poète lustré par la misère.

1910. (1891) La vie littéraire. Troisième série pp. -396

— C’est le p’tit dauphin nouveau . […] Il était trop tôt pour goûter, en dilettante, comme Chateaubriand, les chefs-d’œuvre de la pénitence. […] Ces cliniciens nés sont terribles. […] L’aîné des frères Tisseur, Barthélémy, naquit à Lyon au moment où la Grande Armée périssait en Russie. […] Sans cesse il naît des étoiles et sans cesse il en meurt.

1911. (1862) Notices des œuvres de Shakespeare

Shakespeare était en 1564 ; ce serait donc à vingt-cinq ans qu’il aurait écrit son premier Hamlet. […] De là naît sa grandeur tragique ; elle est dans sa destinée plus que dans son caractère. […] Ce récit fit naître à Nicuola l’idée de s’habiller en homme, et d’entrer chez Lattanzio en qualité de page. […] Cette pièce embrasse un intervalle de seize années ; une princesse y naît au second acte et se marie au cinquième. […] Les lacunes que laisse cette situation sont du moins si heureusement remplies qu’on ne s’aperçoit d’aucun vide, tant l’âme est doucement occupée des sentiments qui en naissent naturellement.

1912. (1882) Autour de la table (nouv. éd.) pp. 1-376

Le vrai poète n’est pas métaphysicien. […] Je pense qu’il est encore à naître. […] redevenir le rien que j’étais avant de naître à la vie et à la douleur vivante !  […] « Naîtra-t-il un Pahlen pour le czar ?  […] Je suis créateur.

1913. (1788) Les entretiens du Jardin des Thuileries de Paris pp. 2-212

Mais d’où cet inconvénient peut-il naître ? […] C’est l’anglomanie, n’en doutons pas, qui a fait naître parmi nous tant de frondeurs. […] Des riens qu’une rencontre favorable fait naître, deviennent des mines d’or sur le champ. […] Pauvres infortunés, s’écria-t-il, qui meurent la plupart presqu’au moment qu’ils viennent de naître, & s’ils subsistent, hélas ! […] Cela nous convient d’autant moins, que nous ne sommes pas nés pour copier.

1914. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Angellier, Auguste (1848-1911) »

Angellier est dans la ville qui a produit Sainte-Beuve : Boulogne-sur-Mer, cité curieuse et diverse qui établit une transition et un lien entre la France et l’Angleterre… Il y a, en Sainte-Beuve, à le bien chercher, un cottage environné de roses de mer.

1915. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Arène, Paul (1843-1896) »

Paul Arène aura sa légende, on dira que c’est ainsi qu’il naquit lui-même, au chant des cigales, tandis que les figues-fleurs, s’ouvrant au soleil, égouttaient leur miel sur ses lèvres.

1916. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » pp. 163-165

Arnaud de Bacculard, [François-Thomas-Marie] d’] originaire du Comtat Venaissin, de plusieurs Académies, à Paris en 17..

1917. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » pp. 179-182

Aubignac, [François Hedelin, d’] Abbé, à Paris en 1604, mort à Nemours en 1676.

1918. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 150-153

LONGCHAMPS, [Pierre de] Abbé, dans le Poitou en 1736.

1919. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 308-311

MILLOT, [Claude-François-Xavier] Prédicateur du Roi, de l’Académie Françoise, & de celles de Lyon & de Nancy, à Besançon en 1725.

1920. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 489-492

PERRAULT, [Charles] de l’Académie Françoise, de celle des Sciences, de celle des Inscriptions, à Paris en 1633, mort dans la même ville en 1723.

1921. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 58-61

Raynal, [N.ABCD l’Abbé] à Saint-Géniés, Diocese de Rhodez, en 1715, des Académies de Londres & de Berlin ; Ecrivain plus ingénieux que solide dans un genre où la solidité, sur-tout celle qui porte au vrai, doit être préférée à toute autre chose.

1922. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 66-69

Regnard, [Jean-François] à Paris en 1647, mort en 1709 ; le meilleur de nos Poëtes Comiques, après Moliere, en ce qu'il a le plus approché du génie de ce Grand Homme.

1923. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 162-165

Rozoi, [N.ABCD] Correspondant de l'Académie des Sciences de Toulouse, à Paris en 1745 ; Poëte qui, avec des talens au dessous du médiocre, n'a pas craint de s'attacher à ce qu'il y a de plus difficile.

1924. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre premier. Musique. — De l’influence du Christianisme dans la musique. »

De là toute institution qui sert à purifier l’âme, à en écarter le trouble et les dissonances, à y faire naître la vertu, est, par cette qualité même, propice à la plus belle musique, ou à l’imitation la plus parfaite du beau.

1925. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre VI. Architecture. — Hôtel des Invalides. »

Un paysage paraît-il nu, triste, désert, placez-y un clocher champêtre : à l’instant tout va s’animer : les douces idées de pasteur et de troupeau, d’asile pour le voyageur, d’aumône pour le pèlerin, d’hospitalité et de fraternité chrétienne, vont naître de toutes parts.

1926. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Avant-propos » pp. 1-5

Des entreprises moins hardies peuvent passer pour être temeraires, puisque c’est vouloir rendre compte à chacun de son approbation et de ses dégouts ; c’est vouloir instruire les autres de la maniere dont leurs propres sentimens naissent en eux.

1927. (1857) Réalisme, numéros 3-6 pp. 33-88

Restif est dans un moment de crise ; il avait, certes, la tête faible, les sens bouillants, une éducation négligée. […] Les Productions qu’elle fait naître ont le mérite du Peintre qui imite la nature. […] Je ne dirai pas, comme on l’a souvent répété à son sujet que Restif, plus tôt ou plus tard, aurait fait de grandes choses. […] pour ce mâle chantre des Ïambes qui nous enflamma de passion en nous faisant regretter d’être nés trop tard ! […] Surville, née de Balzac.

1928. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. LEBRUN (Reprise de Marie Stuart.) » pp. 146-189

à Paris en 1785, arrivant à l’adolescence avec le Consulat, il mûrit sa jeunesse sous l’Empire. […] Tous ceux qui ont vu l’Empire en ont été fortement marqués dans leur imagination ; et j’appelle avoir vu l’Empire, non pas être à telle date qui permît de le voir, mais, même très-jeune, avoir été placé dans une position et comme à une fenêtre d’où on le vît réellement se déployer. […] Un autre qui naissait quand ce siècle avait quatre ans déjà, pour rendre ce même effet indélébile, a pu dire : Nous tous, enfants émus d’un âge de merveilles, Bercés sous l’étendard aux salves des canons, Des combats d’outre-Rhin balbutiant les noms, Nous avons souvenir de plus d’une journée Où l’Empire leva sa tète couronnée ; Quelque magnificence, une armée, un convoi, Un Te Deum ardent, la naissance d’un Roi ; Et l’Empereur lui-même, au moment des campagnes, Il passait dénombrant les aigles ses compagnes ; Du geste il saluait tout un peuple au départ, Et moi qui parle ici, mon front eut son regard ! […] C’est ici que j’aurais dû naître !

1929. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE RÉMUSAT » pp. 458-491

Claire-Élisabeth Gravier de Vergennes naquit à Paris, en 1780. […] Du milieu social où elle naquit, comme de celui où se forma son aînée, Mlle Pauline de Meulan, on peut dire (et je m’appuie ici pour plus de facilité sur des paroles sûres) que « c’était une de ces familles de hauts fonctionnaires et de bonne compagnie, qui sans faire précisément partie ni de la société aristocratique, ni même de la société philosophique, y entraient par beaucoup de points et tenaient du mouvement du siècle, bien qu’avec modération, à peu près comme en politique M. de Vergennes, qui contribua à la révolution d’Amérique, fut collègue de Turgot et de M. Necker, et prépara la Révolution française, sans être philosophe ni novateur. » Protégée et abritée jusqu’au sortir des plus affreux malheurs sous l’aile de son excellente mère, la jeune Clary, dans une profonde retraite de campagne, prolongeait, près de sa sœur cadette236, une enfance paisible, unie, studieuse, et abordait sans trouble la tendre jeunesse, ne cessant d’amasser chaque jour ce fonds inappréciable d’une âme sainement sensible et finement solide : telle la nature l’avait fait naître, telle une éducation lente et continue la sut affermir. […] De là, de ce commerce vague et porté par des sons, entretenu par des lettres, et où divers incidents assez naturels retardent la rencontre, naît un amour tel qu’on le peut supposer entre deux êtres très-jeunes, très-purs et très-malheureux.

1930. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Charles Labitte »

Mais, encore un coup, il n’avait pas vingt-neuf ans, et si mourir jeune est beau pour un poëte, s’il y a dans les premiers chants nés du cœur quelque chose d’une fois trouvé et comme d’irrésistible qui suffit par aventure à forcer les temps et à perpétuer la mémoire, il n’en est pas de même du prosateur et de l’érudit. […] Charles Labitte était le 2 décembre 1816 à Château-Thierry. […] Et quant à ceux qui sont dignes de l’aimer et qui lui feraient honneur par de vrais talents, l’orgueil trop souvent les entête du premier jour ; sauf deux ou trois grands noms qu’ils mettent en avant par forme et où ils se mirent, les voilà qui se comportent comme si tout était avec eux et comme s’ils allaient inaugurer les âges futurs. […] Et si l’on trouvait que je vais bien loin, en appliquant cette gracieuse image à une production quelque peu rabelaisienne, qu’on se rappelle, entre autres, ce riant et beau passage : «  Le Roy que nous demandons est déjà fait par la nature, au vrai parterre des fleurs de lys de France, rejeton droit et verdoyant du tige de saint Louis.

1931. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre I. Succès de cette philosophie en France. — Insuccès de la même philosophie en Angleterre. »

Née en Angleterre, la philosophie du dix-huitième siècle n’a pu se développer en Angleterre ; la fièvre de démolition et de reconstruction y est restée superficielle et momentanée. […] Au plus fort de la bouffonnerie comme au plus fort de la licence, il reste homme de bonne compagnie, et élevé dans ce cercle aristocratique où la liberté est complète, mais où le savoir-vivre est suprême, où toute pensée est permise, mais où toute parole est pesée, où l’on a le droit de tout dire, mais à condition de ne jamais s’oublier. […] Diderot le pousse à bout jusque dans l’emphase larmoyante ou furibonde, par des exclamations, des apostrophes, des attendrissements, des violences, des indignations, des enthousiasmes, des tirades à grand orchestre, où la fougue de sa cervelle trouve une issue et un emploi  En revanche, parmi tant d’écrivains supérieurs, il est le seul qui soit un véritable artiste, un créateur d’âmes, un esprit en qui les objets, les événements et les personnages naissent et s’organisent d’eux-mêmes, par leurs seules forces, en vertu de leurs affinités naturelles, involontairement, sans intervention étrangère, de façon à vivre pour eux-mêmes et par eux-mêmes, à l’abri des calculs et en dehors des combinaisons de l’auteur. […] Rousseau aussi est un artisan, un homme du peuple mal adapté au monde élégant et délicat, hors de chez lui dans un salon, de plus mal , mal élevé, sali par sa vilaine et précoce expérience, d’une sensualité échauffée et déplaisante, malade d’âme et de corps, tourmenté par des facultés supérieures et discordantes, dépourvu de tact, et portant les souillures de son imagination, de son tempérament et de son passé jusque dans sa morale la plus austère et dans ses idylles481 les plus pures ; sans verve d’ailleurs, et en cela le contraire parfait de Diderot, avouant lui-même « que ses idées s’arrangent dans sa tête avec la plus incroyable difficulté, que telle de ses périodes a été tournée et retournée cinq ou six nuits dans sa tête avant qu’elle fût en état d’être mise sur le papier, qu’une lettre sur les moindres sujets lui coûte des heures de fatigue », qu’il ne peut attraper le ton agréable et léger, ni réussir ailleurs que « dans les ouvrages qui demandent du travail482 »  Par contre, dans ce foyer brûlant, sous les prises de cette méditation prolongée et intense, le style, incessamment forgé et reforgé, prend une densité et une trempe qu’il n’a pas ailleurs.

1932. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXIIIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (4e partie) » pp. 1-63

Mais elle serait née d’une loi, au lieu d’être née d’une sédition ; d’un droit, au lieu d’une violence ; d’une délibération, au lieu d’une insurrection. […] dans le berceau même de la liberté, nourri de patriotisme par son père, il n’avait pas eu à faire son choix entre les opinions. […] Sa providence était le temps ; pour disparaître dans les grandes convulsions de son pays, pour survivre aux crises, pour déjouer les partis déjà fatigués, pour satisfaire et pour amortir les révolutions.

1933. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre I. Les chansons de geste »

Il y avait des siècles que l’épopée française était née lorsque l’écriture heureusement fixa ce chef-d’œuvre. […] De génération en génération, comme de province en province, la haine et la guerre s’étendront, faisant ruisseler le sang, jetant cadavre sur cadavre : depuis le vieil Hardré, depuis Bègue et Garin, fils de Hervis, jusqu’aux petits-enfants de Hervis et de Hardré, qu’une paix plâtrée fait naître d’un funeste mariage en mêlant le sang des deux familles, et qui périront sous les coups les uns de leur oncle maternel et les autres de leur propre père. […] De là ce facile bourgeonnement des légendes, ces développements généalogiques qui vont en sens inverse de la nature : car ici les fils engendrent les pères, et les aïeux naissent après les pères. […] Enfin, à ces quatre frères il faut un père, ce sera Garin de Monglane dont les Enfances verront le jour au xve  siècle ; l’aïeul sera à la vie épique quatre ou cinq cents ans après ses petits-fils.

1934. (1857) Articles justificatifs pour Charles Baudelaire, auteur des « Fleurs du mal » pp. 1-33

L’ennui qui dévore les âmes promptement rassasiées des joies vulgaires, et éprises de l’idéal ; — les fureurs de l’amour que font naître non les transports des sens ou l’épanouissement d’un cœur jeune et crédule, mais les raffinements d’une curiosité maladive ; — l’expiation providentielle suspendue sur le vice frivole de l’individu, comme sur la corruption dogmatique des sociétés ; — la brutalité conquérante qui ignore les joies et la puissance du sacrifice ; — les âmes cupides qui fraudent et calomnient les âmes droites et contemplatives ; — enfin, l’orgueil qui se dresse contre Dieu, et qui même, foudroyé, respire avec délices l’encens des malheureux qu’il abuse, des sophistes qu’il enlace, des superbes qu’il enivre. […] Cette qualité est frappante dès le second morceau, intitulé Bénédiction, où l’auteur présente l’action fécondante du malheur sur la vie du Poète : il naît, et sa mère se désole d’avoir porté ce fruit sauvage, cet enfant si peu semblable aux autres et dont la destinée lui échappe ; il grandit, et sa femme le prend en dérision et en haine ; elle l’insulte, le trompe et le ruine ; mais le Poète, à travers ces misères, continue de marcher vers son idéal, et la pièce se termine par un cantique doux et grave comme un final d’Haydn : Vers le Ciel où son œil voit un trône splendide, Le Poëte serein lève ses bras pieux, Et les vastes éclairs de son esprit lucide Lui dérobent l’aspect des peuples furieux : « — Soyez béni, mon Dieu, qui donnez la souffrance Comme un divin remède à nos impuretés, Et comme la meilleure et la plus pure essence Qui prépare les forts aux saintes voluptés ! […] Or, n’est-il pas vrai que souvent nos vertus mêmes naissent de leurs contraires ? que notre courage naît du découragement, notre énergie de la faiblesse, notre sobriété de l’intempérance, notre foi de l’incrédulité ?

1935. (1913) La Fontaine « I. sa vie. »

La Fontaine est à Château-Thierry, dans cette ville qui s’appelait déjà, au dix-septième siècle, par une abréviation assez curieuse, « Chaury », (La Fontaine l’écrit souvent ainsi, quand il date ses lettres), et qui s’appelle encore ainsi dans la familiarité des conversations. Il est le 8 juillet 1621. […] Il était de Champenois, d’une part, et de Poitevins de l’autre, et ceci me fait un plaisir extrême. […] Lorsqu’un écrivain, ou du reste un homme quelconque dont on s’occupe, est, de père et de mère, de famille paternelle et maternelle, du même pays, oui, je crois qu’il n’est pas inutile d’étudier la race dont il est, d’étudier le pays qui l’a vu naître au point de vue ethnique.

1936. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire de la Restauration, par M. Louis de Viel-Castel » pp. 355-368

Chaque régime qui a ses raisons d’être amène à sa suite et fait plus ou moins surgir son cortège naturel, les générations nées en même temps, éveillées au même signal, qui en ont l’esprit, le sentiment, l’intelligence, les espérances d’abord avec les ambitions, et plus tard, s’il tombe, les regrets. […] Le gouvernement de la Restauration était-il viable ?

1937. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — II » pp. 161-173

On ne distinguait que des mouvements de curiosité, et la tranquillité que l’armistice avait fait naître. […] Pendant que se signait cette paix achetée par tant de travaux et de victoires, l’esprit de parti, l’esprit royaliste continuait d’infester la France ; la réaction levait la tête et avait pris pied partout, jusque dans les pouvoirs publics ; et le 18 fructidor, ce coup d’État fâcheux, mais nécessaire, n’était pas encore venu rappeler à l’ordre les mauvais Français, ou ceux qui, se croyant bons, s’égaraient assez pour laisser naître et s’élever en eux des désirs de malheur.

1938. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. »

Auguste Barbier, ce grand poëte d’un jour et d’une heure, que la renommée a immortalisé pour un chant sublime d’un glorieux hasard, mais qui dans l’habitude, ainsi que l’atteste son recueil des Silves 36, est plutôt une âme douce, tendre, naïve ; une âme cherchante, un peu incertaine ; une muse timide, le croirait-on ? […] L’Ode antique imitée d’Anacréon et d’Horace ne serait pas indigne d’un Olivier de Magny, ou même d’un André Chénier qui serait sur les collines vineuses.

1939. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ALFRED DE MUSSET (La Confession d’un Enfant du siècle.) » pp. 202-217

Le sujet de cette confession est celui-ci : Un jeune homme qui a dix-neuf ans au commencement du récit et vingt et un ans à la fin, Octave, vers 1810, de cette génération venue trop tard pour l’Empire, trop tard (malgré sa précocité) pour la Restauration, et qui achève, en ce moment, son apprentissage dans le conflit de toutes les idées et sur les débris de toutes les croyances, Octave est amoureux ; il l’est avec naïveté, confiance, adoration, et, jusque-là, il ressemble aux amoureux de tous les temps ; mais au plus beau de son rêve, un soir à souper, étant en face de sa maîtresse, sa fourchette tombe par hasard, il se baisse pour la ramasser, et voit… quoi ? […] Ils ont remarqué chacun à leur manière cet ennui du plaisir.

1940. (1874) Premiers lundis. Tome II « Mémoires de Casanova de Seingalt. Écrits par lui-même. »

Casanova de Seingalt rentre tout à fait dans cette famille ; c’en est un des fils les plus prodigues et nés le plus complètement coiffés. […] Jacques Casanova naquit à Venise en 1725 ; les liens de famille ne l’étouffèrent pas.

1941. (1874) Premiers lundis. Tome II « Hippolyte Fortoul. Grandeur de la vie privée. »

Aussi, le soir, quand il prit congé de ses hôtes, il leur laissa l’idée qu’il était pour être heureux, et qu’il mourrait ignoré et content au bord du lac, seul témoin destiné à recevoir l’entière confidence de ses pensées. » Rousseau ne donne plus de ses nouvelles, et ses amis croient qu’il les a oubliés. […] Simiane n’est autre chose qu’un Rousseau anticipé, un Rousseau qui n’a pas voulu l’être ; dans les Alpes aussi, venu à Paris jeune et orphelin, avec mille livres de rente, il a tenté la route des lettres ; il a porté à Montesquieu un manuscrit, que le grand homme a jugé très favorablement ; il a fréquenté le café Procope et causé avec les beaux esprits.

1942. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIII. Des tragédies de Shakespeare » pp. 276-294

En Angleterre, les troubles civils qui ont précédé la liberté, et qui étaient toujours causés par l’esprit d’indépendance, ont fait naître beaucoup plus souvent qu’en France de grands crimes et de grandes vertus. […] Les spectateurs refuseraient peut-être leur attendrissement à la plainte volontaire ; ils s’abandonnent à l’émotion que fait naître une douleur qui ne répond plus d’elle.

1943. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre VII. Du style des écrivains et de celui des magistrats » pp. 543-562

On trouve, dans ce dialogue, ce que les grandes pensées ont d’autorité et d’élévation avec l’expression figurée nécessaire au développement complet de l’aperçu philosophique ; et l’on éprouve, en lisant les belles pages de Montesquieu, non l’attendrissement ou l’ivresse que l’éloquence passionnée doit faire naître, mais l’émotion que cause ce qui est admirable en tout genre, l’émotion que les étrangers ressentent lorsqu’ils entrent pour la première fois dans Saint-Pierre de Rome, et qu’ils découvrent à chaque instant une nouvelle beauté qu’absorbaient, pour ainsi dire, la perfection et l’effet imposant de l’ensemble. […] Sans doute il est des sujets dans lesquels l’art ne peut suppléer à ce que l’on éprouve réellement ; mais il en est d’autres que l’esprit pourrait toujours traiter avec succès, si l’on avait profondément réfléchi sur les impressions que ressentent la plupart des hommes, et sur les moyens de les faire naître.

1944. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre I. L’esprit gaulois »

Légère gaieté, prompte à passer comme celle que fait naître un de nos paysage d’avril ; un instant le conteur a regardé la fumée des ruisseaux qui monte autour des saules, la riante vapeur qui emprisonne la clarté du matin ; puis, quand il a chantonné un refrain, il revient à son conte. […] Voici donc les fabliaux, l’épopée du Renard, les contes qui naissent.

1945. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre VII. Maurice Barrès et Paul Adam » pp. 72-89

Mais un âne vivant vaut mieux, non seulement qu’un lion mort, mais même qu’un lion à naître, éventuel et douteux… Et jusqu’à ce qu’un mien livre ait prouvé le contraire, je n’ai pas le droit de ne pas reconnaître qu’Oscar Méténier, par exemple, dont cependant l’écriture est hâtive et la pensée de court vol, vaut mieux que moi-même. […] Toute révolution est légitime quand une aspiration étant née et viable se veut réalisée.

1946. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre IV. Cause immédiate d’une œuvre littéraire. L’auteur. Moyens de le connaître » pp. 57-67

Il faudrait admettre que Bossuet, s’il était en Chine, aurait composé les mêmes sermons qu’en France à la cour du grand roi. […] Qu’est-ce que Candide, si l’on isole ce roman de Voltaire des circonstances où il est  ?

1947. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre II » pp. 12-29

Quelle que soit la corruption générale d’une grande nation, même d’une grande cour, il s’y trouve toujours quelques familles où se conserve l’honnêteté des mœurs, où la raison, le droit sens, la bienséance exercent leur légitime empire, où les bons principes sont héréditaires, comme certaines conformations : ici est d’ordinaire le privilège des familles nombreuses qui s’entretiennent, par les sympathies mutuelles de leurs membres, dans les traditions de vertus où elles sont nées. […] De la multiplicité des conversations naquit celle des correspondances épistolaires.

1948. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre V. Les âmes »

Galilée y meurt, Newton y naît. […] Ces problèmes obsédaient dans le désert Jérôme, cet homme de l’antre, cet Isaïe du Nouveau Testament ; il interrompait les préoccupations de l’éternité et l’attention au clairon de l’archange pour méditer sur telle âme de païen qui l’intéressait ; il supputait l’âge de Perse, rattachant cette recherche à quelque chance obscure de salut possible pour ce poëte aimé du cénobite à cause de sa sévérité ; et rien n’est surprenant comme de voir ce penseur farouche, demi-nu sur sa paille, ainsi que Job, disputer sur cette question, frivole en apparence, de la naissance d’un homme, avec Rufin et Théophile d’Alexandrie, Rufin lui faisant remarquer qu’il se trompe dans ses calculs et que, Perse étant en décembre sous le consulat de Fabius Persicus et de Vitellius et étant mort en novembre sous le consulat de Publius Marius et d’Asinius Gallus, ces époques ne correspondent pas rigoureusement avec l’an II de la deux cent troisième olympiade et l’an il de la deux cent dixième, dates fixées par Jérôme.

1949. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 15, le pouvoir de l’air sur le corps humain prouvé par le caractere des nations » pp. 252-276

Quoique les beotiens et les atheniens ne fussent séparez que par le mont Citheron, les premiers étoient si connus comme un peuple grossier, que pour exprimer la stupidité d’un homme on disoit qu’il paroissoit en Beotie, au lieu que les athéniens passoient pour le peuple le plus spirituel de l’univers. […] Or, les qualitez des plantes ne dépendent pas autant du lieu d’où l’on a tiré la graine, que du lieu où l’on l’a semée, les qualitez des animaux dépendent moins de leur origine que du païs où ils naissent et où ils deviennent grands.

1950. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 12, des masques des comédiens de l’antiquité » pp. 185-210

Les masques des anciens mettoient encore beaucoup de vraisemblance dans ces pieces excellentes, où le noeud naît de l’erreur qui fait prendre un personnage pour un autre personnage par une partie des acteurs. […] Mais d’un autre côté ces masques faisoient perdre aux spectateurs le plaisir de voir naître les passions, et de reconnoître leurs differens symptomes sur le visage des acteurs.

1951. (1860) Ceci n’est pas un livre « Décentralisation et décentralisateurs » pp. 77-106

» À Toulouse — ville de progrès, essentiellement — devait naître le moniteur officiel des Rénovateurs. […] Aussitôt que, par Richelieu qui continue Louis XI, et par Louis XIV qui Continue Richelieu, l’unité politique est réalisée, — l’unité littéraire se fait, la centralisation littéraire (avec Paris, ou Versailles qui est alors le pseudonyme de Paris), la centralisation littéraire existe ; le seizième siècle, puis le dix-septième siècle, se lèvent, — la littérature française est née !

1952. (1912) L’art de lire « Chapitre V. Les poètes »

Voyez ceci, de Renan : « Je suis , déesse aux yeux bleus, de parents barbares, chez les Cimmériens bons et vertueux qui habitent au bord d’une mer sombre, hérissée de rochers, toujours battue par les orages. […] Il est aussi dans les membres de phrase courts en même temps qu’ils sont sourds, des membres de phrase déprimés du commencement, auxquels s’oppose le membre de phrase final, non pas allègre, mais libre, mais libéré, s’espaçant discrètement, mais s’espaçant et prenant du champ et qui semble comme l’expression du soulagement et de la reprise de la vie dans un sourire : « les yeux des jeunes filles y sont (verts et bleus à la fois) comme ces vertes fontaines où sur un fond d’herbes ondulées se mire le ciel. » Ainsi, en lisant à haute voix, vous vous pénétrez des rythmes qui complètent le sens chez les écrivains qui savent écrire musicalement ; du rythme qui est le sens lui-même en sa profondeur ; du rythme qui, en quelque façon, a précédé la pensée (car il y a trois phases : la pensée en son ensemble, en sa généralité : « Je suis en Bretagne » — le rythme qui chante dans l’esprit de l’auteur, qui est son émotion elle-même et dans lequel il sent qu’il faut que sa pensée soit coulée — le détail de la pensée qui se coule en effet dans le rythme, s’y adapte, le respecte, ne le froisse pas et le remplit) ; du rythme enfin qui, parce qu’il est le mouvement même de l’âme de l’auteur, est ce qui, plus que tout le reste, vous met comme directement et sans intermédiaire en communication avec son âme.

1953. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXII. La comtesse Guiccioli »

… Toujours est-il que la femme la moins née pour écrire, écrivit. […] depuis moins de temps et sorti fraîchement des mains de Dieu, il semble radieusement imprégné des baisers que Dieu lui donnait encore, ce matin… Il semble qu’il y ait sur les roses de son front un reflet des portes du ciel, et de la première aurore de la création… Eh bien !

1954. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Buloz »

Mais ce que je veux surtout, c’est traiter Buloz comme une idée générale… Je veux lui faire cet honneur… Je ne connais d’ailleurs personne qui soit plus que lui sain à étudier, car le succès est peut-être la plus grande corruption de l’âme humaine, et Buloz le fait dédaigner, II Il est en 1803, à Vulbens, près de Genève, pays commerçant et puritain. […] Ne vous demandez pas quel est le lord Macaulay français qui soit de la Revue des Deux Mondes !

1955. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Léon XIII et le Vatican »

III Joachim Pecci, nous apprend son biographe, est en 1810 à Carpineto, d’une famille noble, originaire de Sienne. […] … Joachim Pecci fut destiné à être prêtre de si bonne heure qu’on peut presque dire qu’il est prêtre.

1956. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Goethe »

Goethe, qui a joui d’un bonheur sans égal durant sa vie, ce Polycrate moderne qui aurait pu jeter toutes ses bagues — sans crainte de les perdre — aux carpes du Rhin ; Goethe, qui n’était pas sur le trône et qui a montré pour la première fois au monde ébahi la poésie aux affaires, qui a été tout ensemble Richelieu et Corneille ; son Excellence M. de Goethe, qui avait été un beau jeune homme, puis un beau vieillard ; qui fut aimé d’amour dans sa vieillesse comme Ninon de l’Enclos dans la sienne ; qui mourut tard, en pleine gloire, en pleine puissance, que dis-je ? […] La femme allemande, dans sa simplicité, dans son éternelle facilité à croire, la femme allemande, née plus séduite que les autres femmes, et qui se rencontre aussi bien dans les ridicules romans d’Auguste Lafontaine que dans les romans et les drames du grand Goethe, voilà en une seule toutes les femmes de Goethe, dont Paul de Saint-Victor a fait, lui, des femmes différentes, en exécutant sur le motif monotone de Goethe de ces prodigieuses variations à faire prendre le change aux plus habiles et leur faire croire que Goethe a mis dans ses femmes ce que lui, Saint-Victor, seul, y a vu !

1957. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Le père Augustin Theiner »

L’Histoire de Clément XIV, cette nouvelle histoire publiée par un prêtre élevé en dignité, consulteur des saintes congrégations de l’Index et du Saint-Office, préfet coadjuteur des archives secrètes du Vatican, traduite au même moment en trois langues différentes pour qu’elle ait son triple retentissement simultané, ce livre, qui fait bruit à Rome et qui fera probablement bruit dans le monde, n’est point, à coup sûr, un de ces livres qui naissent spontanément et sans dessein dans la pensée laborieuse d’un annaliste. […] Selon la manière dont on sait l’écrire, on peut — autant du moins qu’il est donné à la faible créature humaine, — empêcher l’histoire qui va naître de recommencer l’histoire de ce qui n’est plus, ou bien c’est l’y faire ressembler.

1958. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Conclusion »

Kant imagine des choses en soi d’un côté, et d’autre part un Temps et un Espace homogènes au travers desquels les choses en soi se réfractent : ainsi naîtraient d’un côté le moi phénomène, celui que la conscience aperçoit, et de l’autre les objets extérieurs. […] Le problème de la liberté est donc d’un malentendu : il a été pour les modernes ce que furent, pour les anciens, les sophismes de l’école d’Élée, et comme ces sophismes eux-mêmes, il a son origine dans l’illusion par laquelle on confond succession et simultanéité, durée et étendue, qualité et quantité.

1959. (1882) Types littéraires et fantaisies esthétiques pp. 3-340

Cette jeune Thérèse est née ménagère, cette jeune comtesse Nathalie est née sœur de charité. […] tous ces récits loyalement lus révèlent un homme fier et hautain sans doute, mais singulièrement bon, humain et confiant. […] Il était avec un cœur riche, chaud, facile à séduire, mais aussi avec une intelligence ferme, sage et grave. […] Les impressions nées exclusivement de la lecture portent pour titre le Monde des livres. […] Lui, il appartenait essentiellement à la nature esclave ; il était serf, parasite et bouffon.

1960. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre premier. » pp. 15-203

Pour être très-heureux, que fallait-il naître ? […] Claude était bon ; des courtisans pervers le rendirent méchant : Néron, méchant, ne put jamais devenir bon sous les meilleurs instituteurs. […] Si par hasard ils les avaient pas, faudrait-il pour cela leur attacher des cadenas aux lèvres ? […] Mais d’où naissent toutes ces puériles difficultés ? […] D’où naît cette partialité ?

1961. (1923) Au service de la déesse

Des Grieux a dix-sept ou dix-huit ans alors : il est vers 1703. […] Donc, le Tiberge du roman serait vers 1700. […] Mais ce Charles des Grieux, chevalier de Saint-Louis et lieutenant de carabiniers, serait le 23 août 1709. […] Si Charles des Grieux est en 1709, il était par trop jeune, en 1719 ou 1720, pour être l’amant de Manon. […] Une ombre malfaisante couvrait le pays où j’étais .

1962. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « IX » pp. 33-36

Qu'il vienne donc, qu’il soit déjà, celui de qui dépendent nos prochaines destinées !

1963. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « a propos de casanova de seingalt  » pp. 510-511

Casanova de Seingalt rentre tout à fait dans cette famille ; c’en est un des fils les plus prodigues et nés le plus complétement coiffés… 149.

1964. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lebrun, Pierre (1785-1873) »

Édouard Fournier Il échapperait à notre temps, s’il était resté ce que son âge, — il naquit en 1785, — voulait qu’il fût d’abord : un arrière-classique, un poète de l’Empire, rimant des Odes sur la Guerre de Prusse, sur la Campagne de 1807 et des tragédies telles qu’Ulysse et Pallas, fils d’Évandre ; mais il lui appartient, par la part qu’il prit au mouvement rénovateur, avec sa pièce de Marie Stuart assez fièrement imitée de celle de Schiller et surtout avec son brillant Voyage en Grèce, l’œuvre la plus sincère, la plus vraie de couleur et la plus éclatante qui ait été inspirée chez nous par la guerre des Hellènes.

1965. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 311-314

Boileau, [Gilles] Contrôleur de l’Argenterie du Roi, de l’Académie Françoise, à Paris en 1631, mort dans la même ville en 1669.

1966. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 7-11

COLLÉ, [Charles] Secrétaire ordinaire & Lecteur de M. le Duc d’Orléans, premier Prince du Sang, à Paris en 1709.

1967. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » pp. 507-511

HUET, [Pierre-Daniel] Evêque d’Avranches, de l’Académie Françoise, à Caen en 1632, mort à Paris en 1721.

1968. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 5-9

LACOMBE, [Jacques] Avocat, puis Libraire, à Paris en 1724.

1969. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 343-347

MONTAGNE, [Michel de] dans le Château de Montagne, près de Bordeaux, en 1533, mort en 1592 ; Auteur original, en vogue dès les premiers temps de notre Littérature, plus encore de nos jours, depuis que ses Essais sont devenus une Mine féconde, où nos Philosophes ne cessent de puiser.

1970. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 364-367

MORAND, [Pierre de] Avocat au Parlement d’Aix, à Arles en 1701, mort à Paris en 1757, exerça ses talens poétiques sur les trois Théatres de la Capitale, & eut quelques succès dans le genre tragique & comique.

1971. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 368-371

MOREAU, [Jacob-Nicolas] Conseiller à la Cour des Comptes, Aides & Finances de Provence, premier Conseiller de Monsieur, Historiographe de France, Bibliothécaire de la Reine, à Saint-Florentin le 20 Décembre 1717.

1972. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 45-49

Rancé, [Dom Armand-Jean le Bouthillier de] Chanoine de Notre-Dame, puis Abbé de la Trappe de l’Ordre de Cîteaux, à Paris en 1626, mort à la Trappe en 1700.

1973. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre V. Suite du Père. — Lusignan. »

Le polythéisme, ne s’opposant point aux passions, ne pouvait amener ces combats intérieurs de l’âme, si communs sous la loi évangélique, et d’où naissent les situations les plus touchantes.

1974. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Théocrite »

Il était à Syracuse. […] Il est une idée qui naît à ce propos et qu’on ne saurait tout à fait supprimer : c’est qu’on trouverait au Moyen-Age plus d’un fabliau qui se pourrait rapprocher sans trop d’effort de cette légende du bienheureux Comatas. […] Mais il sut trouver le remède, et, assis sur une roche élevée, les yeux tournés vers la mer, il chantait des choses telles que celles-ci… » Vient alors la célèbre complainte où il apostrophe Galatée, l’appelant à la fois dans son langage « plus blanche que le fromage blanc, plus délicate que l’agneau, plus glorieuse que le jeune taureau, plus dure que le raisin vert. » Après une longue suite de traits plus ou moins naïfs et passionnés, ou même spirituels (car le poëte se joue par moments), l’idée du début se retrouve à la conclusion, et la pièce finit sur ce retour : « C’est ainsi que Polyphème conduisait son amour en chantant, et cela lui réussissait mieux que s’il avait donné de l’or pour se guérir. » Un poëte bucolique des âges postérieurs, en Sicile comme Théocrite, Calpurnius, a résumé heureusement la recette du maître dans ce vers d’une de ses églogues : Cantet, amat quod quisque : levant et carmina curas. […] Quand Polyphème, pour tenter la Nymphe, lui promet quatre petits ours, quand il lui dit qu’il l’aime mieux que son œil unique, et qu’il consentirait à ce qu’elle le lui brûlât, c’est naturel, c’est même touchant encore ; mais quand il regrette que sa mère ne l’ait pas fait naître avec des branchies afin de pouvoir nager comme les poissons, quand il se montre déjà tout amaigri, et que, pour punir sa mère de ne pas lui être serviable, pour la faire enrager (comme dit Fontenelle), il menace de se plaindre de je ne sais quel mal à la tête et aux pieds, la mignardise décidément commence, et elle va jusqu’à la mièvrerie. […] Tel est l’effet de la passion : elle grave en nous les moindres détails du moment et du lieu où elle est née.

1975. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre deuxième. La connaissance des corps — Chapitre premier. La perception extérieure et les idées dont se compose l’idée de corps » pp. 69-122

Peu importe que la sensation soit purement cérébrale et naisse spontanément, sans l’excitation préalable du bout extérieur du nerf, en l’absence des objets qui d’ordinaire provoquent cette excitation. […] Le patient croit sentir dans sa bouche la chair fondante d’une orange absente, ou sur ses épaules la pression d’une main froide qui n’est pas là, voir, dans la rue vide, un défilé de personnages, entendre, dans sa chambre muette, des sons bien articulés. — Donc, lorsque la sensation naît après ses précédents ordinaires, c’est-à-dire après l’excitation de son nerf et par l’effet d’un objet extérieur, elle engendre le même fantôme intérieur, et forcément ce fantôme paraît objet extérieur. […] D’où l’on voit que les objets que nous touchons, voyons ou percevons par un sens quelconque, ne sont que des simulacres ou fantômes exactement semblables à ceux qui naissent dans l’esprit d’un hypnotisé, d’un rêveur, d’un halluciné, d’un homme affligé de sensations subjectives. […] Au contraire, quand nous changeons de place, nous n’emportons pas avec nous les possibilités permanentes de sensation ; elles restent jusqu’à ce que nous revenions, ou bien elles naissent et cessent à des conditions sur lesquelles notre présence n’a en général aucune influence. […] À propos de cette sensation surgissent les images de plusieurs sensations distinctes et liées entre elles, celle des sensations exactement semblables de contact, de résistance et de froid que j’éprouverais si je répétais la même épreuve, celle des sensations à peu près semblables de contact, de résistance et de froid que j’éprouverais si je portais la main au-delà de l’endroit touché, celle des sensations musculaires de locomotion pendant lesquelles ces sensations tactiles me seraient données et au terme desquelles elles ne me seraient plus données, celle des sensations de couleur et de forme visuelles qui naîtraient en moi, s’il y avait de la lumière et si mes yeux étaient ouverts, etc.

1976. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (1re partie) » pp. 413-491

V Il était en 1749 à Asti, jolie petite ville piémontaise, élégante, et riche par ses bons vins, au pied des Alpes, dans la grande plaine du Piémont. […] Le premier plan approuvé, le développement allait très vite ; j’en écrivais un acte par jour, quelquefois plus, rarement moins ; et d’ordinaire, dès le sixième jour, la tragédie était née, sinon faite. […] Gori refusa de me prêter l’Oreste français, et me dit : — Commencez par écrire le vôtre avant de lire celui-ci, et, si vous êtes pour la tragédie, le vôtre pourra valoir plus ou moins ou autant que cet autre Oreste, mais du moins sera-ce bien le vôtre […] Louise-Maximiliane-Caroline-Emmanuel, princesse de Stolberg, était née à Mons, en Belgique, le 20 septembre 1752. […] Une médaille fut frappée pour perpétuer le souvenir de cet événement ; sur l’une des faces, on voyait le portrait de Charles-Édouard, sur l’autre celui de la jeune femme, et la légende, inscrite aussi sur la muraille de la chapelle, portait ces mots en latin : Charles III, en 1720, roi d’Angleterre, de France et d’Irlande. 1766.

1977. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre troisième »

Il n’en est pas de même du mauvais, d’une autre sorte de raison que Fénelon appelle « bornée et subalterne. » Le propre de celui-là est tout à la fois de haïr ce qu’il veut changer, et de ne savoir changer qu’en renversant. […] Toutes les questions nées de l’esprit d’analyse et du besoin d’application, qui furent la noble passion et souvent l’illusion dangereuse du dix-huitième siècle, Montesquieu y touche d’une main aussi hardie que discrète, avec un art qui concilie aux nouveautés les plus audacieuses les esprits les plus timides, aux changements les plus menaçants les classes qui avaient le plus à y perdre. […] Ce qui, au dix-septième siècle, a fait défaut à l’histoire, c’est que l’idée même n’en pouvait venir à un homme de génie, non par l’effet de quelque défense de Louis XIV qui se fût aussi bien qu’Auguste accommodé d’un Tite-Live, mais par une loi des choses de l’esprit, qui faisait naître le génie de l’érudition avant le génie du récit, et les préparateurs de l’histoire avant l’histoire. […] La première édition présentait le cardinal primat de Pologne, président de la diète, sous les traits d’un ambitieux, « profitant des conjonctures, sans chercher à les faire naître, paraissant irrésolu alors qu’il était déterminé dans ses projets, allant toujours à ses fins par des voies qui y semblaient opposées, couvrant le scandale de sa conduite en y ajoutant la perfidie. » Dans la dernière édition, Voltaire a fait disparaître ce passage. […] Elles ramènent à la surface des débris organiques où le microscope reconnaît ces sédiments formés de coquilles dont Buffon composait les couches végétales de ces terres à naître.

1978. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XV. La littérature et les arts » pp. 364-405

Nés tous deux du langage instinctif, ils se sont attachés chacun à l’un des deux ^éléments qui le composaient ; le premier a travaillé sur les cris et les inflexions qui expriment les différents sentiments ; le second sur les sons qui sont devenus des mots exprimant des idées. […] On commence à comprendre aussi qu’un musée digne de ce nom, au lieu de ranger côte à côte dans des galeries quelconques des œuvres séparées souvent par une large distance dans l’espace et le temps, œuvres disparates qui hurlent de ce rapprochement forcé, devrait replacer chaque groupe de tableaux et de statues dans un intérieur aménagé, meublé, orné à la mode de l’époque et du pays où ils naquirent. […] Et en effet le jour où la société polie naît en France, le jour où la vie mondaine s’organise, il faut un nouveau genre d’habitation qui réponde aux besoins nouveaux. […] La farce est née, dans les fêtes de la Basoche, de ces causes grasses qu’avocats et étudiants en droit plaidaient et jouaient à certains jours dans la grande salle du Palais de justice. […] Songe-t-on que les odes de Pindare et les tragédies d’Eschyle naquirent ainsi presque sur commande et osera-t-on affirmer que ce miracle ne pourra jamais se répéter ?

1979. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — III. Le Poëme épique, ou l’Épopée. » pp. 275-353

Il définit l’Iliade « un beau monstre du seul instinct d’un homme supérieur ». […] Il dit que le Grec avoit produit des effets singuliers dans la tête de cette dame ; qu’il y avoit dans sa personne un assemblage grotesque & plaisant des foiblesses de son sexe & de la férocité des enfants du Nord ; qu’il sied aussi mal aux femmes de se hérisser d’une certaine érudition, que de porter des moustaches  ; qu’une femme sçavante a quelque chose de trop hommasse , & conclud que madame Dacier étoit peu propre à faire naître une passion. […] & madame Dacier étoient nés calvinistes : ils sont morts dans le sein de l’église catholique. […] Leur origine, parmi nous, est la première querelle qu’ils ont fait naître. […] Le sçavant abbé Fleuri veut qu’on n’ait commencé à les connoître qu’au douzième siècle, & donne pour la source de tous l’histoire des ducs de Normandie ; ce qui renverse le sentiment de ceux qui mettent Héliodore à la tête des romanciers, & qui disent que du mariage de Théagène & de Chariclée, sont nés tous les romans, Italiens, Espagnols, Allemands, Anglois & François.

1980. (1767) Salon de 1767 « Peintures — La Grenée » pp. 90-121

La terre autour d’eux est jonchée de roses, de jonquilles, de fleurs qui naissent et qui s’épanouissent. […] Les peintres, les poëtes, les sculpteurs, les musiciens et la foule des arts adjacents naissent de la terre, ce sont aussi les enfants de la bonne Cérès ; et je vous réponds que partout où ils tireront leur origine de cette sorte de luxe ils fleuriront et fleuriront à jamais. […] Et il naquit une ostentation insultante dans les uns, et une espèce d’hypocrisie épidémique de fortune dans les autres. […] C’est alors que les grands artistes ne naissent point ou sont obligés de s’avilir, sous peine de mourir de faim. […] Ce n’est pas moi qui ai marché, c’est vous qui m’avez conduit ; et s’il y a un peu de bonne logique dans ce qui précède, il s’ensuit, comme je le disais au commencement, qu’il y a deux sortes de luxe : l’un qui naît de la richesse et de l’aisance générale, l’autre de l’ostentation et de la misère, et que le premier est aussi sûrement favorable à la naissance et au progrès des beaux-arts, que le second leur est nuisible… et là-dessus rentrons dans le salon, et revenons à nos Belle, à nos Bellengé et à nos Voiriot.

1981. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre IV. De la délimitation, et de la fixation des images. Perception et matière. Âme et corps. »

À l’unité vivante, qui naissait de la continuité intérieure, nous substituons l’unité factice d’un cadre vide, inerte comme les termes qu’il maintient unis. […] Son tort n’est pas de priser trop haut l’expérience, mais au contraire de substituer à l’expérience vraie, à celle qui naît du contact immédiat de l’esprit avec son objet, une expérience désarticulée et par conséquent sans doute dénaturée, arrangée en tout cas pour la plus grande facilité de l’action et du langage. […] Et la connaissance immédiate ne trouverait-elle pas alors en elle-même sa justification et sa preuve, si l’on pouvait établir que ces difficultés, ces contradictions, ces problèmes naissent surtout de la figuration symbolique qui la recouvre, figuration qui est devenue pour nous la réalité même, et dont un effort intense, exceptionnel, peut seul réussir à percer l’épaisseur ? […] Les indivisibles de durée ou moments du temps naissent donc d’un besoin de symétrie ; on y aboutit naturellement dès qu’on demande à l’espace une représentation intégrale de la durée. […] Tout à l’heure, la genèse de la perception visuelle d’espace par simple association d’images nous paraissait impliquer une véritable création ex nihilo ; ici, toutes les sensations naissent de rien, ou du moins n’ont aucun rapport avec le mouvement qui les occasionne.

1982. (1903) La renaissance classique pp. -

Les éléments de la future armée naissent à peine que déjà les cadres en sont tout tracés. […] Une grande émotion lyrique l’envahit, annonciatrice de la beauté qui va naître. Il est sûr maintenant qu’elle naîtra. […] On voit tout de suite combien il importe pour un artiste d’être « bien  » et d’appartenir à l’aristocratie naturelle d’un pays. […] Les plus âgés de notre génération sont nés à la veille de la Défaite.

1983. (1905) Propos de théâtre. Deuxième série

Il était législateur, préteur, proconsul et préfet de police. […] De là va naître tout ce qu’on a appelé « la littérature personnelle ». […] C’est un genre qui naît, et qui naît d’une manière de relâchement et d’abaissement. […] Voltaire était « cabotin » de la tête aux pieds. […] Mars était née en 1778.

1984. (1905) Études et portraits. Sociologie et littérature. Tome 3.

Elles étaient démodées aussitôt que nées. […] Il était religieux. […] Le critique des Portraits est déjà . Celui des Lundis va naître. […] Il est de la substance même de ce cœur.

1985. (1863) Histoire de la vie et des ouvrages de Molière pp. -252

Jean-Baptiste Poquelin naquit à Paris le 15 janvier 1622. […] Elle était née le 8 janvier 1618. […] On pensait que c’était elle qui avait été baptisée, le 11 juillet 1638, comme étant née du commerce illégitime du comte de Modène avec mademoiselle Béjart l’aînée. […] Mais ce serait bien à tort que ces vers feraient naître des doutes sur la sobriété habituelle de Molière. […] Enfin, s’étant appesantis sur cette maxime des anciens que « le premier bonheur est de ne point naître, et le second de mourir promptement », ils prirent l’héroïque résolution d’aller sur-le-champ se jeter dans la rivière.

1986. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers » pp. 81-176

« C’est cette qualité appliquée aux grands objets de l’histoire qui, à mon avis, est la qualité essentielle du narrateur, et qui, lorsqu’elle existe, amène bientôt à sa suite toutes les autres, pourvu qu’au don de la nature on joigne l’expérience, née de la pratique. […] Sachant toujours s’occuper lui-même et occuper les autres, il captivait au plus haut point les esprits, et ne laissait pas naître ou dissipait autour de lui des ennuis qui n’entraient jamais dans son âme. […] D’autres sentiments se mêlèrent à cette passion du retour pour altérer l’esprit de l’armée et y faire naître les plus fâcheuses dispositions. […] Elle s’appliquait même à faire naître chez eux un genre d’illusion auquel ils se prêtaient volontiers : c’est qu’au fond le général Bonaparte n’attendait qu’une occasion favorable pour rappeler les Bourbons et leur rendre un héritage qui leur appartenait. […] Mais sa fortune était vieille, et celle du général Bonaparte était jeune au contraire ; elle naissait à peine.

1987. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (1re partie) » pp. 313-408

Voltaire, — Mirabeau — Danton ; le premier des Bonaparte, comme homme de guerre ; Louis XVIII, quoique détestable écrivain ; Rossini, quoique exclusivement dieu de la musique ; Thiers, quoique plus orateur et historien qu’homme d’État ; le second des Bonaparte, quoiqu’il soit l’homme où l’esprit de parti aveugle ait eu la main heureuse en le choisissant pour dictateur ; — ces hommes, nés d’eux-mêmes, et vraiment remarquables, rapetissent tout ce qui est faussement grand autour d’eux. […] Vous étiez fait pour mieux ; vous êtes comme moi, pour le grand, condamné au moindre. […] Au réveil, Joseph sentit pénétrer jusqu’à lui un rayon de l’allégresse universelle, et naître en son cœur comme une envie d’être heureux ce jour-là. […] Il réprima toujours les attendrissements Qui naissent sans savoir, et les troubles charmants, Et les désirs obscurs, et ces vagues délices De l’amour dans les cœurs naturelles complices. […] Si l’on cherchait le lien, le point d’union ou d’embranchement des deux recueils, j’indiquerais la pièce de Joseph Delorme : Toujours je la connus pensive et sérieuse… comme celle d’où est née et sortie, en quelque sorte, cette nouvelle veine plus épurée.

1988. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quatorzième. »

Rien n’est plus propre à faire naître la foi où à l’entretenir que l’unité et la tradition. […] La dureté est l’inévitable conséquence de toute doctrine née du sens propre ; plus on a de vertu, moins on endure les infractions chez les autres. […] Il veut bien remarquer que « de la difficulté vaincue naît un plaisir très sensible pour le lecteur. » La raison est bonne ; mais il y en a une meilleure. Le charme de la poésie n’est pas seulement dans la difficulté vaincue ; il naît surtout de cette beauté singulière qui résulte de la propriété des termes jointe à l’exactitude de la rime. […] Quelques pièces d’André Chénier, douces et savoureuses comme le miel de l’Hymette, et qui reflètent le beau ciel sous lequel était née sa mère, ont rendu son nom immortel.

1989. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1875 » pp. 172-248

Et deux petits chiens, nouveaux nés, gros comme des rats, se tiennent fraternellement dans les pattes l’un de l’autre, se mordillant leurs petites gueules entrouvertes. […] Je le retrouve, ainsi que je l’avais aperçu à l’enterrement de Roger de Beauvoir, je le retrouve avec son teint boucané, sa longue mèche de cheveux lui balafrant la figure, son élégance frelatée dans sa demi-toilette, mais en dépit de tout cela, il faut l’avouer, possédant une politesse de gentilhomme et des grâces de monsieur bien , qui font contraste avec ce taudis, où se mêlent, se heurtent, se confondent avec des objets d’habillements et des chaussettes sales, des livres, des journaux, des revues. […] Des êtres, nés de ma rêverie, commençaient à prendre autour de moi une réalité vivante, des morceaux d’écriture se rangeaient dans le dessin vague d’un plan naissant. […] L’ornemaniste se montre empire, perruque, pour l’agrémentation du zinc. […] Et quand la femme semble amollie par l’éveil amoureux de la nature, soudain, évoquant le souvenir de la dernière guerre, cette femme se montre toute prête à se livrer furieusement à lui, non pour faire l’amour, mais pour qu’il naisse et jaillisse de leurs embrassements, un vengeur.

1990. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — [Lamartine.] » pp. 534-535

J’aurais couru, aujourd’hui même, vous dire tout cela et bien d’autres pensées encore, que les vôtres ont réveillées en moi et ont fait naître ; mais je suis comme vous, j’ai cet honneur, et je suis de corvée tous ces jours-ci : je ne pourrai aller rue de la Ville-l’Évêque que vers la fin de la semaine, et je n’ai pu attendre jusque-là pour vous envoyer les remerciements d’un cœur comblé, pardonné et récompensé à jamais par vous.

1991. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — F — France, Anatole (1844-1924) »

J’y trouve une vive intelligence de l’histoire, une sympathie abondante, une forme digne d’André Chénier ; et je doute qu’on ait jamais mieux exprimé la sécurité enfantine des âmes éprises de vie terrestre et qui se sentent à l’aise dans la nature divinisée, ni, d’autre part, l’inquiétude mystique d’où est née la religion nouvelle.

1992. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Glatigny, Albert (1839-1873) »

Théodore de Banville dans un village, arrivé presque à l’âge d’homme sans éducation et sans lettres, Albert Glatigny entrevit l’art pour la première fois sous cette forme sensible qui seule peut s’imposer aux esprits ignorants.

1993. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 451-455

Caveirac, [Jean Novi de] Abbé, à Nîmes en 1713, une des victimes de la calomnie des Philosophes.

1994. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 56-59

COSTER, [Joseph-François] Avocat en Parlement, premier Commis des Finances, de l’Académie de Nanci & de celle de Lyon, à Nanci en 1729.

1995. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 230-234

DUTEMS, [Louis] ci-devant Ministre du Roi de la Grande-Bretagne à la Cour de Turin, de l’Académie des Inscriptions & Belles-Lettres, à Tours en 1730.

1996. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » pp. 497-500

HÉNAULT, d’autres écrivent HESNAULT, [Jean] à Paris, mort en 1682.

1997. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 104-107

LAUS DE BOISSY, [Louis] fils d’un Epicier, des Académies de Rome & de Madrid, de celle des Ricovrati de Padoue, Correspondant de celle de Montpellier, & Lieutenant Particulier du Siége de la Connétablie & Maréchaussée, à Paris en 1747, est un ancien soi-disant Secrétaire du Parnasse, qui fut bientôt réprouvé de cette fonction, parce qu’il faut du jugement & du goût pour la remplir.

1998. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 285-289

MÉNAGE, [Gilles] de l’Académie Della Crusca, à Angers en 1613, mort à Paris en 1692 ; un des plus célebres Littérateurs du Siecle dernier.

1999. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre IV. Des Sujets de Tableaux. »

Au reste, nous pouvons dire ici des sujets de tableaux, ce que nous avons dit ailleurs des sujets de poèmes : le christianisme a fait naître pour le peintre une partie dramatique, très supérieure à celle de la mythologie.

2000. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Molière »

Jean-Baptiste Poquelin naquit à Paris le 15 janvier 1622, non pas, comme on l’a cru longtemps, sous les piliers des halles, mais, d’après la découverte qu’en a faite M.  […] probablement du théâtre italien, employé de bonne heure par Molière dans la farce du Médecin volant, introduit sur le théâtre régulier en un rôle qui sent un peu son Scarron, il se naturalise comme a fait Mascarille ; il se perfectionne vite et grandit sous la prédilection du maître. […] Le comique Molière était tendre et facilement amoureux, de même que le tendre Racine était assez caustique et enclin à l’épigramme. […] Je suis avec les dernières dispositions à la tendresse, et comme j’ai cru que mes efforts pourroient inspirer à ma femme, par l’habitude, des sentiments que le temps ne pourroit détruire, je n’ai rien oublié pour y parvenir. […] Il y a toute une classe de dramatiques véritables qui ont quelque chose de lyrique en un sens, ou de presque aveugle dans leur inspiration, un échauffement qui naît d’un vif sentiment actuel et qu’ils communiquent directement à leurs personnages.

2001. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Chapitre II. Lord Byron. » pp. 334-423

Il a combattu toute sa vie contre le monde dont il est issu, et pendant sa vie comme après sa mort, il a porté la peine des ressentiments qu’il a provoqués et des répugnances qu’il a fait naître. […] Cet instinct-là est dans le sang : on naît ainsi, comme on naît lion ou bouledogue1246. […] Un jour, près du golfe de San-Fiorenzo1278, son yacht fut jeté à la côte ; la mer était horrible et les écueils en vue ; les passagers baisaient leur rosaire ou s’évanouissaient d’horreur, et les deux capitaines, consultés, déclarèrent le naufrage infaillible. « Bien, dit lord Byron, nous sommes tous nés pour mourir. […] Étrange poésie toute septentrionale, qui a sa racine dans l’Edda et sa fleur dans Shakspeare, née jadis d’un ciel inclément, au bord d’une mer tempétueuse, œuvre d’une race trop volontaire, trop forte et trop sombre, et qui, après avoir prodigué les images de la désolation et de l’héroïsme, finit par étendre comme un voile noir sur toute la nature vivante le rêve de l’universelle destruction. […] Regardons-le naître et grandir, et nous cesserons de le railler ou de le maudire.

2002. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — N — Nodier, Charles (1780-1844) »

Alphonse de Lamartine Charles Nodier était l’ami de toute gloire.

2003. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 120-124

DELILLE, [Jacques] Abbé, Professeur au Collége de la Marche, en 17.. a débuté dans la carriere des Lettres par des Odes & des Epîtres qui ne le distinguoient de ses Rivaux, que par une versification heureuse & pittoresque.

2004. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 94-98

Rigoley de juvigny, [Jean-Antoine] Conseiller Honoraire du Parlement de Metz, à Paris en 17.

2005. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre premier, premières origines du théâtre grec »

C’est du souffle de son esprit, c’est de l’enthousiasme de ses fêtes que le drame est .

2006. (1888) La critique scientifique « Avant-propos »

Tandis que les écrits de la première sorte s’attachent, en effet, à critiquer, à juger, à prononcer catégoriquement sur la valeur de tel ou tel ouvrage, livre, drame, tableau, symphonie, ceux de la seconde poursuivent, comme on sait, un tout autre but, tendent à déduire des caractères particuliers de l’œuvre, soit certains principes d’esthétique, soit l’existence chez son auteur d’un certain mécanisme cérébral, soit une condition définie de l’ensemble social dans lequel elle est née, à expliquer par des lois organiques ou historiques les émotions qu’elle suscite et les idées qu’elle exprime.

2007. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre X. Machines poétiques. — Vénus dans les bois de Carthage, Raphaël au berceau d’Éden. »

Lorsqu’il naquit, tout un ciel de nuages flottait autour de lui ; Dieu lui-même le souleva dans ses bras, et lui dit en le bénissant : Créature, me voici.

2008. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — De l’état de savant. » pp. 519-520

Entre les sciences, les unes sont filles de la nécessité ou du besoin, telles sont la médecine, la jurisprudence, les premiers éléments de la physique et des mathématiques ; les autres naissent de Tàisance et peut-être de la paresse, telles sont la poésie, l’éloquence et toutes les branches de la philosophie spéculative.

2009. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Chapitre IV. Pourquoi le génie d’Homère dans la poésie héroïque ne peut jamais être égalé. Observations sur la comédie et la tragédie » pp. 264-267

Homère, venu si longtemps avant les philosophes, les critiques et les auteurs d’Arts poétiques, fut et reste encore le plus sublime des poètes dans le genre le plus sublime, dans le genre héroïque ; et la tragédie qui naquit après fut toute grossière dans ses commencements, comme personne ne l’ignore.

2010. (1927) Quelques progrès dans l’étude du cœur humain (Freud et Proust)

C’est lui qui nous maintient avec nous-mêmes dans cet état d’amitié et d’alliance sans lequel nous ne pouvons pas vivre et qui est pourtant si complètement dépourvu de justification qu’on ne comprend pas comment il peut naître. […] Et une sorte de critérium esthétique pourrait être établi, qui permettrait de distinguer les œuvres nées d’un penchant, de celles qu’a fabriquées un vouloir, — la qualité esthétique restant réservée. […] Il n’admet donc pas l’appel, l’attraction d’un être sur un autre, ni que l’amour puisse jamais naître d’affinités réelles et objectives. […] Si bien qu’elle faisait confesser leur prix et goûter leur douceur divine, par tous ces mêmes assistants — si seulement ils étaient un peu musiciens — qui ensuite les méconnaîtraient dans la vie, en chaque amour particulier qu’ils verraient naître près d’eux. […] Je vous mets simplement en garde contre les photographies, qui sont presque toutes d’une époque bien antérieure à celle où naquit vraiment Proust l’écrivain, et qui donnent de lui une image beaucoup trop mièvre.

2011. (1932) Les idées politiques de la France

» Ferry mettait sous la catégorie de la tradition ce qui était et ne pouvait se développer que sous celle du changement. […] La hiérarchie condamna ces aspirations insolites, brisa Lamennais, mais Gracchus jeta vers le ciel la poignée de poussière d’où naquirent plusieurs Marius. […] Le jeune clergé est le clergé de paroisse, du peuple, qui vit dans le peuple, qui demeure souvent isolé et mal vu s’il se montre réactionnaire, s’il se met au service des « gros ». […] Par eux et par là a été surmonté en partie ce préjugé de défiance populaire, , comme son produit direct, du cléricalisme militant qui va de 1815 à l’affaire Dreyfus. […] De ces larmes-ci, Vigny a fait naître Éloa.

2012. (1910) Variations sur la vie et les livres pp. 5-314

Albert le Grand vint enseigner à l’Université de Paris où il eut pour élève saint Thomas, dans la ville d’Aquino en Italie. […] Je me suis promené dans le silence de ce cloître avec le poète Raymond de La Tailhède à Moissac. […] Hortense-Thérèse-Sigismonde-Sophie-Alexandrine Allart naquit à Milan, le 7 septembre 1801. […] à Sisteron le 26 juin 1843, Arène est mort à Antibes le 17 décembre 1896. […] Quant à Isabelle elle disait : — Je suis née musulmane et je n’ai jamais changé de religion.

2013. (1902) Le problème du style. Questions d’art, de littérature et de grammaire

Les idées naissent comme elles peuvent. […] Victor Hugo a rédigé ses premiers vers dans le goût d’Andrieux et de Legouvé  ; les images ne naissent sous sa plume qu’à mesure qu’elles naissent dans son œil, qu’elles se classent dans son cerveau. […] Louis Dumur a conté le drame ridicule et triste qui peut naître de ces partielles amnésies. […] De cette intimité naquirent plusieurs recueils de vers un peu gauches, et très beaux, parfois. […] Moréas, il faudrait deux générations : il est le précurseur d’un grand poète qui ne naîtra pas.

2014. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome IV pp. -328

La transfusion du sang d’un animal dans un autre, fit naître à peu près, vers le même temps, de grandes disputes dans les écoles. […] Ils ressentoient cet intérêt vif & tendre qu’inspire aux ames bien nées tout corps auquel on appartient. […] Les Cacouacs, enchantés de leur pays, le désertent quelquefois, après y avoir fait naître des divisions intestines qui n’éclatent que trop. […] Son père, dans le déclin de sa maison, s’étoit attaché au prince de Salerne, qui fut dépouillé depuis de sa principauté par Charles-Quint. […] Porée : Il devoit naître sous Auguste, Dans l’âge heureux des beaux esprits, Si le ciel, par un choix plus juste, Ne l’eût fait naître sous Louis.

2015. (1911) Visages d’hier et d’aujourd’hui

Si les doctrines, nées de son rêve, se posaient sur la réalité, il ne sut pas que la réalité n’y était pour rien ; ou il ne voulut pas le croire. […] Charles-Louis Philippe était à Cérilly, petite ville de l’Ailier. […] Samuel Langhorne Clemens était mort ; Mark Twain venait de naître. […] Un sentiment s’y manifeste ; et, au lieu de naître et mourir, il traîne, il s’atténue, il se multiplie. […] Cela dure encore, et déjà un autre sentiment, un autre son, naît et commence sa romanesque destinée.

2016. (1889) Les artistes littéraires : études sur le XIXe siècle

Or, quelque bizarre que semble la proposition, il est permis de dire que les qualités littéraires n’ont influé sur leur gloire que dans les proportions les plus minimes, et que, si elles l’ont consolidée d’une manière définitive, elles ne l’ont pas fait naître. […] » Théophile Gautier avait déjà protesté contre cette théorie, née d’une confusion entre la faculté de sentir, qui procède des nerfs et du cœur, et la faculté d’engendrer, qui procède du cerveau et de l’intelligence. […] Dans un repli des mers éclatantes et vastes,        Dieu m’a fait naître au flanc des monts. […] Triste philosophie, qui ne naît pas chez le poète simplement de circonstances privées et spéciales, mais plutôt d’une conviction longuement mûrie et d’un sentiment profond ! […] Déterminés par des causes souvent inconnues, mais non pas forcément inconnaissables, ils suivent une marche fatale, naissent, grandissent, s’étiolent, et enfin disparaissent, quelquefois à l’heure même où on les croyait irrévocablement fondés et indestructibles.

2017. (1927) Approximations. Deuxième série

Les romans de Stendhal ne sont nullement, quoiqu’on en pense, des livres dominés : ce qui fait naître cette impression, c’est son don exceptionnel du raccourci. […] Les Goncourt ont su voir, et presque tous leurs défauts ne naissent somme toute que de l’excès même de cette qualité. […] Joseph Milsand naquit le 23 février 1817 à Dijon qui demeura son quartier-général jusqu’à sa mort le 4 septembre 1886. […] Et je voyais naître sous mes yeux et grandir déjà ma légendeeo ». […] Cependant parmi tant d’ouvrages nés de l’état de guerre, et que seul cet état pouvait justifier, je ne serais pas surpris que celui-ci fût un des rares qui survécussent.

2018. (1895) La vie et les livres. Deuxième série pp. -364

Comment naquit ce credo ? […] Quand nous naissons à peu près supportables, le métier nous déforme, nous déprime, nous inflige des gibbosités et des tics. […] » Dans ce ravissement, le poète faillit oublier qu’il était logicien. […] Comment naissent, croissent et meurent les littératures, les religions, les arts, les sociétés politiques ? […] Le pouvoir favorisait sans honte les hommes bien nés qui aiment mieux être oisifs que méchants.

2019. (1886) Le roman russe pp. -351

Mais il ne faut pas confondre cette beauté spirituelle, qui naît d’une certaine illumination du regard chez l’artiste, avec l’habileté de main du prestidigitateur. […] — Quand le manuscrit de Griboïédof commença de circuler, en 1824 (la censure en interdit la publication, et l’auteur ne vit jamais sa pièce imprimée), sa gloire naquit d’un coup, comme elle naissait alors, dans les cercles choisis qui imposaient leurs admirations à la masse ; elle balança un instant celle de Pouchkine. […] Nicolas Vassiliévitch naquit en 1809, à Sorotchinzy, près de Poltava, au centre des terres noires et de l’ancien pays cosaque. […] Cette partie réparatrice ne venait pas ; les douces visions se refusaient à naître sous le crayon attristé du caricaturiste. […] Ce fut là que Ivan Serguiévitch naquit, en 1818, et qu’il grandit en toute liberté et solitude.

2020. (1881) Le roman expérimental

Une expérience, même la plus simple, est toujours basée sur une idée, née elle-même d’une observation. […] Les enfants qui naissent aujourd’hui seront, ils ne doivent pas l’oublier, les hommes du vingtième siècle. […] Il était deux cents ans trop tard. […] Si vous ne naissez pas avec une fortune, que ferez-vous ? […] Un certain Jeoffrin, du caprice d’un étudiant et d’une fille, a grandi dans un ménage ouvrier.

2021. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. FAURIEL. — POST-SCRIPTUM. » pp. 269-272

. ; ces notes vraies, tendres, profondes, nées du cœur et toutes chantantes, nous paraissent, aujourd’hui encore, autrement enviables que bien des mérites lentement acquis.

2022. (1874) Premiers lundis. Tome II « L. Aimé Martin. De l’éducation des mères de famille, ou de la civilisation du genre humain par les femmes. »

Tels sont les doutes qu’a fait naître en notre esprit la lecture de l’estimable ouvrage de M. 

2023. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 34-39

CORDEMOI, [Gérault de] de l’Académie Françoise, à Paris, mort en 1684.

2024. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 260-264

MASSILLON, [Jean-Baptiste] Evêque de Clermont, de l’Académie Françoise, à Hieres en Provence en 1663, mort à Clermont en 1742.

2025. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 467-471

PATRU, [Olivier] Avocat au Parlement de Paris, de l’Académie Françoise, à Paris en 1604, mort dans la même ville en 1681.

2026. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 516-521

Vulson, [Marc de la Colombiere] à Grenoble, mort dans un âge avancé, en 1658 ; Auteur inconnu à presque tous nos Lexicographes, & qui ne méritoit nullement cet oubli pour les services qu'il a rendus à notre Histoire.

2027. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre V. Caractère du vrai Dieu. »

    Il donne aux fleurs leur aimable peinture ;         Il fait naître et mûrir les fruits,         Et leur dispense avec mesure, Et la chaleur des jours, et la fraîcheur des nuits.

2028. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 17, de l’étenduë des climats plus propres aux arts et aux sciences que les autres. Des changemens qui surviennent dans ces climats » pp. 290-294

L’usage frequent et habituel des denrées des païs chauds rapproche donc, pour ainsi dire, le soleil des païs du nord, et il doit mettre dans le sang et dans l’imagination des habitans de ces païs une vigueur et une délicatesse que n’avoient pas les ayeux, dont la simplicité se contentoit des productions de la terre qui les avoit vû naître.

2029. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXIXe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe (2e partie) » pp. 161-232

pourquoi suis-je  ? […] Nous eûmes, sans nous être entendus, et à la différence près du talent, la même pensée née du même temps : faire descendre la poésie des nuages, et l’introduire comme un hôte de tous les jours et de toutes les conditions au foyer domestique de famille, chez le savant comme chez l’ignorant, chez le riche comme chez le pauvre ; changer en pain quotidien de toutes les âmes pensantes ou aimantes cette ambroisie poétique jusque-là réservée aux dieux de ce monde. […] La mère, qui commence à se douter du sentiment de la pitié et du malheur dans le cœur de son fils, prévient les objections qu’elle pressent dans l’esprit du père par les souvenirs de leur ménage, contracté sous les auspices de la Providence seule, au jour de la ruine, le lendemain du grand incendie de la ville. […] De cette rencontre naquit une triple amitié qui ne se refroidit plus jamais entre la princesse, le prince et le poète.

2030. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIe entretien. Vie du Tasse (2e partie) » pp. 65-128

Un préjugé puéril met les poètes en suspicion de démence ; ce préjugé est assez naturellement, dans le monde, de l’opinion que l’imagination prédomine exclusivement dans les poètes, et que cette prédominance de l’imagination seule les prédispose à l’égarement d’esprit. […] Il y a au fond du cœur des hommes nés sensibles une passion ou une maladie de plus que dans les autres hommes : c’est la passion ou la maladie des lieux qui les ont vus naître et dont le nom, le site, le ciel, les montagnes, les mers, les arbres, les images, évoqués tout à coup par un puissant souvenir, se lèvent devant leur imagination avec une telle réalité et une telle attraction du cœur, qu’il faut mourir ou les revoir. […] Je suis , répliquai-je, d’une mère napolitaine, et à Naples, ville célèbre d’Italie ; mon père était de Bergame, en Lombardie ; je cache mon nom, et telle est son obscurité que, si je me nommais, cela ne vous apprendrait rien ; je fuis la persécution d’un prince et de la fortune, et je vais chercher un refuge en Savoie.

2031. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre III. Les immoralités de la morale » pp. 81-134

Les contradictions, les oppositions entre groupes différents correspondent en partie aux morales diverses que fait naître une civilisation quelque peu touffue, aux morales professionnelles, peut-on dire, en élargissant convenablement le sens du mot. […] Comme ils ne s’accordent guère, il naît autant de morales, si l’individu est plastique, qu’il y a d’influences divergentes exercées sur lui. […] Il est tout à fait impossible qu’une conception sociale ou morale nouvelle naisse et grandisse sans aberration, sans défauts de logique, sans que les efforts de ses amis n’entravent plus ou moins sa marche. […] Pourtant, la santé de la société, comme celle du corps et celle de l’âme, la santé relative que nous pouvons, avec quelque témérité, espérer, ne peut naître que d’un équilibre de forces opposées, d’un système de tendances divergentes qui abandonnent, pour s’unir, quelque chose de leur nature et se méconnaissent elles-mêmes.

2032. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 mai 1886. »

Les premiers artistes n’ont donc pas eu besoin de recréer, au moyen d’artifices spéciaux, les diverses sensations ; assez leur a été, pour cette fin, de faire naître les sensations visuelles. […] Et naquit la sculpture du moyen-âge. […] Née à Madrid de parents italiens et chanteurs, elle commença ses études de chant à New York où ses parents avaient émigré. […] Thomas Wingham (1846-1893) était un pianiste et un compositeur anglais à Londres.

2033. (1856) Mémoires du duc de Saint-Simon pp. 5-63

Ces seigneurs en perruques majestueuses, ces princesses aux coiffures étagées, aux robes traînantes, ces magistrats, ces prélats agrandis par les magnifiques plis de leurs robes violettes, ne s’entretenaient que des plus beaux sujets qui puissent intéresser l’homme ; et si parfois des hauteurs de la religion, de la politique, de la philosophie, de la littérature, ils daignaient s’abaisser au badinage, c’était avec la condescendance et la mesure de princes nés académiciens. […] C’était un seigneur d’avant Richelieu, cinquante ans trop tard, sourdement révolté et disgracié de naissance. […] C’est qu’il a trouvé sa vraie place ; cet esprit qui regorgeait de sensations et d’idées était curieux, passionné pour l’histoire, affamé d’observations, « perçant de ses regards clandestins chaque physionomie », psychologue d’instinct, « ayant si fort imprimé en lui les différentes cabales, leurs subdivisions, leurs replis, leurs divers personnages et leurs degrés, la connaissance de leurs chemins, de leurs ressorts, de leurs divers intérêts, que la méditation de plusieurs jours ne lui eût pas développé et représenté toutes ces choses plus nettement que le premier aspect de tous les visages. » « Cette promptitude des yeux à voler partout en sondant les âmes » prouve qu’il aima l’histoire pour l’histoire. […] Ainsi naissent les grands hommes, par hasard et nécessité, comme les grands fleuves, quand les accidents du sol et sa pente réunissent en un lit tous ses ruisseaux.

2034. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid, (suite.) »

Lorsque les Maures feront une invasion en Castille, que nul homme ne le secoure : nous verrons s’il parle ainsi sérieusement ou par plaisanterie. » Rodrigue ne plaisante pas. […] Ils se précipitèrent à la cour d’entrée, avec des flambeaux et des cierges ; ils reçoivent avec la plus grande joie celui qui en bonne heure naquit. « J’en rends grâces à Dieu, mon Cid, dit l’abbé don Sanche ; puisque je vous vois ici, recevez de moi l’hospitalité. » Le Cid dit : « Merci, seigneur abbé, et je suis votre obligé ; je me pourvoirai de vivres pour moi et mes vassaux. […] Elle pleurait de ses yeux, et elle voulut lui baiser les mains. « Merci, Campéador, en bonne heure vous êtes .

2035. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres inédites de F. de la Mennais (suite et fin.)  »

Il avouait qu’il n’était pas pour la prêtrise, qu’il s’y était laissé inconsidérément entraîner par le vertueux abbé Carron ; qu’il lui fallait la vie laïque en plein vent et en plein soleil ; qu’il regrettait de n’être pas marié, de n’avoir pas une femme, des enfants ; mais que, pour se former une famille, il était déjà trop âgé lorsqu’il rompit avec le sacerdoce. » Certes, La Mennais, en 1810, eût probablement frémi de s’entendre s’exprimer de la sorte ; mais l’aveu qui devait sortir plus tard de ses lèvres couvait déjà dans l’amertume cruelle et irrémédiable dont il se sentait abreuvé au fond de l’âme. […] Lui-même le disait à Béranger dans l’épanchement de ses confidences : « Il y en a qui naissent avec une plaie au cœur. » À quoi le malin répondait : « En êtes-vous bien sûr ? Je crois plutôt que nous autres, qui venons au monde pour écrire, grands ou petits, philosophes ou chansonniers, nous naissons avec une écritoire dans la cervelle. » Et Béranger en concluait qu’il ne s’agissait que de verser l’encre sur le papier pour dégager la cervelle elle-même.

2036. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. DE BALZAC (La Recherche de l’Absolu.) » pp. 327-357

Il est à Tours, le 20 mai 1799. […] Maintes idées s’offraient à la fois : la première me portait à diriger mes pas près du roi-citoyen et à lui faire l’aveu de ma découverte ; l’autre, à faire un jour assez d’or pour former divers établissements dans la ville qui me vit naître ; une autre idée me portait à marier le même jour autant de filles qu’il y a de sections à Paris, en les dotant ; une autre idée me portait à me procurer l’adresse des pauvres honteux, et à aller moi-même leur distribuer des secours à domicile. […] Rien ne nuit plus à la curiosité qui naît du nouveau et à ce charme de l’imprévu qui fait l’attrait du roman.

2037. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. VINET. » pp. 1-32

Par Du Perron, en son sein, mais qu’il renvoya à la France, le pays de Vaud fut pour quelque chose dans l’établissement littéraire qui suivit, et ne demeura pas inutile à l’introduction de Malherbe, qui eut, comme on sait, le célèbre cardinal pour patron3. […] dans la Réforme, à un moment où le besoin d’un réveil religieux s’y faisait sentir, il participa tout à fait à ce mouvement de réveil, sans le pousser jamais jusqu’à la séparation, à l’exclusion et à la secte. […] Alexandre-Rodolphe Vinet, de Crassier, naquit à Ouchi près de Lausanne, le 17 juin 1797.

2038. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. NISARD. » pp. 328-357

Pour revenir à Perse, le critique, après l’avoir accusé d’avoir trop tôt produit, et avoir pris de là occasion de s’emporter contre les gens sans génie qui écrivent trop jeunes ; après l’avoir de plus accusé (par une singulière contradiction) d’avoir peu produit et de manquer de qualité abondante et fécondante, déclare qu’il ne se serait jamais élevé bien haut, et qu’il était sans génie. […] Grâce à part, au milieu de toute son apparence et de sa réalité de sens et de raison, il a bien, il est vrai, du convenu, des opinions qui ne sont pas nées en lui dans leur originalité ; il a, dans ses développements, des habitudes littéraires qui font que la phrase domine un peu et amplifie et achève parfois l’idée. […] Mais ne posez pas les limites, ne criez pas contre l’exception, car de l’exception seule naîtra le talent, le génie.

2039. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre IV. Construction de la société future »

On suppose des hommes nés à vingt et un ans, sans parents, sans passé, sans tradition, sans obligations, sans patrie, et qui, assemblés pour la première fois, vont pour la première fois traiter entre eux. […] Sauf chez quelques froides et lucides intelligences, un Fontenelle, un Hume, un Gibbon, en qui elle peut régner parce qu’elle ne rencontre pas de rivales, elle est bien loin de jouer le premier rôle ; il appartient à d’autres puissances, nées avec nous, et qui, à titre de premiers occupants, restent en possession du logis. […] Antérieurement au contrat social, il n’y a pas de droit véritable ; car le droit véritable ne naît que par le contrat social, seul valable, puisqu’il est le seul qui soit dressé entre des êtres parfaitement égaux et parfaitement libres, être abstraits, sortes d’unités mathématiques, toutes de même valeur, toutes ayant le même rôle, et dont nulle inégalité ou contrainte ne vient troubler les conventions.

2040. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLIXe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

Mais, soit conception, fort voilée sous une apparente complicité imitée de la folie de Brutus, soit tentation soudaine d’un crime mémorable, née en lui de la facilité et de l’occasion, il avait résolu d’être le meurtrier de son ami et le libérateur de sa patrie. […] « Cet homme, pour toutes les grandes choses, navigua si bien par le flux et le reflux des événements, qu’il est difficile de savoir s’il montra plus de constance dans la prospérité que d’égalité d’âme et de calme dans la mauvaise fortune : quant à son génie, il était si grand, si facile, si pénétrant, qu’il excellait autant en toutes choses que d’autres dans quelques-unes. […] Dans des affaires si ardues, il se montre tellement habile, qu’il fait naître d’incroyables espérances auxquelles il répondra pleinement.

2041. (1892) Boileau « Chapitre IV. La critique de Boileau (Suite). Les théories de l’« Art poétique » » pp. 89-120

Avant tout, il demande à celui qui veut faire des vers d’être poète, d’avoir le génie. […] On naît poète : il n’y a pas de procédé, d’hygiène ou de gymnastique par où l’on puisse se donner une nature de poète. […] D’autre part, si bien doué qu’on soit, on ne naît pas avec la science du métier : en poésie, comme dans tous les arts, il faut apprendre la technique par où la nature s’exprime et manifeste son originalité ; bien rares sont les génies faciles en qui l’inspiration est immédiatement infaillible, et pour qui l’enfantement des chefs-d’œuvre est l’affaire d’un jour, et d’un accès de fièvre.

2042. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre III. Littérature didactique et morale »

En bon bourgeois aussi, le collaborateur indigne de Guillaume de Lorris méprise les femmes : et de ce mépris brutal et profond naît pour lui l’impossibilité de comprendre l’amour courtois : comment peut-on perdre temps en propos ingénieux, en grimaces dévotes, avec cet être fragile, vicieux, bavard, menteur, et qui ne sert pour un prud’homme qu’à tenir le ménage et donner des enfants ? […] Jean de Meung nous démontre Qu’onques amour et seigneurie Ne s’entrefirent compagnie, et que le pouvoir du mari fait naître au lieu de l’amour l’indocilité chez la femme. […] Tous les deux nés aux bords de Loire, fils du même pays, génies populaires, vulgaires et forts, il y a entre eux la différence des temps : mais c’est au fond la même œuvre, à laquelle ils ont travaillé, presque par les mêmes moyens.

2043. (1868) Alexandre Pouchkine pp. 1-34

On sait leurs griefs contre la société où ils étaient nés. […] Cependant lord Byron, dans un pays d’habitudes oratoires, où l’on parle à toute occasion, et où trop souvent on écrit comme on parle, n’a jamais daigné faire un choix entre les idées qui se présentaient en foule à son imagination. […] Tu n’es pas pour la vie des sauvages ; tu ne veux de la liberté que pour toi.

2044. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre neuvième »

Elle en avait au nom de la liberté de conscience, fruit, chèrement payé, des querelles religieuses ; elle en avait au nom de la science économique, née des souffrances du commerce et de l’industrie dans les dernières années, et qui se plaignait avec le double crédit de critiques fondées et d’espérances sans limites. […] Il y a là encore des portraits, ceux de nos pères par l’esprit, de ces beaux génies qui, selon les paroles de Voltaire, « ont préparé des plaisirs purs et durables aux hommes qui ne sont point encore nés. » Rien n’a vieilli des jugements sommaires et pourtant si pleins qu’il en a portés ; la critique la plus profonde ne réussit qu’à nous en donner les motifs. […] C’est cet esprit qui, dans nos premiers conteurs, naît tout formé, et, parmi tant de mots et de tours destinés à la refonte, crée un français qui ne changera pas.

2045. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « L’expression de l’amour chez les poètes symbolistes » pp. 57-90

En somme, Jean de Tinan est blasé comme l’élite de ses contemporains. […] Il porte le reflet de : L’ardent soleil païen qui l’a fait naître un jour De ton écume d’or, ô Beauté suraiguë ! […] C’est l’affection virile et désintéressée qu’entrevoit l’Américain Whitman et qu’il invoque résolument parce qu’il est d’un pays neuf, dégagé de routine et de faux plis.

2046. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. John Stuart Mill — Chapitre II : La Psychologie. »

Remarquons d’abord qu’il y a deux sortes de propositions générales : les unes qui, de l’avis de tout le monde, naissent de l’expérience et ne la dépassent pas, n’étant que l’expérience généralisée (Exemple : Tous les hommes sont mortels) ; les autres, qui, bien que suggérées par l’expérience, semblent la dépasser par leur caractère de nécessité (Exemple : Deux parallèles sont partout équidistantes). […] On naîtrait bon ou mauvais, comme on naît beau ou laid, sot ou spirituel ; mais alors on plaindrait le crime comme on plaint la laideur, on la réprouverait comme on réprouve la sottise, on l’internerait comme on interne la folie.

2047. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Discours préliminaire, au lecteur citoyen. » pp. 55-106

Tout bon Citoyen doit être jaloux de voir sa Patrie l’emporter sur les autres Peuples par la prééminence des lumieres & des talens : mais, je vous le demande, Lecteur impartial, un zele sage, un zele éclairé peut-il adopter ces célébrités* capricieuses qu’un moment fait naître, & qu’un autre moment voit s’anéantir ? […] Le même Philosophe dit formellement, que tout Ecrivain de génie est Magistrat de sa patrie, & que son droit est son talent. […] Helvetius naquit à Paris, qu’il y fut élevé, qu’il y fit, tout le temps de sa vie, son séjour ordinaire, & l’Auteur de l’Ouvrage posthume déclare n’y avoir séjourné qu’un certain nombre d’années.

2048. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — Y. — article » pp. 529-575

Yvon, [N.ABCD] Abbé, Historiographe de Monseigneur le Comte d'Artois, en 17.. […] Que de familles injustement flétries par l’ignorance ou la scélératesse, doivent leur réhabilitation au repentir que la Religion a fait naître dans l’ame des vrais Coupables ! […] Suivant cet Arrêt, il vient tous les ans à la Maison des Enfans-Trouvés de Paris plus de deux mille Enfans nés dans les Provinces très-éloignées de la Capitale.

2049. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre Premier »

De même la race des humains naît et s’écoule. » — Dans une de ces odes de Pindare, hérissées de lauriers et drapées de pourpre, retentissantes du chant des clairons, qui ressemblent à des processions triomphales, apparaît l’image et rapide et voilée d’une jeune femme blessée par une douleur mystérieuse : — « Elle n’avait plus le courage de s’asseoir à une table nuptiale ni de mêler sa voix aux chants d’hyménée. […] En revanche, — et les exemples sont bien plus nombreux, — que de femmes bien nées, entourées de toutes les protections de la famille et de la fortune, n’aspirent qu’à descendre pour se mêler aux saturnales du monde inférieur ! […] Ce Laffemas, dont le roman et le drame écartèlent depuis si longtemps la mémoire dans une boue sanglante, était un de ces sbires nés pour l’espionnage, comme les levriers pour la chasse.

2050. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame de Pompadour. Mémoires de Mme Du Hausset, sa femme de chambre. (Collection Didot.) » pp. 486-511

Jeanne-Antoinette Poisson, née à Paris le 29 décembre 1721, sortait de cette riche bourgeoisie et de ce monde de finance qui s’était si fort poussé dans les dernières années de Louis XIV, et dans lequel il n’était pas rare de rencontrer un épicuréisme spirituel et somptueux : elle y apporta les élégances. […] Pourtant le caractère de Louis XV étant donné, c’est encore ce qui pourrait peut-être arriver de, mieux à ce roi que de tomber aux mains d’une femme « née sincère, qui l’aimait pour lui-même, et qui avait de la justesse dans l’esprit et de la justice dans le cœur : cela ne se rencontre pas tous les jours. » Telle est, du moins, l’opinion de Voltaire, jugeant Mme de Pompadour après sa mort. […] [NdA] Voici le relevé exact des registres de l’état civil relatifs à Mme de Pompadour : Jeanne-Antoinette Poisson, marquise de Pompadour, née à Paris, le 29 décembre 1721 (Saint-Eustache) mariée, le 9 mars 1741, à Charles-Guillaume Le Normant, seigneur d’Étiolles (Saint-Eustache) ; — morte le 15 avril 1764 ; inhumée le 17 aux Capucines de la place Vendôme. — Sa paroisse à Paris était la Madeleine ; son hôtel, dans le faubourg Saint-Honoré, est aujourd’hui l’Élysée.

2051. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « André Chénier, homme politique. » pp. 144-169

en 1762 à Constantinople, d’une mère grecque, nourri d’abord en France sous le beau ciel du Languedoc, après ses études faites à Paris au collège de Navarre, il essaya quelque temps de la vie militaire ; mais, dégoûté bientôt des exemples et des mœurs oisives de garnison, il chercha l’indépendance. […] Se séparant, pour le mieux flétrir, du faux bon ton qui n’avait jamais été le sien, et revendiquant le vrai bon ton éternel et naturel, celui qui est tel pour toute âme bien née, et qu’aucune révolution n’est en droit d’abolir : Tout homme qui a une âme bonne et franche, s’écriait-il, n’a-t-il pas en soi une justesse de sentiment et de pensées, une dignité d’expressions, une gaieté facile et décente, un respect pour les vraies bienséances, qui est en effet le bon ton, puisque l’honnêteté n’en aura jamais d’autre ? […] C’était (car le temps permet aujourd’hui de soulever le voile), c’était Mme Laurent Le Coulteux, née Pourrat, sœur de Mme Hocquard, et qui habitait alors à Luciennes.

2052. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre I. Le Bovarysme chez les personnages de Flaubert »

Comme elle, et à la suite d’une même sophistication, Léon se conçoit autre qu’il n’est, et ces deux fictions, qui coïncident, vont faire le même office que rempliraient deux sentiments naturels : une réalité amoureuse va naître de cette rencontre. […] Dans son maintien, dans ses attitudes, elle joue cette comédie du ’sacrifice : sa froideur soudaine décourage la timidité du clerc et la réalité sentimentale qui allait se former, se voit brisée par la fiction avant que d’être née. […] Ce qu’il faut donc constater en fin de compte, c’est qu’avec la philosophie et la science, c’est qu’avec l’universalité des modes de la connaissance, l’homme se conçoit propre à atterrir en des régions qui lui demeurent inaccessibles, à posséder un savoir qu’il ne conquiert jamais, qu’il se conçoit pour des fins qui ne sont pas les siennes, qu’il y a un abîme entre sa destinée et la destination qu’il se suppose, qu’essentiellement, et dans son activité la plus haute, il se conçoit autre qu’il n’est.

2053. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Mémoires et journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guettée. — I » pp. 248-262

Si quelqu’un semblait pour être prêtre au plus beau et au plus digne sens du mot, c’était bien Bossuet. […] Bossuet avait tous les genres d’éloquence ; et cette facilité merveilleuse d’une parole née de source et si nourrie d’étude et de doctrine, les occasions de toutes sortes qu’il eut de bonne heure dans les emplois du sacerdoce pour appliquer ces dons de nature et en distribuer les fruits, expliquent jusqu’à un certain point cette satisfaction tranquille, cette stabilité précoce d’un esprit qui sent qu’il n’a qu’à continuer et suivre sa marche droite, et qu’il est dans le chemin qui mène à Jérusalem.

2054. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Parny poète élégiaque. » pp. 285-300

Je laisserai donc ce poème tout à fait en dehors de mon appréciation présente, et il ne sera question ici que du Parny élégiaque, de celui dont Chateaubriand disait : « Je n’ai point connu d’écrivain qui fût plus semblable à ses ouvrages : poète et créole, il ne lui fallait que le ciel de l’Inde, une fontaine, un palmier et une femme. » à l’île Bourbon, le 6 février 1753, envoyé à neuf ans en France, et placé au collège de Rennes, où il fit ses études, Évariste-Désiré de Forges (et non pas Desforges) de Parny entra à dix-huit ans dans un régiment, vint à Versailles, à Paris, s’y lia avec son compatriote Bertin, militaire et poète comme lui, Ils étaient là, de 1770 à 1773, une petite coterie d’aimables jeunes gens, dont le plus âgé n’avait pas vingt-cinq ans, qui soupaient, aimaient, faisaient des vers, et ne prenaient la vie à son début que comme une légère et riante orgie. […] Il a traduit chaque fois ce sentiment à l’instant même : son élégie est née toute voisine du moment de l’émotion.

2055. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Frochot, Préfet de la Seine, histoire administrative, par M. Louis Passy. »

Frochot, à Dijon en 1761, marié fort jeune, établi prévôt royal et notaire dans le bourg d’Aignay-le-Duc, avait vingt-huit ans au moment du grand mouvement de 89 : il en partageait les vœux et les espérances, et il fut porté comme député aux États-Généraux. […] En 1812, Malet, dans la nuit du 22 au 23 octobre, mit en jeu l’audacieuse conspiration née et enfermée dans son seul cerveau et dans laquelle il n’avait pas de complices.

2056. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre VIII. De l’éloquence » pp. 563-585

On peut parcourir en tout sens l’injure et l’éloge, sans faire naître l’enthousiasme ni la haine. […] Si vous interdisiez l’éloquence, vous détruiriez la gloire ; il faut que l’on puisse s’abandonner à l’expression de l’enthousiasme pour faire naître ce sentiment dans les autres ; il faut que tout soit libre pour que la louange le soit, pour qu’elle ait ce caractère qui commande à la raison et à la postérité.

2057. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre I. Origine des privilèges. »

Chacun y naît avec son grade héréditaire, son poste local, sa solde en biens-fonds, avec la certitude de n’être jamais abandonné par son chef, avec l’obligation de se faire tuer au besoin pour son chef. […] Quand naquit son dauphin, la joie de la France fut celle d’une famille, « on s’arrêtait dans les rues, on se parlait sans se connaître, on embrassait tous les gens que l’on connaissait17 ».

2058. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre premier. Les signes — Chapitre III. Des idées générales et de la substitution à plusieurs degrés » pp. 55-71

. — Qu’un nouvel objet semblable aux précédents se rencontre après que nous avons prononcé le mot quatre, il formera avec le mot un groupe nouveau, et il naîtra en nous une tendance analogue à celle qui nous a fait prononcer le mot deux, tendance semblable à la première, en ce qu’il s’agit aussi d’une addition, tendance différente de la première, en ce que, au lieu d’ajouter un objet à un objet, on ajoute ici un objet à un groupe de quatre objets réunis. […] Les fausses théories qu’elles ont fait naître sont aussi compliquées que nombreuses et obstruent aujourd’hui la science ; quand on les aura déblayées, la science redeviendra simple. — Cette illusion-ci écartée, on voit les conséquences.

2059. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre III. Poésie érudite et artistique (depuis 1550) — Chapitre I. Les théories de la Pléiade »

Il est toujours fâcheux pour des poètes de travailler sur des théories arrêtées à l’avance, et de réduire leur génie à l’application méthodique d’un système : mieux vaut que les œuvres fassent naître les théories. […] Biographie : Ronsard, le 11 septembre 1524, fils d’un maître d’hôtel de François Ier, fut page du dauphin, puis du duc d’Orléans : il suivit Madeleine de France en Écosse, puis Lazare de Baïf à la diète de Spire, enfin Guillaume du Bellay à Turin.

2060. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens II) Henry Fouquier »

Ceux mêmes qui sont nés avec quelque originalité d’esprit ont beaucoup de peine à la garder intacte. […] Il est le poursuivant de l’absolu, qui eu fait naître au moins l’idée et le désir à toutes celles qu’il aime… J’avoue que, pour ma part, je conçois don Juan un peu autrement.

2061. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lamartine, Alphonse de (1790-1869) »

Philarète Chasles C’était la plus étonnante créature de Dieu, la plus instinctive, la moins apte à conduire les affaires ou à juger les hommes, la mieux douée pour s’élever, planer, ne pas même savoir qu’il planait, tomber dans un abîme et un gouffre de fautes, sans avoir conscience d’être tombé ; sans vanité, car il se croyait et se voyait au-dessus de tout ; sans orgueil, car il ne doutait nullement de sa divinité et y nageait librement, naturellement ; sans principes, car, étant Dieu, il renfermait tous les principes en lui-même ; sans le moindre sentiment ridicule, car il pardonnait à tout le monde et sc pardonnait à lui-même ; un vrai miracle, une essence plutôt qu’un homme ; une étoile plutôt qu’un drapeau ; un arome plutôt qu’un poète, pour faire couler en beaux discours, en beaux vers, même en actes charitables, en hardis essors, en spontanées tentatives, les trésors les plus faciles, les plus abondants d’éloquence, d’intelligence, de lyrisme, de formes heureuses, quoique trop fluides ; de grâces inépuisables, non pas efféminées, mais manquant de concentration, de sol et de virilité réfléchie. […] Et aussitôt les hommes reconnaissent que cette merveille leur est née : un poète vraiment inspiré, un poète comme ceux des âges antiques, ce « quelque chose de léger, d’ailé et de divin » dont parle

2062. (1766) Le bonheur des gens de lettres : discours [graphies originales] « Le Bonheur des gens de lettres. — Premiere partie. » pp. 12-34

A ce mot je vois frémir les ames foibles qui redoutent la vie ; ames infortunées qui n’existent plus dès que les molles voluptés les abandonnent ; tristes victimes de leur lâcheté, dévouées à la crainte & nées pour l’impuissance ; sans doute elle ne sont point faites pour connoître ce courage mâle qui émousse la pointe de l’infortune, résiste aux revers, triomphe des evénemens, & met au rang des plus précieux trésors l’indépendance & l’honneur. […] A ces grands traits la froide dérision est prête à naître sur les lévres de l’homme vulgaire.

2063. (1766) Le bonheur des gens de lettres : discours [graphies originales] « Le Bonheur des gens de lettres. — Seconde partie. » pp. 35-56

Active imagination, tu es la source & la gardienne de nos plaisirs ; ce n’est qu’à toi que nous devons l’agréable illusion qui nous flatte ; tu sçais fournir à notre cœur les plaisirs dont il a besoin ; tu rappelles nos voluptés passées, & tu nous fais jouir de celles que l’avenir nous promet ; tu plais sur-tout à l’esprit ; c’est ta flamme subtile & légere qui colore & les Cieux & la terre & les Mers ; sans toi l’ame se refroidit, la fleur la plus précieuse de notre sensibilité tombe, se fanne, & tous les charmes de la vie disparoissent ; tu distingues dans les Arts celui qui est avec du génie ; la pensée la plus profonde s’évanouit, si elle n’est revêtue de tes couleurs ; tu as peut-être découvert plus de vérités que la raison même, car tu joins la force à l’agrément, la persuasion à l’autorité ; tout ce qui est vif, délicat, riant est de ton ressort ; oui, tu es le miroir heureux où se peignent, se multiplient, s’embellissent tous les objets de la Nature. […] Que ces têtes étroites, ces ames mal nées indifférentes sur l’intérêt général, concentrées dans leurs petits intérêts ne voyent que ce qui les blesse, vous hommes de Lettres & dignes de ce nom, vous ne profanerez point une plume qui ne doit être consacrée qu’au bien public, en la faisant servir à l’orgueil d’immoler un rival ; c’est à vous de donner l’exemple de ce généreux désintéressement, de cette impartialité qu’on est en droit d’attendre de vous, & que vous exigeriez pour vous même..

2064. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Chefs-d’œuvre de la littérature française (Collection Didot). Hamilton. » pp. 92-107

Il naquit, dit-on, vers 1646, auquel cas il serait un peu plus jeune peut-être que La Bruyère, et un peu plus vieux que Fénelon. […] Qu’un esprit doux et poli, pénétrant et fin, répandant sur les choses et sur le prochain une raillerie légère universelle, qu’un tel esprit vienne à naître, cela ne suffit pas.

2065. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXVI. La sœur Emmerich »

Cazalès n’a songé qu’à glorifier, devant Dieu et devant ceux qui l’aiment, une de ces âmes, rares parmi les Saints eux-mêmes, et comme on en peut compter une cinquantaine au plus, parmi ces milliers de Saints, nés au giron fécond de l’Église catholique, depuis dix-huit cent soixante-dix-sept ans ! […] Et parce que la cause de ce résultat est surnaturelle, faut-il renoncer à caractériser, comme nous le ferions dans un poëte inconnu s’il venait à naître, le genre de beauté qu’elle a laissé derrière elle à la Critique et à la Littérature, ces deux jouisseuses, dont l’adorable âme en Dieu qu’elle était, cette sœur Emmerich ne se doutait pas !

2066. (1936) Réflexions sur la littérature « 1. Une thèse sur le symbolisme » pp. 7-17

Il n’avait ni la culture ni peut-être l’oreille d’un musicien : lui-même, dans bucolique, nous dit qu’il vint tard à la musique, et par curiosité de lui confronter une poésie née hors de son influence. […] Si la poésie née du symbolisme donne les fruits que nous devons en attendre encore, si un théâtre de poésie neuve forme l’oreille du public, si les essais critiques qui se poursuivent actuellement sur l’essence et le rythme du vers français continuent eux aussi à assurer et à affiner le sens poétique, jamais plus riche matière n’aura été offerte à l’exercice du goût conscient et aux délicatesses de l’analyse.

2067. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXI » pp. 87-90

Ce génie, s’il se donnait la peine de naître, trouverait bien quelques difficultés sans doute à rajeunir les points de vue, à ressaisir avec nouveauté les grands caractères déjà tracés, à les offrir par des aspects à la fois reconnaissables et imprévus, à peindre sans copier, à tirer de tous nos petits ridicules assez peu gais une large veine de plaisanterie, et à convoquer toutes nos petites vanités maussades à un rire immense.

2068. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Roumanille, Joseph (1818-1891) »

Charles Maurras Roumanille était au pied de ces deux purs chefs-d’œuvre de l’art grec que le peuple et les savants appellent les Antiques.

2069. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 521-526

Clerc de Montmercy, [Claude-Germain le] Avocat au Parlement, & Docteur en Droit, de la Faculté de Paris, à Auxerre en 1716 ; Poëte qui a la gloire d’avoir fait les plus longues Epîtres qui aient jamais existé.

2070. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 202-207

DUCLOS, [Charles] Historiographe de France, Secrétaire perpétuel de l’Académie Françoise, Membre de celle des Inscriptions & Belles-Lettres, de la Société Royale de Londres, de l’Académie de Berlin, à Dinant en Bretagne, mort à Paris en 1772.

2071. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 303-308

FLEURY, [Claude] Prieur d’Argenteuil, Sous-Précepteur des Ducs de Bourgogne, d’Anjou & de Berri, de l’Académie Françoise, à Paris en 1640, mort en 1723 ; un des Ecrivains qui ont honoré le plus la France & les Lettres, par la supériorité & le bon usage de leurs talens.

2072. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 122-127

Ronsard, [Pierre] Prieur de Croix-Val & de Saint Cosme-les-Tours, Abbé de Bellosane, dans le Vendômois en 1524, mort en 1585 ; Poëte trop célébré de son temps, & trop méprisé dans le nôtre.

2073. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 293-297

Solignac, [Pierre-Joseph de la Pimpie, Chevalier de] Secrétaire perpétuel de l'Académie de Nancy, Correspondant de celle des Inscriptions & Belles-Lettres de Paris, Membre de celles de la Rochelle, de Montpellier, de Rome, de Berlin, de Lyon, &c. à Montpellier en 1687, mort à Nancy en 1773.

2074. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 387-391

Trublet, [Nicolas-Charles-Joseph] de l’Académie Françoise & de celle de Berlin, Archidiacre & Chanoine de Saint-Malo, où il est en 1697, & mort en 1770.

2075. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Préface »

Il faut croire qu’à diverses périodes, ces œuvres, et celles qui en ont été inspirées, ont mieux satisfait les penchants d’un nombre notable de lecteurs français que les œuvres véritablement du terroir ; qu’en d’autres termes la littérature nationale n’a jamais suffi, et aujourd’hui moins que jamais, à exprimer les sentiments dominants de notre société, que celle-ci s’est mieux reconnue et complue dans les productions de certains génies étrangers que dans celles des poètes et des conteurs qu’elle a fait naître.

2076. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre III. Partie historique de la Peinture chez les Modernes. »

Or, il est aisé de prouver trois choses : 1º que la religion chrétienne, étant d’une nature spirituelle et mystique, fournit à la peinture un beau idéal, plus parfait et plus divin que celui qui naît d’un culte matériel ; 2º que, corrigeant la laideur des passions, ou les combattant avec force, elle donne des tons plus sublimes à la figure humaine, et fait mieux sentir l’âme dans les muscles, et les liens de la matière ; 3º enfin, qu’elle a fourni aux arts des sujets plus beaux, plus riches, plus dramatiques, plus touchants, que les sujets mythologiques.

2077. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre premier. Beaux-arts. — Chapitre VIII. Des Églises gothiques. »

Vitruve raconte autrement l’invention du chapiteau, mais cela ne détruit pas ce principe général, que l’architecture est née dans les bois.

2078. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre premier »

Comment naquit cette spiritualité guerrière ?

2079. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre cinquième. Retour des mêmes révolutions lorsque les sociétés détruites se relèvent de leurs ruines — Chapitre I. Objet de ce livre. — Retour de l’âge divin » pp. 357-361

Afin d’établir cette vérité d’une manière inébranlable selon le cours naturel des choses humaines, Dieu permit qu’un nouvel ordre de choses naquît parmi les nations.

2080. (1938) Réflexions sur le roman pp. 9-257

Pourquoi le roman de la jeune intelligence n’a-t-il pas été écrit, quand depuis un siècle tant de romans parfaits de l’enfance sont nés ? […] Cet enthousiasme du divin naît de son hérésie. […] Il a remis ensuite son symbolisme sur le métier, et Le Justicier est . […] Ses livres naquirent en enfants frais et riches de pulpe comme le peuple des tableaux de Rubens. […] On naît encorné comme on naît rôtisseur.

2081. (1906) Propos de théâtre. Troisième série

Je ne suis pas respectueux. […] qu’au début de la pièce, malgré les attitudes et les protestations d’Alceste, le misanthrope en lui n’est pas . […] Alceste est chagrin ; je me suis toujours imaginé qu’il dut avoir l’enfance maussade. […] Qui naquit dans la pourpre en est rarement digne. […] Ils n’étaient point « nés natifs » de ce pays-là.

2082. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre II. Le théâtre. » pp. 2-96

IV Ainsi naquit ce théâtre ; théâtre unique dans l’histoire comme le moment admirable et passager d’où il est sorti, œuvre et portrait de ce jeune monde, aussi naturel, aussi effréné et aussi tragique que lui. […] Presque tous sont des bohèmes, nés dans le peuple29, instruits pourtant, et le plus souvent élèves d’Oxford ou de Cambridge, mais pauvres, en sorte que leur éducation fait contraste avec leur état ; Ben Jonson est beau-fils d’un maçon, maçon lui-même ; Marlowe est fils d’un cordonnier ; Shakspeare, d’un marchand de laine ; Massinger, d’un domestique de grande maison. […] Quelles sortes d’idées y naissent, et de quelle façon est-ce qu’elles y naissent ? […] Nous serions nés dieux, autrement. […] Parfois même l’idylle naît complète et pure, et le théâtre tout entier est occupé par une sorte d’opéra sentimental et poétique.

2083. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre II. Les directions divergentes de l’évolution de la vie. Torpeur, intelligence, instinct. »

La vérité est que le système nerveux est , comme les autres systèmes, d’une division du travail. […] De la méconnaissance de ce point sont nées les erreurs et les puérilités du finalisme radical. […] L’enfant qui vient de naître ne connaît ni des objets déterminés ni une propriété déterminée d’aucun objet ; mais, le jour où l’on appliquera devant lui une propriété à un objet, une épithète à un substantif, il comprendra tout de suite ce que cela veut dire. […] L’entendement serait tombé du ciel avec sa forme, comme nous naissons chacun avec notre visage. […] Il semble que la vie, dès qu’elle s’est contractée en une espèce déterminée, perde contact avec le reste d’elle-même, sauf cependant sur un ou deux points qui intéressent l’espèce qui vient de naître.

2084. (1885) Les étapes d’un naturaliste : impressions et critiques pp. -302

Un jeune prédicateur, le Père Fray Diego Niseno, à Alcazaren, en Vieille-Castille, attaque en face le Cultisme, en tête de son recueil de Sermons de Carême. […] d’une famille d’ouvriers, élevé au poste qu’il savait occuper si dignement par son seul mérite, il avait conservé une modestie, une bienveillance, un instinct de serviabilité qui frappaient à première vue. […] Est Français quiconque est sur le sol de France, parle une langue née sur le sol français, exprime des idées françaises, et à ce point de vue, Mistral est au moins aussi Français que M.  […] d’une famille attachée au prétendant, M.  […] Le devoir, pour un garçon bien comme votre fils, est de venir rompre une lance à Madrid, dans la lice où tous les gens de cœur conquièrent honneur et fortune.

2085. (1910) Propos littéraires. Cinquième série

Il était près de Dantzig, en territoire polonais, l’année 1754. […] Comme il y en a qui sont nées pour jeter de l’huile sur le feu, elle était née pour en mettre dans les rouages et c’était une huile parfumée et d’essence fine. […] Elle était née sainte, comme d’autres naissent mécaniciens. […] Il reconnut, sans étonnement, du reste, à ce que je pense, qu’il était diplomate. […] », et que précisément, Jacques de la Cloche, le petit jésuite, à Jersey, ne savait pas d’autre langue que le français.

2086. (1896) Écrivains étrangers. Première série

Il n’a eu, du pays où il est , ni la langue, ni l’esprit. […] Il était en 1823, à Bristol. […] À seize ans, il se sauva de chez l’imprimeur, courut au pays où il était . […] Ce dernier pourtant avait épousé une dame catholique ; et c’est d’elle que sont nés, à Westacre, en 1622, deux enfants jumeaux, Eustace et John. […] à Rotterdam en 1823, professeur à l’Université de Leyde depuis près de quarante ans, M. 

2087. (1874) Premiers lundis. Tome I « Ch.-V. de Bonstetten : L’homme du midi et l’homme du nord, ou l’influence du climat »

Dans le midi, on vit au jour le jour ; la présence du soleil, des travaux peu pénible et jamais interrompus, des sensations toujours en éveil, ne permettent pas les longues espérances ni les longues inquiétudes : on y jouit précisément de cette liberté d’esprit si propice à l’essor de l’imagination ; c’est là que devaient et que seulement pouvaient naître ces poètes aimables, qui chantaient les douceurs du rien faire, la jouissance du présent et l’oubli du lendemain.

2088. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Aubanel, Théodore (1829-1886) »

Elle s’écoula presque tout entière en Avignon, comme on dit là-bas, où il était et où il mourut, après y avoir vécu cinquante-sept ans (1829-1886)… Son œuvre offre partout la clarté native du génie latin.

2089. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Deroulède, Paul (1846-1914) »

C’est une poésie toute d’action, conçue dans la douleur, née dans l’orage, familiarisée dès le berceau avec l’odeur de la poudre, le sifflement des obus et le bruit du canon, ayant eu pour langes le lambeau d’un drapeau troué de balles ou le linceul d’un mobile mort en criant : « Vive la France ! 

2090. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 317-322

FONTENELLE, [Bernard le Bouvier de] de l’Académie des Sciences, dont il fut Secrétaire pendant 22 ans, de l’Académie Françoise, de celle des Inscriptions & de plusieurs autres, à Rouen en 1657, mort à Paris en 1757.

2091. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 223-229

MARMONTEL, [Jean-François] Historiographe de France, à Bort, petite ville du Limousin en 1719.

2092. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 381-387

MOTHE, [Antoine Houdart de la] de l’Académie Françoise, à Paris en 1672, mort dans la même ville en 1731 ; Bel-Esprit agréable, Ecrivain élégant, bon Poëte à certains égards, on trouveroit dans la diversité de ses Ouvrages de quoi former cinq ou six réputations préférables à celle d’un grand nombre de nos Littérateurs actuels, quoiqu’en embrassant trop de genres, il se soit montré foible dans presque tous, pour avoir méconnu ses talens.

2093. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 532-537

POMPIGNAN, [Jean-Jacques le Franc, Marquis de] ancien premier Président de la Cour des Aides de Montauban, sa patrie, de l’Académie Françoise, de celle des Jeux Floraux, &c. en 1709.

2094. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 240-246

Sarasin, [Jean-François] Conseiller du Roi & Secrétaire des Commandemens de M. le Prince de Conti, à Hermanville en 1603, mort à Pezenas en 1654.

2095. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre V »

Sur l’analogie de vitriol nous avons vu naître aristol, formol, menthol, goménol, mots très acceptables et d’une bonne sonorité.

2096. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Étienne Dolet, et François Floridus. » pp. 114-119

Étienne Dolet naquit à Orléans en 1509.

2097. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Chœur. » pp. 21-24

Voilà quels étaient les avantages des chœurs dans l’ancienne tragédie, avantages que les partisans de l’antiquité ont fait valoir, en supprimant les inconvénients qui en pouvaient naître.

2098. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre premier. Que le Christianisme a changé les rapports des passions en changeant les bases du vice et de la vertu. »

De ce mélange est née la magnanimité, ou la générosité poétique, sorte de passion (car les chevaliers l’ont poussée jusque-là) totalement inconnue des anciens.

2099. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre VII. Des Saints. »

Nés souvent dans la cabane du pauvre, vous n’avez étalé aux yeux du monde que d’humbles jours et d’obscurs malheurs !

2100. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre I. Introduction. Trois sortes de natures, de mœurs, de droits naturels, de gouvernements » pp. 291-295

Alors tous les citoyens naissent libres, soit qu’ils jouissent d’un gouvernement populaire dans lequel la totalité ou la majorité des citoyens constitue la force légitime de la cité, soit qu’un monarque place tous ses sujets sous le niveau des mêmes lois, et qu’ayant seul en main la force militaire, il s’élève au-dessus des citoyens par une distinction purement civile.

2101. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre cinquième. Retour des mêmes révolutions lorsque les sociétés détruites se relèvent de leurs ruines — Chapitre III. Coup d’œil sur le monde politique, ancien et moderne, considéré relativement au but de la science nouvelle » pp. 371-375

Après avoir observé dans ce Livre comment les sociétés recommencent la même carrière, réfléchissons sur les nombreux rapprochements que nous présente cet ouvrage entre l’antiquité et les temps modernes, et nous y trouverons expliquée non plus l’histoire particulière et temporelle des lois et des faits des Romains ou des Grecs, mais l’histoire idéale des lois éternelles que suivent toutes les nations dans leurs commencements et leurs progrès, dans leur décadence et leur fin, et qu’elles suivraient toujours quand même (ce qui n’est point) des mondes infinis naîtraient successivement dans toute l’éternité.

2102. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre I. Les Saxons. » pp. 3-71

Des gouttes de la neige fondante naquit un géant, Ymer. « Ce fut le commencement des siècles,  — quand Ymer s’établit […] —  Il n’y avait ni sables, ni mers, ni ondes fraîches. —  On ne trouvait ni terres, ni ciel élevé. —  Il y avait le gouffre béant,  — mais de l’herbe nulle part. »  — Il n’y avait qu’Ymer, l’horrible Océan glacé, avec ses enfants, nés de ses pieds et de son aisselle, puis leur informe lignée, les Terreurs de l’abîme, les Montagnes stériles, les Ouragans du Nord, et le reste des êtres malfaisants, ennemis du soleil et de la vie. Alors la vache Andhumbla, née aussi de la neige fondante, mit à nu, en léchant le givre des rochers, un homme, Bur, dont les petits-fils tuèrent Ymer. « De sa chair ils firent la terre, de son sang le sol et les fleuves, de ses os les montagnes, de sa tête le ciel, et de son cerveau enfin les nuées. » Ainsi commença la guerre entre les monstres de l’hiver et les dieux lumineux, fécondants, Odin, le fondateur, Balder, le doux et le bienfaisant, Thor, le tonnerre d’été qui épure l’air et par les pluies nourrit la terre. […] — de quel jeune homme es-tu  ?  […] Là il passait sa vie à écouter les morceaux de l’Écriture, qu’on lui expliquait en saxon, « les ruminant comme un animal pur, et les mettant en vers très-doux. » Ainsi naît la vraie poésie ; ceux-ci prient avec toute l’émotion d’une âme neuve ; ils adorent, ils sont à genoux ; moins ils savent, plus ils sentent.

2103. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Cromwell » (1827) »

Aux temps primitifs, quand l’homme s’éveille dans un monde qui vient de naître, la poésie s’éveille avec lui. […] En même temps, naissait l’esprit d’examen et de curiosité. […] Les historiens naissent avec la seconde époque ; les chroniqueurs et les critiques avec la troisième. […] Il serait conséquent d’ajouter ici que tout dans la nature et dans la vie passe par ces trois phases, du lyrique, de l’épique et du dramatique, parce que tout naît, agit et meurt. […] La poésie née du christianisme, la poésie de notre temps est donc le drame ; le caractère du drame est le réel ; le réel résulte de la combinaison toute naturelle de deux types, le sublime et le grotesque, qui se croisent dans le drame, comme ils se croisent dans la vie et dans la création.

2104. (1856) Cours familier de littérature. II « Xe entretien » pp. 217-327

VIII J’étais avec un grand attrait naturel pour les facultés supérieures de l’âme et de l’esprit, et par conséquent avec un grand goût littéraire, le plus noble exercice de ces facultés : dès le collège, il y avait de la littérature dans mes amitiés. […] Il était fatigué. […] Je n’avais encore mis le pied dans aucun salon de Paris ; j’étais trop inconnu, trop étranger dans cette capitale, trop peu entreprenant, trop timide, trop indépendant, trop fier et trop humble pour chercher à m’introduire entre deux portes dans un monde où je n’étais pas . […] Charles Nodier était l’ami de toute gloire. […] Au comte d’Orsay Quand le bronze écumant dans ton moule d’argile, Lèguera par ta main mon image fragile À l’œil indifférent des hommes qui naîtront, Et que, passant leurs doigts dans ces tempes ridées Comme un lit dévasté du torrent des idées, Pleins de doute, ils diront entre eux : de qui ce front ?

2105. (1888) Études sur le XIXe siècle

Les images naissent naturellement de la répétition. […] … » Cet amour, subitement dans une rencontre de hasard, devait être une sorte de roman héroïque dont Garibaldi ne parle qu’avec une extrême discrétion. […] avant terme, par suite des frayeurs que traversa sa mère le jour de la bataille de Novare, dans le désordre d’une fuite, devant une maison qui brûlait, il devait se ressentir toujours de sa précoce venue au monde. […] Ceux-là même qui auraient été grands sur le sol qui les vit naître végètent obscurs au milieu des tourbillons de la vie parisienne. […] Malheur à celui qui abandonne avec mépris la terre qui l’a vu naître, qui renie ses frères comme indignes de lui !

2106. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIIe entretien. Vie du Tasse (3e partie) » pp. 129-224

« À vous deux, disent ces vers, nées dans le même sein, nourries toutes petites ensemble du même lait ! […] Ô madame ma chère sœur, mon état est incurable ; je vous supplie, par la mémoire et l’âme de notre père et de notre mère qui nous ont nourris, de permettre que je vienne auprès de vous, je ne dis pas pour goûter, mais au moins pour respirer cet air des lieux où je suis  ! […] La chevalerie était née en Europe du contact de la barbarie du Nord avec le christianisme du Midi. […] « Il fut un temps où, séduit par les illusions de la jeunesse, je connus d’autres désirs ; je dédaignai la houlette des bergers et je fuis loin des lieux qui m’avaient vu naître : je vécus à Memphis ; je fus admis dans le palais des rois ; quoique intendant des jardins, je vis, je connus la cour et ses injustices. […] d’une race à la fois chevaleresque et poétique, élevé par une mère d’élite et par un père déjà glorieux, recueilli dans la fleur de son adolescence par un prince qui lui ouvrit pour ainsi dire sa propre famille, protégé, aimé peut-être par la sœur charmante de ce prince, qui fut pour lui, sinon une amante, du moins une autre sœur, et qui lui pardonna tout, même ses négligences et ses distractions de sentiment que tant d’autres femmes ne pardonnent jamais, illustre avant l’âge de la gloire par des poèmes que la religion et la nation popularisaient à mesure qu’ils tombaient de sa plume ; disputé comme un joyau de gloire entre la maison d’Este, la maison de Médicis, la maison de Gonzague, la maison de la Rovère, ces grands patrons des lettres en Italie ; misérable et errant par sa propre insanité, mais non par la persécution de ses ennemis ; comblé d’enthousiasme et de soins par la jeune princesse Léonora de Médicis ; chéri à Turin, désiré à Florence, appelé à Rome ; retrouvant à Naples, toutes les fois qu’il voulait s’y réfugier, la patrie, l’amitié, la paix d’esprit, l’admiration d’une foule de disciples fiers d’être ses compatriotes ; enfin rappelé pour le triomphe à Rome par un neveu du souverain de la chrétienté, fanatique de son génie et providence de sa fortune ; mourant dans ses bras avec la couronne du poète en perspective et le triomphe pour tombeau : on ne voit rien dans une telle vie qui soit de nature à accuser l’ingratitude humaine, excepté quelques années de cruelle séquestration dans un hospice de fous, qui n’accusent pas, mais qui dégradent un peu son protecteur devenu son geôlier ; mais cette infortune n’est-elle pas souvent, dans l’économie d’une grande destinée, l’ombre qui fait mieux ressortir la note pathétique, qui attendrit le cœur de la postérité, et qui donne à la gloire quelque chose d’une compassion enthousiaste du monde ?

2107. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre quatrième. L’idée du temps, sa genèse et son action »

Par là on introduit en nous une perpétuelle « vicissitude » dont les tronçons décousus échappent à tout lien de souvenir, une féerie de changements à vue qui est une série d’annihilations et de créations : chaque pensée meurt au moment où elle naît, tout est toujours nouveau en nous, et la conception de la durée se trouve impossible. […] William James suppose que, semblablement, le Créateur fasse naître tout d’un coup un homme avec un cerveau contenant des processus analogues à ces processus d’images évanouissantes qui existent dans un cerveau ordinaire après une certaine expérience de la vie ; le premier stimulus réel qui agirait après la création sur le cerveau d’Adam serait donc accompagné d’un processus évanouissant additionnel : ces deux processus s’envelopperaient l’un l’autre, « et l’homme nouvellement créé aurait sans aucun doute, juste au premier instant de sa vie, le sentiment d’avoir existé déjà depuis un certain espace de temps ». — L’hypothèse est ingénieuse, la solution nous semble inexacte. […] III Théorie kantienne sur la forme a priori du temps Dans l’état actuel, l’individu naît avec une organisation du cerveau héréditaire qui tend à produire la notion de durée : nous avons vu que notre cerveau est tout prêt, dès la naissance, pour la classification des phénomènes présents, à venir et passés. Nous naissons sous la fascination de la durée, dont nous nous faisons une idée a priori, presque surnaturelle et divine. […] Sans doute cet avenir est présent à sa façon sous forme d’une idée actuelle, et cette idée même a ses concomitants cérébraux qui sont des mouvements actuels dans l’espace ; mais l’idée, comme telle, n’existerait pas sans certaines conditions de changement interne et externe qui se sont produites, et cette idée à son tour, une fois née, devient une condition de changement interne et externe.

2108. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre VI » pp. 394-434

Elle avait vu à ses pieds, naître et mourir tant de poèmes fameux dont le nom ne s’était conservé que sur cette frêle couronne d’or faite pour son front l Ingénieuse, éclatante et chère couronne ! […] Nul ne peut le dire ; mais celle qui la doit remplacer n’est pas née encore, à coup sûr. […] Elle était née pour ainsi dire sur le théâtre, au beau moment du siècle passé, à Versailles, au beau milieu du plus grand monde. […] Ces deux enfants étaient nées à Versailles le même jour, et pour ainsi dire à la même heure, aux salves ardentes de l’artillerie, aux chants reconnaissants du Te Deum ! […] Mademoiselle Mars était née à Versailles, le même jour que S. 

2109. (1889) Ægri somnia : pensées et caractères

A quoi bon alors, me dira-t-on, faire voir le jour à des enfants qui, de mon aveu, ne sont pas nés valides ? […] * Ne nous pressons pas d’admirer les gens nés avec des talents, non plus que les gens nés riches. Car quel mérite ont-ils eu à naître, ceux-ci avec les dons de l’esprit, ceux-là au milieu de richesses amassées par leurs pères ? […] On naît Jacobin. […] Ils se sont revus, en effet, et de cette liaison de hasard est née une amitié qui, dans la brièveté de la vie humaine, peut passer pour une des plus vieilles, puisqu’elle remonte à près d’un demi-siècle.

2110. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome II

Remarquez que ce travail de défense spirituelle n’échappe pas à ceux que saint Augustin appelait les eversores, les destructeurs nés de l’ordre social. […] Tout voisin de la Révolution, puisqu’il était en 1799, il savait, par des témoignages directs, à quels excès destructeurs le vertige des idées peut entraîner une nation, par ailleurs policée. […] Il était d’une famille de bonne bourgeoisie provinciale. […] en 1815, il a quatre-vingt-deux ans. […] Il aura été, depuis son origine et de par son origine, le défenseur de la mesure en Europe.

2111. (1853) Portraits littéraires. Tome I (3e éd.) pp. 1-363

Mais telle qu’elle est, cette pièce répond dignement à l’intention dont elle est née. […] Puisqu’elle compatit si tendrement aux douleurs qu’elle n’a pas faites, sera-t-elle moins généreuse pour les souffrances qui sont nées d’elle seule ? […] De là naît souvent une obscurité volontaire ; ils prodiguent les allusions, suppriment à plaisir les idées intermédiaires, et mettent le lecteur dans la nécessité de deviner. […] Il est avec la pensée, il la suit partout avec une exemplaire fidélité ; inégal, désordonné comme elle, il ne laisse jamais languir l’attention. […] Plaignons la foule, qui perd son temps et use ses yeux dans de pareilles lectures ; mais ne discutons pas d’après les règles du goût les œuvres qui n’ont rien à faire avec la discussion, qui sont nées sans raison de naître, et pour lesquelles la discussion ne saurait se faire assez petite.

2112. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Les Mémoires de Saint-Simon » pp. 423-461

Comment cette vocation historique si prononcée se forma-t-elle, et se rencontra-t-elle ainsi toute née au sein de la Cour et dans un si jeune âge ? […] C’est de ce père déjà vieux et remarié en secondes noces avec une personne jeune, mais non plus de la première jeunesse, que naquit Saint-Simon en janvier 1675. […] Religieux par principes et chrétien sincère, il se fit des scrupules de conscience, ou du moins il tint à les empêcher de naître et à se mettre en règle contre les remords et les faiblesses qui pourraient un jour lui venir à ses derniers instants. […] Habituellement et toujours, il a dans sa vivacité à concevoir et à peindre, le besoin d’embrasser et d’offrir mille choses à la fois, ce qui fait que chaque membre de sa phrase pousse une branche qui en fait naître une troisième, et de cette quantité de branchages qui s’entrecroisent, il se forme à chaque instant un arbre des plus touffus.

2113. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Conclusion. Le passé et le présent. » pp. 424-475

C’est là le tronc primitif ; de sa substance et de ses propriétés innées naîtra presque toute la végétation future. […] III Ainsi naquit la littérature du dix-huitième siècle, toute conservatrice, utile, morale et bornée. […] Elle est trop fraîche, elle ne peut durer ; rien n’est arrêté, stable et ferme ici, comme dans les pays du Midi ; tout est coulant, en train de naître et de mourir, suspendu entre les pleurs et la joie. […] Quoique Français et dans une religion différente, je les écoutais avec une admiration et une émotion sincères.

2114. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIe entretien. Molière et Shakespeare »

D’ailleurs ce Duncan est d’un caractère si doux, il a rempli sa tâche de roi d’une manière si irréprochable, que ses vertus, comme des anges à la voix de trompette, s’élèveront contre la damnable atrocité du crime de sa destruction ; et la pitié, semblable à un pauvre petit nouveau-né tout nu, fendant les tourbillons, ou portée comme un chérubin au ciel sur les invisibles courriers de l’air, frappera si vivement tous les yeux de l’horreur de cette action que leurs larmes en éteindront le souffle du vent. […] Ni l’occasion ni le lieu ne vous secondaient alors, et cependant vous vouliez les faire naître l’une et l’autre : elles se sont faites d’elles-mêmes ; et vous, par l’à-propos qu’elles vous offrent, vous voilà défait ! […] ou n’es-tu qu’un poignard de ma pensée, le produit mensonger d’une tête fatiguée du battement de mes artères ? […] Nul homme d’une femme ne peut nuire à Macbeth.

2115. (1890) L’avenir de la science « X » pp. 225-238

Non qu’il faille dire absolument que le sauvage est l’homme primitif : l’enfance des diverses races humaines dut être fort différente selon le ciel sous lequel elles naquirent. […] Mais il est un monument sur lequel sont écrites toutes les phases diverses de cette Genèse merveilleuse, qui par ses mille aspects représente chacun des états qu’a tour à tour esquissés l’humanité, monument qui n’est pas d’un seul âge, mais dont chaque partie, lors même qu’on peut lui assigner une date, renferme des matériaux de tous les siècles antérieurs et peut les rendre à l’analyse ; poème admirable qui est et s’est développé avec l’homme, qui l’a accompagné à chaque pas et a reçu l’empreinte de chacune de ses manières de vivre et de sentir. […] Ainsi l’organisation spontanée, qui à l’origine fit apparaître tout ce qui vit, se conserve encore sur une échelle imperceptible aux derniers degrés de l’échelle animale ; ainsi les facultés spontanées de l’esprit humain vivent dans les faits de l’instinct, mais amoindries et presque étouffées par la raison réfléchie ; ainsi l’esprit créateur du langage se retrouve dans celui qui préside à ses révolutions ; car la force qui fait vivre est au fond celle qui fait naître, et développer est en un sens créer. […] La beauté d’une œuvre ne doit jamais être envisagée abstraitement et indépendamment du milieu où elle est née.

2116. (1856) Cours familier de littérature. I « Ier entretien » pp. 5-78

II La contrée où je suis , bien qu’elle soit voisine du cours de la Saône, où se réfléchissent d’un côté les Alpes lointaines, de l’autre des villes opulentes et les plus riants villages de France, est aride et triste ; des collines grises, où la roche nue perce un sol maigre, s’interposent entre nos hameaux et le grand horizon de la Saône, de la Bresse, du Jura et des Alpes, délices des yeux du voyageur qui suit la rive du fleuve. […] C’est là que j’étais et que je grandissais, sans autre idée de cette terre que ce qui en était contenu pour moi dans cet étroit horizon ; j’y vivais renfermé entre deux ou trois monticules, où les chèvres et les moutons montaient le matin avec les enfants, et d’où ils redescendaient le soir au village pour donner leur lait aux mères. […] Le plus grand nombre de mes condisciples était et avait été élevé dans les villes ; il ne connaissait le printemps que par les livres. […] Ce jeune homme, pour une autre profession, avait été dans son adolescence secrétaire de l’évêque de Mâcon, homme d’exquise littérature ; l’abbé Dumont avait été relégué par la Révolution dans le pauvre presbytère de son oncle ; il devait lui succéder.

2117. (1870) La science et la conscience « Chapitre III : L’histoire »

Cette science est née le jour où la psychologie a embrassé l’homme tout entier dans ses observations et ses expériences, où, comprenant enfin que la vie humaine est une résultante fort complexe, elle a cherché les rapports de l’être sentant, pensant, voulant, avec l’organisme, avec la nature extérieure, avec la société dont il fait partie. […] La critique moderne y voit, à côté du génie propre de l’individu, le génie de la race, du peuple, de l’époque où est l’orateur, le poëte, l’artiste, le romancier ; elle montre l’individu se nourrissant de la substance, s’inspirant de l’âme de ce génie, recueillant et méditant ses traditions, ses mœurs, ses idées, ses sentiments, tous les éléments de sa vie passée ou présente, pour les reproduire par une création véritable de son génie personnel. […] C’est une vérité acquise que rien ne naît, ne se forme, ne se développe, ne vit et ne dure à l’état d’isolement et d’abstraction, pas plus dans la vie des peuples que dans celle des individus. […] Le vice et la vertu sont des produits comme le vitriol et le sucre, et toute donnée complexe naît par la rencontre d’autres données plus simples dont elle dépend.

2118. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — III. (Fin.) » pp. 246-261

Il appartient, ainsi que la plupart des grammairiens philosophes de son temps, à cette école qui considérait avant tout une langue en elle-même et d’une manière absolue, comme étant et devant être l’expression logique et raisonnable d’une idée et d’un jugement ; il la dépouillait volontiers de ses autres qualités sensibles ; il ne l’envisageait pas assez comme une végétation lente, une production historique composée, résultant de mille accidents fortuits et du génie persistant d’une race, et qui a eu souvent, à travers les âges, plus d’une récolte et d’une riche saison ; il ne remontait point à la souche antique, et ne se représentait point les divers rameaux nés d’une racine plus ou moins commune. La philologie comparée n’était pas née alors, ou était dans l’enfance.

2119. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — II. (Fin.) » pp. 296-311

A-t-il à parler (13 août 1779) d’un médecin et chirurgien irlandais, David Macbride, il insistera particulièrement sur les qualités que doit réunir un médecin des femmes et particulièrement un accoucheur : Nées, dit-il, pour la peine autant que pour le plaisir, dévouées en quelque sorte à l’éducation et au bonheur des hommes, destinées à leur fournir le premier aliment et à leur prodiguer les premiers soins, exposées à un grand nombre d’infirmités et de maladies dont cette noble fonction est la source, les femmes ont toujours eu l’intérêt le plus vif à s’occuper de leur santé et à choisir un médecin habile. […] Lorry, une description des maux de nerfs et vapeurs : ce sont là des ressources et des secours qui naissent du fonds, et qu’il appartient ensuite au narrateur habile de bien disposer et de mettre en valeur.

2120. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — II. (Suite.) » pp. 463-478

Les premiers paysages qu’il retrace, et qui sont les plus cités dans les cours de littérature, sont ceux de la vallée de Campan et des rives de l’Adour : Je ne peindrai point cette belle vallée qui voit naître (l’Adour), cette vallée si connue, si célébrée, si digne de l’être ; ces maisons si jolies et si propres, chacune entourée de sa prairie, accompagnée de son jardin, ombragée de sa touffe d’arbres ; les méandres de l’Adour, plus vifs qu’impétueux, impatient de ses rives, mais en respectant la verdure ; les molles inflexions du sol, ondé comme des vagues qui se balancent sous un vent doux et léger : la gaieté des troupeaux et la richesse du berger ; ces bourgs opulents formés, comme fortuitement, là où les habitations répandues dans la vallée ont redoublé de proximité… Il finit cette description riante par des présages menaçants qui font contraste, et qui furent trop réalisés l’année suivante (1788) par l’affreux débordement qui dévasta ces beaux lieux. […] Mais en même temps et en attendant que cette épopée encore à naître fut venue, Ramond, vers 1807, savait fort bien déterminer le caractère littéraire d’un siècle qui était le sien et qui a aussi sa force et son originalité : On le dépréciera tant qu’on voudra ce siècle, disait-il, mais il faut le suivre ; et, après tout, il a bien aussi ses titres de gloire : il présentera moins souvent peut-être l’application des bonnes études à des ouvrages de pure imagination, mais on verra plus souvent des travaux importants, enrichis du mérite littéraire… Nos plus savants hommes marchent au rang de nos meilleurs écrivains, et si le caractère de ce siècle tant calomnié est d’avoir consacré plus particulièrement aux sciences d’observation la force et l’agrément que l’expression de la pensée reçoit d’un bon style, on conviendra sans peine qu’une alliance aussi heureuse de l’agréable et de l’utile nous assure une place assez distinguée dans les fastes de la bonne littérature.

2121. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — III » pp. 90-104

Montluc ne se donne pas pour un historien, c’est un écrivain spécial de guerre ; il semble qu’il tienne à justifier ce mot de Henri IV lisant ses Commentaires, que c’est la Bible du soldat : « Je m’écris à moi-même, et veux instruire ceux qui viendront après moi : car n’être que pour soi, c’est à dire en bon français être une bête. » Il commence par établir une bonne police dans la ville ; il la divise en huit parties, dont chacune est sous la surveillance et les ordres d’un des huit magistrats nommés les « huit de la guerre » : dans chacune de ces sections, il fait faire un recensement exact des hommes jusqu’à soixante ans, des femmes jusqu’à cinquante, et des enfants depuis douze, afin qu’on voie quels sont ceux qui peuvent travailler aux choses de siège et à quoi ils sont propres ; dans le travail commun, les moindres ont leurs fonctions ; chaque art et métier, dans chaque quartier, nomme son capitaine, à qui tous ceux du même métier obéissent au premier ordre.

2122. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Les Chants modernes, par M. Maxime du Camp. Paris, Michel Lévy, in-8°, avec cette épigraphe. « Ni regret du passé, ni peur de l’avenir. » » pp. 3-19

Il n’a pas cet éclat, ce charme continu qui naît de la finesse de l’expression ; il dit trop rondement des choses trop ordinaires : Ah ! […] Dans une autre pièce, il débute très heureusement ainsi : Je suis voyageur ; je suis actif et maigre ; J’ai, comme un Bédouin, le pied sec et cambré: Mes cheveux sont crépus ainsi que ceux d’un nègre.

2123. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — I » pp. 146-160

à Pont-de-Vaux en 1769, l’année même de la naissance de Napoléon, Joubert était fils d’un juge-mage du pays. […] Je suis pour les armes et non pour le commandement.

2124. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Les Contes de Perrault »

De même que, dans le sein de la mère, à l’état d’embryon, l’enfant parcourt rapidement, avant de naître, tous les degrés de l’organisation animale, de même, éclos et , il tend à parcourir en abrégé les premiers âges de l’histoire et d’avant l’histoire.

2125. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Campagnes de la Révolution Française. Dans les Pyrénées-Orientales (1793-1795) »

Cet écrivain si distingué, le premier des critiques de guerre proprement dits, qui avait produit son ouvrage de génie à vingt-six ans, et que la nature fit naître par une singulière rencontre dans le temps où elle venait d’enfanter le plus merveilleux des guerriers (comme si elle avait voulu cette fois qu’Aristarque fût le contemporain et le témoin de l’Iliade), Jomini a éclairé, en fait de guerre, tout ce qu’il a traité ; mais il n’en est pas moins vrai que la narration précise, détaillée, de ces trois campagnes pyrénéennes, l’histoire et la description de chacune des opérations qui les composent, écrite d’après les pièces et documents originaux, et vérifiée point par point sur les lieux, restait à faire, et M.  […] » De Flers rendit alors à cette armée, démoralisée en quelque sorte avant de naître, le seul service qu’il pût rendre : il profita des lenteurs du général espagnol pour former un camp retranché sous Perpignan, et pour y exercer, pour y aguerrir peu à peu les bataillons de volontaires.

2126. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Chateaubriand, jugé par un ami intime en 1803, (suite et fin) » pp. 16-34

Je définis le groupe, non pas l’assemblage fortuit et artificiel de gens d’esprit qui se concertent dans un but, mais l’association naturelle et comme spontanée de jeunes esprits et de jeunes talents, non pas précisément semblables et de la même famille, mais de la même volée et du même printemps, éclos sous le même astre, et qui se sentent nés, avec des variétés de goût et de vocation, pour une œuvre commune. […] Chaque ouvrage d’un auteur vu, examiné de la sorte, à son point, après qu’on l’a replacé dans son cadre et entouré de toutes les circonstances qui l’ont vu naître, acquiert tout son sens, — son sens historique, son sens littéraire, — reprend son degré juste d’originalité, de nouveauté ou d’imitation, et l’on ne court pas risque, en le jugeant, d’inventer des beautés à faux et d’admirer à côté, comme cela est inévitable quand on s’en tient à la pure rhétorique.

2127. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Térence. Son théâtre complet traduit par M. le marquis de Belloy »

Bignan, qui, voué de bonne heure au culte d’Homère, s’adonna toute sa vie à une traduction en vers de l’œuvre homérique et ne cessa de l’améliorer, homme instruit, versificateur élégant, n’eut jamais le prix de son travail : il était quinze ans trop tard. […] à Carthage, esclave de je ne sais quel sénateur, Terentius Lucanus, dont il a immortalisé le nom, il vint de bonne heure en Italie et mérita, pour son esprit, d’être élevé d’abord avec soin, puis affranchi par son maître.

2128. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. BRIZEUX (Les Ternaires, livre lyrique.) » pp. 256-275

Je crois le lui avoir dit souvent alors : lui, pour Rome et pour Athènes, voyant les barbares déborder et les meilleurs se corrompre, il se réfugiait dans son Armorique et s’y cantonnait, s’y armait jusqu’aux dents, comme Sertorius en son Espagne. […] On respire comme un parfum antique dans cette poésie ingénieusement simple, qui se dit née aux landes sauvages.

2129. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Préface » pp. 1-22

De tout petits faits bien choisis, importants, significatifs, amplement circonstanciés et minutieusement notés, voilà aujourd’hui la matière de toute science ; chacun d’eux est un spécimen instructif, une tête de ligne, un exemplaire saillant, un type net auquel se ramène toute une file de cas analogues ; notre grande affaire est de savoir quels sont ses éléments, comment ils naissent, en quelles façons et à quelles conditions ils se combinent, et quels sont les effets constants des combinaisons ainsi formées. […] L’un et l’autre sont un courant d’événements homogènes que la conscience appelle des sensations, que les sens appellent des mouvements, et qui, de leur nature, sont toujours en train de périr et de naître.

2130. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre V. La Fontaine »

Biographie : à Château-Thierry, le 8 juillet 1621, fils d’un maître des eaux et forêts, Jean de La Fontaine étudia à l’oratoire de Reims et à Saint-Magloire de Paris ; puis il vécut oisivement dans sa ville natale, parmi ses amis, Pintrel, traducteur de Sénèque, Maucroix, traducteur de Platon. […] Guillaume Amfrye, abbé de Chaulieu (vers 1636-1720), à Fontenay dans le Vexin normand, s’attacha surtout au grand prieur de Vendôme. « Monsieur le duc » et la duchesse du Maine le protégeaient et le recherchaient aussi.

2131. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIX. Cause et loi essentielles des variations du gout littéraire » pp. 484-497

Corneille dit qu’il n’y a que Dieu qui doit être immuable ; toute autre immutabilité est une imperfection. » Chacun connaît enfin le vers de Lamotte-Houdar : L’ennui naquit un jour de l’uniformité. […] D’abord, je veux dire que la tendance qui domine en une époque est toujours remplacée dans l’époque suivante par une tendance exactement contraire ; que le triomphe de l’autorité éveille l’amour de la liberté ; que la victoire du réalisme a pour lendemain un réveil de l’idéalisme ; que le souci exclusif de la vie mondaine fait naître la passion de la solitude et de la vie des champs.

2132. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre II : L’intelligence »

S’il y a deux sensations successives et entre elles une différence de nature, moins encore, un simple hiatus entre deux moments d’une même sensation, moins encore, une différence d’intensité, alors il se produit une conscience plus ou moins claire : la vie psychologique est née. […] Ce mode de reproduction mentale peut s’établir de la façon suivante : « Des actions, sensations, sentiments qui se produisent ensemble ou se succèdent immédiatement, tendent à naître ensemble, à adhérer de telle façon que quand plus tard l’un se présente à l’esprit, les autres sont aussi représentés. » Les états associés peuvent être ou bien de même nature (sons avec sons, mouvements avec mouvements, etc.), ou de nature différente (couleur avec résistance, mouvement avec distance, etc.).

2133. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Madame Récamier. » pp. 121-137

Sachons seulement, puisqu’il le faut, que Jeanne-Françoise-Julie-Adélaïde Bernard était née à Lyon, dans cette patrie de Louise Labé, le 3 décembre 1777. […] Il y a des natures qui naissent pures et qui ont reçu quand même le don d’innocence.

2134. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le cardinal de Retz. (Mémoires, édition Champollion.) » pp. 238-254

Placé entre un prince de cette nature et le Parlement, cette autre machine compliquée et non moins désespérante à mouvoir, primé dans le parti par le prince de Condé, son ennemi alors et dont il ne peut vouloir le triomphe, Retz se consume durant deux années dans les pourparlers, les expédients, les tentatives perpétuelles d’un tiers parti impuissant à naître et toujours avorté. […] Tel est, chez les hommes de l’esprit le plus supérieur, le malheur des vices ; ils éteignent les bonnes inspirations à leur source et les empêchent de naître.

2135. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Pensées de Pascal. Édition nouvelle avec notes et commentaires, par M. E. Havet. » pp. 523-539

en 1623 d’une famille pleine d’intelligence et de vertu, élevé librement par un père qui était lui-même un homme supérieur, il avait reçu des dons admirables, un génie spécial pour les calculs et pour les concepts mathématiques, et une sensibilité morale exquise qui le rendait passionné pour le bien et contre le mal, avide de bonheur, mais d’un bonheur noble et infini. […] Quant aux autres, aux indifférents, à ceux qui sont destitués de foi vive et de grâce, « dire à ceux-là qu’ils n’ont qu’à voir la moindre des choses qui les environnent, et qu’ils verront Dieu à découvert, et leur donner, pour toute preuve de ce grand et important sujet, le cours de la lune ou des planètes, et prétendre avoir achevé sa preuve avec un tel discours, c’est leur donner sujet de croire que les preuves de notre religion sont bien faibles ; et je vois, par raison et par expérience, que rien n’est plus propre à leur en faire naître le mépris ».

2136. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Saint Anselme, par M. de Rémusat. » pp. 362-377

vers 1034 dans la cité d’Aoste en Piémont, aux confins du Valais et de l’Italie, il mourut à Cantorbéry, le 21 avril 1109. Anselme était de parents nobles et riches, d’un père homme du siècle et livré à ses passions, d’une mère bonne et pieuse, de laquelle il tint beaucoup.

2137. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre premier. Considérations préliminaires » pp. 17-40

Nous l’essaierons cependant par la suite, mais avec une respectueuse circonspection ; car cet écrit, qui ne peut renfermer toutes les vérités sur lesquelles repose la société, est destiné du moins à en faire naître le sentiment, sentiment qui a quelque chose de religieux, et qu’on est trop parvenu à éteindre parmi les peuples. […] Ne disons cependant point comme ce preux chevalier qui mérita si bien d’être roi du beau pays de France, ne disons point, Tout est perdu, fors l’honneur  ; n’avons-nous pas sauvé plus que l’honneur, puisque nous avons sauvé, non point celles de nos institutions qui avaient vieilli, et qui étaient destinées à périr, mais celles d’où devaient naître nos institutions futures ; puisque nous avons sauvé ce qui toujours flatta le plus les nations, une existence qui se perd dans la nuit des temps ; une existence qui, pour nous, est antérieure à toutes les sociétés actuelles ; une existence de quatorze siècles ; puisque nous avons sauvé enfin notre magistrature sur l’Europe ?

2138. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIX. Mme Louise Colet »

Née à Marseille, elle avait ce que j’appelle la poésie marseillaise. […] Mais ce que vous trouvez le plus sous ce masque de républicaine qui signa longtemps. « Mme Louise Colet, née Révoil », c’est « la bourgeoise gentilhomme » — la bourgeoise qui meurt d’envie et de rage de n’être pas dans les derniers marquis et qui se garde bien de ne pas nous dire le nom de tous les patriciens assez généreusement bêtes pour l’admettre chez eux, cette ennemie !

2139. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre VI : M. Cousin philosophe »

Ce qui persiste et ce qui tend à persister, ce ne sont pas les individus, c’est l’espèce, c’est-à-dire la forme abstraite ou idéale commune à tous les individus, et les individus ne vivent, ne naissent et ne se remplacent que parce que cette forme tend à subsister. […] Il n’était point inutile de voir deux doctrines contraires naître en lui tour à tour du développement de deux facultés diverses, une faculté plus faible, fortifiée d’abord par les circonstances, prendre l’empire, fléchir lorsque le temps emporte les causes qui la soutenaient, et s’effacer enfin devant la véritable souveraine, qui essaye d’anéantir tout ce que sa rivale a produit.

2140. (1898) XIII Idylles diaboliques pp. 1-243

Et qu’elle vienne ensuite la bonne mort qui me fera naître à la vie éternelle ! […] Admirables fous, fleurs errantes nées pour la joie humaine, allez, et que la route soit douce à vos pas. […] J’en avais cinquante quand vinrent les fils des Achéens : dix-neuf m’étaient nés du même sein ; des esclaves m’avaient donné les autres dans mes palais. […] Et Achille, songeant à son père, sent naître le besoin de pleurer. […] Et l’orient, où le soleil allait naître, semblait une grande rose-thé près de s’épanouir.

2141. (1828) Introduction à l’histoire de la philosophie

Savez-vous combien il y a de temps qu’elle est née ? […] C’est aussi en Grèce qu’elle est née. […] Toute particularité naît, et par conséquent finit. […] L’individu naîtra ; s’il naît, il mourra, quoiqu’en ait dit Condorcet. […] Naît et meurt à propos.

2142. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — Notice sur M. G. Duplessis. » pp. 516-517

à Janville (Eure-et-Loir), le 16 décembre 1792, M. 

2143. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Appendice — Début d’un article sur l’histoire de César »

Nés dans la pourpre ou à côté de la pourpre, ils se sont inspirés avec une crédulité naïve de tous les reflets de leur berceau ; ils ont grandi dans une religion dynastique, dont leur mérite a été de ne se déprendre ni de ne se départir jamais.

2144. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — I. La Thébaïde des grèves, Reflets de Bretagne, par Hyppolyte Morvonnais. »

Mais le poète s’excuse d’avance ; il n’est pas dans un pays de caractère, il n’a pas rêvé, enfant, aux grèves de l’Océan ; il n’a eu pour premier horizon que d’immenses plaines on le regard n’avait pas même de collines où se poser : Et je n’eus pour parfums, dans ces plaines sans sites, Que la senteur des blés et que l’odeur des foins, Que le souffle embaumé des blanches marguerites, Ou les exhalaisons d’autres fleurs plus petites     Aux rebords des chemins.

2145. (1875) Premiers lundis. Tome III « Lafon-Labatut : Poésies »

Raynouard, nous dit le biographe, touché de tant d’infortunes et des grâces naïves du petit Sicilien, lui témoigna le plus vif intérêt, se plaisant à le faire babiller dans son idiome natal, auquel l’accent de sa voix enfantine prêtait encore plus de charme. » Après un temps de repos, les voyageurs partirentpour le Bugue, petite ville du Périgord, où était le père qui bientôt y mourut.

2146. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XII. Du principal défaut qu’on reproche, en France, à la littérature du Nord » pp. 270-275

La surprise doit naître de la grandeur en elle-même, et non de son opposition avec les petitesses, de quelque genre qu’elles soient.

2147. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Augier, Émile (1820-1889) »

À vingt-quatre ans, il faisait acclamer la Ciguë par une jeunesse née, comme lui, de la veille, à la poésie et à l’enthousiasme.

2148. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bataille, Henry (1872-1922) »

Cela a l’air d’être ainsi, tout fait, un soir, sur des lèvres, près du cimetière et de l’église d’un village de Bretagne, parmi l’odeur âcre des ajoncs écrasés, au son des cloches tristes, sous les yeux surpris des filles aux coiffes blanches.

2149. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre X » pp. 83-88

De la conversation de l’hôtel de Rambouillet, de l’émulation de bien penser et de bien dire qu’elle avait excitée, est née l’Académie française.

2150. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XVII » pp. 193-197

Aujourd’hui que nous possédons les œuvres de ces quatre poètes, nous pouvons nous figurer quelle était la force de leur alliance par leur position dans le monde, par la puissance de leurs talents divers, par le besoin de produire dont ils étaient pressés, par l’émulation qui naissait de leur concours, par la combinaison de leurs efforts pour mériter la bienveillance d’un roi galant et la protection des femmes les plus séduisantes et les plus voluptueuses de sa cour.

2151. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 139-145

LINGUET, [Simon-Nicolas-Henri] Avocat au Parlement de Paris, à Reims en 1736.

2152. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « De la peinture. A propos d’une lettre de M. J.-F. Raffaëlli » pp. 230-235

On ajoute : « qui malheureusement verse dans la caricature. » Mais que l’on me dise un peu quel tableau doit naître sous mon pinceau quand le sentiment que j’ai de la scène que je veux rendre est un sentiment d’ironie ou de colère.

2153. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Racan, et Marie de Jars de Gournai. » pp. 165-171

Née Gascone, elle avoit toute l’imagination & tout le feu de son pays.

2154. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre XI. Le Guerrier. — Définition du beau idéal. »

Il y a deux sortes de beau idéal, le beau idéal moral, et le beau idéal physique : l’un et l’autre sont nés de la société.

2155. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre troisième. Histoire. — Chapitre VIII. Bossuet historien. »

Il lui échappe de temps en temps quelques-uns de ces traits qui n’ont point de modèle dans l’éloquence antique, et qui naissent du génie même du christianisme.

2156. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 20, de la difference des moeurs et des inclinations du même peuple en des siecles differens » pp. 313-319

Des maladies inconnuës naissent en certains siecles, et elles cessent pour toujours après s’être renouvellées deux ou trois fois durant un certain nombre d’années.

2157. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Chapitre VII » pp. 278-283

Convenons plutôt que l’auteur de l’Iliade dut précéder de longtemps celui de l’Odyssée ; que le premier, originaire du nord-est de la Grèce, chanta la guerre de Troie qui avait eu lieu dans son pays ; et que l’autre, du côté de l’Orient et du Midi, célèbre Ulysse qui régnait dans ces contrées. — 4.

2158. (1856) À travers la critique. Figaro pp. 4-2

C’est de ce double avortement que naquit le journaliste. […] Matharel de Fiennes est assurément le linguiste le plus original qui soit au feuilleton parisien. […] Madame Deligne-Lauters est-elle donc née pour ce rôle ? […] Les œuvres nées de ce mariage avec deux muses étrangères ne conservent de la sève originale que l’art puissant et inné au-delà des monts de l’agencement des voix. […] Scudo, au pays de M. 

2159. (1910) Propos de théâtre. Cinquième série

« La pièce de Castro est une fleur sauvage née dans le sol et l’atmosphère qui lui conviennent. […] Christian-Frédéric Hebbel est à Wesselburen, dans le Holstein, le 18 mars 1813. […] C’est comme une comédie née d’un sourire. […] Quand tu naquis, c’était déjà un vieil amour que j’avais pour toi… — Hum ! […] Il te faut des femmes encore à naître.

2160. (1949) La vie littéraire. Cinquième série

Pourtant Elsa ne savait point quel était son ami ; son amour, d’un rêve, vivait dans le mystère. […] Alors les deux principales fonctions du roi étaient de naître et de mourir. […] Ce rêve était dans son âme attique. […] Car c’est déjà une chose émouvante et pathétique que d’être et d’avoir vécu. […] Il était journaliste et homme de lettres.

2161. (1864) Le roman contemporain

Sauf quelques livres hors ligne, Gil Blas, par exemple, qui durera autant que notre langue, combien peu ont survécu au temps qui les avait vus naître ! […] Puis les ombrages commencent à naître entre le président de la république et la majorité. […] Telles sont les idées bizarres que font naître ces sortes de maladies. […] Feydeau ait mis du talent dans cet ouvrage, je ne le nie pas ; mais j’ai peu de goût et peu d’estime pour ce genre de talent des inspirations du sensualisme et qui ne s’élève pas au-dessus des régions où il est . […] Ils ont perdu jusqu’à cette originalité folle qui, chez les personnages de Mürger, faisait naître quelquefois un sourire.

2162. (1930) Les livres du Temps. Troisième série pp. 1-288

Ils se sont donné la peine de naître, dira Beaumarchais. […] Henri de Régnier est dans cette aimable petite ville. […] Il l’explique par ce fait, qui me paraît incontestable, que Balzac est un romancier , chez qui le romancier l’emporte sur le penseur. […] Louise Colet, née Révoil, dut ses quelques succès académiques ou autres à sa beauté fleurie beaucoup plus qu’à son faible talent. […] Que de grands écrivains y sont nés !

2163. (1912) Chateaubriand pp. 1-344

Il est en 1768, dix ans avant la mort de Voltaire et de Rousseau. […] La richesse du sol ne fera-t-elle point naître de nouvelles guerres ? […] Je voudrais n’être pas , ou être à jamais oublié. […] Il a cet argument imprévu et vraiment trop ingénieux : « Le législateur des chrétiens naquit d’une vierge et mourut vierge. […] L’amant, le héros, Eudore, est un très brillant jeune homme vers la fin du troisième siècle.

2164. (1836) Portraits littéraires. Tome I pp. 1-388

Fielding naquit en 1707 d’une famille noble. […] Il est sous une étoile maudite. […] Scott naître des chroniqueurs. […] Les épisodes naîtraient d’eux-mêmes. […] Lélia signifie l’incrédulité du cœur, née de l’amour trompé.

2165. (1891) La bataille littéraire. Quatrième série (1887-1888) pp. 1-398

Un second Corneille, un nouveau Molière, un autre Shakespeare vient de naître ! […] La fable prend son intérêt d’intensité dans sa simplicité, et c’est de cette simplicité même que naît l’émotion que l’on conserve encore longtemps après qu’on a fermé le livre. […] Elle est née d’un crime, d’une violence, d’un outrage dont sa mère, la comtesse de Viviane, a été victime. […] Mais, lorsqu’elle apprend comment elle est née, de qui elle est née, qui a ordonné l’outrage, elle veut venger sa mère des souffrances qu’elle a endurées, se venger elle-même d’avoir été si longtemps orpheline. […] C’est au bord d’un fossé qu’il naissait… autrefois.

2166. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DES MÉMOIRES DE MIRABEAU ET DE L’ÉTUDE DE M. VICTOR HUGO a ce sujet. » pp. 273-306

Lucas-Montigny, que ces étincelles de première passion ne furent pas chez Mirabeau sans combat, qu’il chercha même par un attachement peu sérieux et assez subalterne à détourner l’orage qu’il sentait naître, et à faire avorter son périlleux amour. […] Devant la postérité, tout homme et toute chose s’absout par la grandeur. » Suivant ou accompagnant Mirabeau depuis les fonts baptismaux du Bignon où il naquit, jusqu’au Panthéon où il entra le premier, M. […] tous les styles des grands prosateurs nés, ou plutôt de ceux qui deviennent grands prosateurs, sont-ils et doivent-ils être une lave durcie en granit ?

2167. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME ROLAND — I. » pp. 166-193

Elle se porte du premier pas à l’avant-garde, elle le sait et le dit : « En nous faisant naître à l’époque de la liberté naissante, le sort nous a placés comme les enfants perdus de l’armée qui doit combattre pour elle et triompher ; c’est à nous de bien faire notre tâche et de préparer ainsi le bonheur des générations suivantes. » Tant qu’elle demeure dans cette vue philosophique générale de la situation, son attitude magnanime répond au vrai ; le temps n’a fait que consacrer ses paroles. […] dans un pays où Brissot séjourna d’abord, à Boulogne-sur-mer où il travailla avec Swinton, où il se maria, parent des personnes qui l’accueillirent alors et de cette famille Cavilliers qui l’a précisément connu en ces années calomniées, je n’ai jamais ouï un mot de doute sur son intégrité constante et sa pauvreté en tout temps vertueuse. […] Vous ne pouvez vous représenter l’importance que nos aristocrates mettent à ces bêtises nées peut-être dans leur cerveau ; mais ils voudraient montrer l’Assemblée comme conduite par quelques étourdis excités, échauffés par une dizaine de femmes. » Mme de Staël, en revanche, n’a nulle part (que je me le rappelle) nommé Mme Roland.

2168. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre III »

L’horizon de chacun était restreint ; c’était celui de la profession ou du métier qu’on exerçait, de la corporation dans laquelle on était compris, de la ville où l’on était et tout au plus de la province où l’on habitait558. […] Rappelez-vous ce marquis dont on parlait tout à l’heure, ancien capitaine aux gardes françaises, homme de cœur et loyal, avouant aux élections de 1789 que les connaissances essentielles à un député « se rencontreront plus généralement dans le Tiers-état, dont l’esprit est exercé aux affaires ». — Quant à la théorie, le roturier en sait autant que les nobles, et il croit en savoir davantage ; car, ayant lu les mêmes livres et pénétré des mêmes principes, il ne s’arrête pas comme eux à mi-chemin sur la pente des conséquences, mais plonge en avant, tête baissée, jusqu’au fond de la doctrine, persuadé que sa logique est de la clairvoyance et qu’il a d’autant plus de lumières qu’il a moins de préjugés. — Considérez les jeunes gens qui ont vingt ans aux environs de 1780, nés dans une maison laborieuse, accoutumés à l’effort, capables de travailler douze heures par jour, un Barnave, un Carnot, un Roederer, un Merlin de Thionville, un Robespierre, race énergique qui sent sa force, qui juge ses rivaux, qui sait leur faiblesse, qui compare son application et son instruction à leur légèreté et à leur insuffisance, et qui, au moment où gronde en elle l’ambition de la jeunesse, se voit d’avance exclue de toutes les hautes places, reléguée à perpétuité dans les emplois subalternes, primée en toute carrière par des supérieurs en qui elle reconnaît à peine des égaux. […] Le Compère Mathieu, par Dulaurens (1766). « Nous ne devons nos malheurs qu’à la façon dont nous avons été élevés, c’est-à-dire à l’état de société dans lequel nous sommes nés.

2169. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre deuxième. Les images — Chapitre II. Lois de la renaissance et de l’effacement des images » pp. 129-161

Je sais une personne née dans une petite ville de province qui peut raconter avec la dernière exactitude toutes les circonstances d’une visite de l’impératrice Marie-Louise en 1811, dire sa toilette, les toilettes des dames et des jeunes filles chargées de la recevoir, entendre intérieurement le son de sa voix, revoir ses gestes, sa physionomie, les attitudes des personnes chargées de la complimenter, et bien d’autres choses. — Ce qui rend ces résurrections plus remarquables encore, c’est que souvent elles se font sans que jamais dans tout l’intervalle l’image ait reparu. […] Pendant quelque temps, cette circonstance fut inexplicable, jusqu’à ce que, sur enquête, on trouva qu’elle était née dans le pays de Galles, qu’elle avait parlé le langage de ce pays pendant son enfance, mais qu’elle l’avait entièrement oublié dans la suite. » — Des impressions fugitives, qu’on n’a point remarquées, peuvent aussi surgir de nouveau, avec une puissance étrange et une exactitude automatique. […] « Un homme, dit Abercrombie, en France, avait passé la plus grande partie de sa vie en Angleterre, et, depuis plusieurs années, avait perdu entièrement l’habitude de parler français.

2170. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIVe entretien. Mélanges »

Mon extérieur distingué et ma figure agréable, quoique mélancolique, n’y gâtaient rien ; on parlait de moi comme d’un jeune homme bien et bien pensant, venu à Paris avec les jeunes gentilshommes de sa province pour servir le roi, mais que les dons de Dieu, dont il paraissait comblé, ne tarderaient pas, malgré sa modestie, à tirer de l’obscurité et à faire éclater au grand jour. […] à Grenoble, d’une honorable famille qui tenait une petite auberge où l’on vendait de la bière aux jeunes gens du pays, sa mère, femme pieuse et intelligente, lui avait fait donner par les ecclésiastiques de Grenoble une éducation lettrée, dont elle espérait un jour tirer parti pour son avancement dans le monde. […] C’était un jeune ecclésiastique récemment converti, à Saint-Malo, pays de M. de Chateaubriand, et qui était égal à son compatriote, non en sensibilité, mais en éloquence.

2171. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

Ce ne fut qu’après sa mort que l’abbé Antonio de Sangullo révéla confidentiellement à Laurent l’existence d’un enfant , un an auparavant, des amours de Julien avec mademoiselle Irma, personne de la famille des Goxini. […] Le troupeau, bondissant de joie, le précède et l’agneau suit les traces de sa mère, et si quelqu’un d’eux vient de naître à l’instant sur le sentier, le berger l’emporte dans ses bras, pendant que le chien fidèle veille sur tous et leur fait escorte. » De telles images sont d’un vrai poëte. […] Pic était à Mirandola.

2172. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre IV. Chateaubriand »

Vie de Chateaubriand Le 4 septembre 1768, naissait à Saint-Malo, dans la sombre rue des Juifs, le chevalier François-René de Chateaubriand : le mugissement des vagues étouffa ses premiers cris, le bruit de la tempête berça son premier sommeil. Des neufs enfants nés avant lui, un frère et quatre sœurs survivraient, lorsque la vie lui fut infligée. […] Dans les Natchez, œuvre de jeunesse, bien que publiée tardivement, le Nouveau Monde et l’Ancien Monde, l’homme de la nature, le sauvage, et l’homme de la civilisation, l’Européen ; il semble que la première idée de l’œuvre soit née d’une lecture de Rousseau.

2173. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre deuxième »

à Chinon en 1 483, d’un père qui y tenait une hôtellerie après avoir fait ses premières études dans l’abbaye des Bénédictins de Seuillé ou plutôt, comme il le dit, après avoir passé quelques années de sa jeunesse, comme les petits enfants du pays « à boire manger et dormir, à manger, dormir et boire, à dormir, boire et manger », il était venu faire son noviciat au couvent de Fontenay-le-Comte. […] Tant de savoir dans des ordres d’idées si divers, tant de langues mêlées ensemble, tout cet amalgame de l’ancien et du moderne, de la matière et de l’esprit, de l’universel et du particulier, produisit dans cette tête vaste et active une sorte de fermentation d’où naquit cet ouvrage extraordinaire, dans lequel l’érudition est une ivresse, et le génie une débauche d’esprit. […] Pantagruel est l’homme , le riche ; il a des qualités dont il pourrait se passer.

2174. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre cinquième »

Il était à Chartres en 1546, et Bertaut Caen en 1552. […] près de Falaise, venu à Paris vers la fin du règne de Henri IV, précepteur du duc de Vendôme puis du dauphin qui fut Louis XIII, renvoyé de la cour en 1611, mort en 1619. […] Malherbe naquit dans cette ville, vers l’année 1555.

2175. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre IV. L’ironie comme attitude morale » pp. 135-174

§ 9 L’ironie qui naît devant la contradiction n’est point obligée de la trop dédaigner. […] L’ironie même le suscite et le développe, mais elle le suppose, et tout au moins il naît avec elle, se dégageant des luttes et des contradictions de la vie. […] Mais, selon l’universelle loi des institutions sociales et des formations psychologiques, d’une discordance qu’il aggrave d’abord, il tend à y remédier, et par là, il tend indirectement à se supprimer lui-même.

2176. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 août 1885. »

Cette littérature, fondamentalement Wagnérienne, est née, où réellement vit une pleine sensation de l’être, — où, dans les mots, des visions tout plastiques éclatent, ces musiques sonnent, — où, obsédé d’images, obsédé de sonorités, et décrivant littérairement, le poète a senti son idée vue, et en a oui les harmoniques accordances, — où flottent, étrangement, à travers les rayonnements et les enchantements des phrases, les paysages et les mélodies que le Wagner de l’avenir aurait dites en dessins et en orchestrations : une littérature Wagnérienne, cette littérature, absolument suggestive, — moins simple, moins précise, moins large, moins grandiose que l’art de Wagner, — plus hermétique ! […] Ainsi naissait pour cette Œuvre et ce Théâtre, un Public, le Public du Pur et Simple, du Parsifal qui, seul, peut, lorsque les autres la méconnaissent, connaître la Cène ; et, aujourd’hui, après le Maître, l’Association Wagnérienne, par ses propagandes, ses enseignements, son assistance à Bayreuth, s’efforce vers ce même but, la formation du Public Wagnérien. […] Dans la salle vaguement aperçue, tout à coup l’obscurité tombe, et un grand silence ; alors, en la nuit des yeux et des oreilles et de l’esprit, en la nuit vibrante des quinze cents âmes stupéfiées, un son naît, une résonnance voilée, une sonorité atténuée, emmêlée, dispersée, un mystique résonnement, — inlocalisable, — une intimement chaude mélodie, qui monte, qui s’enfle, et qui dans l’air invisible flotte, portant la pré-sensation des futurs tressaillements du Drame. — Ainsi le Drame se lève : — un rideau s’entrouvre, et, dans le fond, — saillant d’un cadre lointain, noir, obscur, vague, et indistinct, — un paysage apparaît, que nous attendions, et les hommes y sont, dont la vie, en nous inconsciemment vécue déjà, se va en nous revivre évidemment ; — tandis que, parmi l’angoisse des vivantes passions, des désespoirs, des joies, et des extases qui se poussent et s’appellent, parmi l’inéluctable empoignement des très réelles émotions, peu à peu nous descend, insensiblement et nécessairement, l’Explication, l’Idée, la Loi, le prodigieux troublement de l’Unité dernière, comprise.

2177. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « I »

Georg Ungerc était à Leipzig, en 1837. […] — Il était Belge et non pas Français, dit votre correspondant, qui en donne pour preuve que Seghers naquit à Bruxelles en janvier 1801. […] Il s’agit de Joseph Joachim (1831-1907), violoniste, chef d’orchestre et compositeur à Kittsee (près de Bratislava).

2178. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 457-512

Voltaire, [Marie-François Arouet de] de l’Académie Françoise, & de presque toutes les Sociétés Littéraires de l’Europe, à Paris en 1694, mort dans la même Ville en 1778. […] S’il se déchaîne contre le Fanatisme religieux, c’est en montrant, & pour faire naître un fanatisme plus dangereux encore, celui de l’irréligion. […]   Entraîné par l'amour de la gloire à tous les genres, &, par une vive sensibilité, à toutes les passions, ces deux mobiles sont devenus le ressort principal de ses talens, & la regle du différent usage qu'il en a fait, Modeste, s'il eût été universellement encensé ; doux, s'il n'eût point été contredit ; religieux, & zélateur du Culte dans lequel il est , pour peu que ce chemin eût pu le conduire à la fortune ou à la célébrite : on l'eût vu le modèle & le défenseur des vrais principes, en tout genre, si l'intérêt de sa vanité eût pu s'accorder avec aucune espece de dépendance.

2179. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1870 » pp. 321-367

De là, mon souvenir est allé à ma première jeunesse, à mes séjours chez cet oncle Alphonse, pour être un oratorien, et que les circonstances avaient fait négociant en Angleterre, et qui, après avoir été à peu près ruiné par un associé, tout à coup parti pour les Grandes Indes, s’était retiré avec un Horace et une giletière, dans une petite propriété du Loiret. […] Il fallait que l’humain fût frappé dans ces choses de grâce et d’élégance, que je croyais intangibles par la maladie, dans ces dons d’homme comme il faut, d’homme bien , d’homme bien élevé ! […] Je suis effleuré, à tout instant, du frôlement de son bras sortant de son lit, pendant que dans sa bouche avortent et se brisent des paroles qu’on ne comprend pas… Par la fenêtre ouverte, par-dessus le noir des grands arbres, entre et s’allonge, sur le parquet, la blanche clarté électrique d’une lune de ballade… Il y a de sinistres silences, où s’entend seul le bruit de la montre à répétition de notre père, avec laquelle, de temps en temps, je tâte le pouls de son dernier … Malgré trois prises de bromure de potassium, avalées dans le quart d’un verre d’eau, il ne peut dormir une minute, et sa tête s’agite sur son oreiller dans un mouvement incessant de droite à gauche, bruissante de toute la sonorité inintelligente d’un cerveau paralysé, et jetant par les deux coins de la bouche, des ébauches de phrases, des tronçons de mots, des syllabes informulées, prononcées d’abord avec violence, et qui finissent par mourir comme des soupirs… Dans le lointain j’entends distinctement un chien qui hurle à la mort… Ah !

2180. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre deuxième. Le génie, comme puissance de sociabilité et création d’un nouveau milieu social »

On ne peut jamais prévoir si un enfant naîtra viable, et de même si le cerveau d’un poète ou d’un romancier produira un type viable, un être d’art capable de subsister par lui-même. […] Sainte-Beuve ensuite, déclarant « qu’il ne peut juger une œuvre indépendamment de l’homme même qui l’a écrite », fit des recherches biographiques sur l’enfance de l’écrivain, son éducation, les groupes littéraires dont il avait fait partie. « Chaque ouvrage d’un auteur, vu, examiné de la sorte, à son point, après qu’on l’a replacé dans son cadre et entouré de toutes les circonstances qui l’ont vu naître, acquiert tout son sens, son sens historique, son sens littéraire. […] Que l’on admette un milieu social guerrier, Sparte par exemple, et qu’il vienne à y naître, par une de ces variations fortuites que la théorie de la sélection est forcée d’admettre, un homme doué de sentiments délicats et pacifiques ; évidemment cet homme essaiera de ne poiut modifier son âme, de ne pas accomplir des actes qui lui répugnent.

2181. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre II : Examen critique des méditations chrétiennes de M. Guizot »

Voyez, dit-on, dans l’ordre physique, le mal naître du mal, la maladie se transmettre de génération en génération. […] Comment l’aurais-je fait, si je n’étais pas  ? […] J’admets une justice surhumaine, c’est-à-dire une justice plus juste que la mienne, et qui pèse dans des balances infiniment délicates ce que je ne puis peser que dans des balances grossières, une justice qui se confond avec la miséricorde, et qui ne fait pas payer aux hommes le péché d’être  ; mais quant à cette justice qui punit les innocents pour les coupables et qui déclare coupable celui qui n’a pas encore agi, c’est la vendetta barbare, ce n’est pas la justice des hommes éclairés.

2182. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Μ. Ε. Renan » pp. 109-147

Renan est caudataire. […] , l’univers et la création comparés à « l’enfant dans l’amnios qui veut en sortir » : Un petit citoyen qui demande de naître ! […] Renan, mais je l’ai vu naître ; je l’ai toujours suivi dans toutes ses élucubrations, depuis sa Vie de Jésus, qui fut son scandalum tinniens, mais avec laquelle, croyant crever une religion, il ne creva qu’un tambour, et le sien !

2183. (1897) Un peintre écrivain : Fromentin pp. 1-37

Un peintre écrivain : Fromentin1 Tout le monde sait qu’Eugène Fromentin est à la Rochelle, le 24 octobre 1820 ; qu’il a commencé, comme une infinité d’autres, par faire son droit ; qu’on l’a même aperçu dans l’étude d’avoué de Me Denormandie ; qu’il a été vaguement poète avant d’être peintre, et peintre en même temps qu’écrivain ; qu’il est mort en 1876, laissant quatre volumes : Un été dans le Sahara, Une année dans le Sahel, Dominique et les Maîtres d’autrefois. […] L’amitié avec la nature peut vivre autant que nous, mais elle n’a qu’une saison pour commencer : celle de la première jeunesse, l’heure matinale, où le cœur, doué d’une puissance de désir et d’émotion qui ne sera jamais plus grande, n’est encore pris à rien et peut se prendre à tout, parce que les tendresses qui l’occuperont ne sont pas encore nées. […] J’ajoute qu’il n’existe que dans une âme déjà formée, et qu’on ne peut écrire un roman véritable avant la trentaine, parce que, sauf exception, l’expérience est courte, et que la philosophie de la peine n’est pas née en nous.

2184. (1882) Essais de critique et d’histoire (4e éd.)

Quant aux huissiers, ils naissaient prédestinés aux coups de mousquet ; c’était pain bénit quand ils ne recevaient que les étrivières. […] D’autres phrases sont si grandes, qu’elles suppriment les objections et ravissent du premier coup ; la critique n’a pas le temps de naître. […] Qu’auriez-vous fait, vous autres faibles et derniers nés du monde ? […] C’était un seigneur d’avant Richelieu, cinquante ans trop tard, sourdement révolté et disgracié de naissance. […] L’histoire est née et a refondu les sciences morales.

2185. (1910) Rousseau contre Molière

Cette passion est une violente haine du vice, née d’un amour ardent pour la vertu, aigrie par le spectacle continuel de la méchanceté des hommes. […] Comment ne comprend-il pas qu’Alceste est un candide, candide et en qui il restera toujours de la candeur ? […] Alceste est un misanthrope qui vient de naître ? […] Notez encore que s’il vous naît un fils, il se peut qu’il soit d’un sang à vous couvrir de gloire par sa bravoure et son mérite. […] Née protestante, et ayant épousé un athée, elle reste protestante très énergiquement et avec ferveur.

2186. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre V. Comment finissent les comédiennes » pp. 216-393

Ils étaient nés pour être des vagabonds, des bohémiens, on n’en put jamais faire des comédiens sérieux. […] Notre amateur est à la fin du siècle passé. […] — Déclamez pour moi votre tirade la plus amoureuse, ma chère fille ; pour moi qui vous ai vue naître et grandir. […] Ils étaient nés, l’un et l’autre, sous le Pilier des Halles ! […] … Allez saluer avec respect ce Pilier des Halles sous lesquels sont nés Molière et Regnard ; lui-même, il est , tout proche de ce Pilier des Halles, Béranger le poète, et non loin de Béranger, à l’enseigne du Chat noir — le véritable chat qui pelote en attendant la partie, est aussi le plus grand poète comique de notre âge, l’auteur de La Camaraderie et des Premières amours !

2187. (1896) La vie et les livres. Troisième série pp. 1-336

Il était d’une mère timorée et d’un père officier. […] Mais il n’était pas pour la versification « truculente et portenteuse ». […] Mais je ne puis énumérer les causes multiples qui ont fait naître, malgré les mânes irrités de M.  […] Paul Hervieu est observateur. […] Comment diable voulez-vous qu’il naisse à présent des aristocrates ?

2188. (1865) La crise philosophique. MM. Taine, Renan, Littré, Vacherot

Taine est embarrassé d’expliquer comment il se fait que M. de Biran, qui avait eu le bonheur de naître sensualiste, ne s’en est pas tout simplement tenu là ; il paraît donc que le sensualisme ne suffit pas à tout le monde. […] Ces faits, ce sont d’abord les conditions extérieures dans lesquelles l’homme est , le milieu, le temps, le climat, l’éducation, etc. ; ce sont ensuite le tempérament, l’organisation, les accidents de la vie, les passions, les mœurs. […] Elle les écarte comme des importunités, et recherche avec une curiosité maladive par quels liens elle touche à la matière, comment les maladies du cerveau sont les maladies de la pensée, ce qu’elle a de commun avec l’animalité, comment dans la nature les degrés supérieurs naissent des inférieurs. […] demain peut-être, il se fera un mouvement en sens contraire ; il naîtra un penseur audacieux qui découvrira l’âme, et rappellera à l’homme étonné et ravi la dignité, la beauté, l’originalité de sa nature et de son rôle dans la création ; il lui apprendra ce qu’il aura oublié, à regarder au-dessus de lui et non au-dessous. […] Sans doute, quel triste ciel que ce ciel qui ne vit qu’en nous, qui naît et qui meurt avec nous, et dont le seul lieu est la pensée !

2189. (1897) Aspects pp. -215

Par eux une fleur naît du fumier des siècles, par eux, une fois de plus, l’amour naît de la mort… J’allais sur la route crépusculaire, dans la bouc, sous la pluie fine et le brouillard. […] C’est la mère douce aux cheveux blancs dont tu es . […] Michel Alexandrovitch Bakounine naît en 1814 d’une famille noble et très riche. […] Qu’ils naissent à Marseille, à Givet, à Nancy ou à Quimper-Corentin, ils ne peuvent s’empêcher d’être Suisses. […] — Pour qu’un cœur de héros dans ma poitrine naisse, Enfant tu me guidais vers les filas fleuris.

2190. (1905) Promenades philosophiques. Première série

Il est pour commander ; il n’en impose que par l’amour, mais il en impose. […] L’agriculture, le jardinage culinaire, la cuisine, la pharmacie presque tout entière sont nées de là. […] Je pense à l’ennui qui naît soit de la privation d’un bien, soit du désir d’un bien. […] Il faut laisser mourir les vieilles religions et redouter qu’il en naisse de nouvelles. […] Le nouveau siècle est sous une autre étoile, qui n’est pas celle de Bethléem.

2191. (1892) Sur Goethe : études critiques de littérature allemande

Mais lui reprocher cette disposition d’esprit, n’est-ce pas au fond lui reprocher d’être poète ? […] Werther sortit de cette disposition générale des esprits, et ne la fit point naître. […] Si cependant quelque idée de devoir ne la pénètre et ne la soutient, comment survivra-t-elle aux agréments qui l’ont fait naître ? […] Les œuvres inutiles pour le salut, les âmes sauvées ou damnées de toute éternité, même avant que de naître, par un décret divin : voilà, comme chacun sait, le principe de cette doctrine. […] Ce n’est pas toutefois une aberration qui ne puisse naître de la doctrine « orthodoxe » de la grâce dans un cerveau de théologien orgueilleux, enivré de son éloquence sonore.

2192. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXXVI » pp. 147-152

On peut dire de lui qu’il est disciple.

2193. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre III. De la comédie grecque » pp. 113-119

C’est qu’ils avaient le bon goût qui appartient à l’imagination, et non celui qui naît de la moralité des sentiments.

2194. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre III. Du meilleur plan. — Du plan idéal et du plan nécessaire. »

C’est en marquant leur place sur ce premier plan qu’un sujet sera circonscrit et que l’on en connaîtra l’étendue ; c’est en se rappelant sans cesse ces premiers linéaments qu’on déterminera les justes intervalles qui séparent les idées principales, et qu’il naîtra des idées accessoires et moyennes qui serviront à les remplir… « C’est faute de plan, c’est pour n’avoir pas assez réfléchi sur son objet qu’un homme d’esprit se trouve embarrassé et ne sait par où commencer à écrire.

2195. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre premier. Du rapport des idées et des mots »

Écrire donc, c’est achever de penser ; la forme, c’est l’organisation de la matière, et la pensée n’est véritablement née que lorsqu’elle est exprimée.

2196. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Giraud, Albert (1848-1910) »

Après cette clameur : « La haine de ce siècle aux enfants qui naîtront », aveu juvénile de son orgueil blessé et désormais misanthrope, le poète a marché vers les Bergames chimériques et clair, de lunées, et s’est reposé en le triomphe accalmi des dernières fêtes.

2197. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Laforgue, Jules (1860-1887) »

Moréas la sympathie qui se doit, nous dirons hautement aussi qu’un poète est de ce dernier quart de siècle ; il en est un dont les vers sont nouveaux après vingt lectures et suscitent toujours de nouvelles joies ; qui eut le cœur simple et l’âme noble, et une finesse plus fine que celle même de M. 

2198. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre VI » pp. 50-55

Ces dames, nées à la fin du siècle précédent, étaient à peu près du même âge que la marquise, c’est-à-dire de 35 à 40 ans, en 1620.

2199. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 512-518

Clément, [Jean-Marie-Bernard] ancien Professeur au Collége de Dijon, sa Patrie, parent du Prédicateur, en 1742.

2200. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 23-32

CONDORCET, [Marie-Jean- Antoine-Nicolas de Caritat, Marquis de] Secrétaire de l’Académie des Sciences, Membre de la Société Royale de Turin, à Ribemont dans la Picardie, en 1743.

2201. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » pp. 489-496

HELVÉTIUS, [Claude-Adrien] ancien Maître d’Hôtel de la Reine, ci-devant Fermier-Général, à Paris en 1715, mort dans la même ville en 1771.

2202. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 331-337

MOLIERE, [Jean-Baptiste Pocquelin de] à Paris en 1620, mort dans la même ville en 1673.

2203. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Lettre a monseigneur le duc de**. » pp. -

Ce n’est pas que vous dédaigniez la lecture des chefs-d’œuvres d’Athènes & de Rome, la meilleure école du goût & du génie ; mais avec un tempérament aussi délicat que votre esprit, & ne voulant pas vous faire de l’étude un travail pénible, vous avez pensé, avec raison, qu’on éprouvoit toujours quelque fatigue en lisant des Livres écrits dans une langue morte, dont les tours variés, les expressions singulieres, les inversions fréquentes mettent l’esprit à la torture.

2204. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Louis-Michel Vanloo » pp. 191-195

On conçoit que l’huile répandue sur les endroits où il y a beaucoup de différentes couleurs mêlées et fondues, occasionne une action des unes sur les autres et une décomposition d’où naissent des taches jaunes, grises, noires, et la perte de l’harmonie générale.

2205. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 1, de la necessité d’être occupé pour fuir l’ennui, et de l’attrait que les mouvemens des passions ont pour les hommes » pp. 6-11

Section 1, de la necessité d’être occupé pour fuir l’ennui, et de l’attrait que les mouvemens des passions ont pour les hommes Les hommes n’ont aucun plaisir naturel qui ne soit le fruit du besoin, et c’est peut-être ce que Platon vouloit donner à concevoir, quand il a dit en son stile allegorique, que l’amour étoit du mariage du besoin avec l’abondance.

2206. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 22, quelques remarques sur la poësie pastorale et sur les bergers des églogues » pp. 171-178

Aussi tranquilles donc sur leur subsistance que le religieux d’une riche abbaïe, ils avoient la liberté d’esprit necessaire pour se livrer aux goûts que la douceur du climat dans les contrées qu’ils habitoient faisoit naître en eux.

2207. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 36, de la rime » pp. 340-346

En premier lieu, je ne disconviens pas de l’agrément de la rime ; mais je tiens cet agrément fort au-dessous de celui qui naît du rithme et de l’harmonie du vers, et qui se fait sentir continuellement durant la prononciation du vers métrique.

2208. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une conspiration sous Abdul-Théo. Vaudeville turc en trois journées, mêlé d’orientales — Deuxième journée. Les conspirateurs » pp. 225-233

Mais ce pinceau n’est pas encore.

2209. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Remarque finale. Le Temps de la Relativité restreinte et l’Espace de la Relativité généralisée »

Mais comme ces dernières lignes naissent d’un allongement de la première, et comme la première était collée contre du Temps, on dira d’elles que ce sont des Temps allongés.

2210. (1891) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Quatrième série

vers 1600, Calderon ne commença d’écrire qu’en 1619 ou 1620 ; et quand ses comédies furent imprimées pour la première fois, il y avait huit ou dix ans qu’Hardy était mort. […] Une société nouvelle était née, qui grandissait tous les jours, non pas précisément encore athée, ni même délibérément incrédule, mais déjà libertine, indifférente, ou toute laïque. […] et sur quoi la négation eût-elle pu s’appuyer à une époque où ni l’exégèse, ni l’histoire des religions, ni la science enfin n’étaient encore nées ? […] En d’autres termes — et c’est ce qui les rend si l’on veut si insupportables à lire, — la « Science » est née avec leur siècle, et rien ne compte pour eux que ce qu’ils ont eux-mêmes vu naître, pas plus Galilée que Descartes, Kepler que Leibniz, et Tycho Brahé que Malebranche. […] Nous sommes nés pour la société, pour en exercer les devoirs, sans en attendre, en les exerçant, d’autre récompense que d’en avoir, chacun pour notre part, entretenu le culte.

2211. (1885) L’Art romantique

De là naît, chez les dandys, cette attitude hautaine de caste provoquante, même dans sa froideur. […] Tel astre est avec telles fonctions, et tel homme aussi. […] L’immense appétit que nous avons pour les biographies naît d’un sentiment profond de l’égalité. […] Pierre Dupont naît le 23 avril 1821, à Lyon, la grande ville du travail et des merveilles industrielles. […] Il est à Nîmes, en 1809.

2212. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre II. Les couples de caractères généraux et les propositions générales » pp. 297-385

Ainsi, toute suite de vibrations d’une certaine vitesse transmise au nerf auditif par le milieu ambiant provoque en nous la sensation de son ; mais cette sensation peut naître en nous spontanément dans les centres sensitifs, sans qu’au préalable un corps extérieur ou un milieu ambiant ait vibré. […] De cette façon, il énonce mentalement ou tout haut ses premières propositions générales et ses premières propositions abstraites. — Peu à peu, à mesure qu’il avance en âge, il apprend de nouveaux mots ; il les applique aux couples anciens de représentations que l’expérience antérieure a déjà établis en lui, et aux couples nouveaux de représentations que l’expérience incessante établit en lui tous les jours ; ainsi naissent de nouveaux couples de mots compris, c’est-à-dire d’idées. — C’est de dix-huit mois à cinq ou six ans que la majeure partie de ce travail s’accomplit ; plus tard, jusqu’à l’âge adulte, il continue, mais avec des acquisitions moindres. […] Partant, s’il est présent, ce conséquent naîtra ; et, si un autre antécédent obtenu de même est présent aussi, son conséquent naîtra pareillement ; en sorte que le conséquent total sera mixte et double. — À présent, si le conséquent total observé coïncide dans toutes ses parties avec le conséquent total prédit, on dira avec certitude que le double antécédent supposé suffit pour le faire naître, et on pourra supposer que, dans le cas en question, ce double antécédent existe en fait. — À la vérité, ce ne sera là qu’une supposition ou hypothèse ; mais elle sera d’autant plus probable que le conséquent total, étant plus complexe et plus multiple, limitera davantage le nombre des hypothèses capables d’en rendre compte ; et elle sera tout à fait certaine lorsqu’on pourra démontrer, ce qui est le cas pour le mouvement des planètes, que nulle autre combinaison de forces ne pourrait le produire, c’est-à-dire que le double antécédent admis est non seulement possible, mais le seul possible et partant réel. […] Par la pensée, et avec la confirmation auxiliaire des faits sensibles, nous faisons correspondre, membre à membre, deux grandeurs artificielles, ou nous faisons coïncider, élément à élément, deux grandeurs naturelles ; si cette correspondance ou cette coïncidence sont absolues, l’idée d’égalité naît en nous. […] Mais leur valeur dépend de leur origine ; il est donc essentiel de savoir d’où elles naissent et comment elles se forment.

2213. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

Ces Espagnols romanisés n’étaient point nés qu’on sache avec un autre cœur, avec une autre âme que le vulgaire. […] C’était bien la poésie naturelle née de l’amour et formée sans étude ; sa beauté le disait assez. […] Jean Moréas est à Athènes, il y a trente-quatre ans à peine. […] au Havre, en 1863, il avait grandi dans sa ville natale. […] Dieu, dans sa bonté, l’avait fait naître avec une âme de rossignol.

2214. (1885) Le romantisme des classiques (4e éd.)

Il n’y a que l’enfant qui vient de naître qui le soit plus que toi, car il ne fait que d’arriver. […] … Je me suis demandé si cela ne pourrait pas venir encore de ce que Corneille, à Rouen, a du sang normand dans les veines. […] Lygdamon Donc vous n’acconnaissez ce que vous faites naître ? […] Lorsqu’il parut, j’avais bien l’envie d’écrire (Molière, en 1622, avait 20 ans lors du Menteur), mais j’étais incertain de ce que j’écrirais ; mes idées étaient confuses : cet ouvrage vint les fixer. […] Jean Rotrou était à Dreux, en 1609, par conséquent, trois ans après Corneille.

2215. (1882) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Deuxième série pp. 1-334

Fléchier naquit à Pernes en 1632. […] Et il est bien vrai qu’on prenait en ce temps-là le mieux , mais nous avons préféré depuis lors le plus mal élevé. […] « Il était heureux. » Et il insiste : avec quelle imprudence et quelle maladresse ! […] Est-ce à dire qu’il soit tout à fait indépendant, mort sans successeur et sans ancêtres ? […] J’ai souffert, je crois, tout ce qu’il plaît au sort de nous faire souffrir, et j’étais d’une sensibilité peu commune.

2216. (1848) Études sur la littérature française au XIXe siècle. Tome III. Sainte-Beuve, Edgar Quinet, Michelet, etc.

Elle fait naître quelques réflexions et appelle quelques observations. […] Je dirai donc, après et d’après l’ancien Larousse, qu’il naquit à La Rochelle en 1800 et mourut jeune en 1835. […] Telle production qu’au fond le christianisme désavoue, René, Werther, Oberman peut-être, sans le christianisme n’eût jamais pu naître. […] — Moi », crie de loin Jérusalem ; et Jérusalem annonce le Dieu Messie, le Dieu d’une femme, et couché dans une crèche. […] C’est au fond de la conscience, du milieu des idées de devoir et d’obéissance, que naît le vrai sérieux ; celui qui vient d’ailleurs est faux.

2217. (1903) La pensée et le mouvant

Ces réflexions faisaient naître dans notre esprit beaucoup de doutes, en même temps que de grandes espérances. […] Ainsi naquit la théorie platonicienne des Idées. […] Ils naissent, en effet, de ce que nous transposons en fabrication ce qui est création. […] La métaphysique est née, en effet, des arguments de Zénon d’Élée relatifs au changement et au mouvement. […] Beaucoup d’autres problèmes sont nés de la même illusion.

2218. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome I

Hugo est en 1802, ce qui le mène aux environs du point de maturité où se trouvaient les deux vieillards qui s’introduisirent près de Suzanne. […] Puis il arrive que les journaux nous rappellent qu’il y a cent ans naissait un écrivain, jadis le favori de la renommée, aujourd’hui disgracié. […] Il les compare et voici naître cette exquise faculté, portée chez France à un point d’excellence et qui s’appelle le goût. […] Je me souviens, comme si c’était hier, de l’après-midi où je commençai de lire ce livre, et de la révélation qui me saisit qu’un beau génie venait de naître. […] Mais c’est comme saint Bonaventure, avec des mains de cardinal. » Il sentait trop bien qu’il était pour un autre sort.

2219. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre IV : Sélection naturelle »

Ces variations venant à se produire, si d’autre part il est vrai qu’il naisse toujours plus d’individus qu’il n’en peut vivre, il ne saurait être douteux que les individus doués de quelque avantage naturel, si léger qu’il soit, n’aient plus de chance que les autres de survivre et de propager leur race. […] Sans même supposer aucun changement dans les nombres proportionnels des animaux dont notre Loup fait sa proie, un louveteau peut naître avec une tendance innée à poursuivre de préférence certaines espèces. […] Deux individus distincts se trouveront croisés par ce fait ; et nous avons de fortes raisons pour croire, ainsi que nous le prouverons pleinement un peu plus loin, que de ce croisement naîtront des jeunes plants particulièrement vigoureux, qui auront en conséquence les plus grandes chances de fleurir et de se perpétuer. […] D’abord, j’ai recueilli un ensemble considérable de faits montrant, d’accord avec l’opinion presque universelle des éleveurs, que parmi les animaux et les plantes un croisement entre des variétés différentes ou entre des individus de la même variété, mais d’une autre lignée, rend la postérité qui en naît plus vigoureuse et plus féconde ; et que d’autre part les reproductions entre proches parents diminuent d’autant cette fécondité et cette vigueur. […] J’ai observé que, si plusieurs variétés de Choux, de Radis, d’Oignons ou de quelques autres plantes, croissent et montent en graine les unes près des autres, le plus grand nombre des jeunes plants qui naissent des graines, ainsi obtenues, sont des métis.

2220. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre II. Vérification de la loi par l’examen de la littérature française » pp. 34-154

Née autour d’un sanctuaire, le long des routes de pèlerinage, l’épopée manifeste l’union intime de l’Église et de la royauté. […] — « Je vois, je crois, je sais, je suis désabusée » ; les traits de ce genre abondent chez Corneille ; ils suppriment toute lutte intime ; le conflit naît de l’intrigue et l’intrigue est romanesque ; de là le grand embarras de Corneille devant les trois unités, trop étroites pour son action compliquée. […] Cette crise, née de raisons intimes, est accélérée par l’introduction d’idées étrangères, venues surtout d’Angleterre et déjà un peu d’Allemagne. […] Trois fois, c’est-à-dire aux origines féodales, à la Renaissance et lors de la Révolution, la France s’est inspirée d’idées nées ailleurs en Europe, mais non encore ramenées à leur principe essentiel et vital ; elle a pris ces idées, se les est assimilées, les a appliquées dans la réalité de la nation, et rendues au monde en une forme universelle. […] De cette angoisse même naîtra quelque part la foi nouvelle, dont elle refera un monde.

2221. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. BALLANCHE. » pp. 1-51

Quand l’idée philosophique vint à naître chez M. […] Pierre-Simon Ballanche est à Lyon en 1776. […] Ballanche, quoique à Lyon, et malgré ses inclinations mystiques et ses dispositions magnétiques, resta étranger, et à l’école mystique qui avait dû laisser quelques traditions depuis Martinez Pasqualis, et à l’école magnétique que l’exaltation des esprits, pendant le siége, enrichissait d’observations extraordinaires. […] Ballanche, tant cette théorie, capitale dans son œuvre, était née en quelque sorte avec lui !

2222. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE LA FAYETTE » pp. 249-287

Si Mme de La Fayette réforma le roman en France, le roman chevaleresque et sentimental, et lui imprima cette nuance particulière qui concilie jusqu’à un certain point l’idéal avec l’observation, on peut dire aussi qu’elle fonda la première un exemple tout à fait illustre de ces attachements durables, décents, légitimes et consacrés dans leur constance101, de tous les jours, de toutes les minutes pendant des années jusqu’à la mort ; qui tenaient aux mœurs de l’ancienne société, qui sont éteints à peu près avec elle, mais qui ne pouvaient naître qu’après cette société établie et perfectionnée, et elle ne le fut que vers ce temps-là. […] Sa mère (née de Péna) était de Provence et comptait quelque troubadour-lauréat parmi ses aïeux. […] La première lui plaisoit par sa bonté et par une certaine ingénuité à conter tout ce qu’elle avoit dans le cœur, qui ressentoit la simplicité des premiers siècles ; l’autre lui avoit été agréable par son bonheur ; car, bien qu’on lui trouvât du mérite, c’étoit une sorte de mérite si sérieux en apparence, qu’il ne sembloit pas qu’il dût plaire à une princesse aussi jeune que Madame. » A l’âge d’environ trente ans, Mme de La Fayette se trouvait donc au centre de cette politesse et de cette galanterie des plus florissantes années de Louis XIV ; elle était de toutes les parties de Madame à Fontainebleau ou à Saint-Cloud ; spectatrice plutôt qu’agissante ; n’ayant aucune part, comme elle nous dit, à sa confidence sur de certaines affaires, mais, quand elles étaient passées et un peu ébruitées, les entendant de sa bouche, les écrivant pour lui complaire : « Vous écrivez bien, lui disait Madame ; écrivez, je vous fournirai de bons mémoires. » — « C’était un ouvrage assez difficile, avoue Mme de La Fayette, que de tourner la vérité en de certains endroits d’une manière qui la fit connaître et qui ne fût pas néanmoins offensante ni désagréable à la princesse. » Un de ces endroits, entre autres, qui aiguisaient toute la délicatesse de Mme de La Fayette et qui excitaient le badinage de Madame pour la peine que l’aimable écrivain s’y donnait, devait être, j’imagine, celui-ci : « Elle (Madame) se lia avec la comtesse de Soissons… et ne pensa plus qu’à plaire au roi comme belle-sœur ; je crois qu’elle lui plut d’une autre manière, je crois aussi qu’elle pensa qu’il ne lui plaisoit que comme un beau-frère, quoiqu’il lui plût peut-être davantage ; mais enfin, comme ils étoient tous deux infiniment aimables, et tous deux nés avec des dispositions galantes, qu’ils se voyoient tous les jours au milieu des plaisirs et des divertissements, il parut aux yeux de tout le monde qu’ils avoient l’un pour l’autre cet agrément qui précède d’ordinaire les grandes passions. » Madame mourut dans les bras de Mme de La Fayette, qui ne la quitta pas à ses derniers moments. […] Il est touchant de penser dans quelle situation particulière naquirent ces êtres si charmants, si purs, ces personnages nobles et sans tache, ces sentiments si frais, si accomplis, si tendres ; comme Mme de La Fayette mit là tout ce que son âme aimante et poétique tenait en réserve de premiers rêves toujours chéris, et comme M. de La Rochefoucauld se plut sans doute à retrouver dans M. de Nemours cette fleur brillante de chevalerie dont il avait trop mésusé, et, en quelque sorte, un miroir embelli où recommençait sa jeunesse117.

2223. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « M. Ampère »

André-Marie Ampère naquit à Lyon le 20 janvier 1775. […] C’est sous le coup menaçant de cette douleur, et à l’extrémité de toute espérance, que dut être écrite la prière suivante, où l’un des versets précédents se retrouve : Mon Dieu, je vous remercie de m’avoir créé, racheté, et éclairé de votre divine lumière en me faisant naître dans le sein de l’Église catholique. […] Un document précis, qui nous est fourni depuis, le fait naître à ce village de Polémieux ; M. Ampère s’était dit toujours à Lyon.

2224. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIIe entretien. L’Imitation de Jésus-Christ » pp. 97-176

Voici l’histoire de Gerson : Jean-Charles de Gerson, au commencement du quinzième siècle, était à Gerson, dont il porte le nom. […] Rien n’est plus doux que l’amour, rien n’est plus fort, plus élevé, plus étendu, plus délicieux ; il n’est rien de plus parfait ni de meilleur au ciel et sur la terre, parce que l’amour est de Dieu et qu’il ne peut se reposer qu’en Dieu au-dessus de toutes les créatures. […] Naître et ne pas mourir est l’utopie contradictoire.

2225. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Charles Dickens »

L’œuvre de Dickens n’étant pas, par excellence, une œuvre de réalisme descriptif, mais bien une déformation émue du spectacle social, formule un jugement sur ce qui est aimable ou détestable dans le monde, aboutit à fonder une sorte de morale pratique qu’il sera intéressant de connaître, qui n’est ni la morale de ce temps, ni celle du pays où Dickens est , et qui donnera des lumières complètes sur ses inclinations et son idéal. […] Ces caricatures sont parfois poussées au monstrueux, et c’est alors l’aversion épouvantée, l’horreur et la terreur que font naître les types et les scènes que Dickens s’applique ainsi à pousser au noir. […] dans une famille de pauvres employés du commissariat de la marine, son père étant le brave homme dépensier, cérémonieux et faible que nous montre M.  […] Il se tut constamment sur cet épisode de sa vie, et la honte qu’il en conserva lui dicta peut-être, à l’égard des gens bien nés, cette sorte de réserve pointilleuse qu’ont les hommes craintifs de quelque avanie, un ressentiment morbide que la suite de ses succès ultérieurs ne parvint pas à dissiper.

2226. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre premier. Le Moyen Âge (842-1498) » pp. 1-39

En même temps, dans la classe aristocratique, plus instruite, quoiqu’elle ne le soit guère, l’individu, sous la double influence des Romans de la Table-Ronde et de l’exemple des troubadours provençaux, commence à prendre conscience de lui-même ; et le lyrisme naît. […] Littérature d’édification, ou d’enseignement même, si les Miracles et les Mystères sont nés à l’ombre du sanctuaire, c’est qu’ils n’ont d’abord été qu’un prolongement du culte, à vrai dire ; et de cette origine, il en subsistera quelque chose jusque dans les représentations des Confrères de la Passion. […] Sans doute, il y a Villon, François Villon, «  de Paris emprès Pontoise », vrai gibier de potence, mais vrai poète aussi, grand poète même, oserait-on dire ; et quelques-unes de ses Ballades ne sont assurément pas pour démentir ce que ce nom de poète, quand il est mérité, signifie de grâce et de force de style, de sincérité d’émotion, d’originalité de sentiment et d’idées. […] L’Épopée héroïque. — Diverses formes de l’épopée ; — le Mahabahrata ; l’Épopée homérique ; l’Épopée virgilienne ; les Niebelungen ; l’Épopée dantesque, l’Épopée française ; la Jérusalem délivrée. — Que le propre de l’épopée semble être à son origine : — 1º d’avoir un fondement historique ou cru tel ; — 2º de poétiser un conflit non seulement de « nationalités », mais de « races » ; — 3º et d’incarner le triomphe de l’une de ces races sur l’autre dans un héros « éponyme ». — Qu’il ne saurait être qu’à peine question, ces caractères une fois admis, d’une épopée mérovingienne ; — et qu’il devient presque indifférent de savoir ce que c’étaient que ces « cantilènes » ou vulgaria carmina qui auraient précédé l’épopée nationale. — Il n’y a pas lieu non plus d’examiner si l’épopée française est « romane » ou « germanique » dans son origine ; — et encore bien moins de faire de la question une question de patriotisme. — Le moment précis de la naissance de l’épopée française est celui de la rencontre ou du heurt de l’Orient et de l’Occident, de l’islamisme et du christianisme, de l’Arabe et du Franc ; — elle s’est incarnée d’abord dans la personne de Charles-Martel, que l’on a confondu plus tard avec son petit-fils Charlemagne ; — et ainsi on peut même dire « où » nos Chansons de geste sont nées : c’est sur le champ de bataille de Poitiers.

2227. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « III. M. Michelet » pp. 47-96

il était pour mieux que cela !) […] Michelet, comme la plupart des hommes nés dans le pêle-mêle social qui suit toujours les révolutions, et placé bien plus près de ce qui est en bas que de ce qui est en haut par les hasards de sa destinée, a dû se pencher avec les avides aspirations du désir et de l’orgueil souffrant vers la popularité, ce souffle qui nous vient de la terre, mais qui nous enlève. […] « Robespierre, dit-il, ailleurs, avait du prêtre dans sa nature… dans une ville de prêtres, élevé par les prêtres, qui même dès qu’il fut homme le prirent encore à eux et le firent juge d’église… dépassé par la Commune dans la question religieuse (la Commune, c’étaient Chaumette et la fête de la Raison), il devint l’homme d’Arras et de ses tristes précédents. […] Michelet, — avait la mélancolie d’un jeune cœur auquel quelque chose a manqué. — L’enfant, le seul enfant qu’elle eut, naquit neuf mois après la prise de la Bastille, — ce fut elle qui donna à Condorcet le sublime conseil de… terminer l’Esquisse des progrès de l’esprit humain. » Tels sont les seuls et singuliers mérites de Sophie Condorcet que M. 

2228. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome II pp. 5-461

Aussi les recherches qu’on a faites sur l’origine de l’art théâtral, nous ont-elles appris que la comédie est née antérieurement à la tragédie, parce que les hommes sont plus prompts à se moquer qu’à s’attendrir, et sont en général moins bons que méchants. […] Il osa railler le danger des partialités et des jalousies que ces luttes font naître : soudain la cour de Pluton, transformée en tribunal d’esprit, offrit le spectacle d’une joute ridicule entre Eschyle et Euripide. […] Le premier naquit des circonstances particulières à la démocratie d’Athènes ; le second, d’une imitation générale des mœurs humaines sous tous les gouvernements. […] De cette révolution naquirent les fables que les poètes latins traduisirent d’Épicharme et de ses imitateurs. […] Le fait aura la même proportion dans l’une et l’autre, et marchera dans chacune d’elles par des circonstances qui naîtront successivement les unes des autres, et non les unes après les autres.

2229. (1882) Hommes et dieux. Études d’histoire et de littérature

Contemporaine du Parthénon, la grande Vénus est née, comme ses héros et ses dieux, d’une conception idéale. […] Proserpine naît de leurs amours. […] Il est exaspéré de naissance, il est l’écume à la bouche. […] Il naquit frappé des marques du rachitisme. […] C’est Némésis « tout entière à sa proie attachée. » Les femmes corses naissent vengeresses comme les Spartiates naissaient héroïnes.

2230. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Geoffroy de Villehardouin. — I. » pp. 381-397

— Geoffroy de Villehardouin naquit en Champagne ; sans doute dans le château de son nom, à sept lieues de Troyes, entre Arcis et Bar-sur-Aube, d’une famille ancienne et distinguée à la cour des seigneurs et comtes du pays. On conjecture qu’il naquit de 1150 à 1160, et qu’il mourut vers 1213, à l’âge d’à peu près soixante ans, et peut-être moins.

2231. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — I. » pp. 19-35

Et par exemple, nous connaissons la comtesse de Grammont : elle était née Hamilton, et sœur du piquant et moqueur écrivain ; elle était femme du chevalier, depuis comte de Grammont, si connu par les Mémoires que rédigea pour lui son beau-frère. […] Les petits soucis voltigeants sont de ces images insensibles comme il en naît sous la plume de Fénelon ; mais ce qui suit, ces relais, ces lutins, me semblent de trop et sentent la gentillesse.

2232. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Bossuet. Lettres sur Bossuet à un homme d’État, par M. Poujoulat, 1854. — Portrait de Bossuet, par M. de Lamartine, dans Le Civilisateur, 1854. — I. » pp. 180-197

Bossuet, à Dijon le 27 septembre 1627, d’une bonne et ancienne famille bourgeoise de magistrats et de parlementaires, y fut élevé au milieu des livres et dans la bibliothèque domestique. […] Après avoir apostrophé en face l’hérétique Marcion (avec les paroles de Tertulliend) : « Tu ne t’éloignes pas tant de la vérité, Marcion… », entrant alors dans son sujet, il établit que cette miséricorde et cette justice subsistent l’une et l’autre, mais ne se doivent point séparer ; il va s’attacher à représenter dans un même discours le Sauveur miséricordieux et le Sauveur inexorable, le cœur attendri, puis le cœur irrité de Jésus : « Écoutez premièrement la voix douce et bénigne de cet Agneau sans tache, et après vous écouterez les terribles rugissements de ce Lion victorieux de la tribu de Juda : c’est le sujet de cet entretien. » Dès cet exorde on sent un feu singulier, une imagination ingénieuse et exubérante, une érudition un peu subtile qui se prend dès l’abord à une hérésie bizarre ; selon le mot de Chateaubriand, on voit « l’écume au mors du jeune coursier ».

2233. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres inédites de P. de Ronsard, recueillies et publiées par M. Prosper Blanchemain, 1 vol. petit in-8°, Paris, Auguste Aubry, 1856. Étude sur Ronsard, considéré comme imitateur d’Homère et de Pindare, par M. Eugène Gandar, ancien membre de l’École française d’Athènes, 1 vol. in-8°, Metz, 1854. — II » pp. 76-92

Ronsard sans doute était poète, autant ou plus que pas un des modernes, je ne dis pas seulement Français, mais encore Espagnols et Italiens. […] Dans le détail je le trouve plus approchant de Virgile, ou, pour mieux dire, d’Homère, que pas un des poètes que nous connaissons ; et je ne doute point que, s’il fût dans un temps où la langue eût été plus achevée et plus réglée, il n’eût pour ce détail emporté l’avantage sur tous ceux qui font ou feront jamais des vers en notre langue.

2234. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — III » pp. 476-491

Le mieux donc, même en causant, est de ne pas désespérer à ce point des talents nés incomplets, de ne pas rayer d’un trait les esprits, eussent-ils leur coin d’infirmité (et chacun a le sien, elle en convient toute la première), de ne pas méconnaître le parti qu’ils peuvent tirer d’eux-mêmes et qu’en peut tirer la société. […] La vicomtesse de Noailles, en écrivant la Vie de la princesse de Poix, née Beauvau, sa grand-mère72, a fait comme le testament de ce vieux et délicieux monde qui s’est prolongé assez tard pour quelques natures d’élite abritées depuis leur naissance dans des cercles privilégiés.

2235. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Œuvres de Maurice de Guérin, publiées par M. Trébutien — I » pp. 1-17

le 5 août 1810, il appartenait à cette seconde génération du siècle, lequel n’avait plus deux ou trois ans, mais bien dix ou onze lorsqu’il produisait cette volée nouvelle des Musset, des Montalembert, des Guérin ; je joins exprès ces noms. sous le beau ciel du Midi, d’une ancienne famille noble et pauvre, Maurice de Guérin, rêveur dès l’enfance, fut tourné de bonne heure vers les idées religieuses et inclina, sans effort, à la pensée de l’état ecclésiastique.

2236. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire de mon temps. Par M. Guizot. »

On y sent se dessiner les formes d’esprit de l’auteur lui-même, confiance, espérance, certitude ; on y saisit ses origines intellectuelles et morales, son tour et son degré de libéralisme, ses limites distinctes et précises : « Je suis de ceux, dit-il, que l’élan de 1789 a élevés et qui ne consentiront point à descendre… bourgeois et protestant, je suis profondément dévoué à la liberté de conscience, à l’égalité devant la loi, à toutes les grandes conquêtes de notre ordre social. […] Guizot croit avec raison à l’importance des hommes en histoire ; il n’accorde pas tout à la force des choses et à la pente des situations ; un puissant individu de plus ou de moins suffit pour donner aux mêmes éléments une ordonnance et un aspect tout contraires, pour les retourner, pour imprimer aux événements, surtout s’ils ne font que de naître, un tout autre cours.

2237. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Le Poème des champs, par M. Calemard de Lafayette (suite et fin) »

Il regrette de ne pas être mort avant, ou il souhaiterait d’être après : la misérable race qui vit présentement est déjà jugée par Jupiter. Il règne dans ce poème un profond sentiment de la misère de l’homme qui, « à peine , a déjà les tempes qui blanchissent ».

2238. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Les Saints Évangiles, traduction par Le Maistre de Saci. Paris, Imprimerie Impériale, 1862 »

La vue de ce beau livre m’a tenté, et je me suis mis à relire, — oui, à relire d’un bout à l’autre, non pas les quatre Évangiles, je mentirais, mais le premier des Évangiles, celui qui est dit selon saint Matthieu ; et les idées qu’a fait naître en moi cette lecture sont telles, que je crois pouvoir les communiquer à mes lecteurs sans inconvénient ni scandale pour aucun. […] Il est évident qu’ils n’ont pu ajouter un rayon, de leur chef, à cette beauté toute morale ; toute née du dedans.

2239. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Poésies, par Charles Monselet »

Il appert de l’un et de l’autre que l’auteur, personnage d’une quarantaine d’années, portant lunettes, bonne mine, mâle encolure, tête posée avec aplomb, menton ras et double, lèvre fine, ferme, prompte à la malice, est à Nantes, que son père y était libraire ; j’ajouterai, — car je ne suis pas homme à me contenter à demi en matière de biographie, — qu’il fut élevé à Bordeaux, qu’il y fit des études classiques succinctes et fut mis de bonne heure à la pratique, je veux dire au journal, au Courrier de la Gironde. […] A force de renfoncer ses pleurs, on les désaccoutume de naître.

2240. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite et fin.) »

Ô fleur qui n’es pas fugitive, Qui nais tard et vis longuement, Quand des beaux jours la fleur hâtive A l’existence d’un moment, Tu nous dis que l’œuvre légère De la jeunesse est passagère, Et que, dans son travail parfait, L’œuvre lente de notre automne Vit. — Loin que le temps s’en étonne, Il respecte ce qu’il a fait. […] Évariste-Felix-Cyprien Boulay-Paty, fils de Pierre-Sébastien Boulay-Paty, jurisconsulte, était le 19 octobre 1804, à Donges (Loire-Inférieure), où son père avait une propriété.

2241. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les cinq derniers mois de la vie de Racine. (suite et fin.) »

Il avait été reçu par M. de La Chapelle, directeur, qui ne parla pas mal non plus et qui dit même des choses assez neuves et très à propos à cette date de 1699, fin d’un siècle, sur les heures de perfection et de décadence littéraire pour les nations : il développa une pensée de l’historien Velleius Paterculus, et parla de cette sorte de fatalité qui fixe dans tous les arts, chez tous les peuples du monde, un point d’excellence qui ne s’avance ni ne s’étend jamais : « Ce même ordre immuable, disait-il, détermine un nombre certain d’hommes illustres, qui naissent, fleurissent, se trouvent ensemble dans un court espace de temps, où ils sont séparés du reste des hommes communs que les autres temps produisent, et comme enfermés dans un cercle, hors duquel il n’y a rien qui ne tienne ou de l’imperfection de ce qui commence ou de la corruption de ce qui vieillit. » C’était bien pensé et bien dit. […] Depuis que la critique est née et a grandi, qu’elle envahit tout, qu’elle renchérit sur tout, elle n’aime guère les œuvres de poésie entourées d’une parfaite lumière et définitives ; elle n’en a que faire.

2242. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [I] »

Les premières guerres de la Révolution, nées d’un sublime élan, enfantées des entrailles du sol pour le défendre, pour repousser l’agression des rois, nous reportèrent un moment aux beaux jours de l’héroïsme antique ; elles dégénérèrent vite, même en se perfectionnant, mais aussi en s’agrandissant outre mesure au gré du génie et de l’ambition du plus prodigieux comme du plus immodéré capitaine des temps modernes. […] Jomini naquit à Payerne le 6 mars 1779.

2243. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Millevoye »

Charles-Hubert Millevoye est à Abbeville le 24 décembre 1782, et par conséquent, s’il vivait aujourd’hui, il aurait à peu près le même âge (un peu moins) que Béranger. […] Il nous est impossible à nous autres, nés d’autre part et nourris, si l’on veut, d’autres défauts, d’avoir pour ces endroits, je ne dirai pas un pareil enthousiasme, mais même la moindre préférence.

2244. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « La comtesse Diane »

L’amitié naît des confidences… — voilà qui n’est pas difficile à trouver. Cherchez l’antithèse, et vous obtiendrez cette maxime, qui vous a un air fin et qui en vaut une autre : L’amitié naît des confidences, et elle en meurt.

2245. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. James Mill — Chapitre I : Sensations et idées. »

« Nos idées naissent ou existent dans l’ordre où ont existé les sensations dont elles sont les copies. » Telle est la loi générale de l’association des idées. Quand les sensations se sont produites simultanément, les idées s’éveillent aussi simultanément ; quand les sensations ont été successives, les idées naissent successivement26.

2246. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Qu’est-ce qu’un classique ? » pp. 38-55

Cependant les littératures modernes étaient nées, et quelques-unes des plus précoces, comme l’italienne, avaient leur manière d’antiquité déjà. […] En fait de classiques, les plus imprévus sont encore les meilleurs et les plus grands : demandez-le plutôt à ces mâles génies vraiment nés immortels et perpétuellement florissants.

2247. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Marie Stuart, par M. Mignet. (2 vol. in-8º. — Paulin, 1851.) » pp. 409-426

Marie Stuart, née le 8 décembre 1542, six jours avant la mort de son père, lequel était en lutte, comme tous les rois ses devanciers, avec sa turbulente noblesse, commença en orpheline sa destinée d’inconstance et de malheurs. […] Seule et sans conseil, aux prises avec les seigneurs et avec la noblesse comme avaient été ses aïeux, Marie Stuart, prompte, mobile, sujette à ses prédilections ou à ses antipathies, était déjà insuffisante : qu’était-ce donc lorsqu’elle se trouvait de plus en face d’un parti religieux, et grandi durant les années récentes, en face d’un parti « raisonneur et sombre, moral et audacieux », discutant rationnellement et la Bible en main le droit des rois, et poussant la logique sous la prière ?

2248. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — III. (Suite et fin.) » pp. 47-63

Souvent aussi, il avait des pensées originales et nées de lui seul. […] Il participe aux impressions successives qui naissent du paysage et des souvenirs ; lui qui, en Hongrie, avait débuté presque par de la statistique et des chiffres, il devient légèrement mythologique aux environs de Smyrne, homérique à Troie, chrétien en traversant le Liban.

2249. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Les regrets. » pp. 397-413

Cette irritation, qui, je le répète, n’était pas née après la chute même et dans l’intervalle anarchique qui a duré près de quatre ans ; cette irritation, qui était alors paralysée et par la peur très permise et par des retours d’espérance, s’est développée au plus haut degré depuis l’établissement d’un régime qui annule ces espérances en même temps qu’il rassure contre les craintes extrêmes. […] La plus belle disgrâce ministérielle que l’on puisse citer est celle du duc de Choiseul à Chanteloup ; elle fut triomphante d’abord comme une faveur ; l’idée de popularité commençait à naître.

2250. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Ducis. » pp. 456-473

à Versailles le 23 août 1733, d’une mère française et d’un père savoisien, il avait beaucoup de ce dernier. […] Dans son Œdipe chez Admète, où il confond deux actions distinctes, deux tragédies, celle d’Alceste voulant mourir pour son époux, et celle d’Œdipe expirant entre les bras d’Antigone, Ducis a plus que des mots ; il a, au troisième acte et au cinquième, des tirades pathétiques, une touche large, comme lorsque Œdipe, s’adressant aux dieux, les remercie, jusque dans son abîme de calamités, de lui avoir laissé un cœur pur : C’est un de vos bienfaits que, pour la douleur, Je n’aie au moins jamais profané mon malheur… On s’explique aussi très bien le succès de son Othello, représenté pour la première fois en 1792, et parlant comme un soldat parvenu qui sert avec désintéressement la République et n’a rien à envier aux grands : Ils n’ont pas, tous ces grands, manqué d’intelligence, En consacrant entre eux les droits de la naissance : Comme ils sont tout par elle, elle est tout à leurs yeux.

2251. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — II. (Suite.) » pp. 149-166

Il avait foi à la science expérimentale et à ses découvertes croissantes ; il regrettait souvent, vers la fin de sa vie, de n’être pas un siècle plus tard, afin de jouir de tout ce qu’on aurait découvert alors : Le progrès rapide que la vraie science fait de nos jours, écrivait-il à Priestley (8 février 1780), me donne quelquefois le regret d’être sitôt.

2252. (1903) Zola pp. 3-31

Mais il faut qu’on sente chez le satirique un désir vrai, sincère et vif de corriger ses concitoyens en leur peignant leurs défauts ou leurs vices ; et il faut bien avouer que dans les livres de Zola on ne le sentait nullement, mais seulement une haine cordiale et un mépris de parti pris pour ceux dont il avait le malheur d’être le compatriote, ou à peu près le compatriote ; et cela ne laisse pas d’être un peu désobligeant et un peu coupable. […] Il dit, avec une colère qui est peu dans ses habitudes, particulièrement significative, par conséquent : « Son œuvre est mauvaise et il est un de ces malheureux dont on peut dire qu’il vaudrait mieux qu’ils ne fussent jamais nés.

2253. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Observations générales, sur, l’art dramatique. » pp. 39-63

Il faut donc que ce que le poète a inventé arbitrairement pour amener ces beautés, devienne pour les spectateurs le fondement nécessaire dont elles naissent. […] L’empressement de Palmire à justifier Séide devant Mahomet, qui abhorre en lui son rival, est aussi une beauté qui naît de ce léger défaut.

2254. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Préface de la seconde édition »

De plus, elle n’est pas née de rien ; elle est elle-même un effet de causes externes qu’il faut connaître pour pouvoir apprécier son rôle dans l’avenir. […] Cette science, en effet, ne pouvait naître que le jour où l’on eut pressenti que les phénomènes sociaux, pour n’être pas matériels, ne laissent pas d’être des choses réelles qui comportent l’étude.

2255. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Hippolyte Babou »

Babou est entre Toulouse et les Pyrénées, dans ce pays où la domination romaine a laissé des traces aussi profondément enfoncées que les casques, les épées et les grands ossements — grandia ossa — qu’on y retrouve dans le sol, et ce sont ces vestiges d’une influence païenne, qui ont résisté à quatorze siècles de christianisme, que l’auteur des Païens innocents a voulu peindre. […] Par sa taille élevée, par son embonpoint majestueux, qui rappelait le contour d’un beau vase antique, par ses blanches mains de velours, par sa haute mine impertinente que j’ai retrouvée plus tard dans un portrait du cardinal de Rohan, par l’ensemble de sa physionomie et la dignité de sa personne, dom Bazin était prélat… » C’est à ce païen innocent, « qui faisait le signe de la croix en scandant le vers : O fons Bandusiæ splendidior vitro ! 

2256. (1900) Molière pp. -283

Armande Béjart, qu’il a épousée, est née sous ses yeux, il l’a vue grandir, elle a été formée par lui ; c’est précisément ainsi qu’Arnolphe forme, pétrit, élève Agnès pour en faire sa femme. […] Il ne s’agit pas non plus d’une de ces querelles nées de l’esprit processif comme Dufresny a essayé de le peindre dans une pièce d’ailleurs assez froide, La Réconciliation normande. […] La comédie répond si bien à notre humeur ; elle naît si naturellement de nos habitudes d’esprit et du jeu spontané de nos facultés, qu’elle est chez nous de toutes les époques. […] Est-ce trop s’avancer de supposer que l’auteur de Gil Blas aurait pu être lui-même Molière, si la première disgrâce de sa vie n’eût été de naître trop tard. […] L’industrieux Figaro, dans son ressentiment contre ceux qui ne s’étaient donné que la peine de naître, a tout détruit ; je regrette, messieurs, qu’il n’ait pas au moins sauvé du naufrage la grâce et les grandes manières d’Almaviva.

2257. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XVI » pp. 64-69

Nous (la Revue suisse) n’avons pas à le juger politiquement ; mais, à entendre dans cette bouche éloquente ce torrent de magnifiques paroles en sens tout contraire au courant d’hier, nous nous sommes rappelé involontairement ces vers d’Homère (Hiade, XX, c’est Énée qui parle) : « La langue des hommes est flexible, et elle a toutes sortes de discours — de toutes les couleurs, — et le pâturage des paroles s’étend çà et là. » Le noble Pégase a déjà parcouru en bien des sens le pâturage immense, tant sur la rive droite que sur la rive gauche, depuis le jour où d’un coup de son ongle sonore il faisait jaillir au début l’ode sur le duc de Bordeaux : Il est l’Enfant du miracle.

2258. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXXVIII » pp. 158-163

Campenon, mort il y a un mois environ, n’était qu’un poëte gracieux de l’école de Delille, et un homme de goût, à la Guadeloupe et paresseux comme un créole.

2259. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires sur Voltaire. et sur ses ouvrages, par Longchamp et Wagnière, ses secrétaires. »

Ce n’est point aux Mémoires mêmes qu’il faut s’en prendre de cet empressement qu’ils rencontrent plutôt qu’ils ne le font naître ; ce n’est pas non plus à la vénération nationale pour un grand nom qu’il faut en savoir gré seulement.

2260. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. de Ségur. Mémoires, souvenirs et anecdotes. Tome II. »

Il y a dans ce rapprochement de famille de quoi faire naître plus d’une idée, et sur la différence des époques, et en particulier sur la différence des manières littéraires.

2261. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « En guise de préface »

Ou bien, quand l’œuvre est d’importance et qu’on veut « élever ses vues », on s’efforce de la situer historiquement dans une série de productions écrites ; ou bien, on recherche quel moment elle marque dans le développement, la dégénérescence ou la transformation d’un genre  les genres littéraires étant considérés comme un je ne sais quoi de vivant et d’organique, qui existerait indépendamment des œuvres particulières et des cerveaux où elles ont été conçues… Cette critique-là, qui n’est qu’une idéologie, exclut presque entièrement la volupté qui naît du contact plein, naïf, et comme abandonné, avec l’œuvre d’art.

2262. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXVII. Sort des ennemis de Jésus. »

L’empire était certes plus loin encore de soupçonner que son futur destructeur était .

2263. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 196-203

Saint-Evremont, [Charles de Saint-Denis, Sieur de] près de Coutance, dans la Basse-Normandie, en 1613, mort à Londres en 1703 ; un des plus Beaux-esprits & des plus polis Ecrivains du Siecle dernier.

2264. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre II »

Des mots tels que montre, règle, ne possèdent d’autre sens que ceux que leur donne la phrase où ils figurent ; cahier, voulant dire un assemblage de quatre choses, n’est représentatif d’un objet déterminé que parce que nous ignorons son origine ; le mot d’où il est , quaternus, a reparu en français moderne sous la forme médiocre de quaterne.

2265. (1889) L’art au point de vue sociologique « Préface de l’auteur »

La chimie ne faisait que naître avec Lavoisier ; la vraie physiologie était encore à venir : on ne cherchait guère alors à pénétrer dans l’intérieur de l’organisme, à sonder la cellule vivante ou l’atome, encore moins la conscience.

2266. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre IV. De quelques poèmes français et étrangers. »

Ces globes habités par des êtres différents de l’homme, cette profusion d’anges, d’esprits de ténèbres, d’âmes à naître, ou d’âmes qui ont déjà passé sur la terre, jettent l’esprit dans l’immensité.

2267. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 25, des personnages et des actions allegoriques, par rapport à la poësie » pp. 213-220

Le brillant qui naît d’une action metaphorique, les pensées délicates qu’elle suggere et les tours fins avec lesquels on applique son allegorie aux folies des hommes ; en un mot toutes les graces qu’un bel esprit peut tirer d’une pareille fiction, ne sont point en leur place sur le théatre.

2268. (1929) La société des grands esprits

Abel Hermant et de Théodore pour Émile Legrand, aurait été du même âge que le nouvel Anacharsis d’après le premier et ne serait qu’en 1445 d’après le second de ces auteurs. […] Et Rodin admire les cathédrales, création vraiment nationale — opus francigenum — parce qu’elles synthétisent ce pays et la nature française dont elles sont nées. […] en 1839, il mourut en 1894, presque obscur, mais depuis lors, a dit sir Edmond Gosse, sa renommée et son influence n’ont fait que s’élever par sauts et par bonds. […] Ne proclamait-il pas qu’il n’y a pas de plus belle carrière que celle de curé, que chacun doit rester dans la religion où il est , que si lui-même était catholique, il serait demeuré catholique, et que cette église « met un frein très salutaire aux écarts de la raison humaine » ? […] « J’entends par intuition… la conception ferme qui naît, dans un esprit sain et attentif, des seules lumières de la raison ».

2269. (1914) L’évolution des genres dans l’histoire de la littérature. Leçons professées à l’École normale supérieure

Au reste, si j’avais formé le projet d’écrire l’Histoire de la Critique en France, je ne pourrais pas le réaliser pour le moment, faute de trois ou quatre ouvrages, qu’il est étonnant que nous n’ayons pas encore, et que je voudrais bien que ma réclamation pût faire naître. […] Le premier nous sera fourni par L’Histoire de la tragédie française : genre illustre, s’il en fut, genre fameux, aujourd’hui mort et bien mort ; d’ailleurs dans des temps historiques ; dont nous n’ignorons rien d’essentiel ; et, en raison de ce motif, exemple admirable, pour ne pas dire unique, de la façon dont un Genre naît, grandit, atteint sa perfection, décline, et enfin meurt ! […] Pour ce qui est de l’Histoire de la tragédie française, le plan nous en est, en quelque sorte, donné par la manière même dont nous avons posé la question : Comment un Genre naît, grandit, atteint sa perfection, décline, et enfin meurt. […] Née, pour ainsi dire, dans les bibliothèques des érudits de la Renaissance, nous l’avons vue grandir pendant deux cent cinquante ans, et prendre insensiblement conscience de son objet. […] Pascal, est dans une bourgeoisie qui confinait presque à la noblesse, il est dans l’aisance, et il y a vécu, et il a écrit les Pensées ; un troisième enfin, La Bruyère, l’auteur des Caractères, «  chrétien et Français », a vécu dans une condition subalterne, humilié sous une nécessité contre laquelle il ne pouvait rien… Mais ici, ce n’est plus de physiologie, c’est de psychologie qu’il s’agit, si tant est que l’on puisse marquer exactement la limite.

2270. (1900) La vie et les livres. Cinquième série pp. 1-352

Ampère avait déclaré, dans un journal, qu’un Shakespeare nous était . […] méfiant, il devint mystificateur. […] Tu es pour gouverner ! […] Pierre Nozière était « regardeur », comme d’autres naissent marcheurs, calculateurs, orateurs ou sauteurs. […] La vocation littéraire est née, chez lui, de la force des choses.

2271. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Eugène Gandar »

Eugène Gandar naquit le 8 août 1825 au Neufour (Meuse), où son père avait de grands établissements industriels ; mais ses souvenirs d’enfance le reportaient plus habituellement à Remilly, pays de sa mère, foyer principal de sa famille, où l’on retourna bientôt demeurer, où il allait passer ses vacances, et d’où lui vinrent ses impressions les plus chères et les plus douces. […] Ils ont un esprit sérieux et des idées larges ; nés également pour la vie intérieure et la vie publique, ils seront bons pères de famille et bons citoyens. […] La musique aussi avait ses Durutte et ses Desvignes, et l’on se souvenait qu’Ambroise Thomas était à Metz. […] Beulé, en partant, laissait Gandar aux soins d’un jeune et nouveau membre de l’École, dont le coup d’essai brillant, le premier exploit signalé datera également de la Grèce, mais dans un genre bien différent : « Beulé parti, écrivait Gandar, je vivrai en tête à tête avec un de nos jeunes collègues à Dieuze et garçon d’esprit, M.  […] Mézières sur Shakespeare et sur les Contemporains, les Prédécesseurs et les Successeurs de Shakespeare, excellents ouvrages, nés eux-mêmes d’un enseignement de Faculté, sont un équivalent fait pour nous consoler de ceux qu’il n’a pas été donné à Gandar de rédiger et de recueillir sur les mêmes sujets.

2272. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIe entretien. Épopée. Homère. — L’Iliade » pp. 65-160

Écoutez par quelle autre comparaison inattendue le poète détend ici lui-même l’anxiété de l’imagination de ses auditeurs, tout en peignant les mœurs de l’Ionie où il est  : « Ainsi, quand une femme de Carie ou de Méonie a coloré en pourpre les plaques d’ivoire destinées à parer la tête des coursiers, beaucoup de guerriers désirent les posséder ; mais ces ornements précieux, réservés à un roi, seront un jour tout à la fois la parure et l’orgueil de son maître. […] Homère, dans cette sagesse précoce et accomplie qu’il attribue au héros d’Ilion, a eu évidemment pour but de montrer qu’Hector était aussi propre à gouverner un jour sa patrie qu’à combattre pour elle ; à faire ressortir davantage la sauvage et capricieuse férocité d’Achille par opposition à toutes les vertus du fils de Priam ; enfin à redoubler le pathétique de la mort prochaine d’Hector par l’admiration et par le regret de tant de vertus fauchées dans leur fleur. […] La pierre du cercueil ne sut pas t’en défendre ; Et, de ces vils serpents qui rongèrent ta cendre, Sont nés, pour dévorer les restes d’un grand nom, Pour souiller la vertu d’un éternel poison, Ces insectes impurs, ces ténébreux reptiles, Héritiers de la honte et du nom des Zoïles, Qui, pareils à ces vers par la tombe nourris, S’acharnent sur la gloire et vivent de mépris ! […] Nous sommes nés tous les deux sous le même destin, toi au sein d’Ilion dans les palais de Priam, moi à Thèbes, près des forêts de Placus, qui m’éleva quand j’étais enfant, père infortuné d’une fille plus infortunée encore ! […] Ils étaient cinquante quand débarquèrent les enfants de la Grèce ; dix-neuf avaient été enfantés par les mêmes flancs et dans mes palais ; les autres étaient nés de femmes étrangères ; le cruel Mars (la guerre) a tranché la vie du plus grand nombre d’entre eux ; un seul me restait : il défendait notre ville et nous-mêmes !

2273. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIIe entretien. Balzac et ses œuvres (3e partie) » pp. 433-527

II « Madame Vauquer, née de Conflans, est une vieille femme qui, depuis quarante ans, tient à Paris une pension bourgeoise établie rue Neuve-Sainte-Geneviève, entre le quartier latin et le faubourg Saint-Marceau. […] Le long de chaque muraille règne une étroite allée qui mène à un couvert de tilleuls, mot que Mme Vauquer, quoique née de Conflans, prononce obstinément tieuilles, malgré les observations grammaticales de ses hôtes. […] Dès ce jour, Mme Vauquer, née de Conflans, qui avait alors quarante-huit ans effectifs et n’en acceptait que trente-neuf, eut des idées. […] La plupart de mes idées, et même les plus audacieuses en science ou en politique, sont nées là, comme les parfums émanent des fleurs ; mais là verdoyait la plante inconnue qui jeta sur mon âme sa féconde poussière ; là brillait la chaleur solaire qui développa mes bonnes et dessécha mes mauvaises qualités. […] XV Balzac naquit, et, doué par la nature d’un talent immense et d’un esprit juste, il secoua ces haillons de la pensée dont on avait voulu faire un costume national, il rentra dans la voie droite de l’abbé Prévost, et n’aspira qu’à un seul titre, celui d’historiographe de la nature et de la société.

2274. (1879) À propos de « l’Assommoir »

Zola ; au risque de commettre une indiscrétion, nous le transcrivons : « Née en 1851  En 1867 (fin d’année, décembre), elle a dix-sept ans. […] Vous laissez naître ce ferment, il remonte et vous désorganise ensuite. » C’est seulement lorsque les documents ont été soigneusement dépouillés, les notes classées etétudiées, lorsqu’il a visité les lieux et a suivises types, que M.  […] Nous allons raconter l’histoire de ce drame, qui, comme beaucoup de choses, est du hasard. […] Il a le procédé de ce maître, puis le procédé de cet autre maître, tout cela naïvement, sans qu’il s’en aperçoive, parce qu’il est pour cela. […] L’impression que j’ai rapportée de ces trois lectures est celle d’un écrivain sans aucune originalité, disciple, foncièrement élève, rapin de Balzac qu’il parodie, de MM. 

2275. (1925) La fin de l’art

Gassendi Le petit village de Champtercier, près de Digne, inaugure aujourd’hui un monument au philosophe Gassendi qui naquit là à la fin du seizième siècle. […] J’ai donc appris avec plaisir que celui-ci était en 1813. […] Colomb serait à Calvi. […] Admettons que Colomb soit à Calvi et faisons abstraction de cette donation à la France, qui n’eut pas grande conséquence, il n’en serait pas moins français, puisque la Corse est devenue dans la suite des temps un département français. […] Moins peut-être que « l’origine française » d’un homme en Corse au xvie  siècle.

2276. (1908) Jean Racine pp. 1-325

Jean Racine naquit le 20 ou le 21 décembre 1639, de petite mais ancienne bourgeoisie. […] Molière, le 15 janvier 1622, avait dix-huit ans de plus que Racine, le 20 ou 21 décembre 1639. […] Toutefois, Grimarest, en 1659, avait pu connaître beaucoup d’anciens amis ou camarades de Molière. […] J’étais pour servir d’exemple à ta colère, Pour être du malheur un modèle accompli. […] … De ce trouble, je pense, naîtra Suréna, au lendemain du triomphe royal d’Iphigénie.

2277. (1894) La vie et les livres. Première série pp. -348

Il s’est amusé à réunir tous les romans, toutes les nouvelles qui sont nés en France des souvenirs de la guerre de 1870. […] Hassan — de son vrai nom, Yourghi — est à Elbassan près de Monastir, en Albanie. […] J’étais pour cela. » Débarqué dans l’île d’Elbe, son premier soin fut de faire manœuvrer un bataillon. […] La vallée du Hiéromyces, qui est aujourd’hui le Yarmouk, le vit naître, cela est possible. […] » Heliodora, don de Helios, s’appelait-elle ainsi pour être née au pays du soleil levant ?

2278. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome I

C’était l’époque où Flaubert, en 1821, sortait à peine du collège. […] Il était pour croire, et pour aimer, et pour espérer. […] Il naissait tel. […] Le supérieur ne naît pas de l’inférieur, il s’y superpose. […] Il est en octobre 1859.

2279. (1716) Réflexions sur la critique pp. 1-296

Il l’auroit crû le pere de Saturne dont il étoit , et qu’il avoit chassé du ciel ? […] C’est, selon elle, sa volonté seule qui faisoit le destin ; mais en ce cas, je demande quel étoit donc le destin avant que Jupiter fût  ? […] Ils en ont tant exprimé et avec une élégance si continuë, que ce soupçon ne sçauroit naître dans l’esprit de personne. […] Le plus grand vice d’Homere dans le fonds des choses, est donc d’être dans un siécle grossier. […] Laissez la quenoüille aux femmes, vous êtes née pour des occupations plus grandes.

2280. (1865) Introduction à l’étude de la médecine expérimentale

On peut donc dire alors que l’expérience est une observation provoquée dans le but de faire naître une idée. […] Les faits ne s’excluant jamais, ils s’expliquent seulement par les différences de conditions dans lesquelles ils sont nés. […] La médecine est née du besoin, a dit Baglivi, c’est-à-dire que, dès qu’il a existé un malade, on lui a porté secours et l’on a cherché à le guérir. […] Alors on expérimente pour faire naître des observations qui puissent à leur tour faire naître des idées. […] Il fallait faire naître une idée en faisant apparaître un fait, c’est-à-dire instituer encore là une expérience pour voir.

2281. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « La Fontaine de Boileau »

Une rachée : on appelle ainsi les rejetons nés de la racine après qu’on a coupé le tronc.

2282. (1874) Premiers lundis. Tome II « Dupin Aîné. Réception à l’Académie française »

Ce suffrage libre des égaux auquel il attache, et avec raison, tant de prix, lui a fait dire que les trois honneurs qu’il se glorifiait le plus d’avoir reçus dans sa vie étaient : 1° sa charge de bâtonnier de l’ordre des avocats, après trente ans de profession ; 2° sa mission de député du département qui l’avait vu naître ; 3° sa qualité enfin de membre de l’Académie française.

2283. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Bergerat, Émile (1845-1923) »

Émile Bergerat est à Paris, rue de la Vieille-Monnaie, près le Pont-Neuf, en 1845, au mois d’avril, alors que les arbres du boulevard poussaient leurs premières feuilles et que les moineaux francs pépiaient au bord des toits, secouant dans un rayon de soleil leur plumage lustré d’une dernière averse… Lorsqu’il étrenna sa première culotte, ses parents, d’excellents bourgeois, décidèrent qu’il irait l’user sur les bancs d’un collège et le mirent en pension, à Vaugirard, chez les jésuites.

2284. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — J — Jammes, Francis (1868-1938) »

C’est la mère douce aux cheveux gris dont tu es .

2285. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lemercier, Népomucène Louis (1771-1840) »

C’est ainsi qu’en ces années-là, de ces échanges d’idées avec tant de natures diverses, de la contemplation des mœurs et de l’observation des individus, naquirent et se développèrent dans M. 

2286. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre V. Un livre de Renan et un livre sur Renan » pp. 53-59

Renan a créé assez d’œuvres pour qu’on lui permette la joie de faire paraître, de temps en temps, un livre sans peine, par les soins du seul éditeur.

2287. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Introduction » pp. 2-6

Admirer, c’est proposer un modèle à l’imitation  ; railler, c’est empêcher la sympathie de naître ou de se déclarer.

2288. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre VI. Recherche des effets produits par une œuvre littéraire » pp. 76-80

Tel chant de guerre, dans la fièvre de l’enthousiasme, a valu une armée ; tel discours, prononcé à propos, a lancé des milliers d’hommes à l’assaut d’un trône ou d’une bastille.

2289. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — E. — article » pp. 238-247

Louis, Secrétaire d’Ambassade, puis Ministre Plénipotentiaire de France auprès du Roi de la Grande-Bretagne, &c. née à Tonnerre sur l’Armençon en Bourgogne, le 5 Octobre 1728, beaucoup plus connue par la singularité de ses aventures, que par ses Ouvrages, quoiqu’ils lui donnent le droit de figurer avec avantage parmi les Auteurs de ce siecle.

2290. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — Q. — article » pp. 572-580

QUINAULT, [Philippe] Auditeur en la Chambre des Comptes, de l’Académie Françoise, à Paris en 1635, mort en 1688.

2291. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre premier. Que la Mythologie rapetissait la nature ; que les Anciens n’avaient point de Poésie proprement dite descriptive. »

Il faut plaindre les anciens, qui n’avaient trouvé dans l’Océan que le palais de Neptune et la grotte de Protée ; il était dur de ne voir que les aventures des Tritons et des Néréides dans cette immensité des mers, qui semble nous donner une mesure confuse de la grandeur de notre âme, dans cette immensité qui fait naître en nous un vague désir de quitter la vie, pour embrasser la nature et nous confondre avec son Auteur.

2292. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre XIV. Parallèle de l’Enfer et du Tartare. — Entrée de l’Averne. Porte de l’Enfer du Dante. Didon. Françoise de Rimini. Tourments des coupables. »

Virgile a placé les amants au milieu des bois de myrtes et dans des allées solitaires ; le Dante a jeté les siens dans un air vague et parmi des tempêtes qui les entraînent éternellement ; l’un a donné pour punition à l’amour ses propres rêveries, l’autre en a cherché le supplice dans l’image des désordres que cette passion fait naître.

2293. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 44, que les poëmes dramatiques purgent les passions » pp. 435-443

La tendresse paternelle combattuë dans le pere par la raison, les agitations d’un enfant bien , tourmenté par la crainte de déplaire à ses parens, ou de perdre sa maîtresse, donnent lieu à plusieurs incidens interessans, dont il peut résulter une morale utile.

2294. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 11, les romains partageoient souvent la déclamation théatrale entre deux acteurs, dont l’un prononçoit tandis que l’autre faisoit des gestes » pp. 174-184

Delà, continuë Tite-Live, naquit l’usage de partager la déclamation entre deux acteurs, et de réciter, pour ainsi dire, à la cadence du geste des comédiens ; et cet usage a si bien prévalu que les comédiens ne prononcent plus eux-mêmes que les dialogues.

2295. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « VI »

Je suis pour classer et analyser, et je fabrique de l’imagination à cent francs le mètre carré !

2296. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — I »

Il faut qu’il les fortifie d’une façon de prestige moral qui naît de mille petites sagesses dans le détail.

2297. (1915) Les idées et les hommes. Deuxième série pp. -341

Ils se plaignent de n’avoir plus à se battre et d’être nés après le triomphe accompli. […] en 1797, Alfred de Vigny était de souche noble. […] J’étais seulement pour cela. […] » Schuré, en Alsace, répondit : « Plus que jamais, je suis Français !  […] Cependant, nées du texte, les conclusions s’imposent quelquefois au texte.

2298. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE KRÜDNER » pp. 382-410

elle était née au plein milieu du dix-huitième siècle ; les descendants de l’Ordre Teutonique étaient devenus luthériens ; luthérienne donc, et puis femme d’ambassadeur, elle eut à essuyer d’abord toute cette vie de monde, de scepticisme et de plaisirs ; et lorsqu’elle y échappa, lorsque la flamme des événements publics vint éprendre cette âme si fervente sous une enveloppe si frêle, et lui fit croire à l’heure de prédire, de frapper tour à tour et de consoler, il se trouve que bien peu l’entendirent ; qu’elle fut comme la prophétesse stérile d’Ilion en cendres ; que ceux même que sa rapide éloquence de cœur avait un moment saisis, comme la poussière éparse que la nue électrique enlève, elle passée, retombèrent ; et qu’elle-même, sans ordre fixe, sans discipline, sans tradition, soulevée par le souffle ardent des catastrophes et n’ayant entrevu que des lueurs, perdit aussitôt la trace de l’avenir, et mourut dans une Crimée, sans rien laisser, sans rien servir, flocon de neige apporté et remporté par l’aquilon, un simple éclair et un cri de plus dans le vaste orage ! […] Née à Riga, aux bords de la Baltique, vers l’année où Mme de Staël naissait eu France, Mme Juliana de Krüdner, fille du baron de Wietinghoff, un des grands seigneurs du pays, et d’une famille qu’avait récemment encore illustrée le maréchal de Münnich, eut une première enfance telle qu’elle s’est plu à la peindre dans les souvenirs de sa Valérie.

2299. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Quelques documents inédits sur André Chénier »

Chaque chose naît, meurt et se dissout. […] Jadis, enfant chéri, dans la maison d’un père Qui te regardait naître et grandir sous ses yeux, Tu pouvais sans péril, disciple curieux, Sur tout ce qui frappait ton enfance attentive Donner un libre essor à ta langue naïve. […] Parmi les ïambes inédits, j’en trouve un dont le début rappelle, pour la forme, celui de la gracieuse élégie ; c’est un brusque reproche que le poëte se suppose adressé par la bouche de ses adversaires, et auquel il répond soudain en l’interrompant : « Sa langue est un fer chaud ; dans ses veines brûlées Serpentent des fleuves de fiel. » J’ai douze ans, en secret, dans les doctes vallées, Cueilli le poétique miel : Je veux un jour ouvrir ma ruche tout entière ; Dans tous mes vers on pourra voir Si ma muse naquit haineuse et meurtrière.

2300. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « George Farcy »

Nous publions les vers de Farcy, et pourtant, nous le croyons, sa vocation était ailleurs : son goût, ses études, son talent original, les conseils de ses amis les plus influents, le portaient vers la philosophie ; il semblait pour soutenir et continuer avec indépendance le mouvement spiritualiste émané de l’École normale. […] Jean-George Farcy naquit à Paris le 20 novembre 1800, d’une extraction honnête, mais fort obscure. […] Dans la pièce à madame O’R…., alors enceinte, on remarquera une strophe qui ferait honneur à Lamartine lui-même : c’est celle où le poëte, s’adressant à l’enfant qui ne vit encore que pour sa mère, s’écrie : Tu seras beau ; les Dieux, dans leur magnificence, N’ont pas en vain sur toi, dès avant ta naissance, Épuisé les faveurs d’un climat enchanté ; Comme au sein de l’artiste une sublime image, N’es-tu pas parmi les œuvres du vieil âge ?

2301. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIe entretien. Trois heureuses journées littéraires » pp. 161-221

III Vous souvient-il de ces délicieuses pages de Boccace, un des esprits les plus optimistes, les plus souriants, les plus causeurs, de toutes les littératures, pages dans lesquelles il raconte comment d’un désastre universel naquit le Décaméron, qui amusera le monde tant qu’il restera un sourire sur les lèvres de l’humanité ? […] On sait la vie qu’ils y menèrent, et quels charmants contes pour rire et pour aimer naquirent de leurs loisirs d’été à l’ombre des arbres, au gazouillement des eaux et aux roucoulements des colombes. […] La morale a tout à y recueillir, l’imagination n’a rien à y colorier ; les passions humaines, cette âme de l’épopée, en sont exclues ; les prédications d’un homme dans la cabane d’un artisan et suivi de village en village par douze pauvres pêcheurs de Galilée ne sont un poème que pour les philosophes qui étudient à loisir la semence et la germination des vérités divines.

2302. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre I. Le broyeur de lin  (1876) »

Le digne patron des avocats est dans le minihi de Tréguier, et sa petite église y est entourée d’une grande vénération. […] Il avait une fille qui était née vers l’époque de l’émigration. […]  » Elle était née droite et bonne, n’eut jamais de doute sur ses devoirs ; elle n’eut d’autre tort que d’avoir des veines et du sang.

2303. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIV. La littérature et la science » pp. 336-362

La vapeur contrainte pour la première fois à mouvoir des bateaux et des voitures ; la conquête de l’air entreprise par d’audacieux aérostats ; la foudre obligée de dire son secret et de suivre la route qu’on lui trace ; le magnétisme dévoilant quelques-uns de ses mystères, qui font l’étonnement de la foule et la fortune des charlatans : voilà, non le tableau complet, mais une esquisse rapide des fruits que fait naître une observation plus attentive du monde extérieur. […] Ennemie dangereuse de la poésie dont elle attaque l’heureuse ignorance, d’où naissent les fables merveilleuses, la science est pour elle une alliée plus dangereuse encore, quand elle s’offre traîtreusement à elle comme matière à mettre en vers. […] La science devient encore et surtout poétique, parce qu’elle transforme et renouvelle en nous la conception du monde, parce qu’elle fait naître une philosophie plus complexe et plus large que les vieux systèmes désormais dépassés. « La poésie, écrivait Lamartine123, sera de la raison chantée.

2304. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre deuxième. Le développement de la volonté »

. — Sans doute, mais c’est que le désir naît, d’une part, de profondeurs étrangères à notre pensée et à notre conscience claire, d’autre part, d’idées objectives qui s’imposent à nous par les lois de l’association ; quand nous voulons, au contraire, c’est l’idée même de notre moi et de notre indépendance subjective qui devient le motif directeur de l’acte : la conscience du moi se voit donc produire elle-même la volition, au moins dans ce qu’elle a de raisonné et d’intelligent. […] — Nous ne sentons pas naître le désir, ajoute-t-on, nous le sentons seulement grandir en nous, au point même qu’il obscurcit parfois l’intelligence et nous enlève tout pouvoir d’agir. — C’est, répondrons-nous, que le désir proprement dit n’est pas l’action même de l’intelligence, qui le trouve déjà formé et croissant sans elle ; au contraire, la réaction de l’intelligence sur le désir a nécessairement conscience de soi et se voit elle-même à l’œuvre. […] Un désir trop violent abolit la volition, une volition énergique maîtrise le désir ; traduisez : le désir intelligent, qui se développe sous l’idée du moi, s’oppose aux désirs plus ou moins aveugles nés de l’action du non-moi, des objets extérieurs, de l’organisme, etc.

2305. (1833) De la littérature dramatique. Lettre à M. Victor Hugo pp. 5-47

À peine répandiez-vous avec douceur et modestie la parole divine, que les comédiens émus, enivrés des transports que vous faisiez naître parmi vos disciples, se sont prosternés devant vous et ont adoré le vrai Dieu. […] Vous voyez que je vous parle d’un temps où peut-être vous n’étiez pas . […] Votre idée de faire des publics m’a fait naître aussi la pensée de refaire le mien.

2306. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Ernest Feydeau » pp. 106-143

L’occasion avait vingt fois dû naître, pour elle, qui l’outrageait et qui l’oubliait, de s’en réclamer, et les scènes que l’intervention du mari amène avaient dû être pressenties et gâter déjà leur bonheur. […] dans la bauge du xviiie  siècle, le malheureux qui a écrit cette opinion animale pensait peut-être à couvrir de cette orgueilleuse généralité le déshonneur de sa mère, et si cela fut, voilà son excuse ! […] Née d’une séduction, Catherine d’Overmeire est victime d’une autre.

2307. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre vii »

à Versailles, il s’était choisi, retrouvé une petite patrie et avait donné son cœur à la Vendée d’où venaient ses grands-parents. […] De cette imagination si vraie naît le plus fort conseil : comment pourrions-nous mieux vivre que dans un accord étroit avec ceux dont nous sommes le prolongement ? […] C’est de la France qu’ils naissent, c’est en elle qu’ils retombent.‌

2308. (1910) Victor-Marie, comte Hugo pp. 4-265

Ainsi naît une amitié propre. […] L’offense est née très précisément au changement de sens, au changement de plan, au changement de langage. […] Comme vous étiez nés, naturellement, nativement, comme vous étiez nés natifs. […] Ou y être nés, ou y être introduits. […] Qu’avec ces péchés naissent et meurent, commencent et finissent, se découpent nos responsabilités.

2309. (1894) Critique de combat

Sur le conseil de l’ami et avec l’aide d’un « prince de la science », elle fait disparaître le danger et l’enfant à naître. […] Chemin faisant, il nous conte comment naquit d’un couplet la fameuse devise de Chamfort : Guerre aux châteaux ! […] Dites : naître… La mort est bleue. […] Elle est revenue à de meilleurs sentiments en revenant à la vie ; elle confesse ses péchés en pleine audience ; elle prouve qu’Etienne est innocent comme un enfant qui vient de naître. […] Rousseau, romancier français, naquit à Genève », et ce début est alléchant ; il insinue que Fontenelle, l’homme au cœur déglacé, était «  centenaire », et le trait est bien lancé ; il définit l’intelligence de Voltaire « un chaos d’idées claires », et c’est une spirituelle impertinence.

2310. (1927) Des romantiques à nous

Le violent, le délirant désir, Jean-Jacques « , comme il nous dit, avec un sang embrasé », l’a certes connu. […] Sur le front du directeur, la grâce touchante du sujet individuel faisait naître un sourire qui tempérait l’habituelle et insondable sévérité de son regard sur l’espèce. […] Leur école nationale était née de la veille. […] Et c’est ce qui nous fait croire qu’elles y sont nées et que nous surprenons en elle la voix primitive de la nature. […] Il pouvait y avoir un autre premier, si la nature avait eu le généreux caprice de faire naître sur le sol belge en une même couvée d’hommes, deux grands musiciens.

2311. (1896) Les idées en marche pp. 1-385

Nul n’est pour ciseler des phrases, fignoler des épithètes et conjoindre d’harmonieuses images. […] Ou bien c’était une forêt qui naissait de ratures et de bavures, d’un maladroit frôlement de la manche. […] Il dit autre part : « C’est aujourd’hui 3 octobre que je suis . […] De là naît un comique spécial, un art des silhouettes inoubliables et des comparaisons aiguës. […] Baptiste Bonnet est sur la route blanche.

2312. (1805) Mélanges littéraires [posth.]

Ce vice naît toujours d’un défaut de logique, quand on écrit de son propre fonds ; ou d’ignorance soit de la matière, soit de la langue, quand on écrit d’après un autre. […] Si une liste de rimes peut quelquefois faire naître une idée heureuse à un excellent poète, en revanche un poète médiocre ne n’en sert que pour mettre la raison et le bon sens à la torture. […] Un enfant avec du talent ne doit point s’aider de pareils ouvrages pour faire des vers latins, supposé même qu’il soit bon qu’il en fasse ; et il est absurde d’en faire faire aux autres. […] De la propriété des termes naissent trois différentes qualités : la précision dans les matières de discussion ; l’élégance dans les sujets agréables ; l’énergie dans les sujets grands ou pathétiques. […] Il observe que cette prose nous paraît beaucoup moins agréable que les vers, qui expriment la même chose dans les mêmes termes ; et il en conclut que le plaisir qui naît de la mesure des vers, est un plaisir de convention et de préjugé, puisqu’à l’exception de cette mesure, rien n’a disparu du morceau cité.

2313. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre III. De la signification de la vie. L’ordre de la nature et la forme de l’intelligence. »

Ainsi naîtrait le problème de savoir comment l’ordre s’impose au désordre, la forme à la matière. […] Sans doute l’idée première en naquit, dans la pensée de Carnot, de certaines considérations quantitatives sur le rendement des machines thermiques. […] L’ordre qui y règne, et qui se manifeste par les lois de la nature, est un ordre qui doit naître de lui-même quand l’ordre inverse est supprimé : une détente du vouloir produirait précisément cette suppression. […] Mais il n’en est pas moins vrai que les choses se passent comme si tout organisme supérieur était d’une association de cellules qui se seraient partagé entre elles le travail. […] A côté des mondes qui meurent, il y a sans doute des mondes qui naissent.

2314. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Littré. »

Maximilien-Paul-Émile Littré, à Paris le 1er février 1801, fut élevé par des parents d’une moralité forte, sévère et profonde ; il reçut une éducation domestique qui eut sur lui la plus grande influence et qui le marqua à jamais. […] Il ne séparait pas la science de la morale, et il n’était pas non plus de ceux qui ensevelissent leurs débuts pénibles et leurs origines ; il avait eu la vie rude et même misérable ; il avait été pauvre, et il lui arrivait de le rappeler à son fils en des termes qui ne s’oublient pas : « Il m’est arrivé de manquer de pain, toi déjà . […] La fille qui lui naquit et qui est aujourd’hui si digne de son père, une aide intelligente dans ses travaux, fut élevée de même selon la foi de sa mère, chrétiennement. […] Il nous faut renoncer dès lors à toutes les anecdotes postérieures qui ont couru et qui font légende à son sujet ; aux services qu’il aurait rendus à la Grèce pendant la peste d’Athènes, et dont Thucydide ne dit mot ; à ces grands bûchers qu’il aurait fait allumer pour purifier l’air et qui chassèrent le fléau ; à son refus d’aller servir le roi de Perse, et à son mépris des présents d’Artaxerce : inventions agréables, ingénieuses, mais inventions de rhéteurs, nées d’écrits apocryphes que la critique n’admet pas et qu’elle met à néant.

2315. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre VI. La poésie. Tennyson. »

Les idées viennent de naître ; l’homme est heureux et encore enfant. […] Il leur a fait mettre leurs mains dans les siennes, jurer de respecter leur roi comme s’il était leur conscience, et leur conscience comme si elle était leur roi ; de ne point dire de calomnie et de n’en point écouter ; de passer leur douce vie dans la plus pure chasteté ; de n’aimer qu’une jeune fille, de s’attacher à elle ; de lui offrir pour culte des années de nobles actions. » Il y a une sorte de plaisir raffiné à manier un pareil monde ; car il n’y en a point où puissent naître de plus pures et de plus touchantes fleurs. […] Il est poëte, c’est-à-dire constructeur de palais aériens et de châteaux imaginaires. […] Cette grande ville est cosmopolite ; toutes les idées peuvent y naître ; nulle barrière n’y arrête les esprits ; le champ immense de la pensée s’ouvre devant eux sans route frayée ou prescrite.

2316. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier. — Correspondance de Chateaubriand (3e partie) » pp. 161-240

Vous figurez-vous tout cela, et les idées que cette scène faisait naître ? […] Elle est de la ville ou vous êtes née ! […] C’est aujourd’hui le 4 septembre, et non le 4 octobre, que je suis , il y a bien des années ! Je vous adresse le premier battement de mon cœur ; il n’y a aucun doute qu’il fut pour vous, quoique vous ne fussiez pas encore née !

2317. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIIIe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin » pp. 225-319

IV Le château du Cayla était de père en fils possédé et habité par la famille de M. de Guérin, dont la jeune femme était née dans le bourg de Cahuzac. […] Née d’elle-même, elle grandit à la hauteur d’elle-même et elle devint insensiblement, comme nous allons la voir, une femme phénoménale, qui ne se mesurait plus qu’à sa propre taille, et sous l’œil de son père, et sous la mesure de Dieu. […] Tout me disait d’y aller, mais je n’ai fait que deux pas dehors et me suis arrêtée à l’écurie des moutons pour voir un agneau blanc qui venait de naître. […] c’est que la vie et la mort sont sœurs et naissent ensemble comme deux jumelles.

2318. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VII »

Mais cette inspiration musicale elle-même était née d’une inspiration poétique ; elle ne se « condensait », elle ne devenait saisissable, qu’à mesure que le drame prenait forme, que ses acteurs se détachaient clairement, se mouvaient, parlaient dans l’imagination de l’auteur. […] Toujours ceux-là ont composé de la musique sur des textes donnés ; Wagner concevait musique et paroles simultanément, ou plutôt, le drame est « dans le sein maternel de la musique ». […] Ou bien, dans une situation moins marquée, la mention d’un mot, ou d’un nom, fait naître des émotions vives ou flottantes dans le cœur d’un personnage (souvenirs, espoirs, craintes) ; et de nouveau c’est la musique qui nous révèle ces émotions passagères. […] Le chef d’orchestre Jules Étienne Pasdeloup est le 15 septembre 1819 à Paris et mort à Fontainebleau le 13 août 1887.

2319. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre premier. Causes physiologiques et psychologiques du plaisir et de la douleur »

Considérez l’échelle des intensités dans la sensation : il y a un point voisin de l’indifférence, et c’est à partir de ce point neutre que certains plaisirs peuvent naître par un accroissement d’intensité ; tout plaisir ne suppose pas une descente préalable au-dessous du point idéal d’indifférence, dans la région inférieure de la peine. […] Une loi opposée se manifeste dans les sens supérieurs et partout où il y a des organes très spécialisés : là, c’est le plaisir qui peut naître immédiatement et acquérir un degré de distinction notable à partir du point d’indifférence. […] Demandons-nous si tous les plaisirs, même ceux qui paraissent nés d’un besoin, même ceux qui semblent les plus grossiers, ne sont pas encore de même nature pour celui qui regarde au fond des choses. […] Nous voyons donc de nouveau que ce qui est vraiment primitif, c’est l’action identique à l’être et au bien-être, d’où naissent, avec la résistance extérieure, la peine distincte, et avec la victoire sur la résistance, le plaisir distinct.

2320. (1909) De la poésie scientifique

Rien n’indique une intuition, ni, en le second volume, une approche du grand mouvement poétique qui venait de naître. […] Et, acquise, en quelque point de contact que ce soit, cette certitude qui naît de leur identification  le Poète, alors, de chacun de ces points comme centres vibratoires, s’évertuera de pensée à susciter et harmoniser en la série évolutive, des rapports nouveaux de l’Univers. […] Or, Amour implique deux désirs, deux pôles : pour se connaître, dirons-nous métaphysiquement, ils entrent en action, et la résultante de cette action est le troisième mouvement qui naît d’elle — et qui détermine la sortie hors de la non-connaissance, de la non-conscience : c’est-à-dire qu’il détermine l’Evolution, troisième mouvement de l’unité trinaire que nous avons représenté par l’Ellipse, signe de l’Univers évoluant. […] René Ghil proclame qu’il a déterminé tous les mouvements contemporains de la poésie, sinon de la littérature entière), nous pensons avoir déterminé des choses  et que quelque chose de nouveau est de moi.

2321. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1857 » pp. 163-222

Il répète et rabâche amoureusement cette phrase : De la forme naît l’idée, une phrase que lui a dite, ce matin, Flaubert, et qu’il regarde comme la formule suprême de l’école, et qu’il veut qu’on grave sur les murs. […] Lundi 18 mai La Brasserie des Martyrs, une taverne et une caverne de tous les grands hommes sans nom, de tous les bohèmes du petit journalisme, d’un monde d’impuissants et de malhonnêtes, tout entiers à se carotter les uns aux autres un écu neuf ou une vieille idée… À propos d’un duel là, le commissaire de police du quartier disait à Busquet ; « Comment, ce monsieur se bat avec cet homme ! […] Si cela continue, nos enfants naîtront à quarante ans. […] * * * — De la confusion des langues à la tour de Babel, sont nés : Pierrot qui s’en joue, et les traducteurs qui en vivent.

2322. (1894) Textes critiques

Mais elle vit pour l’amour, et de son amour est , sur qui il se reportera, une créature terrestre. — Johannes Vockerat et Anna Mahr, Dieu l’un pour l’autre, selon une tant vieille théorie, au souffle des trains — chœur antique — dans les sabliers vides et du tictac lunaire horé de fugitifs ailerons, perdent tout appui séparés. […] L’être qui naît donne à son corps germe sa forme parfaite, baudruche de son âme, la sphère : puis le voilà parti en différenciations rameuses et compliquées, jusqu’à ce que, le beau ressouvenu, il libre derechef en sa primordiale (ou une pareille) sphéricité. […] Les Rosny ont déjà appelé le cycle un nouvel organe ; c’est surtout un prolongement minéral de notre système osseux, et presque indéfiniment perfectible, étant de la géométrie.‌ […] Le temps est nécessaire parce que ceux qui sont plus âgés que nous — et que nous respectons à ce titre — ont vécu parmi certaines œuvres qui ont pour eux le charme des objets usuels, et ils sont nés avec une âme qui était assortie à ces œuvres, et garantie devant aller jusqu’en l’an mil huit cent quatre-vingt … et tant.

2323. (1856) Cours familier de littérature. II « XIIe entretien » pp. 429-507

périsse à jamais le jour qui m’a vu naître ! […] « L’homme de la femme vit un petit nombre de jours et il est rassasié de peines. […] « Sans doute tu savais que tu devais naître, tu connaissais le nombre de tes jours ? […] « L’homme de la femme vit très peu de temps, et ce petit espace de temps est comblé de beaucoup de misères.

2324. (1857) Cours familier de littérature. IV « XIXe entretien. Littérature légère. Alfred de Musset (suite) » pp. 1-80

À travers ces lueurs d’un talent néfaste mais énergique, on entrevoit nettement que si la poésie est vivante, l’âme est morte avant d’être née. […] Portia, dès le berceau, d’amour environnée, Avait vécu comtesse ainsi qu’elle était née, Jeune, passant sa vie au milieu des plaisirs. […] Grèce, ô mère des arts, terre d’idolâtrie, De mes vœux insensés éternelle patrie, J’étais pour ces temps où les fleurs de ton front Couronnaient dans les mers l’azur de l’Hellespont. […] Le printemps naît ce soir ; les vents vont s’embraser ; Et la bergeronnette, en attendant l’aurore, Aux premiers buissons verts commence à se poser.

2325. (1884) Articles. Revue des deux mondes

A vrai dire, une nation naît tous les jours ; l’énergie qui l’anime est renouvelée sans cesse et peut être indéfiniment accrue par chaque individu nouveau dans une faible mesure, et, dans des proportions plus larges, par chaque génération nouvelle. […] Ainsi le lion est le seul animal dont les petits naissent les yeux ouverts ; les poissons de mer ne se nourrissent pas de l’eau salée, mais de cette portion d’eau douce que l’eau salée renferme ; les chiennes et les truies n’ont tant de petits que parce qu’elles ont plusieurs matrices ; en Libye, où les ânes sont de très grande taille, ils ne couvrent jamais que des jumens rasées, de tous leurs crins, car si elles avaient encore cet ornement qui les pare si bien, elles ne recevraient pas de tels maris : curieuse intuition, pour le dire en passant, du principe de la sélection, sexuelle, dont Ch. […] Il n’est pas beaucoup plus crédule à l’égard des fables populaires, sur le verdier qui naît, comme le phénix, des cendres d’un bûcher ; sur les grues qui prennent dans leurs becs, pour se lester, une pierre qui est bonne à éprouver la pureté de l’or ; sur les chèvres de Crète, qui percées d’une flèche, se mettent en quête du dictame, dont la propriété est de faire sortir le fer de la plaie. […] Sans doute, la nature des êtres de cet ordre ne saurait être éternelle ; mais, une fois , l’être devient éternel dans la mesure où il est possible qu’il le soit… Au point de vue de l’espèce, cette éternité est possible, et c’est ainsi que se perpétuent à jamais les hommes, les animaux et les plantes. » Ainsi, tandis que, pour certain mysticisme et pour le pessimisme moderne, la génération est œuvre de déchéance et assure le triomphe du mal dans l’univers, elle marque, aux yeux du philosophe grec, l’effort sublime de la nature vivante dans son inconsciente aspiration à l’éternité du divin.

2326. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre III. Le roman » pp. 135-201

  Le conte moral et le roman allégorique du Gulliver de Swift et du Candide de Voltaire ont eu des continuateurs avec Pantalonie de Camille de Sainte-Croix, les Lettres de Malaisie, de Paul Adam, les romans demi-fantaisistes de M.  […] VI. — Le roman symboliste Il naquit antérieurement à l’époque qui nous occupe ici, mais ces meilleures œuvres sont récentes :   Les Chevaux de Diomède, ce très absurde, très exquis et très profond roman de M.  […] En effet les auteurs de l’Anthologie, nés aux colonies méritent une large place. […] Mais Mme Georgette Leblanc répondra sans doute que, comme Jean-Jacques Rousseau le pensait pour les hommes, « toutes les femmes sont nées naturellement bonnes », que les conventions seules les ont habituées à de la méfiance ou à de l’envie, et qu’une tendresse continue doit faire renaître tous les bons instincts qui sommeillent en elles.

2327. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre II. De la multiplicité des états de conscience. L’idée de durée »

Cette forme, ces qualités naissent précisément de ce que nous embrassons la multiplicité des atomes dans une aperception unique : supprimez l’esprit qui opère cette synthèse, et vous anéantirez aussitôt les qualités, c’est-à-dire l’aspect sous lequel se présente à notre conscience la synthèse des parties élémentaires. […] Pour que l’espace naisse de leur coexistence, il faut un acte de l’esprit qui les embrasse toutes à la fois et les juxtapose ; cet acte sui generis ressemble assez à ce que Kant appelait une forme a priori de la sensibilité. […] De la comparaison de ces deux réalités naît une représentation symbolique de la durée, tirée de l’espace. […] — De cette confusion entre le mouvement et l’espace parcouru par le mobile sont nés, à notre avis, les sophismes de l’école d’Élée ; car l’intervalle qui sépare deux points est divisible infiniment, et si le mouvement était composé de parties comme celles de l’intervalle lui-même, jamais l’intervalle ne serait franchi.

2328. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le marquis de Lassay, ou Un figurant du Grand Siècle. — I. » pp. 162-179

le 28 mai 1652, de l’ancienne famille de Madaillan, originaire de Guyenne, fils du marquis de Montataire, père très peu tendre, il s’émancipa de bonne heure. Cet homme, qui passera une grande partie de sa vie auprès des grands et à s’insinuer dans leur fortune, avait en lui un certain principe d’indépendance le plus contraire au métier de courtisan ; il n’aimait pas à être soumis ni à obéir : Je ne me soucie point de commander, disait-il, mais l’obéissance m’est insupportable. — Ce sentiment, ajoutait-il, est avec moi ; je l’ai eu dès mon enfance, et à peine en étais-je sorti, que je secouai le joug de la domination paternelle aux dépens de tout ce qui m’en pouvait arriver ; et, pendant plusieurs années, je me réveillais la nuit avec un mouvement de joie que me donnait la pensée de ne plus dépendre de personne.

2329. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Maucroix, l’ami de La Fontaine. Ses Œuvres diverses publiées par M. Louis Paris. » pp. 217-234

Ce camarade de La Fontaine, qui était de deux ans plus âgé que lui, naquit le 7 janvier 1619, à Noyon en l’Île-de-France. […] Il était paresseux, et la province ne diminua pas cette disposition.

2330. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — III. (Fin.) » pp. 479-496

Ramond n’excelle pas moins à donner l’impression des diverses heures du jour, celle du soir et du couchant, — soit qu’il en jouisse à la descente, dans une vallée déjà riante, non loin de Bagnères-de-Luchon, près d’une antique chapelle : Je m’arrêtai un moment devant cette chapelle, frappé de la magnificence du paysage qui l’entoure : le soleil voisin de son coucher y répandait ce charme qui naît de l’approche du soir. […] De même que nous avons vu quelques-uns de ceux qui l’avaient observée avant l’explosion, et quand elle ne faisait que de naître, se flatter de saisir et d’assigner l’instant précis où il eût été possible de la régler, ou mieux de l’anticiper et de la prévenir, de même lui, qui l’avait connue de près en plein cours, il la considérait et la jugeait comme il eût fait un grand soulèvement physique et une révolution de régime dans les montagnes.

2331. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal du marquis de Dangeau — II » pp. 18-35

Cela paraissait tout simple et au roi et aux courtisans, et à Dangeau qui enregistre ces succès avec une parfaite bonne foi, de telle sorte que lorsqu’il écrit dans son journal, à la date du 19 octobre de cette année 1685 : « Outre la cassation de l’Édit de Nantes de 1598, on casse l’édit de Nîmes de 1629, et tous les édits et déclarations donnés en faveur de ceux de la religion prétendue réformée ; ordre à tous les ministres de sortir du royaume dans quinze jours ; les enfants qui naîtront seront baptisés et élevés dans la religion catholique, etc., etc. » ; et que lorsqu’à la date du 22, il ajoute : « Ce jour-là on enregistra dans tout le royaume la cassation de l’Édit de Nantes, et l’on commença à raser tous les temples qui restaient » ; en prenant note de ces actes considérables, il semble ne faire que constater un fait accompli et que rendre compte d’une formalité dernière. […] Après s’être attaché d’abord à l’électeur de Brandebourg dont il commanda l’armée, il lia partie avec le prince d’Orange, l’accompagna dans son expédition d’Angleterre, l’y soutint de son épée, et ne périt que dans la victoire, après avoir tout fait pour lui assurer la couronne. « Ne trouvez-vous pas bien extraordinaire, disait Louis XIV au duc de Villeroi, que M. de Schomberg, qui est Allemand, se soit fait naturaliser Hollandais, Anglais, Français et Portugais ? 

2332. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Préface pour les Maximes de La Rochefoucauld, (Édition elzévirienne de P. Jannet) 1853. » pp. 404-421

en 1613, entré dans le monde à seize ans, toute sa première jeunesse se passe sous Louis XIII ; c’est là qu’il est chevaleresque et romanesque, c’est là qu’il est dévoué, c’est là que son ambition première et généreuse se déguise à elle-même en pur amour, en sacrifice pour la reine persécutée, et se prodigue en mille beaux actes imprudents que Richelieu sut rabattre sans les trop punir. […] J’ai connu un homme qui était professeur, il fut quelque temps avant de le devenir ; un jour enfin, il eut une chaire, et put s’y installer dans toute son importance.

2333. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Voiture. Lettres et poésies, nouvelle édition revue, augmentée et annotée par M. Ubicini. 2 vol. in-18 (Paris, Charpentier). » pp. 192-209

Voiture était l’esprit le plus fin et le plus délicat, formé par la nature pour la compagnie la plus choisie, pour en être l’enfant gâté et les délices : il fut quelque temps avant de rencontrer ce doux climat auquel il était destiné. Il naquit à Amiens en 1598, aux limites des deux siècles.

2334. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — I » pp. 298-315

Il était de fière et forte race, descendant des anciens ducs et rois de Bretagne, allié et apparenté aux principales maisons souveraines : « Je me contenterai, écrit à ce sujet un de ses anciens biographes, de dire seulement une chose assez belle et assez particulière, c’est qu’en quelque lieu de l’Europe qu’il allât, il se trouvait parent de ceux qui y régnaient. » On sait le mot de sa sœur répondant à une déclaration galante de Henri IV : « Je suis trop pauvre pour être votre femme, et de trop bonne maison pour être votre maîtresse. » au château de Blein en Bretagne en 1579, Henri de Rohan, l’aîné de sa famille, fut donc élevé avec de grands soins par sa mère veuve, Catherine de Parthenay, qui mit de bonne heure sur lui son orgueil et ses espérances. […] La reine Élisabeth l’appelait son chevalier ; et le roi Jacques, le traitant en cousin, voulut même qu’il fût parrain d’un fils qui lui naissait en ce temps-là, et qui ne fut autre que l’infortuné Charles Ier.

2335. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Mémoires de Mme Elliot sur la Révolution française, traduits de l’anglais par M. le comte de Baillon » pp. 190-206

Grace Dalrymple, née en Écosse vers 1765, la plus jeune de trois Grâces ou de trois sœurs, fille d’un père avocat en renom et d’une mère très belle, élevée dans un couvent en France jusqu’à l’âge de quinze ans, mariée inconsidérément à un homme qui aurait pu être son père, et devenue ainsi madame Elliott, secoua vite le joug, amena le divorce, devint à Londres la maîtresse du Prince-régent, de qui elle eut une fille, puis la maîtresse du duc d’Orléans, pour qui elle vint d’Angleterre en France. […] Je viens d’en relire quelques-unes : celle de Mme Royale (la duchesse d’Angoulême), une relation auguste et simple ; celle de Mlle de Pons, depuis marquise de Tourzel, celle de Mme de Béarn, née Pauline de Tourzel.

2336. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Œuvres complètes d’Hyppolyte Rigault avec notice de M. Saint-Marc Girardin. »

en 1821, mort en 1858, dans sa trente-huitième année, nulle vie ne fut plus remplie que la sienne, et sans diversion aucune, par l’étude, par les lettres, par la culture continuelle de l’esprit, culture dans le cabinet, culture dans le monde et jusque dans les distractions apparentes, et aussi par les soins et les devoirs domestiques. […] Mais Rigault était professeur ; il était là comme chez lui, il y allait comme on va à la danse.

2337. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Des prochaines élections de l’Académie. »

Ce jeune homme est dans la pourpre ; lui aussi, il s’est donné la peine de naître.

2338. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Lettres inédites de Jean Racine et de Louis Racine, (précédées de Notices) » pp. 56-75

Elle était née peu de mois après la mort de son beau-père : cela allonge la chaîne. […] Il était noble, et il ne tenait qu’à lui en achetant une terre, un fief, d’avantager son aîné ; il y renonça quand il lui naquit un second fils.

2339. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Connaissait-on mieux la nature humaine au XVIIe siècle après la Fronde qu’au XVIIIe avant et après 89 ? »

On a beau être marin, il n’est rien de tel que de voir une tempête ; soldat, que de voir une bataille. […] Que serait-ce si l’on montrait dans son cadre de Passy, au milieu de notre monde du xviiie  siècle, Franklin, le patriarche souriant, le sage de l’avenir, aux remarques fines et utiles, aux vérités ingénieuses et fructueuses, et desquelles bon nombre sont nées parmi nous !

2340. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite) »

Je devais, après mon Gœtz et mon Werther, vérifier le mot d’un sage : « Lorsqu’on a fait quelque chose qui plaît au monde, le monde sait, s’arranger de manière à ce qu’on ne recommence pas. » En d’autres heures pourtant et dans l’habitude de la vie, il appréciait mieux son rare bonheur : ce bonheur avait été de venir à temps, en tête d’une grande époque qui naissait et qu’il avait en partie dirigée et conduite : « Je suis bien content, disait-il gaiement un jour qu’il venait de lire de jolis vers d’un tout jeune poëte, de n’avoir pas aujourd’hui dix-huit ans. […] Il le supposait dans une condition pareille, de parents tailleurs, à Weimar ou à Iéna, soumis à des traverses plus ou moins analogues, et il se demandait « quels fruits aurait portés ce même arbre, croissant dans un tel terrain, dans une autre atmosphère. » Gœthe rendait donc toute justice à l’air vif de Paris.

2341. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français »

Cependant les idiomes modernes, tels quels, étaient nés, ils étaient sortis de leurs langes et faisaient de toutes parts leurs vives et gaies enfances, leurs premières jeunesses ; le commun des gens, le peuple, avait besoin de drames à lui, avait faim de spectacles également dévotieux et émouvants, qu’il entendît, dans lesquels il intervînt et eût sa large part. […] Non qu’il fût impossible qu’un poëte de talent et de génie naquît vers le xve  siècle et, moins gêné alors par les données et les règles de la tradition sacrée, ne marquât de son cachet une œuvre qui fût par quelque coin originale et d’un mérite encore appréciable aujourd’hui.

2342. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Études de politique et de philosophie religieuse, par M. Adolphe Guéroult. »

Amis de l’ancien régime et partisans du droit divin, qui en étiez venus, en désespoir de cause, à préconiser le suffrage universel ; à qui (j’aime à le croire) la conviction était née à la longue, à force de vous répéter, et qui vous montrez encore tout prêts, dites-vous, mais moyennant, j’imagine, certaine condition secrète, à embrasser presque toutes les modernes libertés ; — partisans fermes et convaincus de la démocratie et des principes républicains, polémistes serrés et ardents, logiciens retors et inflexibles, qui, à l’extrémité de votre aile droite, trouvez moyen cependant de donner la main parfois à quelques-uns des champions les plus aigris de la légitimité ; — amis du régime parlementaire pur, et qui le tenez fort sincèrement, nonobstant tous encombres, pour l’instrument le plus sûr, le plus propre à garantir la stabilité et à procurer l’avancement graduel de la société ; — partisans de la liberté franche et entière, qui ne vous dissimulez aucun des périls, aucune des chances auxquelles elle peut conduire, mais qui virilement préférez l’orage même à la stagnation, la lutte à la possession, et qui, en vertu d’une philosophie méditée de longue main dans sa hardiesse, croyez en tout au triomphe du mieux dans l’humanité ; — amis ordinaires et moins élevés du bon sens et des opinions régnantes dans les classes laborieuses et industrielles du jour, et qui continuez avec vivacité, clarté, souvent avec esprit, les traditions d’un libéralisme, « nullement méprisable, quoique en apparence un peu vulgaire ; — beaux messieurs, écrivains de tour élégant, de parole harmonieuse et un peu vague, dont la prétention est d’embrasser de haut et d’unir dans un souple nœud bien des choses qui, pour être saisies, demanderaient pourtant à être serrées d’un peu plus près ; qui représentez bien plus un ton et une couleur de société, des influences et des opinions comme il faut, qu’un principe ; — vous tous, et j’en omets encore, et nous-mêmes, défenseurs dévoués d’un gouvernement que nous aimons et qui, déjà bon en soi et assez glorieux dans ses résultats, nous paraît compatible avec les perfectionnements désirables ; — nous tous donc, tous tant que nous sommes, il y a, nous pouvons le reconnaître, une place qui resterait encore vide entre nous et qui appellerait, un occupant, si M.  […] ce seul nom cependant est si beau, et la chose en elle-même si digne d’envie ; elle est si chère à ceux qui l’ont adoptée à l’heure où l’on croit et où l’on aime, et qui sont restés fidèles à ce premier idéal trop souvent brisé ; elle a été tellement notre rêve à tous, notre idole dans nos belles années ; elle répond si bien, jusque dans son vague, aux aspirations des âmes bien nées et trouve si bien son écho dans les nobles cœurs, qu’on hésite à venir y porter l’analyse, à la vouloir examiner et décomposer.

2343. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vie de Jésus, par M. Ernest Renan »

Si c’est là en effet le dernier mot de l’incrédulité, il faudra désormais autant et plus de foi pour croire à ces conséquences dites philosophiques ou historiques, à ces conjectures écloses et nées d’un seul cerveau, qu’à nous, chrétiens, pour continuer de croire à la tradition, à l’Église, au miracle visible d’un établissement divin toujours subsistant, au majestueux triomphe où l’évidence est écrite, au consentement universel tel qu’il résulte du concert des premiers et seuls témoins… » J’abrège. […] Il ne s’irritera pas, il s’emportera pas, il restera calme et patient, même serein ; il gardera son demi-sourire ; il retrouvera toute sa hauteur en ne répondant jamais.

2344. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid. »

Vinet aime plutôt à voir un noble cadet et le premier disciple du grand tragique : « Ce qu’il y a de certain, dit-il, c’est que Rotrou, trois ans après Corneille, et débutant au théâtre au même âge que ce dernier, c’est-à-dire trois ans après lui54, ne produisit ses deux bonnes pièces, Venceslas et Saint-Genest, qu’après les chefs-d’œuvre de Corneille, et que la distance qui sépare ces deux drames des autres œuvres de l’auteur marque suffisamment la source où il a puisé. […] Rambert n’est pas Français de naissance, mais il est Français de langue, étant dans la Suisse française ; il connaît Paris et y a vécu.

2345. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Jean-Bon Saint-André, sa vie et ses écrits. par M. Michel Nicolas. »

Jean-Bon, à Montauban le 25 février 1749, était d’une bonne famille de foulonniers ou fabricants de draps, protestante de religion. […] Le vieil homme aura ainsi tout le temps de se calmer et de s’apaiser : le nouvel homme aura tout le temps de se former et de naître.

2346. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, — Antiquité et Moyen Âge — Par M. J. Zeller. (Suite et fin.) »

Aussi ne trouve-t-on réellement à Rome, dès le principe, « qu’un seul art grand et original, l’architecture, parce qu’il est le plus utile. » De même « un seul des dons de l’esprit y naît naturellement, y atteint de soi-même tout son développement, et étend son influence sur tous les autres, l’éloquence. » Ici encore, une de ces pages concises et pleines, qui résument toute une perspective et une suite de vues : « Par leur caractère, par leurs institutions, les Romains sont naturellement un peuple, je ne dirai pas éloquent, mais oratoire. […] Toutes ces pensées et bien d’autres naissent à l’esprit, en lisant les chapitres nourris et sérieux de M. 

2347. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet »

Malouet, à Riom, en Auvergne, le 11 février 1740, n’avait pas moins de quarante-neuf ans quand les élections de 89 le pestèrent aux États-Généraux. […] Il appartenait à une famille d’humbles magistrats provinciaux ; il était dans cette condition d’honnête et solide médiocrité, entretenue durant quelques générations, et qui, pour l’individu distingué, est peut-être le plus sûr des points de départ.

2348. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre V. De la littérature latine, pendant que la république romaine durait encore » pp. 135-163

Je ne m’attacherai donc pas ici à l’analyse des effets semblables, qui devaient naître des mêmes causes. […] Quoique Cicéron soit mort sous le triumvirat d’Octave, son génie appartient en entier à la république ; et quoique Ovide, Virgile, Horace, soient nés pendant que la république subsistait encore, leurs écrits portent le caractère de l’influence monarchique.

2349. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre VI. De la philosophie » pp. 513-542

Les idées religieuses ne sont point contraires à la philosophie, puisqu’elles sont d’accord avec la raison ; le maintien des principes qui font la base de l’ordre social ne peut être contraire à la philosophie, puisque ces principes sont d’accord avec la raison ; mais les défenseurs des préjugés, c’est-à-dire, des droits injustes, des doctrines superstitieuses, des privilèges oppressifs, essaient de faire naître une opposition apparente entre la raison et la philosophie, afin de pouvoir soutenir qu’il existe des raisonnements qui interdisent le raisonnement, des vérités auxquelles il faut croire sans les approfondir, des principes qu’il faut admettre en se gardant de les analyser, enfin une sorte d’exercice de la pensée qui doit servir uniquement à convaincre de l’inutilité de la pensée. […] La vertu est de ce nombre ; elle est fille de la création, et non de l’analyse ; elle naît presque en même temps que l’instinct conservateur de la vie, et la pitié pour les autres se développe presque aussitôt que la crainte du mal qui peut nous arriver à nous-mêmes.

2350. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre premier. Les signes — Chapitre II. Des idées générales et de la substitution simple » pp. 33-54

De même, en entendant le mot polygone, je trace en moi-même fort indistinctement des lignes qui se coupent et tâchent de circonscrire un espace, sans que je sache encore si la figure qui est en train de naître sera quadrilatère ou pentagone. […] C’est cette tendance qui évoque en nous le nom ; quand elle naît, c’est ce nom seul qu’on imagine ou qu’on prononce.

2351. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Stéphane Mallarmé » pp. 146-168

à Paris le 18 mars 1842, d’une famille d’ancienne bourgeoisie mais sans fortune, il avait dû pourvoir de bonne heure à sa propre subsistance. […] « La causerie naissait vite, écrit Albert Mockel.

2352. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur Droz. » pp. 165-184

Joseph Droz, à Besançon, le 31 octobre 1773, d’une famille de magistrats et de jurisconsultes honorablement connue dans la province, avait reçu de ses pères comme par héritage la droiture de l’esprit, la douceur du cœur et la disposition au bien. Il était et il resta toute sa vie de la race des bons et des justes.

2353. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « La reine Marguerite. Ses mémoires et ses lettres. » pp. 182-200

Marguerite, née à Saint-Germain-en-Laye le 14 mai 1553, avait six ans quand son père, Henri II, fut tué dans ce fatal tournoi qui rompit la fortune de sa maison. […] On a, chemin faisant, de jolis tableaux flamands qu’elle rend à ravir : à Mons, par exemple, à ce festin de gala où la belle comtesse de Lalain (née Marguerite de Ligne), dont la beauté et le riche costume sont décrits si particulièrement, se fait apporter son enfant au maillot et lui donne à téter devant toute la compagnie, « ce qui eût été tenu à incivilité à quelque autre, dit Marguerite ; mais elle le faisait avec tant de grâce et de naïveté, comme toutes ses actions en étaient accompagnées, qu’elle en reçut autant de louanges que la compagnie de plaisir ».

2354. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — I. » pp. 201-219

Pierre-Augustin Caron, qui prit plus tard le nom de Beaumarchais, naquit à Paris le 24 janvier 1732, sur la paroisse Saint-Jacques-la-Boucherie. […] Ses imprudences et pétulances, selon lui, étaient celles « d’un homme passionné, poussé à bout, justement irrité, très plaisant et très éloquent ».

2355. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « L’abbé Gerbet. » pp. 378-396

en 1798 dans le Jura, à Poligny, il avait fait ses premières études dans sa ville natale, et, de là, était allé suivre son cours de philosophie à l’Académie de Besançon. […] Partout il est le même : figurez-vous une démarche longue et lente, un peu penchée, dans une paisible allée où l’on cause à deux du côté de l’ombre, et où il s’arrête souvent en causant ; voyez de près ce sourire affectueux et fin, cette physionomie bénigne où il se mêle quelque chose du Fléchier et du Fénelon ; écoutez cette parole ingénieuse, élevée, fertile en idées, un peu entrecoupée par la fatigue de la voix, et qui reprend haleine souvent ; remarquez, au milieu des vues de doctrine et des aperçus explicatifs qui s’essaient et naissent d’eux-mêmes sur ses lèvres, des mots heureux, des anecdotes agréables, un discours semé de souvenirs, orné proprement d’aménité : et ne demandez pas si c’est un autre, c’est lui.

2356. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — III. Franklin à Passy. (Fin.) » pp. 167-185

Mise en regard de la correspondance de Voltaire, celle de Franklin fait naître bien des pensées ; tout y est sain, honnête, et comme animé d’une vive et constante sérénité. […] Un homme n’est point complètement jusqu’à ce qu’il ait passé par la mort. » La fin paisible de ses vieux amis qui avaient vécu en justes lui paraissait comme un avant-goût du bonheur d’un autre monde.

2357. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « La Fontaine. » pp. 518-536

le 8 juillet 1624, à Château-Thierry, en Champagne, d’un père maître des eaux et forêts, Jean de La Fontaine paraît n’avoir reçu d’abord qu’une éducation assez négligée ; jeune, il étudiait selon les rencontres et lisait à l’aventure ce qui lui tombait sous la main. […] Les Contes lui seraient aisément venus dans ce lieu-là, non pas les Fables ; les belles fables de La Fontaine, très probablement, ne seraient jamais écloses dans les jardins de Vaux et au milieu de ces molles délices : il fallut, pour qu’elles pussent naître avec toute leur morale agréable et forte, que le bonhomme eût senti élever son génie dans la compagnie de Boileau, de Racine, de Molière, et que, sans se laisser éblouir par Louis XIV, il eût pourtant subi insensiblement l’ascendant glorieux de cette grandeur.

2358. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre III : La littérature du xviiie et du xixe  siècle »

La mélancolie, dira-t-on, est un sentiment de décadence : c’est un sentiment qui naît de la vue des ruines, du doute, du dégoût de la vie, c’est donc un sentiment peu viril et sans beauté. […] Il naît à l’approche des ruines ou après elles.

2359. (1912) L’art de lire « Chapitre VIII. Les ennemis de la lecture »

Ils éliminent les faux amis de la littérature, ceux qui ne liraient que s’il n’y avait pas d’autre distraction, ni d’autre passe-temps, gens par conséquent de très peu de goût, n’ayant pas la vocation et qui alimenteraient autant la basse littérature que la bonne et plutôt celle-là que celle-ci ; et ils laissent intacte la troupe de ceux qui sont véritablement nés pour lire. […] Non seulement ils ne vont pas à la découverte, ce qui est un des plus grands plaisirs de la lecture, mais ils lisent dans un temps où, de quelque caractère durable que soit le livre et dût-il être immortel, il n’a plus sa nouveauté, sa fraîcheur, son duvet, sa concordance avec les circonstances qui, sans l’avoir fait naître, ont contribué du moins à sa formation et surtout lui ont donné en partie sa couleur.

2360. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Fervaques et Bachaumont(1) » pp. 219-245

Elle est née corrompue comme elle est née blonde.

2361. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Alfred de Vigny »

Il en est qui disent qu’on naît poète, mais qu’on devient prosateur. Moi, je crois qu’on n’acquiert pas grand’chose dans l’ordre de l’intelligence et qu’on naît même ce qu’on doit devenir ; mais il n’en est pas moins vrai que Vigny, qui avait le génie poétique à fleur et à fond d’âme, n’avait qu’à fond d’âme le génie de la prose.

2362. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre premier. Le problème des genres littéraires et la loi de leur évolution » pp. 1-33

Or, les idées, aussi bien que les hommes, naissent les unes des autres ; elles ont leur jeunesse, leur maturité, et leur crise finale qui est un nouvel enfantement ; c’est leur évolution logique. […] Croce verra combien mon « système » diffère de la classification rigide encore en usage) que la satire n’est pas un « genre », pas plus que l’idylle, ou le poème héroï-comique, ou le roman champêtre… Ces combinaisons variées, dont nul ne saurait fixer le nombre ni la forme, naissent parfois de la fantaisie d’un génie et meurent avec lui, car les imitations qu’elles suscitent ne sont le plus souvent que de mauvaises copies et ne révèlent qu’une mode sans âme ; — d’autres fois, ces combinaisons (celles-là surtout qu’on essaie de grouper en « genre didactique »), sont tout simplement des œuvres de morale ou de science ; leur style agréable ne suffit pas à en faire des œuvres littéraires ; il s’agit d’un domaine intermédiaire, comme il y en a tant dans la vie où tout n’est que transition ; dans ces cas-là, qu’on commence par rendre courageusement à la morale et à la science tout ce qui n’est pas œuvre d’art ; il y a des documents d’une grande valeur psychologique qui sont sans « forme » au sens précis du mot, donc sans art ; il faut les connaître, les utiliser, en dire l’intention, la signification ; mais, loin de les mettre au nombre des œuvres d’art, dire pourquoi ce ne sont pas des œuvres d’art.

2363. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XII : Pourquoi l’éclectisme a-t-il réussi ? »

. — Sorti du sein des tempêtes, nourri dans le berceau d’une révolution, élevé sous la mâle discipline du génie de la guerre, le dix-neuvième siècle ne peut en vérité contempler son image et retrouver ses instincts dans une philosophie née à l’ombre des délices de Versailles, admirablement faite pour la décrépitude d’une monarchie arbitraire, mais non pour la vie laborieuse d’une jeune liberté environnée de périls97. […] Le système reste maître de l’enseignement, professeur et possesseur des générations qui naissent, défendu par une escorte d’hommes instruits, d’hommes de talent et d’hommes de cœur.

2364. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XIV : De la méthode (Suite) »

. — Portez-la dans la vie privée : vous verrez naître l’esprit intéressé et légiste, l’économie, la frugalité, l’avarice, l’avidité, toutes les coutumes calculatrices qui peuvent conserver et acquérir, les formes minutieuses de transmission juridique, les habitudes de chicane, toutes les dispositions qui sont une garantie ou une arme publique et légale. — Portez-la dans les affections privées : la famille, transformée en institution politique et despotique, fondée, non sur les sentiments naturels, mais sur une communauté d’obéissance et de rites, n’est plus que la chose et la propriété du père, sorte de province léguée chaque fois par une loi en présence de l’État, employée à fournir des soldats au public. — Portez-la dans la région : la région, fondée par l’esprit positif et pratique, dépourvue de philosophie et de poésie, prend pour dieux de sèches abstractions, des fléaux vénérés par crainte, des dieux étrangers importés par intérêt, la patrie adorée par orgueil ; pour culte une terreur sourde et superstitieuse, des cérémonies minutieuses, prosaïques et sanglantes ; pour prêtres des corps organisés de laïques, simples administrateurs, nommés dans l’intérêt de l’État et soumis aux pouvoirs civils. — Portez-la dans l’art : l’art, méprisé, composé d’importations ou de dépouilles, réduit à l’utile, ne produit rien par lui-même que des œuvres politiques et pratiques, documents d’administration, pamphlets, maximes de conduite ; aidé plus tard par la culture étrangère, il n’aboutit qu’à l’éloquence, arme de forum, à la satire, arme de morale, à l’histoire, recueil oratoire de souvenirs politiques ; il ne se développe que par l’imitation, et quand le génie de Rome périt sous un esprit nouveau. — Portez-la dans la science : la science, privée de l’esprit scientifique et philosophique, réduite à des imitations, à des traductions, à des applications, n’est populaire que par la morale, corps de règles pratiques, étudiées pour un but pratique, avec les Grecs pour guides ; et sa seule invention originale est la jurisprudence, compilation de lois, qui reste un manuel de juges, tant que la philosophie grecque n’est pas venue l’organiser et le rapprocher du droit naturel. […] C’est à ce moment que l’on sent naître en soi la notion de la Nature.

2365. (1888) Portraits de maîtres

La Colère de Samson est née d’une émotion violente, d’une souffrance véridique. […] Il faut apprendre à l’homme à croire en ses aptitudes morales et à se sentir pour la grandeur et pour le bien. […] Il arbore réellement à sa date le signe spécial de Paris où naquit Béranger. […] Cet enfant naquit à Bourg, le 17 février 1803. […] Je conçois des séries futures ou inconnues de formes et d’êtres qui me dépasseront en force et en lumière, autant que je dépasse le premier des anciens Océans.

2366. (1881) Études sur la littérature française moderne et contemporaine

L’éditeur était un certain juif italien, Guillaume Angelucci, à Venise, qui gardait soigneusement l’incognito et prenait en Angleterre le nom de William Hatkinson. […] Vous vous êtes donné lapeine de naître… ; tandis que moi, morbleu ! […] Quand la forme manque, rien n’existe, les choses qu’on a voulu exprimer ne sont point ; ce n’est pas assez de dire qu’elles mourront, elles ne sont pas même nées. […] Un mot n’est rien d’absolu, c’est un phénomène historique, il est , il vit, il mourra. […] Réfléchis-y froidement (et toute réflexion doit être froide, parce que nulle vérité n’est passion), la neutralité en 1830, quand le monde moral tout entier et le monde immoral sont sous les armes, quand on va livrer les plus grandes batailles intellectuelles dont jamais ait dépendu le sort des générations nées et à naître !

2367. (1895) Nouveaux essais sur la littérature contemporaine

que ne suis-je dans le saint archipel Aux siècles glorieux où la Terre inspirée Voyait le Ciel descendre à son premier appel. […] Leconte de Lisle au contraire, a toujours considéré que le premier bonheur pour l’homme étant « de ne pas naître », le second était de mourir, ce qui est la formule même du pessimisme de Schopenhauer et de Çakya-Mouni. […] Comment naît un peuple ? […] Il naît des hommes rares comme il en naît de parfaitement beaux, parce que la nature est fertile ou infinie même en combinaisons. […] N’est-ce pas à Saint-Malo que, non loin de la chambre où naquit Chateaubriand, on pourrait montrer le berceau de Lamennais ?

2368. (1902) La politique comparée de Montesquieu, Rousseau et Voltaire

il sera dans la nature de l’homme de revoir avec plaisir une maison où l’on est , un village où l’on a été nourri par une femme mercenaire, et il ne serait pas dans notre cœur d’aimer ceux qui ont pris un soin généreux de nos premières années ? […] Les hommes y ont péri par une maladie insensible et habituelle : nés dans la langueur et la misère… ils se sont vus détruire, souvent sans sentir les causes de leur destruction. […] Elle l’était tellement que certains abus de l’autorité royale étaient nés précisément de cette gêne qu’elle ressentait. […] On voit dans chaque famille religieuse une famille éternelle où il ne naît personne et qui s’entretient aux dépens de toutes les autres. […] Il n’y a rien de plus juste que la haine des démocrates modernes contre le christianisme, car c’est dans les entrailles mêmes du christianisme que sont nés ces Droits de l’homme, qui limitent les droits de l’Etat, et que, par conséquent, les démocrates ne peuvent souffrir.

2369. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Sur le Louis XVI de M. Amédée Renée » pp. 339-344

À défaut d’un homme d’État et comprenant d’instinct, par un premier coup d’œil, la part inévitable de pessimisme qui est à introduire dans le maniement même le plus libéral des hommes, il n’y avait plus que l’expérience qui pût éclairer et détromper graduellement ceux que les théories séduisaient.

2370. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Philosophie du costume contemporain » pp. 154-161

L’uniformité pratique de la mode virile, s’opposant au bariolage, à la diversité superficielle et aux artifices contraignants de la mode féminine, signifie aux yeux que l’homme est pour agir et la femme pour plaire, et nous suggère cette idée que l’extrême différenciation des costumes entre les sexes est peut-être une des marques de l’extrême civilisation.

2371. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Moréas, Jean (1856-1910) »

Paul Souchon Je ne crains pas de le déclarer : un grand poète nous est , un chef-d’œuvre a vu le jour avec le siècle.

2372. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XIX. Réflexions morales sur la maladie du journal » pp. 232-240

II Toutes les mœurs naissent, croissent, imprévues et rapides : vous diriez le succès d’un paradoxe.

2373. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Lutèce » pp. 28-35

Tout d’abord, il regretta amèrement de n’avoir pas été élevé chez les Jésuites, ce qui le privait d’une partie des sensations de son modèle ; — il déplora de n’être pas duc, car il ne comptait ainsi parmi ses aïeux aucun mignon de Henri III et se trouvait dépourvu de précieuses hérédités.

2374. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre premier. Impossibilité de s’en tenir à l’étude de quelques grandes œuvres » pp. 108-111

A toute époque, il y a dans une société certaines idées nouvelles qui naissent à la fois dans un grand nombre d’esprits, des germes de pensées et de sentiments qu’on sent flotter autour de soi et qu’on respire, pour ainsi dire, dans l’air ambiant.

2375. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 169-178

DIDEROT, [Denis] de l’Académie de Berlin, à Langres en 1714, Auteur plus prôné que savant, plus savant qu’homme d’esprit, plus homme d’esprit qu’homme de génie ; Ecrivain incorrect, Traducteur infidele, Métaphysicien hardi, Moraliste dangereux, mauvais Géometre, Physicien médiocre, Philosophe enthousiaste, Littérateur enfin qui a fait beaucoup d’Ouvrages, sans qu’on puisse dire que nous ayons de lui un bon Livre.

2376. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Lucrèce Borgia » (1833) »

L’idée qui a produit le Roi s’amuse et l’idée qui a produit Lucrèce Borgia sont nées au même moment sur le même point du cœur.

2377. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Introduction »

Comme il naît beaucoup plus d’individus qu’il n’en peut vivre, et comme, en conséquence, la lutte se renouvelle souvent entre eux au sujet des moyens d’existence, il s’ensuit que, si quelque être varie, si légèrement que ce puisse être, d’une manière qui lui soit personnellement utile sous des conditions de vie complexes, et quelquefois variables, il aura toute chance de survivre et sera ainsi naturellement élu ou choisi.

2378. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Examen du clair-obscur » pp. 34-38

Outre ce que le peintre perdrait du côté de la variété des formes et des lumières qui naissent des plis et du chiffonnage des vieux habits, il y a encore une raison qui agit en nous sans que nous nous en apercevions, c’est qu’un habit n’est neuf que pendant quelques jours et qu’il est vieux pendant longtemps, et qu’il faut prendre les choses dans l’état qu’elles ont d’une manière la plus durable.

2379. (1767) Salon de 1767 « Peintures — [autres peintres] » pp. 317-320

Ce Parocel que j’ai tant maltraité, ce Brenet sur lequel j’ai un peu exercé ma gaieté, obtiendraient peut-être de vous et de moi quelque éloge, si l’un chaud, bouillant, se chargeait d’une décoration ou de quelques-uns de ces ouvrages éphémères qui demandent beaucoup d’imagination et de faire ; et l’autre, d’un sujet historique, si les besoins domestiques ne le pressaient point, et s’il n’entendait pas sans cesse à ses oreilles le cri de la misère, qui lui demande du pain, des jupons, des souliers, un bonnet.

2380. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 3, que le merite principal des poëmes et des tableaux consiste à imiter les objets qui auroient excité en nous des passions réelles. Les passions que ces imitations font naître en nous ne sont que superficielles » pp. 25-33

Les passions que ces imitations font naître en nous ne sont que superficielles Quand les passions réelles et veritables qui procurent à l’ame ses sensations les plus vives ont des retours si facheux, parce que les momens heureux dont elles font joüir sont suivis de journées si tristes, l’art ne pourroit-il pas trouver le moïen de separer les mauvaises suites de la plûpart des passions d’avec ce qu’elles ont d’agréable ?

2381. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 31, que le jugement du public ne se retracte point, et qu’il se perfectionne toujours » pp. 422-431

Mais comme il met en oeuvre hardiment, c’est là toute sa verve, comme il emploïe sans se laisser géner aux regles de notre sintaxe, les beautez ramassées dans ses lectures, elles semblent nées de son invention.

2382. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Émile Augier »

Un marquis tarte à la crème, deux caillettes, dont l’une n’est que la Bélise de Molière servilement copiée, et un type d’Henri Monnier, à présent commun comme la borne, voilà les épouvantables éléments dont se compose le cléricalisme qui fait trembler, et auquel Augier, cette tête de linotte dramatique, oppose, pour l’aplatir, Giboyer le vénal, monsieur son bâtard et la demoiselle Fernande, née de l’adultère… La critique, cette courtisane de tous les publics dont elle devrait être l’institutrice, a battu des mains comme un simple Gringalet du lustre, et fait ensuite, sur le tremplin du lieu commun, sa pirouette mélancolique en l’honneur des partis vaincus.

2383. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Jean-Jacques Ampère »

Ampère, à Lyon en août 180075, fils du savant géomètre et physicien illustre, fut élevé et nourri à Paris à partir de 1804. […] Un jour que Chateaubriand entrait chez Mme de F…, fille de la marquise d’Aguesseau, et qui, née en Angleterre, avait le culte de Byron, il vit sur une console un buste nouvellement placé, et il demanda en souriant qui c’était ; sur la réponse que c’était lord Byron, il fit un geste en arrière, et son noble visage ne put réprimer une de ces grimaces soudaines auxquelles il était trop sujet. […] J’étais dans une complète illusion, née de celle du cher malade avec lequel je n’avais cessé de correspondre que lors des accidents du mois de janvier, et alors une lettre de M.  […] « Jean-Jacques-Antoine Ampère, le 24 thermidor an viii (12 août 1800), fils d’André-Marie Ampère et d’Antoinette Carron ; à Lyon, grande rue Mercière. » (Extrait des registres de l’état civil, préfecture du Rhône.) […] Il mourut à Bagdad pendant l’expédition scientifique de la Mésopotamie, le 30 novembre 1855, à l’âge de soixante ans, étant le 15 avril 1795.

2384. (1927) André Gide pp. 8-126

Cette perfection a existé, dans le paradis terrestre, chaste éden, jardin des idées : mais Adam s’est ennuyé de cette splendide immobilité ; d’un geste, il a détruit la féerie idéale et fait naître la vie. […] Ajoutez-y le goût de la dissimilation et du risque, la curiosité non pas tant des événements que de lui-même, le désir d’embarrasser la police qui pourra retrouver le motif du crime, puisque le crime sera immotivé… Avouons que la plaisanterie est un peu forte ! […] Et Saunderson répondait à ce même ministre qui lui développait la preuve de l’existence de Dieu par les merveilles de la nature : « Eh, Monsieur, laissez là tout ce beau spectacle qui n’a jamais été fait pour moi… Si vous voulez que je croie en Dieu, il faut que vous me le fassiez toucher. » A ce propos, Voltaire écrivait à Diderot : « Je vous avoue que je ne suis point du tout de l’avis de Saunderson qui nie Dieu parce qu’il est aveugle. » Et il est vrai que cette cécité ne démontre pas l’athéisme ; mais elle n’est peut-être pas non plus un motif d’hymnes jaculatoires et de Te Deum. […] Mais est-il bien sûr que les aveugles nés eux-mêmes n’aient aucun soupçon des couleurs ? […] Celle-ci est pure et innocente, assurément, mais comme toute jeune fille bien née et bien élevée, et sa cécité n’y est pour rien.

2385. (1904) Zangwill pp. 7-90

Il ne faut pas trop se hasarder en conjectures, mais enfin c’est parce qu’il y a une France, ce me semble, qu’il y a eu un La Fontaine et des Français. » Mon Dieu oui ; seulement il y a une France pour tout le monde, la France luit pour tout le monde, et tous les Français, s’ils seront toujours français, ne sont pas La Fontaine ; je n’insiste pas sur toutes ces difficultés, sur toutes ces contrariétés ; je m’en tiens pour aujourd’hui à la forme même du connaissement ; la méthode ne se révèle pas dans toutes les œuvres modernes partout avec une aussi haute audace ; elle ne fait pas dans toutes les œuvres modernes partout l’objet d’une aussi manifeste déclaration que dans cet éminent La Fontaine ; elle est ailleurs plus ou moins dissimulée, plus ou moins implicite ; mais c’est essentiellement, éminemment, la méthode historique moderne, obtenue par le transport, par le transfert direct, en bloc, des méthodes scientifiques modernes dans le domaine de l’histoire ; l’auteur, en bon compagnon, commence par faire son tour de France ; il ferait son tour du monde, s’il était meilleur compagnon ; et quand il a fini son tour du pays, il commence l’autre tour, afin de ne point tomber par mégarde au cœur de son sujet, il commence le tour le plus cher à tout historien bien , le tour des livres et des bibliothèques ; avec ce tour commencera le paragraphe deux. […] Quel historien contemporain, quel petit-fils, quel petit-neveu du vieil homme ne reculera de saisissement devant de telles affirmations, devant de telles présomptions, devant cet admirable et tranquille orgueil, devant ces certitudes et ces limitations ; une humanité Dieu, si parfaitement emplie de sa mémoire totale qu’elle n’a plus rien à connaître désormais ; une humanité Dieu, arrêtée comme un Dieu dans la contemplation de sa totale connaissance, ayant si complètement, si parfaitement épuisé le détail du réel qu’elle est arrivée au bout, et qu’elle s’y tient ; qui au besoin, parmi les historiens du temps présent, ne désavouera les ambitions de l’aïeul et qui ne les traitera de chimères et d’imaginations feintes ; qui ne les reniera, car nous n’avons pas toujours le courage d’avouer nos aïeux, de déclarer nos origines, et de qui nous sommes nés, et d’où nous descendons ; les jeunes gens d’aujourd’hui ne reconnaissent pas toujours les grands ancêtres ; ce ne sont point les pères qui ne reconnaissent pas leurs fils, mais les fils qui ne reconnaissent pas leurs pères ; et comme nos politiciens bourgeois ne reconnaissent pas volontiers leurs grands ancêtres de la révolution française, ainsi nos modestes historiens ne reconnaissent pas toujours leurs grands ancêtres de la révolution mentale moderne, les innovateurs des méthodes historiques, les créateurs du monde intellectuel moderne ; et puis, depuis le temps des grands vieux, nous avons reçu de rudes avertissements ; pour deux raisons, l’une recouvrant l’autre, nul aujourd’hui n’avancerait que toute l’histoire du monde est sur le point d’aboutir, nul aujourd’hui, de tous les historiens, ne souscrirait aux anticipations aventurées, aux grandes ambitions pleines de Renan. Premièrement pour des raisons d’histoire même ; il est arrivé en très grand, pour l’histoire, ce qui arrive généralement des constructions navales françaises ; on n’en voit pas la fin ; quand on mit l’histoire en chantier, armé, ou, pour dire le mot, outillé des méthodes modernes, les innovateurs en firent le devis ; mais à mesure qu’on avançait, et que justement parti des temps antiques on se mouvait au-devant des temps modernes, les mécomptes se multipliaient ; ils se sont si bien multipliés qu’aujourd’hui nul n’oserait en pronostiquer la fin, ni annoncer la fin du travail ; le seul historien de la révolution française que je connaisse personnellement qui soit exactement sérieux nous dira tant que nous le voudrons que pour mener à bien la seule histoire de la révolution française il faudrait des milliers de vies de véritables historiens ; or on ne voit pas qu’il en naisse des milliers ; et nous sommes fort loin de compte. […] Si telle est vraiment l’atteinte obtenue par les théories particulières, quelle ne sera pas la totale atteinte obtenue par la conclusion, où se ramassent et culminent toutes les ambitions des théories particulières ; je ne puis citer les théories particulières ; il faudrait remonter de la fin du volume au commencement, il faudrait citer presque tout le volume ; je cite au long la conclusion ; pourquoi n’éprouvons-nous que de l’indifférence quand nous découpons notre exemplaire de Taine, et pourquoi ne pouvons-nous découper sans regret notre exemplaire de Renan ; ce n’est point, comme le dirait un historien des réalités économiques, parce que les Renan coûtent sept cinquante en librairie et parce que les Taine, chez Hachette, ne coûtent que trois francs cinquante ; et pourquoi, découpant du Renan, recevons-nous une impression de mutilation que nous ne recevons pas découpant du Taine ; c’est que, malgré tout, un livre de Taine est pour nous un volume, et qu’un livre de Renan est pour nous plus qu’un livre ; et pourquoi ne peut-on pas copier du Taine, et peut-on copier du Renan, en se trompant, il est vrai ; et pourquoi est-ce un bon plaisir que de corriger sur épreuves un texte de Renan, et se fait-on un devoir de [corriger sur épreuves un texte de Taine ; telle est la différence que je vois entre les héritages laissés par ces deux grands maîtres de la pensée moderne. « J’ai voulu montrer », dit Taine en forme de conclusion : « J’ai voulu montrer la formation complète d’une œuvre poétique et chercher par un exemple en quoi consiste le beau et comment il naît. […] Ainsi sont nés La Fontaine en France au dix-septième siècle, Shakespeare en Angleterre pendant la Renaissance, Goethe en Allemagne de nos jours.

2386. (1890) Derniers essais de littérature et d’esthétique

En notre propre siècle, elle a chanté pour nous, et ce pays-ci l’a fait naître pour la seconde fois. […] Chaque mois, à mesure qu’il arrive, reçoit des éloges nouveaux et fait naître une musique toute différente de la nôtre. Juillet est « une dame, née dans le vent et la pluie ». […] Elle est pauvre, mais bien née, car elle est la fille unique de M.  […] aux Indes, de parents de pure race hindoue, il a été élevé uniquement en Angleterre.

2387. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome II pp. 1-419

Laure de Noves, qu’il devait immortaliser dans ses chants, naissait quatre ans plus tard. […] Ainsi qu’il a plu à notre père éternel, chacune de nous deux est née immortelle. […] Heureuse dans toutes les autres choses, je me plaignais d’une seule, d’être née dans un lieu trop peu illustre. […] Supposez Pétrarque sous l’empire du polythéisme, et les sentiments exprimés dans ses œuvres italiennes ne se comprennent plus. […] Et, pour lui, l’exaltation naît de l’excès même du travail.

2388. (1878) Nos gens de lettres : leur caractère et leurs œuvres pp. -316

On juge l’œuvre nouvelle isolément, et comme si l’on était de la veille. […] Champfleury est pour le théâtre. […] Et, parmi ceux-là, il en est de nés avec une tournure d’esprit très vive : les malheureux ! […] Nous sommes pour l’article vif et court, nous sommes nés pour le journal. […] ils ne sont donc nés nulle part ! 

2389. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXVII » pp. 306-312

Quelques nobles mouvements naturels et simples viennent par endroits donner jour aux émotions que fait naître un tel spectacle : l’historien, sans intervenir trop fréquemment, est loin d’être impassible.

2390. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Desbordes-Valmore, Marceline (1786-1859) »

Théodore de Banville Ne me demandez pas comment, née à une époque où la poésie s’était faite romance et chantait les hussards vêtus d’azur, — où les robes étaient, comme dans Marie, des « robes de bergère », cette muse, cette femme amoureuse et désolée, n’a pu être entachée par le ridicule environnant : ceci prouve seulement que le génie est une flamme pure, inextinguible, qui redonne à tout la splendeur native !

2391. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — F — Fort, Paul (1872-1960) »

………………………………………………………………………………………… « Jalousies, vous naissez.

2392. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « La réforme prosodique » pp. 120-128

Sans s’embarrasser d’une barrière inutile, il donna au vers ternaire le droit de cité : Il a vaincu — la Femme belle — au cœur subtil… Néoptolème — âme charmante — et chaste tête… Et sur mon cœur — qu’il pénétrait — plein de pitié… Ces braves gens — que le Journal — rend un peu sots… Quoi que j’en aie — et que je rie — ou que je pleure… Rien de meilleur — à respirer — que votre odeur… Pour supporter — tant de douleur — démesurée… Pour, disais-tu, —  les encadrer — bien gentiment… Cette coupe nouvelle de vers, d’où l’on allait tirer des effets si imprévus, offrait toutes les garanties d’une réforme née viable, puisqu’elle était l’épanouissement naturel d’une idée lentement mûrie et qu’elle avait subi le contrôle à la fois du Génie et du Temps.

2393. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre III » pp. 30-37

Le marquis d’Urfé, à Marseille, était un homme de qualité, d’origine allemande, dont la famille habitait le Forez : il était allié de la maison de Savoie, et vivait à la cour de Turin où il était bien venu.

2394. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre VIII » pp. 70-76

Les sympathies et les antipathies naturelles sont des lois de la morale, intimées à tous les cœurs bien nés.

2395. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préfaces des « Odes et Ballades » (1822-1853) — Préface de 1826 »

Chaque plante, chaque arbuste, chaque arbre naît dans sa saison, croît en son lieu, produit son fruit, meurt à son temps.

2396. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — L’abbé Boileau, et Jean-Baptiste Thiers. » pp. 297-306

Elle naquit en Italie, vers le treizième siècle, d’un mélange monstrueux de dévotion & de crime.

2397. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — S’il est plus aisé, de faire une belle action, qu’une belle page. » pp. 539-539

Il y a des hommes bien heureusement nés.

2398. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 17, quand ont fini les représentations somptueuses des anciens. De l’excellence de leurs chants » pp. 296-308

Lorsque cet évenement arriva, saint Gregoire Le Grand, le même qui a composé ou reglé l’office et le chant gregorien qui sont encore en usage dans un très-grand nombre d’églises catholiques, étoit déja .

2399. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre viii »

Supposez Karl Marx ignorant ces deux pays, il eût ignoré comment naissent les idéals ouvriers.

2400. (1905) Propos littéraires. Troisième série

Il était pour le gouvernement. […] Quelque chose est désormais, qui est nouveau dans le monde, et qui est adorable. […] On naît savant. Il était tel. […] Ils étaient nés fureteurs.

2401. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome I

Et comme la philologie s’est jointe à ce concept philosophique pour le soutenir avec une rigueur spécieuse, toute une nouvelle critique est née dont l’œuvre s’accomplit encore devant nos yeux. […] » Et ailleurs : « C’est étrange, comme je suis avec peu de foi au bonheur. […] Ils auraient développé leur pleine vigueur s’ils étaient nés dans un monde plus jeune. […] la plus inguérissable de toutes, celle que nulle meurtrissure du dehors ne nous a infligée, et qui, née, pour ainsi dire, de la substance même du cœur, comme un cancer naît de la chair qu’il dévore, se nourrit aussi de toute notre substance et transforme en sa corruption la sève généreuse de la vie. […] On verra que ces deux éléments une fois donnés, une certaine conception de l’âme humaine devait naître, et, par voie de conséquence, une certaine conception de la politique contemporaine.

2402. (1894) Les maîtres de l’histoire : Renan, Taine, Michelet pp. -312

» De ce tendre amour pour la nature sont nés l’Oiseau, l’Insecte, la Mer, la Montagne. […] Ce désir intense ne peut naître que dans les esprits mal satisfaits des aliments qui leur sont donnés. […] L’âme humaine naît innocente et contient en elle les éléments de tout développement intellectuel et moral. […] Les livres tels qu’il les désirait commencent à naître, et il aura contribué à leur éclosion. […] Il lui semble naturel de dire en même temps : « J’aime la mort » et : « Nous sommes nés pour l’action ».

2403. (1774) Correspondance générale

Combien vous êtes heureuse, princesse, d’être née musicienne ! […] Croyez-moi, faites-nous d’excellente musique, faites-nous-en pendant longtemps, et ne vous exposez pas davantage à devenir ce que tant de gens que nous méprisons sont nés. […] Songez, madame, que la Providence vous a fait naître pour son apologie. […] « Tous les biographes font naître Fenouillot de Falbaire en 1727. […] Denis Dechanet, dit Desessarts, à Langres en 1737, mort en 1793, excellait dans les financiers, les manteaux et les grimes.

2404. (1896) Psychologie de l’attention (3e éd.)

L’acte d’attention peut-il augmenter l’activité vasculaire des ganglions sensoriels et y faire naître des sensations subjectives ? […] Comment donc est-elle née ? Elle est née de la nécessité, sous la pression du besoin et avec le progrès de l’intelligence. […] Elle est donc née sous la pression de la nécessité et de l’éducation que donnent les choses. […] Il naît, comme tout autre état de conscience, au gré des circonstances ; mais ce qui l’en distingue, c’est qu’il est maintenu.

2405. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre III. La nouvelle langue. » pp. 165-234

Le coucou jette sa voix monotone comme un soupir douloureux et tendre entre les troncs blancs des frênes ; le rossignol fait rouler et ruisseler ses notes triomphantes par-dessus la voûte du feuillage ; le rêve naît de lui-même, et Chaucer les entend disputer sur l’amour. […] j’étais toute fringante, et belle, et riche, et jeune et bien née. » Quel mot ! […] Tous ces récits sont liés, et beaucoup mieux que chez Boccace, par de petits incidents vrais, qui naissent du caractère des personnages, et tels, qu’on en rencontre en voyage. […] Il en est ainsi des autres ; c’est pourquoi, selon les variations, la naissance, la floraison, le dépérissement ou l’inertie de la conception maîtresse, la littérature varie, naît, fleurit, dégénère ou finit. […] entre 1328 et 1345, mort en 1400.

2406. (1903) Articles de la Revue bleue (1903) pp. 175-627

En voici le thème : « Dans une des plus anciennes, des plus nobles et des plus riches familles d’Angleterre, où tous ont adoré les chevaux à la passion, un enfant va naître quand son père meurt. […] Enfin, son enfant naît, mais le rêve de toute la race a pris corps et forme, lady Hastings donne le jour à un centaure. […] Dans le dernier numéro d’une jeune revue qui naît sur les ruines de ses aînées qui meurent, (n’est-ce pas la loi de la vie ?) […] Qu’on relise la plupart des poèmes de Shelley et sa très belle Défense de la Poésie, l’entretien de Goethe avec Falk après les funérailles de Wieland, le monologue de Conrad de Mickiewicz, ou qu’on fasse appel à la correspondance et aux œuvres de Victor Hugo à la fin de sa vie, on verra que tous quatre, avec les seules différences que pouvait faire naître leur originalité propre, ont témoigné à ce sujet d’une remarquable similitude de vues. […] Lorsque le romantisme, préparé en France par Rousseau et Diderot, Mme de Staël et Chateaubriand, naquit chez nous, il arrivait à son heure.

2407. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « MÉLEAGRE. » pp. 407-444

Pour moi, je ne serai content que lorsqu’on aura osé traduire et rendre au vif en français, autant qu’il se peut, ces naïvetés mêmes, ces négligences aimables, ce désordre apparent, d’un art caché, par où se révèle la passion, et qui insinue la persuasion dans les cœurs, ces hardiesses naturelles qui n’offensent jamais la beauté, mais qui pourtant ne s’y voilent pas, ne s’y confondent pas toujours. […] La poésie des Latins, au contraire, était née tard et d’une étude savante ; elle n’avait pas eu d’enfance. […] Les belles œuvres industrieuses occupent les abeilles nées des flancs des taureaux, et, assises sur la ruche, elles fabriquent les blanches beautés des rayons humides aux mille trous.

2408. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « M. DE LA ROCHEFOUCAULD » pp. 288-321

en 1613, entré dans le monde dès l’âge de seize ans, il n’avait pas étudié, et ne mêlait à sa vivacité d’esprit qu’un bon sens naturel encore masqué d’une grande imagination. […] « On a bien de la peine à rompre, quand on ne s’aime plus. » On en était à ce point de difficulté : M. de Nemours le trancha, et M. de La Rochefoucauld saisit avec joie une occasion d’être libre, en faisant l’offensé : « Quand nous sommes las d’aimer, nous sommes bien aises qu’on nous devienne infidèle pour nous dégager de notre fidélité. » Il fut donc bien aise, mais non pas sans mélange ni sans des retours amers : « La jalousie, il l’a dit, naît avec l’amour ; mais elle ne meurt pas toujours avec lui. » Le châtiment de ces sortes de liaisons, c’est qu’on souffre également de les porter et de les rompre. […] Mais le jeune duc de Longueville, qui fut des victimes, durant la première guerre de Paris, lui était plus cher que tout.

2409. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre II. Les bêtes »

L’animal contient tous les matériaux de l’homme, sensations, jugements, images, et, de ces matériaux assemblés par une loi nouvelle, naît la raison, comme des corps minéraux liés par une loi nouvelle naît la vie. […] — Comment l’aurais-je fait si je n’étais pas  ?

2410. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIIe entretien. Poésie lyrique. David (2e partie) » pp. 157-220

« Que ces pervers se fondent comme la pluie, comme le limaçon qui se fond en traînant sur la terre humide, comme l’avorton avant terme et qui n’a pas vu la lumière ! […] « Avant que les montagnes fussent nées, avant que les cieux et la terre fussent éclos de l’éternité jusqu’à l’éternité, tu es Dieu ! […] « Tu répands l’humanité comme l’eau ; ils sont, les hommes, comme un sommeil, comme une herbe née du matin !

2411. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIIe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (1re partie). Littérature scientifique » pp. 221-288

Il naquit à Tégel, le 14 septembre 1769. […] Qu’est-ce que les volcans, comment sont-ils nés, comment fonctionnent-ils ? […] Les beaux végétaux que jadis il avait admirés dans les serres chaudes de Vienne et de Schœnbrunn, il les trouvait là, luxuriants, dans leur sauvage liberté, sur le sol qui les avait vus naître.

2412. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Figurines (Deuxième Série) » pp. 103-153

Pendant trente ans Vigny fut le garde-malade patient et assidu de sa femme, massive, paralytique, demi-aveugle et qui, nous dit M. de Ratisbonne, « née en Angleterre, avait oublié l’anglais et n’avait jamais réussi à apprendre le français, ce qui rendait la conversation assez difficile » ; ne la quittant jamais, s’interdisant pour elle toute distraction, tout voyage, presque toute absence. […] Les gentilshommes ni ne meurent ni ne font la fête comme ceux qui ne sont pas « nés ». […] d’un vieux sang républicain et très pur ; muni des meilleures « humanités » ; formé à la fois par la fréquentation du monde, par l’étude de l’histoire et de l’économie politique, et par de longs voyages en Amérique et en Allemagne (tout à fait l’éducation d’un homme politique d’outre-Manche, comme vous voyez) ; honnête homme avec raffinement ; très courageux, et du courage le plus allègre ; et, par surcroît, ayant eu l’esprit de n’être pas encore ministre, il m’apparaît, j’ai plaisir à le dire, comme une des grandes espérances de notre pays.

2413. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre V. Le Séminaire Saint-Sulpice (1882) »

Que de fois j’ai désiré que l’homme naquît ou tout à fait libre ou dénué de liberté. Il serait moins à plaindre s’il naissait comme la plante invariablement fixée au sol qui doit la nourrir. […] Je regrette quelquefois de n’être pas dans un pays où les liens de l’orthodoxie fussent moins resserrés que dans les pays catholiques ; car, à tout prix, je veux être chrétien, mais je ne puis être orthodoxe.

2414. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VIII, les Perses d’Eschyle. »

Si le théâtre athénien domina et inspira tous les autres, c’est qu’Athènes avait été l’âme de ces grandes luttes ; c’est que seule elle avait eu l’idée d’une Patrie commune se levant en masse contre les Barbares, et que cette patrie était née des efforts magnanimes qu’elle fit pour la concevoir. […] Eschyle y combattit, Sophocle dansa autour de ses trophées, Euripide naquit le jour de la bataille. […] … Je suis pour la ruine de ma race.

2415. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1878 » pp. 4-51

Gambetta arrive essoufflé, la voix rauque, se présentant avec une espèce de dandinement roulant, titubant, et toutes les marques et les apparences d’une caducité extraordinaire chez un homme, en 1838. […] Les gens nés au-delà de la Loire, ne savent pas écrire la prose française… Moi ce que j’étais, un imaginateur… Vous ne vous doutez pas de ce que j’ai dans la tête… Eh bien, sans vous, je ne me serais pas préoccupé de cette chienne de langue… et j’aurais pondu, pondu dans la quiétude. » Vendredi 7 juin Le Marsaud qui signe les billets de banque, est un de ces vieillards qui a vu Paris, du temps des galeries de Bois, et qui, à propos de leur disparition, dit avec une indescriptible mélancolie : « Paris a bien perdu !  […] Jeudi 18 juillet En réfléchissant combien mon frère et moi, nous sommes nés différents des autres, combien notre manière de voir, de sentir, de juger était particulière, — et cela tout naturellement et sans affectation et sans pose — combien en un mot notre nous n’était pas une originalité acquise à la force du poignet, je ne puis m’empêcher de croire que l’œuvre que nous avons produit, ne soit pas un œuvre très différent de celui des autres.

2416. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre IV. Shakespeare l’ancien »

Corinthe, Épidaure, Œdepsus, Gythium, Chéronée, où Plutarque devait naître, Thèbes, où était la maison de Pindare, Mantinée, où était la gloire d’Épaminondas, toutes ces villes dorées repoussaient l’Inconnu qu’on entrevoyait comme une nuée derrière le Caucase. […] Il fait célébrer par le chœur « Susicanès et Pégastagon, nés en Égypte, et « le chef de Memphis, la ville sacrée ». […] Il était à Eleusis, et non seulement éleusien, mais éleusiaque, c’est-à-dire croyant.

2417. (1913) La Fontaine « VIII. Ses fables — conclusions. »

De là naîtront engins à vous envelopper, Et lacets pour vous attraper, Enfin mainte et mainte machine Qui causera dans la saison Votre mort ou votre prison : Gare la cage ou le chaudron ! […] Victor Hugo, peignant la cour de Versailles, et la peignant sous un jour odieux, bien entendu  vous connaissez ses habitudes littéraires et historiques surtout  Victor Hugo songe à La Fontaine et dit : La Fontaine offrait ses fables, Et soudain, autour de lui, Les courtisans presque affables, Les ducs au sinistre ennui, Les Louvois nés pour proscrire, Les vils Chamillard rampants, Gais, tournaient leur noir sourire Vers ce charmeur de serpents. […] La gloire de La Fontaine est indestructible, mais la maison où il est , à Château-Thierry, ne l’est pas.

2418. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — I. » pp. 204-223

à Dinan en Bretagne, le 12 février 1704, d’une honnête famille de commerçants, le dernier venu des enfants, il fut l’objet des soins de sa mère veuve, personne de mérite, de raison, qui ne mourut qu’à plus de cent ans, et quelques années seulement avant son fils. […] Ils ont des inconvénients pour la conduite, et ne sont propres qu’aux révolutions ; ils sont nés pour édifier ou pour détruire.

2419. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — II. (Fin.) » pp. 322-341

Sur les bords de l’Isère, apercevant les ruines du château Bayard : « Ici naquit Pierre Du Terrail, cet homme si simple, dit Beyle, qui, comme le marquis de Posa de Schiller, semble appartenir par l’élévation et la sérénité de l’âme à un siècle plus avancé que celui où il vécut. » Mais pourquoi, à la page suivante, en visitant le château de Tencin, Beyle, venant à nommer le cardinal Dubois, tente-t-il en deux mots une réhabilitation qui crie : « La France l’admirerait, dit-il de ce cardinal, s’il fût grand seigneur ? 

2420. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le marquis de la Fare, ou un paresseux. » pp. 389-408

en 1644 d’une noble famille du Vivarais, fils d’un père homme de mérite et qui avait laissé de bons souvenirs, il entra dans le monde à dix-huit ans (1662), l’année même où Louis XIV, affranchi de la tutelle de Mazarin, préludait à sa royauté sérieuse : « Ma figure, dit-il, qui n’était pas déplaisante, quoique je ne fusse pas du premier ordre des gens bien faits, mes manières, mon humeur et mon esprit qui étaient doux, faisaient un tout qui plaisait à tout le monde, et peu de gens en y entrant ont été mieux reçus. » Mme de Montausier, cette personne de considération, lui témoignait de l’amitié en souvenir de son père, et l’appuyait de son crédit. […] Il est évident qu’il ne croit pas à la liberté dans le sens philosophique du mot ; il explique toute la diversité qu’on voit dans les pensées et par conséquent dans la vie des hommes, indépendamment des divers âges du monde et des états ou degrés de civilisation où ils naissent, par le tempérament, la fortune et l’habitude ; et il en vient ainsi, d’une manière un peu couverte, à exposer ce que nous appellerions sa philosophie de l’histoire.

2421. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Instruction générale sur l’exécution du plan d’études des lycées, adressée à MM. les recteurs, par M. Fortoul, ministre de l’Instruction publique » pp. 271-288

Mais aujourd’hui il ne s’agit de rien sacrifier, car une science véritable est née, elle est désormais organisée avec ses méthodes évidentes et sûres, la science de Galilée, de Pascal, de Descartes, de Newton, celle de Harvey, de Franklin, de Lavoisier, de Cuvier. […] Lui-même et sorti des lettres, il n’aurait pu leur faire la moindre injure sans manquer à son passé ; il a donc, dans une combinaison qui est son œuvre, concilié son culte pour elles, le culte de la tradition, avec la part légitime que réclamaient des sœurs rivales, et qui, si elles n’étaient admises, allaient devenir impérieuses.

2422. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — I » pp. 249-267

Si parmi les syllogismes croissent quelques pauvres fleurs, c’est la faute ou le mérite de La Fontaine : où n’en ferait-il pas naître ?  […] Il en est de même pour les hommes et pour les esprits qui vivent dans le même siècle, c’est-à-dire sous un même climat moral : on peut bien, lorsqu’on les étudie un à un, montrer tous les rapports qu’ils ont avec ce temps où ils sont nés et où ils ont vécu ; mais jamais, si l’on ne connaissait que l’époque seule, et même la connût-on à fond dans ses principaux caractères, on n’en pourrait conclure à l’avance qu’elle a dû donner naissance à telle ou telle nature d’individus, à telles ou telles formes de talents.

2423. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Correspondance inédite de Mme du Deffand, précédée d’une notice, par M. le marquis de Sainte-Aulaire. » pp. 218-237

Née trente ou quarante ans avant la nouvelle duchesse de Choiseul, elle s’amuse à intervertir les rôles et les âges, à la confondre avec son homonyme, et à dire au duc et à la duchesse grand-papa et grand-maman, de même qu’eux, en parlant d’elle, la traitent de petite-fille. […] Mme du Deffand, au milieu des impatiences ou des sourires que font naître ses plaintes continuelles, a, en général, un mérite : elle est vraie.

2424. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Béranger, recueillie par M. Paul Boiteau. »

» Un jour, Lamennais, si souvent funèbre et lamentable, lui écrit : « Il y en a qui naissent avec une plaie au cœur. » — « En êtes-vous bien sûr ? […] Je crois plutôt que, nous autres, qui venons au monde pour écrire, grands ou petits, philosophes ou chansonniers, nous naissons avec une écritoire dans la cervelle.

2425. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, par M. Camille Rousset, professeur d’histoire au lycée Bonaparte. (Suite et fin) »

Un roi, en effet, je veux dire quelqu’un qui est pour l’être, qui se croit et se sent de race et d’étoffe à cela, soit qu’il s’appuie à la vieille idée du droit divin, ou qu’il s’inspire de la pensée d’une haute mission, suscitée et justifiée par l’attente universelle, doit avoir en soi une noble confiance. […] Et Goethe que l’on peut citer à côté de Boileau, Goethe le grand et judicieux critique, a observé excellemment que « lorsqu’une famille s’est fait remarquer durant quelques générations par des mérites et des succès divers, elle finit souvent par produire dans le nombre de ses rejetons un individu qui réunit en lui les qualités et les défauts de tous ses ancêtres : il en est de même, ajoute-t-il, des peuples célèbres qui, la plupart, ont vu naître dans leur sein des hommes profondément empreints de la physionomie nationale, comme si la Nature les avait destinés à en offrir le modèle. » Et il cite en exemple Voltaire, le plus Français des hommes, celui que la Nature semble avoir chargé de représenter la France à l’univers.

2426. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Histoire du roman dans l’Antiquité »

Tout le monde parmi les érudits ne rend pas assez de justice à Apulée, à ce Romain d’Afrique sous Trajan, et qui nous a conservé tant de bons contes que l’on chercherait en vain autre part que chez lui, qui nous les a cousus et enchâssés dans un tissu de style recherché et perlé, étincelant de manière et de grâce. […] Certes je prise et goûte fort le joli récit traduit par Courier : il est net, proportionné, piquant, épigrammatique ; mais les additions d’Apulée ne me déplaisent pas tant ; elles m’apprennent bien des choses sur les mœurs tant publiques que privées, sur la police des villes dans les provinces, sur les travers éternels et les maladies de l’esprit humain : « Ce sont des tableaux de pure imagination, où néanmoins chaque trait est d’après nature, des fables vraies dans les détails, qui non seulement divertissent par la grâce de l’invention et la naïveté du langage, mais instruisent en même temps par les remarques qu’on y fait et les réflexions qui en naissent. » Tout cet éloge (sauf le point de la naïveté du langage), que Courier donne à son Lucius, je l’accorde à plus forte raison et je l’étends à notre Lucius latin, à notre Apulée, pour ses additions nombreuses ; lu à côté, le premier Lucius me paraît, je l’avoue, un peu sec.

2427. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Souvenirs de soixante années, par M. Étienne-Jean Delécluze, (suite et fin) »

Beyle eut un mérite rare, incontestable : du sein de la littérature de l’Empire, qui retardait sur les grandes actions et des prodigieux événements contemporains, il sentit qu’une autre littérature devait naître. […] Casimir Delavigne devient faible du moment où il veut intercaler dans ses phrases pures et élégantes les idées gigantesques nées en Allemagne ou en Angleterre ; tandis que Mme Tastu, modeste et discrète comme la langue dont elle fait usage, en n’effarouchant pas le lecteur par la singularité des expressions, protège beaucoup mieux l’élan qu’elle fait prendre à l’imagination de celui, qui lit ; enfin M. 

2428. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Les frères Le Nain, peintres sous Louis XIII, par M. Champfleury »

de lui-même, formé par des lectures personnelles, par des comparaisons directes, incessantes, et par une rude expérience première des choses de la vie, l’auteur dont nous parlons s’est de bonne heure tracé une route et a obéi à une vocation dont il n’a jamais dévié. […] Les frères Le Nain, nés et élevés à Laon, eurent pour premier maître un étranger et probablement un Flamand, qu’on ne nomme pas ; ils étaient trois, Antoine, Louis et Mathieu, « vivant, est-il dit, dans une parfaite union » ; ils offraient, dans l’application de leur pinceau, des différences, qui paraissent avoir été de dimension plutôt que de manière.

2429. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet »

Ainsi, du côté paternel et maternel, tout avait contribué à faire d’Horace l’homme du crayon, un peintre involontaire, irrésistible : sa main fine, mince, longue, élégante, naissait avec toutes les aptitudes, toute formée et dressée pour peindre, comme le pied du cheval arabe pour courir. a Paris aux galeries du Louvre, où logeait son père, le 30 juin 1789, dans une bien chaude année, il fut élevé un peu au hasard et ne reçut pas, littérairement du moins, d’instruction première.

2430. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vaugelas. Discours de M. Maurel, Premier avocat général, à l’Audience solennelle de la Cour impériale de Chambéry. »

Cet homme au parler si pur était non à Chambéry, comme on l’a cru d’abord, mais à Meximieux, dans l’ancien Bugey, province de Savoie. […] Cinquante-sept ans après, en 1704, l’Académie le faisait réimprimer, le considérant comme « un ouvrage dans son sein, et dont la beauté a été si bien reconnue. » Elle y ajoutait un petit nombre d’Observations pour marquer en peu de mots les changements survenus pendant un demi-siècle et rendre compte de l’usage présent, « règle plus forte que tous les raisonnements de grammaire, et la seule qu’il faut suivre pour bien parler. » L’Académie était encore fidèle en cela à la loi reconnue par Vaugelas, et qui n’est autre que celle d’Horace lui-même : …………………………………………… Si volet usus, Quem penes arbitrium est, et jus, et norma loquendi.

2431. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte (suite et fin.) »

je vous en garde un pour la bonne bouche, qui sera le parfait et le superfin dans ce genre d’aventures. » Il ne s’apercevait pas en parlant ainsi, que par son gai succès de Don Quichotte il allait rendre son succès sérieux impossible ; il tirait d’avance sur son futur roman, et Persilès et Sigismonde n’avait plus lieu de naître. […] seigneur Cervantes, que Votre Seigneurie se règle sur le boire, sans oublier le manger, et elle se guérira sans autre remède. » — « Oui, répondis-je, on m’a déjà dit cela bien des fois ; mais je ne puis renoncer à boire quand l’envie m’en prend, et il me semble que je ne sois pour faire autre chose de ma vie.

2432. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Mlle Eugénie de Guérin et madame de Gasparin, (Suite et fin.) »

Sur la montagne, la verdoyante ramée des hêtres triomphait si bien du feuillage noir des sapins, elle s’étendait si lustrée, si criante, elle montait si vaillamment jusqu’à la région des pâturages, et ceux-ci commençaient à verdoyer si ferme, qu’à part la coupole de neige qui couvrait le fin sommet, on ne voyait que ce vert terrible qui semblait refouler la pensée en soi-même. » En allant chez la vieille, il y a un endroit plus élevé, un col à passer, et, si l’on s’y arrête pour jouir du spectacle, on voit en bas cette vallée se déroulant au plus loin dans sa moire verte et « d’un vert criard », mais de l’autre côté, du côté du village, au-dessus et par-delà, on voit la montagne et ses dernières pentes, mouchetées de sapins, semées de hêtres et offrant aussi des places plus riantes, car la saison y est retardée, et quand le vallon est en mai, on n’est là-haut qu’en avril : « Les vergers croissaient parmi, et comme j’avais monté pour arriver au col, je retrouvais fleuris les arbres qui, dans le vallon, avaient passé fleur. » Voilà des expressions charmantes et neuves, nées de l’observation même. […] Le fait est qu’en lisant et en regardant cette suite de tableaux, il y a un peu de fatigue à la longue, et si chez Mlle Eugénie de Guérin on sent quelque monotonie et par suite un peu de langueur due à cette douce uniformité de ton, on éprouve avec Mme de Gasparin cette sorte de brisement des yeux et du cerveau qui naît du heurt fréquent des couleurs et du trop de cahotement.

2433. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Correspondance de Louis XV et du maréchal de Noailles, publiée par M. Camille Rousset, historiographe du ministère de la guerre (suite et fin) »

Noailles a le mérite de pousser le comte de Saxe contre lequel Louis XV faisait d’abord quelques objections, se méfiant de lui à cause de sa qualité d’étranger : « Les officiers, Sire, qui se portent vers le grand sont aujourd’hui si rares que, dans l’opinion que j’ai du comte de Saxe, je le regarde aujourd’hui comme un homme précieux pour votre État, qui mériterait des distinctions particulières s’il était votre sujet ; qui, étant étranger, en mérite encore de plus grandes, afin de l’attacher plus étroitement à Votre Majesté. […] Ce sont des dictons, des proverbes : Nécessité n’a pas de loi… Il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée… À la bonne heure lui prit la pluie… On se demande où ce jeune homme sur le trône a pris cette quantité de locutions populaires, vulgaires, même surannées (du depuis pour depuis) ; on sent qu’il a dû beaucoup commérer avec sa domesticité et avec les gens de service.

2434. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par le chevalier d’Arneth »

Il dut quitter Versailles après le 14 juillet, et son impopularité n’eut de refuge assuré qu’à Vienne, où était née sa fortune avec le vice originel qui y était attaché. […] dans une classe obscure de la bourgeoisie, imbu de tous les principes de la philosophie moderne, et cependant tenant plus qu’aucun ecclésiastique à la hiérarchie du Clergé, vain, bavard, fin et brusque à la fois, fort laid et affectant l’homme singulier, traitant les gens les plus élevés comme ses égaux, quelquefois même comme ses inférieurs, l’abbé de Vermond recevait des ministres et des évêques dans son bain, mais disait en même temps que le cardinal Dubois avait été un sot ; qu’il fallait qu’un homme de sa sorte, parvenu au crédit, fît des cardinaux et refusât de l’être. » Si l’abbé de Vermond disait de ces choses à tous venants et sans discerner son monde, il avait grand tort ; mais il faut convenir que ce qu’on a présentement sous les yeux ne répond pas tout à fait à ce signalement, tracé par une griffe ennemie.

2435. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DISCOURS DE RÉCEPTION A L’ACADÉMIE FRANÇAISE, Prononcé le 27 février 1845, en venant prendre séance à la place de M. Casimir Delavigne. » pp. 169-192

Casimir Delavigne, au Havre en 93, d’une honorable famille de la classe moyenne, vint faire ses études à Paris, au lycée Napoléon. […] Il avait gravé au fond du cœur l’antique programme d’Horace : « Quem tu, Melpomene, semel… Celui, ô Melpomène, que tu as regardé d’un œil d’amour au berceau, celui-là, il ne sera ni lutteur aux jeux de Corinthe, ni vainqueur aux courses d’Élide, ni général triomphateur au Capitole ; mais il aimera les belles eaux de Tibur, et il trouvera la gloire par des vers nés à l’ombre des bois. » Et dans le cas présent d’ailleurs, il y avait mieux, il y avait de quoi tenter et retenir toute l’ambition d’une âme de poëte.

2436. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « UN FACTUM contre ANDRÉ CHÉNIER. » pp. 301-324

Méléagre était un Attique en Syrie, à peu près contemporain de Cicéron ; il a laissé, entre autres petites pièces, une jolie idylle sur le Printemps, dont Chénier s’est souvenu dans son élégie première. […] Il n’a pas oublié non plus les bourgeons du sublime palmier d’Aratus qui embrasse les cieux…, et le frais serpolet de Théodoridas dont on couronne les amphores…, et beaucoup d’autres rejetons nés d’hier, parmi lesquels il a semé aussi çà et là les premières violettes matinales de sa propre muse.

2437. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre II. Les privilèges. »

D’autre part, en dédommagement de ses frais de justice, il reçoit les biens de l’homme condamné à mort et à la confiscation dans son domaine ; il succède au bâtard et décédé dans sa seigneurie sans testament ni enfants légitimes ; il hérite du régnicole, enfant légitime, décédé chez lui sans testament ni héritiers apparents ; il s’approprie les choses mobilières, vivantes ou inanimées, qui se trouvent égarées et dont on ignore le propriétaire ; il prélève le tiers ou la moitié des trésors trouvés, et, sur la côte, il prend pour lui les épaves des naufrages ; enfin, ce qui est plus fructueux en ces temps de misère, il devient possesseur des biens abandonnés qu’on a cessé de cultiver depuis dix ans. — D’autres avantages attestent plus clairement encore que jadis il eut le gouvernement du canton. […] Cette autorité, le plus souvent ils la méritent ; nés et élevés pour l’exercer, ils trouvent dans la tradition, dans l’exemple et dans l’orgueil de famille des cordiaux puissants qui nourrissent en eux l’esprit public ; il y a chance pour qu’ils comprennent les devoirs dont leur prérogative les charge

2438. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVe entretien. Littérature grecque. L’Iliade et l’Odyssée d’Homère » pp. 31-64

Crithéis, portant dans son sein celui qui couvrait alors son front de honte, et qui devait un jour couvrir son nom de célébrité, reçut asile à Smyrne chez un parent de Cléanax, en Béotie et transplanté dans la nouvelle colonie grecque ; il se nommait Isménias. […] Ce nom, qu’on donnait familièrement à Homère, veut dire enfant de Mélès, en mémoire des bords du ruisseau où il était .

2439. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXVIIIe entretien. Tacite (1re partie) » pp. 57-103

III D’abord, il faut qu’il soit poète, c’est-à-dire sensible, coloriste, éloquent de nature ; car comment ferait-il sentir dans son style ce qu’il n’aura pas senti lui-même ? […] Descendre ou naître des princes est un hasard qui ne nous rend digne d’aucune estime ; dans l’adoption, le choix est entier et le jugement libre, et, si l’on veut bien choisir, l’opinion publique vous éclaire.

2440. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre I. La tragédie de Jodelle à Corneille »

Étienne Jodelle (1532-1573), à Paris, fit jouer sa Cléopâtre captive en 1552. […] Alexandre Hardy, entre 1569 et 1575, débuta vers 1593, et mourut vers 1031-163-2

2441. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre IV. L’Histoire »

L’œuvre de Michelet est née « dans le brillant matin de juillet », de l’immense espoir, sitôt déçu, dont la révolution de 1830 enflamma son âme populaire. […] Michelet veut voir comment la France est née, comment elle a formé sa personnalité morale, de quelle vie elle a vécu.

2442. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre X. Les sociales »

pour amuser les lettrés et pour faire jouir les poètes, voici qu’il obtient les applaudissements des francs-maçons. […] Ils « ne peuvent endurer un citoyen , comme eux et plus qu’eux, au sommet de l’échelle sociale… » De telles phrases font grand plaisir à qui les prononce et parfois elles appellent les applaudissements.

2443. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Pensées, essais, maximes, et correspondance de M. Joubert. (2 vol.) » pp. 159-178

Joubert, en 1754, mort en 1824, était, de son vivant, aussi peu auteur que possible. […] À la difficulté particulière des sujets, s’ajoute celle qui naît de la subtilité de l’auteur.

2444. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le père Lacordaire orateur. » pp. 221-240

Je dirai seulement qu’il est en mai 1802, au bourg de Recey-sur-Ource (Côte-d’Or), à cinq lieues de Châtillon-sur-Seine. […] Dans cette patrie de Bossuet, en vue de la colline où naquit saint Bernard, il ne songeait pas encore qu’il aurait un jour affaire à ces grands noms, et qu’il briguerait son rang dans leur descendance.

2445. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « La Mare au diable, La Petite Fadette, François le Champi, par George Sand. (1846-1850.) » pp. 351-370

» telle est l’idée qui naît irrésistiblement dans l’esprit de Germain, en la voyant si avisée, si industrieuse. […] Au xviie  siècle, le sentiment du pittoresque naturel est à peine, il n’est pas détaché ni développé, et, si l’on excepte le bon et grand La Fontaine17, nous n’avons alors à admirer aucun tableau vif et parlant.

2446. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Lettres de la marquise Du Deffand. » pp. 412-431

Née en 1697, morte en 1780, elle a traversé presque tout le xviiie  siècle, dont, encore enfant, elle avait devancé d’elle-même les opinions hardies, et, à aucun moment, elle ne s’est laissé gagner par ses engouements de doctrine, par son jargon métaphysique ou sentimental. […] Née d’une famille noble de Bourgogne, Mlle de Chamrond avait reçu une éducation très irrégulière, très incomplète, et ce fut son esprit seul qui en fit tous les frais.

2447. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand. (Berlin, 1846-1850.) » pp. 144-164

Frédéric, malgré le tort qu’il s’est fait par certaines de ses rhapsodies et de ses paroles, par le cynisme affiché de ses impiétés et de ses goguenarderies, et par cette manie de versifier qui fait toujours sourire, est un vrai grand homme, un de ces rares génies qui sont nés pour être manifestement les chefs et les conducteurs des peuples. […] Frédéric, du reste, ne varia jamais dans son opinion sur le caractère des Polonais comme peuple : cette opinion est énergiquement exprimée en dix endroits de ses histoires, et bien avant que l’idée de partage fût née.

2448. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Florian. (Fables illustrées.) » pp. 229-248

Son nom de famille était Claris ; il naquit en 1755 dans les basses Cévennes, non loin d’Anduze, au château de Florian qu’avait fait bâtir son grand-père. […] Il avait terminé l’un des livres de ses Fables par ces vers, qui pourraient être plus forts d’expression, mais qui sont pleins de sentiment et de philosophie, et qu’il a intitulés Le Voyage : Partir avant le jour, à tâtons, sans voir goutte, Sans songer seulement à demander sa route, Aller de chute en chute, et, se traînant ainsi, Faire un tiers du chemin jusqu’à près de midi ; Voir sur sa tête alors s’amasser les nuages, Dans un sable mouvant précipiter ses pas, Courir, en essuyant orages sur orages, Vers un but incertain, où l’on n’arrive pas ; Détrompé, vers le soir, chercher une retraite, Arriver haletant, se coucher, s’endormir, On appelle cela naître, vivre et mourir : La volonté de Dieu soit faite !

2449. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame de Maintenon. » pp. 369-388

Née en 1635 dans la conciergerie de la prison de Niort, où son père était pour lors enfermé, Françoise d’Aubigné commença la vie comme un roman, le plus étrange roman qui pût arriver, en effet, à une personne avant tout raisonnable. […] Au retour, confiée aux soins d’une tante calviniste, elle fut, bien que née catholique, rejetée dans l’hérésie, d’où il fallut qu’une autre parente, Mme de Neuillant, la vînt arracher avec un ordre de la Cour.

2450. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Rulhière. » pp. 567-586

On le fait naître vers 1735 (d’autres disent plus tôt) ; il était fils et petit-fils d’inspecteurs de la maréchaussée de l’Île-de-France ; il étudia au collège Louis-le-Grand, servit au sortir de là dans les gendarmes de la garde, et fut aide de camp du maréchal de Richelieu. […] Chamfort, alors son ami, lui en adressa des condoléances, auxquelles Rulhière répondit par une épître en vers un peu longue, mais dans laquelle il développe avec facilité ses principes de philosophie et de sagesse, qui ne sont autres que ceux d’Horace :      L’astre inconstant sous lequel je suis ,      Des biens aux maux m’a souvent promené ; Mais aux événements payant mon caractère, En jouissant de tout, rien ne m’est nécessaire.

2451. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La Harpe. » pp. 103-122

Ravenel a extrait des registres officiels les notes suivantes relatives à La Harpe, et qui sont ce qu’on peut désirer de plus exact et de plus précis : Jean-François Delaharpe est à Paris, sur la paroisse de Saint-Nicolas-du-Chardonnet, le 20 novembre 1739. […] La Harpe débuta donc par des héroïdes (1759) ; mais il fit précéder les siennes de quelques pages intitulées Essai sur l’héroïde, dans lesquelles, parlant de ses prédécesseurs, il disait de Fontenelle : « M. de Fontenelle, estimable sans doute à bien des égards, a tenté presque tous les genres de poésie parce qu’il n’était pour aucun. » Ce jugement, et la forme sous laquelle il est exprimé, valent mieux que tous les vers qui suivent.

2452. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La princesse des Ursins. Lettres de Mme de Maintenon et de la princesse des Ursins — II. (Suite et fin.) » pp. 421-440

Mais, en avançant, le désaccord qui naît du fond des situations et des caractères est plus fort que le goût qui vient purement de l’esprit. […] C’est de cette même Élisabeth, née pour le trône, que le grand Frédéric a dit : « La fierté d’un Spartiate, l’opiniâtreté d’un Anglais, la finesse italienne, et la vivacité française formaient le caractère de cette femme singulière ; elle marchait audacieusement à l’accomplissement de ses desseins ; rien ne la surprenait, rien ne pouvait l’arrêter. » Étant de ce caractère, il n’y a rien d’étonnant qu’elle ait profité de la moindre ouverture pour faire place nette dès son arrivée.

2453. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Madame Sophie Gay. » pp. 64-83

Marie-Françoise-Sophie Nichault de Lavalette, née à Paris, le 1er juillet 1776, d’un père homme de finances, attaché à la maison de Monsieur (depuis Louis XVIII), et d’une mère très belle, dont la ressemblance avec Mlle Contat était frappante, reçut une très bonne éducation, une instruction très soignée, et se fit remarquer tout enfant par la gaieté piquante et la promptitude de ses reparties. […] [NdA] Léonie de Montbreuse était dédiée, dans la pensée de Mme Gay, à sa fille Mme la comtesse de Canclaux, née du premier mariage.

2454. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — III. (Suite et fin.) » pp. 242-260

Kornman, homme de finances, mari d’une jeune et jolie femme, née à Bâle, qu’il maltraitait, dont il avait autorisé d’abord les relations irrégulières, et qu’il finit par faire enfermer à Paris, dans une maison de force, rue de Bellefonds, au moment où elle était enceinte et près d’accoucher. […] Mais la paternité l’avait ramené d’instinct et en idée au drame moral et vertueux, et il répétait souvent dans sa vieillesse « que tout homme qui n’est pas un épouvantable méchant, finit toujours par être bon quand l’âge des passions s’éloigne, et surtout quand il a goûté le bonheur si doux d’être père ! 

2455. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Paul-Louis Courier. — I. » pp. 322-340

Paul-Louis Courier, à Paris sur la paroisse Saint-Eustache, le 4 janvier 1772, d’un père riche bourgeois, et qui avait eu maille à partir avec un grand seigneur, fut élevé en Touraine sous les yeux et par les soins de ce père qui le destinait à servir dans le corps du génie et qui l’appliqua en attendant aux langues anciennes. […] Ne parlons pas de bois d’orangers et de haies de citronniers ; mais tant d’autres arbres et de plantes étrangères, que la vigueur du sol y fait naître en foule, ou bien les mêmes que chez nous, mais plus grandes, plus développées, donnent au paysage un tout autre aspect.

2456. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Bernardin de Saint-Pierre. — II. (Suite et fin.) » pp. 436-455

Le berger, indiquant le tombeau que la tradition désigne pour celui d’Ariane, ajoute : « Ce monument, ainsi que tous ceux de ce pays, a été mutilé par le temps et encore plus par les barbares ; mais le souvenir de la vertu malheureuse n’est pas sur la terre au pouvoir des tyrans. » Et Bernardin, après avoir achevé son tableau, ajoute à son tour : « Je doute qu’un athée même, qui ne connaît plus dans la nature que les lois de la matière et du mouvement, pût être insensible au sentiment de ces convenances présentes et de ces antiques ressouvenirs. » Qu’a de commun, je vous prie, un athée avec les idées naturelles que fait naître l’histoire d’Ariane d’après Catulle, dans la bouche du berger ? […] Villemain, de notre éloquent secrétaire perpétuel, si j’avais besoin de m’excuser, je dirais hautement : Membre de l’Académie française, j’ai le droit de relever, de la seule manière qui puisse le toucher, l’organe de la compagnie là où il abuse publiquement de son rôle de rapporteur pour y glisser contrairement aux convenances, contrairement aux intentions de beaucoup de membres, ses passions personnelles : biographe littéraire, je souffre toutes les fois que je vois des critiques éminents à tant d’égards et en possession d’un art merveilleux, mais des esprits plus nés évidemment pour la louange ou la fine satire que pour l’histoire, ne songer à tirer parti des faits que pour les fausser dans le sens de l’effet passager et de l’applaudissement.

2457. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Boileau. » pp. 494-513

le 1er novembre 1636, à Paris, et, comme il est prouvé aujourd’hui, rue de Jérusalem, en face de la maison qui fut le berceau de Voltaire61, Nicolas Boileau était le quinzième enfant d’un père greffier de grand-chambre au parlement de Paris. […] C’est de Pascal surtout et avant tout que me paraît relever Boileau ; on peut dire qu’il est littérairement des Provinciales.

2458. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le président de Brosses. Sa vie, par M. Th. Foisset, 1842 ; ses Lettres sur l’Italie, publiées par M. Colomb, 1836. » pp. 85-104

à Dijon le 7 février 1709, d’une ancienne et noble famille originaire de Savoie, et qui n’avait pris la robe qu’après avoir porté l’épée, le jeune de Brosses fit des études brillantes en sa ville natale, qui avait alors toutes ses ressources au complet, et qui sentait de tout point sa capitale. […] Aussi n’attaqua-t-il jamais à fond rien d’essentiel dans l’ordre de la société ; ses plaisanteries même et ses licences, nées de son humeur et du génie du terroir, n’eurent rien de systématique ni d’hostile ; et, en mêlant à ses propos de tous les jours bien des grains de Rabelais, il n’y mit jamais le venin qui blesse malignement et qui tue.

2459. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

Il y a dans la littérature le domaine de l’imagination, les talents poétiques proprement dits, qui ont en eux un don de création et de génie ; ceux-là ne se suscitent point à volonté : Dieu et la nature y pourvoient ; il faut les laisser naître. […] Sa famille était du Midi, de la jolie ville d’Aubagne, entre Marseille et Toulon, et lui-même naquit à Cassis, dans un voyage qu’y avait fait sa mère, le 20 janvier 1716.

2460. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le cardinal de Richelieu. Ses Lettres, instructions et papiers d’État. Publiés dans la Collection des documents historiques, par M. Avenel. — Premier volume, 1853. — II. (Fin.) » pp. 246-265

Il était, certes, de la race des âmes royales, mais il n’était pas roi. […] S’il fût sur le trône et roi héréditaire, il aurait eu naturellement la grandeur sans avoir à forcer la fermeté.

2461. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre deuxième. La force d’association des idées »

Le plaisir, quand l’excitation a duré un certain temps, fait naître le besoin que le plaisir même ait un terme ; si bien qu’alors, dans la mesure où croît le plaisir, diminue le pouvoir de le ressentir encore. […] La volonté, après avoir accepté le plaisir, s’en lasse et le refuse : après l’affirmation naît la négation.

2462. (1889) Émile Augier (dossier nécrologique du Gaulois) pp. 1-2

Héritière, en ligne collatérale, de Louis XIV, et jalouse d’orner sa souveraineté nouvelle des séductions d’un art d’elle et vivant d’elle, la bourgeoisie avait cru, jadis, trouver, dans M.  […] La famille d’Augier Émile Augier est en 1820, à Valence, en Dauphiné.

2463. (1767) Salon de 1767 « Adressé à mon ami Mr Grimm » pp. 52-65

Avec le tems, par une marche lente et pusillanime, par un long et pénible tâtonnement, par une notion sourde, secrette, d’analogie, acquise par une infinité d’observations successives dont la mémoire s’éteint et dont l’effet reste, la réforme s’est étendue à de moindres parties, de celles-cy à de moindres encore, et de ces dernières aux plus petites, à l’ongle, à la paupière, aux cils, aux cheveux, effaçant sans relâche et avec une circonspection étonante les altérations et difformités de nature viciée, ou dans son origine, ou par les nécessités de sa condition, s’éloignant sans cesse du portrait, de la ligne fausse, pour s’élever au vrai modèle idéal de la beauté, à la ligne vraie ; ligne vraie, modèle idéal de beauté qui n’exista nulle part que dans la tête des Agasias, des Raphaëls, des poussins, des Pugets, des Pigals, des Falconnets ; modèle idéal de la beauté, ligne vraie dont les artistes subalternes ne puisent que des notions incorrectes, plus ou moins approchées que dans l’antique ou dans leurs ouvrages ; modèle idéal de la beauté, ligne vraie que ces grands maîtres ne peuvent inspirer à leurs élèves aussi rigoureusement qu’ils la conçoivent ; modèle idéal de la beauté, ligne vraie au-dessus de laquelle ils peuvent s’élancer en se jouant, pour produire le chimérique, le sphinx, le centaure, l’hippogriphe, le faune, et toutes les natures mêlées ; au-dessous de laquelle ils peuvent descendre pour produire les différents portraits de la vie, la charge, le monstre, le grotesque, selon la dose de mensonge qu’exige leur composition et l’effet qu’ils ont à produire, en sorte que c’est presque une question vuide de sens que de chercher jusqu’où il faut se tenir approché ou éloigné du modèle idéal de la beauté, de la ligne vraie ; modèle idéal de la beauté, ligne vraie non traditionelle qui s’évanouit presque avec l’homme de génie, qui forme pendant un tems l’esprit, le caractère, le goût des ouvrages d’un peuple, d’un siècle, d’une école ; modèle idéal de la beauté, ligne vraie dont l’homme de génie aura la notion la plus correcte selon le climat, le gouvernement, les loix, les circonstances qui l’auront vu naître ; modèle idéal de la beauté, ligne vraie qui se corrompt, qui se perd et qui ne se retrouveroit peut-être parfaitement chez un peuple que par le retour à l’état de Barbarie ; car c’est la seule condition où les hommes convaincus de leur ignorance puissent se résoudre à la lenteur du tâtonnement ; les autres restent médiocres précisément parce qu’ils naissent, pour ainsi dire, scavants.

2464. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre V. Séductions pour la compréhension de la psychologie indigène. — Conclusion »

A côté du désir sexuel, il y a place pour l’amour véritable, d’une émotion esthétique en présence de la beauté soit physique soit morale. […] Cependant il semble résulter des contes que, loin de refuser aux fils, nés de captifs et d’hommes libres, l’intelligence et les qualités de cœur, on les oppose souvent, et à leur avantage, aux enfants issus de parents libres l’un et l’autre.

2465. (1824) Discours sur le romantisme pp. 3-28

Ils se soutiennent indistinctement les uns les autres, mais indépendamment de toute conviction individuelle, et par ce seul instinct d’union et de défense réciproque qui naît du sentiment de la faiblesse numérique. Il y a plus ; au sein du schisme même, naissent sourdement de petits schismes secondaires, à qui peut-être il ne manque qu’une occasion pour éclater.

2466. (1892) L’anarchie littéraire pp. 5-32

Par contre, si je n’avais pu réussir dans ma tentative, j’avais fait naître une cause de divisions. […] Malgré ses dires, il est chaste et pur comme l’enfant qui vient de naître ; mais il lui plaît de s’entendre appeler “monstre” par ces bons bourgeois à qui il ressemble si bien et qu’il brûle déjà d’imiter.

2467. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Édelestand du Méril »

Qui sait (et pour mon compte je le voudrais) si cette Histoire de la Comédie, une des idées de sa jeunesse, quand il n’était pas le philologue qu’il est devenu, ne date pas un retour tardif vers les choses de la pensée et de la vie de la part de cet esprit qui était certainement pour elles, autant et plus qu’aucun de nous ? […] Mais l’historien impatient de naître, l’historien sortait vite de ces généralités fondamentales, et il recherchait alors les origines de la Comédie, non plus dans une des quatre manifestations nécessaires de l’esprit humain, mais dans les contingences et les différences des sociétés et des civilisations.

2468. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « J. de Maistre » pp. 81-108

Tel vous le voyez dans son livre du Pape, aux chapitres fameux de l’Infaillibilité et de la Souveraineté, — tout son système dans la conception de l’unité, — tel vous le retrouvez, en remontant, dans cette dissertation sur la Souveraineté, qui n’était peut-être qu’une pierre d’attente pour ses travaux futurs, et que je regarde comme le morceau capital du livre posthume qu’on a édité. […] Il était armé de facultés soudaines, qu’il put aiguiser mais auxquelles il n’ajouta pas, et par conséquent, conclusion dernière, il a cet avantage, interdit à presque tous les autres hommes, même de génie, mais d’un génie inférieur au sien, que les livres de son âge mûr ne font pas rougir de honte les élucubrations de sa jeunesse, et qu’on peut le voir avec plaisir et le reconnaître dans ce miroir renversé.

2469. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — [M. de Latena, Étude de l’homme.] » pp. 523-526

Mais le doute ne tarde pas à être éclairci par sa rougeur ou son air de contrariété, par son calme affecté ou sa triste préoccupation. » La Bruyère, sans entrer dans ces nuances un peu prolongées, avait dit vivement : « Une femme qui n’a jamais les yeux que sur une même personne, ou qui les en détourne toujours, fait penser d’elle la même chose. » Mais, dans bien des cas, on éprouve chez M. de Latena la satisfaction de rencontrer des pensées justes, exprimées avec une attention et une description circonstanciée qui montre qu’elles sont bien nées, en effet, dans l’esprit de l’auteur : son seul soin est d’être élégant d’expression en même temps que fidèle.

2470. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « SAINTE-BEUVE CHRONIQUEUR » pp. -

Et puis, en certains cas, à l’égard dès œuvres retentissantes qui font époque et révolution — ou du moins beaucoup de bruit (comme chaque jour en voyait naître alors), la critique était encore tenue à de plus grandes réserves par les journaux eux-mêmes qui n’admettaient pas qu’on s’exprimât en public en toute liberté sur ces grands sujets littéraires.

2471. (1875) Premiers lundis. Tome III « Le roi Jérôme »

Un adieu suprême est dû au dernier représentant de la grande époque, au dernier de la première génération des Napoléons, et qui vient de disparaître aussi le dernier.

2472. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre VI. De l’envie et de la vengeance. »

S’il est une passion destructive du bonheur et de l’existence des pays libres, c’est la vengeance ; l’enthousiasme qu’inspire la liberté, l’ambition qu’elle excite, met les hommes dans un plus grand mouvement, fait naître plus d’occasions d’être opposés les uns aux autres.

2473. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre V. Résumé. »

À leur tête, le roi, qui a fait la France en se dévouant à elle comme à sa chose propre, finit par user d’elle comme de sa chose propre ; l’argent public est son argent de poche, et des passions, des vanités, des faiblesses personnelles, des habitudes de luxe, des préoccupations de famille, des intrigues de maîtresse, des caprices d’épouse gouvernent un État de vingt-six millions d’hommes avec un arbitraire, une incurie, une prodigalité, une maladresse, un manque de suite qu’on excuserait à peine dans la conduite d’un domaine privé  Roi et privilégiés, ils n’excellent qu’en un point, le savoir-vivre, le bon goût, le bon ton, le talent de représenter et de recevoir, le don de causer avec grâce, finesse et gaieté, l’art de transformer la vie en une fête ingénieuse et brillante, comme si le monde était un salon d’oisifs délicats où il suffit d’être spirituel et aimable, tandis qu’il est un cirque où il faut être fort pour combattre, et un laboratoire où il faut travailler pour être utile  Par cette habitude, cette perfection et cet ascendant de la conversation polie, ils ont imprimé à l’esprit français la forme classique, qui, combinée avec le nouvel acquis scientifique, produit la philosophie du dix-huitième siècle, le discrédit de la tradition, la prétention de refondre toutes les institutions humaines d’après la raison seule, l’application des méthodes mathématiques à la politique et à la morale, le catéchisme des droits de l’homme, et tous les dogmes anarchiques et despotiques du Contrat social  Une fois que la chimère est née, ils la recueillent chez eux comme un passe-temps de salon ; ils jouent avec le monstre tout petit, encore innocent, enrubanné comme un mouton d’églogue ; ils n’imaginent pas qu’il puisse jamais devenir une bête enragée et formidable ; ils le nourrissent, ils le flattent, puis, de leur hôtel, ils le laissent descendre dans la rue  Là, chez une bourgeoisie que le gouvernement indispose en compromettant sa fortune, que les privilèges heurtent en comprimant ses ambitions, que l’inégalité blesse en froissant son amour-propre, la théorie révolutionnaire prend des accroissements rapides, une âpreté soudaine, et, au bout de quelques années, se trouve la maîtresse incontestée de l’opinion  À ce moment et sur son appel, surgit un autre colosse, un monstre aux millions de têtes, une brute effarouchée et aveugle, tout un peuple pressuré, exaspéré et subitement déchaîné contre le gouvernement dont les exactions le dépouillent, contre les privilégiés dont les droits l’affament, sans que, dans ces campagnes désertées par leurs patrons naturels, il se rencontre une autorité survivante, sans que, dans ces provinces pliées à la centralisation mécanique, il reste un groupe indépendant, sans que, dans cette société désagrégée par le despotisme, il puisse se former des centres d’initiative et de résistance, sans que, dans cette haute classe désarmée par son humanité même, il se trouve un politique exempt d’illusion et capable d’action, sans que tant de bonnes volontés et de belles intelligences puissent se défendre contre les deux ennemis de toute liberté et de tout ordre, contre la contagion du rêve démocratique qui trouble les meilleures têtes et contre les irruptions de la brutalité populacière qui pervertit les meilleures lois.

2474. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Et Lamartine ? »

Et aussitôt, les hommes reconnaissent que cette merveille leur est née : un poète vraiment inspiré, un poète comme ceux des âges antiques, ce « quelque chose de léger, d’ailé et de divin » dont parle Platon.

2475. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Heredia, José Maria de (1842-1905) »

Il a su réduire l’abondance de ses sensations aux strictes cadences d’où naît la splendeur classique.

2476. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Saint-Pol-Roux (1861-1940) »

Saint-Pol-Roux, la Procession qu’imagina son rêve, — et mon ravissement au spectacle des splendides reposoirs que son art sincère édifia… Il sera celui qu’il a défini, le Poète : l’entière humanité dans un seul homme, — car il marche, hautain, à la conquête de l’avenir, en semant, avec le geste large des forts, à la volée, le bon grain d’où naîtront des fleurs éternelles comme les pierreries.

2477. (1863) Molière et la comédie italienne « Préface » pp. -

Est-il tout simplement dans les circonstances que raconte l’abbé Galiani ?

2478. (1911) La valeur de la science « Deuxième partie : Les sciences physiques — Chapitre VII. L’Histoire de la Physique mathématique. »

— La Physique Mathématique, nous le savons, est née de la Mécanique céleste qui l’a engendrée à la fin du XVIIIe siècle, au moment où elle venait elle-même d’atteindre son complet développement.

2479. (1887) Discours et conférences « Discours à l’Association des étudiants »

Je suis, par essence, un légitimiste ; j’étais pour servir fidèlement, et avec toute l’application dont je suis capable, une dynastie ou une Constitution tenues pour autorité incontestée.

2480. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 439-450

PALISSOT, [Charles de Montenoy] de l’Académie de Nancy, sa patrie, en 1730.

2481. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Démosthéne, et Eschine. » pp. 42-52

Mais il étoit bègue.

2482. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean-Baptiste Rousseau et M. de Voltaire. » pp. 47-58

Il apprend que c’est un jeune pensionnaire très-heureusement pour la poësie, & dont on a des choses surprenantes pour son âge.

2483. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre quatrième. »

Il suppose, sans y songer, que ces gens-là, nés parmi nous, n’auraient pas cru à notre religion.

2484. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 42, de notre maniere de réciter la tragédie et la comedie » pp. 417-428

La mandragore de Machiavel, l’une des meilleures comédies qui aïent été faites depuis Terence, et qu’on ne prendroit jamais pour une production d’esprit née dans le même cerveau, où sont écloses tant de refléxions si profondes sur la guerre, sur la politique, et principalement sur les conjurations, est demeurée en Italie une piece unique en sa classe.

2485. (1860) Ceci n’est pas un livre « Les arrière-petits-fils. Sotie parisienne — Deuxième tableau » pp. 196-209

Les arrière-petits-fils d’Ernest Blum ne sont pas nés encore.

2486. (1818) Essai sur les institutions sociales « Préface » pp. 5-12

Lémontey, au contraire, dans les temps qui ont immédiatement précédé la révolution, avait vu l’inquiétude et le malaise général des années, qui se sont écoulées depuis 1783 jusqu’en 1789 ; de plus, comme il était fort jeune à cette époque, il s’était accoutumé à penser que le dix-huitième siècle avait fondé des doctrines, établi des principes.

2487. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Préface » pp. -

Mais au moment où s’éteignait radieusement Walter Scott, Balzac naquit à la publicité, et, à LUI SEUL, il allait établir un équilibre qui n’avait jamais existé entre la France et l’Angleterre.

2488. (1887) Essais sur l’école romantique

» n’est pas viable. […] Voilà le chêne pour les siècles ! […] Si, au lieu d’être en l’an deux ou trois de l’Empire, il fût seulement sous la République, nous chanterions déjà les psaumes des morts sur le talent de Jules Janin. […] Victor Hugo est le 26 février 1802. […] C’est surtout pour les présages et les horoscopes de ce genre que l’on doit du respect aux enfants heureusement nés.

2489. (1858) Du vrai, du beau et du bien (7e éd.) pp. -492

L’éloquence ne se propose pas de faire naître dans l’âme des auditeurs le sentiment désintéressé de la beauté. […] Il naît à Paris vers 1617, et il n’en sort jamais. […] Il est à Bruxelles, il est vrai ; mais il est venu de fort bonne heure à Paris, et son véritable maître a été Poussin qui lui a donné des conseils. […] Ils naissent le même jour, ils se développent et ils périssent ensemble. […] Si je suis le premier des hommes, le plus riche, le plus beau, le plus puissant, etc., je ferai tout pour conserver les avantages que j’ai reçus.

2490. (1880) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Première série pp. 1-336

Ils sont nés chez nous, — comme le drame chez les Grecs, — à l’ombre de l’autel et pour ainsi dire sur le parvis du temple. […] La Renaissance n’a rien détruit : comme toute chose de ce monde périssable, où la vie naît de la mort, elle a été engendrée de la corruption même de l’âge auquel elle succédait. […] La tragédie d’Eschyle et de Sophocle est née dans le sanctuaire, comme nos Mystères, et, comme nos Mystères, elle a gardé jusqu’à son dernier jour un vague souvenir du lieu de sa naissance. […] C’est au sein de cette abondance que naquit Molière, probablement dans les premiers jours du mois de janvier 1622. […] Ainsi le veut le destin d’Arouet : il est courtisan.

2491. (1929) Critique et conférences (Œuvres posthumes III)

Seul il voyait juste le poète qui, voilà quelques lustres, baptisa notre époque, encore à naître : « Une France aux yeux ronds !  […] Cette crainte commune du soleil était d’autant plus caractéristique chez Charles Cros que son pays était Fabrezan, près Narbonne, où il naquit le Ier octobre 1842. […] Deux enfants étaient nés de ce mariage, qu’il adorait. […] J’en conclus que son génie fut le fruit de toutes ces épreuves ; il ne naquit pas, mais émergea naïf et pur, de ses infortunes et de ses joies ; il n’en fut pas le produit, mais il y prit son essor. […] *** Quoi qu’il en soit, Vermersch est à Lille le 5 juin 1843.

2492. (1925) Les écrivains. Première série (1884-1894)

Delpit voulait expliquer sans doute qu’on devient littérateur quand on a du talent, et qu’on naît académicien quand on en manque. […] Le poète est de cette épopée. […] Il évoque ce qui doit naître, comme il ranime ce qui est mort, avec une magnificence et une toute-puissance de Dieu. […] Le bachelier dira : « Caro (Marie-Elme), à Poitiers, paysan français. […] Il pourrait donc arriver que l’humanité ne vît plus naître un second Mozart. » Cette crainte l’amena au seuil du suicide.

2493. (1899) Musiciens et philosophes pp. 3-371

C’est d’elle que devait naître fatalement la culture du poncif, la toute-puissance de la formule, la contrefaçon d’art au sens le plus propre du mot. […] L’artiste crée par mouvements spontanés et réflexes, les symboles naissent en lui d’eux-mêmes, parce que son organisme l’y contraint, en vertu d’une activité analogue à celle du rêve. […] Par un phénomène curieux, le poème de Schiller introduit dans la dernière partie de cette symphonie énonce sinon clairement, du moins expressément cette pensée : que le sentiment (Schiller ne parle, à dire vrai, que du sentiment de la joie) unit tous les hommes et fait naître en eux l’amour. […] Le drame naît de la musique parce que celle-ci est le cœur même de ce drame ; elle est l’expression générale de toutes les apparences dont se compose le drame. […] Soumettre des masses opposées à la domination d’un rythme unique, substituer l’unité d’un même vouloir à une multiplicité grouillante de sentiments et de désirs, voilà la fonction pour laquelle il est , et dans aucune autre il ne se sent plus à l’aise.

2494. (1914) Note conjointe sur M. Descartes et la philosophie cartésienne pp. 59-331

Pour devenir, pour naître, pour être faite. […] Si encore il était à Weimar. […] Ainsi est née la plus belle race de peine qui soit jamais venue au monde. […] Il faut encore qu’il en procède et qu’il en naisse. […] C’est-à-dire : on croit qu’en prenant la servitude dans toute son épaisseur on obtient bien en effet le déterminisme mais qu’en l’amincissant assez du côté qu’elle naît, qu’elle vient de naître on obtient encore la liberté.

2495. (1890) La bataille littéraire. Deuxième série (1879-1882) (3e éd.) pp. 1-303

honnête homme, il se faisait porter en triomphe par des ambitieux dépourvus de tout scrupule. […] Il s’agit des femmes qui, nées pour être gardiennes du foyer, en ont été pour ainsi dire chassées par l’indifférence dédaigneuse ou l’imbécillité de leurs maris. De là bien des déclassées qui sortent chaque jour des rangs du monde où elles sont nées. […] Le Dauphin était avec une âme vive et altière. […] Nés presque au même moment, élevés par les mémos maîtres, ils ont parlé aux mêmes hommes et souvent traité les mêmes sujets.

2496. (1894) La bataille littéraire. Sixième série (1891-1892) pp. 1-368

C’est de cette idée qu’est le dernier ouvrage de M.  […] Un enfant est de cet amour, après la rupture. […] C’est de cette méfiance, de ce combat contre soi-même, qu’est née l’idée de ce roman vraiment exquis dans presque toutes ses parties. […] Vous êtes pour le mariage. […] Qui peut dire comment et pourquoi naît un être ?

2497. (1895) Les mercredis d’un critique, 1894 pp. 3-382

Il y a des hommes qui sont nés pour agir, et selon qu’ils ont du bon sens ou n’en ont point, ce sont des actifs ou des agités. Il y a d’autres hommes qui sont nés pour comprendre, et qui ne s’en lassent jamais. […] tous ont compté sans un quatorzième, qui vient sans qu’on l’invite, l’ennui, l’inévitable ennui, ce compagnon des désœuvrés. […] Jules Claretie est patriote et mourra tel, cela éclate à chaque page de son petit livre, et je l’en félicite. […] C’est de cette conviction qu’est le plaisir que j’ai eu à lire les Images sentimentales de M. 

2498. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre premier. Ce que devient l’esprit mal dépensé » pp. 1-92

Entre ces deux femmes, celle-ci qui s’en va emportant la comédie avec elle, et celle-là qui arrive apportant à sa suite la tragédie, il faut placer une autre femme, une illustre, une infortunée, une passionnée, une éloquente… l’honneur et la maîtresse du drame moderne, qui est avec elle, qui est mort avec elle : est-il besoin de nommer madame Dorval ? […] Il ne faut pas tant de choses, Dieu merci, mais il faut cent fois davantage : il faut l’instinct. — Êtes-vous pour faire rire ou pleurer toute une foule émue et attentive ? […] Est-ce que vraiment tu es venu là pour écouter Racine ou Corneille, avec ce recueillement intime que le chef-d’œuvre fait éprouver aux âmes bien nées ? […] Il menait la joyeuse vie du Bohémien, qui est un des attributs de la comédie, cette aimable fille de joie et d’esprit, née dans un tombereau, et qui rappelle toujours son origine par son vagabondage. […] Nous en avons vu beaucoup, dans les livres et dans les comédies du siècle passé, de ces sortes de filles, assez bien nées pour avoir besoin d’être riches, trop pauvres pour se rappeler longtemps qu’elles étaient bien nées ; vous en trouverez dans ces qualités-là et à profusion, dans les Mémoires d’un certain Casanova qui se mêlait de bonnes fortunes.

2499. (1929) Les livres du Temps. Deuxième série pp. 2-509

Michaut objecte, en ce qui concerne spécialement La Fontaine, qu’étant en Champagne, le fabuliste n’a pourtant rien de champenois. […] Ils naissent, meurent et renaissent. […] Et voici du Sully-Prudhomme : « Mystère du désir : un rien le fait naître ; un rien le tue et l’anéantit. […] Cette perfection a existé, dans le paradis terrestre, chaste éden, jardin des idées : mais Adam s’est ennuyé de cette splendide immobilité ; d’un geste, il a détruit la féerie idéale et fait naître la vie. […] Saadi naquit à Chiraz dans le dernier quart du xiie  siècle (probablement en 1184).

2500. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome III

Sophocle lui fait pitié : il croit que, s’il était de nos jours, il eût perfectionné son art qu’il n’avait fait qu’ébaucher. […] L’homme était-il donc pour tant de dépendance ? […] Ce même Voltaire, cité comme un oracle, a dit, dans son bon temps, que le drame était un monstre de l’impuissance d’être tragique ou comique. […] Peut-on raisonnablement supposer que les dieux fassent naître la douleur et le repentir dans l’âme du scélérat dont ils ont résolu la punition ? […] Ce premier coup d’œil ne produit pas l’amour, mais il lui prépare les voies, et l’aide beaucoup à naître.

2501. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Gabriel Naudé »

Il naquit en février 1609, sur la paroisse Saint-Méry, de parents bourgeois, qui, voyant ses heureuses dispositions, le mirent de bonne heure aux études. […] Le xvie  siècle finissait d’hier quand Naudé naquit. […] Guillaume Colletet, ce rimeur suranné, est son seul poète moderne contemporain. […] Après s’être raillé, au début, de l’éternelle badauderie des Français, il explique très-bien comment cette chimère, cette crédulité, contagieuse des Rose-Croix a pu naître de l’enivrement d’invention qui suivit le xvie  siècle.

2502. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CIVe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (2e partie) » pp. 97-191

Voilà deux mille ans et plus que ces pages ont été écrites ; et avec elles, c’est la critique littéraire qui est née, et qui, dès ce moment, a eu sa méthode, son objet, et quelques-uns de ses principes essentiels. […] Herder remarque avec raison que « la philosophie des arts devait naître dans la Grèce, parce qu’en suivant le mouvement libre de la nature et les inspirations d’un goût infaillible, les poètes et les artistes de cet heureux pays réalisaient la théorie du beau, avant que personne n’en eût encore tracé les lois. […] La poésie a une tout autre origine que le plaisir servile produit en nous par l’imitation ; elle est née de l’homme même. […] VIII Honorons ce grand traducteur, non-seulement pour avoir compris, mais pour avoir combattu son modèle, et félicitons notre siècle d’avoir fait naître une intelligence et une vertu dignes de nous avoir rendu, dans Aristote, non pas un philosophe infaillible, mais le plus grand des philosophes de l’antiquité. — C’est Barthélemy Saint-Hilaire !

2503. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXXXIXe entretien. Littérature germanique. Les Nibelungen »

» Un des fidèles de Kriemhilt répondit au Roi: « Il est à Troneje. […] Kriemhilt désespère de trouver un vengeur, cependant au prix d’une belle veuve qu’elle lui promet, elle décide Blœde à élever une rixe et à faire naître l’occasion d’un combat. […] Kant, le plus penseur et le plus sublime des philosophes, a scruté le monde et y a retrouvé Dieu dans la raison pure ; comme un Brahmane des derniers temps, Wieland, a rajeuni les traditions obscures et mêlé aux dogmes des Indes les légendes de la Grèce ; Schiller a tenté au théâtre et dans l’histoire de renouveler à Weymar les triomphes d’Athènes ; Gœthe enfin, génie plus fort, plus haut, plus complet, a retrempé Faust à la fois dans l’observation et dans le surnaturel, il a expliqué le monde des vivants par le monde des morts ; il a été le Volkêr des temps modernes, le Ménestrel des grands combats de notre ère, il a laissé en mourant l’Allemagne éblouie et vide comme si rien d’aussi grand ne pouvait naître de longtemps pour le remplacer. […] Voyez comme la sagesse presque divine des Indes est venue s’obscurcir dans les brouillards de l’Allemagne, et combien le temps où nous vivons, en apparence pour les progrès sans limite, s’accuse lui-même de décadence intellectuelle ?

2504. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Figurines »

Platon avait déjà dit, comme l’auteur de l’Imitation, ou à peu près, que « l’amour tend toujours en haut, parce que l’amour est de Dieu et qu’il ne peut trouver de repos qu’en Dieu ». […] Il faut revenir à ce verset de l’Imitation de Jésus-Christ, qui semble traduit de Platon : « L’amour aspire à s’élever… Rien n’est plus doux ni plus fort que l’amour… Il n’est rien de meilleur au ciel et sur la terre, parce que l’amour est de Dieu et qu’il ne peut se reposer qu’en Dieu, au dessus de toutes les créatures. » Et c’est là toute l’histoire de l’âme, longtemps inquiète, lentement pacifiée, de Jean Racine. […] Il fait constamment l’effet d’un réfractaire qui se retient, qui en pense plus qu’il n’en dit. (« Un homme chrétien et Français se trouve contraint dans la satire ; les grands sujets lui sont défendus… ») Il semble d’ailleurs avoir aménagé sa vie et composé son attitude pour pouvoir, penser, à part soi, le plus librement possible. […] pour la guerre  et pour la guerre d’autrefois, celle qui était vraiment une profession et où la bravoure individuelle avait souvent le premier rôle  il eut une joie frénétique de vivre, commune chez ceux dont le métier est de donner la mort et de la mépriser.

2505. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 octobre 1885. »

De même, Wagner montre la doctrine chrétienne disparaissante sous le retour de la cruelle Loi Judaïque : Il semble que les Juifs aient cru pouvoir négliger cette participation de leur dieu au gouvernement du monde, puisque, d’un autre côté, ils avaient gagné de participer à la religion chrétienne, qui paraissait très propre à leur livrer, dans le cours des temps, sa civilisation avec tous ses éléments de supériorité ; car le miraculeux point de départ était historiquement donné : dans un coin de la Galilée, Jésus de Nazareth était . […] Nous devons renoncer le besoin sexuel, ne point commettre l’adultère, moins pour ne pas faire tort au prochain que pour nous éviter à nous-mêmes les soucis qui naissent de ces besoins. […] Ne renonçons point les actes, qui sont nuls, qui indiffèrent : renonçons les Désirs, et naîtra la Joie. […] Et nous sommes devenus les esclaves de nos créatures : car les désirs sont nés qui nous ont attachés aux choses, les besoins fatals, motifs nous contraignant, désormais, à l’assidue création des mêmes Apparences.

2506. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VII : Instinct »

Une multitude de faits établissent que les individus de même espèce, nés à l’état sauvage, diffèrent extrêmement dans leur caractère et leurs dispositions instinctives. […] Si leurs services se sont trouvés de quelque utilité à l’espèce au milieu de laquelle elles sont ainsi nées par hasard, au point qu’il fût plus avantageux à cette espèce de capturer des travailleurs que de les procréer, l’habitude acquise de recueillir ou de dérober des œufs étrangers seulement pour s’en nourrir pourrait en être devenue plus forte ou s’être transformée par sélection naturelle, de manière à avoir pour but principal d’élever des esclaves. […] De telles espèces auraient vécu à l’état social, et il eût été avantageux à la communauté qu’un certain nombre d’individus naquissent capables de travailler, mais incapables de se reproduire, je ne vois aucune impossibilité à ce que la sélection naturelle fût parvenue à établir un tel état de choses. […] On sait, en effet, que le développement du cerveau est généralement en raison inverse de la faculté procréatrice, c’est-à-dire du nombre des petits qui naissent à chaque portée, ou plus généralement de la raison géométrique selon laquelle l’espèce tend à se multiplier.

2507. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « Remarques finales. Mécanique et mystique »

Ils sont nés de la conquête. […] Ainsi naîtront des velléités de retour en arrière. […] Mais que nous naissions modifiés, c’est peu probable : à supposer que notre estomac diffère de celui de nos ancêtres préhistoriques, la différence n’est pas due à de simples habitudes contractées dans la suite des temps. […] Elle n’a pas seulement mis la métaphysique sur une fausse piste ; elle a détourné la science de l’observation de certains faits, ou plutôt elle a empêché de naître certaines sciences, excommuniées par avance au nom de je ne sais quel dogme.

2508. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Appendices » pp. 235-309

Son erreur a été de croire que les genres sont en quelque sorte des êtres doués d’une vie propre ; il a voulu montrer « la façon dont un genre naît, grandit, atteint sa perfection, décline, et enfin meurt45 ». […] Chaque être étant unique de son espèce, son expression adéquate devrait être unique aussi ; elle l’est jusqu’à un certain point et le serait bien davantage, si la tradition (troisième facteur important) n’imposait pas certaines idées et certaines formes à la majorité des esprits. — Malgré cette tradition, des formes nouvelles naissent sans cesse ; c’est vouloir remplir le tonneau des Danaïdes que d’enfermer les formes dans le cadre d’une rhétorique. […] dans les Abruzzes en 1863 (ou 1864), Gabriele D’Annunzio débuta à seize ans par un volume de vers (Primo vere), et vint à Rome en 1881, où il fit partie d’un groupe de « jeunes » ; groupe dont l’histoire serait fort intéressante ; il comprenait, entre autres, le peintre Michetti, le journaliste Scarfoglio, le musicien Tosti, le poète Pascarella, et Giulio Salvadori qui écrivait alors le Canzoniere civile… On en était aux premières ivresses de la jeune Italie, avant la crise économique, politique et sociale. […] Empereurs ou rois, qui n’ont plus rien à désirer du côté de la fortune, n’y trouvent rien aussi qui gêne leurs plaisirs, et nés, et destinés à mourir dans leur pourpre, rien ne traverse, ni ne partage, ni ne rompt leur passions, si ce n’est les obstacles qu’elles se créent à elles-mêmes en courant à leur satisfaction.

2509. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Sully, ses Économies royales ou Mémoires. — I. » pp. 134-154

. — Sully, qui, dans toute la première partie de sa carrière, s’appelle Rosny, en 1559 au château de ce nom, était le second de quatre fils, mais de fait il fut considéré comme l’aîné par son père, qui de bonne heure plaça sur lui l’espoir de relever sa maison. […] Et ici, comme nous sommes au xvie  siècle, il est nécessaire de remarquer qu’un des précepteurs de Sully, nommé La Brosse, qui se mêlait de tirer des horoscopes et de prédire des nativités, voyant que son élève, de six ans plus jeune que Henri de Navarre, était , comme ce prince, le 12 ou 13 décembre, jour de Sainte-Luce, l’avait plus d’une fois assuré, avec de grands serments, que le prince, après maint labeur, serait un jour roi de France, et que lui Rosny serait des plus avant dans sa faveur et des mieux participants de sa prospérité.

2510. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — I. » pp. 325-345

Roederer, que nous avons vu mourir le 17 décembre 1835, plein de vigueur encore à l’âge de quatre-vingt-deux ans, était à Metz, le 15 février 1754, d’un père avocat, nous dit-il, « distingué au barreau comme profond jurisconsulte, dans la magistrature comme ennemi du pouvoir arbitraire, et dans la société comme homme aimable ». […] Je vis cette ombre s’étendre au loin autour de moi et marquer partout mon néant 49 … Ici un découragement moral s’empara de lui et le fit peu à peu déchoir de cette hauteur vertueuse où il n’est pas donné à la jeunesse stoïque de se maintenir : Il n’y a qu’un principe de vices pour un homme bien et à qui la raison a parlé, disait-il à ceux de sa famille avec qui il s’épanchait, c’est l’ennui, le dégoût des circonstances auxquelles il est soumis, c’est le néant du cœur ; au nom de Dieu, ne me laissez pas plus longtemps exposé à cet état.

2511. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — I. » pp. 301-321

Il était à Grenoble le 23 janvier 1783, fils d’un avocat, petit-fils d’un médecin, appartenant à la haute bourgeoisie du pays. […] Parlant de l’impression que cause sur place la vue du Forum contemplé du haut des ruines du Colisée, et se laissant aller un moment à son enthousiasme romain, il craint d’en avoir trop dit et de s’être compromis auprès des lecteurs parisiens : « Je ne parle pas, dit-il, du vulgaire pour admirer le pathos de Corinne ; les gens un peu délicats ont ce malheur bien grand au xixe  siècle : quand ils aperçoivent de l’exagération, leur âme n’est plus disposée qu’à inventer de l’ironie. » Ainsi, de ce qu’il y a de la déclamation voisine de l’éloquence, Beyle se jettera dans le contraire ; il ira à mépriser Bossuet et ce qu’il appelle ses phrases.

2512. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Madame Dacier. — I. » pp. 473-493

Anne Le Fèvre qui, à sa manière, fut une des gloires du siècle de Louis XIV, naquit à Saumur, non pas en 1651 comme on l’a souvent répété, mais plus probablement en mars 1654107. […] Et, dans une comparaison spirituelle, elle suppose qu’Hélène, cette beauté sans pareille chez Homère, est morte en Égypte, qu’elle y a été embaumée avec tout l’art des Égyptiens, que son corps a été conservé jusqu’à notre temps et nous est apporté en France ; ce n’est qu’une momie sans doute : On n’y verra pas ces yeux, pleins de feu, ce teint animé des couleurs les plus naturelles et les plus vives, cette grâce, ce charme qui faisait naître tant d’amour et qui se faisait sentir aux glaces mêmes de la vieillesse ; mais on y reconnaîtra encore la justesse et la beauté de ses traits, on y démêlera la grandeur de ses yeux, la petitesse de sa bouche, l’arc de ses beaux sourcils, et l’on y découvrira sa taille noble et majestueuse… C’est en ces termes véridiques et modestes que Mme Dacier annonçait sa traduction, et elle n’a rien dit de trop à son avantage.

2513. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — III » pp. 178-197

quoiqu’il soit donné à bien peu maintenant de te goûter inaltérée et pure, ou, te goûtant, de jouir longtemps de tes dons, trop infirme ou trop imprudent qu’on est pour pouvoir préserver tes douceurs sans mélange de toutes gouttes amères que la négligence ou la brusquerie de nature laisse tomber dans ta coupe de cristal ; tu es la nourrice de la vertu ; c’est dans tes bras qu’elle sourit, paraissant, comme elle l’est en réalité, née dans les cieux et destinée à y remonter de nouveau. […] L’apaisement est proprement ton bienfait ; et soit que je consacre tes légères heures à la lecture, à la musique, ou au travail du poète, ou à faire des filets pour préserver le fruit qui attire l’oiseau, ou que j’enroule le fil de soie autour de la bobine d’ivoire, selon que parfois l’ordonnent celles à qui l’homme est pour complaire, je ne te dédaigne jamais, et je te salue le bienvenu toujours !

2514. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Maine de Biran. Sa vie et ses pensées, publiées par M. Ernest Naville. » pp. 304-323

en 1766, fils d’un médecin de Bergerac, ayant fait ses études à Périgueux chez les doctrinaires, il entra en 1785 dans les gardes du corps de Louis XVI, et il y servit jusqu’aux journées des 5 et 6 octobre 1789. […] Quand on l’a bien lu, il naît, selon l’esprit et les dispositions qu’on y apporte, une foule de réflexions sur les problèmes les plus importants et les plus déliés de notre condition humaine ; mais la nature si délicate de ces problèmes fait qu’il vaut mieux que chacun tire sa leçon comme il l’entend, et boive l’eau de la source à sa manière.

2515. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « L’abbé de Marolles ou le curieux — II » pp. 126-147

On ne saurait se figurer ce que sont les vers de Marolles, « ces fruits tardifs d’une muse naissante dans un âge avancé » ; car c’est ainsi qu’il les appelle, et il les aime et les chérit par-dessus tout, en cette qualité de derniers nés. […] J’y opposerai seulement une certaine page des mémoires de Marolles où il se représente, sans y être obligé, comme singulièrement attaché à la pudeur, et n’ayant jamais manqué en rien d’essentiel aux devoirs de sa condition, et aussi cette autre page où, déplorant en 1650 la mort d’une petite fille née en son logis et sœur des deux autres personnes dont parle Jean Rou, il la regrette en des termes si touchants, si expressifs et si publics, que véritablement il ne semble pas soupçonner qu’on puisse attribuer sa douleur à un sentiment plus personnel : « Cela fait bien voir, dit-il simplement, ce que peut quelquefois la tendresse de l’innocence sur le cœur d’un philosophe quand il ne s’est pas dépouillé de toute humanité. » — Cette remarque faite pour l’acquit de ma conscience, chacun en croira pourtant ce qu’il voudra.

2516. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire de l’Académie française, par Pellisson et d’Olivet, avec introduction et notes, par Ch.-L. Livet. » pp. 195-217

à Béziers en 1624, originaire de Castres, d’une famille protestante très distinguée dans la robe, ayant fait ses études dans le Midi, il y prit un grand goût pour les bons auteurs latins, Cicéron, Térence, et ne s’aperçut, au sortir du collège, que l’on pouvait bien écrire aussi en français, que lorsqu’il eut vu quatre ouvrages dont il garda toujours un souvenir reconnaissant : les Huit Oraisons de Cicéron alors récemment traduites, Le Coup d’État de Sirmond, un volume des lettres de Balzac, et les charmants Mémoires de la reine Marguerite. […] On oublie que, par ces concours qu’elle ouvre à l’émulation des jeunes auteurs, l’Académie semble dire : « Jeune homme, avancez, et là, sur ce parquet uni, au son d’une flûte très simple, mais au son d’une flûte, exécutez devant nous un pas harmonieux ; débitez-nous un discours élégant, agréable, justement mesuré, où tout soit en cadence et qui fasse un tout ; où la pensée et l’expression s’accordent, s’enchaînent ; dont les membres aient du liant, de la souplesse, du nombre ; un discours animé d’un seul et même souffle, ayant fraîcheur et légèreté ; qui laisse voir le svelte et le gracieux de votre âge ; dans lequel, s’il se montre quelque embarras, ce soit celui de la pudeur ; quelque chose de vif, de court, de proportionné, de décent, qui fasse naître cette impression heureuse que procure aux vrais amis des lettres la grâce nouvelle de l’esprit et le brillant prélude du talent. » — Ainsi j’entends cet idéal de début académique, dont il ne se rencontre plus guère d’exemple.

2517. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Dominique par M. Eugène Fromentin (suite et fin.) »

Les paysans qui l’ont vu naître et grandir, et qui le retrouvent aux lieux où vivait son père, le respectent et l’aiment ; il s’arrange lui-même pour les aimer assez, surtout pour les servir et ne pas trop voir leurs laideurs et leurs défauts. […] L’homme bien , ainsi qu’on l’entendait autrefois, était au milieu des belles choses comme dans son élément ; il y était chez lui, non pas insensible sans doute à la finesse et à la noble élégance des objets qui l’entouraient, mais il ne s’y montrait pas non plus perpétuellement attentif et tout occupé de les faire remarquer aux autres ; il vivait au milieu, il en usait, et il vaquait à ses affaires, à ses plaisirs, à ses sentiments.

2518. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid(suite et fin.)  »

Tant que la scène dure, ne laissez pas à la critique le temps de naître ; ne donnez pas aux spectateurs le temps d’aller au foyer se refroidir dans un entr’acte. […] Quand on a réuni, comme je m’en suis donné la triste satisfaction, tous ces pamphlets que le triomphe du Cid fit naître, on reçoit une impression de dégoût et presque de soulèvement, analogue à celle que dut éprouver le cœur de Corneille.

2519. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Réminiscences, par M. Coulmann. Ancien Maître des requêtes, ancien Député. »

Coulmann, vers 1795 ou 1796 en Alsace, aux bords du Rhin, était le frère de la belle comtesse Walther, femme d’un brave général dans ces mêmes contrées, et qui commanda avec honneur et gloire les grenadiers à cheval de la Garde impériale.

2520. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet (suite.) »

L’idée d’Assemblée constituante naquit, selon lui », de l’état passif et incertain du monarque, s’effaçant lui-même devant le nouveau pouvoir qu’il avait appelé à l’origine pour consolider le sien, non pour l’annuler. […] en 1713 dans le Rouergue, élevé chez les Jésuites et engagé lui-même dans la Société, l’abbé Raynal n’en était sorti que vers 1748, à l’âge de trente-cinq ans93.

2521. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME ROLAND — II. » pp. 195-213

Toute âme, en avançant, subit toutes les atteintes, tout le déchet dont elle est capable. « Tous les hommes, a dit le noble et bienveillant Vauvenargues, naissent sincères et meurent trompeurs ; » il lui eût suffi de dire, pour exprimer sa pensée amère, qu’ils meurent détrompés. […] Sa vie déborde, elle se compare à un lion en cage : elle devait naître femme spartiate ou romaine, ou du moins homme français ; osons citer son vœu réalisé depuis par des héroïnes célèbres : « Viens donc à Paris, écrit-elle à la douce et pieuse Sophie ; rien ne vaut ce séjour où les sciences, les arts, les grands hommes, les ressources de toute espèce pour l’esprit, se réunissent à l’envi.

2522. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Aloïsius Bertrand »

Louis-Jacques-Napoléon Bertrand naquit le 20 avril 1807, à Ceva en Piémont (alors département de Montenotte), d’un père lorrain, capitaine de gendarmerie, et d’une mère italienne. […] Je vois l’ombre naître, Près de la fenêtre    Du manoir, De dame en cornette Devant l’épinette   De bois noir.

2523. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre V. Des ouvrages d’imagination » pp. 480-512

Les ouvrages d’imagination agissent sur les hommes de deux manières : en leur présentant des tableaux piquants qui font naître la gaieté, ou en excitant les émotions de l’âme. […] Quels seront nos contrastes, dira-t-on, et d’où naîtront nos effets ?

2524. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre II. De l’expression »

Ils sont nés dans les tavernes ou dans les palais, dans le cabinet ou à la campagne ; ils apparaissent avec un cortège qui leur donne leur titre et leur rang, humble ou élevé, dans le discours. […] Junon chez lui, à l’occasion, parle en marchande et compare la queue du paon « à la boutique d’un lapidaire. » Il tourne volontiers au style trivial que sa trivialité rend narquois ; son amoureux est tiraillé entre deux veuves, « l’une encore verte, et l’autre un peu bien mûre » ; il est de moyen âge et « tire sur le grison », mais « il a du comptant, et partant de quoi choisir. » Ailleurs la goutte plante le piquet sur l’orteil d’un pauvre homme, pendant que l’araignée « se campe sur un lambris, comme si de ces lieux elle eût fait bail à vie. » Tout son style est composé ainsi de familiarités gaies ; rien n’est plus efficace pour mettre en notre cerveau l’image des objets ; car en tout esprit les images familières se réveillent plus aisément que les autres, et les images gaies naissent plus promptement que toutes les autres dans l’esprit des Français.

2525. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIIIe entretien. Chateaubriand, (suite) »

« Quelles qu’aient été tes erreurs, innocent ou coupable, sur un trône ou dans une chaumière, qui que tu sois, enfant du malheur, je te salue : Experti invicem sumus, ego ac fortuna. […] M. de Lamoignon, émigré, rentré avant lui, parent par alliance de sa femme, née Mudson Lindsay, Anglaise aimable, le reçut discrètement aux Ternes.

2526. (1887) Discours et conférences « Réponse au discours de M. Louis Pasteur »

Nul n’a parcouru d’une marche aussi sûre les cercles de la nature élémentaire ; votre vie scientifique est comme une traînée lumineuse dans la grande nuit de l’infiniment petit, dans ces derniers abîmes de l’être où naît la vie. […] La fermentation est toujours d’origine vitale ; elle vient d’êtres microscopiques qui trouvent dans la matière organique leur nourriture, non leur raison de naître ; le groupe droit et le groupe gauche ne satisfont pas également à la nutrition des microbes.

2527. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre VIII. La question de gout ce qui reste en dehors de la science » pp. 84-103

Qu’il se contente de nous dire ce que contient une œuvre, ce qui l’a fait naître, ce qu’elle a engendré à son tour ! […] Par suite, une juste proportion entre l’histoire et la réalité qu’elle veut retracer exige qu’on mette en pleine lumière la tragicomédie dont l’apparition est devenue une date du théâtre français en laissant dans la pénombre ses deux sœurs mal nées.

2528. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVII. Rapports d’une littérature avec les littératures étrangères et avec son propre passé » pp. 444-461

Il est jusqu’à des poèmes en vers assonancés à la mode de nos chansons de geste. […] Il peut arriver alors que le premier de ces ouvrages similaires ne soit pas le meilleur, qu’une idée trouvée et mal exploitée par un talent novice ou secondaire soit plus tard mise en valeur par un maître, Molière a profité chacun le sait de trouvailles pareilles.

2529. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Procès de Jeanne d’arc, publiés pour la première fois par M. J. Quicherat. (6 vol. in-8º.) » pp. 399-420

C’est alors que dans un village de la vallée de la Meuse, aux confins de la Lorraine, vallée qui venait elle-même d’être envahie par des bandes et d’avoir sa part de douleurs communes, une jeune fille, née d’honnêtes laboureurs, simple, pieuse, régulière, crut entendre une voix. […] Sans pouvoir me permettre ici d’aborder une question qui est tout entière du ressort de la physiologie et de la science, je dirai seulement que le seul fait d’avoir entendu des voix et de les entendre habituellement, de se figurer que les pensées nées du dedans, et qui reviennent sous cette forme, sont des suggestions extérieures ou supérieures, est un fait désormais bien constaté dans la science, un fait très rare assurément, très exceptionnel, mais qui ne constitue nullement miracle, et qui non plus ne constitue pas nécessairement folie : c’est le fait de l’hallucination proprement dite.

2530. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Diderot. (Étude sur Diderot, par M. Bersot, 1851. — Œuvres choisies de Diderot, avec Notice, par M. Génin, 1847.) » pp. 293-313

Diderot, à Langres en 1713, fils d’un père coutelier (comme l’était le père de Rollin), eut dès l’enfance le sentiment de famille à un haut degré, et il le tenait des siens : c’était une race d’honnêtes gens. […] Commandé par son ami, il s’avisa, pour la première fois, de regarder, d’examiner ce qu’il n’avait jusque-là que vu en passant ; et du résultat de son observation et de ses réflexions naquirent ces pages de causeries merveilleuses, qui ont véritablement créé en France la critique des beaux-arts.

2531. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Michaud, de l’Académie française. » pp. 20-40

Joseph Michaud naquit le 19 juin 1767, au bourg d’Albens en Savoie, d’une famille honorable et dont quelques membres avaient même acquis une notoriété historique. […] Michaud était journaliste : aux aguets chaque matin, il excellait à faire cette guerre à l’œil, à suivre en souriant les moindres mouvements de l’ennemi, à tomber sur lui par surprise ; quand on sait si bien le point juste où il faut viser pour blesser, il est difficile, même aux moins méchants, un jour ou l’autre, de ne pas être cruels.

2532. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Arnault, de l’Institut. » pp. 496-517

à Paris, le 22 janvier 1766, d’une famille qui tenait à la riche bourgeoisie, il eut de bonne heure ce que de tout temps on trouve si aisément dans la bourgeoisie de Paris à tous les degrés, son franc-parler, de la malice, de la gaieté et de l’indépendance. […] Pourtant le germe tant méprisé, Le germe, au fond du cœur Chêne dès sa naissance, demande grâce et indulgence pour sa jeunesse ; il demande du temps pour croître et grandir ; le temps lui vient en aide : Les Buissons, indignés qu’en une année ou deux         Un Chêne devînt grand comme eux,         Se récriaient contre l’audace De cet aventurieur qui, comme un champignon, d’hier, et de quoi ?

2533. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Ivan Tourguénef »

» Par une dernière infortune, il s’est épris d’une jeune fille loyale, ferme, qui croit de toutes ses forces aux idées révolutionnaires et se prépare sans hésiter à évangéliser le peuple ; son amour pour Nejdanof est en dernière analyse, du rôle d’agitateur que celui-ci a prétendu jouer. […] Mais elles ne naissaient pas en lui et il n’en eut pas l’amour.

2534. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — II. L’histoire de la philosophie au xixe  siècle — Chapitre II : Rapports de l’histoire de la philosophie avec la philosophie même »

Selon les uns, les systèmes sont des opinions arbitraires et de fantaisie, nées dans l’imagination des philosophes, comme les épopées et les drames dans l’imagination des poètes : ils n’ont aucune valeur objective. […] De ce défaut fondamental, commun à presque tous les philosophes modernes, naît une sécheresse et une sorte de pauvreté relative, lorsqu’on compare leurs œuvres à celles des anciens.

2535. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre VI. Des Livres qui traitent de la Rhétorique. » pp. 294-329

Ce que je pardonne encore moins à l’auteur si estimable par son sçavoir & par sa probité, c’est de citer des vers classiques qui doivent mourir dans les lieux où ils sont nés. […] Ses regles sont ingénieuses & ses exemples agréables ; on a appellé son livre le Dictionnaire des Pensées fines, parce qu’il y en a beaucoup de ce genre, & qu’il peut servir à en faire naître.

2536. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre III : Concurrence vitale »

Celle-ci aura de même plus de chances de survivance ; car, entre les nombreux individus de toute espèce qui naissent périodiquement, un petit nombre seulement peut survivre. […] Or, puisqu’il naît un nombre d’individus supérieur à celui qui peut vivre, il doit donc exister une concurrence sérieuse, soit entre les individus de la même espèce, soit entre les individus d’espèces distinctes, soit enfin une lutte contre les conditions physiques de la vie.

2537. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Doyen » pp. 178-191

Je crois avoir déjà remarqué dans quelques-uns de mes papiers, où je m’étais proposé de montrer qu’une nation ne pouvait avoir qu’un beau siècle, et que dans ce beau siècle un grand homme n’avait qu’un moment pour naître, que toute belle composition, tout véritable talent en peinture, en sculpture, en architecture, en éloquence, en poésie, supposait un certain tempérament de raison et d’enthousiasme, de jugement et de verve, tempérament rare et momentané, équilibre sans lequel les compositions sont extravagantes ou froides. […] Le crépuscule naît dans sa composition, comme dans la nature.

2538. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VII. Mme de Gasparin »

car l’incognito du talent est impossible, et le voile qu’elle avait mis sur le sien a été levé… Mme de Gasparin est une chrétienne qui n’écrit que pour des chrétiens, et ce n’est pas moins pour tout le monde, car son livre est bien capable d’en faire naître ; mais n’y eût-il dans ce livre divinisé par le sentiment chrétien que l’imagination humaine où il y a le génie des plus saintes croyances, qu’il faudrait admirer encore le poëme touchant et sublime que l’imagination aurait composé avec les idées de la foi ! […] Il y a un rayon égaré de l’âme de sainte Thérèse dans cette protestante que la personnalité divine de Notre Seigneur Jésus-Christ transporte, mais c’est une sainte Thérèse comme le protestantisme peut en faire des plus grandes âmes qui naissent dans son sein.

2539. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Innocent III et ses contemporains »

Il était donc presque dans la pourpre, et eût pu s’appeler Porphyrogénète, comme certains empereurs de Constantinople. […] Après Innocent, le mouvement d’indépendance qu’on avait voulu comprimer se produisait toujours, et en 1222 les bulles d’Honorius III ne faisaient déjà plus naître de croisés contre l’Albigeois.

2540. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Henri Heine »

Mais, malingre, il prétendit toujours qu’il était mort et que sa vie n’était que le galvanisme de la volonté et des nerfs.

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