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1751. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME ROLAND — II. » pp. 195-213

Ces lettres finissent donc comme un roman, par le mariage ; et, à les bien prendre, elles sont un roman en effet, celui de la première jeunesse, et de l’amitié de deux jeunes filles, de deux pensionnaires qui font leur entrée dans la vie. […] Une précaution est à prendre en abordant ces lettres : pour n’y point avoir de mécompte, il faut se dire une partie de la préoccupation et du dessein de la jeune fille qui les écrit. […] en composant mes lettres (donc elle les compose), ai-je l’espoir qu’après ma mort elles trouveront un éditeur et prendront rang à côté de celles de Mme de Sévigné ? […] Je pris la plume et je fis ton portrait pour m’amuser ; je le garde précieusement. […] Quelquefois je suis tentée de prendre une culotte et un chapeau, pour avoir la liberté de chercher et de voir le beau de tous les talents.

1752. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Aloïsius Bertrand »

Le maître du logis me souhaita une bienvenue simple et cordiale ; sa moitié me fit changer de linge et préparer un chaudeau, et l’aïeul me força de prendre sa place, au coin du feu, dans le gothique fauteuil de bois de chêne que sa culotte (milady me le pardonne !) […] Tantôt à l’ombre, le long des rues solitaires, on l’eût rencontré rôdant et filant d’un air de Pierre Gringoire, Comme un poëte qui prend des vers à la pipée. […] Eugène Renduel avait lu le manuscrit des Fantaisies de Gaspard, y avait pris goût, et il ne s’agissait plus que de l’imprimer. […] Une première fois, se trouvant pris de la poitrine, il était entré à la Pitié dans les salles de M.  […] De nos jours, trop souvent aussi, pour avoir voulu sacrifier imprudemment aux Muses, on est mis à la gêne et l’on se voit pris comme dans le coffre ; mais on y reste brisé, et les abeilles ne viennent plus.

1753. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre II. De l’expression »

Dans cette société de petites gens et dans cette habitude des détails vulgaires, le poëte a pris un ton familier qu’il garde partout. […] 188 Ce sont les figures habituelles aux campagnards, toutes prises dans la pensée de l’argent et de la bombance. […]          Avant que la nitée     Se trouvât assez forte encor     Pour voler et prendre l’essor. […] On voit dans Voiture et dans les lettres du temps, que toute pensée, même gaie et folâtre, prenait alors la grande phrase pour parure. […] La Fontaine s’est plu à tomber du ciel en terre, et à prendre le langage d’un marchand, après celui de Virgile.

1754. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Œuvres de Barnave, publiées par M. Bérenger (de la Drôme). (4 volumes.) » pp. 22-43

Dès les premiers jours, il se fit remarquer dans l’Assemblée par la clarté et la netteté de son esprit et de sa parole, et il prit rang avec faveur. […] On prit l’engagement de ne retourner désormais au spectacle que quand satisfaction aurait été donnée, et on n’y revint, en effet, qu’après plusieurs mois, lorsque Mme Barnave eut consenti à y reparaître. […] Comme son estomac lui faisait mal, je lui proposai du café, elle le prit. […] Quand la Reine voulait faire à Barnave une communication quelconque, elle mettait un écrit cacheté dans la poche de Jarjayes, et celui-ci le transmettait à Barnave, lequel, après en avoir pris connaissance, le replaçait recacheté dans la poche du messager, de façon que la Reine pût le reprendre et le détruire. […] La poche de Jarjayes était comme un bureau où chacun déposait sa réflexion, son impression personnelle, son monologue, sans avoir l’air de se douter qu’un autre que soi en pût prendre connaissance.

1755. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Madame de Motteville. » pp. 168-188

Aussi dit-on qu’elle s’ennuyait quelquefois de la moitié du lit, et que, quand le bonhomme était endormi, elle faisait prendre sa place à une femme de chambre, et que le vieux président ne s’apercevait de rien. […] Mais la partie originale de ces Mémoires est celle qui prend à partir de là, et qui traite de ce qui s’est passé à portée de vue de l’auteur. […] Elle sait ce que signifient trop souvent ces grands airs d’indépendance que prennent ceux que la faveur repousse, ces bruyantes fiertés qui se fondent à la moindre avance et tournent à la bassesse. […] Ses Mémoires deviennent plus sérieux et prennent un caractère historique plus élevé à mesure qu’on avance dans le mouvement des agitations civiles et dans les troubles de la Fronde. […] La religion prit de plus en plus d’empire dans cette âme toute faite pour l’accueillir et si naturellement ordonnée.

1756. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire de la littérature française, par M. D. Nisard. Tome iv. » pp. 207-218

Il est des critiques qui disent : « Le vrai est ce qu’il peut », et qui prennent les choses et les gens comme ils les rencontrent. […] Y a-t-il deux hommes, j’entends même deux hommes de goût, qui puissent l’être absolument, surtout quand l’élément moral est pris si fort en considération ? […] Saint-Marc Girardin, qui le pourrait chicaner et prendre à partie. […] Les erreurs de cet esprit si juste sont des jugements intéressés, où il a pris sa commodité pour règle… Et comparant cette correspondance de Voltaire avec les lettres de Cicéron, cet autre esprit universel et le grand épistolaire de l’Antiquité, il dira : L’amour de la gloire est l’âme de ces deux recueils, et ce que Voltaire fait dire au Cicéron de sa Rome sauvée : Romains, j’aime la gloire et ne veux pas m’en taire, est aussi vrai du poète que de son héros.

1757. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Appendice sur La Fontaine »

La littérature du siècle de Louis XIV repose sur la littérature française du xvie et de la première moitié duxviie  siècle ; elle y a pris naissance, y a germé et en est sortie ; c’est là qu’il faut se reporter si l’on veut approfondir sa nature, saisir sa continuité, et se faire une idée complète et naturelle de ses développements. […] et quand on le lui aurait mis entre les mains, de quelle façon s’y fût-il pris pour le déchiffrer, même à grand renfort de besicles, comme disent Rabelais et Paul-Louis ? […] Mais même en poussant aussi loin qu’on voudra cette exigence scrupuleuse de La Fontaine, et en estimant, d’après un précepte de rhétorique assez faux à mon gré, que chez lui la composition était d’autant moins facile que les résultats le paraissent davantage, on n’en viendra pas pour cela à comprendre par quel enchaînement d’études secrètes, et, pour ainsi dire, par quelle série d’épreuves et d’initiations, le pauvre La Fontaine prit ses grades au Parnasse et mérita, le jour précis qu’il eut quarante et un ans, de recevoir des neuf vierges le chapeau de laurier, attribut de maître en poésie, à peu près comme on reçoit un bonnet de docteur. […] Il avait alors vingt-deux ans, dit-on, et son génie prit feu aussitôt comme celui de Malebranche à la lecture du livre de l’Homme.

1758. (1874) Premiers lundis. Tome I « Alexandre Duval de l’Académie Française : Charles II, ou le Labyrinthe de Woodstock »

Duval : « Un jeune homme, dès sa sortie du collège, où il avait déjà pris le goût du théâtre, qu’il y avait étudié, plein d’admiration pour ses auteurs anciens, et pour les chefs-d’œuvre des Racine, des Corneille, des Molière, s’empressait de composer, d’après leurs principes, une tragédie ou une comédie. […] « S’il réussissait, au contraire, l’auteur, dès ce moment homme à la mode, prenait un rang dans la société ; un seul genre de place pouvait lui convenir : il devenait le commensal plutôt que le secrétaire d’un grand seigneur. […] Si la rénovation du théâtre dans le sens des idées dites romantiques est impraticable en France, il faut s’en prendre à l’une ou à plusieurs de ces quatre causes : 1° notre constitution sociale, 2° le goût du public, 3° le manque d’auteurs, 4° le régime des théâtres. […] Ces suppressions se bornent d’ailleurs à trois ou quatre articles. — Enfin, avant de prendre définitivement congé de l’année 1829, signalons une fausse date que M. 

1759. (1875) Premiers lundis. Tome III « M. Troplong : De la chute de la République romaine »

Les Romains de la fin de la République avaient des institutions qui mettaient en jeu les mêmes facultés, les mêmes passions que nous avons vues à l’œuvre ; ils assistaient à des révolutions analogues ; les caractères soumis aux mêmes épreuves prenaient les mêmes formes ; et, en se transportant parmi eux au siècle de Cicéron, on pourrait, au premier abord, se croire encore parmi nous. […] L’entrée en matière de ses Annales fait espérer d’utiles révélations ; en quelques mots profonds et rapides, il montre le monde fatigué des guerres civiles, un besoin général de repos et de sécurité ; Auguste, maître de l’armée par ses largesses, du peuple par ses distributions, des nobles par ses faveurs, de tous par la douce tranquillité de son gouvernement ; les provinces acceptant avec joie cette domination d’un seul homme par aversion pour l’empire du sénat et du peuple, pour les combats des grands, pour l’avarice des magistrats, pour la violence, la corruption et la brigue qui avaient pris la place des lois ; enfin, la République s’effaçant peu à peu du souvenir d’une société qui, sous un sceptre protecteur, goûtait un repos dont elle avait été si longtemps privée. […] « Prenons par exemple un passage célèbre de ses Annales, celui où il expose les vicissitudes de la législation romaine. […] Tenir à la fois présents tous les ressorts, y avoir l’œil pour les tendre et les détendre insensiblement : prendre une détermination dans les crises, la maintenir ou ne la modifier qu’autant qu’il faut pendant les difficultés et les lenteurs de l’exécution ; être naturellement secret ; porter légèrement tout ce poids sans que le front en ait un nuage ; entremêler la paix à la guerre, et, sans faiblir, les mener de front, songer en toutes deux au nécessaire, c’est-à-dire aussi, chez de certaines nations, à la grandeur des résultats et à la gloire : dans le même temps exalter les courages et continuer d’apaiser les passions, les tenir comprimées de telle sorte que les gens de bien, selon la belle expression de Richelieu, dorment en paix à l’ombre de vos veilles, et que les laborieux dont la masse de la société se compose se livrent en tous sens au développement légitime de leur activité, que dis-je ?

1760. (1888) Demain : questions d’esthétique pp. 5-30

Demain, questions d’esthétique À propos d’un livre de nouvelles théories esthétiques1, j’eus l’idée de consulter sur l’objet même de ce livre quelques-uns des écrivains que j’estime le plus foncièrement parmi ceux qui représentent les formules accomplies ; Il me semblait précieux d’avoir le sentiment des Maîtres actuels sur les tendances de la jeune littérature, sur sa valeur et sur son avenir : quoique mes conclusions personnelles fussent déjà prises, j’étais curieux de savoir comment, par les théories, les efforts de demain s’accorderaient avec les traditions d’hier et les œuvres d’aujourd’hui. […] Je crois avoir assez bien défini le nouveau candidat à l’Académie française, celui-là même qui disait tantôt, avec autant d’élégance que d’exactitude : « J’ai divisé mes visites en trois groupes. » ..................A les bien prendre, nos jeunes poètes sont des mystiques. […] Je vous remercie de la courtoisie du fait et des termes, sans prendre pour moi les ironies légères qui relèvent votre prose, et qui vous sont un moyen facile et louable de faire agréer du « Grand Public » certaines idées dont la gravité l’effaroucherait si elle ne se masquait de sourire. […] Cette époque fut, chez nous, celle de la floraison de la raison pure et il est assez facile de la reconnaître sous sa livrée chrétienne, cette raison qui ne s’était pas abdiquée, bien qu’elle prît gloire à servir la messe.

1761. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre III, naissance du théâtre »

Tiré de flancs embrasés, accouché par la foudre qui dévorait sa mère, frappé de démence par une déesse hostile, attaqué par des rois qui reniaient sa divinité, aux prises avec des géants et des monstres, déchiré par les Titans, d’après d’autres mythes, il avait affronté tous les périls, surmonté toutes les épreuves d’un héros souffrant. […] Le rythme prenait, avec elle, un ton de délire. […] Il se fit de plus en plus sérieux et plaintif ; il prit pour lui la charge des douleurs du dieu, laissant au chant comique ses joies en partage. […] Un jour, aux Lénéennes, un homme, un inconnu, « quelqu’un », dit le Scholiaste, — είς τις — élu mystérieux de Melpomène, pris aux cheveux par elle, comme Achille le fut par Pallas, Habacuc par l’Ange, s’élance sur la table du sacrifice, converse avec le Chœur, lui parle, lui répond.

1762. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Œuvres littéraires de M. Villemain (« Collection Didier », 10 vol.), Œuvres littéraires de M. Cousin (3 vol.) » pp. 108-120

Prenez tous les hommes considérables auxquels s’est appliqué jusqu’ici ce titre de critique, Malherbe, Boileau (car tous deux étaient des critiques sous forme des poètes) ; le docteur Johnson en Angleterre ; La Harpe chez nous, même M. de Fontanes : tous ces hommes, qui ont eu de l’autorité en leur temps, jugeaient des choses de goût avec vivacité, avec trop d’exclusion peut-être, mais enfin avec un sentiment net, décisif et irrésistible. […] Cousin, depuis que, sans déserter la philosophie, mais en partageant toutefois son culte, il a hautement pris position dans la pure critique littéraire. […] Grâce à lui désormais, une foule de détails qui semblaient du ressort exclusif des bibliographes et des éditeurs et dont ces derniers ne faisaient qu’un usage très borné et très aride, ont pris un sens et une vie qui les rattache à l’histoire littéraire. […] Cousin a pris à cœur de recueillir les moindres opuscules de ces femmes plus ou moins célèbres, leurs petits romans ou nouvelles, leurs lettres publiées ou inédites.

1763. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1852 » pp. 13-28

* * * — Dans l’hypertrophie du cœur, la figure, après la mort, prend le caractère extatique. […] * * * — Tous comptes faits avec Dumineray, le seul éditeur de Paris qui, sous l’état de siège, ait osé prendre en dépôt notre pauvre En 18.. […] Dans ce voyage où Gavarni était obligé de veiller à la propreté de son compagnon, un jour il ne pouvait s’empêcher de lui dire : — « Ah çà, Balzac, pourquoi n’avez-vous pas un ami… oui, un de ces bourgeois bêtes et affectueux, comme on en trouve… qui vous laverait les mains, mettrait votre cravate, enfin qui prendrait de vous le soin que vous n’avez pas le temps… » — « Oh ! […] Il a emménagé avec lui une jeune femme, pas précisément jolie, et qui de temps en temps se dérobe et se cache dans un joli mouvement contourné pour prendre une prise de tabac, mais une jeune femme qui a de paresseuses poses de chatte dans sa bergère au coin de la cheminée, un petit bagout spirituel, une grâce de gentille bourgeoise d’un autre siècle : toute cette douce et tranquille séduction cachant une hystérie très prononcée, qui la fait, presque tous les mois, à un quantième, où elle dit, aller chez elle pour donner son linge à la blanchisseuse, disparaître deux ou trois jours avec un des attablés ordinaires de son amant, — après quoi, elle rentre au bercail et le ménage reprend comme si de rien n’était.

1764. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — L’abbé d’Aubignac, avec Ménage, Pierre Corneille, Mademoiselle de Scudéri et Richelet. » pp. 217-236

Il prit le nom de celle de d’Aubignac, diocèse de Bourges. Non content de cette récompense, le jeune duc eut à peine atteint l’âge de vingt-cinq ans, que le premier acte de majorité qu’il fit fut de donner à son précepteur une pension de quatre mille livres à prendre sur tous ses biens. […] Des remords de conscience le prirent. […] Il feint une lettre d’Ariste à Cléanthe, dans laquelle il soutient n’avoir rien pris à l’auteur de Clélie.

1765. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — La déclamation. » pp. 421-441

Ils aiment mieux croire qu’on a mal pris le sens du passage que de supposer les Romains capables de se plaire à un spectacle bisarre, puérile & du genre de Brioché. […] Nous sçavons, dit-il, que César, Alexandre, Annibal étoient des hommes comme nous, passionnés comme nous, ne valant pas mieux que nous, mais séduits dès l’enfance par l’expression outrée de la déclamation, nous prenons ces héros de l’antiquité sur le pied que les comédiens nous les donnent, c’est-à-dire pour des hommes d’une autre nature que la nôtre. […] On riroit, dans les pays protestans, de voir un orateur sacré prendre, en chaire, le ton de déclamateur. […] Le même Riccoboni trouve qu’il n’y a que les avocats qui s’entendent à bien déclamer, qui sçachent modérer leur feu, prendre un air de vérité, & parler comme des hommes doivent parler à d’autres hommes, qu’il n’y a qu’eux qui soient attentifs à rendre les tons, & les accens de la nature.

1766. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre I : Une doctrine littéraire »

Ces deux parties de la même théorie, ou, pour mieux dire, ces deux théories distinctes sont tellement mêlées entre elles, que ni l’auteur ni ses critiques n’ont pris l’habitude de les séparer. […] L’homme de génie, dites-vous, n’est que l’écho de la foule ; mais cette foule elle-même, je le demande, où a-t-elle pris cette somme générale de vérité et de raison que l’écrivain supérieur viendrait à son tour exprimer ? […] Je prendrai, pour éclaircir ma pensée, un exemple emprunté à l’histoire religieuse, mais que l’on me permettra de considérer sous un point de vue tout profane et tout littéraire. […] Quand il applique le premier, c’est-à-dire quand il se contente de rechercher dans les écrits les vérités qu’ils contiennent, sans distinguer si ce sont des vérités de tradition ou des vérités d’invention, des vérités de discipline ou des vérités de liberté, sa critique est large et sûre, à la fois souple et forte : elle rajeunit les sujets les plus épuisés par la manière mâle et solide dont elle les relève ; mais, quand il applique le second de ces principes, le principe de la discipline, sa critique prend quelque chose de partial, de jaloux, je dirais presque d’étroit : on sent que ce n’est plus de la critique absolue, mais de la critique relative faite pour un temps, pour combattre certaines passions, pour défendre certains écrits : c’est une critique de combat.

1767. (1860) Ceci n’est pas un livre « Le maître au lapin » pp. 5-30

. — Rien qu’une démarche, une simple démarche prenait à ses yeux des proportions monstrueuses. […] De grandes faiblesses prennent souvent le pauvre diable ; une bouteille de vin et une livre de viande par semaine ne lui nuiraient peut-être pas ! […] Les photographes ont pris les plus merveilleux points de vue de l’univers, les paysages les plus pittoresques et les plus grandioses ont posé pour eux ; — il semble que la peinture soit vaincue et qu’elle n’ait plus qu’à s’exiler dans quelque bourgade encore barbare, en compagnie de l’antique diligence de nos pères. […] Vite Rodolphe passe un paletot, prend sa canne et va trouver son panégyriste.

1768. (1818) Essai sur les institutions sociales « Addition au chapitre X de l’Essai sur les Institutions sociales » pp. 364-381

Les philosophes qui dans cette question ont pris pour cause initiative, pour impulsion originaire, la révélation de la parole, ont toujours été mal compris, ou se sont mal expliqués, ce qui a donné lieu à de trop faciles accusations de paralogisme. […] De Brosses a analysé avec une admirable sagacité les fonctions de l’instrument vocal ; il a pris rang, pour cette prodigieuse analyse, parmi les esprits du premier ordre : mais enfin il n’a défini et expliqué que l’instrument, et non la faculté. […] Non seulement nous n’avons plus de pensées sans qu’il s’y lie des signes oraux simultanément perçus avec elles, mais pour nous s’est évanoui dans l’ordre intellectuel le sentiment de l’analogie physique du mot. » Or cet événement que, dans une telle hypothèse, j’aurais confondu avec celui que j’ai voulu signaler, c’est cet événement que j’aurais pris pour l’émancipation de la pensée des liens de la parole. […] Ici, il faut être juste, la patience échapperait s’il ne s’agissait pas de répondre à un homme qui fut si éclairé, et que la religion de l’amitié prend sous sa sauvegarde ; la patience échapperait, car c’est encore l’événement que j’ai retracé, mais mal saisi, mal raconté, mal caractérisé.

1769. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XV. Mme la Mise de Blocqueville »

Elle n’avait rien lu que saint François de Sales (et c’était tant pis, car elle lui a pris de ses grâces mignardes) avant son arrivée à Paris. […] Mme de Blocqueville a fourré du jasmin dans les Soirées de Saint-Pétersbourg, et elle a cru qu’elle cacherait ou parerait ainsi la tentative de prendre un titre et une forme littéraire que le génie a rendus inaliénables aux imitateurs qui traînent toujours derrière le génie ! […] Les forts conversationnistes de ses Soirées, qui s’y donnent la réplique, prennent les questions par tous les bouts qu’elles ont et qu’elles n’ont pas. […] Je n’en sais rien, mais ce que je sais et ce que je puis garantir, c’est l’ennui, pour hommes et pour femmes, qui tombera sur tout le monde comme une avalanche, de ces deux accablants volumes ; c’est l’horreur qu’on va prendre dans ce crachoir des lectures de toute une vie de bas-bleu, retourné et renversé sur nos têtes, et dont on voudra se laver et s’essuyer au plus vite, n’importe où !

1770. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « La Chine »

avec cette érudition de troisième main qu’on nous donne pour de l’érudition de première, la Chine restera donc ce qu’elle a été jusqu’ici : une espèce de rêve, entrecoupé de réalités étonnantes pour les penseurs et pour les poètes, et, pour les curieux, les historiens et les observateurs, une espèce de mystification colossale en permanence dans l’Histoire… Olla podrida morale de toutes choses, depuis la piété filiale jusqu’à l’infanticide, attendant toujours, mais vainement encore, pour cette fois, son chimiste et son analyse, la Chine va continuer d’être la pierre de scandale dans Israël, le sujet pris, quitté et repris, des vaines disputes de nos sagesses. […] Enfin, comme intelligence de la race, ils prennent la mesure du plus fort cerveau chinois qui ait jamais existé, ils nous peignent en pied ce Confucius (Koung-fou-Tseu) qu’ils comparent, on ne sait trop pourquoi, à notre glorieux cardinal de Richelieu, lequel n’a pas grand’chose, pourtant, de ce quaker Oriental, dont la haute philosophie ressemble à une Civilité puérile et honnête… Et c’est ainsi qu’ils confirment, au lieu de la détruire, cette grande accusation portée contre la Chine par des esprits sévères auxquels des potiches et des porcelaines, et une originalité grotesque dans les arts et dans la vie, n’ont pas tout fait pardonner ! Il y a déjà quelques années, on publia sur la Chine et sur les Chinois un petit livre, avec des dessins lithographies à deux teintes par Cicéri (je crois), et dont l’auteur était un artiste, un monsieur Auguste Borget, qui, au lieu de voyager à Paris dans les grammaires chinoises, avait pris le parti d’aller voir chez eux les Chinois, assis sur leurs propres tapis, et de leur demander, sans trop de cérémonie, une tasse de thé… Balzac, notre grand romancier, qui aimait la Chine comme un roman à écrire, rendit compte de cet ouvrage dans un journal, — une des lucioles du temps à présent éteinte. […] Eh bien, c’est ce livre de Borget, qui saisissait presque au saut du lit et en déshabillé les Chinois, que Pauthier et Bazin auraient dû prendre pour modèle !

1771. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’ancien Régime et la Révolution »

Et quand nous citons ces noms célèbres, nous les prenons au poids circulant de leur gloire, car pour nous ils ne valent, ni comme publicistes ni comme historiens, le haut prix de leur renommée. […] Il a pris l’ancien Régime à sa dernière heure, dans son expression la plus équivoque et dans son millésime le plus flottant, sans dire où, pour lui, cet ancien Régime commençait, et il n’a pas su en déterminer ni les altérations survenues ni les caractères subsistants. […] Écrire une telle chose sérieusement, c’est une dérision de l’histoire, c’est prendre l’accident pour la cause, le symptôme pour la maladie, les conséquences pour le principe. […] Nous avons montré la valeur substantielle du livre de Tocqueville, soit qu’on le prenne pour un livre d’histoire indépendante écrit pour la postérité, soit qu’il veuille être, sous un autre aspect, un ouvrage de parti et de circonstance.

1772. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIII. M. Nicolardot. Ménage et Finances de Voltaire » pp. 297-310

Prenez, si vous voulez, tous les écrits politiques que notre siècle a vus, toutes les élucubrations quelconques de ces penseurs à répétition qui se donnent pour sonner leur propre pensée, et vous verrez si un seul de ces écrits peut échapper à l’une ou à l’autre de ces deux et fatales origines, ou la théorie de Rousseau ou la théorie de Montesquieu ! […] Louis Nicolardot prend des proportions d’importance à l’égal même de son héros, si c’est bien héros qu’il faut dire. […] Divisant avec un art caché sous une distribution naturelle tout son sujet en trois parties, l’histoire de la fortune, des dépenses et des libéralités de Voltaire, il le prend tour à tour dans ces trois cadres et l’y fait mouvoir avec une grande puissance de reconstruction et de détails. […] Ces renseignements, ces anecdotes, ces rapprochements, ces témoignages, qui ne vont à rien moins qu’au déshonneur complet de Voltaire et dont l’auteur du Ménage et finances prend intrépidement la responsabilité vis-à-vis de la Critique, essaiera-t-on de les diminuer ?

1773. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame de Sabran et le chevalier de Boufflers »

Les lettres, les correspondances, prirent l’importance de toutes les individualités déchaînées, de toutes les vanités, de tous les orgueils, de tous les amours, de tous les sentiments. […] Même l’histoire littéraire du xviiie  siècle prit cette forme de la lettre, le moule forcené du temps ; car cette histoire, c’est la Correspondance de Voltaire et la Correspondance de Grimm. […] Elle n’avait rien de cette fameuse et fière Bacchante de sa famille, qui disait au régent lui-même, son amant : que Dieu, ayant dépensé toute son argile à créer l’homme, prit de la boue et du crachat pour faire les princes et les laquais ! […] Et il ne se contenta pas de lui être infidèle, même pour des laiderons, comme elle le lui reproche dans des vers sans orthographe mais non sans hiatus :         Car la beauté et la laideur         Ont les mêmes droits sur ton cœur, Et tu prises aussi bien le chardon que la rose !

1774. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXX. Saint Anselme de Cantorbéry »

Bouchitté, quand enfin M. de Rémusat, prennent à partie la métaphysique de saint Anselme, la commentent tour à tour et l’interprètent, ils savent bien ce qu’ils font et ils font bien. […] Il a aimé mieux prendre l’homme tout entier, dans le multiple ensemble de sa vie et à sa place dans tous les événements de son temps, et il a écrit un ouvrage qui n’a pas pour titre unique le nom d’Anselme et qui est aussi le tableau de la vie monastique et politique, au onzième siècle. […] Grâce à cette théocratie, que M. de Rémusat condamne dans son livre par la raison très philosophique que l’opinion de l’Europe moderne, qui a la tête déformée par les philosophes, lui est, en ce moment, hostile, l’influence du monde chrétien avait pris le monde musulman et pénétré l’Asie et l’Afrique. […] à cette vertu si profondément sociale de l’obéissance, saint Anselme, respecté par le pape, saint Anselme, le primat d’Angleterre, prit un simple moine pour maître, et le croirez-vous, esprits de nos jours ?

1775. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Edgar Quinet »

Seulement, avec sa tête de papier gonflé, Quinet a bien plus pris feu à la chose que Michelet… Oh ! […] Si je veux me donner des ailes, — (qu’il en prenne donc, pour s’en aller !) […] Il prend la Création du pied des faits où elle n’est pas, car elle est le principe générateur de tous les faits, et sa Création, quand elle serait tout ce qu’il dit, ne serait pas encore la Création, mais l’histoire des choses créées, ce qui est différent. […] Il voit des sauts dans la nature, comme une vieille femme qui verrait des trous dans ses bas et ne saurait comment s’y prendre pour les remmailler. « Tout n’est pas progrès — dit-il — dans la nature et dans l’histoire. » Qu’il s’en souvienne pour une autre fois !

1776. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Arsène Houssaye » pp. 271-286

Si blonde veut dire moralement faible, peu foncée, d’une nuance douce, elle est bien nommée : la rutilante Messaline de Juvénal rirait d’elle et de sa blonderie, et ne l’entraînerait pas où elle va… Jusqu’ici, dans cette histoire que je prends comme un tout et dont je ne veux pas prévoir le dénouement, il n’y a que la Messaline des commencements, — et Messaline, la vraie Messaline, commence par la fin. […] Je les ai prises le temps qu’elles ont passé dans ce volume ouvert devant moi. […] Et cependant on continuera de dire peut-être qu’il est immoral, — comme s’il consacrait une couronne de chêne, comme madame Sand, aux femmes qui ressemblent aux héroïnes de ses livres… Eh bien, qu’il prenne son parti de tout cela, Arsène Houssaye ! On a fait boire ce petit verre d’absinthe à tous les écrivains qui ont pris le vice à poignées, pour le montrer mieux, depuis le grand Molière, père de Tartufe, jusqu’au grand Balzac, père de madame Marneffe !

1777. (1925) Les écrivains. Première série (1884-1894)

Tout objet fixé par lui prend un relief énorme. […] Et, mélancoliquement, il se prend à songer à Paris. […] (Il prend la main de Maleine.) […] Et c’est par là surtout que ce Journal me prend. […] Il prenait tout ce qui s’offrait, parce qu’il fallait vivre.

1778. (1902) Le chemin de velours. Nouvelles dissociations d’idées

Le prêtre prend une hostie dans le corporal et l’élève à la dignité de Dieu. […] Mais ôter l’ironie, c’est prendre l’envers de la pensée de Pascal. […] Prendre parti pour le pécheur, c’est prendre partie pour le malade ; c’est se faire médecin. […] Marotte disait : « D. — Est-on toujours coupable de vol quand on prend le bien d’autrui ? […] Il est le piège à loups où l’on trouve parfois une bête innocente ; mais qu’importe, si la veille il a pris un loup et si le lendemain il prend encore un loup.

1779. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XIX » pp. 76-83

Ce qui fait à nos yeux l’intérêt de ces lettres, c’est leur entière vérité, c’est-à-dire la faiblesse, la misère de la nature humaine et de toutes choses, prises en quelque sorte sur le fait dans une de ces âmes qu’on appelle grandes, comme parle Bossuet. » — A merveille ; mais pourquoi avoir tant triomphé de ces mêmes misères dans Pascal, au nom d’un cartésianisme impuissant et tout satisfait de lui-même ? […] Sue est d’ailleurs un assez bon garçon (good fellow,) qui ne prend pas trop au grave sa bonne fortune de grand homme ; il ne se donne pas pour un écrivain, mais pour un homme à idées et à combinaisons romanesques, ce qui est vrai. […] Tous ces détails sont faits peut-être pour intéresser, se rapportant au romancier le plus en vogue du jour et qui, je le répète, a d’ailleurs le bon esprit de prendre assez humainement son triomphe.

1780. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « [Addenda] »

Pour prendre un exemple contraire, mais par où la remarque se vérifie également, M.  […] Feuillet l’a si bien compris, qu’avant même de donner sa Collection, il n’a pu y tenir et que, dans son tome II des Causeries d’un Curieux (1862), il a pris les devants et a publié, comme la plus délicate des primeurs et bien faite pour affriander, la première lettre de Marie-Antoinette à l’impératrice sa mère, dès son arrivée sur la terre de France (Strasbourg, 8 mai 1770). […] Feuillet de Conches a cherché à prendre sa revanche en étendant de préférence ses dissertations et apologies sur les parties dernières de la Correspondance qui peuvent faire doute encore, tandis que c’étaient surtout les lettres de la première partie qu’il s’agissait de justifier, et de représenter dans des autographes sincères, s’il pouvait en exister de tels en regard de ceux que M. d’Hunolstein avait produits et qui ont été convaincus de fausseté.

1781. (1874) Premiers lundis. Tome I « A. de Lamartine : Réception à l’Académie Française »

Pourtant nous aimons à entendre des voix puissantes et graves nous le redire ; car, par moment, dans les fatigues de la marche, au milieu des inégalités du terrain, l’horizon échappe à nos yeux, et nous nous prenons à douter du but où notre ardeur aspire. […] La destinée du pays dépend en ce moment du rôle qu’oseront prendre ces hommes sages, mais un peu timides, et c’est toujours avec une sorte d’anxiété affectueuse que la France les écoute parler. […] il s’est exprimé sur tous points avec convenance et franchise ; il n’a manqué ni à ses convictions politiques ni à sa haute position littéraire, et, dès le premier jour, il a pris dans l’Académie, avec une noble aisance, la place que son génie lui assure partout.

1782. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre V »

Cette dernière donnée, négligeable chez tous les écrivains qui ne furent qu’« hommes de lettres », prend ici une importance première. […] « Or, puisque c’était un équin, il fallait couper le tendon d’Achille, quitte à s’en prendre plus tard au muscle tibial antérieur, pour se débarrasser du varus. » 95 Ainsi procédèrent très judicieusement les frères de Goncourt. […] On parla de cynisme et M. le Dr Prieur conclut dans le Mercure de France : « Je crois même que ce dernier mot est insuffisant quand on se souvient qu’à la répétition générale le professeur Bertry, ce guignol incohérent, qu’un accès d’angine de poitrine venait frapper au dernier acte, avait pris la tête et les gestes de Charcot que l’angine de poitrine avait frappé à mort, une nuit de voyage, dans une auberge de province, peu de temps auparavant… » 105 Outre une erreur de diagnostic (car Charcot succomba à une insuffisance aortique dûment constatée par les professeurs Strauss et Debove qui assistèrent à son agonie)106, nous pouvons signaler que M. 

1783. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Introduction. Origines de la littérature française — 1. Éléments et développement de la langue. »

Il a fallu, pour produire cette pauvre forme d’embryon, il a fallu que la population gallo-celtique de la Gaule fût réduite sous la loi de Rome, qu’elle prît les mœurs, la culture, la langue de ses vainqueurs, que l’empire romain et la culture latine, formes vénérables et vermoulues, tombassent en poussière au contact, non hostile, mais brutal, des barbares, et que les Francs, fondus dans la masse gallo-romaine, y déterminassent cet obscur travail, d’où sortirent ces deux choses, une race, une langue française. […] A mesure que la pensée et la science élargissent ces étroits cerveaux et en éveillent l’activité, à mesure aussi que les lettrés prennent l’habitude d’user de la langue vulgaire, la première provision de mots préparée par le peuple ne suffira plus. […] Les dialectes frères du français fuient peu à peu délaissés, et, ne servant plus à la littérature, descendirent au rang de patois, tellement avilis et dégradés, que souvent on les a pris pour du français corrompu : leur déchéance fut très insuffisamment compensée par la cession qu’ils firent au français d’un certain nombre de formes qui leur étaient propres.

1784. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « L’exposition Bodinier »

L’exposition Bodinier Si, flânant dans la rue, lorsque rien ne vous presse, vous ne vous êtes jamais arrêté devant les vitrines où sont exposées les photographies des comédiens et des comédiennes ; si vous n’avez jamais pris un plaisir absurde, mais vif, à les reconnaître, depuis M.  […] À le bien prendre, ce n’est donc point Rachel, c’est Phèdre et Hermione ; ce n’est point Talma, c’est Oreste et Néron qui survivent et qui sont immortels. […] le diable lui-même ne s’y reconnaîtrait pas), — nous ne saurions trop les fêter pendant que nous jouissons d’eux, ni leur tresser trop de couronnes, ni trop multiplier ce que nous prenons pour leurs figures, ni trop les décorer, ni trop les gorger de louanges et d’honneurs, — dussions-nous pour cela faire violence à leur inexorable modestie.

1785. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « La Tolérance »

Je me dis que les choses en sont au point qu’il n’est plus permis de prendre la parole ici sans remuer les plus hautes questions. […] Prenez-y garde, notre premier mouvement, et même le second, est de haïr quiconque ne pense pas comme nous. […] messieurs, je vous en prie, affranchissez-vous du passé  non point de ce qu’il y a, dans le passé, de beau, de glorieux, de pur et d’exemplaire pour tous — mais des formes surannées qu’y ont prises les querelles de nos pères et de nos aïeux.

1786. (1887) Discours et conférences « Discours prononcé à Quimper »

Le mal de notre temps, c’est l’âpreté dans les jugements, quelque chose de rogue et de dur, un ton âpre que l’on aurait tout au plus droit de prendre, si l’on était en possession de la vérité absolue. […] je vous assure que voici ce qu’on m’a répondu : il était taupier ; il se faisait payer cinq sous par taupe qu’il prenait. […] Il me reprochait comme une hypocrisie une façon allègre de prendre la vie, dont il ne voyait pas les vraies causes.

1787. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 39-51

Ses ennemis affecterent de prendre ce ménagement pour de la timidité ; ils prétendoient qu’il n’osoit pas imprimer sa Piece, & lui adresserent, à ce sujet, les défis les plus plaisans du monde. […] Corneille, le grand Corneille auroit-il osé prendre ce ton à l’égard des détracteurs du Cid ? & s’il l’eût pris, le Public le lui eût-il pardonné ?

1788. (1898) Inutilité de la calomnie (La Plume) pp. 625-627

Combien je sens qu’ils s’appliqueront à s’emparer de nos pensées, et à prendre enfin cette riche aptitude qui nous porte à être extasiés, perpétuellement, ici et là, au sujet d’une coquille marine, d’une belle demoiselle dénouant sa ceinture, ou bien d’un rouge grain de grenade. […] Rousseau et Rimbaud prennent de l’importance, tandis que M. de Saint-Pierre obtient attention de quelques esprits. » À cette époque, néanmoins, je ne pouvais guère que prévoir l’excès de sensibilité dont souffre aujourd’hui la littérature. […] Il nous a pris nos méthodes, nos maximes et nos images.

1789. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre VIII »

Sleeping-car, garden-party, steamer, rail-way, rail-road, steeple-chase, dead-heat, warrant, reporter, interview, bond-holder, rocking-chair, sportsman et son féminin sportswoman, snowboot, smoking, music-hall, sélect, leader, authoresse : aucun de ces mots, dont la liste est inépuisable, n’ont même l’excuse d’avoir pris la langue française au dépourvu ; aucun qui ne pût trouver dans notre vocabulaire son exacte et claire contre-partie. […] Cet aveu ne nous coûte rien : nous avons permis à l’industrie, au commerce, à la politique, à la marine, à toutes les activités nouvelles ou renouvelées en ce siècle, d’adopter un vocabulaire où l’anglais, s’il ne domine pas encore, tend à prendre au moins la moitié de la place. […] Snob, qui veut dire cordonnier, a pris pour eux le sens péjoratif qu’avait il y a quelques années le mot épicier.

1790. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Jean de Meun, et les femmes de la cour de Philippe-le-Bel. » pp. 95-104

Tout y respire une imagination vive & riante ; tout y prend une ame, une figure, une voix. […] Celles de la cour de Philippe-le-Bel, qui se piquoient de montrer de l’esprit & des talens, prirent la défense de leur sexe. […] Ils écrivirent qu’elles avoient mal pris le sens de son livre ; que le roman étoit une allégorie soutenue ; que, par cette rose, l’objet des vœux de l’amant, il falloit entendre la sagesse, ou l’état de grace, ou la sainte Vierge, ou bien l’éternelle béatitude.

1791. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Montmaur, avec tout le Parnasse Latin & François. » pp. 172-183

L’auteur, à la fin de l’ouvrage, exhortoit, par une satyre de cinq cent vers, tous les sçavans à prendre les armes, à se réunir contre un ennemi commun. […] Balsac, quittant le stile de libèle, voulut prendre le stile léger & bouffon : mais il ne fit rire qu’à ses dépens. […] On imagina de le prendre par son foible, de le mortifier par l’endroit qui lui seroit le plus sensible ; c’est-à-dire, de l’empêcher de parler.

1792. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — Les inscriptions des monumens publics de France doivent-elles être écrites en Latin ou en François. » pp. 98-109

Les sçavans prirent peu de part à cette dispute. […] Elle a pris faveur comme nos usages & nos modes. […] Ménage fit courir ces vers : La pauvre langue Latiale Alloit être troussée en mâle, Si le bel avocat Bélot, Du barreau le plus grand falot, N’en eût pris en main la défense, Et protégé son innocence ; En quoi, certes, & sa bonté, Et son zèle, & sa charité, Se firent d’autant plus paroître, Qu’il n’a l’honneur de la connoître.

1793. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Seconde Partie. De l’Éloquence. — Éloquence du barreau. » pp. 193-204

On a cru devoir les prendre pour modèles dans cette partie : on ne songeoit point que le génie de leur barreau n’avoit rien de commun avec celui du nôtre. […] Ses confrères prirent cette vengeance de l’affront qu’il leur faisoit, en dévoilant la démence de leurs plaidoyers. […] Dans le plus beau du règne de Louis XIV, où tout prit une face nouvelle, cette éloquence ne fut point totalement réformée.

1794. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre III. Parallèle de la Bible et d’Homère. — Termes de comparaison. »

Si vous prenez au hasard quelque substantif grec ou hébreu, vous découvrirez encore mieux le génie des deux langues. […] On lave les pieds du voyageur : il s’assied à terre, et prend en silence le repas de l’hospitalité. […] Toutefois, elle connaît aussi les comparaisons détaillées ; mais alors elle prend un tour oriental, et personnifie l’objet, comme l’orgueil dans le cèdre, etc.

1795. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre quatrième. Éloquence. — Chapitre II. Des Orateurs. — Les Pères de l’Église. »

» Mais mon bonheur eût été d’être aimé aussi bien que d’aimer ; car on veut trouver la vie dans ce qu’on aime… Je tombai enfin dans les filets où je désirais d’être pris : Je fus aimé, et je possédai ce que j’aimais. […] Tertullien parle comme un moderne ; ses motifs d’éloquence sont pris dans le cercle des vérités éternelles, et non dans les raisons de passion et de circonstance employées à la tribune romaine, ou sur la place publique des Athéniens. […] C’est du prêtre de Carthage que Bossuet a emprunté ce passage si terrible et si admiré : « Notre chair change bientôt de nature, notre corps prend un autre nom ; même celui de cadavre, dit Tertullien, parce qu’il nous montre encore quelque forme humaine, ne lui demeure pas longtemps ; il devient un je ne sais quoi qui n’a plus de nom dans aucune langue 187 : tant il est vrai que tout meurt en lui, jusqu’à ces termes funèbres par lesquels on exprime ses malheureux restes ! 

1796. (1767) Salon de 1767 « De la manière » pp. 336-339

La petite portion du peuple qui médite, qui réfléchit, qui pense, qui prend pour unique mesure de son estime le vrai, le bon, l’utile, pour trancher le mot, les philosophes dédaignent les fictions, la poésie, l’harmonie, l’antiquité. […] Le mot manière se prend en bonne et en mauvaise part ; mais presque toujours en mauvaise part, quand il est seul. […] On est tenté de prendre pour la belle nature celle qu’on a toujours vue : cependant le modèle primitif n’est d’aucun siècle, d’aucun pays.

1797. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 3, que l’impulsion du génie détermine à être peintre ou poëte, ceux qui l’ont apporté en naissant » pp. 25-34

Section 3, que l’impulsion du génie détermine à être peintre ou poëte, ceux qui l’ont apporté en naissant En effet, il n’y a pas un grand mérite à mettre la plume à la main d’un jeune poëte, le premier venu, son génie seul la lui auroit fait prendre. […] Tant de gens ont pris soin de publier l’avanture arrivée à M.  […] Il se cachoit pour étudier les mathematiques ; et c’est ce qui lui avoit fait prendre pour devise un phaëton avec ces mots : invito patre sidera verso.

1798. (1907) L’évolution créatrice « Introduction »

Et, le plus souvent, quand l’expérience a fini par nous montrer comment la vie s’y prend pour obtenir un certain résultat, nous trouvons que sa manière d’opérer est précisément celle à laquelle nous n’aurions jamais pensé. […] Elle ne devient relative que si elle prétend, telle qu’elle est, nous représenter la vie, c’est-à-dire le clicheur qui a pris l’empreinte. […] A la différence des systèmes proprement dits, dont chacun fut l’œuvre d’un homme de génie et se présenta comme un bloc, à prendre ou à laisser, elle ne pourra se constituer que par l’effort collectif et progressif de bien des penseurs, de bien des observateurs aussi, se complétant, se corrigeant, se redressant les uns les autres.

1799. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre second » pp. 200-409

S’il eût été tenté d’un forfait, quel parti aurais-je pris ? […] Alors je permets le ton véhément, non parce que je le prends, mais parce que je l’approuve. […] la frayeur vous prend ! […] Avec quelles espèces allez-vous vous mettre aux prises ? […] On sera tenté de me prendre pour une espèce d’original ; mais qu’est-ce que cela fait ?

1800. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre premier. — Une leçon sur la comédie. Essai d’un élève de William Schlegel » pp. 25-96

La sensualité prend souvent cet air de bonhomie. […] » crie l’avare à son fils, pris tout à coup « d’un éblouissement ». […] Lorsqu’on s’offre de prendre une fille sans dot, on ne doit point regarder plus avant. […] Aussitôt il redemande son bien à l’esclave, qui n’a rien pris, rentre dans le temple, reprend sa marmite et court la cacher dans le bois sacré de Sylvain. […] Harpagon entre dans une colère comique contre Cléante qui lui prend son diamant pour le donner à Marianne.

1801. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XIII : Affinités mutuelles des êtres organisés »

Temminck insiste sur l’utilité et même la nécessité de tenir compte de cet élément à l’égard de quelques groupes d’oiseaux, et plusieurs entomologistes et botanistes l’ont pris en considération. […] Mais, par des mesures prises sur des Chiens adultes et sur des petits de six jours, je constatai que ces derniers étaient loin d’avoir acquis toutes leurs différences proportionnelles. […] Prenons un genre d’oiseaux ; qui, d’après ma théorie, descend d’une seule espèce mère, et dont les diverses espèces actuelles se sont modifiées par sélection naturelle, d’après leurs habitudes différentes. […] L’embryologie prend ainsi un plus grand intérêt encore, de ce qu’on peut considérer chaque embryon comme un portrait plus ou moins effacé de la commune forme mère de chaque grande classe d’animaux. […] Dans des plantes de la même espèce, les pétales restent quelquefois à l’état de rudiments, et d’autres fois elles prennent leur développement complet.

1802. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — F — Fuster, Charles (1866-1929) »

Fuster, je dirai qu’elle se passe pendant la dernière guerre ; que deux fiancés, Louise et Pierre, recueille et, soignent un blessé, lequel se prend d’amour pour la jeune fille ; mais le malade, rendu à la santé, retourne parmi les siens ; Louise revient peu à peu à celui qui n’a cessé de l’aimer et oublie ce mirage d’un instant qui avait trompé son cœur. […] Fuster a trouvé des développements fort touchants, et sa muse y a pris prétexte à chanter aussi bien les grandes guerres, l’héroïsme, que le charme de la nature et les phases d’un amour qui s’éteint et se ranime.

1803. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME GUIZOT (NEE PAULINE DE MEULAN) » pp. 214-248

Le moraliste, à proprement parler, a une faculté et un goût d’observer les choses et les caractères, de les prendre n’importe par quel bout selon qu’ils se présentent, et de les pénétrer, de les approfondir. […] M. de Meulan avait pris pour secrétaire à gros appointements Collé, dont Mlle de Meulan, dans le Publiciste, jugea plus tard les Mémoires, et à quielle reconnaissait, à travers la gaieté, beaucoup d’honneur et d’élévation d’âme91. […] A propos d’une phrase de l’auteur de Malvina, de Mme Cottin, qui semblait dénier à son sexe la faculté d’écrire aucun ouvrage philosophique, le critique rappelait l’ouvrage récent de Mme de Staël sur la Littérature, et en prenait occasion d’y louer plus d’un passage, de relever plus d’un censeur, et de toucher à son tour quelques points avec une réserve sentie. […] Il est certain du moins que, dans la plupart des cas, quand l’enfant est bien né, comme on dit, quand il ne recèle pas en lui de faculté trop excentrique ou de passion trop obstinée qui déjoue, le bon résultat doit s’obtenir d’après les soins qu’elle fait prendre. […] Jusqu’à quel point, indépendamment de ses travaux personnels, Mme Guizot prenait-elle part à ceux de son mari, à tant d’honorables publications accessoires dont il accompagnait son œuvre historique fondamentale, et dans lesquelles, à partir de la traduction de Gibbon, elle put être en effet son premier auxiliaire ?

1804. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIIe entretien. Revue littéraire de l’année 1861 en France. M. de Marcellus (1re partie) » pp. 333-411

Ce Marcellus romain, au lieu de mourir comme Caton ou Brutus, ou de plier de mauvaise grâce comme Cicéron, avait pris l’exil comme un intermédiaire entre la persécution et l’abjection ; il s’était retiré volontairement dans l’île de Mytilène ; il y vivait d’études compatibles avec la tyrannie et avec la liberté ; il avait conservé ses amis à Rome, et entre autres Cicéron qui lui écrivait sans cesse d’y rentrer afin d’avoir un complice de sa faiblesse. […] Canning, pour ne pas perdre toute influence en Europe, en Russie, en Prusse, en Autriche, n’osait pas rompre ouvertement avec ces puissances alliées de l’Angleterre, mais il voulait ajourner, embarrasser, compliquer, et enfin faire avorter le congrès, pour empêcher la France de prendre la responsabilité de venger la monarchie de famille en Espagne. […] M. de Chateaubriand, loin de prendre ombrage de cette intimité entre son premier secrétaire et le ministre qu’il caressait alors pour l’amener au congrès, redoubla de confiance, et fit de M. de Marcellus son confident et son envoyé à Paris. […] Celui-ci fit en treize jours le voyage de la Mecque, et il ne rapportait que des notions vagues, quand il fut attaqué et pris dans le désert. […] Puisque vous voulez me quitter sitôt, je vais prendre congé de vous.

1805. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hugo, Victor (1802-1885) »

C’est par là qu’il s’élève quelquefois à des effets jusqu’à présent inconnus ; et c’est là aussi ce qui le fait tomber dans ce qu’on prendrait pour de misérables jeux de mots. […] Victor Hugo d’aller chercher son histoire dans des livres inconnus, au lieu de la prendre dans les ouvrages où tout le monde puise. […] Eschyle clouait le Titan, martyr de la civilisation hellénique, sur la cime de je ne sais quel Caucase baigné par l’Océan, la Grèce, assise dans le théâtre de Bacchus, fit à l’auteur des objections géographiques ou se prit à le chicaner sur les invraisemblances de sa fable ? […] Il était de plus en plus pris de pitié pour les milliers d’êtres que la nature immole à ce qu’elle fait de grand. […] Le Maître, revêtu d’un manteau d’hyacinthe, Trône à leur table ; et, pour leur soif et pour leur faim, Leur donne comme Christ la communion sainte Sous l’espèce du pain symbolique et du vin : « Prenez, dit-il, ô mes amis et mes apôtres, Le pain qui rend fécond et le vin qui rend frère ; Pour que le Verbe issu de mon âme aille aux vôtres, Prenez, mes fils, ceci c’est mon sang et ma chair ! 

1806. (1888) Petit glossaire pour servir à l’intelligence des auteurs décadents et symbolistes « Petit glossaire »

— Prendre une direction angulaire. […] — Prendre sur moi, ou pour moi (assumere, de ad, à, et sumere, prendre). […] — Forme verbale du mot élixir. — Prendre l’essence. […] — Donner l’essor, — s’essorer, prendre essor. […] nuncupare, dénommer, et capere, prendre.

1807. (1888) La vie littéraire. Première série pp. 1-363

Seulement, on leur donnait un autre nom et on y prenait moins garde. […] Seul, il était incapable de prendre un parti. […] Ils ont pris la plume et le papier comme on prend le voile et le scapulaire. […] J’y ai tout de suite pris du goût. […] Mais que voulez-vous qu’un écolier y prenne ?

1808. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre III. Le lien des caractères généraux ou la raison explicative des choses » pp. 387-464

Nous prenons un point quelconque dans l’intérieur du polygone ; de ce point, nous menons des droites à tous ses angles ; nous remplaçons ainsi le polygone par un groupe de triangles dont le nombre est égal au nombre de ses côtés. […] Entre autres procédés, il en est un fort commode qui consiste à prendre sur un plan deux axes fixes AB, BC, qui se coupent suivant un angle connu, à mener de ces axes des parallèles au point, et à donner la longueur de ces parallèles. […] Il peut prendre le quart ou la moitié d’une bâtisse, la verser sur l’autre avec ses habitants, observer d’abord une agitation, un pêle-mêle, puis un apaisement, un arrangement et un développement nouveau ; rien de plus. […] Ici arrive l’historien : il prend un peuple à un moment donné. […] Car, par définition, l’espace pris en lui-même, du moins l’espace tel que nous le concevons, est absolument uniforme, et la durée prise en elle-même, du moins la durée telle que nous la concevons, est absolument uniforme.

1809. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « VIII » pp. 30-32

On a redonné hier Judith, qui, je crois, a été mieux : madame de Girardin prend très-bravement et spirituellement ce demi-succès… Soyons juste, même en étant sévère : il y a de beaux vers, n’est-ce pas ? […] On est las, on n’a plus de préjugés classiques ou autres, on veut quelque chose, on le prendra d’où qu’il vienne.

1810. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXI » pp. 220-221

Cependant, en considérant la position de Molière, et le plaisir que le roi prenait à diriger son talent, on se persuaderait sans peine qu’en approchant l’oreille des rideaux du roi, on sur prendrait quelques paroles dites à demi-voix, pour désigner à Molière ce caractère qui, bien que respecté au fond du cœur, avait quelque chose d’importun pour les maîtresses et pour les femmes qui aspiraient à le devenir.

1811. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE LA FAYETTE » pp. 249-287

Huyghens et sa question, croyez-le bien, pour lui faire prendre ainsi la parole sur le trochée et sur l’ïambe103. […] » Il est vrai qu’après tout, le genre de Zayde ne diffère pas si notablement de celui des Nouvelles de Segrais, qu’on n’ait pu dans le temps prendre le change. […] Nous avons aussi parlé d’un homme que je prends toujours la liberté de mettre en comparaison avec vous pour l’agrément de l’esprit. […] Mais j’ai peur qu’il n’ait pris tout sérieusement ce que je lui en ai dit. […] On ne peut donc prendre ce propos, mal recueilli, pour une autorité.

1812. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIVe entretien. Cicéron (3e partie) » pp. 257-336

Les passions même les plus estimables, telles que celles des grands hommes vertueux, ne doivent rien prendre sur la tranquillité de l’esprit. […] « Aussi ne croirait-on pas, à moins que d’y prendre bien garde, tout ce qu’il en a coûté à la nature pour nous donner la parole. […] D’ailleurs, pour manger des animaux terrestres, des aquatiques et des volatiles, nous en avons partie à prendre, partie à nourrir. […] « Le fer, sans quoi l’on ne peut cultiver les champs, nous allons le prendre dans les entrailles de la terre. […] Nous nous retirâmes enfin pour prendre du repos.

1813. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIIIe entretien. Madame de Staël. Suite. »

Elle avait pris cet éblouissement pour de la lumière et ce phosphore pour de la chaleur. […] « Il se formait alors autour du général Bernadotte un parti de généraux et de sénateurs qui voulaient savoir de lui s’il n’y avait pas quelques résolutions à prendre contre l’usurpation qui s’approchait à grands pas. […] Je désire qu’ils suffisent aux arrangements qui vous restent à prendre, parce que je ne puis vous en accorder davantage. […] Aujourd’hui vous m’obligez à les faire exécuter strictement ; il ne faut vous en prendre qu’à vous-même. […] Ces adieux terminés, j’évitai le plus que je pus les autres adieux qui me faisaient trop de mal, et j’écrivis aux amis que je quittais, en ayant pris soin que ma lettre ne leur fût remise que plusieurs jours après mon départ.

1814. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVI. La littérature et l’éducation publique. Les académies, les cénacles. » pp. 407-442

Le Sauveur aurait-il pu prendre la figure d’une femme ou d’un diable, d’un âne, d’une citrouille ou d’un caillou ? Et en admettant qu’il eût pris la forme d’une citrouille, aurait-il pu prêcher, faire des miracles, être crucifié ? […] Que de fois les conséquences d’une mesure se dérobent de la sorte aux prévisions de ceux qui la prennent ! […] Après l’épanouissement littéraire contemporain de Louis XIV, des auteurs pris parmi les modernes se glissent au programme. […] On risque d’y prendre une certaine étroitesse de goût.

1815. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « De la dernière séance de l’Académie des sciences morales et politiques, et du discours de M. Mignet. » pp. 291-307

Que si l’on prend philosophie dans le sens purement moderne, comme l’a entendu, par exemple, l’école de M.  […] Quelques-uns de vos lecteurs vous prenaient au pied de la lettre dans vos explications fatalistes ; ils disaient : Quel révolutionnaire terrible ! […] Dans le dernier discours sur Jouffroy, il me semble avoir sacrifié plus que d’ordinaire à la mise en scène ; il y a mêlé un but étranger au sujet même qu’il étudiait ; il a voilé en un sens et drapé son personnage ; il a pris parti, plus finement qu’il ne convient, pour la malice et la rancune des grands sophistes et des grands rhéteurs dont l’histoire sera un jour l’un des curieux chapitres de notre temps, intolérants et ligués comme les encyclopédistes, jaloux de dominer partout où ils sont, et qui, depuis que l’influence décidément leur échappe, s’agitent en tous sens pour prouver que le monde ne peut qu’aller de mal en pis. […] Cousin disait à qui voulait l’entendre : « Damiron, — clarté littéraire, obscurité philosophique. » Depuis, après vingt années d’enseignement, et quand l’auteur de tant de mémoires étudiés et fins avait pris rang de maître (s’il devait jamais le prendre), M. 

1816. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Nouveaux voyages en zigzag, par Töpffer. (1853.) » pp. 413-430

C’est l’heure des vacances, c’est le moment de faire son tour de Suisse, sa visite aux Alpes ; pour ceux qui sont libres comme pour ceux qui sont retenus, il n’est pas de moyen plus agréable ou d’éclairer sa route si l’on part, ou de se figurer le voyage si l’on reste, que de prendre les livres de Töpffer. […] À force de croquis manqués, on arrivera à en produire un passable, puis un parlant, et, à la fin, l’on se sera fait sa petite manière à soi de ne s’y prendre pas trop mal, et cela en ne poursuivant que la nature et sans imiter personne. […] Mais à l’hospice du Saint-Bernard, c’est différent : l’hospitalité cordiale l’a gagné, et aussi l’aspect de l’humble foule agenouillée le jour de la fête du couvent l’a pris au cœur. […] Douze ans après, au lit de mort lui-même, et durant sa dernière maladie, Töpffer revenait sur cette méditation, sur cette énigme de la destinée, dont il avait désormais une pleine conscience, et il la dénouait, selon sa mesure, en homme de famille, en époux et en père, pieux, résigné et saignant : « Renoncer au monde, si l’on prend le précepte à la lettre, disait-il, c’est fausser sa destinée en dépravant sa nature. Renoncer au monde, si l’on prend le précepte dans son esprit, c’est faire en toutes choses une part à la vie et une part à la mort, et cela jusqu’au dernier soupir. » — Dans la première partie de son explication, Töpffer n’a pas assez senti, je le crains, tout le mystère de la vie cachée, de la vie des antiques ermites et des Pères du désert ; mais il est impossible de mieux faire la part de l’homme de la société et du père de famille mourant.

1817. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — II. (Fin.) » pp. 364-380

Marianne, un moment délaissée, raisonne là-dessus ; elle se dit en se donnant l’explication du volage : Homme, Français et contemporain des amants de notre temps, voilà ce qu’il était ; il n’avait, pour être constant, que ces trois petites difficultés à vaincre… Son cœur n’est pas usé pour moi, ajoutait-elle, il n’est seulement qu’un peu rassasié du plaisir de m’aimer, pour en avoir trop pris d’abord. […] Ce nœud très léger qu’il agite et qu’il tourmente, il ne faudrait que s’y prendre d’une certaine manière pour le dénouer à l’instant ; il n’a garde de le faire, et c’est ce manège, ce tatillonnage bien mené et semé d’accidents gracieux, qui plaît à des esprits délicats. […] s’écrie à la fin la marquise en se mettant à rire, nous avons pris un plaisant détour pour arriver là !  […] Plein d’égards et aux petits soins pour l’amour-propre des autres, il était susceptible dans le sien à l’excès, et prenait la mouche promptement. […] C’est avec cette physionomie d’homme mortifié que cet aimable et piquant Marivaux, cet esprit lutin d’un monde si riant, prend congé de nous.

1818. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Œuvres de François Arago. Tome I, 1854. » pp. 1-18

On a dit avec vérité que l’aspect des lieux prend une couleur agréable ou sombre, selon les sentiments dont l’âme est agitée : nous l’éprouvions bien fortement alors. […] Par cette lettre d’avances et de bienvenue qui allait prendre le nouvel arrivé au port, le premier il semblait convier Arago à cette renommée scientifique universelle dont lui-même il n’a pas cessé d’être la personnification la plus illustre et par moments le maître des cérémonies un peu empressé, dont ils parurent quelquefois ensemble les deux consuls perpétuels, et qui a bien ses douceurs, mais aussi ses écueils. […] C’est par leurs grands côtés qu’il convient de prendre les grands hommes, et les petitesses qu’il est permis de noter en eux ne doivent venir que dans la perspective de l’ensemble. […] Prenons M.  […] Sur tous ces points, il faut en prendre son parti avec lui : il a la clarté, la force, la droiture du développement scientifique, il n’a pas le goût littéraire proprement dit.

1819. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — I. » pp. 19-35

Je ne prendrai donc Fénelon qu’en dehors de cette affaire du quiétisme, et tout simplement comme un guide approprié, le plus fin, le plus distingué, le plus à souhait, que consultaient quelques âmes inquiètes, quelques amis fidèles. […] Ne fût-ce qu’une demi-heure le matin, qu’un demi-quart d’heure pris sur les embarras et bien ménagé, tout est bon. […] Le remède, à ses yeux, est donc de sortir de soi pour trouver la paix, et de s’élever par le cœur et par la prière, de se plonger et de se perdre autant qu’on le peut dans la pensée de l’Être infini, de l’Être paternel, aimant et bon, et toujours présent ; d’obtenir, s’il est possible, que sa volonté se substitue en nous à la nôtre : Alors on goûte la vraie paix réservée aux hommes de bonne volonté… ; alors les hommes ne peuvent plus rien sur nous, car ils ne peuvent plus nous prendre par nos désirs ni par nos craintes ; alors nous voulons tout et nous ne voulons rien. […] Son expression prend feu et reluit à chaque pas : J’ai fait un sermon ce matin tout de flammes… — Voyez-vous, je ris déjà dans le cœur sur l’attente de votre arrivée. — Ô Dieu ! […] Elle lui vient pourtant, discrète, courante, familière, et quelquefois trop familière : « Vous pouvez faire de moi, écrit-il au duc de Chaulnes, comme d’un mouchoir qu’on prend, qu’on laisse, qu’on chiffonne : je ne veux que votre cœur, et je ne veux le trouver qu’en Dieu. » J’aime mieux qu’il dise à Mme de Grammont : « Vous êtes une bonne montre, mais dont la corde est courte et qu’il faut remonter souvent.

1820. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier. »

S’il eût pris la résolution d’y marcher, on ne peut dire ce qui serait arrivé. […] Quand un homme a pris l’habitude de tomber ivre mort, il est difficile au cœur ou au bras d’une faible femme de le relever, et lorsque avec cela il lui vient, de temps en temps, de soudaines envies de la saisir à la gorge et de la traîner par les cheveux, ce qu’elle a de mieux à faire pour sa dignité comme pour sa sûreté, c’est de se mettre à couvert. […] Il avait même assez pris sur son caractère et sur son humeur pour être en bons termes avec le mari, et il avait réussi à lui agréer. […] Je laisse parler Dutens ; on ne refait pas ces premiers récits tout naturels : « Le jour étant pris pour l’exécution du projet, Mme Orlandini vint déjeuner chez le comte-d’Albany ; après le déjeuner, elle propose d’aller au couvent des Bianchette (Dames-Blanches) voir quelques ouvrages de religieuses, en quoi celles-ci passaient pour exceller. […] Le roi de Suède Gustave III, qui voyageait en Italie incognito, fut initié et prit intérêt à la situation, à la relation, désormais impossible, du comte d’Albany et de la comtesse, et il se chargea de la régler à l’amiable.

1821. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Millevoye »

Ses études terminées, le jeune homme songea à prendre un état ; il essaya du barreau et entra quelque temps dans une étude de procureur. […] La faible couleur est si passée, que le discernement n’y prend plus. […] Elle vous prend et vous classe sans façon pour votre part originale et neuve, si petite que vous l’ayez apportée157. […] Ce bonheur qu’ont certains poëtes d’atteindre, un matin, sans y viser, à quelque chose de bien venu, qui prend aussitôt place dans toutes les mémoires, mérite qu’on l’envie, et faisait dire dernièrement devant moi à l’un de nos chercheurs moins heureux : « Oh ! […] En refaisant le Poète mourant dans de grandes proportions lyriques et avec le souffle religieux de l’hymne, l’auteur des secondes Méditations semble avoir pris soin lui-même de manifester toute notre idée et de consommer la comparaison.

1822. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre III. Trois ouvriers du classicisme »

Elle s’était polie, allégée ; elle avait pris de la délicatesse, de la rapidité. […] Chapelain Ce beau monde, dont Balzac faisait l’éducation, était assez disposé, tant par ignorance que par suffisance, à prendre son seul plaisir pour critérium de la valeur des œuvres littéraires : principe séduisant, mais dangereux. […] La Poétique de Scaliger est le chef-d’œuvre de ces codifications dogmatiques dont la principale erreur était de prendre les règles pour une méthode infaillible, pour les conditions nécessaires et suffisantes de la perfection littéraire. […] Elle manifeste, en une forme abstraite et d’autant plus aisément connaissable, l’idée nouvelle qui prend ou aspire à prendre la direction de ce mouvement.

1823. (1785) De la vie et des poëmes de Dante pp. 19-42

Aussi on ne peut se figurer la sensation prodigieuse que fit sur toute l’Italie ce poëme national, rempli de hardiesses contre les papes, d’allusions aux événements récents et aux questions qui agitaient les esprits ; écrit d’ailleurs dans une langue au berceau, qui prenait entre les mains de Dante une fierté qu’elle n’eut plus après lui, et qu’on ne lui connaissait pas avant. […] Mais Dante ayant à construire son monde idéal, et voulant peindre pour son siècle et sa nation5, prit ses matériaux où il les trouva : il fit parler une langue qui avait bégayé jusqu’alors, et les mots extraordinaires qu’il créait au besoin n’ont servi qu’à lui seul. […] Quel parti donc prendre ? […] Si les comparaisons et les tortures que Dante imagine sont quelquefois horribles, elles ont toujours un côté ingénieux, et chaque supplice est pris dans la nature du crime qu’il punit. […] Dante n’a pas donné le nom de comédie aux trois grandes parties de son poëme, parce qu’il finit d’une manière heureuse, ayant le Paradis pour dénouement, ainsi que l’ont cru les commentateurs : mais parce qu’ayant honoré l’Énéide du nom d’ alta tragedia , il a voulu prendre un titre plus humble, qui convînt mieux au style qu’il emploie, si différent en effet de celui de son maître.

1824. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « La Religieuse de Toulouse, par M. Jules Janin. (2 vol. in-8º.) » pp. 103-120

Janin, en le lui donnant, a commencé par y prendre le sien propre ; il s’amuse évidemment de ce qu’il écrit : c’est le moyen le plus sûr de réussir, de rester toujours en veine et en haleine. […] Ou encore ce style prompt, piquant, pétillant, servi à la minute, fait l’effet d’un sorbet mousseux et frais qu’on prendrait en été sous la treille. […] Les habits étaient simples, mais non uniformes : « On pourra indifféremment choisir du noir, du gris, du blanc, du feuille-morte ou autre couleur obscure, pour le choix de laquelle on prendra l’avis de la Supérieure, qui réglera toutes ces choses, ayant égard à l’âge, à la condition des esprits, et à la qualité des personnes. » Et pour la forme tant du linge que des habits, il semblait que, sans être tout à fait des religieuses, les Filles de l’Enfance eussent déjà pour règle le code mignon de Gresset : Il est aussi des modes pour le voile ; Il est un art de donner d’heureux tours À l’étamine, à la plus simple toile. […] Janin a pris la plupart des noms qui figurent dans son livre ; je dis les noms, car il a donné aux personnages un tout autre caractère, et les a complètement métamorphosés. à partir d’un certain moment, l’institut de l’Enfance étant devenu suspect, la Cour donna ordre de le surveiller étroitement et d’y introduire des espions, ce qu’on appelait dès lors des mouches. […] Il a pris ces noms et ce cadre de l’institut de l’Enfance comme un simple prétexte et un canevas à ses vives études et à ses goûts du moment ; il a voulu tracer, comme il dit, « un capricieux tableau d’histoire ».

1825. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Observations générales, sur, l’art dramatique. » pp. 39-63

Le spectateur, content de voir que l’auteur n’a point péché par ignorance, prend le change et impute tout à la difficulté du sujet. […] Vamir, fait prisonnier par son frère, a pris les armes pour lui enlever Amélie. L’auteur veut prolonger, jusqu’à l’arrivée d’Amélie, l’explication qui doit apprendre au duc de Foix que Vamir est aimé d’elle, et qu’il n’a pris les armes que pour la lui arracher. […] Chambers ajoute que ce mot se prend plus particulièrement pour signifier le nœud ou l’intrigue qui fait la difficulté et l’embarras d’un poème dramatique. […] Comment a-t-il été pris ?

1826. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IV : M. Cousin écrivain »

Ils nous prennent des deux côtés, l’un par la tête, l’autre par le cœur. […] On sent qu’il est toujours maître de son sujet, qu’il se meut dans le champ des idées comme dans son domaine, qu’il en sait tous les chemins, qu’il est prêt, si l’un d’eux se trouve fermé, à en ouvrir d’autres, qu’il a le droit de prendre charge d’âmes, et de s’offrir pour guide aux ignorants et aux étrangers qui voudront visiter la contrée solitaire et périlleuse où il s’est établi. […] Je prends le morceau capital, la célèbre préface réfutée par Schelling, où M.  […] Voici quelques phrases prises au hasard, mais toutes importantes, car chacune d’elles contient une doctrine. […] Je prends une phrase très-courte, je suppose qu’un analyste du dix-huitième siècle soit ici et veuille la comprendre : comptez toutes les tranformations qu’il devra lui faire subir, et jugez par le nombre des traductions à quelle distance la pensée philosophique de M. 

1827. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre V : M. Cousin historien et biographe »

On prend pour matière ces idées générales, ces descriptions de sentiments, ces vérités moyennes, qui sont l’objet propre de l’éloquence. […] Cousin se fait le secrétaire ; prenons nos textes dans M.  […] La régente était faible, il s’agissait « de se bien faire valoir » et de prendre la plus grosse part possible du trésor public. […] Supposons qu’un historien accepte cette idée générale ou toute autre, et la développe, non pas en termes généraux, comme on vient de le faire, mais par des peintures, par un choix de traits de mœurs, par l’interprétation des actions, des pensées et du style, il laissera dans l’esprit du lecteur une idée nette du dix-septième siècle ; ce siècle prendra dans notre souvenir une physionomie distincte ; nous en discernerons le trait dominant, nous verrons pourquoi de ce trait naissent les autres ; nous comprendrons le système des facultés et des passions qui s’y est formé et qui l’a rempli ; nous le connaîtrons, comme on connaît un corps organisé après avoir noté la structure et le mécanisme de toutes ses parties. […] Mais répondons-nous à nous-mêmes que Coligny était jeune, qu’il n’avait pas eu le temps de se faire connaître, et qu’il a été naturellement éclipsé par Dandelot, qui succéda à son titre et prit sa place auprès de Condé.

1828. (1927) Des romantiques à nous

La lutte des partis, des doctrines, prend une place importante dans la société. […] ce n’est pas Lamartine qui l’a trouvé ; il l’a pris à un autre. […] elles ne prenaient que des douceurs. […] Désormais elle ne prendra pas une souris pour une montagne. […] On était pris dans un tourbillon, voluptueusement étourdi, mais non pas touché à l’âme.

1829. (1927) André Gide pp. 8-126

Elles se sont prises par la main, pensant continuer la route. » Illusion ! […] Quelle étrange idée d’aller s’en prendre à M.  […] Pour qui me prend-il ? […] Il pourrait du moins s’abstenir d’injures dans la lettre où il prend congé. […] Celui-ci n’eut gardé et prit très philosophiquement sa disgrâce relative.

1830. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre II. Dryden. »

Je prends l’une de ces tragédies, fort célèbre alors, l’Amour tyrannique ou la Royale Martyre. […] On se taille en pièces, on prend des villes, on se poignarde, et on déclame de tout son gosier. […] Les scènes de Lulli n’y manquent pas : Alméria, comme Armide, arrive pour tuer Cortez endormi, et tout d’un coup se prend d’amour pour lui. […] elle tape dur742. » — En effet ; et par-dessus le marché, elle prend un fouet, le sangle, et le met à la porte. […] Vous savez que les profits de mon livre auraient pu être plus grands, mais ni ma conscience ni mon honneur ne me permettaient de les prendre.

1831. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre VI. La parole intérieure et la pensée. — Second problème leurs différences aux points de vue de l’essence et de l’intensité »

La chose apparaîtra en toute évidence si nous prenons pour exemple les images visuelles de l’homme et de la rose ; ces images, quelque pâles, vagues, effacées qu’elles soient, sont des images particulières. […] Voici deux phrases prises au hasard et composées de termes abstraits : Je crois à la vraisemblance de la thèse idéaliste ; — les esprits les plus subtils ne sont pas les moins crédules. […] Qu’est-ce, en d’autres termes, sinon replacer la parole à son rang de serviteur et de héraut de la pensée, et lui enlever le rôle usurpé de chorège qu’elle prend trop aisément, dans chaque groupe de représentations, à la faveur de l’habitude ? […] Nous prenons ici pour base la liste de M.  […] la chose est impossible : qu’elle soit seule ou en compagnie, si elle a les doigts occupés, si, par exemple, elle prend un repas, l’image doit tout naturellement suppléer la sensation.

1832. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre IX. Du rapport des mots et des choses. — Ses conséquences pour l’invention »

Tout le travail que je viens de recommander deviendrait singulièrement facile, et l’invention recouvrerait une surprenante fécondité, si l’on prenait les mots pour ce qu’ils sont, pour des signes, et si l’on s’accoutumait à leur substituer toujours les choses signifiées. […] Faute de sentir cela, on prend les noms abstraits comme répondant à des réalités concrètes.

1833. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre XII. Dernière et nécessaire opération, qui consiste à corriger ce que l’on a écrit »

Non ; il reste une dernière partie du travail, non la moins nécessaire et la moins délicate, mais dont on se dispense souvent, parce qu’elle est moins matériellement indispensable, parce qu’on est las de l’activité dépensée, parce que ce travail est minutieux, ennuyeux, parce que l’on n’est plus soutenu par le plaisir d’inventer, de créer, et qu’enfin l’œuvre étant si avancée, vivant par elle-même, l’auteur s’en détache et n’y prend plus le même intérêt. […] Pour faire cette opération d’une main plus sûre, pour que l’œil ne soit pas troublé et prenne une vue exacte des choses, il sera bon d’attendre, après avoir écrit, que l’effervescence de la composition soit calmée, que l’esprit soit reposé, que d’autres occupations aient rafraîchi les idées et changé leur cours.

1834. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Chardin » pp. 220-221

C’est que ce vase de porcelaine est de la porcelaine ; c’est que ces olives sont réellement séparées de l’œil par l’eau dans laquelle elles nagent ; c’est qu’il n’y a qu’à prendre ces biscuits et les manger ; cette bigarade, l’ouvrir et la presser ; ce verre de vin, et le boire ; ces fruits, et les peler ; ce pâté, et y mettre le couteau. […] Ô Chardin, ce n’est pas du blanc, du rouge, du noir que tu broies sur ta palette ; c’est la substance même des objets, c’est l’air et la lumière que tu prends à la pointe de ton pinceau, et que tu attaches sur la toile.

1835. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Chapitre I. Les idées et les œuvres. » pp. 234-333

Avec ce petit pécule, ils prirent à loyer une autre ferme. […] » C’est cet essaim de songes grandioses ou gracieux que la servitude du labeur machinal et de l’économie perpétuelle venait écraser lorsqu’ils commençaient à prendre leur vol.  […] C’était en janvier, il prit une fièvre rhumatismale. […] Ils avaient rompu violemment avec la tradition, et sautaient par-dessus toute la culture classique pour aller prendre leurs modèles dans la Renaissance et le moyen âge. […] Prenons pour personnage un enfant idiot, une vieille paysanne qui grelotte, un colporteur, une servante arrêtée dans la rue.

1836. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — III. (Fin.) » pp. 371-393

Pour moi, j’en ai pris une autre idée : Je regarde le Tribunat comme une assemblée d’hommes d’État chargés de contrôler, réviser, épurer, perfectionner l’ouvrage du Conseil d’État, et de concourir avec lui au bonheur public. […] Il connaissait mieux que beaucoup de ceux qui le raillèrent alors les mœurs de la France, et comment le feu chez nous prend aux poudres plus vite que chez nos voisins. […] Roederer ne cessait point pour cela d’être conseiller d’État et président de section ; mais cette direction nouvelle, en le mettant aux prises avec des difficultés et des amours-propres de tout genre, hâta le moment où il y eut arrêt dans sa faveur. […] Ce n’est pas arbitrairement que la tragédie borne l’action à vingt-quatre heures : c’est qu’elle prend les passions à leur maximum, à leur plus haut degré d’intensité, à ce point où il ne leur est possible ni de souffrir de distraction ni de supporter une longue durée. […] Roederer, sans s’inquiéter s’il ne mécontenterait pas les classiques, s’en prenait un peu aux quatre grands poètes, Molière, La Fontaine, Racine et Boileau lui-même, tous plus ou moins complices de ces louanges pour un victorieux et un amoureux.

1837. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — III » pp. 132-153

Il lisait toutes sortes de livres anciens et nouveaux : c’était une nourriture qui lui était nécessaire. « Les jeunes gens surtout, disaii-il, devraient se mettre en tête cette maxime bien véritable, que plus on lit plus on a d’esprit… Celui qui a lu aurait encore plus d’esprit s’il avait lu davantage. » Il lisait toutes les nouveautés, et notait l’impression qu’il en recevait ; il n’était pas de ces dédaîgneurs (comme il les appelle) qui déclaraient d’un livre à première vue que cela ne valait rien ; il lisait jusqu’au bout le livre une fois commencé, biographies, mélanges, anecdotes, même les ana, même les contes de fées ; il les prenait par leur bon côté et y trouvait presque toujours sujet à quelque réflexion, à quelque plaisir : « Je dis à nos amis ordinaires : Que je vous plains de toujours critiquer ! […] Par cette facilité de mœurs, semblables à de pauvres petits enfants trop corrigés et rendus timides, quoique d’un naturel excellent, nous prenons l’importance pour le mérite et la modestie pour insuffisance. […] Là aussi il a été malencontreux et gauche comme il en avait trop pris l’habitude ; occupé de son gros bagage, il a manqué le coche, comme on dit. […] s’écrie-t-il ; avec cela il est philosophe et aime l’humanité. » Il prend sans objection Le Philosophe de Sans-Souci pour ce qu’il se donne. […] Ce qui plaît dans ces remarques manuscrites et ce qui permettrait d’en tirer avec choix et discrétion un volume tout à fait agréable et qui prendrait le lecteur, c’est le naturel franc, et aussi la manière de dire.

1838. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire de la querelle des anciens et des modernes par M. Hippolyte Rigault — II » pp. 150-171

Vous voyez dans ce prélude que cette espèce de savants a pris parti contre M. de La Motte. […] On lui attribue l’honneur d’avoir mis en circulation ce nom et ce terme d’érudits, qui ne se prend plus maintenant en mauvaise part, mais qui, à l’origine, avait une teinte marquée et désagréable. […] On cite de lui ce joli mot à quelqu’un qui l’abordait en croyant le reconnaître, et qui le prenait pour un autre : « Monsieur, je ne suis pas le bossu que vous croyez. » Et toutefois, dans la querelle présente, il ne devait pas tout à fait oublier qu’il lui était échappé, à lui tout le premier, d’appeler les érudits stupides ; et il avait beau dire qu’il ne l’avait fait qu’en général et sans application à personne, le pavé était gros, le compliment peu mince. — Convenons aussi que, sans être Gacon, il fallait se tenir à quatre dans ce débat pour ne pas dire de La Motte (ce qui était vrai au pied de la lettre) qu’il jugeait d’Homère comme un aveugle des couleurs. […] La santé affaiblie de l’abbé de Pons et ses infirmités croissantes, qui ne lui permettaient plus les relations de société, lui firent prendre le parti de se retirer en 1727 à Chaumont, dans le sein de sa famille. […] [NdA] Supériorité, pris dans le sens absolu ; c’est déjà la langue du xviiie  siècle et du nôtre ; ce n’est plus celle du xviie .

1839. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe, et d’Eckermann »

Charles de Nîmes, qui a été longtemps professeur à Montpellier, homme très-instruit, original et sincère, est allé étudier, pendant plusieurs années, l’allemand en Allemagne, là où il faut le prendre, c’est-à-dire à sa source, à sa souche et dans sa racine. […] Là-dessus et d’après ce qu’on lui en rapporta, Eckermann prit courage, adressa son traité critique manuscrit à Gœthe, et se mit lui-même en route à pied et en pèlerin pour Weimar, sans autre dessein d’abord que de faire connaissance avec le grand poëte, son idole. […] Il conserve sa manière de voir pure et droite, et il augmente tous les jours ses connaissances ; sa pénétration, l’étendue de sa vue s’agrandissent ; l’excitation qu’il me donne par la part qu’il prend à mes travaux me le rend inappréciable 49. » Et c’est ainsi que se complète autour du grand esprit de Weimar ce ministère général de l’intelligence dont il est le régulateur et le président ; ou, si l’on aime mieux, on y peut voir un petit système planétaire très bien monté, très bien entendu, dont il est le soleil. […] Un sujet particulier prend un caractère général et poétique, précisément parce qu’il est traité par un poëte. […] Ainsi, lorsqu’on jouait le Comte d’Egmont de Gœthe, à la scène de la prison, pendant qu’on lisait au comte sa condamnation, Schiller chargé de l’arrangement et de la mise en scène, avait pris sur lui de faire apparaître dans le fond le duc d’Albe en masque et en manteau, pour qu’il pût se repaître de l’impression que la condamnation à mort produirait sur Egmont.

1840. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni. »

Prenez la plus innocente de ces fourberies, celle de la jeune fille au bras de son papa qui la devine. — « Comment saviez-vous, papa, que j’aimais mosieu Léon f » — « Parce que tu me parlais toujours de mosieu Paul. » Allez à la plus calme, à la mieux établie et la mieux réglée de ces fourberies conjugales : un jeune homme dans un salon est assis bien à l’aise, installé dans un fauteuil, lisant comme chez lui, le chapeau sur la tête ; avec lui une jeune femme près de la fenêtre, debout, tient à la main son ouvrage et regarde en même temps dans la rue ; et, pour toute légende, ces mots : « Le v’là ! […] Il y eut dix années, où, à partir de 1837, il s’empara de la curiosité publique, de la vogue ; et lui et Balzac, ils se mirent à peindre, à silhouetter dans tous les sens la société à tous ses étages, le monde, le demi-monde et toutes les espèces de mondes. ; ils prirent la vie de leur temps, la vie moderne par tous les bouts. […] Balzac, que je ne prétends nullement diminuer sur ce terrain des mœurs du jour, et de certaines mœurs en particulier, où il est expert et passé maître, Balzac pourtant s’emporte et manque de goût à tout moment ; il s’enivre du vin qu’il verse et ne se possède plus ; la fumée lui monte à la tête ; son cerveau se prend ; il est tout à fait complice et compère dans ce qu’il nous offre et dans ce qu’il nous peint. […] Il a vu l’ironie, la moquerie partout où elle était naturelle et de bonne prise, et dans sa série des Maris vengés il n’a pas épargné les amants ; il les a surpris à leur tour dans les inconvénients du rôle, et les jours où ils sont eux-mêmes pris au piège. […] Vuillart, souhaitant une bonne fin d’année à l’un de ses amis le jeudi, dernier jour de l’an 1699, écrivait : « Il y en a qui prennent ce nouvel an pour le premier d’un siècle nouveau ; mais il me paraît bien plus naturel de le prendre pour le dernier de celui-ci.

1841. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LOYSON. — POLONIUS. — DE LOY. » pp. 276-306

C’était se révolter contre le propre triomphe de leur cause ; chaque école victorieuse meurt vite de l’abondance de son succès ; même sans avoir pris Rome, elle a sa Capoue. […] Son visage, quand on lui lisait quelque écrit, prenait alors quelque chose de grave et de singulièrement expressif, qui, presque avant de parler, donnait conseil. […] Le critique, qui sait très-bien se prendre aux vers les plus hasardeux du classique novateur, nous semble pourtant méconnaître le principe et le droit d’une tentative qui reste légitime dans de certaines mesures, mais dont nous-même avons peut-être, hélas ! […] Barbier parut : les deux poëtes ont pris d’ailleurs leur sujet différemment, M. […] Il en est de la poésie amoureuse comme de Vénus quand elle se montre aux yeux d’Énée, naufragé près de Carthage et à la veille de voir Didon : elle prend les traits d’une mortelle, d’une simple chasseresse ; elle ressemble à une jeune fille de Sparte, et s’exprime sans art d’abord, avec un naturel parfait.

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