Nous parlerons d’abord de la première de ces deux éducations. […] C’est par rapport aux sources vives dont nous avons parlé, que les politiques regardent la communauté des eaux comme l’occasion de l’union des familles. […] C’était là que le père de famille sacrifiait aux dieux de la maison, deivei parentum (loi des douze tables, de parricidio) ; comme parle l’Histoire sainte, le Dieu de nos pères, le Dieu d’Abraham, d’Isaac, de Jacob .
Le quatrième (livres XVI à XX) ne fut achevé qu’en 1811 : il fallait attendre la mort de Lili pour pouvoir parler d’elle. […] se parleront-ils ? […] Mais il en parla. […] Aujourd’hui, muni des renseignements que nous possédons, Goethe ne pourrait plus parler ainsi : il aurait lu le beau livre de M. […] Le Franc ne saurait nous servir de modèle, et nul esprit de vie ne parle dans son art.
Pourquoi n’avoir parlé que de plaies et de souffrances ! […] Qu’ils parlent, au contraire. […] On parle moins aujourd’hui d’art social. […] Mais il faut s’entendre lorsqu’on parle de tradition. […] Qu’une Littérature le parle !
J’ose croire que l’éminent critique ne parle pas bien sérieusement. […] Tous parlent la même langue, tendue, un peu difficile, assez volontiers solennelle. […] Les rois ne causent point ; quand ils parlent, c’est tout. […] Papotages, « snoberies » et « rosseries. » (Quelle belle langue nous parlons !) […] Le défaut, c’est que les bien portants parlent ici comme les malades.
Barrière que ce que j’en ai pu surprendre, c’est-à-dire des surfaces, ou, pour mieux parler, des aspects. […] Comme il n’y a pas de raisons décisives de parler de celle-ci plutôt que de celle-là, le critique se trouve placé dans cette alternative embarrassante de parler de toutes ou de ne parler d’aucune. […] L’auteur leur verse la livre de parfums dont parle l’Écriture, en leur épargnant l’once d’amertume. […] La scène où elle congédie Louis Gandrax fait un parfait contraste avec celle dont nous venons de parler. […] Me parlez-vous par hasard de l’exemple que je vous dois ?
Laromiguière ne parle pas autrement. […] Cette langue, tout le monde ne peut la parler. […] Parlons d’abord de M. […] Les uns lorsqu’ils parlent de la nature, les autres lorsqu’ils parlent de Dieu, en parlent comme le vulgaire. […] Je réponds : « Où. est l’idéal d’Épicure (je ne parle pas de Lucrèce, qui est un poëte) ?
le dernier des sacristains d’Isis en sait plus long qu’elles… On parle bas dans le pays des tombeaux ! […] Il parle, dans ses lettres, des villes ou des provinces qu’il convoite comme les amants de leurs maîtresses. […] On ne parle en la cour que de Sa Majesté. […] On parlait bas dans cette chambre de la royauté moribonde : le moindre bruit la réveillait en sursaut. […] Pausanias parle d’une statue de la Nuit qui tenait ses deux enfants dans ses bras, le Sommeil et la Mort.
On a beaucoup parlé de Véron au moment de sa mort (septembre 1867). […] Janin, dans un article des Débats du 7 octobre 1857, ayant parlé du docteur avec amitié à la fois et mesure, je lui en adressai mon compliment bien sincère en ces termes : Ce 7 octobre 1807.
Elle aimait à parler des années anciennes et à initier ceux qu’elle appelait ses jeunes amis aux confidences d’autrefois : « C’est une manière, disait-elle, de mettre du passé dans l’amitié. » C’est donc elle qui parle autant et plus que moi dans ce que je vais dire : « La première passion de Mme de Staël, à son entrée dans le monde, a été pour M. de Narbonne qui s’est très mal conduit avec elle, comme font trop souvent les hommes après le succès.
Qu'on ne vienne pas parler des conquêtes de l’homme, de ses assurances contre les événements ; nous ne sommes rien. […] Quand on lui a parlé de Paris, elle a répondu que ce n’était pas une visite de curiosité qu’elle faisait, mais une visite d’affection.
Mais ce que nous pouvons affirmer, c’est que si parfois nous nous exprimons avec l’injustice de la prévention ou l’aveuglement de l’antipathie irraisonnée, nous n’avons jamais menti sciemment sur le compte de ceux dont nous parlons. […] Daudet prenait plaisir à la lecture, s’échauffait sur l’intérêt des choses racontées sous le coup de l’impression, me sollicitait d’en publier des fragments, mettait une douce violence à emporter ma volonté, en parlait à notre ami commun, Francis Magnard, qui avait l’aimable idée de les publier dans Le Figaro.
Mais ce que nous pouvons affirmer, c’est que si parfois nous nous exprimons avec l’injustice de la prévention ou l’aveuglement de l’antipathie irraisonnée, nous n’avons jamais menti sciemment sur le compte de ceux dont nous parlons. […] Daudet prenait plaisir à la lecture, s’échauffait sur l’intérêt des choses racontées sous le coup de l’impression, me sollicitait d’en publier des fragments, mettait une douce violence à emporter ma volonté, en parlait à notre ami commun, Francis Magnard, qui avait l’aimable idée de les publier dans le Figaro.
Machiavel a été long-tems le docteur de la politique ; mais ses principes sont détestables, & au lieu d’indiquer les traductions de ses livres, je parlerai de leur réfutation par le Roi de Prusse. […] Il fait parler souvent ce Cardinal en grand Ministre, & d’autres fois en Moine défroqué.
Ceux qui font leur amusement de la poësie dramatique, parlent plus souvent et avec plus d’affection des tragedies que des comedies qu’ils ont vûës ; ils sçavent un plus grand nombre de vers des pieces de Corneille et de Racine, que de celles de Moliere. […] Tous ceux qui travaillent pour notre théatre parlent de même, et ils assurent qu’il est moins dangereux de donner un rendez-vous au public pour le divertir en le faisant pleurer, que pour le divertir en le faisant rire.
Il parla ainsi, et comme Dolon le suppliait, en lui touchant la barbe de la main, il le frappa brusquement de son épée au milieu de la gorge et trancha les deux muscles. Et le Troien parlait encore quand la tête tomba dans la poussière.
Faut-il parler des gigantesques collerettes des dames, de leurs robes bouffantes, de leurs corsages tout roides de diamants ? […] Tu es là quand elle parle, quand elle mange, quand elle pleure, quand elle soupire. […] Il parle aux oiseaux, aux plantes, aux vents, à toute la nature. […] Je veux aussi que vous parliez de mes glaces, de mes tapis, de mes tentures. […] Ils parlent en incrédules ou en superstitieux, jamais en fidèles.
Il parle de Rome et des Romains sur un ton qui rappelle les colères indignées de Luther. […] Puis-je vous demander si vous parlez par ouï-dire ou de votre propre expérience ?” […] Je parlais peu le portugais, et je prononçai ces téméraires paroles en italien. […] Et j’ai un peu peur de lui en parler. […] Tout est fini pour moi, politiquement parlait.
Sa sensibilité parle, plutôt que son intelligence. […] Ce n’est pas à lui qu’il faut parler de l’infinie vanité de tout. […] Elle parle, on l’écoute, on est tenté de lui répondre. […] Le monde des choses est représenté pour nous parle monde des idées. […] Parlez-lui d’une page bien noire, bien tachée, et pareille à ces gribouillis où s’amusent les écoliers : il exulte.
Ils parlent avec assurance et on les écoute avec déférence. […] Qu’il écoute plutôt sur quel ton les savants parlent de la science des littérateurs ! […] Les écrivains qui nous parlent d’amour s’engagent du même coup à en parler avec vérité : s’ils ne nous en montraient que les charmes et non les hontes, c’est alors qu’ils feraient œuvre mauvaise. […] Il parlait du faubourg Saint-Germain comme en parlent les jeunes gens de Balzac et le tambourinaire d’Alphonse Daudet. […] Mais qui parle d’incorrections ?
Et il parlait, parlait, avec entrain, fougue, emportement, volubilité. […] Il pensait comme il parlait. […] Il les fait penser et parler. […] Parlons-en ! […] Chacune rit, pleure, parle.
Ne leur parlez pas de ce qu’on appelle décence ou bon goût. […] Le « publicain » vous parlait grammaire et syntaxe : vous répliquez religion ! […] Francis Jammes n’est pas de ces Pascaliens qui ont la haine du moi et n’osent parler d’eux. […] Après cela, ne parlons pas des différences. […] « J’appelle mal parler, dit-il, parler contre la logique, néologiser sans cesse… » Néologiser : il commet la faute qu’il blâme ; sans doute s’amuse-t-il à nous montrer comme la faute n’est point jolie.
Seulement, dans ce qui précède, il n’a peut-être pas été assez parlé de sa prose : elle est décidément charmante. […] Après tant de témoignages de constante attention, on ne saurait dire assurément que je l’aie négligé : je crains cependant de n’être pas tout à fait arrivé, à son sujet, au niveau des exigences de quelques-uns, — et je ne parle pas seulement de sa famille, mais des admirateurs enthousiastes qu’il n’a cessé de recruter dans les générations survenantes.
Voulez-vous que je vous en parle, bien que vous ne deviez probablement jamais le voir. […] Parodi sont respectables et admirables, son « exécution » est bien insuffisante ; et s’il possède incontestablement le don dramatique, il en usa parfois avec une maladresse déconcertante… Il me faut parler de ce qu’il y a de plus fâcheux dans la Reine Juana : du style.
Mais J. de Strada n’atteindra pas à la gloire dont vous parlez, à la gloire imminente. […] J. de Strada, comme Leconte de Lisle, est un témoin qui raconte le passé et qui communique aux faits un peu du phosphore que son génie lui a mis aux doigts, de ce phosphore dont parle Joubert.
L'Auteur y expose tout ce qui a rapport aux anciens exercices si chers autrefois à la Nation, comme les joûtes, les combats, les triomphes, les tournois, les carrousels, les courses de bague ; il y parle aussi des cartels, des duels, des dégradations des noblesse, de chevalerie, & de mille autres objets aussi curieux qu'intéressans. […] Le même Auteur avoit commencé une Géographie Histori-Politique de l'Allemagne, dont il parle dans son livre de l'Office des Rois d'Armes ; & l'on doit peu regretter qu'il ne l'ait point achevée, depuis que M. l'Abbé Courtalon, Précepteur des Pages de Madame, a publié un Atlas élémentaire de cet Empire, où l'on voit sur des Cartes & des Tableaux sa description géographique, & l'état actuel de sa constitution politique.
En supposant que le poëte françois et le poëte latin aïent traité la même matiere, et qu’ils aïent également réussi ; les françois dont je parle trouvent plus de plaisir à lire les vers latins. […] Enfin les françois et les étrangers, je parle de ceux qui sçavent notre langue aussi bien que nous-mêmes, et qui ont été élevez un Horace dans une main et un Despreaux dans l’autre, ne sçauroient souffrir qu’on mette en comparaison les vers latins et les vers françois considerez mécaniquement.
Indépendamment de son fils Jean, né d’une mère inconnue à Avignon, il parle dans ses lettres et dans ses sonnets d’une belle et jeune dame d’Italie dont les charmes rendaient malgré lui à son cœur des sentiments qu’il rougissait de rallumer. […] La terreur est ici si profonde qu’on n’ose se parler qu’à l’oreille, la nuit, et dans quelques lieux retirés. […] On m’a apporté de votre part une médaille antique qui représente l’image de César ; si cette médaille avait pu parler, que ne vous aurait-elle pas dit pour vous empêcher de faire une retraite si honteuse ! […] Vous dites qu’il aurait excellé s’il se fût adonné à un autre genre de poème ; j’en conviens avec vous ; il avait assez de génie pour réussir dans tout ce qu’il aurait entrepris ; mais il n’est pas question ici de ce qu’il aurait pu faire : nous parlons de ce qu’il a fait. […] Il y a des célébrités pour l’oreille du vulgaire et des célébrités pour les cœurs d’élite ici-bas ; ces dernières sont moins retentissantes, mais elles sont plus chères, plus sacrées, plus consanguines, si l’on peut parler ainsi, à nos propres cœurs.
Des livres, aussi vieux que les fondements de l’Himalaya, nous parlent de l’homme, de ses sens, de ses formes, de sa stature, de son état physique et moral. […] Cela est si vrai que, quand nous voulons parler d’une chose supérieure en sagesse, en vertu, en force, en beauté matérielle ou morale, nous disons : Cela est antique. […] Je le comprenais, et je m’accusais comme s’il avait parlé avec la voix. […] Avant de feuilleter avec vous la littérature de l’Inde primitive, il fallait vous donner une idée de la philosophie religieuse de ces peuples, car avant de parler il faut penser. […] Pelletan, qui parle comme Platon, a le droit de rêver comme lui de beaux rêves.
Pour eux, ils ont un autre mot quand ils en parlent et qu’ils l’exaltent : « Dieu ! […] Quand on n’a pas le langage de la chose qu’on fait, ou l’accent de la langue qu’on parle, quand on n’a pas précisément la qualité essentielle à son art, est-on déjà si grand, littérairement, ou si beau ? […] Grâce à ce livre qui parlait aux plus mauvaises et aux plus ignorantes passions d’une époque viciée, il recruta autour de sa chaire un public qui lui donna le vertige, — en l’applaudissant. […] S’il est athée, ce n’est donc pas à la manière des grands penseurs hégéliens, spinosistes, qui ont de ces têtes puissantes, comme parle Joubert : « organisées pour écraser des œufs d’autruches ». […] Il est des penseurs dans les infiniment petits qui ont beaucoup parlé des nuances infinies de la femme et qui nous en ont compté les variétés sans les épuiser.
» De quel homme Rousseau prétend-il parler ? […] Rousseau veut parler ? […] XIII Et la souveraineté, dont ce philosophe parle tant, sans pouvoir la définir, parlons-en à notre tour. […] Ici la souveraineté de la nature ne parle pour ainsi dire plus intelligiblement aux législateurs. C’est la société politique, diverse dans ses formes, qui prend la parole et qui parle seule.
Laissons parler ici madame de Staël : « Le séducteur Faust, dit-elle, apprend que Marguerite emprisonnée a tué l’enfant qu’elle a mis au jour, espérant ainsi se dérober à la honte. […] « Tout ce qui est visible parle à l’homme de commencement et de fin, de décadence et de destruction. […] Ont-ils pu lui parler de leurs froids intérêts, de leurs misérables désirs ? […] Nous voulons parler de ses Considérations sur la Révolution française. […] Mais si vous ne tenez qu’à la voir sans lui parler, vous en aurez très-souvent l’occasion en vous promenant sur la route de Coppet à Morges.
Quoique, dans votre préface, vous nous traitiez impitoyablement de mousses et de lierres rampants, je n’en rendrai pas moins justice à votre aimable talent, et je parlerai de votre œuvre michelangesque comme je parlais autrefois de vos Odes. […] Charles Garnier Il faut parler des forts quand on s’adresse aux Maîtres ; Il faut parler des preux quand on s’adresse au Roi ; Il faut parler du ciel quand on s’adresse aux prêtres ; Il faut parler des Dieux quand on s’adresse à toi ! […] Désiré Nisard Quand on parle de l’état des lettres dans la France contemporaine, on ne peut guère ne pas nommer M. […] Léon Deschamps Victor Hugo, lorsqu’il entreprend la critique des autres, ne consent à parler que des hommes de génie, ses égaux.
Le beau mérite qu’a eu Térence de faire parler ses personnages selon la nature ! […] C’est en gens d’esprit qu’il fallait les faire parler. […] Les caractères ne valent même pas ceux de Térence ; ils ne parlent ni selon la nature, ni en gens d’esprit. […] Quand on parle de la raison qui met sa gloire à abdiquer, on a nommé Pascal. […] Ces singularités faisaient murmurer l’homme de génie qui a le plus magnifiquement parlé de la raison, Bossuet.
Le voilà qui apparaît, cet état de nature, dont on va tant parler jusqu’à la Révolution française ! […] Des bergers vêtus de soie, qui sont poètes, musiciens et qui parlent comme des livres ; des bergères, jolies, aimables, précieuses. […] L’Art, lui, parle tout autrement. […] Lui-même parle du rôle des poètes avec une fierté que chacun trouve naturelle. […] Puisque nous parlons choses économiques, il nous sera permis de donner quelques chiffres64.
On parle beaucoup en ce moment-ci de l’Eden-Théâtre, qui doit se transformer en Théâtre-Lyrique ; je crains qu’on n’en parle trop. […] Parlons-en. […] Et qu’on ne nous parle pas de M. […] On n’entendra plus parler de moi. […] Benoît, vont s’étonner d’apprendre que Wagner professait la plus vive admiration pour Bach, Gluck, Mozart, Haydn, Weber, Schubert, et qu’il a parlé de Beethoven en des termes inégalés !
Elle était assez jeune et belle toujours, délicieuse de grâce ; petite, blanche, blonde, de ces cheveux d’un blond cendré qui ne sont qu’à Valérie, avec des yeux d’un bleu sombre ; une voix tendre, un parler plein de douceur et de chant, comme c’est le charme des femmes livoniennes ; une walse enivrante, une danse admirée. […] La seule pensée de celui-ci, son ombre, lui donnait, dès l’instant qu’elle en parlait, le vertige sacré des prêtresses ; elle prédisait à tous venants sa sortie de l’île d’Elbe et les maux qui se déchaîneraient avec lui. […] Elle avait une éloquence particulièrement admirable et un redoublement de plénitude quand elle parlait des misères humaines chez les grands : « Oh ! […] Je n’en vois jamais un sans avoir le cœur serré. » Mais c’est surtout quand elle parlait aux pauvres de ces misères qui égalent les leurs, que l’effet de sa parole était souverain. […] Elle commença au milieu de ces femmes étonnées et bientôt touchées : les plaies des puissants furent étalées ; elle frappa son cœur ; elle se confessa aussi grande pécheresse qu’elles toutes ; elle parla de ce Dieu qui, comme elle disait souvent, l’avait ramassée au milieu des délices du monde.
Je le pense encore et je n’en parle jamais, même à lui. […] Le sage et courageux Dupont (de l’Eure), notre président, qui m’avait donné en secret, par écrit, sa survivance pendant les tempêtes du premier et du second jour, parla en notre nom à tous. […] Il publia, quelques semaines après, une profession de foi conservatrice, où le courage parlait la langue de la raison au peuple. […] nous ne sommes plus au temps où le poëte Parlait au ciel en prêtre, à la terre en prophète ! […] Aujourd’hui, vous pensez que l’heure est venue de parler de moi, j’en suis fier ; nous nous aimons depuis quarante ans et nous ne sommes pas morts.
Dans sa fiction, son héros et lui parlent de principes trop opposés pour se rencontrer jamais dans un jugement semblable. […] N’en parlons plus ; cela nous ferait trop serrer le cœur. […] dis-je avec une curiosité qui venait de bonne intention, parlons-en, à moins que cela ne vous fasse trop d’angoisse. […] — Parlez donc, vous, père, dirent-elles toutes deux. […] non, dit le père ; mais parlons chacun à notre tour, et disons chacun ce dont nous nous souvenons ; ainsi le voyageur saura tout par la bouche même de celui qui aura vu, connu et senti la chose.
Elle ne parlait à personne, personne ne songeait à elle, son histoire était évidemment oubliée. […] Elle parlait admirablement le breton, connaissait tous les proverbes des marins et une foule de choses que personne au monde ne sait plus aujourd’hui. […] Celui de Trédarzec, dont je te parle, était un beau vieillard, grand et vigoureux comme un jeune homme, à la figure franche et loyale. […] Le vicaire était la seule personne de son rang qu’elle vit, s’il est permis de parler de la sorte. […] Le sentiment dont nous parlons ne tue que celui qui l’éprouve, et voilà pourquoi la race bretonne est une race facilement chaste ; par son imagination vive et fine, elle se crée un monde aérien qui lui suffit.
On commence à pouvoir parler, dans les limites que je viens de tracer, de critique scientifique. […] Scientifique, il l’a été encore et enfin par sa volonté de tout dire, par son intrépide emploi soit des vocabulaires techniques soit des nudités et des crudités de style, par la précision et l’ampleur de ses descriptions, par l’effacement de toute distinction entre la langue qui se parle et celle qui s’écrit, par le soin scrupuleux de laisser à chacun sa façon propre de s’exprimer. […] Pour parler sans métaphore, il se fait dans le domaine intellectuel un partage sur de nouvelles bases entre l’élément personnel ou subjectif fourni par l’homme et l’élément réel ou objectif fourni par la nature, et le mouvement de pendule qui fait tour à tour prédominer l’un ou l’autre continue ses régulières et larges oscillations. § 3. — J’ai réservé, pour en parler avec plus d’ampleur, les rapports de la poésie et de la science, parce qu’elles passent pour être placées aux deux pôles et parce que, sans être aussi opposées l’une à l’autre qu’on le dit, elles sont pourtant séparées par un vaste écart. […] Le style est coloré, pittoresque ; il parle aux yeux ; il sait décrire la nature, exprimer avec vigueur les sensations.
On a parlé d’un principe vital, antérieur à toutes les activités organiques et indépendant d’elles. […] C’est ce qui arrive lorsqu’on dort pendant un sermon ou une lecture : on a la sensation des sons émis par celui qui parle, on n’en a pas la perception. […] « Il y a, je le répète, une malheureuse équivoque de langage qui fait paraître absurde de parler de sensations non perçues. […] Là quelques-uns peuvent encore manger, parler. […] Manger, boire, parler, ce sont des actes involontaires du corps, de la coquille vide, comme disent ces insulaires ; mais l’âme est partie, suivant eux.
Elle est intéressante d’abord par l’accent de mépris hautain ou de révolte indignée dont elle parle de ces grotesques et de ces ignobles. […] Malheureusement, il ne se contente pas de dire son émotion ; il veut l’analyser et on s’aperçoit immédiatement qu’il ne comprend rien au poète dont il parle. […] Rien ne me paraît plus beau que l’allure harmonieusement idéaliste ou, pour parler en pédant, la dialectique platonicienne des deux poèmes. […] L’Avenir sourira, limpide, dans leurs yeux Et, quand ils parleront, la foule doit se taire. […] Une coquette parle : « Je me promène parfois rien que pour le plaisir de voir, selon le contour des sentes, mon ombre rôder à mon entour pour s’unir à moi ou me fuir, puis disparaître à gauche et, un pas plus loin, renaître à droite ; ici me précéder, tel un héraut, et là me suivre, tel un page.
Il disait : Encore un mot, un mot sérieux, si je puis parler ici aux deux frères, MM. […] Il nous est venu la curiosité de savoir si cette forme conventionnelle d’une littérature oubliée et d’une société disparue, la Tragédie, était définitivement morte ; si dans un pays sans caste et sans aristocratie légale, les misères des petits et des pauvres parleraient à l’intérêt, à l’émotion, à la pitié, aussi haut que les misères des grands et des riches ; si, en un mot, les larmes qu’on pleure en bas, pourraient faire pleurer comme celles qu’on pleure en haut. […] De ses yeux ouverts et vides, elle regarde vaguement défiler les maisons, elle ne parle plus… Arrivée à la porte de l’hôpital, elle veut descendre sans qu’on la porte : « Pouvez-vous aller jusque-là ? […] Mais il m’a été impossible parfois de ne pas parler comme un médecin, comme un savant, comme un historien. […] Oui, je crois, — et ici, je parle pour moi bien tout seul, — je crois que l’aventure, la machination livresque a été épuisée par Soulié, par Sue, par les grands imaginateurs du commencement du siècle, et ma pensée est que la dernière évolution du roman, pour arriver à devenir tout à fait le grand livre des temps modernes, c’est de se faire un livre de pure analyse : livre pour lequel — je l’ai cherchée sans réussite — un jeune trouvera peut-être, quelque jour, une nouvelle dénomination, une dénomination autre que celle de roman.
, passé classique en sortant de ses classes, et qui continuait (disait-on) de parler la belle langue du dix-septième siècle. […] Villemain, qui s’est fait grec le plus qu’il a pu pour admirer sans honte cette vaine poésie qui ne parle pas plus à notre pensée qu’à nos cœurs, prétend que de toute cette poussière, mêlée de sueur, foulée par la muse de Pindare, sortirent tous ces héros, beaux comme des demi-dieux, qui sauvèrent la Grèce et suivirent en Asie Alexandre. […] Vous verrez qu’à propos de ce commentaire sur Pindare, écrit par un homme dont le seul mérite net et vrai fut de savoir bien le latin dans son temps, il est des gens qui parleront encore longtemps de la gloire de collège de Villemain ; et ils auront raison, car cette gloire a fait son heureuse position dans les lettres, et tous les livres qu’il a écrits depuis n’y ont pas beaucoup ajouté. […] C’était là une bonne occasion pourtant de prouver qu’elle avait de l’encre dans les veines… Élevée probablement pour être un bas-bleu, elle ne nous a pas montré le moindre bout de l’odieuse chaussette, et elle s’est contentée de nous dire ce qu’est le livre de son père, avec la simplicité de monsieur Jourdain demandant à Nicole ses pantoufles… À rigoureusement parler, ce livre de la Tribune moderne n’est pas un livre, mais le projet d’un livre interrompu et dont on a réuni les fragments qui ont été achevés. […] comme la plus grande gloire de « la tribune moderne » en Angleterre, puisque dans son livre il n’a parlé que de ces deux-là !
Tout est surnaturel dans ce que nous voyons, et les maux comme les remèdes dérivent immédiatement d’un ordre supérieur de causes, aussi élevé qu’impénétrable à la vue de l’homme, dont la sagesse ne fut jamais mieux convaincue de folie. » N’allez pas, à un homme qui prophétise de la sorte, venir parler avec quelque estime de la politique pratique qu’essayèrent en ces années, — qu’essayeront bientôt des ministres patriotiques et sages, les Richelieu, les De Serre, les Decazes, les Gouvion Saint-Cyr, les Dessolle ; allons donc ! […] Toutes les fois qu’il parle de M. […] J’ai toujours l’espoir de vous aller revoir au printemps… » Une lettre toute d’onction de l’abbé Carron à l’abbé Jean, à ce moment, met au grand jour l’âme suavement bénigne et tendre de cet excellent homme : « (12 décembre 1815)… Je ne vous parlerai, cher ami, de mon bien-aimé fils Féli que les larmes aux yeux : je ne suis point un Paul, et pourtant j’ai dans le même personnage un second Tite, un autre Timothée. […] Les textes irrécusables, les témoignages directs, longtemps tenus sous clef, sortent enfin et parlent assez haut. […] Peyrat pense et parle en ministre de la Religion réformée) ; mais il se relâchait, il s’abandonnait par moments avec Béranger.
J’ai parlé d’une pension qu’elle touchait ; ceci est à expliquer, d’autant plus que la correspondance sera remplie de détails pénibles, et qu’il serait injuste d’en tirer aucune conséquence extrême contre la société ni contre les hommes. […] Et maintenant laissons-la parler elle-même ; parcourons avec elle quelques-unes des branches les plus particulières et les plus intimes de sa correspondance, à commencer par celle qui s’adresse à ce frère si peu favorisé, Félix Desbordes, administré de l’hôpital général à Douai : « (14 janvier 1843)… L’aînée de mes filles est toujours en Angleterre, à ma grande affliction74, car cette absence commence à me devenir insupportable. […] Plus tard je t’en parlerai. […] On a diversement parlé du ministre de la justice en ce temps-là, Martin (du Nord) ; je crains que sa fin n’ait nui à ce qu’il pouvait y avoir de bien dans sa vie. […] Et tout cela me rend l’étude de l’espagnol plus intéressante qu’une autre, parce que je pense que tu as parlé cette langue dans ta jeunesse guerrière. » Elle ennoblit tant qu’elle peut le passé de ce cher frère pour le relever lui-même à ses propres yeux ; elle y verse de la poésie comme sur toute chose, en croyant n’y mettre que du souvenir.
Jomini, dans l’après-midi du 28 (août), ayant jugé nécessaire de faire quelque mouvement de troupes et en ayant parlé à l’empereur Alexandre qui l’approuva, fut chargé d’en porter l’avis au prince généralissime. […] Le voyage de Jomini à Prague au-devant de sa famille ne l’empêcha point de rejoindre à temps l’empereur de Russie avant les journées de Leipsick, son rôle de donneur de conseils fut ce qu’on a vu déjà : il était une Cassandre prophétique, qui parlait pour l’acquit de sa conscience et qu’on n’écoutait qu’à demi. […] Olivier, en plus d’une page de ses Études d’histoire nationale, Monnard même dont je viens de parler dans l’Histoire (continuée) de la Confédération suisse 58, ont parfaitement défini son rôle. […] Le correspondant de Jomini veut parler, sans doute, de la campagne d’Ulm en 1805, et du mouvement de Ney sur la rive gauche du Danube, maintenu malgré l’intervention de Murat et à travers l’hésitation même de Ney, qui fut un moment ébranlé. […] Dans sa correspondance avec le baron Monnier, dans celle qu’il eut avec le général Sarrarin, c’est-à-dire dans le feu de la polémique ou l’ardeur de l’apologie, il me paraît avoir outrepassé un peu les termes de l’exactitude, comme lorsqu’il parle d’un ordre précis que Ney aurait reçu de l’Empereur pour se porter sur Berlin, et auquel lui, Jomini, aurait tout fait pour s’opposer.
Les mortelles leçons de ce père trop éclairé et inexorable d’expérience ne sont, selon moi encore, que trop vraies (je parle en général) ; c’est du La Rochefoucauld développé et senti, c’est du Machiavel domestique ; bien des pages du chapitre intitulé le Deuil ont même de certains accents de morose éloquence. […] Mais que sera-ce donc si j’ai à faire parler dans mon récit un de ces hommes dont le nom seul enferme tout un culte et un héritage évanoui de vertu, de gravité et d’éloquence, quelque Daguesseau, quelque Lamoignon ? […] M. de Bâville a-t-il jamais pu parler à son fils comme il le fait dans le roman ? […] Ce qu’il n’a pas pu dire, je le sais bien ; comment il aurait pu parler, qui le saura, à moins d’avoir eu l’honneur d’être familier autrefois en cette maison même des Malesherbes ? […] Pour avoir une juste idée de Louis XIV et ne plus être tenté d’en parler à la légère, il faut avoir lu au complet le beau Recueil des pièces diplomatiques publiées par M.
Il me suffira de prendre pour type du genre l’œuvre supérieure qui contient et dépasse toutes les autres : je parle des Mémoires du cardinal de Retz352, puisque ceux de Saint-Simon appartiennent décidément au xviiie siècle. […] La littérature tient une grande place dans les lettres de Bussy : il donne son avis sur tout ce qui paraît, et il en parle à merveille, en grand seigneur qui est académicien, et ami des Pères Rapin et Bouhours357. […] Voyez son admirable lettre sur la mort de Turenne, elle l’écrit au bout d’un mois, lorsqu’elle a déjà parlé dix fois du fait. […] Elle écrit cette langue riche, pittoresque et savoureuse, que parleront tous ceux qui auront formé leur esprit dans la première moitié du siècle, et sans quitter jamais le simple ton de la causerie, elle y mêlera les mots puissants, qui évoquent les grandes idées ou les visions saisissantes. […] Je veux parler des érudits, les Du Cange364, les Baluze, et tous ces bénédictins dont l’immense labeur a illustré le nom de l’ordre, les Luc d’Achery, les Mabillon, les Ruynart, les Montfaucon.
A chaque instant les expressions générales et simplement intelligibles se résolvent sous la plume de La Bruyère en petits faits sensibles454: ainsi, voulant indiquer le plaisir de faire du bien, il ne trouve pas de plus forte expression qu’une impression physique, le choc de deux regards qui se rencontrent et parlent : « Il y a du plaisir à rencontrer les yeux de celui à qui on vient de donner ». […] Je veux parler du chapitre de quelques usages. […] Les tours et les détours de l’interrogation socratique font passer devant nos yeux une foule d’idées, que Fénelon tantôt effleure et tantôt développe : sur les poètes et les orateurs anciens, sur les Pères de l’Église, sur la poésie biblique qu’il a profondément sentie, sur l’architecture gothique, dont il parle comme tout son temps avec ignorance et dégoût, etc. […] Au moment où Fénelon dut écrire la lettre à l’Académie, la querelle des anciens et des modernes s’était réveillée : les deux partis en appelaient à lui ; il lui fallut bien en parler. […] Il est le plus charmant, le plus fin, le plus sûr des critiques, partout où sa nature se trouve conforme à l’œuvre dont il parle.
Reprenons maintenant les deux séries S et S′, inverses l’une de l’autre, dont nous venons de parler. […] Ce point unique serait assujetti à rester sur une surface (d’un nombre quelconque de dimensions < 3 n) en vertu des liaisons dont nous venons de parler ; pour se rendre sur cette surface, d’un point à un autre, il prendrait toujours le chemin le plus court ; ce serait là le principe unique qui résumerait toute la mécanique. […] Ainsi la question posée ne peut s’entendre que d’une manière ; est-il possible d’imaginer que, les résultats des expériences relatées plus haut ayant été différents, nous ayons été conduits à attribuer à l’espace plus de trois dimensions ; d’imaginer, par exemple, que la sensation d’accommodation ne soit pas constamment d’accord avec la sensation de convergence des yeux ; ou bien que les expériences dont nous avons parlé au paragraphe 2 et dont nous exprimons le résultat en disant « que le toucher ne s’exerce pas à distance », nous aient conduits à une conclusion inverse. […] § 7. — Rôle des canaux semi-circulaires Je n’ai pas parlé jusqu’ici du rôle de certains organes auxquels les physiologistes attribuent avec raison une importance capitale, je veux parler des canaux semi-circulaires. […] Quand donc, plus haut, nous parlions de la série S ou de la série Σ, nous aurions dû dire, non que c’étaient des séries de sensations musculaires seulement, mais que c’étaient des séries à la fois de sensations musculaires et de sensations dues aux canaux semi-circulaires.
Qu’on déplore tant qu’on voudra les vices qui souillèrent le xviiie siècle, c’est par cette énergie de pitié, de bienfaisance, de passion pour la justice et la vérité qu’il reste grand ; c’est par là qu’il mérite, non seulement l’estime, mais la reconnaissance de ceux qui en parlent aujourd’hui. […] De même, si l’on passe d’une époque à une autre, on voit, si l’on peut ainsi parler, des vertus qui meurent, répudiées et méprisées par les générations nouvelles avec autant d’énergie qu’elles étaient honorées et recherchées par les générations précédentes. […] C’est une amie ; le héros mourant songe avec inquiétude à ce qu’elle va devenir ; il ne veut pas qu’elle souffre en passant aux mains des mécréants, il lui parle, il lui fait ses adieux. […] § 4. — On ne saurait étudier les rapports de la littérature et de la morale sans parler de l’influence exercée sur les œuvres littéraires par l’idée même qu’on se fait des rapports qu’elles doivent avoir. […] Ecoutez Rousseau parler de La nouvelle Héloïse A l’entendre, la jeune fille « qui, malgré ce titre, en osera lire une seule page, est une fille perdue ; mais qu’elle n’impute pas sa perte à ce livre ; le mal était fait d’avance116. » Il paraît ainsi accepter, provoquer même la sévérité des magistrats de Genève qui défendirent aux cabinets de lecture de faire circuler un ouvrage pernicieux pour la jeunesse.
Mari in partibus de sa femme, il vient parler affaires avec elle, régler des comptes, combiner des opérations, et il repartira, comme il est venu, sans avoir entrouvert sa chambre à coucher. […] Mauriceau connaissait pourtant les torts domestiques du duc de Septmonts, et il en parlait, au premier acte, du ton dégagé d’un vieux libertin indulgent aux fredaines de la jeunesse qu’il voudrait bien partager. […] J’ai tout dit, et je n’ai point parlé du talent. […] On s’étonne que Lionnette le laisse parler si longtemps sans courir à sa sonnette, pour lui faire montrer la porte par un de ses gens. […] Lionnette n’est point dépravée, sa fierté la sauve de la corruption ; et pourtant elle parle, dans cette cruelle scène, la langue du vice hystérique.
Mme de Tencin, qui aurait voulu pousser son frère le cardinal à la tête du ministère, ne savait par quel moyen avoir prise sur cette volonté apathique du monarque : elle en écrivait au duc de Richelieu, qui était pour lors à la guerre ; elle engageait ce courtisan à écrire à Mme de La Tournelle (duchesse de Châteauroux), pour qu’elle essayât de tirer le roi de l’engourdissement où il était sur les affaires publiques : Ce que mon frère a pu lui dire là-dessus, ajoutait-elle, a été inutile : c’est, comme il vous l’a mandé, parler aux rochers. […] … » Quand, pour distraire le roi, elle fit jouer la comédie dans les petits appartements, Montesquieu avait l’air de s’en railler dans une lettre écrite à un ami (novembre 1749) : Je ne puis vous dire autre chose, si ce n’est que les opéras et comédies de Mme de Pompadour vont commencer, et qu’ainsi M. le duc de La Vallière va être un des premiers hommes de son siècle ; et, comme on ne parle ici que de comédies et de bals, Voltaire jouit d’une faveur particulière. […] C’était un homme original, brusque, honnête, resté sincère à la Cour, sérieux avec son air de singe, trouvant des apologues ingénieux pour faire parler la vérité. […] Ce livre de Mme Du Hausset laisse une impression singulière ; il est écrit avec une sorte de naïveté et d’ingénuité qui s’est conservée assez honnête dans le voisinage du vice : « Voilà ce que c’est que la Cour, tout est corrompu du grand au petit », disais-je un jour à Madame, qui me parlait de quelques faits qui étaient à ma connaissance. — « Je pourrais t’en dire bien d’autres, m’ajouta-t-elle ; mais la petite chambre où tu te tiens souvent t’en apprend assez. » Mme de Pompadour, après le premier moment passé de féerie et d’éblouissement, jugea sa situation ce qu’elle était, et, tout en aimant le roi, elle ne garda aucune illusion sur son caractère ni sur l’espèce d’affection dont elle était l’objet. […] Mais, s’il trouvait une autre femme à qui il parlerait de sa chasse et de ses affaires, cela lui serait égal au bout de trois jours. » Elle se répétait à elle-même cette parole comme l’exacte et triste vérité.
Lorsqu’on parle d’événements considérables où l’on a eu part, on est tenté d’exagérer cette part et de diminuer celle des autres. […] Le moraliste, sans négliger l’occasion du contrôle lorsqu’elle se présente, peut plus aisément s’en tenir aux discours mêmes du personnage si ces discours sont de grande étendue et très abondants : car il a moins à s’inquiéter du détail et de l’exposé des faits que de celui qui parle, et il est impossible qu’en parlant si longuement de soi ou de ce qui est autour de soi, on ne se découvre. […] répliqua Rosny, vous parlez comme des gens qui ont perdu la bataille. » — « Est-ce tout ce que vous en savez ? […] Il prétend que ce gouvernement de Gisors lui appartient, et, le roi le lui refusant, toujours par les mêmes raisons de ne porter ombrage aux seigneurs catholiques, Rosny s’irritera encore, criera au passe-droit, et fera au roi les mêmes reproches qu’au lendemain d’Ivry : À tous lesquels reproches, il (le roi) ne vous répondit jamais autre chose sinon : « Je vois bien que vous êtes en colère à cette heure ; nous en parlerons une autre fois » ; et s’en alla d’un autre côté ; puis, vous voyant avoir fait de même, il dit à ceux qui le suivaient : « Il le faut laisser dire, car il est d’humeur prompte, et soudaine, et a même quelque espèce de raison ; néanmoins, il ne fera jamais rien de méchant ni de honteux, car il est homme de bien et aime l’honneur. » Voilà la mesure des bouderies de Sully, et le mot de Henri sur son compte demeure le vrai. […] Les contemporains ont remarqué qu’il parlait bien.
Mais, puisque vous avez si peu d’égard à mon contentement et que vous préférez vos fantaisies à mes prières, je ne vous en parlerai plus, vous laisserai vivre à votre mode, comme je ferai aussi moi à la mienne. […] Un jour (1607), Henri IV, étant venu lui parler à l’Arsenal de quelque projet nouveau et s’étant vu désapprouver, sortit en grondant : « Voilà un homme que je ne saurais plus souffrir, dit-il tout haut ; il ne fait jamais que me contredire et trouver mauvais tout ce que je veux ; mais, par Dieu ! […] Or, combien que j’y reconnaisse une partie de ses défauts, et que je sois contraint de lui tenir quelquefois la main haute quand je suis en mauvaise humeur, qu’il me lâche ou qu’il s’échappe en ses fantaisies, néanmoins je ne laisse pas de l’aimer, d’en endurer, de l’estimer et de m’en bien et utilement servir, pource que d’ailleurs je reconnais que véritablement il aime ma personne, qu’il a intérêt que je vive, et désire avec passion la gloire, l’honneur et la grandeur de moi et de mon royaume ; aussi qu’il n’a rien de malin dans le cœur, a l’esprit fort industrieux et fertile en expédients, est grand ménager de mon bien ; homme fort laborieux et diligent, qui essaye de ne rien ignorer et de se rendre capable de toutes sortes d’affaires, de paix et de guerre ; qui écrit et parle assez bien, d’un style qui me plaît, pource qu’il sent son soldat et son homme d’État : bref, il faut que je vous confesse que, nonobstant toutes ses bizarreries et promptitudes, je ne trouve personne qui me console si puissamment que lui en tous mes chagrins, ennuis et fâcheries. La suite du discours de Henri IV concernant Sillery et Villeroi est belle et montre bien la supériorité politique de celui qui parle, qui contrôle l’un par l’autre, et qui met chacun à son juste emploi ; mais c’est assez de nous tenir à Sully. […] Comme tous les hommes qui ont manié les grandes affaires et pris part à une belle et mémorable époque, il la proclamait incomparable ; il était indigné quand il voyait des écrivains inexacts, légers, mercenaires, parler inconsidérément de ces choses et de ces hommes au gré des intérêts divers et nouveaux.
Je ne veux point parler ici de cette science de dialectique et de ces ingénieuses subtilités de division, dans lesquelles on retrouve le théologien profond, l’ancien professeur de théologie morale : j’ai dans l’idée ces hardiesses et ces présences d’esprit de l’orateur, qui, même en développant ses thèmes généraux, s’adresse aux opinions, aux susceptibilités régnantes, et qui, pour déployer ses voiles et voguer presque contre le vent, consulte en bon pilote les courants et les flots. […] La Bruyère a très finement touché ce coin singulier, et ce travers d’être en tout l’opposé du commun des mortels, dans le portrait qu’il a donné de Tréville sous le nom d’Arsène (chapitre « Des ouvrages de l’esprit ») : Arsène, du plus haut de son esprit, contemple les hommes, et, dans l’éloignement d’où il les voit, il est comme effrayé de leur petitesse : loué, exalté et porté jusqu’aux cieux par de certaines gens qui se sont promis de s’admirer réciproquement, il croit, avec quelque mérite qu’il a, posséder tout celui qu’on peut avoir, et qu’il n’aura jamais : occupé et rempli de ses sublimes idées, il se donne à peine le loisir de prononcer quelques oracles : élevé par son caractère au-dessus des jugements humains, il abandonne aux âmes communes le mérite d’une vie suivie et uniforme, et il n’est responsable de ses inconstances qu’à ce cercle d’amis qui les idolâtrent ; eux seuls savent juger, savent penser, savent écrire, doivent écrire… À l’heure dont nous parlons, Tréville n’avait point encore eu d’inconstance proprement dite, mais une simple conversion ; seulement il l’avait faite avec plus d’éclat et de singularité peut-être qu’il n’eût fallu et qu’il ne put le soutenir : il avait couru se loger avec ses amis du faubourg Saint-Jacques, il avait rompu avec tous ses autres amis ; il allait refuser de faire la campagne suivante sous les ordres de Louis XIV : « Je trouve que Tréville a eu raison de ne pas faire la campagne, écrivait un peu ironiquement Bussy : après le pas qu’il a fait du côté de la dévotion, il ne faut plus s’armer que pour les croisades. » Et il ajoutait malignement : « Je l’attends à la persévérance. » Tel était l’homme dont la retraite occupait fort alors le beau monde, lorsque Bourdaloue monta en chaire un dimanche de décembre 1671 et se mit à prêcher Sur la sévérité évangélique : il posait en principe qu’il faut être sévère, mais que la sévérité véritablement chrétienne doit consister, 1º dans un plein désintéressement, un désintéressement même spirituel et pur de toute ambition, de toute affectation même désintéressée ; — 2º qu’elle doit consister dans une sincère humilité, et 3º dans une charité patiente et compatissante. […] Toute cette maladie nouvelle et qui n’est que plus subtile et plus intérieure en ce qu’elle se croit une guérison, est développée par Bourdaloue dans une description admirable, et il offre en quelque sorte un miroir dans lequel ceux qu’il a en vue ne peuvent s’empêcher d’être reconnus et devaient eux-mêmes se reconnaître, Il rappelle excellemment « à ces sages dévots, à ces dévots superbes qui se sont évanouis dans leurs pensées », que la vraie austérité du christianisme consiste à être abaissé, à être oublié (Ama nesciri) : Car voilà, s’écrie-t-il, ce qui est insupportable à la nature : On ne pensera plus à moi, on ne parlera plus de moi ; je n’aurai plus que Dieu pour témoin de ma conduite, et les hommes ne sauront plus, ni qui je suis, ni ce que je fais. […] La princesse de Conti, présente au sermon et ayant cru reconnaître ses amis « dans ces hommes zélés, mais d’un zèle qui n’est pas selon la science, dans ces esprits toujours portés aux extrémités, qui, pour ne pas rendre la pénitence trop facile, la réduisent à l’impossible et n’en parlent jamais que dans des termes capables d’effrayer », témoigna par quelque geste qu’elle était blessée de l’allusion : ce que Bourdaloue ayant remarqué, il alla après le sermon voir la princesse, qui s’en expliqua avec lui et qui lui dit très nettement que la seconde partie l’avait fort scandalisée. […] Il a parlé quelque part de cette forme et de cette espèce de directeur à la mode et très goûté de son temps, « qui semble n’avoir reçu mission de Dieu que pour une seule âme, à laquelle il donne toute son attention ; qui, plusieurs fois chaque semaine, passe régulièrement avec elle des heures entières, ou au tribunal de la pénitence ou hors du tribunal, dans des conversations dont on ne peut imaginer le sujet, ni concevoir l’utilité ; qui expédie toute autre dans l’espace de quelques moments, et l’a bientôt congédiée, mais ne saurait presque finir dès qu’il s’agit de celle-ci » : directeur délicieux et renchéri, exclusif et mystérieux, dont Fénelon est le type idéal le plus charmant (le Fénelon de Mme Guyon et avant l’exil de Cambrai).
que vous en parlez avec justesse ! […] L’auteur, dans ce second chapitre, fait parler en un dialogue le médecin philosophe Bernier et Ninon de Lenclos : « J’avais besoin d’une femme d’esprit qui n’eût pas conservé cette retenue et cette dissimulation que les mœurs imposent à son sexe ; il me fallait une femme qui eût beaucoup pensé, beaucoup vu, et qui osât tout dire. » Et, en effet, il s’y dit froidement beaucoup de choses qui rappellent la conversation des dîners de Mlle Quinault. […] Et comment aurait-il parlé, en même temps que de la nature, de ce qui donne à la vie privée son embellissement et tout son charme, des femmes qu’il aimait, mais qu’au fond il estimait assez peu, dont il décomposait et niait les plus naturelles vertus par la bouche de Ninon, et en faveur de qui, sous le nom de Bernier, et pour tout réparer, il se contentait de dire : « Maintenons dans les deux sexes autant que nous le pourrons ce qui nous reste de l’esprit de chevalerie… » Mais ce reste d’esprit de chevalerie qui, dès lors bien factice et tout à l’écorce, était bon pour entretenir la politesse dans la société, est loin de suffire pour renouveler et pour réjouir sincèrement le fond de l’âme, pour inspirer le respect et l’inviolable tendresse envers une compagne choisie, et pour former au sein de la retraite une image de ce bonheur dont le grand poète Milton a montré l’idéal dans ces divines et pudiques amours d’Adam et Ève aux jours d’Éden. […] William Cowper est loin d’être parfait sans doute, et il a, lui aussi, ses excès, ses défauts ; il a ses parties pénibles et austères à côté de ses peintures les plus neuves et les plus riantes ; il semble déchiffrer parfois, en contemplant la nature, ce que d’autres après lui y liront avec plus d’ampleur et de facilité : mais ce qu’il possède incontestablement, sans parler de son style réel et hardi dans sa simplicité, c’est le fond même de la poésie qui lui est propre ; il en occupe toutes les sources pures émanées d’Éden, et il pratique tous les sentiers qui peuvent y ramener. […] Comme le chèvrefeuille enlace l’arbre qu’il peut atteindre, aune rugueux, frêne à l’écorce unie ou hêtre luisant, enroule autour du tronc ses anneaux en spirale, et suspend aux branches feuillues ses glands dorés, mais il cause un dommage là où il prête une grâce, entravant la croissance par un embrassement trop étroit ; de même l’amour, lorsqu’il s’enlace aux plus fiers esprits, empêche le déploiement de l’âme qu’il subjugue : il adoucit, il est vrai, la démarche de l’amant, le forme au goût de celle qu’il aime, enseigne à ses yeux un langage, embellit son parler, et façonne ses manières ; mais adieu toute promesse de plus heureux fruits !
Élevé sous les yeux de son père, frère d’un aîné d’un autre lit (M. de Caumartin, l’intendant des finances) et qui était très en crédit et très à la mode ; n’ayant lui-même jamais rien écrit ni ne devant rien écrire, mais ayant tout appris dès l’enfance, histoire, chronologie, médailles, théologie enfin, et n’étant surchargé de rien, il avait été reçu à l’Académie dans cette grande jeunesse pour sa pure distinction personnelle : « La brigue ni la faveur, a-t-on eu le soin de nous dire, n’avaient eu aucune part à ce choix : son mérite seul avait parlé pour lui. » Perrault, qui fut chargé de le recevoir, le loua comme un prodige de facilité et d’érudition, dont tous les savants étaient émerveillés et que la Sorbonne avait peine à contenir. […] On a dit que, s’étant fait un point d’honneur de ne jamais parler des personnes d’une naissance commune, M. de Noyon avait affecté de ne rien dire de son prédécesseur Barbier d’Aucour. […] Il sait mieux que personne ce que vous valez, il vous connaît à fond, il aime à vous entretenir, et lorsqu’il vous parle, une joie se répand sur son visage, dont tout le monde s’aperçoit. […] Il est vrai que nous ne louons plus les rois et les princes, nous louons les comédiens, les gens de lettres, c’est-à-dire nous nous louons nous-mêmes ; nous parlons de l’actrice régnante en des termes à faire rougir le grand Condé, et du romancier à la mode comme on ne parlerait pas de M. de Turenne.
Le voyage de Prusse et son essai d’établissement à Berlin furent pour Voltaire une triste campagne, dont il a été assez parlé, et dont on aime à sortir comme lui le plus tôt possible. […] Bien imprudent et insensé celui qui, en quelque ordre que ce soit, appelle de ses vœux l’excès du mal sous prétexte d’un total et prochain redressement, et qui se plaint lorsqu’à la tête des pouvoirs humains (pour ne parler ici qu’humainement) se rencontrent la modération et la sagesse ! […] Voltaire vient d’écrire à la duchesse de Saxe-Gotha au sujet de l’exécution du chevalier de La Barre ; il en est révolté, et avec raison ; il trouve horrible que, pour un indigne méfait, et qui certes méritait (ce n’est plus lui qui parle) une correction sévère, le chevalier ait été torturé, décapité, livré aux flammes, comme on l’eût fait au xiie siècle ; et tout à côté (tome ii, page 558), dans la lettre suivante, adressée à M. […] Alphonse François est de ces esprits délicats et de ces hommes heureux qui, dès leur jeunesse, ont pris le parti de goûter les belles choses et les choses exquises, plutôt que de se fatiguer à en produire ; c’est un dilettante classique dont je puis parler pertinemment, car, d’un âge approchant du mien, mais de bonne heure très mûr, il a eu autrefois des bontés pour mon enfance. […] L’homme dont parle Grimm a tout l’air d’être le prince de Ligne, qui, de son côté, raconte ce qui suit d’une conversation de Voltaire, à Ferney : Je n’aime pas, disait Voltaire, les gens de mauvaise foi et qui se contredisent.
Quand elle parle d’un tapis de vert uniforme « où s’emboit la lumière », des profondeurs d’un vert intense « où s’emboit le soleil », c’est-à-dire où il est tout entier absorbé, sans laisser jour ni reflet à aucune des nuances du prisme, il y a certainement une intention : ne se marque-t-elle pas trop expressément ? […] Dans ce dialogue Lisette parle très bien en paysanne qu’elle est et dans sa gamme ; elle raconte son rêve, sa vision, une vision toute mystique, à la Bunyan. […] Une fois, dans ses courses du Jura et autour de son lac de Neufchâtel, Mme de Gasparin avec sa bande a l’occasion de visiter un couvent, celui des dominicaines d’Estavayer ; il est curieux pour nous de voir comme elle parle de ce qui fait l’idéal du bonheur selon Eugénie : ce lui est à elle et aux siens un épouvantail et un monstre. […] L’autre s’avoisine tout à fait ; elle est simple et grave ; il ne reste pas, on le dirait, une parcelle de sang dans les fibres de sa peau mate ; ses grands yeux s’arrêtent sur nous, amortis par le verre de ses lunettes ; ses manches, larges et pendantes, couvrent presque entièrement la main ; elle parle d’une voix égale, et nous montre, l’un après l’autre, par les trous de ta grille, les souris en pelote, les porte-montre brodés de perles, les coques d’œufs remplies de fleurs microscopiques, les coquilles d’escargots avec des saintes dedans, ces mille prodiges d’adresse et de laideur par quoi de pauvres recluses trompent leur ennui. […] « La course au lac, il faut bien en parler, mais cela ne se dit pas, il faut le voir ; il faut passer par ces chemins en l’air pour en avoir l’idée.
Sans doute il y a quelques dissonances entre la majesté des choses dont il parle et la manière dont il en parle : c’est le défaut. […] Flammarion y fait appel ; il est orateur à propos des astres ; il prodigue les professions de foi ; il parle de nobles croyances, comme si la noblesse était de quelque chose dans les inductions de la science sévère et dans la calme observation de la nature. […] L’Humanité collective et solidaire y apparaît rangée comme en amphithéâtre, ou plutôt échelonnée dans des stations successives et de plus en plus avancées ; mais laissons parler ou chanter l’auteur. […] Comme on parle de tout sans avoir assez étudié, et que l’homme d’un seul livre est à redouter, quand on s’aventure, sans y prendre garde, sur le terrain où il est maître !
Vous parlez de Tacite, qui a admirablement condensé, travaillé, pétri, cuit et recuit à la lampe, doré d’un ton sombre ses peintures chaudes et amères : ne vous repentez pas, Français, d’avoir eu chez vous, en pleine Cour de Versailles et à même de la curée humaine, ce petit duc à l’œil perçant, cruel, inassouvi, toujours courant, furetant, présent à tout, faisant partout son butin et son ravage, un Tacite au naturel et à bride abattue. […] on en parle trop à son aise. […] Il a parfaitement distingué chez Saint-Simon ce qu’il y faut distinguer, la différence des moments et des époques : lorsque Saint-Simon parle des événements et des hommes d’avant sa naissance, d’avant son entrée dans le monde, il est nécessairement moins bien informé ; il est sujet aux traditions et préventions qui lui ont été transmises : il a pu et dû se tromper plus fréquemment. […] On peut trouver qu’il conteste à Louis XIV quelques qualités que ce roi eut peut-être plus qu’il ne l’a dit : ce serait matière à examen et à discussion ; mais il est impossible, en lisant Saint-Simon, de ne pas être frappé d’une chose, c’est qu’il a infiniment plus donné au grand roi qu’il ne lui a ôté devant la postérité : il le fait vivre, marcher, parler, agir sous nos yeux en cent façons et toujours en roi, avec majesté, grandeur, avec séduction même. […] La Bruyère, grand peintre, est abstrait à côté de Saint-Simon : j’ajouterai qu’il l’est moins depuis que celui-ci a parlé.
Théophile Gautier qui vient à eux cette fois, non plus seulement comme un curieux et comme un érudit, mais comme un franc auxiliaire ; il entre dans la question flamberge au vent et enseignes déployées, ou, pour parler son pittoresque langage, il y entre « comme un jeune romantique à tous crins de l’an de grâce mil huit cent trente. » Un tel point de vue, hardiment choisi, est bien fait pour éveiller l’intérêt, quand on sait à quelle plume vive, à quelle plume effilée, intrépide et sans gêne on a affaire. […] Ce manuscrit est uniquement fait pour être consulté par les curieux en quête sur ces matières, par ceux surtout qui ont à parler de Colletet. […] Gautier, ayant à parler de La Fontaine, lequel, en effet, fréquenta beaucoup à ses débuts le vieux rimeur, nous dit tout couramment : La Fontaine, qui n’était point bonhomme… En général, le procédé de M. […] Je ne saurais admettre non plus la façon dont il parle de Louis Racine. […] Gautier en parlant de Théophile, c’est d’un véritable grand poëte que nous allons parler. » — Et à propos de Saint-Amant : « C’est, à coup sûr, un très-grand et très-original poëte, digne d’être Cité entre les meilleurs dont la France puisse s’honorer. » Voilà des paroles positives.
Les peintures nuancées dont nous parlons supposent un goût et une culture d’âme que la civilisation démocratique n’aurait pas abolis sans inconvénient pour elle-même, s’il ne devait renaître dans les mœurs nouvelles quelque chose d’analogue un jour. […] En attendant, l’on sent ce qui manque, et parfois l’on en souffre ; on se reprend, dans certaines heures d’ennui, à quelques parfums du passé, d’un passé d’hier encore, mais qui ne se retrouvera plus ; et voilà comment je me suis remis l’autre matinée à relire Eugène de Rothelin, Adèle de Sénange, et pourquoi j’en parle aujourd’hui. […] Si on voulait franchir son cercle idéal, si on lui parlait politique, elle répondait que M. de Sénange avait eu une attaque de goutte, et qu’elle en était fort inquiète. […] Après Eugène de Rothelin, nous avons à parler encore de deux romans de Mme de Souza, plus développés que ses deux précédents chefs-d’œuvre, et qui sont eux-mêmes d’excellents ouvrages, Eugénie et Mathilde et la Comtesse de Fargy. […] Le Mémorial, déjà cité, de Gouverneur Morris donne ici les plus curieuses particularités sur ce séjour de Mme de Flahaut en Suisse ; on la voit, par plusieurs lettres d’elle, l’amie, la conseillère influente et active d’un jeune prince, depuis roi (Louis-Philippe) ; elle fit avec lui la route de Bremgarten (Suisse) jusqu’à Brunswick et ne tarda pas à le rejoindre à Hambourg (édition française, tome I, pages 449-458). — Après la révolution de 1830, quand on parlait des Tuileries où son fils était en si bon pied, Mme de Souza avait soin de marquer, d’un air d’allusion fine, qu’elle-même n’y allait pas.
Il fit parler spirituellement et même raisonnablement son abbé sur la technique des beaux-arts ; il y distingua des beautés universelles et des beautés relatives ; il fit voir que les formes, le style et le goût sont choses infiniment variables, qui enveloppent et déguisent certaines conditions générales et permanentes. […] Il tint à démontrer qu’Homère parlait congrûment de l’anatomie et du battage de l’or, qu’il savait la géographie et la durée ordinaire de la vie des chiens, et qu’il ne faisait pas tenir aux princesses des propos de corps de garde. […] Il y a un sentiment fin et juste de la couleur, si l’on peut dire, des expressions et des langues dans la démonstration que Boileau entreprend ; mais la gaucherie de la forme est plus sensible que la vérité du fond, et l’on ne peut s’empêcher de sourire, quand on voit Boileau alléguer Thalès, Empédocle et Lucrèce, pour faire valoir la dignité de l’eau dans l’antiquité, quand il ne veut pas qu’Homère ait parlé du « boudin » : un « ventre de truie », à la bonne heure, voilà qui est noble ; ou quand enfin il aime mieux mettre aux pieds de Télémaque une « magnifique chaussure » que de « beaux souliers », et maintient obstinément qu’il ne faut pas appeler « cochons » ou « pourceaux » les animaux de nom « fort noble », en grec, dont avait soin le « sage vieillard » Eumée, qui n’était pas un « porcher ». […] Jugez-en par Racine, un des deux ou trois écrivains du siècle à l’âme desquels la Grèce a vraiment parlé : qui s’attendrait que Racine voulût retrancher du Banquet de Platon, comme inutile et scandaleux, tout le discours d’Alcibiade, ce portrait de Socrate, ce pur chef-d’œuvre où l’enthousiasme et la moquerie se mêlent avec une grâce subtile ? […] On ne s’étonnera donc point que les meilleures pages que Boileau ait écrites sur la Querelle des anciens et des modernes, soient celles où il entre dans les vues de son adversaire : je veux parler de la lettre qu’il écrivit à Perrault en 1700, après que le grand Arnauld, leur ami commun, les eut réconciliés.
Parler par symboles, allégoriser, voilà, à ce qu’il nous semble, la grande innovation, en fait de style, depuis cinquante ans. […] Certes, on ne parlait pas ainsi au Dix-Septième Siècle, ni dans la première moitié du Dix-Huitième. […] La puissante imagination de M. de Chateaubriand, sollicitée par tant d’émotions, ramenée vers la nature par les convulsions du monde politique, cherchant partout des démonstrations au spiritualisme, et faisant parler la terre et les cieux pour ranimer la foi religieuse, a trouvé là bien des couleurs. […] Quant à Byron, sans parler de quelques beaux symboles de lui, tels que sa Grèce mourante, connus de tout le monde et presque populaires, on peut dire que son style présente continuellement ce mélange de langage positif et figuré dans la même phrase, qui est aussi, comme on l’a remarqué, l’artifice presque continuel du style de Shakespeare. […] Mais encore une fois ce n’est pas son but ; et quand il arrive au génie, il oublie ses deux images, il brise ses deux miroirs, et, au lieu de contempler son objet spirituel dans un emblème physique, il change d’inspiration, il se sert d’expressions abstraites ; il parle des accès d’une sainte manie , de l’ardeur qui le possède ; il prend ses figures à toutes sources : rien n’est suivi ; c’est une manière fragmentaire et hachée.
Je ne parle pas des bourreaux et de leurs aides, ni des hommes politiques, ces lâches professionnels : un pareil tas d’immondices est au-dessous de la parole. […] Ta voix est pleine de larmes quand tu parles de son « déshonneur légal ». […] La phrase romantique se gonfle de passion, s’agite en violences, éclate de couleurs ; mais toujours, même lorsqu’elle hurle les pires souffrances ou rugit les plus extrêmes colères, ses harmoniques disent la joie de ne point parler bourgeoisement. […] Notre beau libertaire s’associe aux expéditions glorieuses où l’on fait taire « au nom de la loi » un à homme « non autorisé » à parler. […] Jourdain qui parle par la bouche grandiloque du prétendu anarchiste.
Il parle bas dans la conversation, et il articule mal. […] Charrier reçoit cet argentier maladroit, et de quel ton il lui parle, et de quel œil il le toise ! […] Il faudrait, comme les nègres du Congo, avoir peur du papier qui parle, comme du plus redoutable et du plus méchant des fétiches. […] Le dialogue veut être gai à tout prix ; les mots pleuvent, les reparties grêlent ; souvent même, les personnages, pour égayer le sujet, parlent l’argot des coulisses et imitent le cri des rapins. […] On parle bas dans ces sanctuaires de la piété pratique et mondaine ; les bougies y brûlent comme des cierges ; le fauteuil de la maîtresse de la maison a un faux air de confessionnal.
J’ai parlé une fois ici de Mme de Sévigné, et tout récemment de Mme Sand. […] … J’admirais hier au soir la nombreuse compagnie qui était chez moi ; hommes et femmes me paraissaient des machines à ressort qui allaient, venaient, parlaient, riaient, sans penser, sans réfléchir, sans sentir ; chacun jouait son rôle par habitude : Mme la duchesse d’Aiguillon crevait de rire ; Mme de Forcalquier dédaignait tout ; Mme de La Vallière jabotait sur tout. […] nous ne sommes pas comme cela ; nous avons des livres ; les uns sont l’art de penser ; d’autres l’art de parler, d’écrire, de comparer, de juger, etc. » Mais si elle a l’air ici de flatter Walpole et d’épouser le goût de sa nation, elle ne le complimente pas toujours, et sait au besoin lui résister. […] Il est curieux de recueillir les impressions de ce spirituel et clairvoyant ami : il se relève dans notre esprit et se fait absoudre de ses petites duretés et froideurs à son égard par la manière dont il parle d’elle à d’autres qu’elle. Il ne rougit point, je vous assure, de parler de sa chère vieille amie.
Après avoir hésité entre Suétone et Salluste, et avoir quelque temps songé à les mener de front l’un et l’autre, il se fixa au dernier, non pas seulement pour une édition et une traduction, mais pour une restitution complète des parties détruites et manquantes ; il eut même l’idée d’abord de les rédiger en latin, et, dans tous les cas, comme si c’était Salluste qui se retrouvât tout d’un coup et qui se mît à parler en son nom. Il résolut, à cet effet, de consulter et de collationner tous les manuscrits existants de cet historien latin, de réunir à son sujet tous les renseignements et les accompagnements désirables, en géographie, en médailles, en portraits des hommes célèbres dont il avait parlé. […] En allant visiter les îles Borromées, il nous parle du saint si vénéré, de Charles Borromée, ce grand personnage, bienfaiteur du pays, et qui a partout laissé sa trace : « Il est singulier qu’un homme qui a si peu vécu ait pu faire tant de choses de différents genres, toutes exécutées dans le grand, et marquant de hautes vues pour le bien public. » Il traite assez lestement ce petit faquin de lac Majeur qui s’avise de singer l’Océan et d’avoir des tempêtes : Les bords du lac, dit-il, sont garnis de montagnes fort couvertes de bois, de treilles disposées en amphithéâtre, avec quelques villages et maisons de campagne, qui forment un aspect assez amusant. […] Par exemple, quand il passe en Dauphiné, il dira de l’Isère : « Nous passâmes ensuite à l’embouchure de l’Isère, rivière infâme s’il en fut jamais : c’est une décoction d’ardoise. » Et à Marseille : « On trouve en cette province, à chaque pas, l’agréable et jamais le nécessaire ; aussi, à vous parler net, la Provence n’est qu’une gueuse parfumée . » À propos d’une danseuse qu’il voit à Vérone, et qui surpasse tous les maîtres en entrechats : « De sorte, ajoute-t-il, qu’à l’égard de la légèreté, la Camargo est auprès d’elle une danseuse de pierre de taille. » Parlant du Giorgione à Venise, et le comparant, pour le coloris, à ce qu’est Michel-Ange pour le dessin, il dira : « Ces deux maîtres sont les czars Pierre de la Peinture, qui en ont banni la barbarie ; mais ce n’a pas été sans férocité. » Et en débarquant à Livourne : « Figurez-vous une petite ville de poche, toute neuve, jolie à mettre dans une tabatière, voilà Livourne. » Je cite ces mots au hasard, non comme des mots (car quelques-uns pourraient sembler maniérés, s’ils étaient faits pour être détachés et mis en relief), mais comme faisant partie du mouvement et du pétillement d’esprit ordinaire au président de Brosses. […] Il a bien du cœur en effet, un foyer d’affection vraie et sincère ; et, après un an environ d’absence, il y a quelque chose qu’il aime encore mieux que de visiter le Capitole, « c’est d’en parler avec ce qu’on aime ».
Comme poète et comme écrivain, son originalité est peu de chose, ou, pour parler plus nettement, elle n’en a aucune : son intelligence, au contraire, est grande, active, avide, généreuse. […] Arrivée à Béziers, elle est entourée de tous, « vous assurant, Monseigneur, écrit-elle à son frère, que quand je cuide (je crois) parler de vous à deux ou trois, sitôt que je nomme le roi, tout le monde s’approche pour m’écouter ; en sorte que je suis contrainte leur dire de vos nouvelles, dont je ne ferme le propos qu’il ne soit accompagné de larmes des gens de tous états ». […] Marot lui-même, en la louant, insiste particulièrement sur son caractère de douceur qui efface la beauté des plus belles, sur son regard chaste, et ce rond parler, sans fard, sans artifice. […] « Ne parlons point de celle-là, dit le roi, elle m’aime trop : elle ne croira jamais que ce que je croirai, et ne prendra jamais de religion qui préjudicie à mon État. » Ce mot résume le vrai : Marguerite ne pouvait être d’une autre religion que son frère, et Bayle a très bien remarque, dans une très belle page, que plus on refuse à Marguerite d’être unie de doctrine avec les protestants, plus on est forcé d’accorder à sa générosité, à son élévation d’âme et à son humanité pure. […] Le Roux de Lincy nous a donné ; elle veut dire qu’il vaut mieux ne rien accorder à un amant que de lui octroyer la moindre petite faveur dont il va se prévaloir à l’instant pour vous faire faire du chemin : Baillez-lui tout ce qu’il veut maintenant, Soit le parler, soit l’œil, ou soit la main, Et vous verrez en lui incontinent Autre vouloir que de cousin germain.
Qu’on l’excuse donc si, dans ces pages, il est contraint de parler un peu trop (c’est toujours trop) de lui-même. […] Nous ne parlerions pas ainsi des romantiques ; ils eurent un outil excellent qui leur servit à faire d’admirables choses (et pour nous Romantisme enclot Parnasse), mais on peut en avoir un meilleur. […] Dans un affranchissement du vers, je cherchais une musique plus complexe, et Laforgue s’inquiétait d’un mode de donner la sensation même, la vérité plus stricte, plus lacée, sans chevilles aucunes, avec le plus d’acuité possible et le plus d’accent personnel, comme parlé. […] Le poète parle et écrit pour l’oreille et non pour les yeux, de là une des modifications que nous faisons subir à la rime, et un de nos principaux désaccords d’avec Banville, car notre conception du vers logiquement mais mobilement vertébré nous écarte tout de suite et sans discussion de cet axiome « qu’on n’entend dans le vers que le mot qui est la rime ». […] Garder le grand vers eût été une indication qu’on voulait pousser jusqu’à la farce, à la parodie, ce que fit Corneille dans l’Illusion comique où le Matamore parle la langue même qui servira au Cid.
J’en ai entendu, moi qui vous parle, un de ces hommes, le dos appuyé contre la cheminée de l’artiste, le condamner impudemment, lui et tous ses semblables, au travail et à l’indigence ; et croire par la plus malhonnête compassion réparer les propros les plus malhonnêtes, en promettant l’aumône aux enfants de l’artiste qui l’écoutoit. […] Cependant on n’en parle pas moins chez ce peuple de l’imitation de la belle nature ; et ces gens qui parlent sans cesse de l’imitation de la belle nature, croyent de bonne foi qu’il y a une belle nature subsistante, qu’elle est, qu’on la voit quand on veut, et qu’il n’y a qu’à la copier. […] Convenez qu’il parlait en grand artiste et en homme de sens, ce Vernet, lorsqu’il disait aux élèves de l’école occupés de la caricature oui, ces plis sont grands, larges et beaux ; mais songez que vous ne les reverrez plus. […] Surtout, mon ami, comme il faut que je me taise ou que je parle selon la franchise de mon caractère, Mr le maître de la boutique du houx toujours verd, obtenez de vos pratiques le serment solennel de la réticence.
Chez quelques-uns, il est vrai, l’antagonisme n’était qu’apparent, simple amour du paradoxe, besoin effréné de faire parler de soi par des dires étranges. […] Voici, d’ailleurs, le portrait d’un poète de ce groupe, extrait d’un livre à paraître : L’Amour et la Vie : « Léon Mateau est le type bâtard du bohème romantique mâtiné de bourgeois, au fond ce qu’il y a de pire au monde ; de ces hommes qui affectent des allures excentriques et parlent un langage paradoxal uniquement pour se faire de la réclame ; un de ces braillards qui crient que tout est mal quand ils sont dans la dèche et qui, une fois parvenus à une bonne situation, deviennent les plus impitoyables tenanciers de la routine et des abus. […] Lui-même se prête volontiers aux plaisanteries les plus équivoques sur son compte, se vante de cultiver son linge avec un soin jaloux et parle souvent de ses longues stations dans les salles de bains. […] Quoique Raynaud ait abandonné l’École décadente, il n’est point pour cela devenu mon ennemi ; c’est donc en toute impartialité que je peux parler de lui. […] Le groupement des hommes par races est une utopie pour quiconque a la moindre connaissance des doctrines socialistes, et le culte de la Beauté préconisé par ce bon Raynaud, allez donc en parler à l’armée des malheureux qui n’ont pas un morceau de pain à se mettre sous la dent.
Elle le parle, même en français. […] Espèce de Christine de Suède à sa manière, qui n’a pas abdiqué le trône, mais la royauté de la femme, le trône de sa grâce et de sa faiblesse ; elle a pris l’habit équivoque dont nous parle la Palatine et elle a mis sur sa pensée, qu’elle a cru viriliser, une forme qui n’a pas gagné en énergie ce qu’elle a perdu en abondance. […] Docte distraite ou peut-être pas assez docte, parce que les hommes ne l’ont pas voulu, elle n’aurait point parlé de l’amour d’Héloïse, si cette philosophe du douzième siècle, au lieu d’écrire en latin ses désirs fétides, les avait écrits en français ! […] Une seule chose peut l’en empêcher, c’est que la Chine est un Empire, et même un Empire d’un certain despotisme, et que des femmes comme Mme Stern, des femmes de cette virilité fière, doivent à la forte décence de leurs mœurs, de ne parler que des Républiques ! […] Je ne leur défends point l’érudition, si cela les amuse, car il faut toujours, si bas-bleu qu’elles soient, leur parler d’amusement.
Les connaisseurs seuls en parleront de cette voix qui ne fait pas tapage, comme on parle des chefs-d’œuvre de Mozart, de Raphaël et de Goethe, mais la fanfare de la gloire, par toutes les trompettes, n’existera plus ! […] Préoccupés de cette personnalité qu’on lui reproche, nous n’entendons pas la Fonction qui parle dans ce mot splendide ; et, quoique mieux placé que nous pour l’entendre, Saint-Simon ne l’a pas entendue. […] Cette grande femme d’État avait peut-être jugé et pénétré Saint-Simon avant Louis XIV, mais sur ce point comme sur tous les autres, elle ne domina pas le roi, elle avait vu comme il devait voir, elle le devinait… Elle lui parlait sa propre pensée et le Roi se reconnaissait à l’instant. […] Elle fit respecter l’innocence des enfants dont elle était chargée, réfréna les désirs du roi, l’épousa en secret, n’en parla jamais, ne revendiqua aucun des privilèges de sa fonction, acheta et sauva des patrimoines de protestants indemnisés, ne répondit point aux calomnies, et, à la mort du roi, baissa ses coiffes qu’elle n’avait jamais beaucoup relevées, et s’en alla mourir à Saint-Cyr.
Il a eu son rayonnement dans quelques esprits trop peu nombreux qu’il a frappés par les qualités transcendantes dont il brille ; mais parmi les Critiques d’état, les journalistes, doseurs de gloire, on en a très peu parlé. […] C’est la thèse qu’ont posée et soutenue partout les Pères, les théologiens et les écrivains catholiques qui ont eu à parler de l’Église depuis son établissement, — c’est la notion même de l’Église, se renversant, dans la tête humaine, si elle ne s’appuie à cette idée nécessaire d’infaillibilité. […] Je ne sache pas, en effet, de meilleure occasion de parler maintenant de Saint-Bonnet, et vous allez tout à l’heure le comprendre. […] Caro ne parlera jamais, — doit être mis à part de tous les autres livres qui ont jamais touché à ce sujet. […] Son Infini, quand il parle de l’Infini, n’est pas le leur ; car eux, plus ou moins panthéistes, si on leur appuie sur la gorge on ne peut pas dire qu’il en sorte la notion juste de l’Infini.
En dernier lieu, il est certain que ces observations et ces lois pourront être comprises, vérifiées et acceptées ; car déjà, tous les jours, les hommes se comprennent lorsqu’ils se parlent entre eux de leurs espérances, de leurs craintes, de leurs émotions, de leurs idées, toutes choses intérieures et invisibles. […] Jouffroy a marché ; ses auditeurs parlent encore avec admiration de ses analyses. […] Les gens d’esprit méprisent les ornements ; il faut parler devant eux non comme un livre, mais comme un homme, c’est-à-dire être exact, trouver des idées, noter des faits, ne pas se croire à la Sorbonne, devant un public de jeunes enthousiastes et de vieux badauds. […] L’expansion dont vous parlez n’est point une opération de la sensibilité, mais de l’entendement. […] Vous l’aviez conduite hors du chemin dans une broussaille ; elle y est encore ; les physiologistes à qui l’on parle de psychologie se mettent à rire, citent Molière, l’opium qui fait dormir parce qu’il a une vertu dormitive ; l’homme qui perçoit les objets extérieurs parce qu’il a la faculté appelée perception extérieure ; l’âme qui ressent l’émulation parce qu’elle apporte en naissant un penchant à l’émulation ; l’esprit qui connaît les objets infinis parce qu’il possède la raison, faculté de l’infini.
L’auteur reconnu de ce conseil, qui causa grand déplaisir à la faction espagnole, fut le président Jeannin : « Et vous assure, nous dit Villeroi, que ce coup fut donné très à propos pour le salut du royaume. » Villeroi, qui était sobre de paroles, même au Conseil et autour d’un tapis vert, dédaigna de parler et d’assister à ces États généraux. […] Le président Jeannin était moins dégoûté et se mettait plus en avant dans la mêlée pour le bien général ; il écrivit et parla beaucoup dans cette assemblée. […] Villeroi et Jeannin traitaient avec franchise, et dans les portraits qu’on a tracés du caractère de ce dernier, au milieu des éloges dus à son habileté, on n’a pas oublié de parler de sa candeur, une candeur compatible avec la tactique des négociations. […] Le duc de Mayenne, lorsque Villeroi lui en parla bientôt dans un sentiment de reproche, répondit par toutes sortes d’excuses, et conclut en ces termes qui peignent au vrai sa situation comme chef de parti, « qu’il priait ses amis de plaindre plutôt sa condition et lui aider à conduire ses affaires à bon port, que de s’offenser de ses actions, étant toutes forcées comme elles étaient ».
Elle dut en faire quelquefois la comparaison en elle-même en souriant, et quand elle parlait avec ses amis, dans l’intimité, de ses actes et de ses occupations comme souveraine de toutes les Russies : « Eh bien ! […] Catherine, connaissant l’humeur et l’étourderie, le mélange de faiblesse et de violence du grand-duc, et voyant éclater les premiers symptômes graves de sa désaffection à l’occasion de sa seconde grossesse, où elle accoucha d’une fille (décembre 1758), s’était à l’avance posé tous les cas, toutes les chances, et elle les énumérait ainsi : ou bien, 1°, s’attacher à lui, lier sa fortune à la sienne, quelle qu’elle fût ; ou bien, 2°, rester exposée à toute heure à ce qu’il lui plairait de disposer pour ou contre elle ; ou enfin, 3°, prendre une route indépendante de tout événement ; mais laissons-la s’exprimer elle-même : « Pour parler plus clair, il s’agissait de périr avec lui ou par lui, ou bien aussi de me sauver moi-même, mes enfants et peut-être l’État, du naufrage dont toutes les facultés morales et physiques de ce prince faisaient prévoir le danger. […] Je savais que j’étais homme (elle parle comme Sulpicius à Cicéron dans cette lettre célèbre de consolation pour la mort de sa fille Tullia, quoniam homo nata fuerat), et par là un être borné, et par là incapable de la perfection ; mais mes intentions avaient toujours été pures et honnêtes. […] Parler de Catherine empereur serait une tâche difficile, mêlée, périlleuse et infinie, vaste champ de toutes parts ouvert aux polémistes, encore refusé à l’historien.
Il est d’une naissance obscure ; il le sait, il est certain que personne ne l’ignore ; mais au lieu de dédaigner cet avantage par intérêt et par raison, il n’a qu’un but dans l’existence, c’est de vous parler des grands seigneurs avec lesquels il a passé sa vie ; il les protège, de peur d’en être protégé ; il les appelle par leur nom, tandis que leurs égaux y joignent leurs titres, et se fait reconnaître subalterne par l’inquiétude même de le paraître. […] il a vieilli dans les affaires sans y prendre une idée, sans atteindre à un résultat, cependant il se croit l’esprit des places qu’il a occupées ; il vous confie ce qu’ont imprimé les gazettes ; il parle avec circonspection même des ministres du siècle dernier ; il achève ses phrases par une mine concentrée, qui ne signifie pas plus que les paroles ; il a des lettres de ministres, d’hommes puissants, dans sa poche, qui lui parlent du temps qu’il fait, et lui semblent une preuve de confiance ; il frémit à l’aspect de ce qu’il appelle une mauvaise tête, et donne assez volontiers ce nom à tout homme supérieur ; il a une diatribe contre l’esprit à laquelle la majorité d’un salon applaudit presque toujours, c’est, vous dit-il, un obstacle à bien voir que l’esprit, les gens d’esprit n’entendent point les affaires. […] L’homme vain s’enorgueillit de tout lui-même indistinctement, c’est moi, c’est encore moi, s’écrie-t-il ; cet égoïsme d’enthousiasme fait un charme à ses yeux de chacun de ses défauts. — Cléon est encore à cet égard un bien plus brillant spectacle ; toutes les prétentions à la fois sont entrées dans son âme ; il est laid, il se croit aimé, son livre tombe, c’est par une cabale qui l’honore, on l’oublie, il pense qu’on le persécute ; il n’attend pas que vous l’ayez loué, il vous dit ce que vous devez penser ; il vous parle de lui sans que vous l’interrogiez, il ne vous écoute pas si vous lui répondez, il aime mieux s’entendre, car vous ne pouvez jamais égaler ce qu’il va dire de lui-même.
Là même où domine l’idée, où la vérité plus que la beauté a été l’objet de l’écrivain, l’impression et l’interprétation personnelle sont à leur place : tout le monde ne voit pas tout ; les œuvres fortes ne se livrent qu’aux forts esprits ; et l’on se propose précisément, par l’exercice dont nous parlons, de former chez les jeunes gens une habitude d’aller au-delà du sens grossier que nul ne manque d’apercevoir, et un art de rassembler — dirai-je de mobiliser rapidement toutes leurs facultés, pour arracher au texte le plus possible de son secret. On ne songe même pas à condamner la rêverie dont je parlais tout à l’heure, l’activité créatrice de l’esprit du lecteur qui prend le texte seulement comme tremplin pour s’élancer dans les espaces du concevable ou de l’imaginable. […] Seule, l’étude sérieuse apporte ce profit : il n’en faut pas parler quand on lit tous les livres comme des romans. […] Les professeurs n’eurent qu’à faire parler leurs élèves ; et ils constatèrent aisément que les contresens étaient aussi faciles à faire, et n’étaient guère moins nombreux sur une page de français que sur une page de latin ou de grec.
Il y a des hommes que j’ai rencontrés et à qui j’ai parlé vingt fois, et qui, j’en suis certain, me resteront toujours incompréhensibles. […] Je perçois chez eux des séries de pensées, d’attitudes, de gestes ; mais, quand ils me parlent, ce n’est point une personne qui me répond, c’est quelque merveilleux automate. […] On me dit qu’il parle toujours comme cela, et qu’il traverse la vie dans des habits spéciaux, redressé, embaumé, pétrifié dans une attitude d’éternelle chevalerie, de dandysme ininterrompu et d’obstinée jeunesse. […] On parle beaucoup, depuis quelques années, de « catholicisme sadique » et de « péché de malice. » Il faut voir ce que c’est.
Comment faire parler ces âmes, toutes parvenues au dernier point de tension morale ? […] … sans te parler de moi. […] PONTICUS Oui, laisse dans tes yeux parler ton cœur charmant. […] Les âmes chrétiennes les plus douces et les plus abondantes en vertus parlaient des « infamies du vieux monde » dans les mêmes termes que le font aujourd’hui les anarchistes les moins vertueux.
Mais il influera émotionnellement, et, je crois, pour jusqu’à la fin du parler de France. […] Oserai-je dire que ce sont ceux qu’il écrivit, il y a vingt-cinq ans, au temps où personne ne parlait de lui ? […] Il a parlé de la chair avec frénésie, des baisers avec ivresse, sachant bien que là était le charme souverain de l’amour. […] Elles vivent d’un art inédit et spécial ; elles haussent celui qui les écrivit au-dessus des deux poètes dont nous avons parlé.
Préférerois-tu une molle inaction à l’honneur même dangéreux de parler devant le genre humain ? […] Ce n’est pas pour vous que je parle ames froides & bornées qui n’avez jamais fait usage de vos facultés intellectuelles ; il faut frapper vos sens pour réveiller votre langueur. […] Là, tu me réprésentes les esprits de révolte étendus sur le lac enflammé ; leur Chef porte sur son front cicatrisé l’empreinte de la foudre ; j’entends les blasphêmes respectueux qu’il vomit dans son audace, aussi étonnante que coupable ; soudain tu me ravis aux Cieux, je vois les légions aîlées qui entourent le trône de l’Eternel ; il parle, tout s’ébranle ; les milices du Dieu vivant s’élancent pour venger sa puissance outragée. […] Ma voix est foible, mais du moins elle sera l’interpréte de l’honnêteté ; & je dirai : ô vous qui courez la carriere de l’immortalité, oubliez-vous qu’ayant l’honneur de parler aux hommes, ils ont droit d’attendre de vous une vertu mâle, severe, courageuse, qui sçache prononcer contre vous-même lorsque l’intérêt général le demandera.
Adolphe est las de lui-même et de sa puissance inoccupée ; il aspire à vouloir, à dominer, à parler pour être compris, à marcher pour être suivi, à aimer pour mettre à l’ombre de sa puissance une volonté moins forte que la sienne, et qui se confie en obéissant. […] Ma paupière ne s’abaissera pas devant ces mères orgueilleuses qui parlent bas à l’oreille de leurs filles en me voyant passer ; je marcherai près d’elles d’un pas ferme ; je sentirai la rougeur monter à mon front, mais je retiendrai mes larmes, et je les accumulerai pour les verser à flots dans le cœur de mon bien-aimé. […] Aucun des deux ne voudra être vaincu en générosité, et, pour ne pas laisser entrevoir son désabusement, chacun redoublera de prévenances, parlera de l’avenir avec de célestes espérances, traitera le reste du monde avec un dédain fastueux, cachera ses larmes sous l’ironie et la jactance, et fera de la ruse le premier de ses devoirs. […] car ils ont au moins, pour se consoler pendant le reste de la route, le souvenir du bonheur passé ; ils peuvent se rappeler dans une amitié durable un amour évanoui ; ils assistent muets aux funérailles de leur enthousiasme, et en parlent sans amertume comme d’un fils emporté par la guerre.
Je veux parler de M. […] Ils ont été élèves de la même école et en même temps ; ils ont subi la même éducation, les mêmes influences ; et pourtant quelle divergence ; ce n’est pas seulement dans leurs écrits qu’on la voit éclater ; c’est dans leur enseignement, dans leur façon de parler, dans leur aspect même. […] Mais aujourd’hui, c’est avant tout du rôle de l’intuition dans la Science elle-même que je voudrais parler. […] Leur faiblesse a besoin d’un bâton plus solide et, malgré les exceptions dont nous venons de parler, il n’en est pas moins vrai que l’intuition sensible est en Mathématiques l’instrument le plus ordinaire de l’invention.
Oreste, Electre, le Chœur ne cessent de converser avec lui, comme on parle du dehors, à travers la porte, à un homme enfermé dans sa maison close. […] Le Chœur entend sa pensée cachée et il y répond : — « Prie pour ceux qui aimèrent ton père… Pour toi et pour quiconque hait Égisthe… Souviens-toi d’Oreste… Parle des meurtriers… Souhaite qu’un vengeur arrive et les égorge à leur tour. » — La libation est empoisonnée, Électre peut la verser sur la tombe ; ses paroles l’imprègnent encore d’une mortelle amertume. […] Strophios attend leur réponse. — Son récit est fait du ton indifférent d’un message, quoiqu’il y glisse ce sombre sarcasme : « Ce que j’ai entendu, je le redis, j’ignore si je parle à ceux que cela concerne ; mais il importe que le père le sache » — Clytemnestre écoute, impassible. […] Ayant à faire parler une nourrice, Eschyle lui donne la bonté bavarde et la naïve indécence des femmes de sa classe.
Et pourquoi donc n’en parlerais-je pas ? Je sais les difficultés d’en parler convenablement : le temps des illusions et des complaisances est passé ; il faut absolument dire des vérités, et cela peut sembler cruel, tant le moment est bien choisi. […] Et, par exemple, sans sortir des Confidences, dans l’ordre des choses de goût et de sentiment, que fait M. de Lamartine quand il nous parle de sa mère ? […] Il est question dans le roman d’Adèle de Sénange d’un personnage qui ne parle point sans placer trois mots presque synonymes l’un après l’autre, qui ne vous salue, par exemple, qu’en vous priant de compter sur sa déférence, ses égards, sa considération.