La vie de ce père est le morceau le plus brillant de l’ouvrage. […] Voulant constater les droits de sa haute noblesse, & faire rentrer dans le néant celui qui le ménageoit si peu, il donne à la hâte un libèle, intitulé la vie & les parens de Gaspard Scioppius.
Son but avoit été d’exposer en peu de mots les principales circonstances de la vie d’un homme illustre & les faits curieux dignes d’exercer la critique, & de les développer ensuite dans d’abondantes remarques mises au bas des pages. […] M. de Bonnegarde a publié cette même année, 1771., un Dictionnaire critique, ou recherches sur la vie & les opinions de plusieurs hommes célébres, tirées des Dictionnaires de M.
Comme il naît beaucoup plus d’individus qu’il n’en peut vivre, et comme, en conséquence, la lutte se renouvelle souvent entre eux au sujet des moyens d’existence, il s’ensuit que, si quelque être varie, si légèrement que ce puisse être, d’une manière qui lui soit personnellement utile sous des conditions de vie complexes, et quelquefois variables, il aura toute chance de survivre et sera ainsi naturellement élu ou choisi. […] Il sera traité assez longuement de ce principe fondamental de sélection naturelle dans le quatrième chapitre ; et nous verrons comment cette sélection naturelle cause presque inévitablement de fréquentes extinctions d’espèces parmi les formés de vie moins parfaites, et conduit à ce que j’ai nommé la divergence des caractères.
On annonce de M. de Lescure une Vie de la princesse de Lamballe, qui fera pendant à sa chaude esquisse de Marie-Antoinette. […] Scarron ne serait pas le plus sombre endroit de sa vie. […] A l’occasion d’une édition de Boileau qu’il préparait (1727) : « Des Maizeaux fera pis que des vignettes, écrit Marais ; il fera des Notes de sa façon, qui sont toujours basses et plates, et nous donnera un Despréaux aussi beau que sa Vie 5 ; je sais qu’il s’est adressé à M. de Valincour qui, sur son nom seul, a refusé tout éclaircissement, et moi de même. » Et voilà pourtant l’homme qui est chargé d’introduire dans le monde savant les Lettres de Bayle et d’écrire sa Vie ; on est encore trop heureux de l’avoir, faute de mieux. […] Il avait déjà donné une Vie de Despréaux en 1712.
On y gagne enfin de bien voir autour de soi cette partie, à la fois isolée et dépendante, sur laquelle on se trouve, et qu’on ne songeait guère à découvrir quand on était dans la vie du milieu et dans le tourbillon du centre. […] Ton eau silencieuse en son paisible cours Présente à mon esprit l’image de la vie : Elle semble immobile et s’écoule toujours. […] C’est le pauvre fils de Marie, C’est l’époux de la terre en deuil, Qui pose la lampe de vie Dans le mystère du cercueil ! […] — Soit qu’il nous peigne ce grand style de Pascal, si caractérisé entre tous par sa vérité, austère et nu pour l’ordinaire, paré de sa nudité même, et qu’il ajoute pour le fond : « Bien des paragraphes de Pascal sont des strophes d’un Byron chrétien ; » soit qu’il admire, avec les penseurs, dans La Rochefoucauld, ce talent de présenter chaque idée sous l’angle le plus ouvert, et cette force d’irradiation qui fait épanouir le point central en une vaste circonférence ; soit qu’il trouve chez La Bruyère, et à l’inverse de ce qui a lieu chez La Rochefoucauld, des lointains un peu illusoires créés par le pinceau, moins d’étendue réelle de pensée que l’expression n’en fait d’abord pressentir, et qu’il se montre aussi presque sévère pour un style si finement élaboré, dont il a souvent un peu lui-même les qualités et l’effort ; soit que, se souvenant sans doute d’une pensée de Mme Necker sur le style de Mme de Sévigné, il oppose d’un mot la forme de prose encore gracieusement flottante du xviie siècle à cette élégance plus déterminée du suivant, qu’il appelle succincta vestis ; soit qu’en regard des lettres capricieuses et des mille dons de Mme de Sévigné, toute grâce, il dise des lettres de Mme de Maintenon en une phrase accomplie, assez pareille à la vie qu’elle exprime, et enveloppant tout ce qu’une critique infinie déduirait : « Le plus parfait naturel, une justesse admirable d’expression, une précision sévère, une grande connaissance du monde, donneront toujours beaucoup de valeur à cette correspondance, où l’on croit sentir la circonspection d’une position équivoque et la dignité d’une haute destinée ; » soit qu’il touche l’aimable figure de Vauvenargues d’un trait affectueux et reconnaissant, et qu’il dégage de sa philosophie généreuse et inconséquente les attraits qui le poussaient au christianisme ; soit qu’en style de Vauvenargues lui-même il recommande, dans les Éléments de Philosophie de d’Alembert, un style qui n’est orné que de sa clarté, mais d’une clarté si vive qu’elle est brillante ; — sur tous ces points et sur cent autres, je ne me lasse pas de repasser les jugements de l’auteur, qui sont comme autant de pierres précieuses, enchâssées, l’une après l’autre, dans la prise exacte de son ongle net et fin. […] Voir le Canton de Vaud, sa Vie et son Histoire, par M.
Dans Buffon, le premier homme, racontant les premières heures de sa vie, analyse ses sensations, ses émotions, ses motifs aussi finement que ferait Condillac lui-même. […] — Voilà quelques-unes des puissances brutes qui gouvernent la vie humaine. […] D’où il suit qu’il peut mettre des conditions à son cadeau, limiter à son gré l’usage que j’en ferai, restreindre et régler ma faculté de donner, de tester. « Par nature443, le droit de propriété ne s’étend pas au-delà de la vie du propriétaire ; à l’instant qu’un homme est mort, son bien ne lui appartient plus. […] Ces articles sont « l’existence de la divinité puissante, intelligente, bienfaisante, prévoyante et pourvoyante, la vie à venir, le bonheur des justes, le châtiment des méchants, la sainteté du contrat social et des lois450. Sans pouvoir obliger personne à les croire, il faut bannir de l’État quiconque ne les croit pas ; il faut le bannir non comme impie, mais comme insociable, comme incapable d’aimer sincèrement les lois, la justice, et d’immoler au besoin sa vie à son devoir » Prenez garde que cette profession de foi n’est point une cérémonie vaine : une inquisition nouvelle en va surveiller la sincérité. « Si quelqu’un, après avoir reconnu publiquement ces mêmes dogmes, se conduit comme ne les croyant pas, qu’il soit puni de mort ; il a commis le plus grand des crimes : il a menti devant les lois. » — Je le disais bien, nous sommes au couvent.
Le poète Racan était ami de son père et avait fait pour lui une de ses plus belles odes, dans laquelle il l’exhortait à la retraite : Bussy, notre printemps s’en va presque expiré ; Il est temps de jouir du repos assuré Où l’âge nous convie : Fuyons donc ces grandeurs qu’insensés nous suivons, Et, sans penser plus loin, jouissons de la vie Tandis que nous l’avons. […] Bussy, tout léger qu’il est, a connu la vraie passion en effet, mais il ne l’a connue que tard ; il convient que, dans toutes ces premières et folles épreuves, il n’avait rien de sérieux d’engagé : « Pour revenir à mes amours, dit-il plaisamment en tout endroit, il est à remarquer que je ne pouvais plus souffrir ma maîtresse, tant elle m’aimait. » — « Mon heure d’aimer fortement et longtemps n’était pas encore venue » dit-il encore ; et, parlant d’une séparation qui eut lieu alors, et qui lui fut moins pénible qu’elle n’aurait dû l’être : « C’est que la grande jeunesse, ajoute-t-il, est incapable de réflexions ; elle est vive, pleine de feu, emportée et point tendre tout attachement lui est contrainte ; et l’union des cœurs, que les gens raisonnables trouvent le seul plaisir qu’il y ait dans la vie, lui paraît un joug insupportable. » Le véritable attachement de Bussy ne fut que tout à la fin pour la comtesse de Montglat, qui l’en paya si mal, et qui lui laissa au cœur, par sa perfidie, une plaie ulcérée et envenimée dont on voit qu’il eut bien de la peine à guérir. […] Jusqu’aux huit dernières années de sa vie, il avait été plus circonspect qu’entreprenant… sa prudence venait de son tempérament, et sa hardiesse de son expérience36. […] Les dernières années de sa vie, il fut honnête (c’est-à-dire accueillant, affable) et bienfaisant ; il se fit aimer et estimer également des officiers et des soldats ; et, sur la gloire, il se trouva enfin si fort au-dessus de tout le monde, que celle des autres ne pouvait plus l’incommoder. […] Une heure après on vient réveiller le maréchal, en lui amenant un page qui s’est échappé du camp des ennemis, et sur le rapport duquel il se confirme dans l’idée de livrer bataille le lendemain : Et après, dit Bussy, il se recoucha pour se reposer seulement ; car j’ai trop bonne opinion de lui pour croire qu’ayant une bataille à donner six heures après, où sa vie était la moindre chose dont il s’agît, il pût dormir aussi tranquillement que si le lendemain il n’eût eu rien à faire.
Isolé par goût, sans autre ambition que celle des lettres, des « saintes lettres », comme il les appelle, n’aspirant à rien tant qu’à les voir se retremper aux grandes sources et se régénérer, ne désespérant point d’y aider pour sa part en un siècle dont il appréciait les germes de vie et aussi la corruption et la décadence, il n’entra jamais dans la politique qu’à la façon d’un particulier généreux qui vient remplir son devoir envers la cause commune, dire tout haut ce qu’il pense, applaudir ou s’indigner énergiquement. […] Né en 1762 à Constantinople, d’une mère grecque, nourri d’abord en France sous le beau ciel du Languedoc, après ses études faites à Paris au collège de Navarre, il essaya quelque temps de la vie militaire ; mais, dégoûté bientôt des exemples et des mœurs oisives de garnison, il chercha l’indépendance. […] La vie ne vaut pas tant d’opprobre. […] A lui demandé commant il sapelloit A répondu quil senomoit André Chenier natife de Constentinoble âgé de trente et un ans demeurant à Paris rue de Clairy section de Brutus A lui demandé de quelle ané il demeuroit rue de Clairy A lui répondue depuis environ mil sept cent quatre vingt douze au moins A lui demandé quel son ses moyent de subsisté A lui répondu que de puis quatre vingt dix quil vie que de que lui fait son père12 A lui demandé combien que lui faisoit son père A répondu que son père lui endonnoit lorsquil luy endemandoit A lui demandé s’il peut nous dire a combien la somme quil demande à son pere par an se monte A repondu quil ne savoit pas positivement mais environ huit cent livre à mille livre par année A lui demandé sil na auttre chose que la somme quil nous déclare cy-dessus A repondu qu’il na pas d’auttre moyent que ce quil nous a déclarée A lui demande quelle manierre il prend son existance A repondu tenteau chez son père tenteau chez ses amis et tentot chez des resteaurateurs A lui demandé quel sont ses amis ou il va mangé ordinairement A répondu que cetoit chez plusieurs amis dont il ne croit pas nécessaire de dire lenom A lui demandé s’il vien mangé souvent dans la maison ou nous lavons aretté A repondu quil ne croyoit n’avoir jamais mangé dans cette maison ou il est aresté, mais il dit avoir mangé quelque foy avec les mêmes personnes apparis chez eux A lui demandé sil na pas de correpondance avec les ennemis de la République et la vons sommé de nous dire la vérité A repondu au cune A lui demandé sil na pas reçue des lettre danglaitaire depuis son retoure dans la République A repondu quil en a recue une ou deux ducitoyent Barthelemy àlorse ministre plénipotensiêre en Anglaitaire et nen avoir pas reçue dauttre A lui demandé à quelle épocque il a recue les lettre désigniés sy dessus sommé a lui denous les representés A répondue quil ne les avoit pas A lui demandé ce quil en àfait et le motife quil lat engagé à sendeffaire A repondu que ce netoit que des lettre relative à ses interrest particulier, comme pour faire venire ses livres et auttre effest laissé en Anglaitaire et du genre de celle que personne ne conserve A lui demandé quel sorte de genre que personne ne conserve et surtout des lettre portant son interest personnelle13 sommé de nous dire la vérité A répondu il me semble que des lettre qui énonce l’arrivé des effest désigniés cy-dessus lorsque ses effest son reçue ne son plus daucune valeure A lui representé quil nest pas juste dans faire réponse, dautant plus que des lettre personnelle doive se conserver pour la justification de celui qui à En voyé les effet comme pour celui qui les à reçue A repond quil persite à pensé quand des particulier qui ne mettre pas tant dexactitude que des maison de commerce lorsque la reception des fait demandé est accusé toute la correspondance devient inutisle et quil croit que la plus part des particuliers en use insy A lui représenté que nous ne fond pas des demande de commerce sommé à lui de nous répondre sur les motifes de de son arestation qui ne sont pas affaire de commerce14 A repondu quil en ignorest du faite A lui demandé pourquoy il nous cherche des frase et surquoy il nous repond cathegoriquement15 A dit avoir repondue avec toute la simplicité possible et que ses reponse contiene lexatte veritté A lui demandé sil y à longtemps quil conoit les citoyent ou nous l’avons aresté sommé a lui de nous dire depuis quel temps A repondu quil les connaissoit depuis quatre ou cinqt ans A lui demandé comment il les avoit conu A repondu quil croit les avoir connu pour la premiere fois chez la citoyene Trudenne A lui demandé quel rue elle demeuroit alors A repondu sur la place de la Revolution la maison à Cottée A lui demandé comment il connoit la maison à Cottée16 et les-citoyent quil demeuroit alors A repondu quil est leure amie de l’anfance A lui represanté quil nest pas juste dans sa reponse attendue que place de la Revolution il ny a pas de maison qui se nome la maison à Cottée donc il vien de nous déclarés A repondue quil entandoit la maison voisine du citoyent Letems A lui représentes quil nous fait des frase attandue quil nous a repettes deux fois la maison à Cottée A repondue quil a dit la vérité A lui demandée sil est seul dans lappartement quil occuppe dans la rue de Clairy nº quatre vingt dix sept A repondue quil demeuroit avec son père et sa mère et son frère ainée A lui demandée sil na personne pour le service Il y à un domestique commun pour les quatre qui les sere A lui demandée ou il étoit a lepoque du dix aoust mil sept cent quatre vingt douze A répondue a paris malade d’une colique nefretique A lui demandee sy cette colique le tient continuellement et sil elle tenoit le jour du dix aoust quatre vingt douze A répondue quil se rétablissoit a lors d’une attaque et que cette maladie le tiend presque continuellement depuis lage de vingt ans plus ou moins fortes A lui demandés quelles est cette malady et quelle est le chirurgient quil le traitoit alors et sy cest le même qui letraitte en core A repondu le médecin Joffroy latraitté au commancement de cette maladie et depuis ce temps jai suis un régime connue pour ses sorte de meaux A lui demandée quelle difference il fait d’une attaque de meaux ou de maladies. […] Et, à ce propos, j’annoncerai que M. de Chénier a terminé un Précis historique sur la vie et les ouvrages de son oncle André, composé d’après les papiers de famille, et dans lequel il a réuni des particularités aussi exactes qu’intéressantes.
» Puis, dans un retour aux mouvements impétueux de la vie, est-ce Pindare, est-ce Bossuet, qui, frappé du sillon d’éclair de l’aigle, que sa pensée a tant de fois suivi dans les cieux, dit d’un guerrier qu’il admire : « Comme une aigle qu’on voit toujours, soit qu’elle vole au milieu des airs, soit qu’elle se pose sur quelque rocher, porter de tous côtés ses regards perçants et tomber si sûrement sur sa proie qu’on ne peut éviter ses ongles non plus que ses yeux ; aussi vifs étoient les regards, aussi vite et impétueuse était l’attaque, aussi fortes et inévitables étaient les mains du prince de Condé. » Un seul mot vient ici littéralement de Pindare, et avant lui, d’Homère : χεῖρας ἀφύκτους. […] Ainsi tous les hommes commencent par les mêmes infirmités : dans le progrès de leur âge, leurs années se poussent les unes les autres, comme les flots ; leur vie roule et descend sans cesse à la mort par sa pesanteur naturelle ; et enfin, après avoir fait comme des fleuves un peu plus de bruit, et traversé un peu plus de pays les uns que les autres, ils vont tous se confondre dans ce gouffre infini du néant, où on ne trouve plus ni rois, ni princes, ni capitaines, ni tous ces noms qui nous séparent les uns des autres, mais la corruption et les vers, la cendre et la pourriture qui nous égalent. » C’est ainsi, c’est avec un semblable regard mélancolique et vaste, que souvent, à l’occasion d’une prouesse vulgaire et d’un nom sans souvenir, le poëte thébain suscite une émotion profonde par quelque leçon sévère sur la faiblesse de l’homme et les jeux accablants du sort. […] Il n’offre pas seulement ces descriptions terrestres d’une autre vie, communes à la poésie grecque, ces plaisirs de l’Élysée semblables aux chasses, que se figure le sauvage dans le séjour des âmes. […] il connaît les fins de la vie et le commencement donné de Dieu17. » Mais ailleurs il avait dit : « Qu’est-ce que Dieu ? […] Et, si on songe que tout le reste de cette ode est rempli par une peinture du bonheur de l’autre vie pour ceux qui se complairont au respect du serment et auront su garder leur âme de toute injustice, qu’à ce prix seul le poëte les voit cheminant, par la route de Jupiter, jusqu’au palais de Saturne, où les brises de l’Océan soufflent autour de l’île des bienheureux, où des fleurs d’or étincellent, et où ils tressent de leurs mains des guirlandes et des couronnes, ne reconnaît-on pas encore là ce génie religieux qui, en voulant l’unité du pouvoir pour l’ordre stable des États, la réglait en espérance sur l’immortelle justice de la Cité céleste, dont il proposait le bonheur pour récompense aux vertus des puissants et des rois ?
Ses frères eurent une vie agitée, mais médiocre. […] Tout le monde se mit à rire, son père le traita d’imbécile ; mais toute sa vie il fut cet imbécile, car il admirait plus le vol d’un moucheron que la colonnade du Louvre. […] Il arrive dans la vie ce qui arrive sur un fleuve pendant qu’il vous entraîne: vous croyez que tout ce qui est autour de vous chemine, et que seul vous restez immobile. […] Combien de fois, à l’ombre de ces rochers, ai-je partagé avec elles vos repas champêtres, qui n’avaient coûté la vie à aucun animal ! […] Les périodes de leur vie se réglaient sur celles de la nature.
Les fenêtres de sa chambre fermées, il passoit sa vie à réfléchir profondément. […] Les capucins revenoient continuellement au genre de vie scandaleux que menoient les cordeliers. […] On ose attenter à la vie de Henri IV. […] La mère Angélique avoit passé plusieurs années de sa vie à réformer des couvens. […] Il entretint toute sa vie des correspondances avec les cardinaux du sacré collège.
Les définitions de la vie qu’ils donnent, notamment M. […] La vie est une résistance et une ségrégation, ou mieux encore une adaptation défensive, négative, antagoniste aux actions du dehors et tendant à le devenir de plus en plus à mesure qu’elle s’élève davantage. […] Si cela lui est interdit, si le milieu social est hostile, c’est-à-dire si presque tous ses compatriotes ont la même âme contraire à la sienne, il pourra se faire qu’il acquière par gloriole, par intimidation, par conseils, la barbarie qui lui manque ; plus probablement, il devra se résigner à une vie de mépris, de pauvreté, d’incertitude, à mourir toi et à ne pas fonder de famille. […] Hennequin, dans ces deux pages semble reprendre, contre le transformisme et l’évolutionnisme, la théorie spinoziste du « conatus » (voir aussi p. 113, « persister en son être »), à moins de souscrire à la célèbre définition de la vie proposée par Bichat dans ses Recherches physiologiques de 1800 : « l’ensemble des fonctions qui résistent à la mort ». […] Georges Ohnet (1848-1918), romancier et dramaturge, connut en grand succès avec sa série romanesque des « Batailles de la vie » (Serge Panine, Le Maître de forges, etc.).
Vous pouvez avoir vu à la Comédie-Italienne une pièce intitulée la Vie est un songe. […] Il y va de la vie et voici mon chemin. […] » Aussi reçoit-il des soufflets de Martine et des coups de bâton de Sganarelle ; et il est guéri de la générosité pour toute sa vie. […] Au point de vue du bon sens bourgeois, c’est tellement fou qu’il en rit encore et qu’il en rira toute sa vie. […] Quoi de plus naturel à l’homme que de vouloir s’élever au-dessus de ses semblables, si ce n’est de vouloir jouir des plaisirs de la vie ?
. — J’ai ouï aujourd’hui le père Massillon pour la première fois de ma vie. […] Il le met au-dessus de tous pour la solidité, pour l’onction, pour la vertu chrétienne qui est dans toute sa vie et qui passe dans ses discours.
M. le comte Molé est de ces hommes dont l’éloge n’embarrasse personne, et l’on n’a qu’à choisir dans une vie si utilement et si noblement remplie. […] Au reste, ce début si brillant de la vie politique du comte Molé n’aura pas et ne peut avoir d’autre historien que lui-même ; il a laissé des Mémoires dont les commencements au moins, pour tout ce qui est de cette époque, doivent être achevés, et il aura su joindre, en écrivant ce qu’il racontait si bien, la perfection de son bon goût à la netteté de ses souvenirs.
Andrieux professa au collège de France, comme, depuis plusieurs années déjà, il professait à l’intérieur de l’École Polytechnique, et ses cours publics, fort suivis et fort aimés de la jeunesse, devinrent son occupation favorite, son bonheur et toute sa vie. […] Andrieux est resté fidèle, toute sa vie, aux doctrines philosophiques et politiques de sa jeunesse.
René est bien le fils d’un siècle qui a tout examiné, tout mis en question ; mais le fils ne s’en tient pas au testament du père, il veut recommencer la vie et ne sait comment ; une intelligence avancée, consommée, qui a tout décomposé de bonne heure et tout analysé, se trouve chez lui en désaccord flagrant avec une imagination réveillée et puissante, avec un cœur avide, désenchanté et inassouvi. […] La religion de René, qui n’est que dans l’imagination et qui ne régénère pas le cœur, ressemble fort aussi à celle qui a régné dans le premier tiers de ce siècle ; on en était aux regrets du passé et à ne plus le maudire ; on n’avait plus pourtant la force ou la faiblesse de croire, on aspirait à un avenir incertain dont on ne se formait pas l’idée, et l’on se berçait ainsi, avec soupirs et gémissements, sur un nuage de sentiments contradictoires qui ne donnaient aucun fonds à la vie, aucun point d’appui à l’action.
« L’œuvre, dit à son propos Maurice Hennequin, l’œuvre conçue comme l’intégration de notes prises au cours de la vie ou dans les livres, n’ayant, en somme, de l’auteur que le choix entre ces faits et la recherche de certaines formes verbales, possède l’impassible froideur d’une constatation. […] Nous ne la suivrons pas sur ce terrain de pure esthétique, mais nous devions signaler ce dernier stade comme indispensable et requis : « Au théâtre, dans le roman, nous dit très finement le Dr Cabanès15… il est bon de nous donner des tranches de vie, mais à la condition de ne pas nous les servir toutes crues. » ⁂ Voici donc les naturalistes — affublés d’une impassibilité toute verbale — en quête du document humain.
L’importance du premier dans la vie nationale est mal représentée par la place qu’il occupe dans la littérature française, quoiqu’il lui ait fourni plusieurs de ses chefs-d’œuvre les plus considérables, et certains genres même, qui n’ont pas d’analogie dans les littératures anciennes, comme l’éloquence religieuse. […] Elle ne nous fait connaître véritablement que leur diffusion dans les esprits du vulgaire ignorant, leur dégradation pour ainsi dire, et la force d’impulsion qu’elles ont manifestée : mais la genèse et l’évolution de ces idées même dans l’élite qui pense, les formes supérieures de la vie intellectuelle, ne se sont pas déposées alors, sinon par hasard, dans les œuvres de langue française.
Des réflexions si justes et si élevées de mon ami Corréard, je vous engage particulièrement à retenir ceci, que nous ne sommes pas des isolés dans le temps ; que tout ce que la vie a pour nous soit de commodité, soit de noblesse, c’est à nos pères, à nos aïeux, à nos ancêtres que nous le devons ; que nous devons aux morts la culture même d’esprit qui nous permet, sur certains points, de penser autrement qu’eux et mieux, je l’espère et qu’enfin, suivant le beau mot d’Auguste Comte, l’humanité est composée de plus de morts que de vivants. […] C’est là, mes amis, une basse et mauvaise façon de prendre la vie.
Virgile est l’ami du solitaire, le compagnon des heures secrètes de la vie. […] Les tableaux de Virgile, sans être moins nobles, ne sont pas bornés à de certaines perspectives de la vie ; ils représentent toute la nature : ce sont les profondeurs des forêts, l’aspect des montagnes, les rivages de la mer, où des femmes exilées regardent, en pleurant, l’immensité des flots : Cunctaeque profundum Pontum adspectabant flentes.
On espérait mieux que de coucher sur le champ de bataille, on attendait la suite de l’élan, on espérait de la belle vie infusée au livre, au théâtre, bouleversant les caducités de l’art. […] Et les plus hardis n’allaient qu’à chuchoter qu’après tout Zola n’était pas le naturalisme et qu’on n’inventait pas l’étude de la vie réelle après Balzac, Stendhal, Flaubert et les Goncourt ; mais personne n’osait l’écrire, cette hérésie.
« Sa vie passée dans le luxe, dit Bossuet, ne lui faisait point sentir la durée, tant elle coulait doucement17. » C’est le mot ordinaire ; mais si je veux, spontanément par trouvaille, ou volontairement par effort, si je veux donne ; à ce mot plus de hardiesse, l’accoupler à des pensées imprévues, ce simple verbe peut devenir admirable, la plume de Bossuet : « Laissez couler sur le prochain cet amour que vous avez pour vous-même18. » Et ailleurs « Dieu a tant d’amour pour les hommes et sa nature est si libérale qu’on peut dire qu’il semble qu’il se fasse quelque violence quand il retient pour un temps ses bienfaits et qu’il les empêche de couler sur nous avec une entière profusion19. » Et toujours de Bossuet dans cet ordre d’idées : « Les générations des hommes s’écoulent comme des torrents. » Encore une fois, ces trouvailles, ces images, ces transpositions de sens peuvent n’avoir pas coûté d’effort à Bossuet. […] Que Saint-Simon ait réalisé facilement la vie des mots, l’observation intense, le relief des images, toutes les tressaillantes surprises du style, nous sommes d’accord.
De ceux-ci la ligne de vie est assez bizarre. […] Un roi philosophe, antichrétien et ami des philosophes, il a cherché cela toute sa vie et a mis toute sa vie à s’apercevoir qu’il ne l’avait pas trouvé et à déplorer de ne l’avoir trouvé jamais. […] Et, de fait, il n’en fallait pas autoriser une seule, parce que toutes étaient « en dehors de la vie familiale et de la vie sociale ». […] Vivez si bon vous semble cette vie exceptionnelle du couvent, vie extra-familiale et extra-sociale. […] Les républicains despotistes répondaient : « Jamais de la vie !
Toucher à la palme tragique une ou deux fois dans sa vie, c’était le rêve immortel. […] quelle joie De tenir dans mes mains et leur vie et ma proie De les voir, reculant à l’aspect de leur roi, Fuir sans trouver d’asile où se sauver de moi, Et, pâles de leur crainte et de la mort future, Implorer vainement, même la sépulture ! […] En même temps, le changement de régime avait pour effet de rendre sans réserve le poëte à la vie littéraire ; il n’y appartenait plus tout entier depuis quelques années. Selon l’usage de l’Empire, où les lettres se coordonnaient volontiers aux affaires, il occupait dans l’administration bienveillante de Français de Nantes une place assez considérable au Havre, une de ces places, il est vrai, données tout exprès pour très-peu assujettir ; il passait une bonne partie de sa vie à Rouen ou à Paris. […] Magnin, Vie de Camoëns.
La religion y conduit en un jour, la philosophie n’y conduit que par une longue vie, par le malheur et par la mort. […] La république, seule de tous les gouvernements attaqués à main armée dans son centre, triompha héroïquement, mais d’un triomphe qui n’aurait dû coûter que peu de sang, et qui coûta bien des vies précieuses à la France. […] La vie ou la mort de Louis XVI, détrôné ou prisonnier, ne pesait pas le poids d’une baïonnette de plus ou de moins dans la balance des destinées de la république. […] Les uns votèrent par une puissante conviction de la nécessité de supprimer le signe vivant de la royauté en abolissant la royauté elle-même ; les autres par un défi aux rois de l’Europe, qui ne les croiraient pas, selon eux, assez républicains tant qu’ils n’auraient pas supplicié un roi ; ceux-ci, pour donner aux peuples asservis un signal et un exemple qui leur communiquassent l’audace de secouer la superstition des rois ; ceux-là par une ferme persuasion des trahisons de Louis XVI, que la presse et la tribune des clubs leur dépeignaient, depuis le commencement de la Révolution, comme un conspirateur ; quelques-uns par impatience des dangers de la patrie, quelques autres, comme les Girondins, à regret et par rivalité d’ambition, à qui donnerait le gage le plus irrécusable à la république ; d’autres par cet entraînement qui emporte les faibles âmes dans le courant des assemblées publiques ; d’autres par cette lâcheté qui surprend tout à coup le cœur et qui fait abandonner la vie d’autrui comme on abandonne sa propre vie ; un grand nombre enfin votèrent la mort avec réflexion, par un fanatisme qui ne se faisait illusion ni sur l’insuffisance des crimes, ni sur l’irrégularité des formes, ni sur la cruauté de la peine, ni même sur le compte qu’en demanderait la postérité à leur mémoire, mais qui crurent la liberté assez sainte pour justifier par sa fondation ce qui manquait à la justice de leur vote, et assez implacable pour lui immoler leur propre pitié ! […] Aujourd’hui, c’est la vie de Cléry entre les mains, c’est en pouvant de nouveau s’appuyer sur des faits positifs, que M. de Lamartine confirme l’hommage qu’il rend à la vérité sur le dévouement si entier, si complet du fidèle Cléry, avant et après son entrée dans la tour du Temple.
Mais lorsque la pacification eut lieu, en 1652, la vie licencieuse de la Cour et de la capitale recommencèrent et allèrent jusqu’au débordement. […] Les précieuses reprirent, comme toutes les coteries, une nouvelle vie ; elles se multiplièrent ; les cercles où elles se réunissaient devinrent aussi plus nombreux, plus animés, plus brûlants, mais aussi marquèrent plus sensiblement par leur opposition avec les mœurs générales. […] Grimarest, auteur d’une Vie de Molière, rédigée sur les témoignages de Baron, et publiée en 1705, l’affirme. […] On demande quelle est la liberté dont les femmes jouissent, et ont droit de jouir dans la société et dans la vie conjugale : la liberté préconisée à cette occasion est plus près de la domination que de l’indépendance ; il semble, dit la discoureuse, que les soupçons du mari donnent à la femme le droit de faillir. […] Mais, par le mot Galantes, il entend parler d’un esprit tourné vers les idées et les sentiments romanesques et vers les ouvrages de galanterie, et non des habitudes désordonnées d’une vie galante.
Le drame c’est la vie, et la vie c’est tout. […] » Les plus sévères, les purs, n’admettent même pas Thespis, et rappellent que, pour le seul fait d’avoir détaché et isolé dans une pièce un épisode de la vie de Bacchus, l’histoire de Penthée, Solon avait levé son bâton sur Thespis en l’appelant « menteur ». […] Ces quarante-huit acheteurs ont sauvé la vie à l’œuvre de Shakespeare. […] Et la poésie a deux oreilles : l’une qui écoute la vie, l’autre qui écoute la mort. […] Gutenberg est à jamais l’auxiliaire de la vie ; il est le collaborateur permanent de la civilisation en travail.
Je m’assure que vous eussiez eu regret toute votre vie de ne vous y être pas trouvé. […] croyait bien que c’était le moment de se rendre, lorsqu’au contraire, apprenant son nom et le reconnaissant, l’un d’eux lui dit : « Nous vous connaissons bien tous ; nous voulez-vous faire courtoisie et nous sauver la vie ? […] » À l’affaire d’Aumale (1592) où Henri s’expose si imprudemment, Rosny est dépêché par les plus fidèles serviteurs du roi pour lui faire remontrance sur le terrain même et le prier de ne point se hasarder ainsi sans besoin : « Sire, ces messieurs qui vous aiment plus que leurs vies, m’ont prié de vous dire qu’ils ont appris des meilleurs capitaines, et de vous plus souvent que de nul autre, qu’il n’y a point d’entreprise plus imprudente et moins utile à un homme de guerre que d’attaquer, étant faible, à la tête d’une armée. » À quoi il vous répondit : « Voilà un discours de gens qui ont peur ; je ne l’eusse pas attendu de vous autres. » — « Il est vrai, Sire, lui repartîtes-vous, mais seulement pour votre personne qui nous est si chère ; que s’il vous plaît vous retirer avec le gros qui a passé le vallon, et nous commander d’aller, pour votre service ou votre contentement, mourir dans cette forêt de piques, vous reconnaîtrez que nous n’avons point de peur pour nos vies, mais seulement pour la vôtre. » Ce propos, comme il vous l’a confessé depuis, lui attendrit le cœur… Il y a dans ces Mémoires de Sully, et si l’on en écarte les cérémonies et les lenteurs, des scènes racontées d’une manière charmante et même naïve.
Il voit dans cette nouvelle industrie des soies, « plutôt méditative, oisive et sédentaire », une cause d’affaiblissement, même au moral ; il craint que cet emploi d’un nouveau genre ne désaccoutume la population de la vie laborieuse et pénible qui est propre à former de bons soldats. […] On a devant soi neuf belles et pleines années (1601-1610) : la vie de Rosny devient l’histoire de Henri IV, ou du moins une très grande partie de cette histoire, il devient difficile de l’en séparer par une biographie distincte et réduite à de justes mesures. […] Tous ces honneurs cependant, toutes ces dignités accumulées, qui remplissaient son orgueil, ne lui firent rien relâcher de sa vie laborieuse et appliquée. […] » dit le roi. — « Dès les trois heures du matin », répondit le ministre. — « Eh bien, Roquelaure, dit Henri IV en se retournant vers son plus facétieux courtisan, pour combien voudriez-vous faire cette vie-là ?
La première raconte les propos familiers et retrace les habitudes domestiques du bon roi, « comment il se gouverna tout son temps (toute sa vie) selon Dieu et selon l’Église, et au profit de son royaume ». […] Or maintenant je vous dirai le mien qui est tel, que si je descends du vaisseau, il y a céans telles personnes au nombre de cinq cents et plus87, qui n’y voudront non plus rester et qui demeureront en l’île de Chypre par peur du péril ; car il n’y a homme qui autant n’aime sa vie comme je fais la mienne ; et ils courront risque de ne jamais rentrer en leur pays. […] Ce n’est pas moi qui suis roi de France ni qui suis la sainte Église ; je ne suis qu’un seul homme dont la vie passera comme celle d’un autre homme quand il plaira à Dieu. […] [NdA] Voir au tome III, p. 239, de la Vie de saint Louis, par Tillemont, publiée seulement de nos jours par M. de Gaulle pour la Société de l’histoire de France (1847-1851).
. — M. de Montaigne disait : « Qu’il s’était toute sa vie méfié du jugement d’autrui sur le discours des commodités des pays étrangers, chacun ne sachant goûter que selon l’ordonnance de sa coutume et de l’usage de son village, et avoir fait fort peu d’état des avertissements que les voyageurs lui donnaient : mais en ce lieu, il s’émerveillait encore plus de leur bêtise, ayant, et notamment en ce voyagé, ouï dire que l’entre-deux des Alpes en cet endroit était plein de difficultés, les mœurs des hommes étranges, chemins inaccessibles, logis sauvages, l’air insupportable. […] C’est que c’est d’abord l’homme ennuyé et qui se fuit lui-même, puis c’est l’artiste surtout qui voyage en la personne de Chateaubriand : chez Montaigne, c’est le curieux amusé de la vie, et qui dépense la sienne sans compter. […] Il juge très bien, à première vue, du changement de configuration du sol, et de l’ensevelissement de l’ancienne Rome : la forme des montagnes et des pentes n’est plus du tout la même, et il tenait pour certain « qu’en plusieurs endroits nous marchions sur la tête des vieux murs et sur le faîte des maisons tout entières. » La liberté de vie à Rome lui paraît bien différente de celle de Venise : la sûreté y manque. […] Michel de Montaigne, sa Vie, ses Œuvres et son Temps par M.
J’ai voulu lire récemment, pour mieux m’éclairer, la Vie de M. […] Les fragments cités dans la Vie de M. […] Tout cela se retrouve ou devrait se retrouver en nous, vers la fin de la vie, avec un rafraîchissement et un ravivement de souvenirs mêlés d’une secrète tendresse. […] Vie de M.
Il me serait toujours impossible de lire cet endroit sans pleurer sur les malheurs du vieux monarque infortuné. » Et alors il prit le livre, et il essaya en effet de lire à haute voix le passage : « Allez-vous-en, misérables, opprobre de ma vie… » Mais il fut interrompu par ses larmes. […] Celui qui n’a pas l’œil fait pour observer toutes ces choses, et qui ne peut d’un seul regard distinguer chaque nuance et chaque teinte dans sa variété, sera d’autant insuffisant par là même dans une des plus essentielles qualités du poète. » Pope n’est certes pas dénué de pittoresque ; il sentait la nature, il l’a aimée et décrite dans sa forêt de Windsor ; condamné par sa santé à une vie sédentaire et ne pouvant voyager vers les grands sites, il avait le goût de la nature champêtre, telle qu’elle s’offrait riante et fraîche autour de lui : il dessinait même et peignait le paysage, il avait pris des leçons, pendant une année et demie, de son ami Jervas ; et comme on lui demandait un jour : « Lequel des deux arts vous donne le plus de plaisir, la poésie ou la peinture ? […] Il y en a qui aiment la vie à l’ombre, au point de croire que c’est une même chose d’être à la lumière ou dans le tourbillon. […] Taine nous entretenait l’autre jour27, — occupés, dis-je, à rechercher uniquement et scrupuleusement la vérité dans de vieux livres, dans des textes ingrats ou par des expériences difficiles ; des hommes qui voués à la culture de leur entendement, se sevrant de toute autre passion, attentifs aux lois générales du monde et de l’univers, et puisque dans cet univers la nature est vivante aussi bien que l’histoire, attentifs nécessairement dès lors à écouter et à étudier dans les parties par où elle se manifeste à eux la pensée et l’âme du monde ; des hommes qui sont stoïciens par le cœur, qui cherchent à pratiquer le bien, à faire et à penser le mieux et le plus exactement qu’ils peuvent, même sans l’attrait futur d’une récompense individuelle, mais qui se trouvent satisfaits et contents de se sentir en règle avec eux-mêmes, en accord et en harmonie avec l’ordre général, comme l’a si bien exprimé le divin Marc-Aurèle en son temps et comme le sentait Spinosa aussi ; — ces hommes-là, je vous le demande (et en dehors de tout symbole particulier, de toute profession de foi philosophique), convient-il donc de les flétrir au préalable d’une appellation odieuse, de les écarter à ce titre, ou du moins de ne les tolérer que comme on tolère et l’on amnistie par grâce des errants et des coupables reconnus ; n’ont-ils pas enfin gagné chez nous leur place et leur coin au soleil ; n’ont-ils pas droit, ô généreux Éclectiques que je me plais à comparer avec eux, vous dont tout le monde sait le parfait désintéressement moral habituel et la perpétuelle grandeur d’âme sous l’œil de Dieu, d’être traités au moins sur le même pied que vous et honorés à l’égal des vôtres pour la pureté de leur doctrine, pour la droiture de leurs intentions et l’innocence de leur vie ?
Il reste beaucoup à faire pour établir avec sûreté et précision les premières années de Catinat : une Vie critique de ce guerrier de tant de mérite n’est pas écrite encore. […] Il y en a qui s’amollissent en avançant dans la vie et se corrompent par le repos ou par les honneurs : lui, il resta intègre jusqu’au dernier jour, et si la sagesse était née avec lui, on peut dire que sa vertu ne parut jamais plus pure qu’au sortir de l’action et dans ces années de retraite où il se disposait à mourir. […] C’est le résumé moral et, comme on disait autrefois, la bonne ou la mauvaise odeur qui émane de toute une vie. […] Il y a, je l’ai dit, beaucoup à faire pour cette première partie de la vie de Catinat.
Sa vie publique, fort bien digérée, fort judicieusement présentée par l’abbé Millot, et avec accompagnement de pièces originales, a rempli des volumes dits Mémoires de Noailles, qui se lisent avec instruction et ne sont pas sans intérêt. […] Mais combien il y a plus de vrai toutefois et plus de vie dans un quart de ce Noailles d’après Saint-Simon, que dans presque tout l’abbé Millot, dans cet autre Noailles de montre et de convention, qui, au moment d’entrer au Conseil des finances sous la Régence, et d’y exercer toute l’autorité qu’il y pourra prendre, écrit à Mme de Maintenon, en se faisant tout petit et modeste : « Monseigneur le duc d’Orléans exige de moi absolument d’entrer dans le Conseil des finances qu’il a formé. […] Et de Saint-Simon, au contraire, voici par exemple un premier portrait, ou une première partie de portrait qui me paraît incontestable : « Le duc de Noailles, maintenant (1743) arrivé au bâton, au commandement des premières armées et au ministère, va désormais figurer tant, et en tant de manières, qu’il serait difficile d’aller plus loin avec netteté sans le faire connaître, encore qu’il soit plein de vie et de santé, et qu’il ait trois ans moins que moi. […] Doux quand il lui plaît, gracieux, affable, jamais importuné quand même il l’est le plus ; gaillard, amusant ; plaisant de la bonne et fine plaisanterie, mais d’une plaisanterie qui ne peut offenser ; fécond en saillies charmantes ; bon convive, musicien ; prompt à revêtir comme siens tous les goûts des autres, sans jamais la moindre humeur ; avec le talent de dire tout ce qu’il veut, comme il veut, et de parler toute une journée sans toutefois qu’il s’en puisse recueillir quoi que ce soit, et cela même au milieu du salon de Marly, et dans les moments de sa vie les plus inquiets, les plus chagrins, les plus embarrassants.
Quant à moi, je pense qu’il convient, dans la biographie d’un homme, dans son portrait fidèle, de conserver aux choses l’importance relative qu’elles eurent dans sa vie et dans ses pensées. […] Ici deux points de vue, deux façons de sentir, qui avaient l’une et l’autre leur raison d’être et leur légitimité, sont en présence, et l’histoire ne peut que les constater sans trancher le différend : il y avait la manière héroïque et patriotiquement guerrière d’entendre la défense du sol, la résistance nationale ; de faire un appel aux armes comme aux premiers jours de la Révolution, et, ainsi que Napoléon l’écrivait à Augereau, de « reprendre ses bottes et sa résolution de 93 » ; mais il y avait aussi chez la plupart, et chez les hommes de guerre tout les premiers, fatigue, épuisement, rassasiement comme après excès ; il y avait partout découragement et dégoût, besoin de repos, et, dans le pays tout entier, un immense désir de paix, de travail régulier, de retour à la vie de famille, aux transactions libres, et, après tant de sang versé, une soif de réparation salutaire et bienfaisante. […] La première Restauration fut, on peut le dire, l’œuvre de M. de Talleyrand : ç’a été le grand acte historique de sa vie ou, si l’on aime mieux, le triomphe de son savoir-faire. […] » — « Les têtes graves doivent réfléchir. » — « C’est mon avis, monsieur l’archevêque. » — « Il y a telle circonstance dans la vie politique où un homme peut racheter tout un passé. » — « Croyez-vous, monsieur ?
Quand l’enfant de cet homme Eut reçu pour hochet la couronne de Rome ; Lorsqu’on l’eut revêtu d’un nom qui retentit ; Lorsqu’on eut bien montré son front royal qui tremble Au peuple émerveillé qu’on puisse tout ensemble Être si grand et si petit ; Quand son père eut pour lui gagné bien des batailles, Lorsqu’il eut épaissi de vivantes murailles Autour du nouveau-né riant sur son chevet ; Quand ce grand ouvrier, qui savait comme on fonde, Eut, à coups de cognée, à peu près fait le monde Selon le songe qu’il rêvait ; Quand tout fut préparé par les mains paternelles Pour doter l’humble enfant des splendeurs éternelles ; Lorsqu’on eut de sa vie assuré les relais ; Quand, pour loger un jour ce maître héréditaire, On eût enraciné bien avant dans la terre Les pieds de marbre des palais ; Lorsqu’on eut pour sa soif posé devant la France Un vase tout rempli du vin de l’espérance ; Avant qu’il eût goûté de ce poison doré, Avant que de sa lèvre il eût touché la coupe, Un cosaque survint qui prit l’enfant en croupe, Et l’emporta tout effaré. […] Que vous servira d’avoir tant écrit dans ce livre, d’en avoir rempli toutes les pages de beaux caractères, puisque, enfin, une seule rature doit tout effacer : encore une rature laisserait-elle quelque trace, du moins d’elle-même ; au lieu que ce dernier moment, qui effacera d’un seul trait tout notre vie, s’ira perdre lui-même avec tout le reste dans ce grand gouffre du néant… Qu’est-ce donc que ma substance, ô grand Dieu ? J’entre dans la vie pour en sortir bientôt ; je viens me montrer comme les autres ; après, il faudra disparaître. […] Précisément toute sa poésie, ce qui fait rêver, cette pointe de philosophie railleuse et désabusée, qui ouvre un jour soudain sur les grandeurs et les petitesses de la vie militaire.
Avec la salle des Confrères, les comédiens avaient loué leurs décorations : le renouvellement des sujets ne porta point d’abord atteinte aux traditions scéniques, et Hardy ne songea point à construire sa Didon ou sa Marianne autrement qu’il n’eût découpé une Vie de sainte Catherine ou une Histoire d’Amadis. […] Rien du style ni de la poésie, ni du pittoresque de Virgile ne subsiste ; mais l’action, la vie, la lutte, Hardy a senti tout cela : il dégage très justement les situations, et, dans son plat jargon, il fait dire aux personnages précisément ce qu’il faut qu’ils disent. […] En leur vrai sens, elles représentent le minimum de convention qu’on ne peut retrancher dans la représentation de la vie : on suppose que le plancher de la scène est un autre lieu quelconque du monde, mais toujours le même lieu, et que les deux heures du spectacle peuvent contenir les événements d’une journée : mais l’idéal où l’on tend, c’est de réduire la durée de l’action à la durée de la représentation. […] Arnaud, Étude sur la vie et les œuvres de l’abbé d’Aubignac, in-8, Paris, 1887.
De tout temps, elle avait aimé à nous peindre sa contrée natale ; elle nous l’avait montrée dans Valentine, dans André, en cent endroits ; mais ce n’est plus ici par intervalles et par échappées, comme pour faire décoration à d’autres scènes, qu’elle nous découpe le paysage ; c’est la vie rustique en elle-même qu’elle embrasse ; comme nos bons aïeux, nous dit-elle, elle en a subi l’ivresse, et elle nous la rend avec plénitude. […] Nous, s’écrie l’auteur, nous n’avons plus affaire à la mort, mais à la vie ; nous ne croyons plus ni au néant de la tombe, ni au salut acheté par un renoncement forcé ; nous voulons que la vie soit bonne, parce que nous voulons qu’elle soit féconde. […] Dans sa vie de pauvre bergère aux champs, n’a-t-elle pas appris à se suffire avec rien, à tirer parti de tout ?
moi, je vous renvoie à Horace, je ne veux, pour vous battre, d’autre auxiliaire que lui, et je me fais fort de vous insinuer presque tous les conseils chrétiens qui vous conviennent, ou du moins tous les conseils utiles à la vie, en les déguisant sous des vers d’Horace. […] ) Vous voyez combien la vie est fragile. […] Quiconque ne passerait pas de telles choses aux hommes deviendrait misanthrope ; il faut éviter pour soi de tels écueils dans la vie, et les passer facilement à son prochain. […] La mort du duc de Beauvilliers (31 août 1714) acheva de briser les derniers liens étroits qui rattachaient Fénelon à l’avenir : « Les vrais amis, écrivait-il en cette occasion à Destouches, font toute la douceur et toute l’amertume de la vie. » C’est à Destouches aussi qu’il écrivait cette admirable lettre, déjà citée par M. de Bausset, sur ce qu’il serait à désirer « que tous les bons amis s’entendissent pour mourir ensemble le même jour », et il cite à ce sujet Philémon et Baucis ; tant il est vrai qu’il y a un rapport réel, et que nous n’avons pas rêvé, entre l’âme de Fénelon et celle de La Fontaine.
C’est un des traits curieux de la vie de Rulhière et l’un des témoignages les plus frappants de la folie de Jean-Jacques. […] Il n’avait plus rien à désirer dans la vie. […] De son jardin, il voyait l’abbaye de Saint-Denis qui lui rappelait la grandeur humaine et la mort ; il avait fait construire une jolie fontaine dont les eaux l’avertissaient de la fuite de la vie, et que surmontait une statue de l’Amour. […] Mais tout chez lui, dans la suite de sa vie et de ses procédés, semble indiquer l’honnête homme socialement parlant.
Vous devriez nous en fournir tous les six mois. » Mais il n’en est pas de ces petits chefs-d’œuvre comme des victoires de héros : on ne les rencontre pas plus d’une fois dans sa vie. […] Il se flattait que nous irions un jour dans le soleil, d’où nous jouirions, pour récompense d’une bonne vie, de l’ensemble merveilleux de la création ; il revoyait dans son paradis la plénitude et le triomphe de sa physique. […] Même lorsqu’il est le mieux traité et le plus choyé dans ses voyages à Paris, lorsque chacun le caresse et veut le retenir, Bernardin ne soupire pas moins après sa solitude champêtre ; il sent que la vie s’écoule, que ses dernières pages à achever le réclament, et il écrit alors naïvement à sa jeune femme : Je suis comme le scarabée du blé, vivant heureux au sein de sa famille à l’ombre des moissons ; mais, si un rayon du soleil levant vient faire briller l’émeraude et l’or de ses élytres, alors les enfants qui l’aperçoivent s’en emparent et l’enferment dans une petite cage, l’étouffent de gâteaux et de fleurs, croyant le rendre plus heureux par leurs caresses qu’il ne l’était au sein de la nature. […] De cette étude bien imparfaite, mais qui repose sur plus de lectures et de comparaisons que je n’ai pu en apporter ici, il me semble résulter que Bernardin de Saint-Pierre, dans sa vie, n’a été qu’à demi un sage, et que, dans ses écrits, il a presque aussi souvent erré que rencontré avec bonheur : mais, une fois, il a eu une inspiration simple et complète, il y a obéi avec docilité et l’a mise tout entière au jour comme sous le rayon ; il a mérité par là que son souvenir reste à jamais distinct et toujours renouvelé dans la mémoire humaine, et qu’autour de ce chef-d’œuvre de Paul et Virginie, la curiosité littéraire rassemble, sans en rien perdre, les grâces éparses de l’écrivain.
Au retour, et n’étant plus si pressé, le prince ne manquait pas de s’arrêter en oraison dans l’église du cloître : Car, dit-elle, « néanmoins qu’il menât la vie que je vous dis, si était-il prince craignant et aimant Dieu ». Montaigne relève ce propos et se demande à quoi pouvait servir, en un tel moment, cette idée de protection et de faveur divine : « Ce n’est pas par cette preuve seulement, ajoute-t-il, qu’on pourrait vérifier que les femmes ne sont guère propres à traiter les matières de la théologie. » Aussi n’était-ce pas une théologienne que Marguerite : c’était une personne de piété réelle et de cœur, de science et d’humanité, et qui mêlait à une vie grave un heureux enjouement d’humeur, faisant de tout cela un ensemble très sincère et qui nous étonne un peu aujourd’hui. […] Les contes et nouvelles de la reine de Navarre n’ont rien, comme on le pourrait croire, qui soit tant en désaccord et en contradiction avec sa vie et avec la nature habituelle de ses pensées. […] Cette dame Oisille répond de la manière la plus édifiante : Mes enfants, vous me demandez une chose que je trouve fort difficile, de vous enseigner un passe-temps qui vous puisse délivrer de vos ennuis ; car, ayant cherché le remède toute ma vie, n’en ai jamais trouvé qu’un, qui est la lecture des Saintes Lettres, en laquelle se trouve la vraie et parfaite joie de l’esprit, dont procède le repos et la santé du corps.
Selon Hume, cette loi a la même importance dans la vie intellectuelle que l’attraction dans les mouvements des astres. […] Nous avons donc là plus qu’un contraste intellectuel : c’est un rythme organique et une alternative, comme celle de la respiration ; c’est un contraste réel, essentiel au mouvement de la vie. […] Le savant ne doit-il pas d’abord séparer l’idée de combustion d’avec toutes ses associations habituelles, — dégagement de flamme et destruction de l’objet brûlé, etc., — pour pouvoir l’associer ensuite avec l’idée de cette respiration qui entretient la vie ? […] Il n’en est pas moins vrai que le véritable fond du processus est dans l’appétit, dont le mécanisme est la manifestation extérieure ; s’il n’y avait pas dans les éléments de notre organisme des appétitions élémentaires et, dans le tout, un appétit général où les autres se résument et se composent, il n’y aurait ni vie, ni mouvement, ni mémoire.
. — Durée de la vie des guinné. — Goules et vampires. — Sorciers et anti-sorciers. — Jettatori — Végétaux, minéraux, objets, abstractions jouant un rôle dans les contes. — Talismans, remèdes merveilleux, armes magiques. […] Vaincus à la lutte, c’est avec de l’or qu’ils rachètent leur vie. […] Ainsi, dans Le pardon du guinnârou, le guinné veut la vie de la sœur de son protégé en échange de l’aide donnée. […] La durée de la vie des guinné n’est pas indéfinie, leur existence est longue et leur croissance lente et dès qu’ils ont atteint un âge avancé ils meurent pour recommencer à vivre.
Il nous semble que Cinna et Horace, Phèdre et Iphigénie, Mithridate et Britannicus, Œdipe et Mérope, Brutus et Rome sauvée, tragédies puisées, les unes dans le théâtre grec, les autres dans les annales de l’ancien Univers, et toutes imitées ou créées avec un égal génie, sont des œuvres modernes et françaises, en dépit de leur origine ; qu’elles ne sont ni des calques, ni des copies, ni des pastiches ; qu’il y a de la sève et de la vie, et qu’enfin ce ne sont pas là tout-à-fait, comme on l’a dit, les productions d’un art pétrifié. […] Mais l’innocente joie et la franche gaîté ont bien aussi leurs charmes ; et l’expression du bonheur est peut-être un hymne aussi respectueux pour le Dieu de qui nous tenons la vie, que ces éternelles lamentations qui semblent la lui reprocher comme un don funeste. […] Dans l’âge où tout invite au plaisir, quelque grande infortune les aurait-elle désabusés du songe de la vie et du néant de nos félicités ? […] Le romantisme n’est donc rien comme système de composition littéraire ; ou plutôt le romantisme n’existe pas, n’a pas une vie réelle.
« Quand bien même quelques vies de philosophes se consumeraient à ce travail, ce ne serait pas trop, et il ne faudrait pas les regretter, si ce but était atteint. » C’est qu’à son avis, toute espérance reposait désormais sur les progrès de la psychologie. […] certainement j’en mangerai encore une demain, etc. » — Ce branle donné, vous êtes disposé à voir les choses en beau : « Il y a de bons moments dans la vie, etc., etc. » — Le morceau avalé, vous repensez à la pêche et vous y repensez avec plaisir. […] Un homme d’esprit, votre unique successeur, a passé sa vie à en distinguer vingt-cinq ou trente, à compter les trente ou quarante inclinations primitives, à démêler en nous l’instinct de monter sur les lieux élevés. […] Pour la faire d’une manière utile, il faudrait chercher les causes qui fortifient cette idée, par exemple gueil (Anglais), le manque d’imagination (Hollandais), l’habitude du péril (Sauvages), la réflexion habituelle et intense, la vie solitaire, etc ; la volonté n’est qu’un effet.
Ce citoyen, trop éclairé pour être fanatique, et trop vertueux pour être rebelle, parla aux Seize, comme un homme qui préfère son devoir à sa vie ; et il en fut récompensé en mourant pour l’État. […] Il ne faut donc pas s’étonner si, pendant sa vie ou après sa mort, il fut célébré par plus de cinq cents panégyristes, tant poètes qu’orateurs ; il ne faut pas s’étonner si, malgré l’éloquence brute et sauvage de son siècle, on ne trouve presque aucune des oraisons funèbres de ce prince, où il n’y ait quelque mouvement éloquent sur sa mort. […] Les mémoires de Sully, en peignant les détails de sa vie domestique, nous ont rendu son souvenir encore plus cher, parce qu’ils montrent partout l’homme sensible à côté du grand homme. […] On a représenté quelques-unes des époques de sa vie, en bronze et en marbre ; on les a fait servir d’ornement à ces boîtes, invention et amusement du luxe, que le goût et les modes françaises font valoir et distribuent dans l’Europe : le peuple même connaît et bénit sa mémoire.
Nous l’avons vu mille fois en sa vie faire des réponses à propos sans ouïr ce que le requérant voulait proposer. […] La Force s’étant excusé, d’Aubigné fit alors un de ces discours dont il aime à se ressouvenir, et où il résume avec énergie et talent tout l’esprit d’une situation et d’une crise : Sire, vous avez plus de besoin de conseil que de consolation ; ce que vous ferez dans une heure donnera bon ou mauvais branle à tout le reste de votre vie, et vous fera roi ou rien. […] La postérité qui s’inquiète peu des souffrances des hommes et des traverses qu’ils ont eu à supporter dans leur vie ; qui les prend, quand elle a à s’occuper d’eux, par leur ensemble, et qui aime à les voir sous leurs aspects principaux, a fait à d’Aubigné une belle place et de plus en plus distincte.
. — En avançant vers l’est, vous rencontrez la grasse Flandre, antique nourrice de la vie corporelle, ses plaines immenses toutes regorgeantes d’une abondance grossière, ses prairies peuplées de troupeaux couchés qui ruminent, ses larges fleuves qui tournoient paisiblement à pleins bords sous les bateaux chargés, ses nuages noirâtres tachés de blancheurs éclatantes qui abattent incessamment leurs averses sur la verdure, son ciel changeant, plein de violents contrastes, et qui répand une beauté poétique sur sa lourde fécondité. — Au sortir de ce grand potager, le Rhin apparaît, et l’on remonte vers la France. […] Le profond rajeunissement des êtres, l’air tiède du printemps qui renouvelle et ébranle toutes les vies, ne leur suggère qu’un couplet gracieux ; ils remarquent en passant que « déjà est passé l’hiver, que l’aubépine fleurit et que la rose s’épanouit » ; puis ils vont à leurs affaires. […] Il se dit qu’il dupe un mari, « qu’il trompe une cruelle4, et croit gagner des pardons à cela. » Il veut rire ; c’est là son état préféré, le but et l’emploi de sa vie.
Mais qu’il ait desséché sa verve poétique (ce que nous ne pensons pas) parce qu’il a exprimé et tordu le cœur de l’homme lorsqu’il n’est plus qu’une éponge pourrie, ou qu’il l’ait, au contraire, sur-vidée d’une première écume, il est tenu de se taire maintenant, car il a dit les mots suprêmes sur le mal de la vie, ou de parler un autre langage. […] Ferdinand Brunetière À qui se fier, je vous le demande, ô compagnons de la vie nouvelle, et sur qui compterons-nous désormais, si M. […] Tu les ornas de ton orgueil, toi, le hanté De vice et de terreur, d’amour et de prière, Et les vêtis soudain d’une telle lumière, Qu’elles furent la Vie et ton Éternité.
Ce fut, malgré la maladie et les privations, un stage heureux de la vie du poète. […] Ses récits nous initiaient aux splendeurs de la grande vie, nous ouvraient les endroits à la mode, les coulisses de l’Opéra, la loge de Mme Caron « aux gestes de reine », le foyer de la danse, le pavillon d’Armenonville ; évoquaient l’orgie parisienne : premières sensationnelles, vernissages, courses, dîners, bals, cotillons. […] Ceux-là, à qui la vie fut dure, se montraient pleins d’indulgence pour vos faiblesses et y compatissaient.
Quelques grands hommes sont devenus l’objet d’une véritable idolâtrie ; ils ont eu leurs pontifes, leurs dévôts, leurs fanatiques ; leurs livres ont été commentés comme un texte sacré ; les plus minces événements de leur vie ont donné lieu à des querelles quasi théologiques ; des reliques problématiques de ces nouveaux saints ont même été pieusement recueillies sous verre et exposées à l’adoration des fidèles. […] On a eu raison d’interroger les portraits et l’écriture d’un auteur, de le suivre pas à pas dans son voyage à travers la vie, de pénétrer dans sa maison et dans les milieux divers qu’il a traversés, de relever son tempérament, ses habitudes, ses goûts, ses amitiés, ses lectures favorites, sa façon de travailler, etc. […] En considérant la vie de Jean-Jacques, par exemple, quand nous le voyons balbutier et rougir de timidité, souffrir atrocement pendant son séjour aux Charmettes d’une maladie à demi imaginaire, embrasser la terre au moment où, chassé de France, il franchit la frontière suisse, fondre en larmes à tout propos, nous avons une preuve de plus qu’une de ses facultés dominantes et probablement sa faculté maîtresse était bien, comme ses ouvrages nous l’avaient déjà révélé, une sensibilité excessive, et nous redisons sans hésiter le mot que lui adressait le marquis de Mirabeau : « Vous avez l’âme écorchée. » — Tantôt, au contraire, nous découvrons une contradiction entre ce qu’un homme a fait et ce qu’il a dit ou écrit.
Si le cerveau est l’organe de l’imagination et de la mémoire, comme l’expérience semble bien l’indiquer, si l’âme ne peut penser sans signes et sans images, c’est-à-dire sans cerveau, qu’advient-il le jour où la mort, venant à dissoudre non-seulement les organes de la vie végétative, mais ceux de la vie de relation, de la sensibilité, de la volonté, de la mémoire, semble détruire ces conditions inévitables de toute conscience et de toute pensée ? Sans doute l’âme n’est pas détruite par là même, et elle conserve encore virtuellement la puissance de penser ; mais la pensée actuelle, mais la pensée individuelle, la pensée enfin accompagnée de conscience et de souvenir, cette pensée qui dit moi, celle-là seule qui constitue la personne humaine et à laquelle notre égoïsme s’attache, comme étant le seul être dont l’immortalité nous intéresse, que devient-elle à ce moment terrible et mystérieux où l’âme, en rompant les liens qui l’unissent à ses organes, semble en même temps rompre avec la vie d’ici-bas, en dépouiller à la fois les joies et les misères, les amours et les haines, les erreurs et les souvenirs, en un mot perdre toute individualité ?
» Ils lui répondirent : Notre père, votre serviteur, est encore en vie, et il se porte bien ; et, en se baissant profondément, ils l’adorèrent. […] On aime cette main cachée dans la nue, qui travaille incessamment les hommes ; on aime à se croire quelque chose dans les projets de la Sagesse, et à sentir que le moment de notre vie est un dessein de l’éternité. […] Mes jours ont été courts et mauvais, et ils n’ont point égalé ceux de mes pères120. » Voilà deux sortes d’antiquités bien différentes : l’une est en images, l’autre en sentiments ; l’une réveille des idées riantes, l’autre des pensées tristes ; l’une, représentant le chef d’un peuple, ne montre le vieillard que relativement à une position de la vie ; l’autre le considère individuellement et tout entier : en général, Homère fait plus réfléchir sur les hommes, et la Bible sur l’homme.
Ce fut là certainement, du moins pour moi, l’époque qui plaît le plus de sa vie, le moment où il déploya le mieux les qualités (sans inconvénient encore !) […] L’Angleterre surtout s’était fait avec ce genre de composition collective une gloire à part dans sa gloire littéraire, si grande déjà… La génération de 1830, qui, comme masse de talents et somme de vie, n’a pas encore été remplacée et attend toujours ses successeurs, crut, quand la Revue des Deux Mondes parut, tenir sa Revue d’Édimbourg. […] Eh bien, pas un abonné de ce journal, dont il était la vie et la gloire, n’a bougé, et je crois même qu’il en est venu d’autres !
l’Empire ne fut jamais que la Dictature de la République, mesurée à la vie d’un homme. […] Le droit de vie et de mort, qui n’existe plus dans nos systèmes énervés de gouvernement, et qu’a gardé, comme un dernier vestige du droit romain, la monarchie française jusqu’à Henri III, qui fit tuer Guise sans jugement, et Louis XIII, le maréchal d’Ancre, ce droit terrible était inhérent au pouvoir politique chez les Romains. […] Il fut toute sa vie l’ami de saint Rémy, qui était un Gallo-Romain.
Aussi, dit-il à Théodose, nous étions accoutumés à voir l’or retourner du trésor public à ceux à qui on l’avait injustement enlevé, mais nous venons de voir plus ; nous avons vu des hommes menés par la loi aux portes de la mort, ramenés à la vie par le prince ; car de tous nos empereurs, tu es celui qui respecte le plus la loi ; mais tu sais que par respect pour la loi même, il faut quelquefois s’en écarter. » Et dans le même discours, faisant allusion à la fable célèbre des deux tonneaux d’Homère : « Sous ton empire, nous connaissons le tonneau du bien, d’où s’épanchent la félicité, la richesse et la vie. […] Marc-Aurèle, voyant son armée prête à périr par la soif, leva ses mains au ciel : Ô Dieu, dit-il, je lève vers toi, qui donnes la vie, cette main qui ne l’a jamais ôtée à personne.
Dans Le Moniteur du 4 février 1854, j’ai donné un article sur l’ouvrage intitulé Étude de l’homme, par M. de Latena, conseiller-maître à la Cour des comptes ; en voici une partie, jusqu’à l’endroit où je ne me suis pas fait comprendre : Écrire des pensées, résumer l’expérience de la vie dans quelques essais de morale, est une des formes naturelles à toute une classe d’esprits graves et polis. […] Pourtant, comme la diversité des esprits jusque dans les mêmes genres est infinie, comme la bonne foi et la sincérité en chacun est le grand secret pour tirer de sa nature tout ce qu’elle renferme, il y a moyen toujours, en ne disant que ce qu’on a senti, en n’écrivant que ce qu’on a observé, d’ajouter quelque chose peut-être à ce que les maîtres lumineux et perçants de la vie humaine ont déjà embrassé, ou du moins de faire en sorte que le lecteur soit ramené sur les mêmes chemins et vers les mêmes vues sans fatigue et sans ennui.
Cette étude faite évidemment sur nature, et dont chaque trait a dû être observé, produit dans l’âme du lecteur un profond malaise moral, au sortir duquel toute fraîcheur et toute vie est pour longtemps fanée ; on se sent comme vieilli avant l’âge. […] Ni les circonstances de la vie, ni celles de la personne n’ont aucune identité ; il en résulte qu’à quelques égards elle se montre dans le cours du roman tout autre qu’il ne l’a annoncée : mais, à l’impétuosité et à l’exigence dans les relations d’amour, on ne peut la méconnaître.
« Ma vie, monsieur, est si entravée, je lis si lentement que je serais trop longtemps sans vous remercier. […] Mais quant à la Vie de Rancé, j’avoue que je n’y regardai pas de si près.
mais ce qu’on sait moins, c’est comment cette issue se prépara, par quelle force puissante et cachée la Révolution fut menée à terme, et par quel principe de vie le salut de la France s’enfanta au milieu des cris, des larmes et du sang. […] Thiers, les choses ne se passent pas aussi simplement, et qu’il n’ait eu garde d’omettre les fréquentes perturbations qui ont altéré sinon dévié leur cours ; on lui a reproché d’introduire dans l’histoire une sorte de fatalisme systématique, qui subordonne les actes humains à des règles inflexibles, intercale les hommes dans le cadre d’une destinée toute faite, et, dès lors, dispense trop l’historien d’indignation contre les oppresseurs, de sympathie pour les victimes, et de tous ces sentiments qui donnent couleur et vie.
L’âme n’est jamais tout entière active, et il semble que la vie s’y ramasse toujours en un seul point. […] La vie des autres est une matière inépuisable, et l’on croit obtenir un brevet d’esprit en déchirant les réputations à belles dents.
Et donc, dans les vingt dernières années de sa vie, je crois, cette dame consacra, fort intelligemment, de quinze à vingt millions à des fondations de bienfaisance. […] Cela ne va pas tout seul, et il faut le bien vouloir, même quand l’argent que nous gagnons dépasse notablement nos besoins et nous permet une vie déjà large et aisée.
[La Vie littéraire (1888-1889).] […] [La Vie et les Livres (1896).]
. — Poésies : les Amours, la Vie, l’Amour (1866-1874). — La Chanson des heures (1874-1878). — Dimitri, opéra en 5 actes (1876). — Les Ailes d’or (1878-1880). — Myrrha, saynète romaine (1880). — Monsieur, comédie-bouffe en 3 actes (1880). — Le Pays des roses (1880-1882). — Galante Aventure, opéra-comique en 3 actes (1882). — Le Chemin des étoiles (1882-1885). — Les Malheurs du commandant Laripète (1882). — Les Farces de mon ami Jacques (1882). — Mémoires d’un galopin (1882). — Le Péché d’Ève (1882). — Pour faire rire (1882). — Le Filleul du Docteur Frousse-Cadet (1882) […] [La Vie littéraire (1892).]
Mme de Staël risque celle-ci : « Tout ce qui concerne l’exercice de la pensée dans les écrits, les sciences physiques exceptées » ; et Schlegel : « Tous les arts et toutes les sciences, ainsi que toutes les créations et toutes les productions qui ont pour objet la vie et l’homme lui-même, mais qui, sans avoir aucun acte extérieur pour but, n’agissent que par la pensée et le langage et ne se manifestent qu’à l’aide de la parole et de l’écriture. » Cette définition encyclopédique est peut-être juste, mais, si elle définit quelque chose, elle exprime que la littérature embrasse tout ce qui s’écrit, car où serait la démarcation ? […] Artistes ou savants, ils ne se savent jamais sûrs de parfaire l’harmonie ou de réussir l’expérience après laquelle seulement l’œuvre sera ; ils ne considèrent pas comme un gagne-pain l’aléatoire profit de leur vie intérieure ; ils en cherchent un autre.
Je consume les plus beaux jours de ma vie au service d’autrui… Je vis dans une action continuelle ; pas un moment à donner à mes amis ; les bontés du roi ne sauraient me dédommager de toutes ces pertes. » On pourrait trouver une nuance d’ingratitude dans ces paroles, si l’on n’y voyait la sage précaution d’une femme intacte contre des soupçons offensants. […] En vertu du régime alors établi dans la vie conjugale, nous verrons désormais une alternative continuelle de brouilleries et de raccommodements entre madame de Montespan et le roi, entre madame Scarron et madame de Montespan.
En exigeant des vers renforcés de pensées ; en préférant, dans les vers, les pensées à tout autre mérite, n’est-ce pas en bannir ce qui en fait l’agrément & la vie, l’imagination ? […] Quand nous disons Poésie, nous ne prétendons pas la réduire à la simple versification : on sait en particulier que Mallebranche n’a fait que deux vers en sa vie, qui l’ont même rendu ridicule : nous parlons de cette Poésie, qui bien loin d’être ennemie de la prose, en est l’ame & l’ornement.
Tous ces beaux génies vivoient dans la douceur d’un commerce libre & philosophique ; ils s’entr’aidoient à porter le fardeau de la vie, à se consoler des sottises humaines, à conserver sur la terre cette raison saine, ce feu pur & céleste, le partage de quelques ames privilégiées. […] Ils sembloient tous avoir le mot, afin de tâcher de lui nuire, & de faire le malheur de sa vie.
Je ne compte point Denys le tyran, que le démon des vers posséda toute sa vie ; qui briguoit d’en remporter le prix dans les jeux olympiques ; & chargeoit des lecteurs d’une poitrine forte & d’une voix admirable, d’y faire valoir ses poësies ; qui avoit dans son palais l’élite des gens de lettres comme autant de flatteurs à gages, employés à se récrier sur ses poëmes, à lui prostituer l’encens & des hommages ; qui ne trouva la vérité que dans la bouche d’un Philoxène, cet homme toujours le même malgré la crainte des supplices & la peine des carrières où il fut condamné. […] La terreur étoit sur le Parnasse ; chacun y craignoit pour sa vie.
Il se promit bien de cultiver toute sa vie l’amitié de Rousseau, de le consulter sur tous ses ouvrages, & de les soumettre à son jugement. […] Il déploroit leur vie dure, Vous êtes, disoit-il un jour au P.
La brièveté de notre vie, la faiblesse de nos sens, la grossièreté de nos instruments et de nos moyens, s’opposent à la découverte de cette formule générale que Dieu nous cache à jamais. […] Lorsque la science était pauvre et solitaire ; lorsqu’elle errait dans la vallée et dans la forêt, qu’elle épiait l’oiseau portant à manger à ses petits, ou le quadrupède retournant à sa tanière, que son laboratoire était la nature, son amphithéâtre les cieux et les champs ; qu’elle était simple et merveilleuse comme les déserts où elle passait sa vie, alors elle était religieuse.
Tout bien considéré, la vie étant l’objet le plus précieux, le sacrifice le plus difficile, je l’ai prise pour la mesure la plus forte de l’intérêt de l’homme ; et je me suis dit : Si le fantôme exagéré de l’ignominie, si la valeur outrée de la considération publique ne donnent pas le courage de l’organisation, ils le remplacent par le courage du devoir, de l’honneur, de la raison. […] On apprécie les incertitudes ; on calcule les chances ; on fait sa part et celle du sort ; et c’est en ce sens que les mathématiques deviennent une science usuelle, une règle de la vie, une balance universelle ; et qu’Euclide, qui m’apprend à comparer les avantages et les désavantages d’une action, est encore un maître de morale.
De là sont nées les extravagances de tant d’amans dont la plûpart n’étoient point amoureux ; les uns se sont fait assommer en écrivant le nom des belles qu’ils pensoient aimer sur les murailles des villes assiegées ; d’autres sont allez de vie à trepas pour avoir voulu rompre dans les portes d’une ville ennemie leur lance enrichie des livrées d’une maîtresse qu’ils n’aimoient point, ou qu’ils n’aimoient gueres. […] Un troisiéme est descendu dans une fosse aux lions pour en rapporter à sa dame le gand qu’elle n’y avoit jetté que pour l’envoïer chercher, et pour se faire un fort leger honneur au peril de la vie d’un homme dont l’entêtement meritoit du moins de la compassion.
Le Tasse n’enfantoit ces peintures admirables, qu’il nous a faites d’Armide et de Clorinde, qu’au prix de la disposition qu’il avoit à une démence véritable, dans laquelle il tomba avant la fin de sa vie ; Apollon a son yvresse, ainsi que Bacchus. […] Supposant même que le hazard l’ait fait naître à une telle distance de ces emplois, qu’il lui soit possible de la franchir dans le cours d’une vie humaine ; il manque souvent des talens qui peuvent les lui faire obtenir.
Nous l’avons respiré, on ne sait à quelle heure de notre vie tant cette impression est profonde et vit profondément en nous. […] — leur défaille contre ce monstre de fausse lumière, à qui rien n’a défailli contre Dieu, et qui fit oublier une fois dans toute sa vie au grand de Maistre, monté ce jour-là à la hauteur d’un courroux de prophète, que le mépris est la colère du gentilhomme.
Je conçois le mot lâche de Voltaire, qui disait : « La vie des hommes littéraires n’est que dans leurs écrits. » Il voulait y cacher la sienne. […] Le talent réfléchit la vie, et il nous en renvoie toujours l’ignominie ou la noblesse.
Non-seulement le génie du romancier crée des types, des situations, des caractères, des dénouements, et à sa manière, fait de la vie, comme Dieu, — de la vie immortelle, — mais ces types, ces caractères, ces situations sont des découvertes dans l’ordre de l’imagination et de l’observation combinées ; ce sont des faits qui doivent rester acquis à l’inventaire humain, comme les faits de la Science.
Il fit graver les portraits de tous les hommes les plus célèbres du dix-septième siècle, et rassembla beaucoup de mémoires sur ceux dont les succès avaient été éclatants et la vie obscure. […] Il est nécessaire, sans doute, et l’ordre de la société, fondé sur la politique et sur les lois, demande que ces distinctions subsistent pendant la vie ; mais des cendres renfermées dans des tombeaux, deviennent égales.
Nous avons essayé de rendre manifeste, par un type présent et familier pour nous, ce génie du poëte thébain si difficile à expliquer et à traduire : ajoutons-y quelques souvenirs de l’antiquité sur sa vie. […] J’en atteste le dieu du Ménale, chantant un hymne, ton ouvrage, et oubliant sa flûte pastorale30. » Entre ces fables populaires, la longue vie du poëte paraît s’être écoulée dans le culte des dieux et les succès de son art, renommé par toute la Grèce.
Cependant l’horizon politique vint à s’éclaircir ; fatigués de leurs excès divers, tous les partis parurent reconnaître le besoin de la paix et la nécessité du bon ordre ; Geoffroy revint alors à Paris pour y cacher sa vie dans le plus modeste pensionnat. […] Telle est la situation de Chimène, forcée par l’honneur et la piété filiale de solliciter la mort d’un amant qui lui est plus cher que la vie. […] L’auteur a travaillé toute sa vie pour détruire lui-même l’intérêt de sa pièce, ainsi que le sublime du caractère de Polyeucte. […] Au moment où elle menace César, où elle médite sa ruine, elle lui révèle une conjuration tramée contre sa vie : César est une grande victime qui lui est due, qu’elle se réserve à elle seule. […] Le jeune Attale, protégé par les Romains, et l’unique objet des crimes d’Arsinoé, augmente l’intérêt du dénouement, lorsqu’il se montre digne frère de Nicomède, et lui sauve, par un coup inattendu, la liberté et la vie.
Crétineau-Joly et par nos notions personnelles, aux commencements de la vie du cardinal, omis ou trop légèrement relatés dans ce livre, dont l’objet était plus vaste. […] Mon pauvre frère se plaignit bientôt d’une douleur très intense à l’un de ses genoux, sans aucun signe extérieur tout d’abord ; mais peu à peu le genou se dressa presque jusqu’au menton, et demeura ainsi durant le reste de sa vie. […] J’acquis de la sorte les faveurs et l’amour infini dont, à dater de ce moment, le cardinal duc d’York m’honora jusqu’à la dernière heure de sa vie. […] Cette dernière fut attaquée par la petite vérole, alors qu’elle était enceinte, et il lui fallut dire adieu à la vie à l’âge si tendre de dix-huit ans. […] Ce pape opulent, magnifique, prodigue envers ses neveux, les Braschi, expia dans l’indigence et la captivité le luxe de sa vie et l’amabilité de ses manières.
Il faut qu’ils combattent contre Philippe de toute l’énergie de leur parole ; il faut qu’ils s’emportent contre Antoine en invectives virulentes, qu’ils défendent leur vie, leur honneur, leur patrie. […] La philosophie, si elle accepte une consigne, si elle approuve ou réfute sur commande, ne mérite pas et n’obtient pas l’ascendant qu’elle a le droit d’espérer, quand elle est un libre essai de réponse aux questions que nous posent la vie et la mort. […] Il annonçait ainsi qu’une nouvelle façon de concevoir la beauté réclamait son droit à la vie et à la lumière. […] C’est d’apporter dans la littérature le mouvement qui est la vie. […] Il n’a garde de les oublier ; mais il doit suivre minutieusement leur vie plus ou moins courte ; car leur naissance et leur disparition marquent des dates importantes, qu’il aurait peine à fixer autrement ; elles lui indiquent d’une façon précise les moments où s’opèrent ces variations du goût dont il s’efforce de dérouler l’enchaînement.
Ce ne sont pas des jeunesses fougueuses et remuantes, mais de secondes jeunesses qui connaissent le prix de la vie et qui en jouissent avec tranquillité. […] Achille Devéria a puisé, pour notre plaisir, dans son inépuisable fécondité, de ravissantes vignettes, de charmants petits tableaux d’intérieur, de gracieuses scènes de la vie élégante, comme nul keepsake, malgré les prétentions des réputations nouvelles, n’en a depuis édité. […] Ces lithographies, que les marchands achètent trois sols et qu’ils vendent un franc, sont les représentants fidèles de cette vie élégante et parfumée de la Restauration, sur laquelle plane comme un ange protecteur le romantique et blond fantôme de la duchesse de Berry. […] Joseph Fay a envoyé six dessins représentant la vie des anciens Germains ; — ce sont les cartons d’une frise exécutée à fresque à la grande salle des réunions du conseil municipal de l’hôtel de ville d’Ebersfeld, en Prusse. […] — Au vent qui soufflera demain nul ne tend l’oreille ; et pourtant l’héroïsme de la vie moderne nous entoure et nous presse. — Nos sentiments vrais nous étouffent assez pour que nous les connaissions. — Ce ne sont ni les sujets ni les couleurs qui manquent aux épopées.
. — Nous n’allons pas si loin ; mais quand la pièce est très bonne et imite de très près la vie contemporaine, aujourd’hui encore, dans une première représentation, les exclamations supprimées, les rires involontaires, cent vivacités montrent l’émotion du public. […] Parfois enfin les petites sonnettes qui, en règle générale, reçoivent d’elle leur ébranlement, lui transmettent le leur ; et nous savons les principales conditions de ces effets singuliers. — Dans les hallucinations du microscope, la cloche a été si fortement et si constamment ébranlée en un seul sens, que son mécanisme continue à fonctionner, même lorsque le cordon est devenu immobile. — Dans le rêve et l’hallucination hypnagogique, le cordon est fatigué ; il ne rend plus ; le long emploi de la veille l’a mis hors d’usage ; les objets extérieurs ont beau le tirer, il ne fait plus sonner la cloche ; à ce moment, au contraire, les petites sonnettes dont les sollicitations ont été réprimées perpétuellement pendant la veille, et dont les tiraillements ont été annulés par le tiraillement plus fort du cordon, reprennent toute leur puissance ; elles tintent plus fort et tirent avec efficacité ; leur ébranlement provoque dans la cloche un ébranlement correspondant ; et la vie de l’homme se trouve ainsi divisée en deux périodes, la veille pendant laquelle la cloche tinte par l’effet du cordon, le sommeil pendant lequel la cloche tinte par l’effet des sonnettes. — Dans l’hallucination maladive, le cordon tire encore, mais son effort est vaincu par la puissance plus grande des sonnettes ; et diverses causes, l’afflux du sang, l’inflammation du cerveau, le haschich, toutes les circonstances qui peuvent rendre les hémisphères plus actifs, produisent cet accident ; le tiraillement des sonnettes, plus faible à l’état normal que celui du cordon, est devenu plus fort, et l’équilibre ordinaire est rompu, parce qu’une des fonctions qui le constituent a pris un ascendant qu’elle ne doit pas avoir. […] Confrontée avec la sensation présente et avec la population latente d’images indistinctes qui répètent notre vie récente, la figure a reculé d’abord tout d’un coup à une distance indéterminée. […] Mais ils se font contraste par leurs précédents et par leurs suites, le premier étant le produit harmonieux de toutes les tendances réunies de la plante humaine, le second étant le grossissement exagéré d’un élément désaccordé, qui, comme un organe hypertrophié et soustrait à la vie générale, se développe à part et monstrueusement, en dépit des autres dont il trouble le jeu concordant. On voit maintenant pourquoi nos conceptions et imaginations ordinaires nous apparaissent comme telles et ne nous font pas illusion ; toutes sont comprises entre deux états extrêmes, et chacun de ces deux états renferme une particularité qui réprime l’illusion. — Ou bien, ce qui est le cas ordinaire, elles sont vagues et dépouillées de circonstances précises, en sorte que, déjà rejetées hors du présent par la contradiction des sensations présentes, elles manquent d’attaches pour s’emboîter dans le présent et dans l’avenir ; d’où il suit que, dépourvues de situation dans le temps, elles apparaissent comme exclues du temps, c’est-à-dire de la vie réelle, et sont déclarées sensations apparentes, fausses et purement imaginaires.
Il en est des genres comme des langues : ce qui se fixe, c’est ce qui meurt, et les genres ne vivent que par une adaptation, c’est-à-dire une transformation continuelle ; dans cette évolution, ils semblent périr lorsque leur principe de vie abandonne la forme qui les caractérisait pour en revêtir une autre, qui fera la même fonction, sans pourtant avoir rien de commun en apparence avec ce qu’elle remplace. […] Nous demandons que l’artiste nous fasse apercevoir ces transitions, et comme ces amorces qui aident l’imagination à réintégrer l’objet isolé par convention dans le tout dont il est une pièce, et qu’il nous indique l’incessante transformation des choses et les aspects multiples de la vie, qui brode de si riches couleurs une si pauvre étoffe. […] La nature humaine, d’abord, affinée par la vie de cour et la vie de salon, n’offrait pas le même modèle à l’imitation que, par exemple, la brutale Angleterre de Shakespeare, ou notre turbulente et confuse société. […] Les historiens et les critiques nous ont appris à lui attribuer un caractère éminemment grave et philosophique, à y respecter une des formes les plus expressives de la civilisation générale, où sont contenues toutes les conceptions de la vie et de la destinée humaines, toutes les représentations de l’univers et de l’être, par lesquelles l’humanité s’est consolée ou désespérée à chaque siècle.
Or, au seizième siècle, un mélange de rudesse gauloise et de grandeur imitée de Plutarque, la licence propre aux temps où la violence et le danger rendent la vie précaire, la corruption de l’Italie en décadence, formaient les mœurs de la cour, sur laquelle se modelait la nation. […] Ce jour arriva bientôt, et, dans la vie de Balzac, la gloire du jeune homme fut comme un embarras pour l’homme mûr. […] Avouez-moi que ce n’est pas un petit effet de la Providence de s’être visiblement opposée au premier genre de vie qu’avait choisi un homme si dangereux12. » Quel est donc cet homme ? […] La vie littéraire de Balzac fut attristée, après quelques années brillantes, par une double disgrâce : ses qualités ne lui valurent pas les récompenses solides qu’il ambitionnait, et ses défauts suscitèrent contre lui un injuste retour d’opinion. […] J’obéirais à une loi si fâcheuse, à cause que je suis bon citoyen ; mais ce serait par mon silence et non par ma lâcheté, et à la charge de ne point parler, et non pas de parler contre ma conscience16. » Vaugelas, un autre homme de bien à qui nous aurons aussi à rendre justice, défiait Phyllarque de trouver un meilleur cœur que Balzac, une plus grande douceur que « celle qui accompagnait toutes les parties de sa vie. » « Sa probité, ajoute-t-il, lui paraissait une des plus rares choses de ce siècle, comme son esprit est un des plus grands ornements de la cour17. » Quant à la langue, les services que Balzac lui a rendus suffiraient pour le sauver de l’oubli.
alors viennent expirer comme aux pieds de cette incarnation, non sans qu’un lien certain les apparente ainsi à son humanité, ces raréfactions et ces sommités naturelles que la Musique rend, arrière prolongement vibratoire de tout ainsi que la Vie. […] Souvenirs wagnériens Ce n’est jamais sans émotion que je pense à l’époque de ma vie où j’ai vécu, pour ainsi dire, en communauté absolue avec l’œuvre de Wagner, allant presque chaque soir l’entendre à l’Opernhaus, aux concerts de Bilse, à l’Académie de chant où la jalousie des Berlinois siffla madame Materna, ou à l’une des auditions du « Wagner-Verein » dans lesquelles le grave talent de Betz interprétait des fragments de la tétralogie encore inconnue dans l’Allemagne du Nord ; — déchiffrant tant bien que mal, sur un mauvais piano de louage, les partitions que je ne connaissais jamais assez ; — lisant ses écrits qui venaient d’être réunis en édition définitive ; — causant surtout de lui avec quelques jeunes musiciens enthousiastes comme moi. […] Dans la salle vaguement aperçue, tout à coup l’obscurité tombe, et un grand silence ; alors, en la nuit des yeux et des oreilles et de l’esprit, en la nuit vibrante des quinze cents âmes stupéfiées, un son naît, une résonnance voilée, une sonorité atténuée, emmêlée, dispersée, un mystique résonnement, — inlocalisable, — une intimement chaude mélodie, qui monte, qui s’enfle, et qui dans l’air invisible flotte, portant la pré-sensation des futurs tressaillements du Drame. — Ainsi le Drame se lève : — un rideau s’entrouvre, et, dans le fond, — saillant d’un cadre lointain, noir, obscur, vague, et indistinct, — un paysage apparaît, que nous attendions, et les hommes y sont, dont la vie, en nous inconsciemment vécue déjà, se va en nous revivre évidemment ; — tandis que, parmi l’angoisse des vivantes passions, des désespoirs, des joies, et des extases qui se poussent et s’appellent, parmi l’inéluctable empoignement des très réelles émotions, peu à peu nous descend, insensiblement et nécessairement, l’Explication, l’Idée, la Loi, le prodigieux troublement de l’Unité dernière, comprise. […] Le public n’existe pas consciemment à Bayreuth ; tout ce qui en moi est susceptible de répondre à l’appel de ce drame vivant, se mêla intimement à ce drame, vit de sa vie. […] De tels artistes sont les pionniers de la science et remplissent bien le véritable but de l’art, qui est de contrôler les facultés humaines pour édifier de plus en plus solidement l’évolution expérimentale, c’est-à-dire la vie consciente. » Complément au mois wagnérien de Juin MARSEILLE Répertoire des concerts populaires : Introduction au 3e acte de Lohengrin.
C’est ce qui explique comment on peut éprouver des sensations sans en avoir conscience (recevoir une blessure dans le feu de la bataille) ; et penser, sans éprouver aucune sensation spéciale, sauf celles de la vie organique (réfléchir dans son lit au milieu du silence de la nuit). […] « Les formes de la pensée, comme les formes de la vie, sont des évolutions, non des préformations. » Kant ne l’a point vu. […] Ainsi il trouve dans Xénophane, au moins des germes de scepticisme204 ; son disciple Parménide « n’a pas seulement une notion vague et générale de l’incertitude de la connaissance humaine ; il maintient que la pensée est trompeuse, parce qu’elle dépend de l’organisation205 », ce qui louche de plus au matérialisme, Héraclite ne voit dans tout qu’un devenir. — Empédocle se lamente sur l’incertitude de la connaissance et la fragilité de la vie humaine. […] Darwin (Erasme) professe la même théorie, en substituant au mot « vibration » l’expression « mouvements sensoriels. » Bien que son système soit plein d’ « hypothèses absurdes », il a eu le mérite de voir que la psychologie est subordonnée aux lois de la vie, et de couper court par là à des questions mal posées et à des problèmes factices. […] Son grand mérite a été d’apercevoir clairement les rapports de la psychologie avec la science de la vie, reconnaissant ainsi une grande vérité, déjà clairement vue par Aristote et exprimée ainsi par saint Thomas d’Aquin : « Impossibile est in uno homine esse plures animas per essentiam différentes, sed una tantum est anima intellectiva quæ vegetativo et sensitivo et intellectivo officiis fungilur.
« Dieu est notre ressource, notre lumière, notre vie, notre soutien, notre tout. […] Paul, la lettre tue et l’esprit done la vie. […] Ce mot anagogique vient du grec (…) : ainsi le sens anagogique de l’ecriture sainte est un sens mystique, qui élève l’esprit aux objets célestes et divins de la vie éternèle dont les saints jouissent dans le ciel. […] Il en est de même de douceur, amertume, être, néant, vie, mort, mouvement, repos, etc. […] On considère alors par abstraction le nombre en lui même, ou plutot l’idée de nombre que nous avons aquise par l’usage de la vie.
» Le comte de Maistre, dans une des charmantes lettres à sa fille, Mlle Constance de Maistre, a badiné agréablement sur cette question, et il y a mêlé des vues pleines de force et de vérité : « L’erreur de certaines femmes est d’imaginer que pour être distinguées, elles doivent l’être à la manière des hommes… On ne connaît presque pas de femmes savantes qui n’aient été malheureuses ou ridicules par la science. » Au siècle dernier, un jésuite des plus éclairés et des plus spirituels, le père Buffier, qui était de la société de Mme de Lambert, dans une dissertation légèrement paradoxale, s’est plu à soutenir et à prouver que « les femmes sont capables des sciences » ; et après s’être joué dans les diverses branches de la question, après avoir montré qu’il y a eu des femmes politiques comme Zénobie ou la reine Élisabeth, des femmes philosophes comme l’Aspasie de Périclès et tant d’autres, des femmes géomètres et astronomes comme Hypatie ou telle marquise moderne, des femmes docteurs comme la fameuse Cornara de l’école de Padoue, et après s’être un peu moqué de celles qui chez nous, à son exemple, « auraient toutes les envies imaginables d’être docteurs de Sorbonne », — le père Buffier, s’étant ainsi donné carrière et en ayant fini du piquant, arrive à une conclusion mixte et qui n’est plus que raisonnable : À l’égard des autres, dit-il, qui ont des devoirs à remplir, si elles ont du temps de reste, il leur sera toujours beaucoup plus utile de l’employer à se mettre dans l’esprit quelques connaissances honnêtes, pourvu qu’elles n’en tirent point de sotte vanité, que de l’occuper au jeu et à d’autres amusements aussi frivoles et aussi dangereux, tels que ceux qui partagent la vie de la plupart des femmes du monde. […] C’est l’Homère de Mme Dacier que lisait Mme Roland, jeune fille, avant les rêves de la vie publique, et dans sa studieuse retraite. […] Il nous restait une fille très aimable, qui était toute notre consolation, qui avait parfaitement répondu à nos soins et rempli nos vœux, qui était ornée de toutes les vertus, et qui, par la vivacité, l’étendue et la solidité de son esprit, et par les talents les plus agréables, rendait délicieux tous les moments de notre vie ; la mort vient de nous la ravir. […] (Voir la Vie d’Olympia Morata, par M.
Il y vit pour la première fois le jeune duc qui devait être le grand adversaire de sa vie, son élève dans cette prochaine guerre, puis son rival, son vaincu, son dupeur éternel, celui avec qui il aura maille à partir sous toutes les formes et avec qui son écheveau devra s’entremêler et se brouiller sans cesse. […] Le pasteur Arnaud y prononça cette prière : « Seigneur Jésus, toi qui as tant souffert et qui es mort pour nous, accorde-nous la grâce de pouvoir souffrir aussi et de sacrifier notre vie pour toi î Ceux qui persévéreront jusqu’à la fin seront sauvés. […] Feuquières, particulièrement chargé d’en finir avec l’une des vallées, écrivait à M. de Louvois (6 mai 1691) : « Ces gens-là n’ont pas une botte de paille pour se coucher… On ne peut comprendre, à moins de l’avoir vu, combien la vie qu’ils mènent est dure ; car enfin, Monseigneur, ils ne se font pas seulement un gîte en terre. […] On aime à croire que lorsque Catinat, sur la fin de sa vie, se promenait à Saint-Gratien en philosophe et sans épée, il se disait qu’il avait parfois employé cette noble épée à une œuvre plus qu’équivoque, et qu’il en avait un léger remords comme sage ou même comme chrétien.
Il souffrait et l’on souffrait autour de lui d’être hors d’état de rien entreprendre et de ne pouvoir renouveler la leçon de La Marsaille : « Au nom de Dieu, écrivait Tessé le 30 juin 1694. que le roi se détermine à prendre la vaisselle d’argent de cent hommes qui la lui enverront de bon cœur, et ayons une fok dans la vie de quoi donner les étrivières à tous ces gens-là. […] Je crois que bien des gens seraient surpris s’ils connaissaient jusqu’où va mon intérieur sur ce sujet ; j’ai bien fait des réflexions en ma vie sur les révolutions qui peuvent arriver aux hommes, et particulièrement à ceux qui sont honorés d’être en place ; j’y ai trouvé quelque appui et quelque consolation dans l’étourdissement où ce coup m’a mis. […] Bien des points de cette dernière partie de la vie de Catinat en ce qui concerne ses rapports exacts avec la Cour, avec Mme de Maintenon, avec le ministre Chamillart, restent à éclaircir ; car il ne conviendrait pas de prendre à la lettre les dires de Saint-Simon. […] Toute cette cérémonie et les soins donnés à la tombe nouvelle ont été suggérés, inspirés et surveillés par l’esprit et le cœur d’une princesse bien digne de posséder le domaine historique de Saint-Gratien, et qui, aimant de prédilection sans doute les grandeurs et les beautés de l’art et tout ce qui fait le charme de la vie, met encore au-dessus le patriotisme, l’esprit de vérité, la droiture et les honnêtes gens.
Le maréchal s’élançait comme moi volontairement à une brèche où personne ne l’envoyait, et voulait vaincre toute l’armée du prince de Hohenlohe avec les quatre mille hommes seulement qui le suivaient : la moitié de ces braves paya de la vie une téméraire intrépidité, et trois de ses aides de camp y furent grièvement blessés. […] je ne serais pas réduit aujourd’hui à détester la vie, à maudire jusqu’aux faibles rayons de gloire que ma carrière m’a laissé entrevoir un instant. […] Je demande pardon de tant insister, mais la vie, la carrière du général Jomini, de « cette perle des officiers d’état-major », comme je l’entends appeler par un bon juge, est restée pour beaucoup une énigme et un problème. […] Au tome IV, page 2, de la Vie politique et militaire de Napoléon.
Il habitue l’homme aux joies et aux devoirs domestiques, il asseoit entre l’étable et l’âtre, sa vie vagabonde. […] Tantale de la mer de feu qui baignait le monde, l’homme croupissait ou s’agitait dans ses flots, sans pouvoir en recueillir l’unique goutte qui l’aurait tiré des horreurs de la vie sauvage. […] Les choses employées par la main de l’homme se personnifiaient vite dans ces temps de mythologie luxuriante, la vie divine coulait à plein bord et pénétrait tout. […] Le Titan a tiré le feu du ciel, mais il ne peut en faire jaillir l’étincelle divine de la vie.
Son mari paraît avoir peu compté dans sa vie, sinon pour lui assurer la fortune qui fut le point de départ et le premier instrument de la considération qu’elle sut acquérir. […] Quand ses intérêts n’étaient point en cause, elle vous donnait des conseils sûrs et pratiques, dont on avait à profiter dans la vie. […] Le grand événement de la vie de Mme Geoffrin fut le voyage qu’elle fit en Pologne (1766), pour aller voir le roi Stanislas Poniatowski. […] J’ai mon magasin de réflexions et de comparaisons bien garni pour le reste de ma vie.
Il faut absolument que je fasse ce qu’il détestait le plus quand cela n’était pas à deux siècles au moins de distance, une biographie ou du moins quelque chose qui y ressemble, et qui rende quelque vie, quelque physionomie, à ce qui de soi seul parlerait peu. […] Les connaisseurs pourtant ont retenu et me signalent du doigt dans ces volumes un vrai bijou, la vie et la mort de Mayeux, le fameux Mayeux (le type grotesque de notre versatilité politique), venu au monde à Paris le 14 juillet 1789, et qui s’est successivement appelé Messidor-Napoléon-Louis-Charles-Philippe Mayeux, selon les noms des divers régimes qu’il a, tour à tour, épousés ou répudiés, Mayeux un moment porté sur le pavois après 1830, et qui meurt, vers 1833, de douleur et de honte d’avoir été renvoyé des rangs de la Garde nationale et rayé des contrôles comme coupable de faire rire. […] Il se retrouve homme de lettres sur ce point : entre deux ridicules, selon lui, et deux inconvénients, il choisit le moindre, et, pour le coup, il dirait volontiers comme cet autre de ma connaissance : « J’ai, pour un homme de lettres, le malheur d’appartenir à une nation qui n’est jamais plus fière que quand elle a un pompon sur la tête, et qu’elle obéit au mot d’ordre d’un caporal. » Son bourgeois de Paris nous est présenté par lui comme ayant éprouvé aux affaires du mois de juin (1832) un double accident : « il a gagné une extinction de voix et la croix d’honneur, deux malheurs dans la vie d’un homme raisonnable, qui craint également la médecine et le ridicule ». […] « La sottise est à peu près comme la disposition à la petite vérole, a dit Horace Walpole, il faut que chacun l’ait une fois en sa vie. » M.
Personne certes ne connaissait mieux le Fontenelle définitif que Mme Geoffrin ; qui passait sa vie avec lui et qui fut son exécutrice testamentaire. […] On y voit à nu cette nature purement spirituelle, qui était comme dépourvue de la plupart des sens et des impressions ordinaires au commun des hommes, et qui de bonne heure, se gouverna dans la vie en vertu du principe de la moindre action. […] Cette mort fut la seule douleur de sa longue vie, le seul accident qui trouva sa philosophie en défaut ; il fut homme un jour par ce côté. […] [NdA] Sur les débuts et sur la famille de Fontenelle et sur toute sa vie en général, on trouvera quelques détails précis et nouveaux dans la Biographie de Fontenelle, par M.
S’il est vrai que Raynouard, comme on l’a dit, ait laissé des mémoires, on doit inviter ceux qui en sont possesseurs à les publier pour éclairer cette première moitié de sa vie, dont quelques points seulement sont connus. […] Il a, trois fois dans sa vie, en trois circonstances mémorables, saisi le moment et l’occasion. […] Cette première idée, fondée sur des preuves si légères, en vérité, que les gens de bon sens et neufs à la question souriraient si je pouvais les leur exposer ; cette première idée lui fut si précieuse, qu’il imagina là-dessus tout un système, à savoir que du vie au ixe siècle, dans l’intervalle de la domination des Wisigoths à celle de Charlemagne, il s’était formé et parlé en France une langue romane unique, type et matrice de toutes les autres qui se sont produites depuis, et servant comme de médiateur entre le latin et elles toutes. […] Thiers, dans son XVIIIe volume de l’Histoire du Consulat et de l’Empire, a noté un second jour parlementaire mémorable dans la vie politique de M.
Fiévée n’est pas de ces hommes dont il faille, je crois, écrire la vie bien en détail, mais il est de ces écrivains distingués qui méritent qu’on s’occupe de leurs opinions et de leurs livres. […] Quoi qu’il en soit, La Dot de Suzette fut une heureuse quinzaine dans sa vie. […] Il montre le royalisme tel qu’il était dès lors dans cette société de plus en plus positive : De nos jours, le royalisme n’est ni une passion, ni un enthousiasme, moins encore un fanatisme : c’est une opinion ; et les hommes qui n’agissent qu’en conséquence d’une opinion torturée par toutes les crises dont nous avons été acteurs et victimes, ne sacrifient pas la tranquillité de leur vie à des projets dont ils sentent que l’exécution est au-dessus de leur pouvoir. […] Si, en imprimant, il n’a rien ajouté ni arrangé à sa Correspondance, il a vraiment du mérite d’avoir dit au Premier consul, en l’engageant à se conserver pour mener à bonne fin et accomplir toute sa destinée : « Que l’homme de nos jours ne ressemble pas aux hommes fameux de l’Antiquité, qui n’ont fait que donner au monde une grande secousse dont le monde s’est ensuite tiré comme il a pu. » Cette Correspondance, dans ces premières pages, résume ce qu’il y a eu d’honorable et de digne de souvenir dans la vie de M.
Shakespeare — Sa vie I Il y a une douzaine d’années, dans une île voisine des côtes de France, une maison, d’aspect mélancolique en toute saison, devenait particulièrement sombre à cause de l’hiver qui commençait. Le vent d’ouest, soufflant là en pleine liberté, faisait plus épaisses encore sur cette demeure toutes ces enveloppes de brouillard que novembre met entre la vie terrestre et le soleil. […] Il épousa cette Anne Hatway, plus âgée que lui de huit ans, en eut une fille, puis deux jumeaux fille et garçon, et la quitta ; et cette femme, disparue de toute la vie de Shakespeare, ne revient plus que dans son testament où il lui lègue le moins bon de ses deux lits, « ayant probablement, dit un biographe, employé le meilleur avec d’autres. » Shakespeare, comme, La Fontaine, ne fit que traverser le mariage. […] IV La vie de Shakespeare fut très mêlée d’amertume.
Pour prendre un des exemples les plus vulgaires de la vie, qu’y a-t-il de si réjouissant dans le spectacle d’un homme qui tombe sur la glace ou sur le pavé, qui trébuche au bout d’un trottoir, pour que la face de son frère en Jésus-Christ se contracte d’une façon désordonnée, pour que les muscles de son visage se mettent à jouer subitement comme une horloge à midi ou un joujou à ressorts ? […] Il est sorti des conditions fondamentales de la vie ; ses organes ne supportent plus sa pensée. […] Aussi le rire des enfants, qu’on voudrait en vain m’objecter, est-il tout à fait différent, même comme expression physique, comme forme, du rire de l’homme qui assiste à une comédie, regarde une caricature, ou du rire terrible de Melmoth ; de Melmoth, l’être déclassé, l’individu situé entre les dernières limites de la patrie humaine et les frontières de la vie supérieure ; de Melmoth se croyant toujours près de se débarrasser de son pacte infernal, espérant sans cesse troquer ce pouvoir surhumain, qui fait son malheur, contre la conscience pure d’un ignorant qui lui fait envie. — Le rire des enfants est comme un épanouissement de fleur. […] Si celle-ci paraît tirée de loin et quelque peu difficile à admettre, c’est que le rire causé par le grotesque a en soi quelque chose de profond, d’axiomatique et de primitif qui se rapproche beaucoup plus de la vie innocente et de la joie absolue que le rire causé par le comique de mœurs.
Bazin, Notes historiques sur la vie de Molière. […] Bazin, Notes historiques sur la vie de Molière. […] Louis Moland, Molière, sa vie et ses ouvrages. […] Louis Moland, Molière, sa vie et ses ouvrages. […] Taschereau, Histoire de la vie et des ouvrages de Molière.
Sa vie entière s’était consumée dans cette lutte subtile ; ses facultés s’y étaient resserrées ; et, grâce à tant de travail sur elle-même, nulle femme ne possédait à son égal l’entente profonde et déliée des tracas de salon ; c’était une gloire dans la société, mais, en même temps, un obstacle à l’intelligence des grandes affaires. […] J’ai vu mourir le roi comme un saint et comme un héros ; j’ai quitté le monde que je n’aimais pas ; je suis dans la plus aimable retraite que je puisse désirer ; et partout, madame, je serai toute la vie, avec le respect et l’attachement que je vous dois, votre très humble et très obéissante servante. » Nous ne pousserons pas plus loin ces citations, qui suffisent, ce nous semble, pour définir le caractère de madame de Maintenon.
D’heureux choix récents l’avaient relevée dans l’estime publique et lui avaient rendu quelque vie ; elle devait réparation à M. de Lamartine, et elle le nomma, quoique absent. […] La vie pleine et compacte de M.
Vie, poésies et pensées de Joseph Delorme Deuxième édition. […] Mais revenons ; ce Joseph, qui se consumait ainsi sans foi, sans croyances, sans action ; cet individu malade qui suivait son petit sentier loin de la société et des hommes, avait commencé vers la fin de sa vie à renaître à une sympathie plus bienveillante, et à chercher les regards consolants de quelques amis poètes ; c’est ce qu’il fit de mieux et de plus profitable pour lui ; son cœur se dilata à leur côté ; son talent s’échauffa aux rayons du leur, et il dut à l’un d’eux surtout, au plus grand, au plus cher, le peu qu’il nous a laissé.
Cent ans de guerres civiles et de troubles presque continuels, une foule de trahisons, de supplices, de dévouements généreux, avaient préparé les sujets d’Élisabeth à ce genre de tragédie, qui ne reproduit presque rien de tout le factice de la vie des cours et de la civilisation des peuples tranquilles. Les Anglais de 1590, heureusement fort ignorants, aimèrent à contempler au théâtre, l’image des malheurs que le caractère ferme de leur reine venait d’éloigner de la vie réelle.
Il est étrange de songer que ce cerveau, en qui la réalité avait reflété des images si nettes, qui avait su interpréter, ramasser, coordonner ces images avec une vigueur et dans des directions si décidées, et nous les renvoyer, plus riches de sens, à l’aide de signes si fortement ourdis, n’ait plus, à partir d’un certain moment, reçu du monde extérieur que des impressions confuses, incohérentes, éparses, aussi rudimentaires et aussi peu liées que celles des animaux, et pleines, en outre, d’épouvante et de douleur, à cause des vagues ressouvenirs d’une vie plus complète ; et que l’auteur de Boule-de-Suif, de Pierre et Jean, de Notre Coeur, soit entré, vivant, dans l’éternelle nuit. […] Je me rappelle les longues fuites de Maupassant hors de la société des hommes, ses solitudes de plusieurs mois, en mer ou dans les champs, ses tentatives de retour à une vie simplifiée, toute physique et tout animale, où il pût oublier l’ennemi sourd, l’ennemi patient qu’il portait en lui ; puis, quand il rentrait parmi nous, cette fièvre d’amusement, et de plaisanteries, et de jeux presque enfantins, qui était encore comme une fuite, une évasion hors de soi… Vains efforts !
La Chanson de vieille mortalité — dit l’alliance par les automnes et par les soirs des doux messagers de vie, « passés, venus, puis disparus ». […] Nous préférons clore cette déjà longue notice par quelques scrupuleuses indications bibliographiques, rappelant la collaboration de Gustave Kahn à la Jeune Belgique, au Décadent, à la Basoche, à la Gazette anecdotique, au Paris littéraire, à la Vie moderne, au Réveil de Gand, à la Société nouvelle, à la Revue encyclopédique, au Monde moderne, à la Revue de Paris, à la Nouvelle Revue, au Livre d’Art, à l’Épreuve, au Supplément du Pan, au Mercure de France, au Journal, à l’Événement, aux Droits de l’Homme, à la Presse, à l’Almanach des poètes (Mercure de France, 1896-1897), aux Hommes d’aujourd’hui, et à la Revue blanche où, indépendamment de différentes études consacrées à Rodenbach, Anatole France, Émile Zola, Arthur Rimbaud, etc., il signe depuis plusieurs années la chronique des poèmes.
. — Éviter le solennel et prendre la vie à la blague. » * * * Étrange société où connaître les gens qui font « la fête » suffit pour conférer un titre d’excellence. […] que n’est-il encore temps de « prendre la vie à la blague » ?
Accoutumés aux jeûnes, à la prière obstinée, à une vie toute d’aspirations, ils s’étonnèrent de se voir tout à coup transportés au milieu des joies de la bienvenue 551. […] Par son genre de vie, par son opposition aux pouvoirs politiques établis, Jean rappelait en effet cette figure étrange de la vieille histoire d’Israël 571.
Au contraire, leur sévérité mystérieuse et leurs grimaces affectées irritent la censure de tout le monde contre les actions de leur vie. […] Le cynisme prive de tous les charmes qu’elle répand dans la vie sociale à tous les degrés des liaisons et des intimités qu’elle procure, Le goût veut donc, comme la morale, que moins les mœurs sont pures, et plus on les déguise sous un langage exempt de leur souillure.
Et sur la vision lugubre, et sur moi-même Que j’y voyais ainsi qu’au fond d’un miroir blême, La vie immense ouvrait ses difformes rameaux ; Je contemplais les fers, les voluptés, les maux, La mort, les avatars et les métempsycoses, Et dans l’obscur taillis des êtres et des choses Je regardais rôder, noir, riant, l’œil en feu, Satan, ce braconnier de la forêt de Dieu. […] * De l’empreinte profonde et grave qu’a laissée Ce chaos de la vie à ma sombre pensée, De cette vision du mouvant genre humain, Ce livre, où près d’hier on entrevoit demain, Est sorti, reflétant de poëme en poëme Toute cette clarté vertigineuse et blême ; Pendant que mon cerveau douloureux le couvait, La légende est parfois venue à mon chevet, Mystérieuse sœur de l’histoire sinistre ; Et toutes deux ont mis leur doigt sur ce registre.
Il avoit mené, dans sa jeunesse, une vie errante & malheureuse. […] Il fallut que Ménage donnât le signal de la guerre, en publiant en Latin la vie de Montmaur.
Ce champ est assez vaste pour occuper un homme tout entier : ceux même qui l’ont cultivé toute leur vie ont peine à s’y reconnoître. […] Tous les deux ont mis pour jamais, en France, nos avocats sur la bonne voie ; l’un par son exemple, & l’autre par la guerre qu’il fit, toute sa vie, au verbiage emphatique.
Les uns et les autres restent toute leur vie de vils ouvriers, et des manoeuvres, dont il faut païer les journées, mais qui ne méritent pas la consideration et les récompenses que les nations polies doivent aux artisans illustres. […] Voilà pourquoi tant de gens vont à la guerre toute leur vie sans se rendre capables d’y commander.
Du moins voïons-nous dans sa vie que ce qui le fit connoître d’Auguste, ce furent des secrets pour guérir les chevaux, à la faveur desquels ce grand poëte s’introduisit dans l’écurie de l’empereur. […] N’est-ce pas malgré ses parens que l’auteur moderne de la vie de Philippe Auguste et de Charles VII s’est adonné à composer l’histoire, pour laquelle il a reçû de grands talens de la nature ?
« Il s’agit tout le temps, dit-il, d’orages, de ruines qui croulent, de parvis, de feuilles sèches, que disperse le vent de la mort ; de la colombe qui construit son nid solitaire (pour dire le célibat) ; de volcans à peine fermés (pour dire les passions apaisées) ; du forum, pour dire, comme les avocats, la vie publique ; de l’ange de la destinée, de la lampe de la foi, de la coupe de miel offerte aux lèvres pures (pour dire une vie heureuse, bien qu’on ne mette guère maintenant du miel dans les coupes) ; des anneaux rattachés de la chaîne brisée ; du fait de la richesse, du règne de la vérité qui s’annonce à l’horizon ; du volcan, de l’éternel volcan qui vomit par ses mille cratères de la fange et de la lave, et enfin du bouclier, pour dire : le sentiment qui défend son cœur !
Après lui avoir accordé — trop accordé — les dons étincelants de la verve, de l’expression, de l’improvisation inouïe et de la patience qui cherche l’idéal, plus étonnante encore, Wallon, ce malin terrible, refuse à Cousin la seule chose à laquelle Cousin ait prétendu toute sa vie, — il lui refuse d’être philosophe. […] » Nous avons décrit la manœuvre de cette polémique contre un homme, et, quoique nous reconnaissions que Wallon ait eu raison de nier dans Cousin la bonne foi intégrale, l’impersonnalité, la solidité, la découverte, c’est-à-dire tout le génie philosophique d’un seul coup, nous n’aimons pas, nous l’avouerons, cette méthode, qui surfait un homme par tous les côtés pour l’affamer et le tuer par le côté qui est toute la prétention de sa vie.
Quant aux lettrés de Vouziers, ils prennent un ton réservé, disant : Taine n’est pas venu à nous ; il ne nous a pas connus ; il ne rentrait à Vouziers que de loin en loin, descendait à l’hôtel et ne voyait que ses hommes d’affaires. » La supériorité de la vie contemplative sur la politique, c’est qu’il n’est pas besoin de délégation pour la représenter ; que le Rethelois, que l’Argonne, que nos régions de l’Est autorisent ou non Taine, elles s’expriment par son génie. […] Mais contrarier la nature, l’exalter, c’est un magnifique dressage. » Les grands hommes que je viens de citer sont des forces conservatrices ; ils risquent d’enrayer le mouvement vers l’inconnu, qui est la vie même.
Sans l’attrait d’un tel intérêt privé identifié avec l’intérêt public, comment ces pères de famille à peine sortis de la vie sauvage, et que Platon reconnaît dans le Polyphème d’Homère, auraient-ils pu être déterminés à suivre l’ordre civil ? […] Joignez à cela les causes naturelles qui produisent les gouvernements humains, et qui sont toutes contraires à celles qui avaient produit l’héroïsme, puisqu’elles ne sont autres que désir du repos, amour paternel et conjugal, attachement à la vie.
Zamore, qui doit la vie à la générosité du gouverneur, veut lui enlever sa femme, et, parce qu’il ne peut en venir à bout, il poignarde le mari voilà ses vertus. […] Si un militaire était convaincu d’avoir aposté un assassin pour tuer son rival, aucun remords ne pourrait empêcher qu’il ne fût chassé de son régiment, et regardé comme un infâme le reste de sa vie. […] Le monde se dépeuplerait si un affront suffisait aux hommes pour sortir de la vie. […] Ainsi, au mépris des lois, des ordres de son père, au risque de perdre la vie sur un échafaud, elle écrit à Tancrède de venir l’épouser et régner dans la république de Syracuse, comme si cela était aussi aisé à faire qu’à écrire. […] Il y a longtemps que je connais la pièce ; c’est elle que j’ai vu représenter la première fois de ma vie que je suis allé au spectacle.
Il aurait su, comme l’a dit l’un des plus enchanteurs, le Tasse, après Lucrèce, que le monde court avant tout là où la muse de la persuasion a versé le plus de ses douceurs, que la vérité en soi est souvent un remède amer, et qu’à l’enfant malade, c’est-à-dire à l’homme, il faut emmieller tant soit peu le bord du vase où il boira la guérison et la vie : Cosi all’ egro fanciul… Cela, je le sais, est un peu moins vrai qu’autrefois, mais cela n’a pas tout à fait cessé de l’être. […] Nommé à l’Académie française deux ans après La Bruyère lui-même, qui avait signalé son entrée par un si neuf et si éloquent discours de réception, il en fit un des plus ordinaires ; et, comme Fontenelle, à qui il le montrait en manuscrit, lui faisait remarquer que le style en était plat : « Tant mieux, dit l’abbé, il m’en ressemblera davantage ; et c’est assez pour un honnête homme de donner deux heures de sa vie à un discours pour l’Académie. » Il était homme à répondre comme un de nos contemporains à celui qui critiquait une de ses phrases : « Ah ! […] Il était content et le laissait voir : « J’ai du plaisir partout, disait-il, parce que j’ai l’âme saine. » Il a pourtant écrit, au sujet de la moquerie, un mot fait pour toucher, et où il ne tient qu’à nous de voir une allusion à ce portrait de Mopse : « Quel agrément dans la vie pour le bienfaisant de sentir la joie de ceux chez qui il entre !
Lorsqu’on lit l’Iliade, on sent à chaque instant qu’Homère a fait la guerre, et n’a pas, comme le disent les commentateurs, passé sa vie dans les écoles de Chio ; quand on lit l’Énéide, on sent que…, etc., etc. » Je supprime le reste comme par trop irrévérencieux. […] Plus ordinairement le récit va déroulant à chaque pas les similitudes étendues et fertiles qui associent dans un rapport frappant des images bien contraires, des reflets le plus souvent de la vie civile ou champêtre au milieu des horreurs du carnage. […] Ceux qui entretiennent une familiarité libre avec les éloquents écrivains qui la représentent ont chance d’en ressaisir quelque chose dans leur vie, dans leur pensée.
, et où le poète développe cette pensée que, puisque nous sommes les époux de la Vie et que la Vie est fille de la Mort, nous avons la Mort pour belle-mère ! […] Et puis, à Paris, la lutte pour la vie et pour la gloire est d’une extrême âpreté : il y a des petits jeunes gens qui égorgeraient leur meilleur ami — surtout leur meilleur ami — pour arriver plus vite à la « notoriété » ou à la fortune.
Le centre d’action de Jésus, à cette époque de sa vie, fut la petite ville de Capharnahum, située sur le bord du lac de Génésareth. […] Ces édifices, qui n’avaient rien du temple, étaient le centre de toute la vie juive. […] Une seule barque, dans le plus misérable état, sillonne aujourd’hui ces flots jadis si riches de vie et de joie.
Ils y prêchoient le renoncement entier à soi-même, le silence de l’ame, l’anéantissement de toutes ses puissances, le culte intérieur, une indifférence totale pour la vie ou la mort, pour le paradis ou l’enfer. […] Ils faisoient de cette vie une anticipation de l’autre, une extase sans réveil, une jouissance continuelle de bonheur pour les ames tendres & pieuses. […] Il reconnut, sur la fin de sa vie, la vanité des sciences, & fit quelques vers galans* dans le goût de ceux de Quinault.
Lorsque Saint-Simon ou Dangeau, ou Madame de Motteville, ou n’importe quel faiseur de Mémoires, écrivent les souvenirs de leur vie, ils se révèlent eux-mêmes, de cela seul qu’ils écrivent en leur propre nom. […] Vraie supériorité de femme que chacun sentit et que personne ne jugea, parce qu’elle charmait trop ceux qui se mêlèrent à sa vie, elle n’était peut-être pas plus belle qu’elle n’était spirituelle, cette femme à qui Canova n’avait qu’à poser une couronne sur les cheveux pour en faire la Béatrice du Dante, et que tous ils ont dite si belle, dans une si grande unanimité d’illusion, que cela équivaut à une réalité pour l’Histoire. […] Ces Souvenirs, Madame Lenormant s’est donné beaucoup de peine pour les raviver, mais elle n’a ni la puissance de révocation ni celle de la vie.
Il a été, sa vie durant, la terreur des faussaires, des fumistes et de ses confrères, tant français qu’étrangers qui aiment mieux être roulés à l’insu du public que publiquement détrompés. […] Sous le Second Empire, la vie fut dure pour les journalistes et les gens qui faisaient de l’opposition. […] Dans l’ordinaire de la vie, bien des compromissions paraissent vénielles, mais on ne saurait mettre trop de scrupules dans le crime, l’état de grâce y est absolument nécessaire, comme pour approcher dignement des autels. […] Paul La vie littéraire n’est pas possible si on ne l’a pas excellent. […] Paul Comme la vie conjugale.
Son père, comme tous les riches cultivateurs de campagne qui rêvent follement pour leur fils une condition supérieure, selon leur vanité, à la vie rurale, fit étudier son fils à Aix et à Avignon pour en faire un avocat de village. […] Écoutons-le, écoutons encore ; je passerais à l’entendre ainsi mes veillées et ma vie. » Et là finit le premier chant de Mireille. […] « Il était un vieux pâtre, dit-elle ; il avait passé toute sa vie seul et sauvage dans l’âpre Lubéron, gardant son troupeau. […] On ne fait pas deux chefs-d’œuvre dans une vie ; tu en as fait un : rends grâce au Ciel et ne reste pas parmi nous : tu manquerais le chef-d’œuvre de la vie, le bonheur dans la simplicité. […] Au moment où le soleil touchait la mer, la tige de l’arbre, dont la sève est de l’encens, sortit tout à coup de ses nœuds gonflés de vie comme un glaive qu’une main robuste tire du fourreau pour le faire reluire au soleil, et la fleur d’un quart de siècle éclata au sommet de la tige dans un bruyant épanouissement semblable à l’explosion végétale d’un obus qui sort du mortier.
Et l’honneur rigoureux de ma vie est l’arbitre. […] Il vivait à l’avance la vie morale de toutes les générations théâtrales de l’avenir. […] Ce vers a été un des beaux jours de ma vie. […] Mais j’ai la vie la plus plate du monde. […] Casimir a une tache dans sa vie si pure.
Les grands intérêts sont tout ce qui remue fortement les hommes ; et il y a des moments où la vie n’est pas leur plus grande passion. […] Camma, pour sauver la vie à Sostrate qu’elle aime, se résout enfin à épouser Sinorix qu’elle hait et qu’elle doit haïr. […] Quel homme que celui qui, même dans le remords que lui cause le meurtre d’un de ses fils, craint d’attenter à la vie de l’autre ! […] Il y va de sa vie, au moins que je le croye. […] Pauline, malgré la passion qu’elle a pour Sévère, qu’elle pourrait épouser après la mort de Polieucte, veut que ce même Sévère sauve la vie à Polieucte.
Né le 31 août 1601, au village de Houdan (ou Hodenc), à trois lieues de Beauvais, d’une honnête famille bourgeoise qui comptait parmi ses membres des marchands drapiers, des notaires, des avocats et même des conseillers au présidial16, Gui Patin garda toute sa vie la marque du franc Picard et de l’homme de race probe. […] Il voulut que son fils en sortît : « Il me faisait lire, encore tout petit, les Vies de Plutarque tout haut et m’apprenait à bien prononcer. » Ce père, qui avait été reçu avocat lui-même, voulait faire de Gui Patin un avocat. […] Tel il sera toute sa vie : à l’affût des nouvelles, des particularités et personnalités, et y appliquant sa nature d’esprit ; railleur, franc-parleur, franc-jugeur ; avide des on dit qui courent, les redisant non sans les colorer de son humeur et sans les redoubler de son accent ; un anecdotier, comme La Fontaine était un fablier. […] C’est un épisode de la vie de Gui Patin qui mériterait un éclaircissement dans une bonne édition de ses lettres ; j’en donnerai ici un aperçu.
C’était le moment où Bonaparte, nommé consul à vie (août 1802), instituant la Légion d’honneur, créant les sénatoreries, faisait subir à la première Constitution consulaire une modification essentielle qui l’inclinait dans le sens monarchique. […] Il met de côté cette faculté d’admiration qui veut être satisfaite et tenue en haleine, même dans le régime ordinaire de la vie. […] Cette vie qu’on menait au Bois-Roussel a été décrite assez vivement et avec assez de relief par un témoin ou du moins par le fils d’un voisin de terre66 ; ces sortes de descriptions d’intérieur sont trop délicates pour pouvoir être reprises à distance par ceux qui n’en ont pas vu de leurs yeux quelque chose. […] Génin, dans la Vie de Molière qu’il a mise en tête de son Lexique comparé de la langue de Molière et des écrivains du xviie siècle, p.
Il convient lui-même « qu’un de ses torts a été de se laisser un peu trop mondifier par les différentes circonstances commodes, agréables et flatteuses qu’il a rencontrées dans sa vie ». […] Il était en 89 à Strasbourg, dans un petit monde mystique comme cette ville en a eu à diverses époques ; il voyait tous les jours celle qu’il appelle sa meilleure amie, Mme Boechlin ; il formait le projet de se réunir encore plus entièrement à elle en logeant dans la même maison ; il venait même de réaliser ce projet depuis deux mois, en 1791 ; il allait entamer la lecture de Jacob Boehm et suivait tout un roman idéal, tout un rêve de vie intérieure accomplie, lorsqu’une maladie de son père l’appela à Amboise et le rejeta dans la réalité : Au bout de deux mois (de cette réunion dans un même logement), il fallut, dit-il, quitter mon paradis pour aller soigner mon père. […] Je me recommandai au magnifique Dieu de ma vie pour être dispensé de boire cette coupe ; mais je lus clairement que, quoique ce sacrifice fût horrible, il le fallait faire, et je le fis en versant un torrent de larmes. […] On ne peut s’empêcher de remarquer que Saint-Martin ici nous présente une simple contrariété de sa vie intérieure comme un malheur horrible, et cela en regard de cette véritable infortune publique de Louis XVI et de Marie-Antoinette, qu’il se contente d’appeler une bagarre.
Ses années de direction à Rome (1828-1835) forment une époque unique dans sa vie : une fille belle et adorée qui était sa gloire, et dont il a consacré l’image en maint endroit, faisait avec sa mère les honneurs de la Villa Médicis ; devenue Mme Paul Delaroche et morte à la fleur de l’âge, elle devait lui apprendre ce que c’est que la première grande douleur. […] tu gagneras ta vie. » Il suivit le conseil et l’appliqua immédiatement en jugeant l’Exposition de peinture et de sculpture, comme il fit bientôt pour les œuvres littéraires elles-mêmes. […] D’autre part, ceux qui ont cru Horace indifférent au paysage et aux arbres de la route, qui ont dit qu’il dessinait en pensant à autre chose, « comme on tricote les yeux fermés », les mêmes qui ont ajouté qu’il était à peu près inutile, pour le juger comme peintre, d’étudier sa vie, ne conviendront-ils pas qu’ils lui ont fait légèrement tort ? […] Et c’est ainsi qu’Horace Vernet arriva à réaliser et à fixer en trois tableaux, vrais et dramatiques, irréprochables d’exactitude, admirables de composition et de vie, les préliminaires et l’instant même de ce glorieux assaut.
Ils gardent ainsi quelque chose de plus abstrait que dans la pièce espagnole, où ces changements de lieu sont fortement accusés, et que dans la réalité de la vie, où mille particularités du discours avertissent à tout instant de l’endroit précis où l’on est et où l’on parle. […] Cette abstraction cornélienne est moins complète dans le Cid que dans les pièces qui ont suivi, et si le brillant Rodrigue nous plaît plus que les autres héros de Corneille, c’est qu’aussi il a gardé plus de vie, plus de flamme au front et plus d’éclairs. […] Dans la pièce espagnole, scène correspondante, Diègue raconte que, voyant son ennemi étendu sans vie, il a porté la main à sa blessure et a lavé (à la lettre) avec le sang la place du soufflet sur sa joue ; et il arrive la joue encore teinte de ce sang. […] Restée seule avec Elvire, ou se croyant seule, Chimène ouvre alors toute son âme et exhale toute sa peine : « La moitié de ma vie a mis l’autre au tombeau !
Jean-Bon Saint-André, sa vie et ses écrits par M. […] Je faisais ces réflexions en repassant depuis lundi dernier quelques-unes des versions qui ont été données de la glorieuse bataille du 1er juin 1794, et je me prenais à désirer que parmi les compatriotes montalbanais de Jean-Bon qui ont déjà tant fait pour sa biographie, il y en eût un qui prit soin de former et de réimprimer un dossier complet des pièces qui peuvent mettre en pleine lumière ce point éclatant dans l’histoire de la Révolution et capital dans la vie du vaillant conventionnel. […] Son intégrité, dans les deux temps de sa vie publique, est parfaite et au-dessus du soupçon. […] J’ai essayé de les apprécier équitablement, d’y saisir et de faire toucher le lien qui les unit à distance, de dégager l’unité de l’homme à travers les disparates de la vie, et, bien que sans aucun goût (tant s’en faut !)
Ce n’est pas moi pourtant qui lui ferai un reproche d’être resté au fond mécontent de lui ; d’avoir eu comme une teinte de tristesse répandue jusqu’à la fin sur ses souvenirs, et, sans regretter précisément ce qu’il avait fait, d’avoir compris qu’il y avait sur cette partie de sa vie sinon une tache, du moins une obscurité qui demandait un éclaircissement. […] Cette Réplique au général Stuart, si l’on y joint un deuxième Appendice publié plus tard en réponse à des attaques allemandes, faites au nom du général Toll (car Jomini passa sa vie au moral entre deux feux), définit parfaitement son rôle à l’armée des Alliés en 1813. […] Bien qu’il eût un congé illimité, il crut devoir spontanément se rendre à Saint-Pétersbourg afin de mettre le reste de ses forces et de sa vie au service de la Russie. […] Mais j’ai songé, en parlant si à fond de lui, à autre chose encore ; j’ai tenu surtout, en découvrant sincèrement sa vie et ses pensées, en y introduisant si avant le lecteur, à détruire un préjugé à son égard, à faire tomber une prévention (s’il en existait) dans l’esprit de notre jeunesse militaire française.
On ne chicanait pas alors sur les textes : à l’humaniste proprement dit, le Virgile du Père de La Rue, l’Horace de Bond, le Cicéron de D’Olivet, suffisaient sans tant de questions, et on en avait pour la vie. […] Car lui, qui vient de défendre de traduire les poètes, il finira par traduire en vers deux livres de l’Énéide (le IVe et le VIe), et, dans une Lettre-Préface à un ami, il donnera les raisons qu’il a eues de se contredire ainsi en apparence. […] Bien qu’il ait annoncé précédemment qu’il ne tracerait pas l’idée complète et exemplaire du poète, il va pourtant le dépeindre et le présenter dans les conditions qu’il estime les plus favorables pour entreprendre une telle œuvre, c’est-à-dire doué d’une excellente félicité de nature, instruit dès l’enfance de tous les bons arts et sciences, versé dans les meilleurs auteurs de l’Antiquité, nullement ignorant avec cela des offices et devoirs de la vie humaine et civile, pas de trop haute naissance surtout ni appelé au régime public, ni non plus de lieu abject et pauvre, afin d’être exempt des embarras et des soucis domestiques, mais tranquille et serein d’esprit par tempérament et aussi par bonne conduite : il est touchant de lui voir définir cette heureuse médiocrité de condition et de circonstances, qui permet mieux en effet toute sa franchise de vocation et tout son essor au génie. […] C’est ce sentiment tout romain et tout sabin qui fait la vie des six derniers livres de l’Énéide.
Il a donc rang parmi nos poëtes65 à aussi bon droit, je pense, que s’il avait composé dans sa vie une couple de pièces en alexandrins ; et nous n’avons pas même à demander pardon de la liberté grande aux innombrables auteurs d’élégies, à l’aristocratie désormais très-mélangée des rêveurs et des rimeurs à rimes plus ou moins riches. […] Les jeunes gens étaient plus naturellement gais, moins ambitieux qu’on ne les voit à présent, et les amitiés premières faisaient aisément religion dans la vie. […] Sans doute, dans le monde réel, il n’y a pas tant de millions ni tant de beaux colonels que cela ; mais cette comédie est l’idéal pas trop invraisemblable, le roman à hauteur d’appui de toute notre vie de balcon, d’entresol, de comptoir ; toute la classe moyenne et assez distinguée de la société ne rêve rien de mieux. […] S’il fallait pourtant proposer absolument ma conjecture, je dirais qu’un de ses grands arts est de prendre en tout le contre-pied juste de ce qui semble et de ce qu’on attend (le plus beau Jour de la Vie).
Tite-Live, le parrain le plus brillant de cette histoire demi-fabuleuse de Rome au berceau, a été aussi le principal auteur du doute, lorsqu’en commençant son vie livre, il a dit : « Jusqu’ici notre histoire est assez obscure. […] Cette quantité de détails sur le clergé, les couvents, les parlements, les charges de cour, qui formaient la trame sociale, et qui étaient un reste de la vie du moyen âge, on ne les connaît plus. […] Il paraît peu disposé à le croire très-développé : « La vie politique des Grecs, dit-il en un endroit194, non moins active que celle de Rome, mais resserrée dans leurs petits États, n’appelait point un aussi rapide et énergique instrument de publicité que cet immense empire dont les armées conquérantes détruisirent en peu d’années Carthage, Corinthe et Numance. » On a vu que cet énergique instrument de publicité ne joua jamais que très-peu à Rome ; et, puisqu’il s’agit de la faculté plutôt encore que de l’usage, j’ai peine à croire qu’Athènes, par exemple, n’en ait pas fait preuve, même dans son cercle très-resserré. […] La vie humaine, il y a longtemps qu’on l’a dit, ressemble à la guerre : chacun n’a qu’à tenir son rang avec honneur et qu’à faire sa fonction, comme si la mort n’était pas là dans tous les sens, qui sillonne.
» Quand on voit, au seul point de vue moral, de telles métamorphoses, on maudit les révolutions, on les redoute, non pas pour sa vie, mais pour son propre caractère ; on se demande si l’on n’aurait point en soi quelque travers, quelque fausse vue ou quelque passion maligne, quelque fanatisme caché, qu’elles se chargeraient de développer ensuite et de mettre en lumière pour notre abaissement et notre honte. […] Pour bien étudier Condorcet, et sur le terrain le plus pacifique et le moins brûlant, il faut lire sa Vie de M. […] Turgot croit à une intelligence suprême et ordonnatrice du monde ; il croit à une continuation d’existence au-delà de cette vie ; il croit à une morale plus ferme et plus fondée en principe que ne le fait Condorcet. […] Plus tard, en reprenant et en exposant pour son propre compte un système semblable, Condorcet retranchera toute idée divine, toute espérance d’une vie ultérieure, et aussi toute lumière de style.
C’était une des prétentions de Mlle de Scudéry, de connaître à ce point et de si bien décrire les mouvements les plus secrets de l’amour sans les avoir guère autrement sentis que par la réflexion, et elle y réussit souvent, en effet, dans tout ce qui est délicatesse et finesse, dans tout ce qui n’est pas la flamme même. « Vous expliquez cela si admirablement, pourrait-on lui dire avec un personnage de ses dialogues, que quand vous n’auriez fait autre chose toute votre vie que d’avoir de l’amour, vous n’en parleriez pas mieux. » — « Si je n’en ai eu, nous répondrait-elle en nous faisant son plus beau sourire, j’ai des amies qui en ont eu pour moi et qui m’ont appris à en parler. » Voilà de l’esprit pourtant, et Mlle de Scudéry en avait beaucoup. […] Et ce qu’il y a de rare est qu’une femme qui ne peut danser avec bienséance que cinq ou six ans de sa vie, en emploie dix ou douze à apprendre, continuellement ce qu’elle ne doit faire que cinq ou six ; et, à cette même personne qui est obligée d’avoir du jugement jusques à la mort, et de parler jusques à son dernier soupir, on ne lui apprend rien du tout qui puisse ni la faire parler plus agréablement, ni la faire agir avec plus de conduite. […] Mlle de Scudéry, au tome VIe du Grand Cyrus, avait donné le portrait de Mme Cornuel sous le nom de Zénocrite, dont elle avait fait une des plus agréables et des plus redoutables railleuses de la Lycie. […] Tels sont Artamène ou le Grand Cyrus, où l’on trouve une partie considérable de la vie de Louis de Bourbon prince de Condé, et sa Clélie qui renferme quantité de traits qui ont du rapport à tout ce qu’il y avait alors de personnes illustres en France.
Mais, dans un article sur les obsèques de Sautelet (16 mai), Carrel lui-même ne disait-il pas, en voulant expliquer l’âme douloureuse de son ami : La génération à laquelle appartenait notre malheureux ami n’a point connu les douleurs ni l’éclat des grandes convulsions politiques… Mais, à la suite de ces orages qui ne peuvent se rencontrer que de loin à loin, notre génération a été, plus qu’une autre, en butte aux difficultés de la vie individuelle, aux troubles et aux catastrophes domestiques… Et pourquoi, s’il en était ainsi de cette génération, pourquoi interdire à la sensibilité particulière et sincère son expression la plus naturelle et la plus innocente qui est la poésie lyrique, consolation et charme de celui qui souffre et qui chante, et qui ne se tue pas ? […] Des circonstances de sa vie intérieure que chacun savait alors, et que ses amis arrivés au pouvoir auraient dû apprécier, le détournaient impérieusement d’accepter des fonctions publiques en province. […] Là est un faible, et qui, transporté de sa vie militaire à sa vie politique, domina toute sa carrière et finit par la briser.
La vie des héros a enrichi l’histoire, et l’histoire a embelli les actions des héros : ainsi je ne sais qui sont plus redevables, ou ceux qui ont écrit l’histoire, à ceux qui leur en ont fourni une si noble matière, ou ces grands hommes à leurs historiens. […] Arsène , du plus haut de son esprit, contemple les hommes, et dans l’éloignement d’où il les voit, il est comme effrayé de leur petitesse : loüé, exalté, et porté jusqu’aux cieux par de certaines gens qui se sont promis de s’admirer réciproquement, il croit avec quelque mérite qu’il a, posséder tout celui qu’on peut avoir, et qu’il n’aura jamais : occupé et rempli de ses sublimes idées, il se donne à peine le loisir de prononcer quelques oracles : élevé par son caractère au-dessus des jugements humains, il abandonne aux âmes communes le mérite d’une vie suivie et uniforme, et il n’est responsable de ses inconstances qu’à ce cercle d’amis qui les idolâtrent ; eux seuls savent juger, savent penser, savent écrire, doivent écrire ; il n’y a point d’autre ouvrage d’esprit si bien reçu dans le monde, et si universellement goûté des honnêtes gens, je ne dis pas qu’il veuille approuver, mais qu’il daigne lire : incapable d’être corrigé par cette peinture qu’il ne lira point. […] Le philosophe consume sa vie à observer les hommes, et il use ses esprits à en démêler les vices et le ridicule ; s’il donne quelque tour à ses pensées, c’est moins par une vanité d’auteur, que pour mettre une vérité qu’il a trouvée dans tout le jour nécessaire pour faire l’impression qui doit servir à son dessein. […] Ce n’est donc pas un tissu de jolis sentiments, de déclarations tendres, d’entretiens galants, de portraits agréables, de mots doucereux, ou quelquefois assez plaisants pour faire rire, suivi à la vérité d’une dernière scène où les3 mutins n’entendent aucune raison, et où, pour la bienséance, il y a enfin du sang répandu, et quelque malheureux à qui il en coûte la vie.
L’instruction adoucit les caractères, éclaire sur les devoirs, subtilise les vices, les étouffe ou les voile, inspire l’amour de l’ordre, de la justice et des vertus, et accélère la naissance du bon goût dans toutes les choses de la vie. […] Il faudrait se moquer de la simplicité de ces bonnes gens qui ont prétendu former d’honnêtes et habiles citoyens, des hommes utiles, de grands hommes, en se promenant, en causant, en plaisantant ; accoutumer la jeunesse à la pratique éclairée des vertus et l’initier aux sciences par manière de passe-temps ; oui, certes, il faudrait s’en moquer si l’on ne respectait la bonté de leur âme et leur tendre compassion poulies années innocentes de notre vie. […] Accoutumé au spectacle d’une vie laborieuse, la fatigue de l’étude lui en paraît moins ingrate. […] L’objet d’une école publique n’est point de faire un homme profond en quelque genre que ce soit, mais de l’initier à un grand nombre de connaissances dont l’ignorance lui serait nuisible dans tous les états de la vie, et plus ou moins honteuse dans quelques-uns.
Si l’on ne s’en tenait point à des actions communes, (et j’appelle actions communes toutes celles où un homme en menace ou en tue un autre) mais qu’on imaginât quelque trait de générosité, quelque sacrifice de la vie à la conservation d’un autre, on élèverait mon âme, on la serrerait, peut-être même m’arracherait-on des larmes. […] On y discerne, on est frappé par un cavalier vu par le dos et par la croupe de son cheval blanc et vigoureux ; il porte un étendart qu’un fantassin, qui est à sa gauche, cherche à lui enlever avec la vie ; mais ce cavalier a saisi la garde de l’épée du fantassin, et va lui plonger la sienne dans la gorge. […] On y voit le charme de la nature avec les incidens les plus doux ou les plus terribles de la vie. […] Dans la bataille sur terre, son morceau de réception, le coup de canon, ou plutôt ce ciel, cette fumée teinte d’un feu rougeâtre, est bien ; le cheval blanc dessiné à ravir, belle croupe, tête pleine de vie ; l’animal et le cavalier vont tomber : le cavalier se renverse en arrière ; il a abandonné ses armes ; son cheval est sur la croupe ; les armes sont faites avec précision, et il y a là un tact tout particulier.
— Vie de l’abbé de Rancé. — Inauguration de la statue de Molière. — Discours d’Arago. — Enterrement de Charles Nodier. — Odes et Poëmes, par Victor de Laprade. — Les Jésuites, d’après une brochure du Père Ravignan. — Procès de Janin contre Pyat 176 XLVI. — Projet de loi sur l’instruction secondaire. — Concession aux petits séminaires. — Retour de la critique aux chefs-d’œuvre du XVIIe siècle 183 XLVII. — Opinion d’un gallican sur la brochure du Père Ravignan en faveur des jésuites. — Condamnation de Félix Pyat pour diffamation envers Jules Janin. — Élections de MM. […] Buloz. — Les Bretons, de Brizeux. — Poésies de Théophile Gautier. — Orgueil de la vie 332 LXXXIV. — Béranger en 1845 337 fin de la table.
Trop préoccupé du Cénacle qu’il avait chanté autrefois, il lui a donné dans ma vie littéraire plus d’importance qu’il n’en eut dans le temps de ces réunions rares et légères. […] La vie de garnison n’allait pas plus à de Vigny qu’à moi ; les habitudes des autres officiers qui passaient une grande partie de leurs journées dans les cafés ou ailleurs ne lui convenaient pas.
Mais il faudrait pousser la réflexion à un degré où elle va rarement, et peu d’hommes ont souffert de cette double vie morale, où l’on s’empêche d’agir à force de se regarder faire. […] S’il n’y a pas un homme sur mille qui relise de sa vie, après le baccalauréat, une page de grec ou de latin, combien y en a-t-il même qui, bacheliers ou brevetés, ouvriront un volume de Bossuet, de Corneille on même de Molière pour se divertir ?
Il ne voulut pas qu’un jour on pût lui reprocher ce passé, passé d’erreur sans doute, mais aussi de conviction, de conscience, de désintéressement, comme sera, il l’espère, toute sa vie. […] L’auteur était jeune, il est vieux ; il était présent, il est absent ; il avait alors devant lui l’espérance, maintenant il a derrière lui la vie.
Il déclama toute sa vie contre les grandeurs & les richesses. […] Il vit sa fin du même œil d’indifférence dont il avoit envisagé tous les événemens de la vie.
À Blois, la Vie Blésoise de M. […] Sans distinction d’esthétique et de pensée politique, tous ces jeunes hommes sont mus par un même amour envers leur pays, par un même désir de donner une vie propre à leur province.
Les leçons sur les sciences suffisent lorsqu’elles ont indiqué au talent naturel l’objet particulier qui deviendra l’étude et l’exercice particulier du reste de la vie. […] Il est donc à propos que l’enseignement de ses sujets se conforme à sa façon de penser et qu’on leur démontre la distinction des deux substances, l’existence de Dieu, l’immortalité de l’âme et la certitude d’une vie à venir, comme les préliminaires de la morale ou de la science qui fait découler de l’idée du vrai bonheur, et des rapports actuels de l’homme avec ses semblables, ses devoirs et toutes les lois justes ; car on ne peut, sans atrocité, m’ordonner ce qui est contraire à mon vrai bonheur, et on me l’ordonnerait inutilement.
C’est ainsi qu’à relire, on se compare à soi-même, on note les hausses et les décadences — plus souvent celles-ci — de sa sensibilité ; les pertes et les gains — plus souvent ceux-ci — de notre intelligence générale et de notre intelligence critique, et l’on trace ainsi les courbes de sa vie intellectuelle et morale. Ajoutez que, quel que soit l’auteur qu’on, relise, si l’on sent plus, si l’on sent moins, si l’on comprend plus, si l’on comprend mieux, même si l’on comprend moins ; ce sont en partie les événements mêmes de votre vie qui en sont la cause, et que par conséquent, relire, c’est revivre.
Mais l’intérieur de ces vieilles poitrines de grimpeurs de montagnes ou du cœur de rose de cette fillette, mais la manière de concevoir et de sentir la vie de ce mâle et pauvre curé qui, son bréviaire récité, sa messe dite, se rappelant qu’il est un robuste fils des Alpes, s’en va faire la guerre aux oiseaux du ciel pour nourrir les pauvres de la terre, voilà ce que l’on voudrait voir, voilà ce que Topffer ne nous montre pas avec assez de détails et ce qui n’aurait pas échappé à Sterne, par exemple, ce grand moraliste qui sait aussi fixer en trois hachures un paysage d’un ineffaçable fusain, grand comme l’ongle, mais infini d’expression, et qui reste à jamais, dès qu’on l’a vu, dans la mémoire, comme une pattefiche dans un mur ! […] et l’éclat pur de son rire sonore s’éteindrait dans ce pensif sourire qui traîne aux lèvres de ceux qui ont jugé la vie, comme un bout de velours traîne sur une tombe, — bien doucement et sans faire aucun bruit.
Pour ce blême Leopardi, ce Pierrot mélancolique de la poésie italienne qui chante au clair de lune romantique de son temps, la vie est mal faite et la vieillesse épouvantable, et c’est entre ces deux inspirations monotones que se balance éternellement le triste pantin ! […] Il ne sait pas pourquoi la vie est mal faite, et il a la peur (qui le ratatine déjà) d’être vieux !
Au lieu de l’étrange visionnaire à la sensibilité renversée qui fait le fond d’Edgar Poe ou d’Hoffmann, il y a un écrivain sensible à notre manière, à nous tous, pour tous les phénomènes normaux de la vie, et un observateur du cœur, quand le cœur est rythmé par les sentiments de l’humanité saine et pure. […] Cela suffirait seul pour justifier nos observations sur Erckmann-Chatrian, qui, de nature, n’est pas fait pour ce monde à part, surnaturel et clair-obscur, ou fantastique, et dont le talent n’a qu’au plein jour de la vie réelle et corpulente, sa force et son intensité.
Au siècle de César et d’Auguste, plusieurs Romains célèbres ne goûtaient point du tout les ouvrages d’Isocrate, et sûrement Brutus était de ce nombre ; au siècle de Trajan, Plutarque le peignait comme un orateur faible et un citoyen inutile, qui passait sa vie à arranger des mots et compasser froidement des périodes ; au siècle de Louis XIV, Fénelon le traitait encore plus mal ; Isocrate, selon lui, n’est qu’un déclamateur oisif qui se tourmente pour des sons, avide de petites grâces et de faux ornements, plein de mollesse dans son style, sans philosophie et sans force dans ses idées. […] Il en est d’un peuple qui entend parfaitement une langue, et de l’orateur qui lui parle, comme de deux amis qui ont passé leur vie ensemble, et qui conversent ; les lieux, les temps, les souvenirs attachent pour eux, à chaque mot, une foule d’idées dont une seule est exprimée, et dont les autres se développent rapidement dans l’âme sensible.
Les solides eux-mêmes, ils les réduisaient aux chairs, viscera [vesci voulait dire se nourrir, parce que les aliments que l’on assimile font de la chair] ; aux os et articulations, artus [observons que artus vient du mot ars, qui chez les anciens Latins signifiait la force du corps ; d’où artitus, robuste ; ensuite on donna ce nom d’ars à tout système de préceptes propres à former quelques facultés de l’âme] ; aux nerfs, qu’ils prirent pour les forces, lorsque, usant encore du langage muet, ils parlaient avec des signes matériels [ce n’est pas sans raison qu’ils prirent nerfs dans ce sens, puisque les nerfs tendent les muscles, dont la tension fait la force de l’homme] ; enfin à la moelle, c’est dans la moelle qu’ils placèrent non moins sagement l’essence de la vie [l’amant appelait sa maîtresse medulla, et medullitùs voulait dire de tout cœur ; lorsque l’on veut désigner l’excès de l’amour, on dit qu’il brûle la moelle des os, urit medullas]. […] Quant à l’autre partie de l’homme, qui est l’âme, les poètes théologiens la placèrent dans l’air, chez les Latins anima ; l’air fut pour eux le véhicule de la vie, d’où les Latins conservèrent la phrase animâ vivimus, et en poésie, ferri ad vitales auras, pour naître ; ducere vitales auras, pour vivre ; vitam referre in auras, pour mourir ; et en prose animam ducere, vivre ; animam trahere, être à l’agonie ; animam efflare, emittere, expirer ; ensuite les physiciens placèrent aussi dans l’air l’âme du monde.
Mais tout lac, en reflétant les objets, les décolore et leur imprime une sorte d’humide frisson conforme à son onde, au lieu de la chaleur naturelle et de la vie. […] On surprend là tout à nu l’homme qui plus tard, et déjà tempéré par la méthode, n’a pu s’empêcher de lancer ses ingénieux et hardis paradoxes sur le Sommeil, et qui consacre plusieurs leçons de son cours à la question de la vie antérieure. […] Dubois a écrit et a bien voulu nous lire un récit de cette époque de sa vie où son âme et celle de M. […] Jouffroy disait fréquemment d’une voix pénétrée : « Tout parle, tout vit dans la nature ; la pierre elle-même, le minéral le plus informe vit d’une vie sourde, et nous parle un langage mystérieux ; et ce langage, le pâtre, dans sa solitude, l’entend, l’écoute, le sait autant et plus que le savant et le philosophe, autant que le poëte ! […] Allez, osez, ô Vous dont le drame est déjà consommé au dedans ; remontez un jour en idée cette Dôle avec votre ami vieilli ; et là, non plus par le soleil du matin, mais à l’heure plus solennelle du couchant, reposez devant nous le mélancolique problème des destinées ; au terme de vos récits abondants et sous une forme qui se grave, montrez-nous le sommet de la vie, la dernière vue de l’expérience, la masse au loin qui gagne et se déploie, l’individu qui souffre comme toujours, et le divin, l’inconsolé désir ici-bas du poëte, de l’amant et du sage !
Il le sera en faveur de la physiologie, un peu aux dépens de la psychologie ; le but sera de montrer que le souvenir conscient est une simple « efflorescence », dont les racines plongent bien avant dans la vie organique ; « la mémoire est, par essence, un fait biologique ; par accident, un fait psychologique ». […] On sait que des gravures exposées aux rayons solaires et conservées dans l’obscurité peuvent, plusieurs mois après, à l’aide de réactifs spéciaux, révéler la persistance de la vibration lumineuse sur leur surface67. — Mais comment, objectent les adversaires de vibrations persistantes dans le cerveau, tant de mouvements et d’ondulations en sens divers pourraient-ils trouver place et se propager dans le cerveau pendant toute la vie ? […] Qu’y aurait-il d’étonnant à ce que les ondulations du cerveau se propageassent, sous une certaine forme, pendant la vie entière et à ce qu’une sensation pût reparaître en l’absence de sa cause, comme le rayon de l’étoile semble se rallumer dans la nuit ? […] Pour le philosophe qui généralise, si on laisse de côté la sensibilité et la conscience, la vie elle-même offre-t-elle extérieurement autre chose qu’un mécanisme perfectionné ? […] Ici encore, nous voyons les sentiments, et surtout ceux des jeunes années, résister mieux que les idées à l’influence destructive de la maladie, tant il est vrai que la sensibilité et la volonté sont le fond de la vie même et conséquemment de la mémoire.
Voltaire, philosophe, historien, critique, érudit, commentateur, poète épique, poète dramatique, poète satirique, poète burlesque et scandaleux, poète léger et rival en grâce d’Horace son maître ; Voltaire surtout, correspondant de l’univers et répandant dans ses lettres familières, chef-d’œuvre insoucieux de soixante-dix ans de vie, plus de naturel, d’atticisme, de souplesse, de grâce, de solidité et d’éclat de style qu’il n’en faudrait pour illustrer toute une autre littérature. […] Je voulais que la France créât le budget des lettres ; je voulais que l’écrivain, le savant, l’artiste de tous les genres de culture d’esprit, après avoir consacré onéreusement sa vie à l’utilité ou à la gloire, cette utilité suprême de son pays, ne reçût pas pour tout salaire de cette noble abnégation de vie, un misérable subside de douze cents francs, inférieur aux gages d’un mercenaire, et distribué parcimonieusement à quarante privilégiés de la détresse à la porte d’une académie ouverte de temps en temps par la mort. […] Je ne voudrais d’autre preuve de cette immatérialité de la révolution française au commencement, que ceci : c’est que le jour où cette révolution donna son premier signe de vie en France, elle ne fut plus française, elle fut européenne et même universelle ; c’est que l’Europe tout entière, attentive, haletante, passionnée, ne fut plus en Europe, mais à Paris ; c’est que chaque grand esprit de chaque nation étrangère, Fox, Burke, Pitt lui-même en Angleterre ; Klopstock, Schiller, Goethe en Allemagne ; Monti, Alfieri en Italie, la saluèrent dans leurs discours, dans leurs poèmes ou dans leurs hymnes, comme l’aurore non d’un jour français, mais d’un jour nouveau et universel, qui allait se lever sur le monde et dissiper les ténèbres épaissies depuis des siècles de barbarie sur l’esprit humain ? […] Au banquet de la vie à peine commencé, Un instant seulement mes lèvres ont pressé La coupe en mes mains encor pleine.
Elle aurait en même temps « plusieurs des caractères que connote ce mot dereligion : grâce à la naturesurnaturelledes objets de son culte ; à son règlement universel de vie ; à la rigueur de sa discipline morale ; et à la forme réellement extatique et mystiquement inspirée de sa production. » L’énumération n’est pas complète : ces caractères ne sont pas les seuls qui distinguent la religion positiviste de tant d’autres essais de religion rationnelle ; et je me propose de le montrer dans une prochaine étude sur La Religion comme sociologie. […] La conception de la vie n’est plus pour nos physiologistes ce qu’elle pouvait être pour Cabanis ou pour Bichat ; le tableau de la nature n’est plus pour nous ce qu’il était pour les contemporains de l’auteur du Cosmos. […] Un petit procédé pour se former le bon sens, une façon de se bien poser dans la vie, et d’acquérir d’utiles et curieuses connaissances. […] De menus détails, capables de piquer la curiosité des esprits actifs et de servir de passe-temps à ceux qui n’ont rien de mieux à faire, fort indifférens pour celui qui voit dans la vie une chose sérieuse, et se préoccupe avant tout des besoins religieux et moraux de l’homme.La science ne vaut qu’autant qu’elle peut rechercher ce que la révélation prétend enseigner5. » Ai-je besoin de citer encore ? […] Obligée de convenir aujourd’hui qu’elle ne va pas au fond des choses, — que le sous-sol de son domaine, pour ainsi dire, échappe à son exploitation, — et quelle ne saurait nous dire ni ce que c’est que la chaleur, ni ce que c’est que la vie, ni ce que c’est que la pensée, quels titres aurait-elle à nous parler de notre destinée, des lois de notre conduite ou de la force qui gouverne le monde ?
Le seul but c’est le drame lui-même, c’est à dire l’action, la passion, la vie. […] Aujourd’hui même et dans cette église aura lieu le concours de chant ; Walter, à ce mot, se sent naître à une vie nouvelle. […] Armbruster sur la vie, la théorie et les œuvres de R. […] Les trois moments de la vie de Wagner sont révélateurs de la pensée de Wolzogen. […] La fin de sa vie est souvent considérée comme un retour au conservatisme.
La vie ne paraît qu’un instant auprès de l’éternité, et la félicité humaine, un songe ; et, s’il faut parler franchement, ce n’est pas seulement contre la mort qu’on peut tirer des forces de la foi ; elle nous est d’un grand secours dans toutes les misères humaines ; il n’y a point de disgrâces qu’elle n’adoucisse, point de larmes qu’elle n’essuie, point de pertes qu’elle ne répare ; elle console du mépris, de la pauvreté, de l’infortune, du défaut de santé, qui est la plus rude affliction que puissent éprouver les hommes, et il n’en est aucun de si humilié, de si abandonné, qui, dans son désespoir et son abattement, ne trouve en elle de l’appui, des espérances, du courage : mais cette même foi, qui est la consolation de misérables, est le supplice des heureux ; c’est elle qui empoisonne leurs plaisirs, qui trouble leur félicité présente, qui leur donne des regrets sur le passé, et des craintes sur l’avenir ; c’est elle, enfin, qui tyrannise leurs passions, et qui veut leur interdire les deux sources d’où la nature fait couler nos biens et nos maux, l’amour-propre et la volupté, c’est-à-dire tous les plaisirs des sens, et toutes les joies du cœur… Vauvenargues avait vingt-quatre ans quand il écrivait ces lignes. […] Aristide lui-même, si on lit sa vie dans Plutarque, n’est pas si simple et si pur qu’on se le figure de loin. […] … Vauvenargues, sous ce masque de Sénèque, ne regarde la littérature que comme un pis-aller : contemporain de Voltaire et déjà son ami, il estime pourtant qu’elle ne compte point assez parmi les hommes pour être le but enviable des efforts sérieux de toute une vie.
Y eut-il jamais, dans la vie d’un peuple militaire et libre, un plus admirable moment et pour ce peuple lui-même et pour les jeunes guerriers dont il était fier, que l’heure où, après une pareille campagne unique par le génie et toute patriotique d’inspiration, toute défensive encore jusque dans ses conquêtes, après n’avoir battu tant de fois l’étranger au dehors et ne l’avoir relancé si loin que pour ne pas l’avoir chez soi au dedans, les enfants de cette triomphante armée d’Italie revinrent dans leurs foyers, simples, modestes, décorés du seul éclat des victoires ? […] » Sans prétendre juger du fond des choses dans des affaires si embrouillées, il est certain pour moi, par la manière dont il est parlé de Joubert dans le récit de Fouché, et par la comparaison des pièces produites dans cette vie même du général, que Joubert, plus ou moins en garde d’abord contre les procédés de Brune, fut bientôt retourné et gagné par Fouché. […] Sa vie est un feuillet déchiré, mais qui précède immédiatement un des plus mémorables chapitres du livre auguste de l’Histoire.
Aussi je m’explique qu’un poète qui n’habitait pas volontiers les sommets humides et blanchâtres, un poète des choses du sang et de la vie, Alfred de Musset, un jour que l’on discutait à l’Académie sur les mérites d’un des recueils de M. de Laprade, se soit penché à mon oreille, et m’ait dit avec impatience : « Est-ce que vous trouvez que c’est un poète, ça ? […] il est poète, quoiqu’il n’ait pas la sainte fureur, ni cet aiguillon de désir et d’ennui, qui a été notre fureur à nous, le besoin inassouvi de sentir ; bienqu’il n’ait pas eu la rage de courir tout d’abord à toutesles fleurs et de mordre à tous les fruits ; — il l’est, bien qu’il ne fouille pas avec acharnement dans son propre cœur pour y aiguiser la vie, et qu’il ne s’ouvre pas les flancs (comme on l’a dit du pélican), pour y nourrir de son sang ses petits, les enfants de ses rêves ; — il l’est, bien qu’il n’ait jamais été emporté à corps perdu sur le cheval de Mazeppa, et qu’il n’ait jamais crié, au moment où le coursier sans frein changeait de route : « J’irai peut-être trop loin dans ce sens-là comme dans l’autre, mais n’importe, j’irai toujours. » — Il l’est, poète, bien qu’il n’ait jamais su passer comme vous, en un instant, ô Chantre aimable de Rolla et de Namouna, de la passion délirante à l’ironie moqueuse et légère ; il est, dis-je, poète à sa manière, parce qu’il est élevé, recueilli, ami de la solitude et de la nature, parce qu’il écoute l’écho des bois, la voix des monts agitateurs de feuilles, et qu’il l’interprète avec dignité, avec largeur et harmonie, bien qu’à la façon des oracles. […] Ainsi dans chacun de ces morceaux, dans chacune de ces thèses où il disserte, et où parfois il déclame, il faut voir comme il prêche pour son saint, comme il exagère le spiritualisme dans la vie, comme il accuse le machinisme qui bien souvent n’en peut mais, et le voit à tout bout de champ en travers de sa route, comme il exagère le respect, la vénération, le sérieux, la crainte du rire !
Il y apparaît éloquent, enthousiaste, religieux à la fois et bon Français, et, pour parler son langage, « tout rayonnant des meilleures ardeurs de la vie. » Je ne saispas, en vérité, de plus noble prose ni dont la presse doive être plus fière. […] Frappé dans ses joies de famille, dans ses affections profondes, il a gémi ; il n’a pas seulement prié, il a chanté : écoutez ce chant imprévu qui révèle dans cette âme de lutte et de combat des sources vives de tendresse : Je ne suis plus celui qui, charmé d’être au monde, En ses âpres chemins avançait sans les voir ; Mon cœur n’est plus ce cœur surabondant d’espoir, D’où la vie en chansons jaillissait comme une onde. […] Avant qu’il fût deux mois, De mes tremblantes mains j’en ensevelis trois ; Je les vois, mais non plus dans la fleur de la vie ; Non plus avec ces traits dont j’avais trop d’orgueil, Au baiser paternel offrant leurs jeunes têtes ; Mais telles que la mort, hélas !
Fervel une expression de vie et un relief que rien ne saurait plus désormais effacer. […] Que le Dugommier vif et franc, brave et simple autant qu’habile, et dont les talents n’éclatèrent également qu’à la fin de la carrière, paraît donc supérieur à ce Dumouriez, qui fut un libérateur aussi à son heure, mais qui ternit sa gloire, de tout temps un peu équivoque, par les intrigues manifestes et les manigances prolongées de sa dernière vie ! […] Guerre, art, poésie, philosophie, imagination ou réalité, heureux qui trouve à quoi se prendre une dernière fois dans sa vie, entre les belles causes qui demandent et appellent l’étincelle sacrée !
On disait cela à l’auteur de Madame Bovary ; on le pressait de recommencer sans précisément récidiver, d’assurer son précédent succès par un autre un peu différent, mais sur ce même terrain encore de la réalité et de la vie moderne. […] Flaubert, voyageur en Orient, en Syrie, en Egypte et dans le nord de l’Afrique, a cru pouvoir, à l’aide du paysage où il sait si bien lire, à l’aide des mœurs et des physionomies de race plus persistantes là qu’ailleurs, et moyennant des inductions applicables aux peuples de même souche et aux civilisations de même origine, rapprocher et grouper dans un même cadre une masse de faits, de notions, de conjectures, et il s’est flatté d’animer cet ensemble qu’il appellerait Carthage, de manière à nous intéresser en même temps qu’à nous initier à la vie punique si évanouie, et qui n’a laissé d’elle-même aucun témoignage direct. […] L’ignorance même où l’on est de la vie habituelle et du tous les jours de ce peuple laissait d’autant plus le champ libre à M.
L’esprit de parti unit les hommes entre eux par l’intérêt d’une haine commune, mais non par l’estime ou l’attrait du cœur ; il anéantit les affections qui existent dans l’âme, pour y substituer des liens formés seulement par les rapports d’opinion : l’on sait moins de gré à un homme de ce qu’il fait pour vous que pour votre cause ; vous avoir sauvé la vie est un mérite beaucoup moins grand à vos yeux que de penser comme vous ; et, par un code singulier, l’on n’établit les relations d’attachement et de reconnaissance qu’entre les personnes du même avis : la limite de son opinion est aussi celle de ses devoirs ; et si l’on reçoit, dans quelques circonstances, des secours d’un homme qui suit un parti contraire au sien, il semble que la confraternité humaine n’existe plus avec lui, et que le service qu’il vous a rendu est un hasard qu’on doit totalement séparer de celui qui l’a fait naître. […] Il y a un moment de jouissance dans toutes les passions tumultueuses, c’est le délire qui agite l’existence, et donne au moral l’espèce de plaisir que les enfants éprouvent dans les jeux qui les enivrent de mouvement et de fatigue : l’esprit de parti peut très bien suppléer à l’usage des liqueurs fortes ; et si le petit nombre se dérobe à la vie par l’élévation de la pensée, la foule lui échappe par tous les genres d’ivresse ; mais quand l’égarement a cessé, l’homme qui se réveille de l’esprit de parti, est le plus infortuné des êtres. […] Aussi se réveilleront-ils un jour ceux qui seuls sont sincères, ceux qui seuls méritent les regrets ; accablés de mépris, tandis qu’ils auraient besoin de considération ; accusés du sang et des pleurs, tandis qu’ils seront encore capables de pitié ; isolés dans l’univers sensible, tandis qu’ils pensaient s’unir à toute la race humaine ; ils éprouveront ces douleurs alors que les motifs qui les ont entrainés auront perdu toute réalité, même à leurs yeux, et ne conserveront de la funeste identité, qui ne leur permet pas de se séparer de leur vie passée, que les remords pour garants ; les remords, seuls liens des deux êtres les plus contraires ; celui qu’ils se sont montrés sous le joug de l’esprit de parti ; celui qu’ils devaient être par les dons de la nature.
« En prétendant négliger les accidents de temps et d’espace pour ne nous montrer que des vérités éternelles, vous méconnaissez une loi de la vie, qui est de réaliser l’universel, mais seulement dans les individus. » C’est au plus un reproche imputable aux romantiques, et plus exactement aux derniers classiques. […] Ohnet, dont la mentalité m’est mal connue, c’est le réserviste Déroulède, expert en tirs, c’est un sportsman, Guy de Maupassant, doué d’ailleurs d’un sens très violent de la vie et d’une fameuse facilité littéraire, mais d’instruction superficielle, et c’est un marin, M. […] Devant la médiocrité des emplois administratifs, d’anciens élèves d’Écoles, normale, même centrale et polytechnique, des archivistes, des agrégés de philosophie, pensèrent à gagner la vie littéraire.
On trouverait lit de singuliers mélanges, la soif de la volupté unie à la crainte du lendemain de la vie, la sensibilité débridée faisant ménage avec une religiosité hystérique, etc. […] On cherchera la conception que l’auteur se faisait du monde extérieur, de la société humaine, de la vie, de l’art, de l’ensemble des choses. […] On y aperçoit bien vite un pessimisme violent qui n’est autre chose qu’une tendance à rabaisser l’homme et à dégoûter de la vie.
Langhans) ; calendrier ; dates de la vie du maître ; le ciel germanique (W. […] Laurens, Les grands artistes, leur vie, leur œuvre (1910). […] Il est l’auteur de Richard Wagner, les étapes de sa vie, de sa pensée et de son temps, paru de façon posthume (Paris, Hachette, 1923).
Ce grand poëte eut toujours dans le cœur un germe de religion, lequel se développa parfaitement sur la fin de sa vie, & la rendit exemplaire. […] Un auteur ; dans un ouvrage sérieux, mais que plusieurs anecdotes hasardées déparent, prétend que l’antipathie de Despréaux pour les dindons apportés en France par les jésuites, vint de ce qu’un de ces animaux avoit blessé ce poëte, encore enfant, dans une partie très-sensible, & si cruellement qu’il ne put en faire usage de sa vie. […] Il passa les dernieres années de sa vie à Auteuil, s’y occupant de dieu, de l’étude & de ses amis.
Nous trouvons cette sorte d’amour énergiquement exprimée dans une pièce de vers inédits adressée à un jeune homme qui se plaignait d’avoir passé l’âge d’aimer : Va, si tu veux aimer, tu n’as point passé l’âge ; Si le calme te pèse, espère encore l’orage ; Ton printemps fut trop doux, attends les mois d’été ; Vienne, vienne l’ardeur de la virilité, Et, sans plus t’exhaler en pleurs imaginaires, Sous des torrents de feu, au milieu des tonnerres, Le cœur par tous les points saignant, tu sentiras, Au seuil de la beauté, sous ses pieds, dans ses bras, Tout ce qu’avait d’heureux ton indolente peine Au prix de cet excès de la souffrance humaine ; Car l’amour vrai, tardif, qui mûrit en son temps, Vois-tu, n’est pas semblable à celui de vingt ans, Que jette la jeunesse en sa première sève, Au blondi duvet, vermeil et doré comme un rêve ; C’est un amour profond, amer, désespéré, C’est le dernier, l’unique ; on dit moins, j’en mourrai ; On en meurt ; — un amour armé de jalousie, Consumant tout, honneur et gloire et poésie ; Sans douceurs et sans miel, capable de poison, Et pour toute la vie égarant la raison. L’amour de Diderot pour mademoiselle Voland fut un de ces amours de l’été de la vie, profonds, mûris, irrémédiables, et qui ne demanderaient que des obstacles pour devenir orageux.
Turquety a cherché à se créer un rôle propre parmi les poètes modernes ; retiré dans sa Bretagne, il a consulté les graves et habituelles préoccupations d’une vie monotone que les seuls rayons mystiques éclairaient parfois. […] Voici, par exemple, une petite pièce qui a un bouquet d’anthologie chrétienne, autant qu’en un genre tout contraire une petite épigramme de l’anthologie grecque peut sentir son Hymette et son Musée : Le pèlerin Regardant une étoile au ciel épanouie, Un jeune homme marchait ; son léger manteau bleu Diminuait toujours : ce manteau, c’est la vie, Le voyageur c’est l’âme, et l’étoile c’est Dieu, Mais les essais de vers blancs, qui terminent le volume, ne sont pas heureux ; mais on n’échappe jamais tout à fait, dans cette langue française adoptive, à des accents du premier terroir.
La clarté de ses vers et le noble exemple de sa vie impressionnent tous les jeunes gens que le Midi produit en rangs pressés et qui, portant au cœur l’amour de la patrie natale, s’aventurent cependant dans la littérature française vivifiée et embellie de leur lumineuse vigueur. […] Il apparaît une figure presque unique en Europe, aujourd’hui, non seulement par son œuvre, mais par sa vie, ses attitudes, tous les gestes de sa pensée, son influence sur une race entière, ce je ne sais quoi, ce fluide, ce halo dont sa tête et son nom s’auréolent.
Ces solutions satisfont aux problèmes constants que lui semble soulever la vie moderne. […] Concevoir le monde comme un militarisme psychologique, à qui convient une théorie et une seule, envisager comme identiques les infiniment variées positions morales dont le nom seul est commun, et comme comportant une solution (qu’on va vous dire), imaginer qu’on a formulé la vie quand on a trouvé cinq ou six problèmes abstraits, est-ce le fait d’« une des plus hautes intelligences de notre temps » ou d’un Homais raisonneur et borné ?
salués d’applaudissements de triomphe, des milliers de savants s’emploieront à des investigations physiques presque infinitésimales ; à rechercher la composition atomique et la structure microscopique du corps ; à explorer les formes innombrables de la vie animale et végétale, invisibles à l’œil tout seul ; à découvrir des planètes qui ont parcouru, inconnues pendant des siècles, leurs orbites obscurs ; à condenser, par la puissance du télescope, en soleils et systèmes, ce qui était regardé récemment encore comme la vapeur élémentaire des étoiles ; à traduire en formules numériques l’inconcevable rapidité des vibrations qui constituent ces rayons, si fermes en apparence que les plus forts vents ne les ébranlent pas ; à mettre ainsi en vue les parties les plus mystérieuses de l’univers matériel, depuis l’infiniment loin jusqu’à l’infiniment petit ; mais l’analyse exacte des phénomènes de conscience, la distinction entre les différences, si fines pourtant et si petites, des sentiments et des opérations ; l’investigation attentive des enchaînements les plus subtils de la pensée, la vue ferme mais délicate de ces analogies mentales qui se dérobent au maniement grossier et négligent de l’observation vulgaire, l’appréciation exacte du langage et de tous ses changements de nuances et de tous ses expédients cachés, la décomposition des procédés du raisonnement, la mise à nu des fondements de l’évidence : tout cela serait stigmatisé comme un exercice superflu de pénétration, comme une perte de puissance analytique, comme une vaine dissection de cheveux, comme un tissage inutile de toiles d’araignées ? […] La vie pratique dépend tout entière de ce principe qu’on rejette en spéculation.
Deux Démons, à leur gré, partagent notre vie, Et de son patrimoine ont chassé la Raison : Je ne vois point de cœur qui ne leur sacrifie ; Si vous me demandez leur état & leur nom, J’appelle l’un Amour, & l’autre Ambition. […] Du titre de Clément rendez-le ambititieux ; (Louis XIV) C’est par-là que les Rois sont semblables aux Dieux Du magnanime Henri qu’il contemple la vie ; Dès qu’il put se venger il en perdit l’envie ; Inspirez à Louis cette même douceur : La plus belle victoire est de vaincre son cœur.
« On a vu, dit-il, trois mois durant, certain nombre de ceux de sa faction sortir tous les matins de leur quartier, & prendre leur département de deux en deux, avec ordre de m’aller rendre de mauvais offices en toutes les contrées du petit monde & de semer par-tout leur doctrine médisante, avec intention de soulever contre moi le peuple, & le porter à faire de ma personne ce que leur supérieur a fait de mon livre… Ils ont été rechercher, pour grossir leur troupe, des hommes condamnés par la voix publique, fameux par leurs débauches & par le scandale de leur vie, connus de toute la France par les mauvais sentimens qu’ils ont de la foi. » Toutes les actions du P. […] Ses sujets offroient eux-mêmes les mémoires de sa vie.
Ce que je regrette en présence de votre génération, ce que je vous reprocherais même si vous étiez seuls responsables de cet inquiétant abandon des intelligences, c’est l’affaiblissement chez la plupart d’entre vous, chez quelques-uns même l’absence d’un sentiment qui propage la flamme et la vie et dans toute l’étendue de son empire agrandit la nature humaine. […] Pour vous aussi dès maintenant la vie est une ascension vers le vrai, vers le beau ; adoptez donc franchement la devise du voyageur et chaque jour dites-vous aussi : « Plus haut !
Y a-t-il plus de bien que de maux dans la vie ? […] Il faudrait pouvoir observer pendant toute la vie le jeu du cerveau, du cœur, du diaphragme, des entrailles, et avoir la vue assez subtile, assez perçante pour en appercevoir les oscillations les plus imperceptibles.
Enfin dans une nation industrieuse et capable de prendre toute sorte de peine pour gagner sa vie sans être assujettie à un travail reglé, il s’est formé un peuple entier de gens qui cherchent à faire quelque profit par le moïen du commerce des tableaux. […] Notre vie est un perpetuel embarras, ou bien pour faire une fortune capable de satisfaire à nos besoins qui sont sans bornes, ou bien pour la maintenir dans un païs où il n’est pas moins difficile de conserver du bien que d’en acquérir.
même sans la foi religieuse qu’il n’a pas, l’historien n’a point le droit de n’en pas tenir compte dans la vie des hommes dont il écrit l’histoire ; car cette foi religieuse, même inconséquente, même violée et faussée par les passions qui entraînent hors de Dieu, fût-ce dans les voies les plus scélérates, cette foi religieuse, tombée et ravalée jusqu’au fanatisme de Philippe II, par exemple, est encore une grande chose, qui grandit l’homme par le Dieu qu’elle y ajoute, et qui, s’imposant au moraliste dans l’historien, doit le forcer à s’occuper d’elle. Or, c’est justement l’étude de cette grande chose qui plane sur toute la vie de Philippe II et qui le met à part, dans l’Histoire, lui et le XVIe siècle, c’est cette grande chose qui se trouve oubliée dans le livre de Forneron, où, excepté cette grande chose, il a tout vu.
Voilà sa vie. […] Il a, si vous voulez, une certaine force de métier, mais il n’en a jamais assez pour rentrer, par le fait de cette force, dans le naturel de la vie.
Il a beaucoup salué dans sa vie, et il est dans la catégorie des bohèmes qui ont un chapeau. […] Mais une telle femme manquerait de fierté ou manquerait de laquais, si elle ne faisait pas jeter hors de chez elle les hommes qui foulent aux pieds toutes les convenances de la pensée et de la vie !
Si le grand estropié qui fut Cervantes resta malheureux jusqu’à sa dernière heure, broyé par la Misère, cette divine marâtre qui pétrit si bien le génie et l’imbibe de ses meilleurs parfums, au moins son œuvre eut-elle, après sa mort, le bonheur qu’il ne connut pas, lui, pendant sa vie. […] Ricaneur éveillé par la vieillesse, à qui les oreilles d’âne d’une raison trop positive poussent sur un front ingénu et ouvert comme celui d’Homère, c’est par la tristesse, la douce, la patiente, la sublime tristesse, que, poète et chrétien dépaysé, il se retrouve dans l’infini, du fond des réalités de la vie !
Condillac qui dormait, lui, dans sa tombe, du sommeil non des justes, mais des ennuyés qui ont fini par s’écouter, Condillac au grêle système, le Pygmalion mystifié de cette statue qu’il ne put jamais animer, Condillac revient à la vie et à la mode de par Taine, à la mode lui-même, et cela après les travaux des Écoles écossaise, française et allemande, après Reid, Dugald-Stewart, Royer-Collard, Jouffroy, Cousin, Kant, Fichte, Schelling, Hegel. […] Mais, encore une fois, la punition de cela, le sans inconvénient de cela, c’est l’ennui, l’ennui qui sort de ces pages sèches, où il n’y a que des mots sans vie et des abstractions scientifiques.
III Mais ce que Béranger, qui a tourné le dos à son talent pendant la plus grande partie de sa vie, n’avait pas prévu, M. […] Pierre Dupont me paraît légèrement chétif en comparaison de ce robuste jeune homme qui aurait mordu, avec ses dents si belles, dans toutes les jouissances de la civilisation et de la vie, comme dans un morceau de pain blanc !
Et, en effet, Paul Meurice vaut bien, après tout, la plupart des romanciers de ce temps ; et de talent il était bien capable de nous dresser en pied un Césara grandiose qui aurait été un double héros, tout à la fois le héros de la vie publique et celui de la vie privée. […] Et non seulement le héros de la vie publique est misérablement rapetissé dans ces fades mièvreries d’un jouvenceau et d’un poète, mais l’autre héros, le héros de la vie privée, disparaît aussi dans cet amour benêt… et adultère ; car le noble Césara est marié.
Ainsi, pour salaire de ses mensonges, il eut l’ingratitude d’un tyran, une vie honteuse, une mort sanglante, et le déshonneur chez la postérité : c’était bien la peine d’être vil. […] avec l’esprit qu’il a, on s’en passe ; la vie ?
Il faut voir dans les lettres de Pline même, tous les détails de cette union si douce ; on partage et l’on envie les charmes de leur amitié : ils voulaient vivre, ils voulaient mourir ensemble ; ils désiraient, quand ils ne seraient plus, que la postérité unît encore leurs noms, comme leurs âmes l’avaient été pendant la vie. […] Tel est celui où il parle de la vie farouche et solitaire de Domitien, qu’il peint « enfermé dans son palais, comme une bête féroce dans son antre, tantôt s’y abreuvant, pour ainsi dire, du sang de ses proches, tantôt méditant le meurtre des plus illustres citoyens, et s’élançant au-dehors pour le carnage.
L’argent et les honneurs valent mieux que la gloire : Il faut soigner sa vie et non pas sa mémoire. […] Que me sert d’enrichir l’éditeur de mes œuvres, Si j’ai toute ma vie avalé des couleuvres ?
que ma vie s’écoule en silence ignorée des citoyens ! […] ici la source d’une vie toute puissante.
Oui, Molière, j’ose entreprendre de te montrer sous ces divers rapports, et le lecteur, impatient de te connaître par les traits qui te caractérisent le mieux, me saura gré sans doute de passer légèrement sur les trente-huit premières années de ta vie ; ton génie ne s’y manifestant que par intervalles, préparait plus de vingt chefs-d’œuvre, et moins de trois lustres devaient les créer comme par enchantement. […] Voltaire, partageant cette erreur, a écrit dans une vie de Molière : « Cette petite pièce faite en province, prouve assez que son auteur n’avait en vue que le ridicule des provinciales ; mais il se trouva depuis que l’ouvrage pouvait convenir à la cour et à la ville. » Je demande si les ridicules qui, du temps de Molière, caractérisaient les femmes les plus célèbres de Paris, pouvaient avoir pris naissance dans la province ? […] La scène où Sganarelle consulte quatre médecins sur la maladie de sa fille est évidemment calquée sur celle où Demiphon consulte quatre avocats, mais, les hommes tenant plus à la vie qu’au gain d’un procès, le comique et la moralité de la scène française croissent avec l’importance de l’objet, et par le choix des charlatans mis en action. […] Ils ignoraient que la précision, la facilité d’une prose naturelle, donnent quelquefois, et suivant le genre d’une pièce, autant d’âme, autant de vie, et plus de rapidité, à une action dramatique, que tous les prestiges de la versification. […] , et à la suite duquel les convives, pris de vin, résolurent d’aller se jeter dans la rivière, autant pour se débarrasser, disaient-ils, d’une vie toujours orageuse, que pour avoir le plaisir de mourir ensemble.
Les uns, romanciers à grands sentiments ou tragiques doucereux, inventaient des modes de penser et de sentir que l’âme humaine n’avait jamais éprouvés, un héroïsme plus héroïque, un amour plus amoureux que tout ce qu’on voit dans la vie. […] Le grand Corneille obscurcissait parfois son grand et droit sens de la vie, sa sûre et vive science des caractères, par l’ambition de faire grand ou fin, et par condescendance pour le goût d’un public à qui la nature ne suffisait pas encore. […] Molière, le premier, renonçait aux bouffonneries fantastiques et aux énormes charges où la comédie s’était d’abord arrêtée : plus de parasites, ni de matamores, mais des êtres réels, vivants, que le spectateur a rencontrés plus d’une fois dans la vie, qui sont autour de lui, qui sont lui parfois. […] , cette imagination m’irrite plus qu’elle ne m’attire… Voyez nos grands romanciers contemporains : leur talent ne vient pas de ce qu’ils imaginent, mais de ce qu’ils rendent la nature avec intensité… Tous les efforts de l’écrivain tendent à cacher l’imaginaire sous le réel… Vous peignez la vie : voyez-la avant tout telle qu’elle est, et donnez-en l’impression.
Il y a des monceaux de ruines et des flaques de sang dans sa vie. […] Voilà donc le dieu demandé, le justicier invoqué, un bravo d’affaires qui tue un homme, par spéculation, pour assurer la vie d’un ingénieur qui lui rapportera un bénéfice de vingt-cinq pour cent. […] Ce fils ne semble guère plus compter dons sa vie de luxe qu’un marmouset de vieux saxe sur son étagère. — « Drôle de maison ! […] C’est d’un drame ou d’un roman d’il y a quarante ans qu’il semble débarquer dans la vie actuelle.
Il ne faut pas craindre de nommer les choses et les époques par leur nom ; et le nom sous lequel le xviiie siècle peut le plus justement se désigner à beaucoup d’égards, pour le goût, pour le genre universellement régnant alors dans les arts du dessin, dans les modes et les usages de la vie, dans la poésie même, n’est-il pas ce nom galant et pomponné qui semblait fait exprès pour la belle marquise et qui rimait si bien avec l’amour ? […] Longtemps maladif dans son enfance, le jeune roi, dont la vie semblait ne tenir qu’à un souffle, avait été élevé avec des précautions excessives, et on lui avait épargné tout effort, plus même qu’il n’était d’usage avec un prince. […] Mme de La Tour-Franqueville, témoin peu suspect, écrivait à Jean-Jacques Rousseau (6 mai) : Le temps a été si affreux ici tout le mois passé, que Mme de Pompadour en a dû avoir moins de peine à quitter la vie. […] ma vie est comme celle du chrétien, un combat perpétuel.
Il n’avait pourtant point dirigé ses premières vues du côté de la vie des cloîtres : mais, un jour qu’il était à la chasse avec quelques jeunes gens de son âge, son cheval le renversa et l’entraîna quelque temps, le pied engagé dans l’étrier. […] Enfin l’abbé Prévost (c’est tout simple) proposait un plan agréable, expéditif et un peu mondain, et il n’entrait pas dans celui de dom Rivet, dont l’originalité était dans le complet même : Ce sont, disait encore dom Rivet insistant sur ce plan qu’il voulait fertiliser à force de patience et animer d’une certaine vie suffisante aux esprits solides, ce sont les monuments connus de la littérature gauloise et française, recherchés avec soin, réunis avec méthode, rangés dans leur ordre naturel, éclaircis avec une juste étendue, accompagnés des liaisons convenables, dont nous formons l’Histoire littéraire de la France. […] Un simple mot d’un biographe de dom Rivet nous ouvre un jour au passage sur cette vie mortifiée, dont la flamme intérieure nous est inconnue.
Oui, il serait à souhaiter qu’on en eût une pareille de tous les règnes, au moins de tous les grands règnes ; car ces mémoires « représentent avec la plus désirable précision, Saint-Simon le reconnaît un peu plus loin, le tableau extérieur de la Cour, de tout ce qui la compose, les occupations, les amusements, le partage de la vie du roi, le gros de celle de tout le monde ». […] Que de choses indispensables, de particularités à apprendre sur les usages, les habitudes, les circonstances journalières de la vie ! […] Nous savons à point nommé le jour où Monseigneur a pris le plus grand loup qu’il ait pris de sa vie (jeudi 24 octobre 1686, à Fontainebleau).
Amoureux dès l’âge de neuf ans de la jeune Béatrix, qui n’en avait que huit, Dante conserva toute sa vie le culte inconcevable de cette ardeur qui semblerait fabuleuse si elle n’était d’accord avec les idées raffinées qui se professaient en cet âge chevaleresque. […] Dans une langue qui ne savait guère encore, comme il le dit, que bégayer papa et maman, il trouva moyen d’exprimer le fond de l’univers et la cime des subtilités divines. — Pour nous il a fait plus : il a fait entrer dans le langage du genre humain nombre de ces paroles décisives qui marquent les grands moments de la vie et de la destinée, ou qui fixent la note inimitable de la passion, et qui se répéteront telles qu’il les a dites, tant qu’il y aura des hommes. […] Pope, s’entretenant avec ses amis, racontait combien de cruels moments il avait passés dans les premiers temps qu’il avait entrepris de traduire Homère : il se sentait effrayé de son engagement ; c’était une inquiétude qui le poursuivait partout, c’était pour lui un cauchemar dont il aurait désiré qu’on le délivrât, disait-il, même au prix de la vie.
Il y avait là, convenons-en, de quoi faire, enrager un gentilhomme de bonne race et lui faire manger son cœur ; et c’est en effet à quoi Bussy passa le reste de sa vie. […] On sait peu de chose de la vie de Tallemant ; il paraît avoir exercé une charge de finance (contrôleur provincial ancien des régiments au département de la Basse Bretagne, c’est ainsi que cela s’appelait). […] À moins qu’il ne soit persuadé qu’il y va de la vie des gens, il ne leur gardera pas le secret.
La première partie du moins, qui contient la narration de sa vie jusqu’à l’âge de cinquante-cinq ans, est tout à fait intéressante ; on est bien aise d’y trouver quantité d’anecdotes littéraires ou historiques qui ne sont point ailleurs. […] Le mariage royal de la princesse Marie apporta un changement notable dans le genre de vie et dans les idées de Marolles. […] Marolles, en embrassant ce genre de vie, avait-il donc besoin d’être consolé de quelque chose ?
Ce qu’était Buffon dans l’habitude de la vie, dans le train et le ton ordinaire de sa pensée, on le sait à présent, et l’on peut s’en faire une idée exacte, sans exagération, sans caricature. […] Littéralement, Buffon n’avait pas à grandir ni à déchoir ; le grand écrivain en lui est dès longtemps hors de cause et ne saurait dépendre de ce qu’il peut y avoir d’un peu commun dans ses lettres : moralement, sa correspondance nous le montre partout, et dans toute la teneur de sa vie, sensé et digne. […] D’ailleurs, il s’intéresse peu aux querelles d’auteurs ; il est lui-même et sera toujours très peu auteur dans sa vie, dans ses lettres.
J’aime à croire que non, car le fond de mon opinion est le même ; mais j’aime tout ce qui est de l’homme quand l’homme est distingué et supérieur ; je me laisse et me laisserai toujours prendre à la curiosité de la vie, et à ce chef-d’œuvre de la vie, — un grand et puissant esprit ; avant de la juger, je ne pense qu’à la comprendre et qu’à en jouir quand je suis en présence d’une haute et brillante personnalité. […] C’est le présent dont nous sommes les témoins intelligents, qui éclaire pour nous le passé ; c’est la vie présente et que nous vivons, qui nous apprend à bien lire dans l’histoire, dans cette histoire humaine qui n’a été qu’un perpétuel mouvement.
quand on publie ses Mémoires de son vivant, on s’expose à un jugement complet de son vivant ; on le réclame ; car ne demander qu’un simple jugement littéraire en venant présenter au public toute sa personne, toute sa vie, ce serait par trop diminuer le droit du lecteur et rabaisser sa juridiction. […] On l’attendait à cet endroit critique de sa vie parlementaire, où la ligne de conduite qu’il suivit lui fut si fort reprochée. […] Même pour les plus honnêtes gens, la politique n’est pas une œuvre de saints ; elle a des nécessités, des obscurités que, bon gré, mal gré, on accepte en les subissant ; elle suscite des passions, elle amène des occasions de complaisance pour soi-même auxquelles nul, je crois, s’il sonde bien son âme après l’épreuve, n’est sûr d’avoir complètement échappé ; et quiconque n’est pas décidé à porter sans trouble le poids de ces complications et de ces imperfections inhérentes à la vie publique la plus droite fera bien de se renfermer dans la via privée et dans la spéculation pure. » Quoi qu’il en soit, on vit là un de ces beaux duels où l’appétit des ambitions et la passion du jeu firent taire la prudence.
Sa thèse latine eut pour objet Swift, sa Vie et ses Œuvres. […] Mais déjà sa pensée était autre part : il se sentait un peu exilé, même dans cette ville lettrée et bienveillante aux talents ; car rien ne supplée au mouvement et à la vie. […] Il a dans ce dernier genre de très jolis morceaux que je me reprocherais de ne pas indiquer, sur l’Enfer, sur l’autre vie ; un charmant et bel article sur Spinosa.
Maintenant qu’on a une première idée du personnage, il va nous raconter lui-même sa vie, non sans finesse, mais cependant avec une bonhomie parfaite. […] Dans la vie d’un homme, il y a toujours des circonstances décisives qui l’enlèvent à la génération dont il procède, pour le placer au milieu de celle dont il fait partie. […] Si l’on peut trouver qu’il insiste un peu trop sur quelques élèves, dont les noms sont restés parfaitement inconnus, par exemple sur Gautherot « à la dartre vive », il résulte de cette suite de croquis d’après nature une impression totale pleine de vie et de mouvement.
Professeur pendant quatre années à Strasbourg, puis quatre autres années à Aix, du temps de Prevost-Paradol et de Weiss, il a, dans cette vie laborieuse de province, amassé des provisions de savoir qu’il accroît journellement et qu’il distribue désormais avec bon sens, gravité, justesse, avec un talent très-remarquable d’ordonnance et de composition, aux fortes générations d’élèves qu’il est chargé d’enseigner, les élèves de l’École normale et ceux de l’École polytechnique. […] Il le propose comme le modèle inimitable des abrégés : « Cet écrivain, dit-il, que je ne me lasse point de lire ; que, par pressentiment, j’ai admiré toute ma vie ; qui réunit tous les genres ; qui est historien, quoique abréviateur ; qui, dans le plus petit espace, nous a conservé un grand nombre d’anecdotes qu’on ne trouve point ailleurs ; qui défend son lecteur de l’ennui d’un abrégé par des réflexions courtes, qui sont comme le corollaire de chaque événement ; dont les portraits nécessaires pour l’intelligence des faits sont tous en ornement ; enfin l’écrivain le plus agréable que l’on puisse lire… », cet écrivain sans pareil n’est autre pour lui que Velléius. […] Il n’a pas plus douté, à aucune heure de sa vie, des fondements de la foi que celui qu’on appelait le grand Arnauld, mais qui n’était pas vraiment grand par l’étendue de l’esprit.
Il leur est indifférent que de plus ou moins braves garçons gagnent leur vie : puisqu’il n’y a pas de sots métiers… Les Lettres plutôt se loueraient de voir restreindre le nombre de leurs servants à celui des maniaques incurables et insoucieux, par force, de la gloire monnayée. […] Tout cela c’est la vie et l’A. […] Quant à son influence sur la vie de la langue et sur les lettres, elle n’est ni bonne ni mauvaise, elle est nulle — à moins que vous n’entendiez par « les lettres » une petite coterie d’ardélions serviles et de fades convertis.
Un homme, qui a été toute sa vie dans les aides, ne boit que de l’eau ! […] Un homme qui a cette prudence une seule fois en sa vie n’est-il pas pour jamais au-dessus de ses affaires ? […] Il a fait bien plus, il m’a tellement persuadé, que je crois qu’un bon père de famille est obligé en conscience de faire banqueroute au moins une fois en sa vie, pour l’avantage de ses enfants.
D’Aguesseau, à Fresnes, pas plus que L’Hôpital en sa maison de Vignay, ne doit se considérer comme un ministre en disgrâce ; c’était un magistrat homme d’études, qui retrouvait, un peu mélancoliquement peut-être, mais sans trop d’ennui, les habitudes de la vie de cabinet. […] quelle tristesse que celle de la vie d’un ministre disgracié ! […] Si vous saviez combien de fois il m’avait assuré que nous passerions notre vie ensemble, et que je n’avais pas au monde un meilleur ami que lui !
Des hommes sont morts d’un coup d’épée parce qu’un maladroit leur avait froissé l’orteil, qui, délivrés du joug de la coutume, n’eussent point songé à mettre en péril la vie même de leur offenseur. […] Il semble, durant cette première période de la vie humaine, que l’effort héréditaire employé tout entier à composer le squelette, les tissus et les nerfs, et, d’une façon générale, l’être physiologique, soit impuissant alors à opposer une résistance importante, en ce qui touche à la mentalité, aux images-notion suscitées par le milieu. […] Mayne Reid et Fenimore Cooper, lui inspirent l’amour de la vie sauvage et avec des plumes dans la tête, un arc et des flèches, l’enfant s’élance sur le sentier de la guerre : aux Champs-Élysées, aux Tuileries, ou dans le jardin provincial de ses parents, il rencontre des serpents et des lions, toute la faune des forêts vierges.
Pourquoi ne veux-tu pas t’asseoir aussi parmi les précepteurs du genre humain, les consolateurs des maux de la vie, les vengeurs du crime, les rémunérateurs de la vertu ? […] On appelle du nom de peintres de genre indistinctement et ceux qui ne s’occupent que des fleurs, des fruits, des animaux, des bois, des forêts, des montagnes, et ceux qui empruntent leurs scènes de la vie commune et domestique ; Tesniere, Wowermans, Greuze, Chardin, Loutherbourg, Vernet même sont des peintres de genre. […] Mais il faudrait savoir animer les choses mortes ; et le nombre de ceux qui savent conserver la vie aux choses qui l’ont reçue, est facile à compter.
Si j’avais eu à composer un tableau pour une chambre criminelle, espèce d’inquisition d’où le crime intrépide, subtil, hardi s’échappe quelquefois par les formes, qui immolent d’autres fois l’innocence timide, effrayée, alarmée ; au lieu d’inviter des hommes, devenus cruels par habitude, à redoubler de férocité par le spectacle hideux des monstres qu’ils ont à détruire, j’aurais feuilleté l’histoire ; au défaut de l’histoire, j’aurais creusé mon imagination jusqu’à ce que j’en eusse tiré quelques traits capables de les inviter à la commisération, à la méfiance, à faire sentir la faiblesse de l’homme, l’atrocité des peines capitales et le prix de la vie. […] S’il n’en croyait point, il n’a point tué son fils pour cause de religion ; s’il en croyait un, au dernier moment il n’a pu attester ce dieu qu’il croyait de son innocence, et lui offrir sa vie en expiation des autres fautes qu’il avait commises. […] Cela n’est absolument que poché, mais charmant, expressif, plein de vie et d’esprit ; cependant couvrez l’instrument, et vous jugerez que c’est un fumeur.
Le παντα ρει universel englobe la poésie comme la vie elle-même. […] Poète, Musset, jamais de la vie ! […] La cantilène de sainte Eulalie (ixe siècle), la Vie de saint Léger (xe siècle), le roman de Brut (xiie siècle), les œuvres de Marie de France (xiie siècle), en font foi.
Dans La Vie de mon père, l’auteur de Monsieur Nicolas et du Paysan perverti nous a tracé le portrait de sa propre famille : c’est la décence et la gravité mêmes, avec une nuance marquée d’orgueil héréditaire, et un besoin très vif d’estime et de considération. […] Dans la poésie, maintenant que l’on disposait d’un instrument plus souple, nous avions donc espéré que l’on voudrait imiter et serrer de plus près l’exact contour de la réalité ; nous avions cru qu’au théâtre, on pourrait se débarrasser des conventions inutiles, pour n’en respecter que les nécessaires, qui ne sont pas plus de deux ou trois ; et, dans le roman, nous avions cru que la vie contemporaine était assez complexe, assez curieuse à étudier pour que l’imitation en pût suffire à plus d’un chef-d’œuvre. […] Zola, c’est de valeur documentaire, de naturel et de vérité, de vie et de variété.
Le poète dramatique, s’il est vraiment tel qu’il s’en est vu aux glorieuses époques et qu’on a le droit d’en espérer toujours, ce poète, dans la liberté et le premier feu de ses conceptions, ne songe point à faire directement un ouvrage moral ; il pense à faire un ouvrage vrai puisé dans la nature, dans la vie ou dans l’histoire, et qui sache en exprimer avec puissance les grandeurs, les malheurs, les crimes, les catastrophes et les passions. […] et songeaient-ils à autre chose qu’à donner vie entière par l’imagination à des êtres ambitieux ou chéris ?
L’abbé de Pons gagna son procès, mais résigna presque aussitôt son canonicat ; il s’était accoutumé, dans l’intervalle, à la vie de Paris et à la fréquentation des gens de lettres. […] Comme ceux qui sentent en eux un aiguillon secret de douleur et qui ont la vie rapide, l’abbé de Pons se prenait plus activement qu’un autre aux choses du jour, à la circonstance qui passe, et s’y jetait avec une vivacité et un feu qui faisaient de lui un excellent journaliste : ce n’est pas une raison pour nous de le mépriser.
Un excellent chapitre sur le rapport des idées et des mœurs démontre que, s’il est des époques dans la vie du monde où les mœurs précèdent les idées, il en est d’autres où, au milieu de la prostration des anciennes mœurs, l’initiative est aux idées pour réformer et retremper les nations. […] L’Histoire du Pouvoir législatif, que plusieurs années vont édifier, unira, nous l’espérons, à cette ardeur morale qui est la vie des écrits, et dont M.
Les hommes qui, en Allemagne, attaquèrent d’abord dans les Schlegel le mysticisme des théories sur le moyen âge, et dans Goethe l’impartialité égoïste et suprême de l’art, ces hommes sont en partie les mêmes qui essaient de populariser maintenant les idées pratiques de liberté, et d’amener leurs compatriotes à la vie publique. […] Ainsi que me le faisait remarquer un ami, homme d’esprit, Robert a recueilli d’abord en lui les figures que lui offrait la nature, et de même que les âmes ne perdent pas dans les feux du purgatoire leur individualité, mais seulement les souillures de la terre, avant de s’élever au séjour des heureux, ainsi ces figures ont été purifiées dans les flammes brûlantes du génie de l’artiste, pour entrer radieuses dans le ciel de l’art, où règnent encore la vie éternelle et l’éternelle beauté, où Vénus et Marie ne perdent jamais leurs adorateurs, où Roméo et Juliette ne meurent jamais, où Hélène reste toujours jeune, où Hécube au moins ne vieillit plus davantage. » Voilà de la critique certainement éloquente, et je crois, très judicieuse.
Je conseillerai donc, si l’on veut apporter quelque récit à l’appui d’un conseil ou pour preuve d’une thèse, de n’entreprendre point de faire parler les animaux et les arbres, et de n’imaginer rien qui soit hors des conditions de la vie commune : que la fable soit un conte, une anecdote, enfin une petite scène du monde réel ; cela aura plus d’intérêt et un tour plus moderne. Le charmant récit où Voltaire nous peint les différentes destinées de Jeannot et de Colin est le modèle accompli de ce genre de moralité : tout est combiné pour l’instruction que veut donner l’auteur ; c’est le procédé même de l’apologue, un conseil donné par l’exemple des personnages qu’on invente : mais ici plus rien de merveilleux ; tout est vraisemblable, c’est la nature même et la vie.
« Prenez garde, lui dit France, vous menez une vie singulière, qui peut être publiée. […] Si nous savions tout, nous ne pourrions pas supporter la vie une heure.
Une génération nouvelle se levait, éprise de sports et de vie agissante, qui n’avait guère le goût des spéculations métaphysiques ni des subtilités prosodiques. […] Lucien March, chef de la statistique générale de France, a constaté que le coût de la vie, qu’il avait étudié depuis 1875, suivait une courbe descendante et qu’en l’an de grâce 1900, il n’en suffit plus, à une famille de quatre personnes, que de la misérable somme de 1 029 francs — chiffre rond sans centime — pour boucler son budget annuel.
Tout y tombe en ruines après une certaine durée de vie, et tout y ressort des ruines après une certaine durée de mort. […] X Cet inventaire de l’esprit humain, à l’heure où nous sommes, comprend l’Inde, la Chine, l’Égypte, la Perse, l’Arabie, la Grèce, Rome, l’Italie moderne, la France, l’Espagne, le Portugal, l’Allemagne, l’Angleterre, l’Amérique elle-même naissante à la littérature comme à la vie, en un mot tous les peuples du globe qui ont apporté ou qui apportent un contingent littéraire à ce dépôt général de l’esprit humain.
Qu’on prenne les journaux et les livres, — et les livres, au train dont nous allons, ne seront bientôt plus que des journaux accumulés, si de fortes œuvres de méditation et d’haleine ne viennent pas les arracher à la juste indifférence qu’ils inspirent, — qu’on prenne les journaux et les livres et qu’on cherche dans les uns et dans les autres cette critique nécessaire à la vie des littératures, et l’on verra si la notion même n’en périclite pas ! […] Dans les journaux, ne sait-on pas de reste que les relations de la vie l’emportent sur les intérêts de la vérité ?
Il fut comique, comme un courtisan, comme un valet et comme un menteur ; il mascarilla et scapina toute sa vie. […] Il le fut toute sa vie, mais surtout un jour, dans un procès dont les détails semblent fantastiques quand on pense au temps où une telle cause se produisit.
Pendant que les talents qui fondèrent l’une et rejetèrent l’autre, et qui avaient trop de personnalité et de vie pour se laisser grossièrement éteindre, s’en allaient successivement à la file, il resta et passa maître, les maîtres partis. […] » il aurait peut-être été piquant et coloré pour la première fois de sa vie en nous parlant des sentiments religieux de M.
Quand on n’a pas d’idées à soi et qu’on a le cœur vide, des hommes faits pour rester d’honnêtes lettrés toute leur vie ramassent dans la poussière de toutes les civilisations des détritus d’idées sur lesquelles le monde entier a passé, et ils se bâtissent avec cela, qui des poésies, qui des systèmes d’histoire, en se croyant très candidement des inventeurs. […] Pour sept fois, je n’en sais absolument rien, mais poétiquement parlant, le cœur, le pectus de M. le Conte de L’Isle est trempé dans le néant ; ce peut être une situation aux Indes, mais pour nous qui sommes d’ici et qui avons la prétention de vivre encore, ce néant soi-disant divin ne vaut pas le plus humble degré de la vie que le poète se donne les tons de mépriser !
Avoir du talent, mais se garder de l’invention comme de la peste, n’avoir pas surtout l’insolent privilège de l’originalité qui choque tant les esprits vulgaires et viole trop cette chère loi de l’égalité ; avoir du talent et même s’en permettre beaucoup si on peut, mais sous la condition expresse que ce sera sur un mode connu, accepté, qui ne dérangera rien dans les habitudes intellectuelles et ne sera point, pour ceux qui se comparent, une différence par trop cruelle, telle est la meilleure et la plus prudente combinaison qu’il y ait pour se faire un succès, qui suffit à la vie et même à la fatuité dans la vie et pour se passer très bien de la gloire, — ce morceau de pain toujours inutile, gagné en mourant de faim par ces imbéciles d’inventeurs qui ne le mangent pas !
Janin est resté étranger toute sa vie. […] Fou dans le monde des faits et de la vie active, il devenait un sage dans les régions purement spiritualistes. […] Quelle existence horrible et, peut-être, quelle vie pleine d’enchantements ! […] ——— La cause de l’insuccès des premiers volumes de l’Histoire de ma Vie, M. de Pontmartin ne l’a point recherchée ; en eût-il été autrement, qu’il se fût refusé à l’admettre. […] Elle anime cette torpeur ; elle fait circuler le feu et la vie dans cette gloire… » Voilà ce que je dis ; Eh que dis-je autre chose ?
Fauvel, Henri (1860-1938) [Bibliographie] L’Art et la Vie (1888).
On a encore de lui un abrégé de la vie des plus fameux Peintres, beaucoup plus estimé que ses Ouvrages de Physique.
Joseph Declareuil Il inaugura cette Chanson falote qui n’est pas seulement un livre, chef-d’œuvre d’humour et de verve bizarre, mais sa vie même : Spleen gai !
François s’apitoie sur les souffrances de la vie, sur les misères de la condition humaine.
Charles Fuster C’est toute la vie d’une âme, d’une âme de poète assoiffée d’idéal, débordant de tendresse ; — ce sont ses aspirations, ses rêves, ses douleurs.
Ce nous est un vif regret de trouver çà et là un peu de politique ; mais, en revanche, les vers énergiques abondent, et la vie ne manque pas.
Frédéric Mistral Je ne doute pas de voire victoire, car vous avez une flamme de jeunesse et de foi capable de mettre le feu aux quatre coins de la ville, ou de la vie, si vous aimez mieux.
Lemercier, Eugène (1862-1939) [Bibliographie] La Vie en chansons. — Chansons ironiques.
[La Vie littéraire, 3e série (1891).]
C’est une suite de tableaux, je dirai d’impressions d’après nature, traduites en vers pleins de vie et de lumière, œuvre attrayante de peintre et de poète à la fois.
Les vers Latins, & les autres Ouvrages de Bigot ne valoient pas la peine qu’on s’attachât si fort aux anecdotes de sa vie.
Il sera suivi, si Dieu me prête vie, de deux autres.
On dirait une âme d’enfant qui traduirait avec une simplicité candide ses éveils à la lumière, ses sensations d’aube, et qui, peu à peu, verrait s’évanouir tous ses rêves dans le crépuscule de la vie qui passe.
Cette alliance de la poésie et de la pensée a été le rêve de ma vie.
. — À côté de la vie (1895).
Charles Fuster Ce sont de beaux morceaux, des morceaux à l’ampleur toute lamartinienne, que la Vie d’un chêne, les Cloches, la Creuse, la Maison abandonnée, Forêts des montagnes, l’Automne.
Les qualités maîtresses du poète sont une énergie poussée parfois jusqu’à la violence, une sincérité passionnée et, aussi, une très particulière puissance d’imagination avec laquelle il sait évoquer les souvenirs terribles et grandioses de sa vie maritime.
Sa Vie de S.
On est étonné qu’il ait entrepris d’écrire aussi la vie d’Henri IV, après celle que nous avons de Péréfixe.
En les méditant, on arrive à connaître le paysan russe aussi parfaitement que si on avait passé sa vie dans le pays. […] Cette époque est une des grandes époques de la vie du peuple russe et de l’humanité tout entière. […] Que veux-tu, cette vie-là est si dure ! […] — Et ici il cligna les yeux d’un air de malice. — Dieu merci, j’ai assez vécu ; j’ai connu de braves gens dans ma vie, et… — Tu devrais au moins, — lui dis-je en l’interrompant, — écrire à ta famille. […] À un tel peuple, il ne faut pas de longs ouvrages, il lui faut des scènes vives, courtes, simples et touchantes tout à la fois : les poëmes presque pastoraux de la vie russe.
Si ton père boulanger avait raisonné comme toi, s’il avait voulu se débarrasser de tous les tracas et mener une vie inutile aux autres, et si le père Zacharias Kobus avait eu la même façon de voir, vous ne seriez pas là, le nez rouge et le ventre à table, à vous goberger aux dépens de leur travail. […] C’est encore plein de rosée, et ça conserve tout son goût naturel, toute sa force et toute sa vie. » Christel le regardait d’un air joyeux. […] Le pavé résonnait au loin, les fenêtres se remplissaient de figures ébahies, et eux, nonchalamment renversés comme de grands seigneurs, ils fumaient sans tourner la tête et semblaient n’avoir fait autre chose toute leur vie que de rouler en chaise de poste. […] Ainsi débuta Iôsef, ayant bien des fois, dans sa vie errante, pris des leçons du chantre de la nuit, le coude dans la mousse, l’oreille dans la main, et les yeux fermés, perdu dans les ravissements célestes. […] — Père Christel, reprit Fritz, vous tenez ma vie entre vos mains….
D’où vient donc la décadence dans laquelle est tombé le Théâtre-Français, si florissant, si plein de vie en 1828, si misérable et si languissant en 1844 ? […] Aussi, peu d’auteurs ont-ils vu, comme George Sand, se réaliser ce rêve de gloire que l’artiste poursuit toute sa vie et n’atteint presque jamais que dans le tombeau. […] Soumet m’écrit : « Mon cher Dumas, « Je suis depuis cinq mois couché sur mon lit, immobile entre la vie et la mort, et j’espérais depuis que vous en êtes instruit que vous me consacreriez quelques minutes. […] Leur vie et leurs œuvres les défendent assez. […] Aux vingt drames ou comédies que j’ai composés en seize ans, et qui ont fait entrer dans les caisses des différents théâtres où je les ai donnés plus de trois millions de recette, je suis prêt à ajouter, si Dieu me donne encore seize ans de vie et de force, vingt autres comédies ou drames ; mais ce ne sera pas, comme on comprend bien, sur la scène où M.
. — Au courant de la vie (1897).
Les sujets qu’il traite sont les thèmes éternels et qui toujours seront les plus fertiles en variations lyriques : les promenades à travers les champs et les bois, les charmants épisodes de la vie de famille, quelques scènes de l’antiquité, les jeux de la fantaisie et jusqu’aux discrètes émotions du patriotisme.
Quel art de relever et de fixer les petites choses ; les plus minces détails de la vie enfantine !
Antonin Bunand Il se révèle entièrement dans ces récents Mémoires d’un Centaure, poème qui, tout en exprimant, par son panthéisme de consolation et de sérénité, un original et très généreux sens de la vie et de ses fins, renoue, en sa forme, la noble tradition de prose enrythmée, aux graves ondes symphoniques, des Chateaubriand, des Ballanche, des Sénancour, des Maurice de Guérin.
Ces Vies, au nombre de soixante-seize, peuvent jeter un grand jour sur l’Histoire de notre ancienne Littérature.
Marc. 596 Lettre au Roi de Sardaigne Victor Amédée III, en lui envoyant l'Abrégé historique de la vie du Roi Charles-Emmanuel III, son père. 598 Lettre à l'Impératrice-Reine de Hongrie. 601 Lettre au Prince Charles de Lorraine, oncle de l'Empereur, Gouverneur des Pays-Bas, &c. 603 Lettre à un Journaliste. 605 Lettre à MM. les Auteurs du Journal de Paris. 615 Lettre à M. l'Abbé de Fontenai, Rédacteur des Annonces & Affiches pour la Province. 619 Lettre à M.
. — Le Sens de la vie (1898). — Les Joies humaines (1899). — De Messidor à Prairial (1899).
Eugène Ledrain Comment la mélancolie du milieu de la vie ne l’aurait-elle pas touché ?
. — À travers la vie, poésies (1885).
Ce second Empire, qui fut si court et comme étranglé par les événements, avait toujours été d’une extrême importance historique à étudier ; mais la renaissance et le rétablissement de l’Empire, il y a dix ans, lui a rendu un intérêt d’à-propos et de vie, puisqu’il reparaissait en quelque sorte sous les yeux comme un problème actuel et toujours pendant. […] Mais lui, qu’a-t-il fait toute sa vie que prendre des légendes pour des réalités, des brouillards pour des terres fermes, des nuages pour des rivages ?
2° Quel est, d’après les événements de l’histoire et les détails que nous avons sur la vie de Virgile, l’ordre de ces petits poëmes ? […] Jusque dans les Bucoliques pourtant, Virgile, ce génie naturellement grave, sérieux et mélancolique, présage déjà son originalité sur deux points : la Xe églogue, si passionnée, en mémoire de Gallus, laisse déjà éclater les accents du chantre de Didon, et la IVe églogue à Pollion, toute religieuse et sibylline, toute digne d’un consul, fait entrevoir dans le lointain les beautés sévères et sacrées du VIe livre de l’Enéide.
Dans la vie, c’est autre chose : on est entre soi, deux mots expliquent tout. […] On s’en aperçoit bien, dans la scène du défi, à la surprise du duc, quand l’étrange proposition lui est faite de jouer sa vie sur un coup de dé.
A la scène, comme au reste dans les romans, le dénouement n’est presque jamais celui de la vie. Cosima elle-même m’en offre un exemple, et, en assistant au dénouement, je me disais : Non, Cosima dans la vie ne s’empoisonnerait pas encore à ce moment-là ; elle céderait, elle s’enfuirait avec l’homme indigne, avec l’amant exécrable, et ce ne serait que quinze jours après que, repentante, éperdue, ayant épuisé l’illusion jusqu’à la lie, elle se donnerait la mort. — Il est vrai que si Cosima se tue à ce moment dans le drame, c’est parce que la faute en son cœur était consommée.
Et quant à la direction morale à indiquer aux travaux de l’esprit, il suffirait peut-être d’une fondation annuelle par laquelle on proposerait des sujets à traiter soit pour la poésie, soit pour la prose, des sujets nationaux, actuels, pas trop curieux ni trop érudits, mais conformes à la vie et aux instincts de la société moderne. […] Quoi qu’il en soit, en fait l’ouvrier littéraire, dans son imprévoyance, se multiplie et pullule chaque jour ; son existence est devenue une nécessité, un produit naturel et croissant de vie échauffée qui se porte à la tête et qui constitue la civilisation parisienne.
En s’étudiant soi-même, l’on verra que, dans toutes les douleurs de la vie, on est porté à croire les autres plus que ses propres réflexions, à chercher les motifs de ses craintes et de ses espérances ailleurs que dans sa raison. […] On dirait que, nouveaux dans la vie, ils ne savent pas si ce qui est pourrait exister autrement.
et comme elle confirme bien cette vérité démontrée depuis longtemps par Aristote aux platoniciens, qu’à mesure qu’on remplace davantage les abstractions et les généralités par des notions particulières et concrètes, on augmente, avec l’intensité de la vie, l’intensité de l’intérêt ! […] Don Juan, au milieu du naufrage de toutes ses croyances, s’aperçoit qu’il conserve encore le sentiment de l’humanité, et, au nom de ce sentiment, fait la seule bonne action de sa vie.
C’est là l’histoire des pièces que Ruzzante publia à la fin de sa vie d’improvisateur et d’acteur, l’histoire de L’Angelica du capitaine Cocodrillo et d’un très grand nombre des productions que nous a léguées l’époque la plus féconde du théâtre italien. […] réplique le Capitan ; le seul récit de mes hauts faits doit suffire à te tenir en vie.
Elle aime votre esprit et vos manières, et quand vous nous retrouverez ici, vous n’aurez point à craindre de n’être pas à la mode. » Cette continuation de société intime avait lieu malgré la vie mystérieuse des petites maisons de nourrices. […] Ce sont des précieuses modifiées, prises dans la vie bourgeoise, à qui un mari peut dire fort raisonnablement : Qu’on n’aille pas chercher ce qu’on fait dans la lune, Et qu’on se mêle un peu de ce qu’on fait chez soi.
Qu’on lise les Mémoires de sa vie ; on y applaudira à la générosité de ses bienfaits, répandus sur les Littérateurs qu’il se croyoit obligé d’attaquer dans ses Ecrits ; on y apprendra qu’il a été le bienfaiteur de Liniere, qui ne cessoit de déclamer contre lui ; qu’il donna des secours à Cassandre, dont il estimoit peu les talens ; qu’il se réconcilia avec Perrault, en oubliant ses calomnies ; qu’il rendit justice à Boursault, en reconnoissant son mérite qu’il avoit trop méconnu ; qu’il conserva au célebre Patru sa Bibliotheque, en l’achetant plus cher qu’il ne vouloit la vendre, & en lui en laissant la jouissance ; qu’il osa refuser le paiement de la pension que lui faisoit Louis XIV, en disant à ce Prince, qu’il seroit honteux pour lui de la recevoir, tandis que Corneille, qui venoit de perdre la sienne, par la mort de Colbert, se verroit privé de ses bienfaits : ce qui valut à ce dernier un présent de deux cents louis ; qu’il eut un grand nombre d’amis dans les rangs les plus élevés, comme parmi les plus célebres Littérateurs de son temps, & qu’il les conserva toute sa vie.
S’il fut cause de la mort de tant de milliers de gens qui se croisèrent sur la foi de ses prophéties, on lui doit aussi la gloire d’avoir sauvé la vie à une multitude innombrable de juifs innocens, qu’un moine, nommé Raoul, vouloit faire exterminer. […] L’auteur de la vie d’Abailard plaisante beaucoup sur ce reproche, que lui faisoit saint Bernard, d’aimer les femmes.
Autant on parla de lui pendant sa vie, autant sa mort fit peu d’impression. C’est qu’indépendamment du grand nombre de ses années qui préparoient à cette perte, elle arriva dans ces circonstances affreuses, où toute la France étoit en allarme pour la vie du meilleur des rois, frappé par un monstre.
Ils avoient passé toute leur vie dans l’étude des auteurs Grecs & Latins, dans ce talent si rare d’instruire la jeunesse, dans la composition de plusieurs ouvrages analogues à leur état. […] Rollin n’avoit pas le don de s’énoncer facilement, quoiqu’il eut professé l’éloquence toute sa vie.
Le seul temps de la vie qui soit bien propre à faire acquerir leur perfection à l’oeil et à la main, est le temps où nos organes tant interieurs qu’exterieurs achevent de se former. […] Si Virgile, ajoûte Juvenal, n’avoit pas eu les commoditez de la vie, ces hidres, dont il sçait faire des monstres si terribles, n’auroient été que des couleuvres ordinaires.
Ce n’est pas un cadavre, c’est un vivant qui flaire comme baume et qui a toute la fraîcheur de la vie ! […] Talbot et avec l’esprit de ce pays-ci, il y en avait peut-être là pour la vie éternelle !
Après la décapitation de d’Egmont, ce Ney de l’histoire hispano-flamande, — car Graveline et Saint-Quentin valent bien la Moscowa, — et pour qui, comme pour Ney, il y eut autant de raisons de pardonner que de condamner, Prescott rapporte toute entière cette lettre du duc d’Albe à Philippe II, que tant d’autres historiens auraient oubliée : « Votre Majesté comprendra le regret que j’ai eu de voir finir ainsi ce pauvre seigneur et de lui faire subir ce sort ; mais je n’ai pas reculé devant le devoir de servir mon souverain… Le sort de la comtesse m’inspire aussi une très grande compassion quand je la vois chargée de onze enfants dont aucun n’est assez âgé pour se suffire, et quand on pense à son rang élevé de sœur de comte palatin et à sa vie si vertueuse et si exemplaire, je ne puis que la recommander aux bonnes grâces de Votre Majesté. » Les bonnes grâces de Philippe II furent chiches. […] — menacé dans sa vie et son autorité, chargé d’un gouvernement impossible, et qui reste à son poste et fait tête comme un capitaine qui exécuterait une consigne.
Hatin dit encore que « le journalisme est le signe de la vie commune ». Mais la vie commune sans des chefs serait le pêle-mêle de l’anarchie, et ce n’est pas pour y trouver de tels spectacles que les hommes étudient l’histoire, mais pour tirer de ces spectacles de vigoureuses conclusions.
Saisset à la page xxv de son introduction) : « ceux qui nient la raison, la science et le progrès et veulent le retour de la théocratie du moyen âge, et ceux qui veulent, une reconstitution radicale de la société et de la vie humaine ». […] Ôtez, en effet, les vérités indémontrables et nécessaires à la vie et à la pensée humaines, qu’on savait avant les philosophes, et auxquelles ils n’ont pas donné un degré de certitude de plus, — le nombre infini de leurs sophismes laborieux, — les forces d’Hercule perdues par eux pour saisir le faux ou le vide, — le mal social de leurs doctrines qui n’ont pas même besoin d’être grandes pour produire les plus grands maux, — ôtez cela après l’avoir pesé, et dites-moi ce qui reste de tous ces philosophes et de toutes ces philosophies, même de ceux ou de celles qui paraissent le plus des colosses !
Saisset, passé toute sa vie à citer des textes et à commenter des doctrines, tombées en désuétude et dans le mépris de l’histoire, si l’histoire n’était pas une pédante, quand elle est écrite par des professeurs ! […] Aujourd’hui, arrivé à cet autre âge de la vie où l’on paquette son bagage pour la postérité, M.
Lacombe a signalé les changements profonds introduits par le Christianisme dans la vie générale des peuples et dans la condition humaine. […] C’est ainsi qu’à chaque âge de sa vie elle forma un tout harmonique.
Sa vie, je l’ignore. […] L’histoire de la monarchie française a été rompue par la révolution le jour que cette monarchie s’est séparée du principe religieux qui faisait sa vie et sa force, et cette rupture n’est pas seulement qu’une interruption momentanée… Pour les logiciens de l’Histoire, qui a sa mathématique inflexible, c’est la rupture dans la chaîne des faits qu’il faut nécessairement reprendre dans leur ordre, comme un raisonnement dans le sien, si on veut se retrouver dans la vérité, qui est la même dans l’ordre des raisonnements et des faits.
Frédéric Mistral, nouvellement découvert, et dont le nom, beau comme un surnom, convient si bien à un poète de son pays, un homme né et resté dans la société qu’il chante, ayant le bonheur d’avoir les mœurs de ses héros et d’être un de ces poètes complets, dont la vie et l’imagination s’accordent, comme le fut Burns, le jaugeur. […] La circonstance du génie qui leur est donné ne leur appartient ni plus ni moins que la circonstance de la vie qui le leur développe, et l’auteur de Mirèio possède, au degré le plus profond et le plus extraordinaire, ces deux sources d’originalité.
Mais quelqu’un d’aussi littéraire que Feuillet de Conches, quelqu’un qui passe sa vie en habit de soie dans le détail d’une fonction de cour qui demande un perpétuel sous les armes, ne pouvait pas aller chercher le conte où il est réellement le plus, et où de mâles observateurs comme Fielding, le juge de paix, et Walter Scott, le greffier, sont allés le chercher, au péril de leurs habitudes de gentlemen tirés à quatre épingles, de la délicatesse de leurs sensations, et parfois de leur dignité. […] Il n’y a, de fait, que Balzac, dans ces contes inouïs qui ne sont pas pour les enfants et qui ont tout, excepté l’innocence ; il n’y a que Balzac qui ait parlé depuis Rabelais cette langue phénoménale que Feuillet rappelle en plus d’un endroit de son livre par la propriété pittoresque de l’expression, l’opulence des vocables, le mouvement ému, les contours renflés, la grâce du tour, et particulièrement ce coloris qui étend sur toutes choses ses clartés rougissantes et qui nous fait nous demander, à nous, vieux critiques, accoutumés au feu de la phrase quand elle en a : « Mais dans quel baquet de pourpre s’est-il plongé, ce diplomate, pour en être ressorti avec cet éclat et cette vie qu’un artiste de profession lui envierait ?
Puisque l’idée de la justice dominait la vie sociale, ne serait-elle pas destinée à régir également la vie inter-sociale ?
Apparemment, le poëte eut deux époques dans sa vie et dans son art ; ou bien il faut supposer que, son nom étant devenu célèbre, on le chargea dans les siècles suivants de vers qui ne lui appartenaient pas. […] Le soin même d’Hérodote59 à noter avec détail ce souvenir d’Arion, à quelque distance de l’admirable récit de l’invasion des Perses, témoigne de la grande place que la poésie occupait dès lors dans la vie des Grecs.
Calomniée sans cesse, et me trouvant trop peu d’importance pour me résoudre à parler de moi, j’ai dû céder à l’espoir qu’en publiant ce fruit de mes méditations, je donnerais quelque idée vraie des habitudes de ma vie et de la nature de mon caractère.
Il m’a été doux de rendre hommage à cette Muse simple, croyante et toujours inspirée, éprise de tout ce qui mérite, seul, un regret de la vie : l’Amour et les fleurs.
Paul Mariéton Une existence douloureuse secouée d’exaltations, de déceptions sans nombre faiblement compensées par la vision lointaine d’une gloire désirée et qui tarde à venir, voilà la vie, voilà la poésie de Louisa Sieffert.
Cette Histoire contient leurs Vies, le catalogue, la critique, le jugement, la chronologie, l’analyse & le dénombrement des différentes éditions de leurs Ouvrages.
Passe sa vie à braconner des pièces de cinq francs — sur la lisière du Code pénal.
En quarante strophes, l’auteur nous a fait passer par toutes les sensations de l’homme qui, lassé de la vie, s’est décidé à en trancher le fil lui-même.
Les Vies d’Horace, d’Ovide, & de Pline le jeune, écrites en latin, sont dans le même goût, quoiqu’on les regarde comme ce qu’il a fait de mieux.
Longin avait cherché à résoudre ce problème dans un ouvrage dont fait mention Diogène Laërce dans la vie de Pyrrhon.
L’attachement pour la princesse Charlotte Bonaparte tint sans doute une grande place dans sa vie, mais ne peut être considéré comme la raison déterminante d’une mélancolie qui avait ses racines dans l’organisation même,
Dans la Belle Douleur, l’horizon s’est élargi, des personnages apparaissent, l’amour palpite, la vie est précisée, sous le même clair de lune hiératique et troublant.
Les « Sonnets blonds », qui forment la plus grande partie du recueil, sont l’histoire d’une passion ardente, chaste et discrète, d’un de ces sentiments profonds et doux qui parfument le reste de la vie et demeurent l’honneur de celui qui les éprouva… Les parures naturelles du Quercy revivent, brillent ou chantent dans ces pièces.
Laurent Évrard, à la fin du court avertissement où il justifie son système rythmique, ajoute : « Ce n’est donc pas de la matière sonore ni du nombre métrique que le lecteur pourra se plaindre, mais du poète qui ne sait pas, dans les entraves d’or, marcher d’un pas agile ou boiter comme un dieu. » À quoi d’aucuns objecteraient que le poète eût mieux fait de ne se mettre aux chevilles nulle entrave, même d’or… Ce poète sait voir et exprimer ; il observe la vie latente des eaux, des pierres et des plantes ; l’obscur frisson des choses inertes ne lui a pas échappé.
Michel, Henri [Bibliographie] Les Chants de la vie (1897).
Et il gardera à travers la vie sa pitié pour le poète qui fut le confident de sa première tristesse.
Toute sa vie a été consumée à écrire contre les Incrédules & les Jésuites ; mais ses Ouvrages mouroient à mesure qu’ils voyoient le jour.
Les plus connus sont des Homélies imprimées sous le titre d’Année Evangélique ; des Conférences, intitulées Discours sur la vie ecclésiastique, des Instructions courtes & familieres pour tous les Dimanches & principales Fêtes de l’année.
Duhamel à qui Maupertuis disait : convenez qu’excepté vous, tous les physiciens de l’académie ne sont que des sots, et qui répondait ingénuement à Maupertuis : je sais bien, monsieur, que la politesse excepte toujours celui à qui l’on parle. ce Duhamel a inventé une infinité de machines qui ne servent à rien, écrit et traduit une infinité de livres sur l’agriculture qu’on ne connaît plus ; fait toute sa vie des expériences dont on attend encore quelque résultat utile ; c’est un chien qui suit à vue le gibier que les chiens qui ont du nez font lever, qui le fait abandonner aux autres et qui ne le prend jamais.
Je dirai donc qu’au temps de ses plus grands succès et de ses prédications les plus admirées et les plus émouvantes, la vie de Massillon fut odieusement incriminée. […] Le Régent disait qu’il était né ennuyé : combien d’hommes depuis, qui, sans être régents du royaume ni fils de France, ont également commencé par l’ennui une vie que les passions n’ont pu qu’agiter et ravager sans la remplir ! […] Ajoutez que, dans la pratique et dans l’usage de la vie, cette même vertu n’avait rien d’entêté ni de farouche : il y avait de l’Atticus chez Massillon.
Ce qui parlait surtout en sa faveur, c’était sa vie, la pureté de ses mœurs, l’égalité et la tranquillité de son âme : « C’est une science divine et bien ardue, disait-il, que de savoir jouir loyalement de son être, se conduire selon le modèle commun et naturel, selon ses propres conditions, sans en chercher d’autres étranges. » Cette science pratique, à laquelle, sauf de rares et courts instants de passion, il avait toujours été disposé, il paraît qu’il l’avait tout à fait acquise en vieillissant ; l’équilibre de son humeur et de son tempérament l’y aidait ; il avait pris pour sa devise : Paix et peu, et il la justifiait par toute sa vie. […] Il répand une teinte si bienfaisante sur toutes les affaires de la vie !
A Geffrot ; Essai sur sa vie et son caractère politique, par M. […] Malgré la vie de forçat que je mène, je me porte bien, madame ; Dieu veuille que mon sang ne s’échauffe point trop, et que cela ne fasse point renaître le mal que vous savez qui me faisait tant de peur autrefois ! […] Toute femme qu’elle est (notez-le bien), elle n’a pas de nerfs, de vapeurs, ni de ces nuages qui passent ; elle n’a pas cette imagination qui grossit les objets : sur un fond de santé forte, d’humeur heureuse et peut-être d’indifférence, il y a un esprit ferme, adroit et actif, de vives qualités disponibles, dressées de bonne heure à la grande vie, au train des cours, et qui cherchent leur aliment et leur plaisir dans le démêlé des intérêts, dans le maniement des ressorts, dans l’influence et la représentation continue.
Le cardinal de Retz passa les derniers jours de sa vie à faire un livre unique, qui reste le bréviaire de tous ceux qui ont vu ou verront des révolutions, même autrement formidables. […] La Bruyère, déjà plus éloigné, avait pourtant assez appris et oui de ce temps-là pour se dire que rien n’est plus ordinaire que de voir un même homme changer du tout au tout dans sa vie, et en moins de vingt années, sur les points les plus importants et les plus sérieux. […] J’ai oublié le Contrat social de Rousseau, mais j’ai toujours présentes à l’imagination et à l’esprit tant de descriptions engageantes d’une vie saine, naturelle et sensée : puisse ce genre heureux d’existence, qui présuppose de si bons fondements, se propager plus encore39 !
Peu à peu tout l’Ancien et le Nouveau Testament y passèrent et y défilèrent, mis et traduits en scènes et en personnages ; et les Vies des Saints, et les Miracles de la Vierge également. […] Il y a certes des beautés de différentes sortes et de différents degrés ; les manifestations de la vie et de l’âme humaine sont infinies. […] On a sous les yeux une suite de scènes qui devaient avoir beaucoup d’intérêt pour des spectateurs nourris de ces sujets saints, et dont toute la vie se passait au sein des croyances, au milieu de tout ce qui les retraçait.
Israël et le Magnificat ; que tout ce qu’il y a de poésie dans le culte chrétien, l’encens, les chasubles brodées d’or, les longues processions avec des fleurs, léchant, le chant surtout aux fêtes solennelles, grave ou lugubre, tendre ou triomphant, l’a vivement exalté ; qu’il a respiré cet air, vécu de cette vie, et que, par conséquent, il a dû pénétrer plus avant dans le sens et l’intelligence de la musique chrétienne que beaucoup de jeunes gens qui, nourris des traditions de collège et ne voyant dans la messe qu’une corvée hebdomadaire, ne se seraient jamais avisés d’aller chercher de l’art et de la poésie dans les cris inhumains d’un chantre à la bouche de travers. » Et plus loin, insistant, sur le caractère propre, à ces chants grandioses ou tendres, et qu’il importe de leur conserver sans les travestir par trop de mondanité ou d’élégance, devançant ce que MM. d’Ortigue et Félix Clément ont depuis plaidé et victorieusement démontré, il dira (qu’on me pardonne la longueur de la citation, mais, lorsque je parle d’un écrivain, j’aime toujours à le montrer à son heure de talent la plus éclairée, la plus favorable, et, s’il se peut, sous le rayon) : « J’ai dit tout à l’heure, en parlant du Dies iræ, que je ne connaissais rien de plus beau ; j’ai besoin d’y revenir et de m’expliquer. […] unité de direction et vie publique ! […] A côté de la dignité, n’oublions jamais cet autre sentiment inspirateur, au moins égal en prix, l’humanité, c’est-à-dire le souci de la misère, de la souffrance, de la vie insuffisante et chétive du grand nombre ; revenons en idée au point de départ et aux mille entraves qui arrêtent si souvent à l’entrée du chemin, pour en affranchir peu à peu les autres ; inquiétons-nous de tout ce qu’il y a de précaire dans toutes ces existences qui ne se doutent pas qu’elles s’appellent des destinées.
Chacun, dans les résumés et les récapitulations qu’il donne de sa vie passée, s’arrange sans doute pour faire le moins de mea culpa possible et pour se rendre justice par les meilleurs côtés ; mais, quand on y regarde avec lui, on ne peut s’empêcher d’être en cela de l’avis de M. de Girardin sur lui-même : parmi les députés de la Chambre de 1846, il fut l’un de ceux qui se laissèrent le moins abuser par le spectacle des luttes oratoires, et qui, ne se réglant en rien sur le thermomètre intérieur de la Chambre, restèrent le plus exactement en rapport avec l’air extérieur : il fut, de tous les conservateurs de la veille, celui qui, avec M. […] « Vous arrivez à propos, lui dit M. de Lamartine, je suis au désespoir ; la vie de Girardin est en danger, il est bloqué dans les bureaux de la Presse par des centaines, des milliers d’individus, depuis le matin ; nous sommes au dépourvu, il n’y a pas dans Paris un soldat, pas un secours à lui donner. […] Rouher ; — lorsque encore, par exemple, ayant à parler de Victor-Emmanuel, il l’a défini « ce roi plein de résolution qui met le triomphe de l’unité italienne au-dessus de la conservation de sa couronne et de sa vie, roi plein d’ardeur, qui a le mépris de la mort et la volupté du péril » — lorsqu’à la veille du discours de l’Empereur pour l’ouverture de la dernière session, et s’arrêtant par convenance au moment où il allait essayer d’en deviner le sens, il ajoutait : « On peut s’en rapporter pleinement de ce qu’il conviendrait de dire, s’il le veut dire, à l’Empereur, qui semble puiser dans la condensation et l’esprit du silence la force et le génie du discours. » On ne saurait mieux dire ni plus justement, et en moins de mots, les jours où l’on ne veut pas déplaire.
Quand la nature crée un homme supérieur et d’une supériorité de premier ordre, quand elle l’a fondu et coulé tout d’un jet dans un de ses plus beaux moules humains, si cet homme, après avoir fourni sa grande carrière, tombe ou sort de la scène dans la plénitude de la vie et de ses facultés, sans que la maladie ou l’âge soit venu l’altérer ou l’affaiblir, il est bien clair qu’il est et qu’il a dû rester le même pendant toute cette durée de son rôle actif, que les événements n’ont fait que le produire, un peu plus tôt ; un peu plus tard, sous ses aspects différents, le montrer et le développer plus ou moins dans quelques-unes de ses dispositions naturelles et donner occasion à ses qualités ou à ses défauts primitifs de se manifester dans tout leur relief ou même dans leur exagération ; mais il y avait en lui, dès le principe, le germe et remboîtement de tout ce qui est sorti. […] Lefebvre, a été reproduite et accentuée par lui à diverses reprises avec beaucoup d’énergie et en des pages très-heureuses : « Plus que jamais, dit-il dans son récit, au moment des complications qui surgirent en Italie par suite des résistances du Pape dès les premiers mois de 4806, — plus que jamais nous croyons qu’après les trophées de Marengo et de Hohenlinden il eût été d’une bonne politique pour le premier Consul de ne point s’engager à fond dans les affaires d’Italie, et que la tâche de réduire l’Angleterre, d’affermir nos conquêtes sur le Rhin et l’Escaut, suffisait pour remplir, pour glorifier la vie d’un grand homme et absorber les forces d’une génération. […] Il débuta, dans ses rapports avec l’Europe, par lui imposer le traité de Lunéville, qui était un droit créé par la victoire, mais non un acte de conciliation et de durée : cette première transaction décida de toute la vie du premier Consul.
Il y a des temps décisifs dans la vie des individus, où leur constitution physique ou morale subit de graves changements et se fonde comme derechef, où l’on refait bail, pour ainsi dire, sur un certain pied et à de certaines conditions avec ses idées, avec ses moyens ; il y a, enfin, des années critiques, climatériques, comme disaient les anciens médecins, palingénésiques, comme disent de modernes philosophes. Cela semble aussi se reproduire assez fidèlement dans la vie d’une époque. […] La vie d’une littérature est-elle là ?
Toutefois, un certain besoin de perfection et de beauté concentrée, une vérité et une justesse de plus en plus soigneusement recherchée, la difficulté croissante du goût à l’égard de soi-même, l’absence du théâtre aussi et d’un cadre qui incessamment sollicite, bien des causes peuvent faire, en avançant, que les produits de ce genre d’imagination ne remplissent pas toute une vie et y laissent vacantes bien des heures. C’est alors qu’il est bon de se partager, de se faire à temps un goût, une étude durable, ce que j’appellerai un cabinet de curiosités ou un cloître pour la seconde moitié de la vie, la partie de whist ou d’échecs des longues heures paisibles. […] L’étude alors est là, l’érudition dans toutes ses branches et avec ses ingénieux travaux, plus longs, à coup sûr, que la vie : elles ont pour objet d’occuper, d’animer, s’il se peut, les saisons sur lesquelles d’abord on ne comptait guère, et qui ont déconcerté plus d’un.
Dans son insouciance d’homme qui savait la vie et qui n’aspirait pas à la gloire, il n’a pas même pris le soin de recueillir ses Œuvres éparses et de dire : Me voilà, à ceux qui viendront après244. […] Notre siècle n’est plus celui des fades compliments ; la vie publique aguerrit aux contradictions, elle y aguerrit même trop : qu’à l’Académie du moins l’urbanité préside, comme nous venons de le voir, à ces oppositions nécessaires, et tout sera bien. […] En parlant avec élévation et chaleur du sentiment de l’admiration, de cette source de toute vie et de toute grandeur morale, M.
C’était étrange, c’était nouveau… il n’en fallait pas davantage pour que mon Dumas fût empaumé, je devrais dire emballé, car il fut, dès le principe, un des plus fervents adeptes des nouvelles doctrines, un adepte, plutôt un apôtre, prêchant d’exemple et de parole : “Songez donc, me disait-il, la vie de l’être, de l’Humanité, est là toute entière ! […] Charcot avait nié Burcq pendant longtemps, mais à la fin de sa vie il lui rendit un sérieux hommage. […] Mon malade revient à la vie grâce à la médication stimulante, les préparations de musc, de quinine, etc. et peut-être aussi grâce à la nature médicatrice.
Un abbé, une actrice de l’Opéra, une bourgeoise de province le consultent sur la façon et les moyens de régler leur vie. […] De Jean-Jacques surtout procède cet enthousiasme, cet attendrissement universels qui embellissent les derniers jours de l’ancien régime, et semblent fondre toutes les haines, tous les égoïsmes dans une commune ardeur de réforme et de philanthropie ; la vie mondaine devient plus intime, moins cérémonieuse, élimine la représentation au profit du plaisir574. […] Et, toute sa vie, Mme Roland sera la femme selon Jean-Jacques, aussi bien dans sa façon de faire la lessive ou la vendange, que dans ses plans de réforme et de gouvernement.
Car le véritable intérêt des monuments de l’éloquence révolutionnaire est dans le terrible drame dont on suit jour à jour pour ainsi dire les péripéties : drame national, où s’explique une des grandes crises qu’ait traversées notre pays, drame individuel, où des caractères énergiques défendent à chaque instant leur autorité, leur honneur, leur vie. […] Mirabeau porta toute sa vie le poids de son passé : il eut la gloire, jamais l’estime et la confiance. […] Une vie désordonnée, des dettes, des duels, des séductions : tout ce que de charmants seigneurs faisaient communément sans perdre leur réputation de galants hommes, tout ce qui valait à un Lauzun sa royauté mondaine.
Les politiques ne s’arrêtent pas, ou, si l’on veut, ne s’arrêtaient pas alors à ces bagatelles qui gênent les hommes d’honneur dans le train ordinaire de la vie. […] Il tenait à la vie, il y tenait par des attaches plus fortes que celles des grands cœurs, je veux dire par les mille liens du possesseur vulgaire qui s’attache aux choses en raison des biens qu’il a amassés : Un jour, dit Brienne, je me promenais dans les appartements neufs de son palais (c’est la grande galerie qui longe la rue de Richelieu et qui conduisait à sa bibliothèque) ; j’étais dans la petite galerie où l’on voyait une tapisserie toute en laine qui représentait Scipion, exécutée sur les dessins de Jules Romain ; le cardinal n’en avait pas de plus belle. […] Une vie complète et anecdotique de Mazarin serait très curieuse à faire : on en possède à peu près tous les éléments.
« Je dépasse à peine le milieu de la vie, dit-il dans le préambule de son Histoire, et j’ai vécu déjà sous dix dominations, ou sous dix gouvernements différents en France. » Et il énumère tous les gouvernements qui se sont succédés depuis soixante ans, à commencer par Louis XVI. Mais, dès cette première phrase de M. de Lamartine, j’ai vu des personnes se demander ce que l’historien entendait par le milieu de la vie, et si, en effet, nous en étions encore à mesurer l’espace de nos jours et le nombre des soleils qui nous sont accordés, comme on le faisait au temps des patriarches. […] Lui, historien de la Restauration, il ne saurait dire, par exemple, de Louis XVIII en 1814, ou de M. de Talleyrand, qu’il appelle à cette même date un vieux diplomate, qu’ils avaient à peine dépassé le milieu de la vie.
Le temps de la retraite de Portalis, après le 18 Fructidor, tient une place intéressante dans sa vie. […] Enfin il n’eut point à souffrir dans sa conscience de ces revirements politiques successifs qui brisent toujours plus ou moins l’unité d’une belle vie. […] [NdA] Puisque j’ai cité l’un des critiques intempestifs du Code civil, j’en veux indiquer un qui était tout le contraire et qui ne faisait rien d’intempestif dans sa vie.
Il est probable qu’épuisé par le travail et les veilles, il usa le reste de sa vie dans ses efforts pour montrer un front serein à sa cour. […] Arrivé aujourd’hui à la pleine maturité de la vie, maître en bien des points, sachant à fond et de près les langues, les monuments, l’esprit des races, la société à tous ses degrés et l’homme, il n’a plus, ce me semble, qu’un progrès à faire pour être tout entier lui-même et pour faire jouir le public des derniers fruits consommés de son talent. […] Dans Emmeline de même : cette vive, espiègle et rieuse personne, et qui pourtant a un cœur, se prend d’un premier amour de jeune fille, qui la rend mélancolique d’abord ; mais, sitôt qu’elle a aimé et qu’elle a épousé l’homme qu’elle aime, la gaieté revient : « Il semblait que la vie d’Emmeline eût été suspendue par son amour ; dès qu’il fut satisfait, elle reprit son cours, comme un ruisseau arrêté un instant. » Ne cherchez point chez M.
D…, descendant de l’avocat général de Bordeaux, et qui, lui, n’eut pas l’air de nous trouver extraordinairement criminels, et après D…, le juge L…, une sorte d’ahuri qui ressemblait à Leménil prenant un bain de pieds dans Le Chapeau de paille d’Italie, fourré dans l’affaire comme un comique en un imbroglio, et qui avait de lui, dans la pièce où il nous reçut, un portrait en costume de chasse, un des plus extravagants portraits que j’aie vus de ma vie. […] Ce qu’il voyait, ce qu’il entendait, la déclaration de ce substitut, les dénégations de Latour-Dumoulin qui lui avait dit travailler à arrêter les poursuites, tout cela, le sortant de son égoïste optimisme, faisait tout à coup, ainsi que du feu d’un caillou, jaillir de l’indignation de ce vieux bourgeois habitué par sa longue vie à ne s’indigner de rien. […] Trois ans de liberté, trois ans de vie ainsi ôtés d’une existence humaine en un tour de Code ; le délit pesé en une seconde avec un coup de pouce dans la balance, et l’habitude de ce métier cruel et mécanique de tailler à la grosse, pendant des heures, des parts de cachots. — Il faut voir cela pour savoir ce que c’est.
La mélancolie, dira-t-on, est un sentiment de décadence : c’est un sentiment qui naît de la vue des ruines, du doute, du dégoût de la vie, c’est donc un sentiment peu viril et sans beauté. […] Nisard, « d’amour et de dégoût de la vie », du sentiment de la vanité des choses uni à un désir insatiable d’être et de vérité ; c’est le sentiment que l’âme éprouve en présence du problème de sa destinée, comme te disait M. […] Toute sa vie n’est qu’une souffrance, imaginaire si vous le voulez, mais non moins cruelle pour cela.
Quelques auteurs emploient le mot de variation, en sens technique, comme impliquant une modification directement due aux conditions physiques de la vie ; et les variations en ce sens ne sont pas supposées transmissibles par voie d’héritage : mais qui peut affirmer que les proportions naines des coquillages dans les eaux saumâtres de la Baltique et des plantes sur les sommets alpestres, ou l’épaisse fourrure des animaux de la zone polaire, ne sont pas, en bien des occasions, transmissibles au moins pendant quelques générations ? […] Ces observations sur la prédominance des espèces ne s’appliquent, on doit le comprendre, qu’aux formes organiques qui entrent en concurrence les unes avec les autres, et plus particulièrement aux représentants du même genre et de la même classe qui ont à peu près les mêmes habitudes de vie. […] Une plante peut être considérée comme dominante, si elle est plus nombreuse en individus et plus répandue que presque toutes les autres plantes de la même contrée, qui n’exigent pas des conditions de vie très différentes.
Pour comble, l’un exalta les planètes, êtres intelligents doués de la vie aromale, celui-ci l’escadron des anges swédenborgiens, celui-là la circumnavigation des âmes à travers les astres, un autre le passage des pères dans le corps des fils, un autre le culte officiel de l’humanité abstraite, et « l’évocation cérébrale des morts chéris. » Sauf les deux premiers siècles de notre ère, jamais le bourdonnement des songes métaphysiques ne fut si fort et si continu ; jamais on n’eut plus d’inclination pour croire non sa raison, mais son cœur ; jamais on n’eut tant de goût pour le style abstrait et sublime qui fait de la raison la dupe du cœur. […] Soutenez la liberté française encore mal assurée et chancelante au milieu des tombeaux et des débris qui nous environnent, par une morale qui l’affermisse à jamais ; et cette forte morale, demandons-la à jamais à cette philosophie généreuse, si honorable pour l’humanité, qui, professant les plus nobles maximes, les trouve dans notre nature, et qui nous appelle à l’honneur par la voix du simple bon sens96. — Sorti du sein des tempêtes, nourri dans le berceau d’une révolution, élevé sous la mâle discipline du génie de la guerre, le dix-neuvième siècle ne peut en vérité contempler son image et retrouver ses instincts dans une philosophie née à l’ombre des délices de Versailles, admirablement faite pour la décrépitude d’une monarchie arbitraire, mais non pour la vie laborieuse d’une jeune liberté environnée de périls97. […] Les murs, les colonnes, les voûtes, les dalles étaient couverts d’hiéroglyphes et d’inscriptions : chaque pouce de pierre enfermait une pensée, et la cité révélée était un livre de granit où s’était consumée toute la vie de tout un peuple.
Ce sont cueillies les pensées qui cheminent aux heures moroses ou roses de la vie, celles qui font sourire dans les larmes, rayons filtrés par les lourds nuages d’orage, venant illuminer et vivifier l’âme.
Sa Vie, écrite par lui-même, est encore moins bonne ; il y a pris la licence pour la franchise, & c’est ce qui l’a engagé dans des détails qu’il auroit dû supprimer.
Une particularité à observer dans sa vie, c’est qu’il ne commença à travailler pour le Théatre qu’à l’âge de soixante ans.
Ce qu’il a fait de mieux, est un Recueil de Vies des Hommes illustres de France, qu’il a poussé jusqu’au dixieme volume.
Après cela, il ne faut chercher dans cet Ouvrage, ainsi que dans la Vie du Cardinal Charles de Bourbon, du même Auteur, d’autres objets d’utilité, qu’un amas assez indigeste d’époques & de recherches.
Des Etrennes, des Epîtres, des Fables, des Eloges, des Mémoires historiques, des Vies, des Essais sur divers sujets, des Anecdotes, des Dissertations, des Journaux, des Tablettes, des Lettres, des Histoires, des Bibliotheques, des Dictionnaires, une Traduction en Prose de Perse, & une imitation en Vers de ce même Poëte : tant de Productions seroient plus que suffisantes pour faire vivre un Auteur dans la postérité, si elles n’étoient mortes dès à present.
le Febvre a donné encore une Histoire abrégée de la Vie d’Auguste.
Baudot de Juilly, l’Histoire de Louis IX, celle de Charles VI, & celle de la Révolution de Naples ; il ne resteroit à Mademoiselle de Lussan que la Vie du brave Crillon, Ouvrage prolixe & assez mal écrit, ainsi que toutes les autres Histoires qu’elle a adoptées, si on en excepte les Anecdotes de la Cour de Philippe Auguste.
De tous les Auteurs dont il est parlé dans cette Collection, à peine douze sont connus dans la République des Lettres ; & les Mémoires qui regardent la vie de tous ces Auteurs ignorés, sont écrits d’un style si bas & si rampant, qu’on n’en peut soutenir la lecture.
Cet Auteur a laissé des Mémoires sur la Vie du Cardinal de Retz, très-recherchés, malgré l'originalité de ceux que le Cardinal a écrits lui-même.
Thomas Braun Tour à tour héroïque, légendaire, philosophe ou gamin, M. de Lautrec traverse la vie, une badine à la main, déjouant ses combinaisons, interprétant son sens occulte.
Alphonse Lemerre Dans ses poèmes descriptifs, bien que rentrant un peu trop dans le travail technique de la flore agreste et des travaux divers de la campagne, il a cependant bien rendu les scènes de la vie rurale, parfois avec émotion, toujours avec sincérité.
Antony Valabrègue a sa place dans ce groupe d’écrivains qui se sont attachés tout spécialement à décrire Paris et ses aspects pittoresques, sa vie, ses amours, ses plaisirs en même temps que la campagne environnante et les bois à la fois mystérieux et bruyants de la banlieue.
Ses Ouvrages de Théologie, & son Histoire Ecclésiastique écrite en latin, lui attirerent pendant sa vie une grande considération, qui ne subsiste plus que parmi les Théologiens.
Ce Religieux a composé une Vie du Maréchal Fabert, où la même plume se montre avec les mêmes défauts, ainsi que dans son Histoire des Loix & des Tribunaux, très-capable d’intéresser par le fond des choses, mais dégoûtante par la pesanteur de l’élocution.
On peut attribuer les disgraces de sa vie à son humeur farouche & caustique, qui le rendoit insupportable à tout ce qui l’environnoit.
Cet Ouvrage lui a procuré une grande célébrité pendant sa vie, & lui en assurera une plus solide encore dans la postérité.
Hermant a laissé beaucoup d’autres Ecrits, tels que les Vies de S.
Il est vraisemblable qu’elle eût tiré un plus grand parti de ses richesses, si les Parques eussent été d’accord avec la Fortune pour prolonger sa vie, & lui procurer cette aisance si nécessaire aux Enfans d’Apollon ; car, selon un ancien Auteur, C’est peu pour eux d’avoir ce Dieu pour pere, Si rien n’échoit du côté de leur mere.
Il cultiva & professa les Lettres presque toute sa vie.
— La Vie véritable du citoyen Jean Rossignol, publiée sur les écritures originales avec préface, notes, documents inédits (1896). — Pour le Roi, drame (1897).
Les Versiculets sont le reflet ou mieux la quintessence de sa vie.
. — La Vie de feu (1875). — Les Mariages dangereux (1878). — Les Rieurs de Paris (1880). — Les Romans du wagon (1883). — Les Jeunes Gens à marier (1886).
Sa vie, comme sa prose & ses vers, ne fut qu’un mélange de misere, de burlesque & de platitude.
La Reine mere, Anne d’Autriche, répondit au Libraire Bertier, qui n’osoit imprimer la vie du Cardinal de Richelieu, parce que l’Historien y parloit peu avantageusement de plusieurs Seigneurs de la Cour : Travaillez sans crainte, & faites tant de honte au vice, qu’il ne reste plus que de la vertu en France.
La Vie de Grotius, celle d’Erasime, celle de Bossuet, sont le fruit de ses travaux, c’est-à-dire qu’il a pris la peine de recueillir, sur ces célebres Ecrivains, différentes Pieces qui peuvent servir de matériaux à ceux qui voudront traiter les mêmes sujets d’une maniere plus intéressante.
Il vaut mieux laisser les Productions étrangeres dans l’oubli, quand on ne sait pas en faire un choix éclairé ou leur donner une nouvelle vie, que de les exposer à l’opprobre d’une seconde mort ; ce qui est arrivé précisément à tout ce dont M.
Il a écrit, dans ce goût, la Vie de S.
Cependant il a passé toute sa vie à satiriser & à plaisanter.
Anonyme C’est un livre de poésie pure, c’est aussi un livre de réalité poignante, un salut en même temps qu’un adieu à la vie, puisqu’il s’agit d’un poète, atteint du mal inguérissable de la phtisie, dont il meurt, dont il se sent mourir, agonisant amoureux de la nature, des cieux de Provence, des joies des choses, des tendres caresses de la femme, de tout ce qui ravit les autres et qu’il faut quitter.
Aussi son lyrisme indépendant a-t-il vite commencé d’éclater d’abord dans le Psautier de l’Amie et dans cette belle pièce, l’Amante du Christ, où tout est étincelle et vie.
Il est devenu lettré, instituteur, professeur, écrivain et poète ; il ne lui est rien resté du paysan, si ce n’est l’amour de la terre natale et le goût de la vie simple : Je reste vigneron et paysan dans l’âme, écrit-il encore plus tard.
que l’on seroit heureux « Dans ce beau lieu digne d’envie, « Si, toujours aimé de Silvie, « L’on pouvoit, toujours amoureux, « Avec elle passer sa vie !
Celui dont ils ont tiré le plus de parti, a pour titre, Bibliothecia pontifica, où l’Auteur donne un Abrégé de la vie des Papes, une Notice des Ecrits publiés par eux & contre eux ; ce qui suffit pour ranger le P.
] ex-Abbé, né en Bretagne, mort en 1742 ; Poëte qui n’étoit ni sans esprit, ni sans talens, mais à qui une vie dissipée ne permit pas de s’élever au dessus de la médiocrité.
On jugera toujours par ses Vies des Solitaires d’Orient, ses Lettres spirituelles, la Comédienne convertie, la parfaite Religieuse, la Vierge chrétienne, &c. en un mot par tous ses Ouvrages, qu’il eût été capable de donner plus d’exactitude & plus de perfection à son style, s’il se fût autant occupé de sa réputation littéraire, que du désir de faire servir sa pieuse industrie à inspirer l’horreur du vice, l’amour de la Religion & de la vertu.
Gens sages, en qui je me fie, M’ont dit que c’est fait prudemment Que d’y penser toute sa vie.
Les plaisanteries de l'Auteur sur les divers états de la vie, sont, à la vérité, aussi anciennes que ces états mêmes, mais elles sont renouvelées d'une maniere très-piquante & très-philosophique.
La grandeur de l’action ; car qu’y a-t-il de plus grand, que de vaincre les plus forts instincts de la nature, et de sacrifier un bien qu’on voudroit, s’il étoit possible, racheter de sa propre vie ? […] Leur coeur n’est bien exercé que de ce côté-là ; et leur vie désocupée ajoûte encore à leur penchant. […] La raison ne demandoit-elle pas qu’il cédât à la nécessité, et qu’il ne désespérât pas un homme maître de sa vie et de l’honneur même de sa fille ? […] L’autre qui lui doit la vie, prend cependant contre lui les intérêts de la justice et de l’état ; et il aime mieux s’exposer aux reproches d’ingratitude, que de trahir la sincérité qu’il doit à son roi. […] Elle lui dit, dès qu’il se présente, qu’elle ne murmure pas de son bonheur ; et qu’elle mourra contente, puisqu’à ce prix elle lui assure et la vie et l’empire ; elle ajoûte ensuite.
. — La Vie future (1850). — Histoire des martyrs de la liberté (1851). — Les Fastes populaires (1851-1853).
. — Scènes de la vie castillane et andalouse (1835).
Il fit un Poëme sur la Vie de J.
Nos vies sont pesle-mesle assorties De bien & mal : encor, de toutes parts, Croissent toujours, dans ce jardin espars, Là, peu d’œillets ; ici, beaucoup d’orties.
La Vie de Virgile & celle de Mécène sont aussi sagement que correctement écrites ; la derniere sur-tout mérite d'être lue par les recherches curieuses qui l'enrichissent.
La mystérieuse difficulté de la vie sort de toutes les trois.
Il y a un moment dans la vie de l’artiste où, muni de toute sa science et riche de tous ses matériaux, fort de son entière expérience et encore en possession de toute sa force, mais pressentant qu’elle pourrait bien faiblir un jour et lui échapper, il se lance à fond de train, se déploie, s’abandonne avec fureur et sans plus de réserve comme s’il voulait s’épuiser et laisser son âme dans son œuvre : c’est le moment décisif, c’est celui qui, dans une grande bataille rangée, décide et achève la victoire. […] Il y avait quelque chose de fort imposant dans ce cortège qui marchait avec une grande rapidité et comme s’il craignait d’être rattrapé par un ennemi. » Je passe sur le reste du voyage où les contrariétés mêmes, les retards et les coups de vent tournent à intérêt et sont au profit de la curiosité ; jamais six semaines d’une vie ne furent employées plus vivement (mars-mai 1845). […] Les événements de 1843 dérangèrent fort la vie et, un moment, la carrière d’Horace Vernet. […] La peinture est une maîtresse qui passe de main en main sans jamais vieillir ; avec un peu de jugement on doit s’en éloigner avant quelle ne vous joue de mauvais tours ; du reste, c’est le secret de la vie tout entière.
Depuis, la maison resta inhabitée, et tomba lentement en ruine, comme toute demeure à laquelle la présence de l’homme ne communique plus la vie. […] XIV « Rien dans ce jardin ne contrariait l’effort sacré des choses vers la vie ; la croissance vénérable était là chez elle. […] XV « En floréal, cet énorme buisson, libre derrière sa grille et dans ses quatre murs, entrait en rut dans le sourd travail de la germination universelle, tressaillait au soleil levant presque comme une bête qui aspire les effluves de l’amour cosmique et qui sent la sève d’avril monter et bouillir dans ses veines, et, secouant au vent sa prodigieuse chevelure verte, semait sur la terre humide, sur les statues frustes, sur le perron croulant du pavillon et jusque sur le pavé de la rue déserte, les fleurs en étoiles, la rosée en perles, la fécondité, la beauté, la vie, la joie, les parfums. […] Dans les vastes échanges cosmiques, la vie universelle va et vient en quantités inconnues, roulant tout dans l’invisible mystère des effluves, employant tout, ne perdant pas un rêve de pas un sommeil, semant un animalcule ici, émiettant un astre là, oscillant et serpentant, faisant de la lumière une force et de la pensée un élément, disséminée et indivisible, dissolvant tout, excepté ce point géométrique, le moi ; ramenant tout à l’âme atome ; épanouissant tout en Dieu ; enchevêtrant, depuis la plus haute jusqu’à la plus basse, toutes les activités dans l’obscurité d’un mécanisme vertigineux, rattachant le vol d’un insecte au mouvement de la terre, subordonnant, qui sait ?
C’est à l’imitation étrangère qu’appartiennent ces désespoirs, ces alternatives de feu et de glace, ces cœurs Meurdris, couverts de sang, percés de toutes parts, Au milieu d’un grand feu qu’allument des regards ; ces vies « ravies par des yeux foudroyants, ces yeux « où le beau soleil tous les soirs se retire » ; ces plaies incurables, et tout ce détail du martyre amoureux : … les angoisses mortelles, Les diverses fureurs, les peurs continuelles Les injustes rigueurs, les courroux véhéments, Les rapports envieux, les mécontentements etc. […] Jusqu’à cette époque on ne sait rien ne sa vie, sinon qu’ayant quitté son père, gentilhomme de Caen119, parceque celui-ci s’était fait huguenot, il vint en Provence, et s’attacha au grand prieur de Provence, Henri d’Angoulême. […] Il y a peu d’hommes moins lyriques que Malherbe, à voir sa vie ; et je ne lui connais d’enthousiasme que contre les méchants vers. […] Que prétendait Malherbe par sa réforme, sinon faire voir aux poëtes de son temps que ce qui leur était imposé par le tour d’esprit d’alors, par l’imitation de l’Italie et par le faux savoir, ne valait pas ce que leur bon sens, cultivé par les lettres anciennes, et développé par l’expérience de la vie, leur inspirait, comme à leur insu, de pensées franches et naturelles ?
C’est que si Tristan et Isolde avaient vraiment la prétention de nous enseigner la philosophie de Schopenhauer, il n’y aurait qu’à les renvoyer à l’école pour mieux apprendre leur leçon, car toute leur vie, tous leurs actes, toutes leurs paroles sont en contradiction flagrante avec la doctrine du philosophe. […] Celui qui se suicide veut la vie, il se plaint seulement des conditions spéciales qui l’entourent… C’est parce qu’il ne peut cesser de vouloir qu’il cesse de vivre… (I, 471, et dans presque tous les écrits de Schopenhauer). […] Ces tropes de la nuit et du jour, de la mort et de la vie, traînent depuis trois mille ans dans toutes les poésies. […] Dans les paroles de cette scène, qui sont d’un vague admirable, il voit l’énoncé précis d’un système philosophique ; dans la musique, qui est une révélation inondant de lumière la vie de ces âmes, il voit « une page unique » mais « qui rend tout simplement les mouvements extérieurs des amants et leurs amoureux transport. »[NdA] 4.
Comédie, au reste, cela voulait dire (on ne le sait pas toujours) χὼμοι bourgade, et ωδὴ chant, c’est-à-dire chant des faubourgs, le chant de la joie et de la liberté quelque peu avinée, la chanson joyeuse de la vie errante : Vie errante Est chose enivrante ! […] Mais le ridicule qui est quelque part, il faut l’y voir, l’en tirer avec grâce et d’une manière qui plaise et qui instruise. » Il disait aussi, et l’on croirait entendre Molière, mais un Molière plus correct et plus châtié : « Le philosophe consume sa vie à observer les hommes, et il use son esprit à en démêler les vices et les ridicules. […] C’est l’origine de toutes les occupations tumultuaires des hommes et de tout ce a qu’on appelle divertissement ou passe-temps, dans lesquels on n’a, en effet, pour but, que d’éviter, en perdant cette partie de la vie, l’amertume qui accompagne l’attention que l’on ferait de soi-même. — Pauvre âme qui ne trouve rien en elle qui la contente, qui n’y voit rien qui ne l’afflige, quand elle y pense, il suffit, pour la rendre misérable, de l’obliger de se voir et d’être avec soi.
. — Esquisses poétiques de la vie (1841). — Harmonie de l’intelligence humaine (1845).
Paul Arène Païen avant tout, Gustave Mathieu aime et fait aimer la vie.
Oui, et cette immoralité s’étale dans toute son horreur lorsque l’on voit disparaître des créatures à peine écloses à la vie et si particulièrement douées… Les lettrés peuvent pleurer la mort de Charles Read ; il eût été un des leurs et non l’un des moins vaillants.
Castellan se servit, sous Henri II, du crédit que lui donnoit sa place de Grand-Aumônier, pour assurer des fonds qui fournissent à la subsistance des Filles-Repenties, qui, avant ce temps, alloient mendier le jour, & ne revenoient que le soir dans leur retraite ; genre de vie qui pouvoit les exposer à de nouveaux repentirs.
Une chose qui doit étonner, c’est que Charpentier, occupé toute sa vie à traduire les Auteurs Grecs & Latins, se soit rangé au nombre de leurs détracteurs.
Ce seroit toujours beaucoup, si le Public eût confirmé les éloges du Tribunal ; mais le vernis philosophique, répandu sur le Poëme de la Rapidité de la Vie, & sur le Discours en vers sur la Philosophie, n’en a pas imposé aux vrais Connoisseurs sur le défaut d’intérêt, de poésie & de vrai talent qu’ils y ont remarqué ; ce qui n’a pas empêché de regarder ces deux Poëmes comme très-supérieurs à ceux qui ont eu le Prix.
Il sera bon de faire remarquer que cet Auteur, malgré la médiocrité de ses talens, avoit fait gagner plus de cent mille écus à son Libraire, & qu’il termina sa vie dans la plus affreuse pauvreté.
Le plus connu, & celui qui mérite le plus de l'être, est la Vie des Hommes illustres, comparés les uns avec les autres, depuis la chute de l'Empire Romain jusqu'à nos jours.
On lui donna pendant sa vie le surnom de dixieme Muse, à cause de son esprit, & de quatrieme Grace, à cause de sa beauté.
Entendons-nous bien : ce ne serait pas d’avoir eu dans sa longue vie quelques amis attachés et fidèles qu’on pourrait raisonnablement lui faire un crime : le triste et le fâcheux, ç’a été la succession et le renouvellement à l’infini, c’est la liste et la kyrielle. […] il m’a bien payée du goût que j’ai pris toute ma vie à le lire, et il m’a appris bien des choses en m’amusant”. » Sa Correspondance avec Voltaire, relue aujourd’hui, est à son avantage.
C’était sur la fin de l’été et de sa vie, en 1869, après la publication, dans le Temps, de sa grande étude sur Jomini. […] Une récompense décernée à cet officier dans le moment où sa vie et sa mort sont encore incertaines, peut hâter sa guérison ou lui donner, en mourant, la satisfaction la plus chère à celui qui a versé son sang pour la patrie.
Le roi dispensant les hautes classes de travailler au bien public, ce loisir développe les relations sociales, et donne un éclat intense à la vie de société. […] Elle exprime sereinement, impartialement, le monde et la vie, dans leur commune réalité, sans aspirer à en changer les conditions actuelles.
Quelques-uns des médaillons de dix vers qu’il a intitulés : Promenades et intérieurs, sont de petits chefs-d’œuvre, et telle est la puissance de la forme, que cela existe et palpite de vie et resplendit dans la lumière, bien que la matière qu’il a mise en œuvre se réduise au plus bas minimum possible ; mais l’artiste est vraiment le créateur qui tire des êtres du néant. […] [La Vie littéraire (1889-1890).]
Nous nous blasons même des excellents paysages norwégiens, des Harrison et des Mesdag, qui nous prirent tant il y a quelques années, nous sommes saturés du plein air et de la pleine vie, mais n’est-ce pas déjà charmant de constater la réunion de deux ou trois jeunes talents, les Aman-Jean, les Louis Picard, les Jean Veber ? […] Selon les hasards de la vie il s’accrochera à l’Institut et ne fera que poncif, ou à la Révolution et ne fera que violent. — Pour tous ceux qui ont du talent, il faut ouvrir les portes.
L’état de grossièreté où reste, chez nous, par suite de notre vie isolée et tout individuelle, celui qui n’a pas été aux écoles est inconnu dans ces sociétés, où la culture morale et surtout l’esprit général du temps se transmettent par le contact perpétuel des hommes. […] Mais la poésie religieuse des psaumes se trouva dans un merveilleux accord avec son âme lyrique ; ils restèrent toute sa vie son aliment et son soutien.
Je ne veux parler, que du livre de Mme Quinet et des impressions de Mme Quinet et de l’éclosion subite et tardive de Mme Quinet dans la vie politique et littéraire, car je ne sache pas qu’elle ait jamais écrit, avant le siège de Paris. […] désormais régler notre vie.
C’est comme une dentelle qui peut se déchirer à tous les angles de la vie… Elle a de la délicatesse. […] Elle n’a pas le regard qu’on rabat du ciel sur les choses de la vie et qui, tombant de si haut, va au fond… C’est une femme du monde, qui peint une société dont les surfaces l’attirent, bien plus qu’un romancier moraliste qui prend les passions et les jauge partout où elles sont… Mais, si elle n’est pas, si elle ne peut pas être le moraliste à la façon des grands romanciers qui savent l’ordre le cœur humain pour tirer la morale du sang, des larmes et de la fange qu’ils en font sortir, elle est toujours et partout la plume pure que j’ai dit qu’elle était.
» Prévost-Paradol fit l’effet d’un être vivant dans le journal des gnomes et des fantômes, et on y salua son apparition comme celle de la vie. […] dans une oisiveté désolante, il ne croyait pas à autre chose qu’à ces deux messieurs en sa personne et à leurs talents cachés, qu’il eut fait reluire au soleil de la vie publique si seulement, il y a quelques années, il avait été au Journal des Débats.
Quelle peut être sur nous l’influence vivante et sincère de cet art, extérieur je le veux bien, mais dont la prétention est la simplification dans l’harmonie, alors que l’ambition de l’art, en ces derniers temps, est une concentration, aussi profonde qu’elle puisse être, dans l’harmonie aussi, mais dans une harmonie qui ne fond rien en elle pour tout unir, et, au contraire, donne la plus violente intensité à chaque détail et voudrait décupler les forces les plus vives de la vie ! […] Girard, du pittoresque, ce grand souci de l’art moderne, qui ne croit pas à la vie sans la couleur, pas plus dans les compositions littéraires que dans les compositions plastiques, — pas plus sur la toile que dans l’histoire, — et de cette insouciance, très inférieure selon nous, M.
Les circonstances sont les coups de marteau qui enfoncent le clou, droit ou de travers, dans la vie. […] Collé, le Triboulet dramatique, savait la vie.
Les détails mêmes, les arabesques si chères à la Fantaisie, à cette Belle au Bois dormant qui s’est assoupie au branle monotone de la littérature de Louis XIV et que la gloire du xixe siècle sera d’avoir réveillée, toutes ces choses qui ne sont pas la poésie elle-même, mais qui y touchent, ne paraissent point là en réalité ce qu’on les croyait à distance : « Pour faire un paradis persan, — disait Lord Byron en plaisantant, — il faut beaucoup de ruisseaux de limonade et des milliers de longs yeux noirs. » Pour faire un poème indien, la méthode ne serait peut-être pas beaucoup plus compliquée… Les fragments de Colbrooke et la Sacountala, quoique traduite avec la bégueulerie française par M. de Chézy (un homme qui aurait appris la Trénis aux Bayadères), ont suffisamment montré que la métaphore indienne était vite épuisée, comme il doit arriver toujours chez les peuples immobiles, qui n’observent pas, qui n’agissent point, et qui vivent de la vie végétale de l’humanité. […] On sent bien en elle quelque chose de dépaysé, d’étranger, quelque chose qui n’est pas de l’Inde, mais qui sert à faire mieux comprendre que sans remonter jusqu’aux chefs-d’œuvre enfantés par la civilisation chrétienne, le premier poème venu de nos climats, imprégné de Christianisme, la première vie des Saints de nos plus humbles légendes, sont plus purement et plus profondément poétiques que tous les épisodes mis ensemble de la singulière épopée que l’on nous donne pour la gloire de l’esprit humain !
II Et ce serait une intéressante page de biographie à écrire et qui éclairerait la Critique… M. l’abbé Gorini, au doux nom italien, est un prêtre de Bourg qui a passé la plus longue partie de sa jeunesse et de sa vie dans un des plus tristes pays et une des plus pauvres paroisses du département de l’Ain, si pour les prêtres qui vivent, les yeux en haut et la pensée sur l’invisible, il y avait, comme pour nous, des pays tristes et de pauvres paroisses, et si même la plus pauvre de toutes n’était pas la plus riche pour eux ! […] Les prêtres vraiment prêtres n’ont ni nos manières de juger, ni nos manières de sentir la vie ; ils ne se laissent pas conduire par l’influence de nos misérables sentimentalités, et d’ailleurs peut-il y avoir une solitude pour qui fait descendre son Dieu tous les matins dans sa poitrine ?
Avec le genre d’occupations et de préoccupations auxquelles M. le docteur Tessier a dévoué sa vie, on peut s’étonner qu’il fasse partie de ces « derniers Romains » qui périront probablement à la peine et à l’honneur de la vérité ; mais, s’il y a là une raison pour être surpris, il y en a une autre pour applaudir et pour admirer ! […] Méconnaissance de la nature spirituelle de l’homme qu’on définit un mammifère monodelphe bimane, et rien de plus, négation de l’unité de la race humaine, affirmation de l’activité de la matière, confusion de la physiologie et de l’histoire naturelle, au mépris des traditions médicales, depuis Hippocrate jusqu’à nos jours, enfin l’opinion qui implique le matérialisme le plus complet : « Que la vie ne doit pas être considérée comme un principe, mais comme un résultat, une propriété dont jouit la matière, sans qu’il soit nécessaire de supposer un autre agent dans le corps », toutes ces solutions et beaucoup d’autres de la même énormité sont attaquées et ruinées de fond en comble par le rude jouteur des Études.
On conçoit qu’il n’aime pas à se regarder dans ces imitations et à se trouver trop soi dans ces glaces dont il a fourni l’étamage, — ce qui est trop cher ; mais les hugolâtres s’excommuniant eux-mêmes de leur hugolâtrie, et se mettant à la porte de l’imitation hugotine qui est toute leur Église, et hors de laquelle il n’y a pour eux ni vie ni salut, cela réellement ne se comprend plus ! […] J’ai dans ma vie vu bien des êtres creux, coupes et cruches, bassins de toute espèce, imbécilles, ouverts et béants à toutes les choses qu’on jette dans leur vide, mais de capacité à tenir tout un homme, et quel homme !
Mais nous avons appris tout à coup que MM. de Goncourt devenaient romanciers, et romanciers contemporains, romanciers du dix-neuvième siècle, et qu’ils quittaient leur vieux vestiaire du dix-huitième siècle pour l’observation présente, la vie vivante, la réalité ! […] Ils ont été entraînés au dialogue, au monologue, à la lettre, au mémorandum, à toutes les formes littéraires possibles, se succédant sans raison d’exister que la fantaisie, mais pour moi, je ne croirai jamais qu’ils aient songé à refaire ce roman de Balzac, qui ne se refera jamais, par la raison qu’on ne refait que ce qui est manqué, et dans lequel la vie littéraire du dix-neuvième siècle a été transpercée d’une lumière qui en a fait voir les plus lâches misères et les plus féroces vanités.
Le Diable boiteux de Lesage, les Mémoires du Diable de Frédéric Soulié, ce Shakespeare des portières, dans lesquels il y a tant de vie et de vérité pourtant, ne reposent, après tout, que sur les plus grossières inventions fantastiques ; mais les Mémoires d’une femme de chambre, qui sont aussi des Mémoires du Diable à leur façon, s’appuient sur une donnée humaine d’un tout autre intérêt et d’une toute autre réalité ! […] Et si ce n’était pas une vraie femme de chambre (comme je le voudrais) qui eût écrit ces Mémoires, timbrés de sa qualité, de son impayable qualité, et qui, pour cela, semblaient nous promettre des révélations auxquelles le génie lui-même ne pourrait pas se substituer, je me disais que c’était au moins un esprit hardi, pénétrant, riche en expériences de tout genre, amères ou bouffonnes, consommé dans l’observation de la vie, cette étude qui nous mange le cœur, pour vouloir jouer ce difficile rôle de femme de chambre qui veut tout dire dans un livre, que ce livre soit, d’ailleurs, d’un moraliste de fonction, ou d’un romancier !
Il couchoit tantôt à la belle étoile, tantôt dans les chaises à porteur qui sont au coin des rues ; genre de vie nullement propre à favoriser les dons du génie.
Les Belles-Lettres furent l’étude de sa jeunesse, & la Poésie latine fut, tout le temps de sa vie, l’objet de ses délassemens.
Sa Tragédie de Pénélope, restée au Théatre, est aujourd’hui le seul de ses Ouvrages qui ait une apparence de vie.
LEGENDRE, [Louis] Chanoine de Notre-Dame de Paris, né à Rouen en 1655, mort à Paris en 1733, Auteur d’une mauvaise Histoire de France en sept volumes in-12, d’une Vie du Cardinal d’Amboise qui ne vaut guere mieux, & de plusieurs autres Ouvrages, parmi lesquels il y en a un très-estimé & très-digne de l’être.
Un seul trait fera connoître combien il s’inquiétoit peu des commodités de la vie.
Les Regles de la vie chrétienne, du même Auteur, sont également remplies de maximes solides, de sages principes.
Le fait est que depuis bien du temps il n’y a pas beaucoup de vie et qu’on ne court pas.
Jules Barbey d’Aurevilly La Muse de M. de Beauvoir a plus d’un rapport avec une célèbre courtisane, restée sincère et tendre, malgré les dissipations de sa vie.
Dans son dernier recueil (Prières), je ne trouve pas assez d’habileté d’art pour séduire mes mauvais instincts de rhéteur, ni les sensations d’humanité et de vie que réclame ma sensibilité naturelle.
C’est un poème en prose, plein de vie et haut en couleur : « Et un grand souffle d’amour passa sur Israël.
Sainte-Beuve De vous je ne parlerai non plus, harmonieux poète de la vie domestique et des joies du Foyer (les Chants du foyer), Madame Auguste Penquer, qui avez, depuis, étendu votre vol et enhardi votre essor dans les Révélations poétiques (1865) ; âme et lyre également bien douées, à la note large et pleine, aux cordes sensibles et nombreuses ; que rien de particulièrement breton ne distingue, si ce n’est l’amour du pays natal ; qui avez mérité d’être saluée comme une jeune sœur de ceux que vous nommez « le Cygne de Mâcon » et « l’Aigle de Guernesey », et qui n’avez qu’à vous garder d’un éblouissement trop lyrique en présence des demi-dieux.
Sa personnalité politique s’y dessine mieux que dans les termes généraux de la satire… La meilleure pièce des Italiennes est celle que l’auteur adresse à Chateaubriand… Veyrat n’est pas seulement une des figures poétiques, c’est une des âmes, un des témoins de ce temps-ci : un Donoso Cortès de la Savoie… Sa lyre et son âme, sa vie et son œuvre sont une même chose.
Les Vies qu’on a de lui, & principalement celles de S.
L’ingénu M. de Coulanges nous apprend encore qu’il a fait plus de dix mille vers en sa vie, & qu’à l’exception de quatre mille, qui composent son Recueil, tous les autres ont été la proie des flammes : « Sacrifice affreux, sans doute, pour un pere, s’écrie-t-il, de livrer ainsi au feu des enfans conçus avec tant de peine, & si tendrement aimés.
Mais il est encore temps d’apprendre aux jeunes gens, susceptibles d’être dirigés vers les sources du génie, qu’on ne peut devenir un grand Homme, qu’en s’attachant à la lecture des grands Modeles, & que ce n’est qu’en allumant son flambeau aux rayons du soleil, qu’on peut, comme Prométhée, communiquer à ses Ouvrages le feu qui leur donne la vie.
Quoiqu’il ne faille pas juger de cet Auteur par ce qu’en ont dit plusieurs Faiseurs de Brochures, &, entre autres, Chevrier ; il n’en est pas moins vrai que sa vie a été agitée par des événemens singuliers & très-fâcheux.
Sa vie fut à peu près semblable à celle de l'Abbé des Ivetaux ; l'un & l'autre sacrifierent tout au plaisir, sans excepter l'honneur.
Abadie un cœur fraternel ; le simple labeur qui sert de balancier à sa vie épanouit en lui la sympathie et la miséricorde.
Gustave Kahn Le sujet de ce poème, car l’Esprit qui passe est bien une sorte d’épopée à la fois enchaînée et variée, c’est-à-dire composée de poèmes simplement juxtaposés d’après une unité de sujet, de rythme et de mouvement, en somme la forme actuelle du poème, ce serait la vie en un poète de l’Esprit, se cherchant dans le passé pour prendre conscience de lui-même.
. — Les Arts de la vie et le Règne de la laideur (1899).
Les marbres qu’il touche semblent reprendre vie comme sous la baguette d’une fée… [La Presse (1900).]
Parfois, le soir, cette eau sans vie et sans lumière, Au bruit d’un pas furtif parti d’une clairière, Brusquement se réveille et tressaille. — Il en sort Tout effaré, le cou raidi, criant d’angoisse Ennui les rameaux nus, qu’il éclabousse et froisse, Un canard au jabot de moire, — vert et bleu.
le Brun de Granville fut, pendant sa vie, un des aboyeurs secondaires de la Philosophie.
Lacombe la Traduction de quelques Ouvrages Anglois, tels que les Lettres de Milord Shastersbury sur l’enthousiasme, les Lettres historiques & philosophiques du Comte d’Oreri, sur la Vie & les Ouvrages du Docteur Swift, quelques Poésies de Pope & de Dryden, &c.
Le Roi de Prusse le défendit lui-même pendant sa vie ; il l’a même défendu après sa mort : preuve certaine que les véritables Grands Hommes ne perdent rien en cessant d’exister.
Rochefort, [N.ABCD] de l'Académie des Inscriptions & Belles-Lettres, né en 17.. connu avantageusement dans la Littérature par une Traduction en Vers de l'Iliade & de l'Odyssée d'Homere, où l'on trouve une versification aisée, noble, animée, & quelquefois nerveuse, mais dépourvue en général de ce coloris qui donne la vie aux pensées & aux sentimens, de cette variété de tours qui fait disparoître la monotonie, & de ce choix de termes qui rend le Vers toujours poétique.
Ceux qui se plaindroient qu'on ait prodigué tant d'esprit & d'imagination sur un sujet aussi mince que la Vie des Comédiens, ne savent peut-être pas que l'arme du ridicule étoit déjà nécessaire du temps de Scarron, pour corriger l'extravagance & abattre l'orgueil de ces Messieurs.
Devaux, Chirurgien de Paris, le Précis historique sur la Vie & les Ouvrages de M.
J’ai donc pensé que je dégageais un sentiment et une ressemblance de plus entre nous, en dédiant à l’auteur des Artistes vivants, ces Romanciers vivants, qui sont aussi des peintres ou des sculpteurs, à leur façon, comme vos artistes, puisque, comme eux, mais avec des procédés différents, ils s’efforcent d’exprimer la Vie et veulent atteindre à la Beauté.
Cette assimilation est utile dans la vie pratique, et nécessaire dans la plupart des sciences.
À ces causes, considérant que les sciences et les arts n’illustrent pas moins un grand État que font les armes, et que la nation française excelle autant en esprit comme en courage et en valeur ; d’ailleurs désirant favoriser le suppliant et lui donner le moyen de soutenir les grandes dépenses qu’il est obligé de faire incessamment dans l’exécution d’un si louable dessein, tant pour paiement de plusieurs personnes qu’il est obligé d’y employer que pour l’entretien des correspondances avec toutes les personnes de savoir et de mérite en divers et lointains pays ; nous lui avons permis de recueillir et amasser de foules parts et endroits qu’il advisera bon être les nouvelles lumières, connaissances et inventions qui paraîtront dans la physique, les mathématiques, l’astronomie, la médecine, anatomie et chirurgie, pharmacie et chimie ; dans la peinture, l’architecture, la navigation, l’agriculture, la texture, la teinture, la fabrique de toutes choses nécessaires à la vie et à l’usage des hommes, et généralement dans toutes les sciences et dans tous les arts, tant libéraux que mécaniques ; comme aussi de rechercher, indiquer et donner toutes les nouvelles pièces, monuments, titres, actes, sceaux, médailles qu’il pourra découvrir servant à l’illustration de l’histoire, à l’avancement des sciences et à la connaissance de la vérité ; toutes lesquelles choses, sous le titre susdit, nous lui permettons d’imprimer, faire imprimer, vendre et débiter soit toutes les semaines, soit de quinze en quinze jours, soit tous les mois ou tous les ans, et de ce qui aura été imprimé par parcelles d’en faire des recueils, si bon lui semble, et les donner au public ; comme aussi lui permettons de recueillir de la même sorte les titres de tous les livres et écrits qui s’imprimeront dans toutes les parties de l’Europe, sans que, néanmoins, il ait la liberté de faire aucun jugement ni réflexion sur ce qui sera de la morale, de la religion ou de la politique, et qui concernera en quelque sorte que ce puisse être les intérêts de notre État ou des autres princes chrétiens. […] Par malheur, Mézeray, dans ce genre de vie, pas plus que dans son style, ne sut éviter le bas ; il était devenu un anachronisme sous le règne de Louis XIV. […] Dans sa dernière maladie, Mézeray, qui n’obéissait en rien au respect humain ni à l’esprit de système, fit amende honorable devant témoins sur les points capitaux de la croyance : « Oubliez, dit-il, ce que j’ai pu autrefois vous dire de contraire, et souvenez-vous que Mézeray mourant est plus croyable que n’était Mézeray en vie. » Il mourut le 10 juillet 1683, laissant un testament qu’on a publié et qui prête aux commentaires.
Si l’on allait plus au fond, même sans prétendre au technique, on trouverait les caractères des divers généraux vivement dessinés d’après leurs actions mêmes : le maréchal Daun, prudent, circonspect, méthodique, à qui il arrive un jour de galoper pour la première et la dernière fois de sa vie, et qui, après la victoire de Hochkirch, se met à écrire à Marie-Thérèse pour sa fête de sainte Thérèse la relation de la victoire, au lieu de donner les derniers ordres pour la poursuivre ; il s’appuie sur une pierre pour écrire : « Cette pierre-là fut notre pierre d’achoppement », dit le prince de Ligne qui aimait les jeux de mots, surtout si dans ces gaietés sur le mot il y avait de l’imagination. […] Parmi les ouvrages décousus échappés au prince de Ligne dans la première moitié de sa vie, et qui le peignent le mieux à cette date, je distingue ce qu’il a écrit sur les jardins à l’occasion de ceux de Belœil. […] Un tableau sans figures ressemble à la fin du monde. » Pourtant le prince de Ligne, dans les dernières années de sa vie passées à son Refuge sur le Leopoldsberg près de Vienne, paraîtra en être venu à admirer plus véritablement la nature pour elle-même.
La vie politique et administrative de M. […] Ces multitudes d’hommes dévoués, qui ont fait d’avance à leur pays le sacrifice de leur sang et de leur vie, ne lui demandent que leurs besoins physiques, mais ils les demandent impérieusement. […] Il voulait plus encore : il avait trente-sept ans ; il voulait faire une grande comédie en cinq actes et en vers, se surpasser, livrer sa grande bataille comme tout talent doit essayer, une fois au moins dans sa vie, de la livrer avec toutes ses forces.
De plus il a sous lui toute une élite d’hommes secondaires que cette histoire nous découvre et qui prennent figure et vie à nos yeux : — en première ligne, Martinet, lieutenant-colonel du régiment du Roi, mort maréchal de camp, officier modèle, dont le nom devient proverbial dans l’armée, et qui est l’instrument de la réforme, le parfait instructeur, le praticien de la discipline nouvelle dans l’infanterie ; — après lui, le chevalier de Fourilles, qui rend des services pareils, et qui est un autre Martinet pour la cavalerie ; — des intendants comme Chaniel, agent zélé, ferme, intelligent, dont les plus grands généraux redoutent les écritures, qui ne paraît pas en avoir abusé toutefois, et que Louvois, fidèle au principe de la séparation des pouvoirs, soutient sans broncher dans ses contestations avec les maréchaux victorieux, après la conquête. […] Ce n’est pas à réussir sur l’heure et pour un jour qu’il vise, comme cela suffit aux charlatans, c’est à s’acquérir l’estime des connaisseurs et de ceux qui en jugeront plus tard à l’usage : « Ce n’est pas ici un jeu d’enfants, écrivait-il à propos de ce même Dunkerque, et j’aimerais mieux perdre la vie que d’entendre dire un jour de moi ce que j’entends des gens qui m’ont devancé. » Plein de bonnes raisons, et de celles qu’il donne, et de celles qu’il garde par devers lui dans un art qui a ses secrets, il s’impatiente et s’irrite même des chicanes et des objections qu’on élève quand il a le dos tourné ; il s’en plaint au ministre et d’un ton parfois un peu brusque. […] Il voudrait faire mentir ceux qui disent « que les Français commencent tout et n’achèvent jamais rien. » Il voudrait les désabuser de ce faux point d’honneur qui, dans les sièges, quand il est tout préoccupé, par ses inventions savantes, de ménager la vie des hommes, leur fait prodiguer la leur, sans utilité, sans aucune raison et par pure bravade ; « Mais ceci, disait-il, est un péché originel dont les Français ne se corrigeront jamais, si Dieu, qui est tout-puissant, n’en réforme toute l’espèce. » Hormis ce pur et irréprochable Vauban, tous ceux qui figurent dans cette histoire, y paraissent avec leurs qualités et leurs défauts ou avec leurs vices : Condé, avec ses réveils d’ardeur, ses lumières d’esprit, mais aussi avec des lenteurs imprévues, des indécisions de volonté (premier signe d’affaiblissement), et avec ses obséquiosités de courtisan envers le maître et même envers les ministres ; Turenne, avec son expérience, sa prudence moins accrue qu’enhardie en vieillissant, et son habileté consommée, mais avec ses sécheresses d’humeur et ses obscurités de discours ; Luxembourg, avec ses talents, ses ardeurs à la Condé, sa verve railleuse, mais avec sa corruption flagrante et son absence de tout scrupule ; Louvois, avec sa dureté et sa hauteur qui font comme partie de son génie et qui sont des instruments de sa capacité même, avec plus de modération toutefois et d’empire sur ses passions qu’on ne s’attendait à lui en trouver.
Un passage de La Bruyère, qui l’avait frappé dans sa jeunesse, est devenu, nous dit-il, le programme et comme le texte de toute sa vie : « Il faut, en France, beaucoup de fermeté et une grande étendue d’esprit pour se passer des charges et des emplois, et consentir ainsi à demeurer chez soi et à ne rien faire. […] Il n’est pas difficile, après une vie longue, quand on a entendu tout le monde et vu les dénouements, de venir faire, à propos de chaque personnage célèbre, une espèce de compilation de jugements, une cote tant bien que mal taillée, et de la donner sans y mettre le relief et la façon. […] Delécluze ouÉtienne, qui a passé sa vie à se croire classique et à défendre plus ou moins l’orthodoxie en littérature ou en art, serait, à cette heure-ci, rejeté de tous les classiques, s’il y en avait encore, et au nom même de ce qu’il a professé : je ne lui vois d’asile et de refuge à espérer que in partibus infidelium, parmi ceux qu’il a tant conspués, et qui l’accueillent volontiers, qui lui font place, en faveur d’un joli roman naturel, de quelques dessins vrais et frappants, de quelques descriptions fidèles et qui ont le cachet de leur date : Mademoiselle de Liron, son chef-d’œuvre, l’Atelier de David, et quelques pages et portraits des Souvenirs.
Il y a, au Cabinet des Estampes, jusqu’à trente portraits gravés de ce prélat, qui évidemment aimait à se contempler et à se voir reproduit dans sa noblesse et dans ses grâces ; il y est représenté à tous les âges, sous toutes les formes, abbé, docteur, archevêque de Rouen, archevêque de Paris, à tous les degrés de sa vie ou de ses dignités. […] Au sortir de là et sa démission obtenue, le roi avait nommé M. de Marca, un savant homme, un ancien magistrat devenu homme d’Église, et qui mourut brusquement dans le temps même où il recevait ses bulles : on se rabattit alors à messire Hardouin de Péréfixe, ancien précepteur du roi, écrivain assez agréable dans sa Vie de Henri le Grand, assez instruit, assez bonhomme, mais sans caractère, sans élévation d’âme ni aucune dignité extérieure : il ne fut jamais au niveau de sa haute position, et il encourut en plus d’un cas le ridicule. […] Il y a dans sa vie ecclésiastique et politique assez de faits importants, d’actes de premier ordre, pour mériter examen, analyse et tableau.
La littérature classique bien conçue n’a pas seulement à s’occuper des chefs-d’œuvre de la langue, tragédies, épopées, odes, harangues et discours, elle ne néglige pas les victoires : je veux dire les victoires illustres, celles qui font époque dans la vie des nations. […] Mais il est beau que sa fortune fasse la fortune publique. » Et songeant moi-même à Villars, à Masséna, à ces grands hommes de guerre qui ont eu des vices, mais qui peuvent aussi montrer dans leur vie ces nobles pages, Rivoli, Essling et Zurich, ou bien Friedlingen, Hochstett et Denain, je dirai qu’il convient de leur appliquer les paroles de Périclès dans l’Éloge funèbre des guerriers morts pour Athènes : « A ceux qui ont de moins bonnes parties il est juste que la valeur déployée contre les ennemis de la patrie soit comptée en première ligne ; car le mal disparaît dans le bien, et ils ont été plus utiles en un seul jour par ce service public, qu’ils n’ont pu nuire dans toute leur vie parleurs inconvénients particuliers. » C’est la conclusion qui me paraît la plus digne pour ce chapitre d’histoire.
Il y a eu dans les deux communions des réveils, des coups de baguette impérieux et puissants, des coups de trompette, de grands talents, de belles âmes éloquentes, ardentes, qui ont essayé de fondre les divisions artificielles, de dégager le vrai courant, de reporter les esprits aux hauteurs et aux sources, de ne s’attacher qu’à ce qui est la vie ; et je le dirai avec la conscience de ne faire injure à aucun, s’il y a eu d’un côté Lacordaire, ce regard flamboyant, cette parole de feu, on a eu de l’autre Adolphe Monod, cette âme d’orateur et d’athlète chrétien qui, à ceux qui l’ont vue de près dans son agonie suprême, a rappelé le martyre et l’héroïsme de Pascal. […] Au fond Mme de Gasparin a beau faire, elle n’est pas contrite, elle n’est pas triste ; elle est bonne et compatit aux tristesses ; elle a l’âme noblement ambitieuse, altérée de vie, ayant soif de bonheur, jalouse de le conquérir pour le communiquer, pour le répandre autour d’elle ; c’est une vaillante, une infatigable qui chante son Excelsior en montant toujours le plus haut qu’elle peut sur la montagne. […] Elle aussi, elle a visité les montagnes : dans les dernières années de sa vie, malade, on l’envoya prendre les eaux à Cauterets ; elle dut quitter sa chambre du Cayla, cette chambrette bien aimée devenue caveau par tout ce qu’elle contenait de chères reliques, un vrai « cloître de souvenirs. » Elle ne se plut que médiocrement dans les Pyrénées, « la plus magnifique Bastille où l’on puisse être renfermé », disait-elle, et, sa saison faite, elle fut heureuse d’en sortir.
Dans l’hiver, nous verrons ce qu’il y aura à faire pour l’année prochaine, et à la paix pour l’avenir, laquelle il ne faut pas faire honteuse qu’on n’y soit contraint par la très grande force, et j’y suis bien déterminé au péril même de ma vie. » Les derniers mots au péril de ma vie raccommodent assez mal la chose, une paix honteuse ! […] » Avant que la critique allemande ait protesté contre de pareilles plaisanteries mises sur le compte d’un des souverains qui ont eu le plus à cœur leur métier de roi, il y avait longtemps que la critique française, dans une vue de simple bon sens, avait dit : « Nous ignorons si Frédéric était capable de se servir des moyens indiqués ici ; mais nous croyons pouvoir affirmer que, s’il avait assez d’immoralité pour employer des médecins et des serruriers politiques, il avait en même temps trop d’adresse pour l’avouer à qui que ce soit, même à son successeur75. » Il y avait peut-être à introduire Frédéric dans cette Étude où Louis XV tient le premier rôle, mais c’aurait dû être alors pour opposer les deux esprits, la mollesse et la force, l’abandon et l’infatigable vigilance, le laisser aller de tout, après quelque velléité d’action passagère, et l’héroïque et constant labeur, tant civil que guerrier, qui occupa toutes les heures d’une longue vie.
. — Le nouveau commentateur s’empare ainsi de toutes les circonstances connues de la vie de La Bruyère ; il les rapproche de son livre : on trouvera de l’esprit dans ces rapprochements, mais c’est serré de trop près ; c’est excessif. […] Règle générale : nous remarquons de prime abord les défauts de ceux qui entrent dans la vie et dans la carrière après nous ; les qualités, quand nous les reconnaissons, ne viennent qu’en second lieu. […] Voici le portrait que trace de M. de Valincour Saint-Simon qui, d’ordinaire, ne flatte guère son monde : « C’était un homme d’infiniment d’esprit, et qui savait extraordinairement ; d’ailleurs, un répertoire d’anecdotes de Cour où il avait passé sa vie dans l’intrinsèque, et parmi la compagnie la plus illustre et la plus choisie ; solidement vertueux et modeste, toujours dans sa place, et jamais gâté par les confiances les plus importantes et les plus flatteuses : d’ailleurs très-difficile à se montrer, hors avec ses amis particuliers, et peu à peu, très-longtemps, devenu grand homme de bien.
Il a, pour les mœurs, pour le déréglement de la vie et de la veine, plus d’un rapport avec les poëtes de ce temps-ci : je lui voudrais pourtant plus de talent eu égard à son malheur. » Je ne me dis simule pas les points nombreux de rapprochement que cette école poétique de Louis XIII peut offrir avec l’école poétique d’aujourd’hui ; mais, loin de m’en applaudir, j’en suis bien plutôt à le regretter, car ces rapports sont en général ceux d’une corruption hâtive et d’une décadence prématurée. […] Il y a un beau mot de M. de Bonald : « Une vie déréglée aiguise l’esprit et fausse le jugement. » Je ne pousserai pas M. […] et ces autres encore : Ils s’en vont ces rois de ma vie, Ces yeux, ces beaux yeux, etc., etc Il y a déjà du grand Corneille dans ce lyrique-là.
remy ne paraît pas avoir fait) la Vie d’Homère, faussement attribuée à Hérodote, mais qui, si fabuleuse qu’elle soit, exprime très-bien le fond des légendes populaires qui circulaient sur le poëte. […] Dans le chant que met André Chénier sur les lèvres d’Homère, il assemble toute une série de grands sujets, et tandis que se déploie devant nous ce riche canevas, ce tissu des saintes mélodies, on y reconnaît et on se rappelle successivement, tantôt le chant de Silène dans l’églogue vie de Virgile, tantôt le bouclier d’Achille et les diverses scènes qui y sont représentées, puis encore des allusions à diverses circonstances de l’Odyssée ; mais, vers la fin du chant, le combat des Centaures et des Lapithes prend le dessus, et tout d’un coup on y assiste. […] Celui qui demain va mourir sent un regret à quitter la vie que consolait sous les barreaux une vue si charmante, mais il exprime ce regret à peine, et son émotion prend encore la forme d’une pensée légère, de peur de jeter une ombre sur le jeune front souriant94.
. ; Les Embarras de Paris), par celles qui suivirent immédiatement : Muse, changeons de style (1663), et la Satire dédiée à Molière (1664), Boileau se montrait un versificateur déjà habile, exact et scrupuleux entre tous ceux du jour, très préoccupé d’exprimer élégamment certains détails particuliers de citadin et de rimeur, n’abordant l’homme et la vie ni par le côté de la sensibilité comme Racine et comme La Fontaine, ni par le côté de l’observation moralement railleuse et philosophique comme La Fontaine encore et Molière, mais par un aspect moins étendu, moins fertile, pourtant agréable déjà et piquant. […] Boileau finit par la vendre, mais ce ne fut que quand ses infirmités lui eurent rendu la vie plus difficile et la conversation tout à fait pénible. […] Car il y a la race des hommes qui, lorsqu’ils découvrent autour d’eux un vice, une sottise, ou littéraire ou morale, gardent le secret et ne songent qu’à s’en servir et à en profiter doucement dans la vie par des flatteries intéressées ou des alliances ; c’est le grand nombre.
La beauté de toute chose ici-bas, c’est de pouvoir se perfectionner ; tout est doué de cette propriété : croître, s’augmenter, se fortifier, gagner, avancer, valoir mieux aujourd’hui qu’hier ; c’est à la fois la gloire et la vie. […] La poésie vit d’une vie virtuelle. […] Insistons d’ailleurs sur ceci, car l’émulation des esprits c’est la vie du beau, ô poètes, le premier rang est toujours libre.
Après l’avoir lu, on se demande pourquoi le docte abbé ne finit pas sa vie à Bicêtre ; et ses fautes sont relevées avec une rudesse, une roideur de conviction, une hauteur de mépris, une brièveté tranchante, un ton de juge, qui interdisent le doute et terrassent la résistance. […] vous prouvez que la destruction des hémisphères cérébraux détruit la mémoire, les instincts, le raisonnement, sans abolir la vie ni les sensations brutes ! […] Gardez plutôt la théorie qui déclare les vivants tout formés dans l’ovaire ; dites que l’animal ne se crée pas, qu’il s’accroît ; que, fabriqué tout entier d’avance, il est aussi compliqué au premier qu’au dernier jour, que sa grosseur change, non sa structure ; qu’Ève contenait incluses les unes dans les autres, achevées et complètes, les cent quatre-vingts générations qui d’elle ont transmis la vie jusqu’à nous.
. — La Vie chimérique (1898).
Jeune et déjà fait aux épreuves de la vie, il prend l’homme avec tous ses sentiments de père, d’époux, d’ami, et il le place dans le cadre éblouissant des Tropiques.
André Lefèvre, avec cette pensée philosophique qu’il met en avant (la croyance à la vie des choses), est un artiste, un savant artiste de forme.
Une autre, du Prélude, est consacrée à la glorification de Baudelaire : deux bons patrons à invoquer avant de courir les hasards de la vie littéraire.
. — L’Amour et la Vie
Nous y voyons aussi la confession d’un Faust que l’amour de Marguerite aurait régénéré, le drame simple de la vie révélé par l’amour d’où le personnage de Méphistophélès a été biffé.
. — La Musique et la Vie (1897). — Les Mains gantées et les Pieds nus (1898). — Les Jardins d’Armide (1899). — Les Escales galantes (1900).
On estime sur-tout celui qui a pour titre : Theatrum vitœ humanœ, qui contient la Vie & les Portraits, en taille-douce, de cent quatre-vingt-dix-huit personnes illustres.
On peut en juger par son épitaphe, qu’il fit la derniere année de sa vie.
Quoique d’une complexion foible, il vécut quatre-vingts ans, & conserva jusqu’à la fin de sa vie tous les charmes de la jeunesse, & cette bonté de cœur si désirable dans l’amitié ; c’est l’éloge qu’en fait Mademoiselle de Lenclos, dans une Lettre qu’elle écrit à S.
Ces Vers sont applicables à plus d’une circonstance de la vie.
En effet, il paroît, par elles & par la raison même, que son adversaire confondoit trop la vie des Solitaires avec celle des Religieux.
« Quand on les lit, on ne comprend pas, dit cet Ecrivain, qu’il ait pu trouver du temps pour composer tant d’autres Ouvrages sur les matieres les plus importantes, & l’on est tenté de croire qu’il a passé sa vie à lire Homere & Virgile, dont il prend si bien le tour & le caractere ».
« Marquer tous les pas de l’Art de guérir, soit qu’ils l’approchent, soit qu’ils l’éloignent de la perfection ; annoncer en quel temps & par qui il fut accéléré ou retardé dans sa marche ; présenter les découvertes vraiment originales, les vûes propres de chaque Inventeur ; disposer les inventions dans l’ordre de leur naissance ; indiquer où elles se trouvent, afin d’épargner au Lecteur qui sait qu’elle existe ; la peine de les chercher, & à celui qui l’ignore, celle de les inventer ; montrer comment une découverte a produit d’autres découvertes ; rapporter les inventions de tout genre à leurs véritables Auteurs ; déterminer le temps, le lieu, & les circonstances qui ont vu naître ces Auteurs, & recueillir les fruits les plus frappans de leur vie ; faire connoître le rang que la Chirurgie a tenu dans tous les temps parmi les autres Arts, le degré d’estime accordé à ceux qui l’ont professée, & le mérite personnel de ses promoteurs » : telle est la tâche étendue & pénible que M.
C’est faire apprécier au lecteur l’ensemble de toutes les tentatives, dans lesquelles les auteurs se sont essayé à voir avec des yeux autres que ceux de tout le monde ; à mettre en relief les grâces et l’originalité des arts mis au ban par les Académies et les Instituts ; à découvrir le caractère (la beauté) d’un paysage de la banlieue de Paris ; — à apporter à une figure d’imagination la vie vraie, donnée par dix ans d’observations sur un être vivant (Renée Mauperin, Germinie Lacerteux) ; à ne plus faire éternellement tourner le roman autour d’une amourette ; à hausser le roman moderne à une sérieuse étude de l’amitié fraternelle, (Les Frères Zemganno) ou à une psychologie de la religiosité chez la femme (Madame Gervaisais) ; — à introduire au théâtre une langue littéraire parlée ; — à utiliser en histoire des matériaux historiques, restés sans emploi avant eux, (les lettres autographes, les tableaux, les gravures, l’objet mobilier) ; — tentatives enfin, où les deux frères ont cherché à faire du neuf, ont fait leurs efforts pour doter les diverses branches de la littérature de quelque chose, que n’avaient point songé à trouver leurs prédécesseurs.
Le pathétique ne peut être le corps d’un développement ; c’en est, si l’on veut, l’âme et la vie.
Écoutez, par exemple, ce sonnet (d’Arvers), et dites-moi s’il n’est pas dommage que ces choses-là se perdent et disparaissent comme des articles de journaux : Ma vie a son secret, mon âme a son mystère : Un amour éternel en un moment conçu ; Le mal est sans espoir, aussi j’ai dû le taire, Et celle qui l’a fait n’en a jamais rien su.
Gaston Boissier, il a vécu de la vie romaine et s’est promené avec savoir et curiosité à travers les cités mortes et les siècles révolus.
Remy de Gourmont Relu, Tête d’or m’a enivré d’une violente sensation d’art et de poésie ; mais, je l’avoue, c’est de l’eau-de-vie un peu forte pour les temps d’aujourd’hui ; les fragiles petites artères battent le long des yeux, les paupières se ferment ; trop grandiose, le spectacle de la vie se trouble et meurt au seuil des cerveaux las de ne jamais songer.
Le corps n’est pas gisant depuis une journée Que, dans ses profondeurs, la vie est ramenée ; Les ferments ont trahi leur sourde invasion ; Le cadavre s’émeut, frappé par la lumière, Et l’on voit s’altérer sa majesté première Sous le labeur hideux d’une autre vision… ………………………………………………… Et ce débris boueux qui fut la créature, Touché par l’aquilon brûlant de la nature, Au lieu de reposer s’évertue à pourrir.
Judas ayant accompli un miracle, ayant rendu la vie à une jeune fille morte, le miracle aura sa suite logique ; il aura des conséquences impures, puisqu’il a obéi à l’incantation d’un être impur.
Une enfance, une adolescence, les premières joies et les premières tristesses de la Chair, décrites en de successifs états d’âmes, d’une subtilité d’analyse et d’un art infinis, tel est ce livre d’où se dégagé un charme enveloppant et profondément émouvant, parce qu’il est fait de sincérité et que l’on sent, par-delà les musiques charmeuses des mots, passer un intense frisson de vie.
La vie d’un sage ne vaut pas, ma Salomé, ta danse d’Orient sauvage comme la chair, et ta bouche couleur de meurtre, et tes seins couleur de désert.
», cette Propagande des Chansons, Eugène Pottier employa toute sa vie à la réaliser, sans, hélas !
Une raison prématurée lui ayant fait connoître de bonne heure, que rien ne contribuoit plus que les Belles-Lettres & les Sciences à rendre la vie douce & agréable, il a consacré à l’étude un temps que les personnes de son âge & de son rang donnent ordinairement aux plaisirs & à la dissipation.
A la tête de ses Œuvres, qui n’ont paru qu’après sa mort, est un Mémoire sur sa vie & ses Ouvrages, composé par lui-même, où il ne s’épargne pas les louanges ; ce qui suffiroit pour dispenser le Public de lui en accorder.
Il a donné dans sa jeunesse une Histoire de la Vie de Simonide & de son Siecle, Ouvrage plein d’érudition & de discernement, propre à faire naître quelques espérances, mais qui n’a été suivi d’aucun autre, du moins nous n’en avons pas connoissance.
On fit pour Gomberville, pendant sa vie, ce que deux ou trois Journalistes font aujourd’hui en faveur d’une foule d’Auteurs médiocres qui ne valent pas mieux que lui.
C’est ainsi que tout dépérit dans la vie.
Ce n’est pas qu’il ait tiré tout de son propre fonds : la vie d’un homme ne suffiroit pas pour produire une si grande abondance d’idées & de préceptes sur tant de matieres différentes : mais on doit lui savoir gré d’avoir soutenu si courageusement la fatigue & le dégoût des recherches, & d’avoir présenté les pensées d’autrui sous un jour qui les rend plus sensibles & plus intéressantes que dans les originaux.
Cet oubli vient sans doute de ce qu'il passa sa vie en Hollande, où il s'étoit réfugié après la révocation de l'Edit de Nantes.
Dans le Tableau philosophique de l'esprit de M. de Voltaire, pour servir de suite à ses Ouvrages, & de Mémoire à l'Histoire de sa Vie
Comme écrivain de Vie, Philippe de Commines ressemble singulièrement à Plutarque ; sa simplicité est même plus franche que celle du biographe antique : Plutarque n’a souvent que le bon esprit d’être simple ; il court volontiers après la pensée : ce n’est qu’un agréable imposteur en tours naïfs.
que nous est-il arrivé qui n’arrive à tous les hommes jetés à une distance infinie du cours ordinaire de la vie ? […] Il transmet le couteau à Goujon, qui, d’une main assurée, se porte un coup mortel, et tombe sans vie.
Car elle aiguise sur la glace son poignard de Melpomène, et sur la glace la plus dure qui soit au monde, je veux dire la vie raffinée des salons168. — La comédie française n’est qu’une épigramme prolongée169. […] Voici comment Jean-Paul conclut le Prologue-Programme de son Titan : Maintenant donnons-nous la main, auteur et lecteurs, et dansons ensemble dans cet ouvrage ce grand bal de la vie ; moi à la tête d’un quadrille, et vous en sautant en mesure derrière moi, accompagnés par le chant des Muses et par la lyre d’Apollon, dansons de volume en volume, de cycle en cycle, de digression en digression, d’une pensée à une autre… (Traduction de M.
Il dit aussi les grands lieux communs de la vie et de la mort ; il les dit en apparence sans intérêt personnel, dérobant la particularité de ses expériences sous l’impersonnelle démonstration de la vérité générale. […] Racan, Vie de Malherbe.
Qu’il veuille chanter « le culte du moi » ou « l’énergie nationale », il jette toujours, en des romans mal faits et exsangues, quelques pages d’autobiographie ou d’histoire où ne frémit plus, passionnante, la vie multiforme. […] Il n’y manque que peu de choses : la couleur et la vie.
Celles d’Amiot ont été longtemps recherchées pour leur stile naïf & charmant : on met encore au rang des bonnes celles des lettres de Pline, par l’avocat Sacy, de l’académie Françoise ; des lettres de Cicéron à Atticus, par l’abbé Mongaut ; celles de Virgile, par l’abbé Desfontaines ; de l’Anti-Lucrèce, par M. de Bougainville ; de la vie d’Agricola & des mœurs des Germains, par M. l’abbé de la Bletterie. […] On attend avec impatience que l’auteur de la vie de Julien nous donne, en partie cette satisfaction.
Un Dieu qui n’est qu’un objet de raisonnement et la conclusion d’un syllogisme, un Dieu qui n’est rien dans la vie, et auquel on ne pense que lorsqu’il s’agit de réfuter les athées, un tel Dieu est une pure abstraction, et je m’étonne quelquefois que l’on mette tant d’ardeur à combattre ceux qui se trompent sur ces questions lorsque dans la vie on fait une part si faible à ces croyances d’où il semble que tout doit dépendre.
Toute cette grave histoire, c’est celle d’une société qui passa sa vie à jouer aux petits jeux et aux petits vers, et qui eut la triste puissance de rapetisser une minute Condé et Bossuet. […] Ce qu’il y a de certain, du reste, c’est que parmi tous ces engoués du xviie siècle, qui le retournent pour y chercher quelque grimaud bien oublié à remettre en lumière et s’en faire honneur, il ne s’en trouvera pas un seul qui ait le cœur de nous donner, par exemple, la vie de saint Vincent de Paul, qui était bien aussi pourtant du xviie siècle, et qui n’a pas encore une bonne histoire.
Trempé par une étude sévère et mûri par la vie, M. […] La Terreur a existé de sa propre vie et de sa propre force, — et c’est même la Révolution qui l’a tuée, ajoutant à ses autres crimes celui-là, qui n’en était un que pour elle !
Il escorte, il accompagne, il commente, il résume mes pensées et mes écrits… » Ernest Hello reste donc dans la stricte unité de sa pensée et de sa vie. […] III À son originalité dans la conception de son livre qui tient à ses idées premières, aux assises mêmes de son esprit, et qu’il met audacieusement, pour la première fois, sous cette forme difficile du conte, pour les faire mieux briller sous cette forme vivante, comme on retourne et l’on fait jouer un diamant à la lumière du jour pour l’épuiser de tous ses feux, Ernest Hello ajoute aujourd’hui une originalité qui n’est plus celle de ses idées, mais de leur expression et de la vie spéciale qu’il sait leur donner, et il obtient ce résultat superbe que l’exécution de l’artiste vaut la conception du penseur !
Richepin analyse trop l’âme pour n’y pas croire ; son livre, comme la vie, est encore plus psychologique que physiologique, et c’est là sa valeur, c’est là sa supériorité. […] c’est par moralité, — son espèce de moralité à lui, — pour condamner ou pour mieux flétrir ce qui lui paraît immoral ou laid dans la vie.
Flaubert a réfléchi et léché dix ans, et peut-être plus, son fameux livre de Madame Bovary, publié tard dans la maturité de sa vie et mûr comme elle. […] … Je voudrais bien savoir ce qu’est le devoir pour un homme qui ne croit qu’à la vie, à la génération des êtres, à la reproduction et aux instincts !
S’il nous parle de la vie mortelle de ses héros, c’est pour nous persuader de leur bienheureuse immortalité. […] Ne pouvant encore s’autoriser contre l’usage, il fit connaître à ses amis qu’il allait à l’armée faire sa cour qu’il lui coûtait moins d’exposer sa vie que de dissimuler ses sentiments, et qu’il n’achèterait jamais ni de faveurs, ni de fortune aux dépens de sa probité. » Je pourrais encore citer d’autres endroits qui ont une beauté réelle ; mais le discours en général est au-dessous de son sujet ; on y trouve plus d’esprit que de force et de mouvement ; on s’attendait du moins à trouver quelques idées vraiment éloquentes sur l’éducation d’un dauphin, sur la nécessité de former une âme d’où peut naître un jour le bonheur et la gloire d’une nation ; sur l’art d’y faire germer les passions utiles, d’y étouffer les passions dangereuses, de lui inspirer de la sensibilité sans faiblesse, de la justice sans dureté, de l’élévation sans orgueil, de tirer parti de l’orgueil même quand il est né, et d’en faire un instrument de grandeur ; sur l’art de créer une morale à un jeune prince et de lui apprendre à rougir ; sur l’art de graver dans son cœur ces trois mots, Dieu, l’univers et la postérité, pour que ces mots lui servent de frein quand il aura le malheur de pouvoir tout ; sur l’art de faire disparaître l’intervalle qui est entre les hommes ; de lui montrer à côté de l’inégalité de pouvoir, l’humiliante égalité d’imperfection et de faiblesse ; de l’instruire par ses erreurs, par ses besoins, par ses douleurs même ; de lui faire sentir la main de la nature qui le rabaisse et le tire vers les autres hommes, tandis que l’orgueil fait effort pour le relever et l’agrandir ; sur l’art de le rendre compatissant au milieu de tout ce qui étouffe la pitié, de transporter dans son âme des maux que ses sens n’éprouveront point, de suppléer au malheur qu’il aura de ne jamais sentir l’infortune ; de l’accoutumer à lier toujours ensemble l’idée du faste qui se montre, avec l’idée de la misère et de la honte qui sont au-delà et qui se cachent ; enfin, sur l’art plus difficile encore de fortifier toutes ces leçons contre le spectacle habituel de la grandeur, contre les hommages et des serviteurs et des courtisans, c’est-à-dire contre la bassesse muette et la bassesse plus dangereuse encore qui flatte.
Quand Iphigénie dans Racine a reçu l’ordre de son pere de ne plus revoir Achille, elle s’écrie : dieux plus doux vous n’aviez demandé que ma vie. […] Il convient peu à la comédie qui étant l’image de la vie commune, doit être généralement dans le style de la conversation ordinaire. […] Les oraisons funebres de Mascaron sont foibles, & son style n’a point de vie en comparaison de Bossuet. […] Son soufle impur empoisonna ma vie. […] Il y en avoit pour chaque profession, pour chaque action de la vie, pour les enfans, pour les filles nubiles, pour les mariées, pour les accouchées ; on eut le dieu Pet.
Elle nous dit la malheureuse passion qui dévora sa vie et, par ses insatiables exigences, fit continuellement échec à ce que le poète aurait pu mériter d’honorabilité et de gloire.
Maurice Tourneux Il avait à peine dix-huit ans quand la Chronique, revue mensuelle (1842), inséra ses premiers vers, réimprimés depuis dans un recueil de poésies, intitulé d’abord Préface de la vie, puis Péchés de jeunesse (1847).
Ses vers sont pris sur le vif de la vie et de la nature, vécus et vus.
Là respire non pas la vie matérielle, mais celle d’un cœur aimant, mélancolique et désillusionné.
. — La Fin de la vie, critique (1897). — La Forêt magique, poème (1898). — Actes (1899).
Faut-il se montrer bien difficile et exiger de l’émotion et de la vie de quelqu’un qui a du goût, de l’habileté et de la délicatesse dans l’expression des sujets qu’il choisit ?
La caducité de l’âge n’eut pas le pouvoir d’amortir les saillies de sa Muse, ni d’altérer ses goûts ; il aima toujours les plaisirs, & les chanta jusqu’à la fin de sa vie.
Ce qu’on peut lui reprocher, à plus juste titre, c’est d’avoir écrit la Vie du grand Sobiesky, à-peu-près comme il a écrit ses Bagatelles.
L’éloquence de Démosthene & celle de Cicéron pâlissent presque toujours sous son pinceau grammatical, & pour trop craindre de s’écarter du véritable sens des originaux & de la pureté du langage, il ôte en quelque sorte la vie à ses Modeles.
Grosley, Avocat, a écrit la Vie des deux freres ; c’est la meilleure que nous ayons, sans qu’elle soit toutefois exempte de plusieurs défauts.
Nous le plaçons parmi les Auteurs François, parce qu’il a passé la plus grande partie de sa vie en France, & que tous ses Ecrits sont dans notre Langue.
Monsieur , lui dit-il, depuis vingt ans j'ai bien débité du galimatias ; mais vous venez d'en dire plus en une heure, que je n'en ai écrit en toute ma vie.
Le portrait du célèbre sculpteur Le Moyne est surprenant pour la vie et la vérité qui y sont.
. — Les Chercheurs d’amour, scènes de la vie romanesque (1856). — Le Cousin du Roi, comédie en vers, avec Théodore de Banville (1867). — Les Deux Saisons, poésies (1867).
. — Le Cerveau de Paris, esquisses de la vie littéraire et artistique (1886). — Entrée de clowns (1886). — Les Bohémiens, ballet lyrique (1887). — Le Défilé (1887). — Parisienne, vers (1887). — L’Amant des danseuses (1888). — Lulu, pantomime avec préface d’Arsène Houssaye (1888)
Voici un recueil de mélodies douces et harmonieuses, où l’influence de Verlaine n’empêche point une très personnelle sensibilité, un tact frileux, quelque hésitation devant la vie, et beaucoup d’art.
[L’Art et la Vie (1897).]
[La Vie littéraire, 3e série (1891).]
[La Vie et les Livres, 1re série (1894).]
La maladie & la pauvreté affligent les bergers comme le reste des hommes ; cependant on écarte ces tristes images de la peinture de leur vie. […] Cette vérité, c’est l’avantage d’une vie douce, tranquille & innocente, telle qu’on peut la goûter en se rapprochant de la nature, sur une vie mêlée de trouble, d’amertume & d’ennuis, telle que l’homme l’éprouve depuis qu’il s’est forgé de vains desirs, des intérêts chimériques, & des besoins factices. […] A ces conditions on ne peut trop multiplier les morceaux dramatiques dans l’épopée ; ils y répandent la chaleur & la vie. […] Va, tu me veux en vain rappeller à la vie. […] Et pourquoi les peintres qui ont fait souvent une galerie de la vie d’un homme, n’en feroient-ils pas d’une seule action ?
. — La Vie et l’œuvre du Titien (1886).
On n’isole pas impunément de la vie l’essence de toute beauté… Nous rêvons, je crois, d’un autre art, plus large, plus humain, avec des libres correspondances dans la nature et dans l’homme.
La Nature elle-même semble avoir voulu tenir de lui une nouvelle vie, car elle l’a pourvu des plus heureux talens, pour développer ses ouvrages & les faire admirer.
Le Traité de l’amour de Dieu, l’Introduction à la vie dévote, ses Lettres à différentes personnes & sur différens sujets, sont autant de chef-d’œuvres de lumieres & de sentiment, capables de dompter les esprits rebelles, & d’émouvoir les cœurs endurcis.
On peut en juger par ceux-ci : Ne me demandez pas, Silvie, Quel est le mal que je ressens ; C’est un mal que j’aurai tout le temps de ma vie ; Mais je ne l’aurai pas long-temps.
Son frere même ne pouvoit lui pardonner ce travers, comme on peut en juger par ce qu'il dit de lui dans l'Histoire de sa vie.
Il perdra la vie avant que de quitter son drapeau.
Demarteau Je me suis expliqué ailleurs sur l’allégorie de Cochin, relative à la vie et à la mort de M. le dauphin.
Vous verrez que la faible intensité de ce désir consistait d’abord en ce qu’il vous semblait isolé et comme étranger à tout le reste de votre vie interne. […] Les arts plastiques obtiennent un effet du même genre par la fixité qu’ils imposent soudain à la vie, et qu’une contagion physique communique à l’attention du spectateur. […] Mais la plupart des émotions sont grosses de mille sensations, sentiments ou idées qui les pénètrent : chacune d’elles est donc un état unique en son genre, indéfinissable, et il semble qu’il faudrait revivre la vie de celui qui l’éprouve pour l’embrasser dans sa complexe originalité. […] Il suffira, pour s’en convaincre, de lire la remarquable description que le même auteur a donnée du dégoût : « Si l’excitation est faible, il peut n’y avoir ni nausée ni vomissement… Si l’excitation est plus forte, au lieu de se limiter au pneumo-gastrique elle s’irradie et porte sur presque tout le système de la vie organique. […] On n’a peut-être pas assez remarqué la multitude d’éléments très différents qui concourent, dans la vie journalière, à nous renseigner sur la nature de la source lumineuse.
Dans beaucoup de villages, ce sont des artisans, des journaliers, des métayers, qui pourtant auraient besoin de tout leur temps pour gagner leur vie. […] Leurs octrois accrus en 1748 devaient fournir en onze ans les 606 000 livres convenues ; mais, les onze ans écoulés, le fisc soldé a maintenu ses exigences, si bien qu’en 1774 elles ont déjà versé 2 071 052 livres et que l’octroi provisoire dure toujours Or cet octroi exorbitant pèse partout sur les choses les plus indispensables à la vie, et de cette façon l’artisan est plus chargé que le bourgeois. […] Et il est si mauvais, que Malouet, l’intendant de la marine, le refuse pour ses employés « Sire, disait en chaire M. de la Fare, évêque de Nancy, le 4 mai 1789, sire, le peuple sur lequel vous régnez a donné des preuves non équivoques de sa patience… C’est un peuple martyr, à qui la vie semble n’avoir été laissée que pour le faire souffrir plus longtemps. » VIII. […] Nous vous le demandons, sire, avec tous vos autres sujets, qui sont aussi las que nous… Nous vous demanderions encore bien d’autres choses, mais vous ne pouvez pas tout faire à la fois. » — Les impôts et les privilèges, voilà, dans les cahiers vraiment populaires, les deux ennemis contre lesquels les plaintes ne tarissent pas728. « Nous sommes écrasés par les demandes de subsides…, nos impositions sont au-delà de nos forces… Nous ne nous sentons pas la force d’en supporter davantage…, nous périssons terrassés par les sacrifices qu’on exige de nous… Le travail est assujetti à un taux et la vie oisive en est exempte… Le plus désastreux des abus est la féodalité, et les maux qu’elle cause surpassent de beaucoup la foudre et la grêle… Impossible de subsister, si l’on continue à enlever les trois quarts des moissons par champart, terrage, etc.
Toutes les fois que j’ai cherché à m’analyser à moi-même l’extraordinaire intensité de plénitude qui me venait des drames de Wagner, en dépit de leurs visées métaphysiques, je suis arrivé à cette conclusion : c’est que, chez Wagner, l’amour de la vie et le sentiment de la réalité sont antérieurs et restent supérieurs à toute spéculation cérébrale. […] Ainsi l’orchestration devient une source de vie scénique et l’agent, par excellence, de la psychologie du drame. […] Au bout de quelque temps d’une vie sauvage adoucie seulement par l’amour et la harpe de Tristan, qui est poète et musicien, Iseult est rappelée par son mari qui s’ennuie d’être veuf : la bonté de Marc’h ne va cependant pas jusqu’à rappeler son coupable neveu, et il reçoit ordre de ne plus se montrer à la cour. […] Il est l’auteur de : Richard Wagner, Les étapes de sa vie, de sa pensée et de son temps, paru de façon posthume (Paris, hachette, 1923).
Puisque vos cœurs sont attendris, et qu’une ardente charité en a fondu la glace et amolli la dureté, allons donc tous ensemble nous jeter aux pieds de l’Empereur : ou plutôt prions le Dieu de miséricorde de l’adoucir, en sorte qu’il nous accorde la grâce entière. » Ce discours eut son effet, et saint Chrysostome sauva la vie à Eutrope. […] Saint Chrysostome avait un ami intime nommé Basyle, qui lui avait persuadé de quitter la maison de sa mère pour mener avec lui une vie solitaire et retirée. […] S’il atteste Dieu, Dieu est pré sent sur les autels ; s’il annonce le néant de la vie, la mort est auprès de lui pour lui rendre témoignage, et montre à ceux qui l’écoutent qu’ils sont assis sur des tombeaux. […] Que de fois de l’airain les terribles accents De l’athée endurci firent frémir les sens, Alors qu’au sein des nuits leur funèbre harmonie Annonçoit qu’un mortel alloit quitter la vie !
Quant au fond, il était peut-être pire, certainement vénal et, de plus, malgré sa douceur apparente de mœurs et de ton, ayant si peu de scrupule pour les actes, qu’il y a trois points de sa vie qui font trois doutes presque terribles : la mort de Mirabeau, — l’affaire du duc d’Enghien, — l’affaire de Maubreuil.
Le public, tantôt respectueux, tantôt enthousiaste, tantôt anéanti, écouta, acclama et contempla le colossal chef-d’œuvre où l’échevèlement de la fantaisie apparaît dans les profondeurs les plus sévères de la philosophie, où la nature est aussi humaine que l’homme, la mort aussi vivante que la vie.
. — La Vie et la Mort (1886). — Fantasmagories (1887). — La Chanson des étoiles (1888). — Possédée d’amour (1889). — La Marguerite de 300 mètres (1890). — Moune (1890). — Nature (1891). — Simple roman (1891). — Mademoiselle Azur (1893). — La Mascarade (1893)
Le désir du mieux, quand il ne mène pas tout simplement au bien, n’est que la tentation de se laisser aller à ce que les peintres appellent empâter les couleurs, ce qui est proprement charger de fard un visage où l’on n’a pas su mettre la vie.
Il a tenu parole, & on ne peut que regretter qu’il n’ait pas joui d’une plus longue vie.
M. l’Abbé de Gourcy a publié depuis un Essai sur le bonheur, qui mérite d’être lu par les personnes qui désirent de tirer le plus grand parti possible des avantages & des inconvéniens attachés à la vie de ce bas monde.
Pendant le cours de sa vie, il habita moins sa maison que la Bastille, où il fut enfermé dix à douze fois.
En effet, il y a des morceaux dans les Odes de Racan, qui ne le cedent point aux plus beaux Vers de Malherbe ; telles sont les deux Strophes que voici : Que te sert de chercher les tempêtes de Mars, Pour mourir tout en vie au milieu des hasards Où la gloire te mene ?
l'Abbé Reyrac, n'ont pu leur donner le moindre degré de chaleur & de vie.
Un Dieu montait sur son char, un prêtre offrait un sacrifice ; mais ni le Dieu ni le prêtre n’enseignaient ce que c’est que l’homme, d’où il vient, où il va, quels sont ses penchants, ses vices, ses fins dans cette vie, ses fins dans l’autre.
Voyez, mon cher comte, si vous pouvez plus que moi exciter le principe de vie qui s’éteint chez nous : pour moi, j’ai rué tous mes grands coups, et je vais prendre le parti d’être en apoplexie comme les autres sur le sentiment, sans cesser de faire mon devoir en bon citoyen et en honnête homme. […] J’ai satisfait sa vanité, je le cultive, je l’encourage, et je mène à cet égard une vie qui ne peut être justifiée que par le service du roi et le bien de l’alliance. […] Ce n’est plus un ministre ni un homme d’État, c’est un malade qui écrit et qui nous énumère les symptômes dont il est atteint : coliques d’estomac qui durent dix heures, étourdissements fréquents et qui augmentent, insomnies opiniâtres : « Mon visage est quelquefois comme celui d’un lépreux, parce que la bile arrêtée s’est portée à la peau. » Son cri perpétuel est qu’il n’en peut plus, et que son moral même est ébranlé : Je vous en avertis, ma tête est malade (septembre 1758) : avec du repos et l’espérance de ne me pas déshonorer, je me rétablirai ; sans cela, je tomberai dans un état où il ne me sera plus possible de faire aucun travail… Mais qu’on me sauve du déshonneur si on veut conserver ma tête et ma vie !
Daru, son immense facilité et sa capacité laborieuse exercée de bonne heure, toujours appliquée et sans trêve, cette vie de littérature solide et agréable, d’administration infatigable et intègre, d’exactitude et de devoir en tout genre, et dans laquelle il ne manquait jamais à rien ; mais, ajoute quelqu’un qui l’a connu, il ne se plaisait pas également à tout, et c’est ce qui fait son mérite. […] Le conseil habituel du père Lefebvre à son jeune ami, c’est de profiter de son heureuse flexibilité qui tend à se porter sur toutes sortes de genres et de sujets, mais de ne s’y point livrer trop rapidement, d’attendre avant de publier : « L’âge est le meilleur des Aristarques. » Ses scrupules de traducteur, dans le travail qu’il avait entrepris sur la Bible, fatiguaient et consumaient le père Lefebvre : « Ce métier de traducteur dont je me suis occupé toute ma vie, disait-il, me paraît toujours plus difficile à mesure que j’avance, soit que l’âge me glace le sang, soit que mon goût s’épure à force d’approfondir ; une page de traduction m’épuise pour huit jours. » Et ailleurs : Je suis revenu de la campagne à la ville, mais j’étais si essoufflé qu’il m’a fallu un grand mois pour reprendre haleine. […] Quels doux souvenirs elle m’a rappelés sur ce bon compagnon de ma vie, de mes beaux jours !
Il n’osa toutefois assumer la responsabilité d’un refus, et il se mit de la partie avec ce même sentiment de la difficulté et de la non-réussite qui constitue son étoile : « Je considérais quel fardeau je prenais sur mes épaules pour la troisième fois ; je me ramentevais l’inconstance de nos peuples, l’infidélité des principaux d’iceux, les partis formés que le roi avait dans toutes nos communautés, l’indigence de la campagne, l’avarice des villes, et surtout l’irréligion de tous. » Par irréligion il faut simplement entendre l’affaiblissement de ce principe religieux exalté qui ne s’était vu qu’au xvie siècle et qui poussait à tous les sacrifices de vie et de fortune pour la foi, affaiblissement qui tenait déjà de l’esprit moderne, et un vertu duquel beaucoup d’estimables réformés préféraient le commerce à la guerre ; Ce n’était pas le compte de Rohan ni des chefs féodaux. […] Résolution vraiment chrétienne et qui ne dément point tout le cours de sa vie, qui ayant été un tissu d’afflictions continuelles45, elle s’y est trouvée tellement fortifiée de l’assistance de Dieu, qu’elle en est en bénédictions à tous les gens de bien, et sera à la postérité un exemple illustre d’une vertu sans exemple et d’une piété admirable. […] Elle s’est trouvée ensevelie dans une âpre et impitoyable famine, et en sa fin a acquis par sa constance une plus longue vie dans la renommée des siècles à venir que celles qui, aujourd’hui, prospèrent dans le siècle présent.
On se lisait les uns aux autres les ouvrages qu’on avait composés ; on se critiquait, on s’encourageait. « Les conférences étaient suivies tantôt d’une promenade, tantôt d’une collation en commun. » Pendant trois ou quatre ans, on continua de la sorte avec une entière obscurité et liberté : « Quand ils parlent encore aujourd’hui de ce temps-là et de ce premier âge de l’Académie, nous dit Pellisson, ils en parlent comme d’un âge d’or, durant lequel avec toute l’innocence et toute la liberté des premiers siècles, sans bruit et sans pompe, et sans autres lois que celles de l’amitié, ils goûtaient ensemble tout ce que la société des esprits et la vie raisonnable ont de plus doux et de plus charmant. » Il y avait secret promis et gardé : Qui sapit in tacito gaudeat ille sinu. […] Une des plus piquantes preuves de ce que j’ai dit que l’Académie, dans sa longue vie depuis 1634 jusqu’à 1793, était tour à tour très présente ou légèrement arriérée, et tantôt de la vogue du jour, tantôt du régime de la veille, c’est ce qui arriva lorsqu’elle exclut de son sein, en 1718, l’abbé de Saint-Pierre. […] Mais Richelieu voulait de son Académie française autre chose encore, et cette autre chose, je n’irai pas la demander aux révélations de La Mesnardière, esprit assez peu sûr, qui, dans son discours de réception, nous dit, non sans un retour de vanité complaisante : J’eus de Son Éminence de longues et glorieuses audiences vers la fin de sa vie durant le voyage de Roussillon, dont la sérénité fut troublée pour lui de tant d’orages.
Sa vie de jeu, d’indolence et de loisir s’accommodait mal de cette application obligée de chaque heure et de chaque instant, et elle lui permettait tout au plus de l’activité par veine et intermittence. […] Il se tenait imperturbablement derrière le fauteuil du roi dans toutes les grandes cérémonies ; mais il fut véritablement hors de la vie politique active tout le temps de la Restauration ; il n’était que spectateur. […] Il voulut, comme on dit, mettre ordre à ses affaires ; avec l’art et le calme qui le distinguaient, il disposa le dernier acte de sa vie en deux scènes qu’on ne trouvera pas mauvais que je présente comme il convient et que je développe.
Cette religion sortait de la vie barbare. […] vous êtes des enfants, il n’y a pas de vieillards parmi vous ; vous êtes tous jeunes d’esprit. » Cette momie vivante ne croyait pas si bien dire : la Grèce naquit et elle resta jeune ; et c’est cette jeunesse qui lui donna la Beauté, qui versa sur ses œuvres la fleur de la vie, et lui fit cueillir légèrement les prémices de toutes les moissons, le laurier-rose de toutes les victoires. Tandis que la morne et caduque Égypte, chargée des chaînes de ses dogmes, tournait autour d’un puits funéraire, dans le cercle qu’avaient creusé ses ancêtres ; tandis qu’elle embaumait ses morts et raidissait ses colosses, la libre et riante Hellade créait ses dieux en chantant, et les sculptait dans les marbres pleins d’une vie sublime.
C’est ici que sa vie publique commence ; elle avait dix-sept ans. […] Mais ne sentez-vous pas d’abord combien ce passage de Jeanne fut rapide, et que sa vie ne fut qu’un éclair, comme il arrive presque toujours de ces merveilleuses et lumineuses destinées ? […] Michelet a bien saisi la pensée même du personnage, qu’il a rendu avec vie, avec entrain et verve, le mouvement de l’ensemble, l’ivresse de la population, ce cri public d’enthousiasme qui, plus vrai que toute réflexion et toute doctrine, plus fort que toute puissance régulière, s’éleva alors en l’honneur de la noble enfant, et qui, nonobstant Chapelain ou Voltaire, n’a pas cessé de l’environner depuis.
Et pourtant, si l’on ne reporte pas directement, comme fait Bossuet, le conseil et la loi du monde historique au sein de la Providence même, il me semble qu’il est fort difficile et fort périlleux d’y trouver cette suite et cet enchaînement que Montesquieu, après coup, se flatte d’y découvrir ; et Machiavel, sur ce point, me paraît plus sage encore et plus dans le vrai que Montesquieu, en nous rappelant toujours, au milieu de ses réflexions mêmes, combien il entre de hasard, c’est-à-dire de causes à nous inconnues dans l’origine et dans l’accomplissement de ces choses de l’histoire et dans la vie des empires. […] A-t-on de la force et de la vie, on vous l’ôte à coups d’épingle. […] vous faites la douceur et le charme de la vie, Vous croyez que vous n’avez rien, et moi je vous dis que vous avez tout.
Quand il fut question, plus tard, de conduire le char de l’État sur une pente rapide, et que pas un instant n’était à perdre, on conçoit que ce fond d’indécision dut être fatal : dans l’habitude de la vie, ce n’était qu’une singularité piquante. […] Pour bien connaître les hommes, pensait-il, il faut avoir traversé trois états de la vie absolument différents : « l’état d’infériorité qui vous donne le besoin de plaire aux autres, le besoin de les étudier ; l’état d’égal à égal, qui vous appelle à les connaître dans toute la liberté de leurs passions ; l’état de supériorité qui vous donne l’occasion de les observer dans leur marche circonspecte, dans leurs tâtonnements et dans leurs manèges ». […] Quoique le moi soit un sujet de conversation interdit, il pensait pourtant que « c’est le seul que la plupart des hommes aient bien étudié, le seul où ils aient fait des découvertes » ; et il disait comme Montaigne, avec quelque variante : Laissez-les vous confier l’opinion qu’ils ont d’eux-mêmes, et ils vous amuseront plus qu’en répétant, après tant d’autres, les lieux communs de la vie. — C’est de leur chose, pensait-il encore, de leurs intérêts, de leur vanité régnante qu’il faut les entretenir, si l’on veut voir leurs traits s’animer, leur voix s’accentuer, leurs bras se débattre, si l’on veut faire aller le pantin et jouir de ses mouvements.
C’est là que, spectacle majestueux, desservi par tous les talents à la fois, spectacle pathétique, répondant à toutes les passions du cœur et épuisant toutes les misères de la vie, et aussi spectacle rare, extraordinaire, elle appelait, à quelques grands jours seulement, un effort de génie toujours nouveau, et, dans le peuple, une ardeur d’admiration que la satiété n’émoussait pas. […] La cause ancienne de cette opinion tenait sans doute à une sorte de rudesse des hommes de la Béotie, n’ayant pas eu, comme ceux d’Athènes, l’activité du commerce et des arts, vivant d’une vie plus simple, laboureurs et bergers, et ne pratiquant pas, comme les Spartiates, leurs voisins, cette forte discipline, cette vertueuse et austère pauvreté qui, seule aux yeux des Grecs, soutenait le parallèle avec la magnificence et le bon goût d’Athènes. […] Car sur nous est suspendu le temps insidieux qui a déroulé le cours incertain de la vie.
Nous n’avons pas l’intention de suivre plus longtemps la vie de notre poëte. […] Ce n’est pas seulement à la physionomie de son style qu’on s’en aperçoit : le choix peu scrupuleux de ses sujets, et, encore plus, le déréglement absolu de sa vie, se ressentaient des habitudes de la bonne Régence ; le favori de Fouquet avait longtemps vécu au milieu des scandales de Saint-Mandé ; il les avait célébrés, partagés, et était resté fidèle aux mœurs autant qu’à la mémoire d’Oronte.
Il s’agit bien vite pour le vieux Tarass, tout fier des jeunes recrues qui lui arrivent, d’initier les deux écoliers émancipés à la vie cosaque, aux travaux guerriers, et, au sortir d’un festin copieux comme on en verra tant, il est décidé que lui-même les conduira dès le lendemain vers la setch. […] La petite histoire intitulée un Ménage d’autrefois, et qui peint la vie monotone et heureuse de deux époux dans la Petite-Russie, est pourtant d’un contraste heureux avec les scènes dures et sauvages de Boulba : rien de plus calme, de plus reposé, de plus uni ; on ne se figure pas d’ordinaire que la Russie renferme de telles idylles à la Philémon et Baucis, de ces existences qui semblent réaliser l’idéal du home anglais et où le feeling respire dans toute sa douceur continue : Charles Lamb aurait pu écrire ce charmant et minutieux récit ; mais vers la fin, lorsque le vieillard a perdu son inséparable compagne, lorsque le voyageur, qui l’a quitté cinq années auparavant, le revoit veuf, infirme, paralytique et presque tombé en enfance, lorsqu’à un certain moment du repas un mets favori de friandise rappelle au pauvre homme la défunte et le fait éclater en sanglots, l’auteur retrouve cette profondeur d’accent dont il a déjà fait preuve dans Boulba, et il y a là des pages que j’aimerais à citer encore, s’il ne fallait se borner dans une analyse, et laisser au lecteur quelque chose à désirer. — En homme, le nom de M.
Enfin dans les deux descriptions j’apercevrai, non pas deux procédés seulement, ni deux arts, mais deux siècles et deux hommes : d’un côté, l’esprit lettré, l’orateur, qui raisonne sa sensation et ne conçoit rien que de triste hors des conditions du monde civilisé et de la vie de société ; de l’autre, le critique, l’artiste, capable de prendre tour à tour l’âme de tous les peuples, acceptant la sensation étrange et même illogique, habile à saisir la beauté dans les moins riants aspects de la nature, dans l’égalité monotone de la lumière. […] Ce ne sera pas le désert, je le veux ; ce sera votre rêve du désert : et la vie n’est-elle pas souvent dominée par les visions charmantes du pays où l’on n’est pas allé, du temps qui ne viendra jamais ?
L’antinomie dans la vie affective Considérons la sensibilité dans les facteurs qui concourent à la former ; puis dans sa nature et dans son évolution. […] Cet individualisme consiste à cultiver nos sentiments dans la mesure de notre richesse d’âme, à développer notre faculté de jouir et de souffrir sous ses formes les plus complexes et les plus élevées, à nous intéresser à la vie la plus riche et la plus belle.
Nous n’entrons pas ici, comme on pourrait le croire, dans la métaphysique ; du moins n’y sera-t-il question ni de la matière ni de l’esprit, considérées comme substances » La « théorie psychologique de l’esprit et de la matière », qui est le résumé et le résultat de ce qui précède, s’oppose à la théorie intuitive (introspective) de Reid, de Stewart et de la plupart des philosophes, en ce que celle-ci considère le sujet et l’objet comme deux termes fondamentaux, irréductibles, à nous révélés par la conscience dès le commencement de la vie, tandis, que l’école expérimentale pense que les notions de matière et d’esprit sont complexes et formées à une époque ultérieure ; qu’en conséquence, en y appliquant l’analyse, on peut en découvrir et en retracer la genèse. […] En effet, le courant de conscience qui constitue la vie phénoménale de l’esprit se compose non-seulement de sensations présentes, mais aussi de souvenirs et d’attentes ; il n’est pas borné au présent, il embrasse aussi le passé et l’avenir.
Lorsque, la première fois, le brillant écrivain abordait ces portions d’étude si compliquées et parfois si sombres, il n’avait connu que les grâces de la vie, et il n’en avait recueilli que les applaudissements faciles : « Lecteur profane, disait-il, je cherchais dans ces bibliothèques théologiques les mœurs et le génie des peuples… » Pour bien apprécier le génie des Ambroise et des Augustin durant ces âges extrêmes de la calamité et de l’agonie humaine, il fallait avoir fait un pas de plus, et y revenir avec la conscience qu’on n’a été soi-même étranger à rien de l’homme. […] Grâce à lui désormais, une foule de détails qui semblaient du ressort exclusif des bibliographes et des éditeurs et dont ces derniers ne faisaient qu’un usage très borné et très aride, ont pris un sens et une vie qui les rattache à l’histoire littéraire.
L’inventeur qui a décoré sa lanterne du nom de biographe ignorait peut-être l’existence antérieure de ce mot dans l’usage français ; il ignorait encore bien plus que bios signifie surtout la vie humaine et ne possède pas l’idée générale de vie qui est tenue par [mot en caractère grec] ou [mot en caractère grec] — Le mot français biologie veut dire en grec biographie.
. — Ô bouche, si tu pouvais parler, ô cœur, si tu étais en vie ! […] La fillette, spécialement, y apparaît à nu, tantôt se laissant mourir de désespoir, tantôt ne disant pas non au cavalier qui passe, pourvu qu’il ait bourse pleine, tantôt victime de sa paresse et de sa mauvaise conduite : Les soldats l’ont laissée Sans chemise et sans pain… Telle chanson, comme la Mal Mariée, révèle le pessimisme résigné de gens qui sentent que la vie est mauvaise, et mauvaise sans remède ; mais telle autre dit bellement la joie héroïque de l’amour, comme la Fille dans la Tour, dont voici une version mutilée : Le roi Louis est sur son pont, Tenant sa fille en son giron.
La vie que menait l’auteur dans ces lieux peuplés de souvenirs, on se la figure sans peine. […] La voici : Reconstruire par la pensée, dans toute son ampleur et dans toute sa puissance, un de ces châteaux où les burgraves, égaux aux princes, vivaient d’une vie presque royale.
Votre vie a au dedans d’elle la mort, qui se porte bien. […] Oui, tous tant que nous sommes, grands et petits, puissants et méconnus, illustres et obscurs, dans toutes nos œuvres, bonnes ou mauvaises, quelles qu’elles soient, poëmes, drames, romans, histoire, philosophie, à la tribune des assemblées comme devant les foules du théâtre, comme dans le recueillement des solitudes, oui, partout, oui, toujours, oui, pour combattre les violences et les impostures, oui, pour réhabiliter les lapidés et les accablés, oui, pour conclure logiquement et marcher droit, oui, pour consoler, pour secourir, pour relever, pour encourager, pour enseigner, oui, pour panser en attendant qu’on guérisse, oui, pour transformer la charité en fraternité, l’aumône en assistance, la fainéantise en travail, l’oisiveté en utilité, la centralisation en famille, l’iniquité en justice, le bourgeois en citoyen, la populace en peuple, la canaille en nation, les nations en humanité, la guerre en amour, le préjugé en examen, les frontières en soudures, les limites en ouvertures, les ornières en rails, les sacristies en temples, l’instinct du mal en volonté du bien, la vie en droit, les rois en hommes, oui, pour ôter des religions l’enfer et des sociétés le bagne, oui, pour être frères du misérable, du serf, du fellah, du prolétaire, du déshérité, de l’exploité, du trahi, du vaincu, du vendu, de l’enchaîné, du sacrifié, de la prostituée, du forçat, de l’ignorant, du sauvage, de l’esclave, du nègre, du condamné et du damné, oui, nous sommes tes fils, Révolution !
— Croirais-tu, ma, chère, que ce pignouf ne m’a jamais donné un louis de sa vie ? […] Les mauvaises habitudes Il y a des gens qui passent leur vie à pester contre les mauvaises habitudes ; Vous préférez le havane au cigare d’un sou, — mauvaise habitude.
Une grande tristesse est accourue les saisir ; ils ont été dégoûtés de la vie sans oser désirer la mort, ou plutôt sans chercher ce qui peut consoler de vivre dans des temps aussi terribles. […] Ce n’était point assez que le monde physique fût livré aux incertitudes et à l’esprit de système, nous voulions dénaturer encore le monde moral et achever de décolorer la vie.
Ernest Hello est un moraliste d’un autre ordre et d’un autre accent que ces moralistes blessés qui, en la jugeant, se vengent de la vie. […] — pouvait soudainement renoncer à ce mysticisme qui est la vie de son cœur et de sa pensée et fouler aux pieds le flambeau à la lueur divine dont la clarté n’éclaire que lui, vous verriez le sourire s’arrêter sur les lèvres impertinentes des sceptiques, l’éclat de rire bête ravalé par la bouche ouverte des incrédules et des blasphémateurs !
Partout, sur ce sol fragmenté par des institutions diverses, vous chercheriez en vain la famille, la famille comme nous la comprenons et qui est l’âme de la vie moderne. […] En Grèce, dans les diverses républiques que nous voyons se mouvoir sous les faces multiples de leur vie intérieure, plusieurs se sont vaincues alternativement les unes les autres ; mais le trait commun est que, pour elles, la victoire n’est jamais le commencement du gouvernement.
nous ne sommes pas des rêveurs et nous connaissons la vie. […] — « subissant des faits de subjectivité, c’est-à-dire, les Révélations du férouer Mazaéen, du bon démon, de l’ange gardien de cet autre moi qui n’est que le moi éternel, en pleine possession de lui-même, planant sur le moi enveloppé dans les ombres de la vie !
Pelletan ; qui ne pensons pas comme lui, que le progrès, soit l’expansion illimitée de toutes les forces passionnées de l’homme, avec toutes leurs excitations et leurs réalisations dans l’État, dans l’Art, dans l’Industrie, dans les mœurs ; mais qui croyons, au contraire, que le progrès, c’est, la vertu par le sacrifice en vue de quelque chose qui n’est ni dans l’histoire, ni dans la vie visible de l’humanité ! […] Citons-en une seule en passant : « L’homme, dit-il, recruta d’abord ces races expiatoires qui devaient régénérer l’homme en donnant sa vie pour lui et racheter par leur sang sa pauvreté !
Tout ce qu’il y a de plus charmant dans le vie, n’est-ce pas d’être spirituel ? […] — les sophistes grecs, tous ces gens-là qui sont morts dans leur pays mort et qu’ils ont tué, on ne peut pas leur redonner la vie parce qu’on les déterre, momies presque anonymes, tant on a de peine à lire leurs pauvres noms sur leurs bandelettes !
Assurément les prêtres ont le devoir et le droit d’écrire les annales de l’Église et la vie de leurs Saints, et le cardinal Pitra nous a montré comme ils s’y prennent quand ils se mêlent de les écrire ; mais de Maistre et de Bonald étaient des laïques, et quel prêtre de ce temps a plus mérité de l’Église que ces cardinaux… oubliés ? […] l’histoire d’un seul Pape, dans l’histoire de l’Église, a de tels rayonnements en avant et en arrière que ce n’est plus l’histoire d’un siècle ni d’un Pape, mais l’histoire de l’Église universelle et éternelle, concentrée dans la minute d’un siècle ou d’une vie d’homme, comme tout un horizon répercuté et concentré dans une facette de diamant… En intérêt, l’Histoire de la Papauté pendant le xve siècle, par l’abbé Christophe, vaut, avec d’autres événements et des personnalités différentes, son Histoire de la Papauté pendant le xive siècle, et elle a le même mérite d’unité dans la variété qui est le caractère particulier de toutes les histoires détachées de l’histoire générale de l’Église, qui a bien raison de s’appeler catholique, c’est-à-dire universelle ; car si Dieu l’ôtait de ce monde, il s’y ferait un de ces trous, comme dit Shakespeare en parlant des monarchies qui croulent, que rien — quoi qu’on y jette — ne peut plus combler !
Si, par malheur pour l’art et le Théâtre-Français, une telle menace s’accomplissait, la représentation de ma pièce se lierait au souvenir le plus triste de ma vie.
De loin, leur jeunesse paraît plus fleurie, plus avide de vie et de lumière parce qu’ils ne jouissent plus du soleil ; et leur tendresse paraît plus tendre parce que leur cœur ne bat plus.
Il nous parle non des accidents passionnels de sa biographie, mais des inquiétudes éternelles de la vie intérieure… Il a bien fait ce qu’il a voulu.
[La Vie à Paris (1896).]
Jeune fille, jeune femme, jeune mère, telles sont les trois phases de la vie correspondant aux trois recueils qui composent le volume de Mme Colet, et chacune d’elles a donné sa fleur ou son fruit.
Le volume se termine par une pièce d’une plus haute envergure, Claudion, l’aventure d’un désespéré moderne qui a, à la fois, peur de la mort et horreur de la vie.
Hugues Lapaire, d’avoir participé à la vie rustique du Berri, à l’âme populaire qu’il exprime comme son âme même, sans artifice et sans effort.
[La Vie littéraire (1892).]
« J’ai mis dans ce livre, dit-il, ma foi à la vie, à la bonté des hommes… Puisse-t-il aller à tous ceux qui cherchent comme moi les routes de l’existence future.
. — La Vie future et le Culte des morts (1892). — Études sur les origines du christianisme (1898). — Exégèse biblique (1894). — Lettres d’un mort (1890). — Les Questions sociales dans l’antiquité (1898). — La Seconde République (1898). — Symbolique religieuse (1898). — Religion et philosophie de l’Égypte (1899).
[La Vie à Paris (1895).]
Enfin, en comparant ceci à ce qui fut écrit plus haut, j’aimerais à terminer par cette affirmation : Le rythme nous avertit de la vie en sa marche incessante vers le but ignoré ; l’harmonie, qui en procède, est le signe de notre Prédestination.
Le problème des antinomies La vie sociale ne va pas sans de nombreux conflits entre l’individu et la société.
Pour avoir eu, pendant sa vie, une réputation au dessus de son mérite, ce Poëte est aujourd’hui beaucoup moins estimé qu’il ne vaut.
Un vieux Prêtre énergumene, déclamant contre sa Religion, & renversant, par frénésie, des Autels qu’il avoit servis toute sa vie ; de longues tirades contre tous les Cultes ; de fréquentes oraisons à la Divinité ; des personnages tous Déïstes, venant, chacun à leur tour, exhaler leur dépit contre le Sacerdoce & la Religion ; des allusions prétendues ingénieuses, & qui n’ont décélé que de l’audace ou des puérilités ; toutes ces heureuses combinaisons ont été crues propres à répandre dans les esprits ce que le Monde philosophique appelle des lumieres.
L’Ouvrage dans lequel il fournit moins à la critique, est l’Instruction pour se conduire dans le monde, Instruction qu’il fit pour ses enfans, & où il annonce l’homme qui connoît le monde, un esprit qui fait penser sagement, un Philosophe qui apprécie à leur juste valeur les biens & les maux de la vie.
Pour les détails, on ne sauroit trop y applaudit : l’élégance, le naturel, l’aménité, y répandant un air de vie qui égaye l’imagination, la fixe sur tous les objets, & les lui rend sensibles.
Après l’avoir célébrée pendant sa vie, il la célébra après sa mort, & l’on soupçonneroit son amour ou ses regrets d’avoir été très-foibles, à en juger par les Vers que M.
Je contenterai son désir Par le beau récit de ta vie, Et charmerai le déplaisir Qui lui fit maudire Pavie.
Jamais les anciens Philosophes, encore moins ceux de notre Siecle, n’ont rien écrit de plus sensé & de plus instructif sur l’homme, sur ses devoirs, sur ses passions, sur l’usage qu’il doit faire des biens & des maux de la vie.
Ses travaux littéraires consistent dans des Traductions ; 1°. d’une Histoire de Maroc depuis le septieme Siecle jusqu’au quatorzieme ; 2°. d’une Histoire de toutes les Monarchies Mahométanes, composée par Hussein Effendi Hezarsen, Turc moderne ; 3°. d’un Etat général de l’Empire Ottoman, depuis sa fondation jusqu’au dix-huitieme Siecle, avec l’Abrégé des Vies des Empereurs, d’après un Manuscrit Turc ; enfin, dans celle des Mille & un Jours, Contes Arabes, & c.
Il ne s'est pas contenté d'accorder aux uns des Statues, aux autres des Médaillons, dans la Description qu'il a donnée en un volume in-folio, de ce Monument patriotique, il a inséré un extrait de la vie, & donné le Catalogue des Poésies de ceux qu'il a jugés dignes d'y avoir place.
Ceux qui revenaient de la Terre Sainte, de Sainte-Reine, du Mont-Saint-Michel, de Notre-Dame-du-Puy, et d’autres lieux semblables, composaient des cantiques sur leurs voyages, auxquels ils mêlaient le récit de la vie et de la mort de Jésus-Christ, d’une manière véritablement très grossière, mais que la simplicité de ces temps-là semblait rendre pathétique.
il faut que ni le peintre ni l’homme n’aient vu de leur vie un portrait de Vandick, ou bien c’est qu’ils n’en font point de cas.
Occupé toute sa vie d’autres travaux, et sans titres d’aucune espèce pour parler de littérature, si malgré lui ses idées se revêtent quelquefois d’apparences tranchantes, c’est que, par respect pour le public, il a voulu les énoncer clairement et en peu de mots.
Qu’on lise le deuxième intermède de Pour la Vierge du roc ardent, en quelques strophes aux rimes monotones, éteintes, le poète y dit toute la vie et tout le rêve de la jeune fille.
. — Scènes de la vie cruelle (1876). — Lettres gourmandes (1877). — Poésies complètes (1881). — Monsieur de Cupidon (1882)
Anonyme Poète de combat, tel nous apparaît Laurent Pichat dans sa personne et sa politique, dans sa vie et dans ses écrits.
Il a traversé la vie sans bruit, dans un effacement volontaire, ne parlant jamais de lui-même, publiant à la dérobée, çà et là, des proses élégantes et des vers où il laissait percer toute l’amertume de son âme inquiète, découragée.
« Il considere ce progrès insensible, mais si rapide de la vie vers sa fin, la mort toujours prochaine, ou plutôt toujours présente, le tombeau, la cendre, le tribunal de son Juge, les peines & la gloire de l’Eternité ; il attache sa vue sur ces dernieres fins de l’homme, si propres à régler sa course, &, prosterné chaque jour devant Dieu, il lui demande la grace de bien vivre, pour avoir celle de bien mourir ; sacré soin, précieuse solitude, sceau de Dieu dans les ames prédestinées, vigilance nécessaire, mais rare dans tous les hommes, plus rare dans les Grands, & plus nécessaire encore aux Grands qu’aux autres hommes ».
Ce derniers mots, sans cesser, il répete, Tantôt assis sur le bord d’un ruisseau, Tantôt couché dessus la tendre herbette, Tantôt le dos appuyé d’un ormeau, Onc ne mena, Berger, si triste vie : Du doux sommeil il ne fait plus de cas !
Ne vaudroit-il pas mieux se guérir de la démangeaison du Théatre, si on est sans talent, ou, si l'on en est pourvu, se borner à ne produire dans tout le cours de sa vie qu'une ou deux bonnes Pieces, que d'amuser le Public par des bagatelles qui passent bientôt de vogue, sans avoir le mérite de reparoître une seconde fois avec succès ?
Christine ne lui donna rien, & ce n'est pas le plus beau trait de la vie de cette Princesse.
Il a eu le sort de la plupart des Auteurs médiocres, c’est-à-dire quelques succès pendant sa vie, & le plus profond oubli après sa mort.
Autre chose est de produire un ouvrage de quelques mois de travail, autre chose est d’élever un monument qui demande les labeurs de toute une vie.
Tel est le merveilleux qu’on peut tirer de nos saints, sans parler des diverses histoires de leur vie.
Ils sauront opposer un tempérament robuste dans le cours de leur vie aux conjonctures difficiles qui les attendent.
C’est un accident de la vie.
Si vous causiez un instant avec lui, vous croiriez qu’elle va s’échapper et se mettre en liberté ; mais bientôt vous reconnaîtriez que les liens sont au-dessus des efforts, et qu’il faudra que cela se remue toute la vie, sans se dresser et partir.
Intellectuellement, c’est tout madame de La Fayette, avec sa douceur de regard, sa pureté de style, sa lueur de perle… Quoique fort bienvenue de cette éblouissante Henriette, qui a laissé inextinguibles dans l’Histoire l’éclair de sa vie et l’éclair de sa mort ; quoique mêlée à ces intrigues, voilées de décence, d’une cour qui commençait alors de mettre la convenance par-dessus toutes ses passions, madame de La Fayette ne nous donne pas sur les hommes et les choses de son temps des lumières bien nouvelles.
Même lorsqu’il ne nous est pas donné de pénétrer au delà, et qu’en avançant dans la vie nous n’avons plus que des instants pour nous retourner vers cette patrie première de toute belle pensée, la villa d’Horace, ce Tibur tant célébré, continue de nous apparaître à l’horizon, couronnant les dernières collines, et surtout, comme sur un dernier promontoire de cette mer d’azur aux rivages immortels, s’élève encore et se dessine, aussi distinct qu’au premier jour, le bûcher fumant de Didon. […] Et pour ce qui est de la Didon de Virgile en particulier, à laquelle tout ceci a trait et se rapporte, on se rend mieux compte alors de ces qualités souveraines qui assurent la vie aux œuvres de l’art dans les époques d’entière culture, à savoir, la composition, l’unité d’intérêt et un achèvement heureux de l’ensemble et des parties. […] Je ne répéterai pas le peu qu’on sait de sa vie et de ses démêlés avec Callimaque, rivalité de disciple et de maître, querelle d’épopée et d’élégie. […] mais soudainement les épouvantes de l’horrible Pluton descendirent dans son cœur ; elle demeura un long temps privée de la parole : autour d’elle tous les aimables soins de la vie se représentaient. […] Il y a longtemps que Pline le Jeune, dans une agréable lettre où il raconte plusieurs beaux traits de la célèbre Arria, femme de Pætus, a remarqué qu’ils sont tout aussi grands et aussi mémorables que le fameux mot d’elle, le seul qu’on cite (Pæte, non dolet) ; et il en conclut que la renommée est quelque peu capricieuse, et que, des actions ou des paroles entre lesquelles elle fait choix dans une vie pour la célébrer, les unes ont plus d’éclat et les autres plus de grandeur, alia esse clariora, alia majora.
Hors des redites et des banalités, il sait relater, en phrases substantielles, colorées, durables, tels aspects et mouvements caractéristiques de la vie moderne.
Paul Laur Je mets au défi tout cœur de vingt ans que la vie n’a pas encore racorni de lire la Cithare sans une émotion profonde.
. — Poèmes parisiens : Fleurs du bitume, Ciels de, lit, Vache enragée, Fins dernières, La Vie fâchée, etc.
[La Vie littéraire, 4e série (1892).]
Louis XIV honora toute sa vie Dufresny d’une bienveillance particuliere, & le combla de bienfaits, sans jamais le pouvoir enrichir.
de Voltaire, pour servir de suite à ses Ouvrages, & de Mémoires à l’Histoire de sa Vie, à Paris, chez le Jay, Libraire, rue S.
Elle les ranime, & s’ils sont éprouvés dans cette vie par les afflictions qui l’empoisonnent, rien n’altere du moins leur espérance, qui est, selon l’expression des Livres saints, pleine d’immortalité : Spes eorum immortalitatis plena ».
Il a su, malgré ces obstacles, la traiter de la maniere la plus intéressante, en la rapprochant, en quelque sorte, de nous ; en y développant les révolutions de nos mœurs ; en opposant, avec autant de justesse que de précision, les usages actuels à ceux de l'ancien temps ; en donnant aux matieres qu'il présente, une netteté, un ordre, un souffle de chaleur & de vie qui subjuguent l'attention & gravent profondément les objets dans la mémoire.
Mais une telle que la vôtre, Ne se doit jamais hasarder ; Pour votre bien, & pour le nôtre, Seigneur, il vous la faut garder, C’est injustement que la vie Fait le plus petit de vos soins ; Dès qu’elle vous sera ravie, Vous en vaudrez de moitié moins.
Psyché, de cette cène où s’éveilla ton âme, Tes yeux noirs regardaient avec étonnement, Sur le front de l’époux tout transpercé de flamme, Je ne sais quel rayon d’un plus pur élément : C’était l’ardent brasier qui consume la vie, Qui fait la flamme ailleurs, le charbon ici-bas !
Vies des Saints, 79 §.
S’il y a une autre vie, ils y seront certainement châtiés pour cela ; ils y seront condamnés à voir ces tableaux, à les regarder sans cesse, et à les trouver de plus en plus mauvais.
J’aime mieux l’ancien médaillon ; il y a plus d’élégance, plus de noblesse, plus de finesse et plus de vie.
Préface Maurice Delafosse, Administrateur en Chef des Colonies Pour bien connaître une race humaine, pour apprécier sa mentalité, pour dégager ses procédés de raisonnement, pour comprendre sa vie intellectuelle et morale, il n’est rien de tel que d’étudier son folklore, c’est-à-dire la littérature naïve et sans apprêts issue de l’âme populaire et nous la livrant dans sa nudité primitive.
… » « D’El-Arich à Gaza, le pays change de figure ; le sable se couvre de petits buissons, puis on commence à rencontrer des pierres, puis des troupeaux ; enfin on entend un peu de bruit ; le silence est encore une chose qui fait une véritable impression ; on cherche pendant longtemps ce qui manque à la vie, et tout à coup… » Horace Vernet a, depuis, imprimé quelques-uns de ces passages dans une brochure sur les Costumes de l’Orient, il a ôté les familiarités et n’a laissé que le noble et le grave, ce qui allait à son but. […] C’est dans son voyage de Syrie qu’Horace Vernet paraît avoir conçu pour la première fois ses idées sur l’immobilité de l’Orient et sur les applications qu’on en pouvait tirer à la peinture ; il lui arriva alors une chose rare, unique dans sa vie : il eut un système, il fit une théorie. […] Il commençait pourtant à s’ennuyer tout de bon d’être traité si continuellement en ami, en homme de la Cour, de passer sa vie dans les parades, dans les voyages et dans les fêtes.
Un autre secours des plus directs, une autre source où l’on n’avait pas laissé de puiser, c’était le manuscrit de Guillaume Colletet, conservé à la Bibliothèque du Louvre et contenant les Vies des Poètes françois. […] Philippe Tamizey de Larroque, en a tiré les Vies des Poètes gascons au nombre de six (1866). […] Berthelin, d’une cinquantaine de pages, s’intitule : Étude sur Amadis Jamyn : son Temps, sa Vie, ses OEuvres.
Mais, il faut le dire, avec toute l’estime qu’inspirent de semblables travaux, l’entière gloire littéraire d’une nation n’est pas là ; une certaine vie même, libre et hardie, chercha toujours aventure hors de ces enceintes : c’est dans le grand champ du dehors que l’imagination a toutes chances de se déployer. […] Avec nos mœurs électorales, industrielles, tout le monde, une fois au moins dans sa vie, aura eu sa page, son discours, son prospectus, son toast, sera auteur. […] Mais, ces avertissements donnés, ces précautions prises, et profitant à notre tour de cette audace qu’appuie la nécessité aussi, et de cette inspiration âpre et libre d’une vie de plus en plus dégagée, on est en position et en droit de dire le vrai comme on l’entend sur un ensemble dont l’impression n’est pas douteuse, dont le résultat révolte et crie de plus en plus.
Il ignore le nom de sa maîtresse, et une sorte de pudeur sévère l’empêche de regarder de trop près dans cette partie de sa vie. […] C’est à son cœur qu’il s’adresse en lui montrant la vie de Paul jetée en dehors des voies régulières, son avenir entravé par cette liaison sans issue. […] Emile Augier, qui a montré tant de fois un sens si net et si clair de la vie moderne, devient légendaire dès qu’il met le journal en scène.
Représentez-vous à une grande soirée de la duchesse de Duras, ou mieux à une brillante matinée du château de Lormois, chez la duchesse de Maillé, en plein soleil d’été, cette enfant rieuse, avec sa profusion de cheveux blonds et ce luxe de vie qui donne la joie, échappée dans le parc, bondissant et courant, puis rappelée tout à coup, et dans le plus élégant des salons, devant le plus recherché des mondes, récitant des vers d’un air grave, avec un front d’inspirée, un profil légèrement accusé de Muse antique, avec un timbre de voix précis et sonore, récitant ou un chant de Madeleine, ou son élégie (tant de fois refaite) sur Le Bonheur d’être belle, et dites s’il n’y avait pas de quoi rendre les armes et de quoi être ébloui. […] C’était assurément la seule chance qu’ait eue dans sa vie le général Cavaignac d’être comparé au pasteur Endymion. […] Je n’y trouve pas plus de ce naturel véritable qui, né de la pensée ou du sentiment, et jaillissant de la passion même, pénètre dans tout le langage et y circule comme la vie.
Ils errent et prédisent ; ils campent dans les forêts où l’on va acheter d’eux la connaissance de l’avenir, curiosité qui marque fortement le mécontentement du présent, aussi fortement que l’éloge du sommeil le mécontentement de la vie ; préjugé des russes qui n’est ni moins naturel, ni moins absurde qu’une infinité d’autres presque universellement établis chez des nations qui se glorifient d’être policées, et où des charlatans d’une autre espèce sont plus charlatans, plus honorés, plus crus et mieux payés que les sorciers russes. […] Deux bohémiennes l’accostent, lui prennent la main, lui prédisent des enfans et charmans, comme vous pensez bien, un jeune mari qui l’aimera à la folie, et qui n’aimera qu’elle, comme il arrive toujours ; de la fortune, il y avait une certaine ligne qui le disait et ne mentait jamais ; une vie longue et heureuse, comme l’indiquait une autre ligne aussi véridique que la première. […] Si cela n’est pas, l’artiste est faux ; si cela est, il n’y a donc point de pauvres ; s’il n’y a point de pauvres, et que les conditions les plus basses de la vie y soient aisées et heureuses, que manque-t-il à ce gouvernement ?
Il fallait nécessairement, à un pareil peuple, la liberté, le loisir, l’aisance ; il fallait des esclaves chargés de travailler pour eux, et de suppléer à tous les soins de la vie ; enfin, il n’y a peut-être jamais eu de grande éloquence que devant le peuple. […] Parmi nous tout est différent ; point de ces causes qui tiennent aux affaires d’état ; point même de ces grandes causes criminelles où un orateur puisse sauver la vie d’un citoyen. […] Parmi les causes ordinaires, plusieurs par l’embarras de nos procédures, ne dépendent que des formes ; plusieurs par le vice de nos lois qui se combattent, se réduisent souvent à une discussion sèche de lois qu’il faut éclaircir : l’étude même de tant de législations opposées, consume parmi nous la vie d’un orateur.
… » Cette exaltation et cette glorification de lui-même vont continuant sur ce ton : « Le sentiment de la vie morale, qui seul révèle les causes, éclaira, dans mes livres et dans mes cours, les temps de la Renaissance.
Ses idées là-dessus qui ajoutent un élément de plus, l’élément d’esprit et de vie aux pians d’ailleurs si judicieux du maréchal Clausel, méritent d’être méditées.
[La Vie littéraire (1893).]
Maurice de Faramond s’est plu à créer, diverses et semblables, des personnes légendaires qui expriment, sous forme de déclamation sentimentale, les aventures pathétiques de la vie… Le charme de leurs propos est singulier, inattendu et déconcertant… [Mercure de France (février 1898).]
. — La Vie nouvelle, comédie en cinq actes (1867). — Les Misérables, drame en cinq actes, avec Victor et Charles Hugo (1870). — La Brésilienne, drame en cinq actes, avec Mathey (1878). — Quatre-vingt-treize, drame en 12 tableaux, d’après Victor Hugo (1881). — Le Songe d’une nuit d’été, féérie (1886). — Struensée, drame en cinq actes et en vers (1898).
Moréas est un des bons poètes de ce temps, et celui qui dans ses Chants de la Pluie et du Soleil fait surgir si splendidement nue de la mer féconde Vénus Anadiomène, celui-là est plus apte que quiconque à comprendre cet Hellène et à saisir les nuances de celui qui — s’il fut archaïque — ne se ferma pas entièrement aux voix naturelles de la vie et aux chants très modestes des pâtres près des sources jonchées d’asphodèle.
Ce qui fortifie cette opinion, est sa Traduction des Harangues choisies de quelques Auteurs Latins, où il est toujours le même, quoique ses originaux soient pleins de chaleur & de vie.
Le singe se sentait démangé comme jamais il ne l’avait été de sa vie.
Sans remonter bien haut, dans le Jacques Cœur 4 de Pierre Clément, dont nous parlions récemment, nous nous rappelons un excellent chapitre sur la littérature du xve siècle qui prouve, avec une grande autorité, combien déjà au xve siècle le génie littéraire de la France avait de vie intime et de force, et avec quelle puissance il commençait, semblable au lion de Milton s’arrachant au chaos qui l’enveloppe encore, de se détirer des obscurités et des empâtements de sa native originalité.
Elle débute par un fragment qui sert d’amorce et se complète peu à peu… Képler a consacré une partie de sa vie à essayer des hypothèses bizarres jusqu’au jour où, ayant découvert l’orbite elliptique de Mars, tout son travail antérieur prit corps et s’organisa en système 79. » En d’autres termes, au lieu d’un schéma unique, aux formes immobiles et raides, dont on se donne tout de suite la conception distincte, il peut y avoir un schéma élastique ou mouvant, dont l’esprit se refuse à arrêter les contours, parce qu’il attend sa décision des images mêmes que le schéma doit attirer pour se donner un corps. […] C’est l’unité même de la vie. […] Si les images constituent le tout de notre vie mentale, par où l’état de concentration de l’esprit pourra-t-il se différencier de l’état de dispersion intellectuelle ? […] Cette opération, qui est celle même de la vie, consiste dans un passage graduel du moins réalisé au plus réalisé, de l’intensif à l’extensif, d’une implication réciproque des parties à leur juxtaposition.
Le souffle harmonieux y sort comme une plainte vague, abondante ; la plainte monte à chaque stance comme une marée sans étoile sur quelque grève de Bretagne : Quand la nuit n’est pas étoilée, Viens te bercer aux flots des mers ; Comme la mort elle est voilée, Comme la vie ils sont amers. […] Charmante observation prise à la vie de famille !
La conversation devint bientôt le principal attrait de cette société, et fut placée entre les plus vives et les plus nobles jouissances de la vie : c’était la préparation et le complément de toutes celles qui étaient réservées à l’intimité. […] V, pag. 282, cite en note une réponse du roi au reproche la tyrannie que lui faisait le prince de Condé : « Je n’ai fait en ma vie acte de tyrannie que quand je vous ai fait reconnaître pour ce que vous n’étiez point. » Ces paroles se rapportent à la cassation ordonnée par le roi, d’un arrêt qui déclarait enfant adultérin le prince de Condé.
Le démon de Stagyre, ou, ce qui revient au même, le mal de René, c’est le dégoût de la vie, l’inaction et l’abus du rêve, un sentiment orgueilleux d’isolement, de se croire méconnu, de mépriser le monde et les voies tracées, de les juger indignes de soi, de s’estimer le plus désolé des hommes, et à la fois d’aimer sa tristesse ; le dernier terme de ce mal serait le suicide. […] Il n’a cessé de lui redire sur tous les tons, sur le ton de la raillerie, comme aussi sur celui de l’affection : Ne vous croyez pas supérieur aux autres ; acceptez la vie commune ; ne faites pas fi de la petite morale, elle est la seule bonne.
C’est ce caractère moral qui, répandu sur toute une vie, contribue beaucoup à l’autorité dès la jeunesse. […] On le voit, ce n’est point l’unité qui manque à une telle vie.
Ensuite je chercherai si Michel-Ange a pu, avec quelque jugement, mettre la figure de l’homme en contradiction avec ses mœurs, son histoire et sa vie. […] Et Jésus-Christ pauvre, débonnaire, jeûnant, priant, veillant, souffrant, battu, foueté, bafoué, souffleté a-t-il jamais pu être taillé d’après un brigand nerveux qui avait débuté par étouffer des serpens au berceau, et employé le reste de sa vie à courir les grands chemins, une massue à la main, écrasant des monstres et dépucelant des filles ?
Un palatin de Pologne dépense en vin et en eaux de vie. […] Ils sçavent vivre de peu, et ils craignent autant de perdre la gravité que les autres hommes de perdre la vie.
Ce qui suit n’est qu’une phrase nombreuse ; du reste, elle l’est à souhait, et sans affectation ni raffinement, par où elle est un vrai modèle : « Vous verrez dans une seule vie toutes les extrémités des choses humaines, | la félicité sans bornes aussi bien que les misères, | une longue et paisible jouissance d’une des plus nobles couronnes de l’Univers, | tout ce que peuvent donner de plus glorieux la naissance et la grandeur accumulée sur une seule tête, | qui ensuite est exposée à tous les outrages de la fortune ; | la bonne cause d’abord suivie de bon succès | et, depuis, des retours soudains, des changements inouïs, | la rébellion longtemps retenue, à la fin tout à fait maîtresse, | nul frein à la licence ; les lois abolies ; la majesté violée par des attentats jusqu’alors inconnus, | l’usurpation et la tyrannie sous le nom de liberté, | une reine fugitive qui ne trouve aucune retraite dans trois royaumes | et à qui sa propre patrie n’est plus qu’un triste lieu d’exil, | neuf voyages sur mer entrepris par une princesse malgré les tempêtes, | l’océan étonné de se voir traversé tant de fois en des appareils si divers et pour des causes si différentes, | un trône indignement renversé et miraculeusement rétabli. » Cette période est composée de membres de phrase d’une longueur inégale, mais non pas très inégale, de membres de phrase qui vont d’une longueur de vingt syllabes environ à une longueur de trente syllabes environ et c’est-à-dire qui sont réglées par le rythme de l’haleine sans s’astreindre à en remplir toujours toute la tenue, et qui ainsi se soutiennent bien les uns les autres et satisfont le besoin qu’a l’oreille de continuité à la fois et de variété, de rythme et de rythme qui ne soit pas monotone. […] Il est aussi dans les membres de phrase courts en même temps qu’ils sont sourds, des membres de phrase déprimés du commencement, auxquels s’oppose le membre de phrase final, non pas allègre, mais libre, mais libéré, s’espaçant discrètement, mais s’espaçant et prenant du champ et qui semble comme l’expression du soulagement et de la reprise de la vie dans un sourire : « les yeux des jeunes filles y sont (verts et bleus à la fois) comme ces vertes fontaines où sur un fond d’herbes ondulées se mire le ciel. » Ainsi, en lisant à haute voix, vous vous pénétrez des rythmes qui complètent le sens chez les écrivains qui savent écrire musicalement ; du rythme qui est le sens lui-même en sa profondeur ; du rythme qui, en quelque façon, a précédé la pensée (car il y a trois phases : la pensée en son ensemble, en sa généralité : « Je suis né en Bretagne » — le rythme qui chante dans l’esprit de l’auteur, qui est son émotion elle-même et dans lequel il sent qu’il faut que sa pensée soit coulée — le détail de la pensée qui se coule en effet dans le rythme, s’y adapte, le respecte, ne le froisse pas et le remplit) ; du rythme enfin qui, parce qu’il est le mouvement même de l’âme de l’auteur, est ce qui, plus que tout le reste, vous met comme directement et sans intermédiaire en communication avec son âme.
C’est une imitation de société qui s’essaie encore, c’est un fantôme brillant qui joue la vie, un bas-relief byzantin en cire flexible, mais toujours prêt à recevoir l’impression du doigt de chair ou du cachet de métal. […] Ils peuvent être des chevaliers de Grammont dans la vie ; c’est un air à prendre, un habit à porter, un propos à tenir, une manière de saluer, de monter à cheval, de mettre ses bottes, ou de se les faire ôter par des princesses, — comme faisait Lauzun.
En vain elle est sortie de l’esprit de Celui qui est toute Vérité et toute Vie ; c’est assez pour elle qu’elle en soit sortie ! […] Vivante, elle devait immobiliser la vie.
Seulement, si un conte répété deux fois est assez ennuyeux pour que Shakespeare en ait fait la comparaison de la vie, nous demandons quelle impression doit causer, à vingt ans de distance, une imitation malheureusement trop réussie puisqu’elle ne nous donne ni une idée ni une sensation de plus que le poète dont elle est l’écho. […] … Si Banville n’est pas l’impuissance à poste fixe dans un système, il aura passé la moitié de sa vie à se préparer poète.
On donne volontiers raison au prince de Ligne, lorsqu’il disait : « Dans les pensées de M. de Meilhan, il y a des traits de feu qui éclairent toujours, et des fusées qui vont plus haut qu’elles ne font de bruit. » M. de Meilhan s’était exercé, dans la première partie de sa vie, à traduire les Annales de Tacite, une double école de politique et de style.
Payen, Louis (1875-1927) [Bibliographie] Vers la vie (1898). — Tiphaine, épisode dramatique, musique de V.
Il sent tout ce qu’il conçoit ; ce qui donne à sa Dialectique une ame & une vie qui en communiquent toute l’activité, soit à l’Auditeur, soit au Lecteur.
Après avoir fait voir les deux armées aux prises, & avoir peint d’une maniere énergique la défaite du Duc, il lui adresse ainsi la parole : Grand Héros, qu’un excès d’amour & de valeur Engage aveuglément dans le dernier malheur, Tous tes autres exploits ont mérité de vivre ; Ils vivront à jamais sur le marbre & le cuivre : Tes sublimes vertus, dignes d’un meilleur sort, Effacent, à nos yeux, la honte de ta mort ; Et les siecles futurs, francs de haine & d’envie, Ne doivent pas juger de l’état de ta vie, Par l’instant malheureux qui surprit tes beaux jours D’une éclipse fatale au milieu de leur cours.
La Chasse d’Henri IV auroit été accueillie avec enthousiasme, quand elle n’auroit eu d’autre effet que de rappeler un trait intéressant de la vie d’un Monarque, dont le nom seul suffit pour attendrir les cœurs ; mais M.
COUTEL, [Antoine] né à Paris en 1622, mort à Blois, où il avoit passé la plus grande partie de sa vie ; Poëte oublié, dont le Recueil de Poésies a pour titre : Promenades de Messire Antoine Coutel.
Il se démit de son Evêché, afin d’avoir plus de temps à donner à l’étude, & se retira ensuite à la Maison Professe des Jésuites de Paris, où il passa les vingt dernieres années de sa vie.
Tourne les yeux : sa tombe est près de ce palais, C’est ici la montagne où, lavant nos forfaits, Il voulut expirer sous les coups de l’impie ; C’est là que de sa tombe il rappela sa vie.
Inquiets et volages dans le bonheur, constants et invincibles dans l’adversité, formés pour les arts, civilisés jusqu’à l’excès, durant le calme de l’État ; grossiers et sauvages dans les troubles politiques, flottants comme des vaisseaux sans lest au gré des passions ; à présent dans les cieux, l’instant d’après dans les abîmes enthousiastes et du bien et du mal, faisant le premier sans en exiger de reconnaissance, et le second sans en sentir de remords ; ne se souvenant ni de leurs crimes, ni de leurs vertus ; amants pusillanimes de la vie pendant la paix ; prodigues de leurs jours dans les batailles ; vains, railleurs, ambitieux, à la fois routiniers et novateurs, méprisant tout ce qui n’est pas eux ; individuellement les plus aimables des hommes, en corps les plus désagréables de tous ; charmants dans leur propre pays, insupportables chez l’étranger ; tour à tour plus doux, plus innocents que l’agneau, et plus impitoyables, plus féroces que le tigre : tels furent les Athéniens d’autrefois, et tels sont les Français d’aujourd’hui.
Plus de doute : j’avais, pour la première fois de ma vie, trouvé le nid de notre troglodyte d’hiver ! […] Le pewee ou gobe-mouche brun Les détails dont se compose la biographie de ce gobe-mouche sont, pour la plupart, si intimement unis avec les particularités de ma propre histoire, que, s’il m’était permis de m’écarter de mon sujet, ce volume serait consacré bien moins à la description et aux mœurs des oiseaux qu’aux impressions de jeunesse d’un homme qui a vécu, longues années, de la vie des bois, en Amérique. […] Ainsi, sous cette frêle enveloppe existait déjà la vie ; et dans quelques semaines, une créature faible, délicate et sans défense, mais parfaite en chacune de ses parties, allait briser la coquille et réclamer les plus doux soins et toute l’attention de ses parents qui n’existeraient que pour elle ! […] Que mon doigt eût pressé la détente, et c’était fait de sa vie ; mais, m’étant aperçu que ce qu’il dirigeait sur ma poitrine n’était qu’une espèce de mauvais fusil qui ne pourrait jamais faire feu, je me sentis au fond assez peu effrayé de ses menaces et ne crus pas nécessaire d’en venir aux extrémités. […] Aussi, lorsqu’ils m’invitèrent humblement à faire honneur aux mets qui étaient devant nous, j’en pris ma part d’aussi bon cœur que je l’aie jamais fait de ma vie.
Pour ceux qui connaissent son caractère de droiture, d’énergie et de franchise, ou qui ont apprécié la haute portée de son talent, c’était un besoin de manifester les sentiments d’estime et d’affection qu’ils lui portent : ceux qui partagent ses principes politiques ont dû lui savoir gré de cette généreuse ardeur toujours prompte à relever les provocations ou à venger les injures qui s’adressent à la cause de Juillet ; les hommes de cœur, enfin, qui, sans être attirés vers lui par une communauté d’opinion aussi étroite, ont pris en dégoût les honteuses palinodies qui font le scandale de notre temps, n’ont pu refuser quelque marque de sympathie à un écrivain dont la foi politique, éclairée et persévérante, va jusqu’au sacrifice de la vie.
. — La Vie rurale (1856)
[La Vie et les Livres (2e série, 1895).]
Son Sonnet sur un Avorton, celui qu’il fit contre le Ministre Colbert, un autre sur la Vie privée, sont des preuves décisives de ses talens pour la Poésie.
C’est surtout en fait de Traduction, que la lettre tue & que l’esprit donne la vie.
Cet Auteur a conservé sa gaieté jusqu’au dernier moment de sa vie.
Sarcey me disait, vers la fin de sa vie, il est vrai : « Comme je suis las de lire les livres pour savoir ce que j’en dirai !
Mais la vérité est que ces illusions persistent toujours, et qu’elles conservent la même intensité pendant toute la vie : on peut s’en convaincre par des questions adressées aux amputés longtemps après qu’ils ont subi l’opération. […] Après la guérison, le sujet conserve les sensations qu’un membre sain procure aux autres hommes, et fréquemment il reste pendant toute la vie un sentiment de formication et même de douleur, ayant en apparence son siège dans les parties extérieures, qui cependant n’existent plus. […] D’ordinaire, ce jugement est efficace au point de vue pratique, par les prévisions qu’il nous suggère et qui dirigent notre conduite ; en soi, il n’est qu’une illusion le plus souvent utile, une erreur foncière que la nature et l’expérience ont construite en nous et établie en nous à demeure, pour en faire un préservatif de notre vie et un organe de notre action. […] Le lecteur les a vues quand nous avons montré la persistance sourde des images, leur vie latente, leur état rudimentaire, l’effacement qu’elles subissent, souvent pendant des années entières, et la prédisposition organique qui les conserve à l’état hibernant ou nul, comme la vie d’un rotifère desséché, jusqu’au moment où les cellules corticales en qui cette prédisposition est établie reprendront leur jeu, propageront leur danse et ramèneront l’image correspondante au premier plan cérébral. […] Il ne faut donc pas s’étonner du rôle énorme que joue l’atlas visuel dans notre vie courante.
Peut-être que la vie entiere d’un héros, maniée avec art, et ornée des beautés poëtiques, en seroit une matiere raisonnable. à quel titre condamneroit-on un ouvrage qui seroit le modele de toute la vie, la morale de tous les âges et de toutes les fortunes ? […] Pour donner plus de vie, plus de mouvement à son poëme, il fait presque toujours parler ses personnages. […] Ce n’est pas assez pour eux que de vaincre, ils veulent arracher la vie ; ils insultent encore aux morts ; et ils voudroient, selon les idées de leur tems, éterniser leur malheur, en leur refusant la sépulture. […] Le destin lui avoit proposé par la bouche de Thétis, l’alternative d’une vie longue et heureuse, mais obscure, s’il demeuroit dans ses états ; et d’une vie courte, mais glorieuse, s’il embrassoit la vengeance des grecs. […] Il la traite de chimere, et il met la vie paisible, quoiqu’obscure, au dessus de tous les honneurs du monde.
Il y a dans les vies des pères du désert une jolie histoire que Thibaudet a bien fait de ne pas relire avant de se mettre à son article. […] Et cela, je le répète, de bien des façons : amour, dévouement, commencement d’une vie morale plus haute, initiatives de tout genre et dans tous les ordres de vocations ; adaptation, héroïque souvent, mais toujours laborieuse, de tout l’être au modèle que l’inspiration lui a montré. […] Nos vrais savants reconnaissent à la poésie son droit à la vie, en certains cas à la victoire, par le fait même qu’ils croient découvrir les causes psycho-physiologiques précises dont ils veulent faire dépendre sa force et sa beauté-précisions qui ont ceci de particulier de n’être jamais limitatives. […] Elle englobe pour nous toute la vie, elle est la source intérieure de l’être en ses manifestations les plus diverses, et l’on doit l’étudier comme telle, ainsi qu’on distingue le sentiment du beau indépendamment de l’art et de ses formes. […] Il apparaît pendant une courte vie, mais d’où vient-il, où va-t-il ?
. — Et puis n’est-ce donc rien que la vie sociale et les qualités qui en font l’agrément ?
Elle prête une âme aux choses, et sa verve jette un reflet de vie sur les pauvres objets, accessoires familiers de tous les ridicules humains, de nos faiblesses et de nos infirmités.
La doctrine symboliste Les Décadents dissemblaient des Symbolistes en ce sens qu’ils admettaient l’émotion directe, la traduction exacte des phénomènes de la vie au lieu d’en exiger la transposition, qu’ils n’allongeaient pas outre mesure l’alexandrin et qu’ils usaient des poèmes à forme fixe.
La ville de Toulouse, pleine d’admiration pour ses talens, & d’estime pour ses vertus, lui fit une pension pendant les vingt dernieres années de sa vie, &, lorsqu’il fut mort, plaça son buste dans le Capitole, à côté de celui du Poëte Maynard, son Compatriote.
Ses Remarques Littéraires & Critiques sur les Bibliotheques de la Croix du Maine & du Verdier, ses Mémoires historiques sur la vie & les Ouvrages de la Monnoye, offrent des traits fréquens de zele & de réclamation contre les attentats de la Philosophie.
Dans cette ligne de vie qui nous fut transmise par nos ancêtres, et que nous devons prolonger au-delà de nous, on ne saisit que le point présent ; et, chacun se consacrant à sa propre corruption, comme un sacerdoce abominable, vit tel que si rien ne l’eût précédé, et que rien ne le dût suivre.
Mais la comedie, suivant la définition d’Aristote est l’imitation du ridicule des hommes ; et la tragedie, suivant la signification qu’on donnoit à ce mot, est l’imitation de la vie et du discours des heros ou des hommes sujets par leur élevation aux passions les plus violentes.
C’est lui qui est l’auteur de la célèbre phrase : « Les secours les plus empressés n’ont pu le rappeler à la vie », appliquée à un suicide de trois jours, et à propos de laquelle les héritiers de Lapalisse voulaient lui intenter un procès. […] Barbier, qui passe sa vie à courir après M. […] Il passe sa vie à mettre en pratique la devise de César : « Voir, venir et vaincre. » — Comment fait-il ? […] On a beaucoup écrit sur mademoiselle Rachel pendant sa vie ; car elle était, comme femme et comme artiste, un de ces personnages que leur évidence soumet incessamment aux indiscrètes curiosités de l’opinion. […] Depuis longtemps la gloire lui avait dit son dernier mot, et, si elle avait encore quelque chose à demander à la vie, ce ne pouvait être que le repos
Il différencie radicalement les facultés de ce qu’il appelle l’intelligence d’avec les facultés de l’âme ; il fait de la première la science purement terrestre, le résultat élaboré des organes ; il fait de la seconde une émanation de Dieu et un pur esprit ; et c’est en s’attachant aux facultés de cette partie immatérielle qu’il pense arriver avec évidence aux vérités sublimes et naturelles qui doivent diriger toute une vie.
Ce chapitre, me dira-t-on, est d’une couleur trop sombre, la pensée de la mort y est presque inséparable du tableau de l’amour, et l’amour embellit la vie, et l’amour est le charme de la nature.
Jean Aicard de nous dire, avec son éloquence, le beau et charmant poème de la naissance, de la vie et de la mort du Christ.
Nous doutions-nous, au milieu des agitations stériles de notre vie artificielle et tourmentée, qu’un homme extraordinaire, isolé depuis plus de quarante années dans le silence et la méditation, avait su élever un monument qui, par sa splendeur et sa vérité, domine la mêlée de nos passions, de nos luttes et de nos médiocrités tapageuses, comme les Pyramides surplombent de leur hauteur écrasante les sables mouvants et les simouns du désert ?
Or ce n’est que durant les premieres années de notre vie que la liaison entre un certain mot et une certaine idée se fait si bien, que ce mot nous paroisse avoir une énergie naturelle ; c’est-à-dire une proprieté particuliere, pour signifier la chose dont il n’est cependant qu’un signe institué arbitrairement.
Depuis un temps les eaux de vie simples et composées, le tabac, le caffé, le chocolat et d’autres denrées qui ne croissent que sous le soleil le plus ardent, sont en usage, même parmi le bas peuple, en Hollande, en Angleterre, en Pologne, en Allemagne et dans le nord.
Il appète une vie végétative. […] — Vieillard, de macro… et bios, vie. […] Cet homme qui strapassonnait de façon si aiguë et nerveuse la vie au gaz… […] Villotières s, f. — Coureuses, filles de mauvaise vie.
Cet homme d’étude, qui, dans sa jeunesse, avait été précepteur du comte Tanneguy Duchâtel (les Suisses sont volontiers précepteurs dans leur jeunesse), n’avait pas varié une minute au fond du cœur ni faibli dans sa première et vieille trempe helvétique ; et quand je pense à cet homme de bien, vétéran des universités, ancien membre de la Diète aux heures difficiles, si modeste de vie, mais intègre et grand par le caractère, je me le figure toujours sous les traits d’un soldat suisse dans les combats, inébranlable dans la mêlée comme à Sempach, la pique ou la hallebarde à la main. […] Dans la Vie politique et militaire de Napoléon, l’historien rentre dans le vrai et le vraisemblable : « Ney, est-il dit, attachant trop d’importance au mouvement sur Berlin, était prêt (à un moment) à s’y porter de sa personne. » Là eût été la faute, et c’est en cela que Jomini le combattit par toutes sortes d’objections que les renseignements et les ordres ultérieurs vinrent tout à fait confirmer. […] Je crois la trouver dans ce passage de la Vie politique et militaire de Napoléon (tome IV, page 424) ; c’est l’Empereur qui est censé parler : « Ney n’avait d’illumination qu’au milieu des boulets et dans le tumulte du combat : là son coup d’œil, son sang-froid et sa vigueur étaient incomparables ; mais il ne savait pas si bien préparer ses opérations dans le silence du cabinet en étudiant la carte.
Cette excursion exceptée, les principaux événements de sa vie sont tout littéraires : nommé de l’Académie des Sciences morales lors de la fondation en 1832, élu de l’Académie française comme successeur de M.Raynouard en 1836, il fut de plus choisi pour secrétaire perpétuel de la première de ces académies, à la mort de M.Comte, en 1837. […] M.de Lionne, dont la trace si considérable était restée à demi ensevelie dans les cartons officiels, reparaît ici avec toute sa vie et sa variété féconde. Politique avisé autant qu’homme aimable, plein d’expédients et de ressources, fertile, infatigable, possédant à fond les affaires et les portant avec légèreté et grâce, les égayant presque toujours dans le ton, il était le chef de cette école de diplomates dont Chaulieu avait connu de brillants élèves, et dont il a fait un groupe à part dans son Élysée : Dans un bois d’orangers qu’arrose un clair ruisseau Je revois Seignelai, je retrouve Béthune, Esprits supérieurs en qui la volupté Ne déroba jamais rien à l’habileté, Dignes de plus de vie et de plus de fortune !
Baillarger, que d’entendre les malades se plaindre que les interlocuteurs invisibles leur racontent une foule de choses qui les concernent… Comment, pour me servir de l’expression d’une malade, peut-on lire dans leur vie comme dans un livre ? […] Un autre avait lu, peu de temps avant de tomber malade, la relation d’un voyage dans l’Himalaya ; et c’est sur ce sujet que roulait principalement son délire. » — Les circonstances12 les plus effacées de nos premières années, les incidents les moins remarqués et les plus insignifiants de notre vie ressuscitent parfois avec cette hypertrophie monstrueuse. […] Ainsi l’hallucination, qui semble une monstruosité, est la trame même de notre vie mentale. — Considérée par rapport aux choses, tantôt elle leur correspond, et, dans ce cas, elle constitue la perception extérieure normale ; tantôt elle ne leur correspond pas, et dans ce cas, qui est celui du rêve, du somnambulisme, de l’hypnotisme et de la maladie, elle constitue la perception extérieure fausse, ou hallucination proprement dite. — Considérée en elle-même, tantôt elle est complète ou achevée dans son développement : ce qui arrive dans les deux cas précédents ; tantôt elle est réprimée et demeure rudimentaire : c’est le cas des idées, conceptions, représentations, souvenirs, prévisions, imaginations, et de toutes les autres opérations mentales.
Il n’aura, la vie durant, qu’à toucher sa prébende. […] Qui scruta le mirage de l’Immortalité sait bien qu’elle consiste, outre le salut indifférent de la foule future, dans le culte, renouvelé par quelques jeunes gens, au début de la vie. […] Considérez, notre investigation aboutit : un échange peut, ou plutôt il doit survenir, en retour du triomphal appoint, le verbe, que coûte que coûte ou plaintivement à un moment même bref accepte l’instrumentation, afin de ne demeurer les forces de la vie aveugles à leur splendeur, latentes ou sans issue.
3° Enfin, dans notre vie ordinaire, tout objet visible est composé de parties très petites ou minima visibilia. […] Le partisan de la liberté dit : d’abord, j’ai pour moi le sentiment intime de mon libre arbitre ; ensuite mes projets, mes plans, les actes même les plus vulgaires de ma vie montrent que je ne suis pas esclave de la nécessité, que je n’agis pas comme un automate, mais que je participe à mes actions. […] L’objet de la morale doit donc être de déduire des lois de la vie et de ses conditions d’existence, quelles sont les espèces d’actions qui tendent nécessairement à produire le bonheur et quelles sont les espèces d’actions qui tendent au contraire.
Entre le plan de l’action, — le plan où notre corps a contracté son passé en habitudes motrices, — et le plan de la mémoire pure, où notre esprit conserve dans tous ses détails le tableau de notre vie écoulée, nous avons cru apercevoir au contraire mille et mille plans de conscience différents, mille répétitions intégrales et pourtant diverses de la totalité de notre expérience vécue. […] L’intelligence, se mouvant à tout moment le long de l’intervalle qui les sépare, les retrouve ou plutôt les crée à nouveau sans cesse : sa vie consiste dans ce mouvement même. […] Non seulement, par sa mémoire des expériences déjà anciennes, cette conscience retient de mieux en mieux le passé pour l’organiser avec le présent dans une décision plus riche et plus neuve, mais vivant d’une vie plus intense, contractant, par sa mémoire de l’expérience immédiate, un nombre croissant de moments extérieurs dans sa durée présente, elle devient plus capable de créer des actes dont l’indétermination interne, devant se répartir sur une multiplicité aussi grande qu’on voudra des moments de la matière, passera d’autant plus facilement à travers les mailles de la nécessité.
Marx l’avait remarqué ; la Vielseitigkeit devient de plus en plus nécessaire au travailleur ; l’état, économique de l’industrie tend de lui-même à substituer, à l’individu qui n’est que partiellement développé et ne sait exercer toute sa vie qu’une fonction de détail (Theil Individuum), l’individu développé intégralement, capable d’exercer tour à tour des fonctions différentes. […] D’ailleurs, on méconnaîtrait étrangement les caractères que la civilisation impose tant aux besoins qu’aux activités des hommes, si l’on considérait comme seuls importants pour la vie sociale les groupements d’ordre économique. […] Qu’un commerce constant et réglé par les usages mondains mette en présence, dans les salons du xviiie siècle, le roturier et le gentilhomme, et ils se rapprocheront insensiblement ; c’est ainsi que, plus encore peut-être que leurs théories, la vie mondaine de nos grands écrivains préparait le succès des idées égalitaires.
Scherer est un des nobles types des esprits sérieux qui croient à une vérité absolue, qui, même lorsqu’ils ont le sourire fin, ne l’ont pas léger et moqueur ; et quand il ne nous le déclarerait pas, on sent, en le lisant, qu’il signerait volontiers cette pensée du théosophe Saint-Martin : « La vie nous a été donnée pour que chacune des minutes dont elle se compose soit échangée contre une parcelle de la vérité. » Voilà une vocation. […] Scherer, et qui touchent à des contemporains pleins de vie.
Dans les premiers, de l’examen d’un cas particulier, bien choisi, de l’exposition de la vie d’un prince ou d’un saint, il tire une leçon générale, une loi pour le règlement de la vie chrétienne et le salut des auditeurs.
Ici, comme dans plusieurs autres circonstances de sa vie, Jésus se plia aux idées qui avaient cours de son temps, bien qu’elles ne fussent pas précisément les siennes. […] Il nous est facile à nous autres, impuissants que nous sommes, d’appeler cela mensonge, et, fiers de notre timide honnêteté, de traiter avec dédain les héros qui ont accepté dans d’autres conditions la lutte de la vie.
Dans la vie organique, il n’y a à l’origine aucune liaison entre la souffrance physique et les actions calculées pour la soulager. […] Les actions réflexes, les actes habituels sont de cette nature, « Les actes volontaires se distinguent des actions réflexes par l’intervention d’une conscience, et le phénomène est très remarquable, en ce qu’il nous introduit, pour ainsi dire, dans un nouveau monde Nous sommes même libres, si cela nous plaît, de dire que l’esprit est une source de puissance ; mais nous devons alors entendre par esprit la conscience jointe à tout le corps, et nous devons aussi être prêts à admettre que l’énergie physique est la condition indispensable ; la conscience, la condition accidentelle187. » V « Tout ce qui a été exposé jusqu’ici188 relativement aux actions volontaires des êtres vivants, implique la prédominance d’une uniformité ou d’une loi dans cette classe de phénomènes, en supposant toutefois une complication de nombreux antécédents qui ne sont pas toujours parfaitement connus. » La pratique de la vie s’accorde en général avec cette théorie : nous prédisons la conduite future de chacun d’après son passé ; nous appelons Aristide un juste, Socrate un héros moral, Néron un monstre de cruauté.
Que sait-on de la vie d’Hamilton ? […] Quel contraste ironique de cette vie de jeunesse avec l’expiation finale à Saint-Germain !
C’est un artiste dévoué à l’art, qui n’a jamais cherché le succès par de pauvres moyens, qui s’est habitué toute sa vie a regarder le public fixement et en face. […] Quand cela sera fait, quand il aura rapporté chez lui, intacte, inviolable et sacrée, sa liberté de poëte et de citoyen, il se remettra paisiblement à l’œuvre de sa vie dont on l’arrache violemment et qu’il eut voulu ne jamais quitter un instant.
Certains censeurs austères de la poësie la rédoutent au point de compter, parmi les belles actions de leur vie, celle de s’interdire la lecture de tout poëte. […] Mais partout ailleurs où il ne sera point question de ce monstrueux mélange, quel inconvénient y a-t-il qu’un poëte, qui cherche à nous instruire ou à plaire, emploie quelquefois, pour parvenir à son but, & la fable & ces fictions ingénieuses, qui, par la vie qu’elles donnent à tout, font plus d’effet souvent que la réalité même ?
Ce n’est que vers la fin de sa vie qu’il s’est posé à lui-même le problème de Dieu. […] C’est ce que firent à la fois en Allemagne et en France deux grands penseurs, Fichte et Biran, le premier plus porté au spéculatif suivant le goût et le génie de sa nation, le second plus psychologue, plus observateur, — le premier liant la métaphysique à la politique, passionné pour les idées du xviiie siècle et de la révolution, le second royaliste dans la pratique, assez indifférent pour ces sortes de recherches et occupé d’une manière tout abstraite à l’étude de la vie intérieure, — tous deux enfin, par une rencontre singulière et selon toute apparence par des raisons analogues, ayant terminé leur carrière par le mysticisme, mais le premier par un mysticisme inclinant au panthéisme, le second par le mysticisme chrétien.
Mais si on avait, comme je le suppose, un désir sincère de les convertir en les effrayant, on pouvait, ce me semble, faire agir un intérêt plus puissant et plus sûr, celui de leur vanité et de leur amour-propre ; les représenter courant sans cesse après des chimères ou des chagrins ; leur montrer d’une part le néant des connaissances humaines, la futilité de quelques-unes, l’incertitude de presque toutes ; de l’autre, la haine et l’envie poursuivant jusqu’au tombeau les écrivains célèbres, honorés après leur mort comme les premiers des hommes, et traités comme les derniers pendant leur vie ; Homère et Milton, pauvres et malheureux ; Aristote et Descartes, fuyant la persécution ; le Tasse, mourant sans avoir joui de sa gloire ; Corneille, dégoûté du théâtre, et n’y rentrant que pour s’y traîner avec de nouveaux dégoûts ; Racine, désespéré par ses critiques ; Quinault, victime de la satire ; tous enfin se reprochant d’avoir perdu leur repos pour courir après la renommée. […] Peut-être après la lecture d’un pareil livre, serait-on tenté de fermer pour jamais les siens, comme on allait se tuer autrefois au sortir de l’école de ce philosophe mélancolique, qui décriait la vie au point d’en dégoûter ses auditeurs, et qui gardait pour lui le courage de ne se pas tuer.
Le voyageur est ordinairement une créature plus ou moins ardente, plus ou moins haletante, plus ou moins inquiète, qui aime le mouvement et qui le recherche ; tandis que lui, Fromentin, a l’amour, assez rare maintenant, et qui deviendra d’ici quelque temps une originalité profonde, de l’immobilité dans la vie, et il n’a pas honte de l’avouer. […] et il a l’avantage de la vie sur du Camp, c’est-à-dire d’une toute-puissante spontanéité.
Quoi qu’il en soit de tant d’opinions diverses, et sur cette affaire en particulier, et sur la vie entière de Marie-Antoinette, on ne pourra du moins refuser des vertus à cette princesse qui montra tant d’affabilité sur le trône et de dignité dans le malheur.
On tenta de transporter à l’esprit les bienfaits dont on la voyait adoucir la vie matérielle.
Mais sa vie littéraire n’était point scellée dans la tombe des dieux disparus, et, par une métamorphose qui surprendra seulement les niais, le vicomte de Guerne s’est montré dès lors le poète le plus voisin de nous et le plus préoccupé, maintenant, du monde qui peine autour de lui vers les destins inconnus.
Tout en fréquentant les sombres bureaux de rédaction et en vivant de la vie enfumée, poussiéreuse et énervante de Paris, il laissait son imagination s’envoler vers les pays lointains : amour boréal, amour africain, idylles chinoises et coloniales, tout le captivait, et son Harem n’est autre chose qu’un Tour du Monde en vingt-cinq parties.
Le nom de Chef des odeurs suaves qu’il lui a donné ne saurait être mieux placé qu’en tête d’un livre de poésies qui ne chantent que les fleurs, nous en fait encore respirer les parfums au-delà de leurs petites vies, et nous les fait suivre jusque dans le vol de leurs âmes légères.
Le monde extérieur et banal n’existerait plus et on vivrait une vie de rêve, d’idéal… et de poète.
Ce dessein est devenu la tâché de toute sa vie ; grande tâche et vraiment patriotique !
Il faudra presque une vie entière pour connaître à fond une époque.
N’y a-t-il pas des coins de sa vie qui nous échappent ?
Pouvoit-il ignorer qu’il existe toujours de petits nuages dans la vie des plus grands hommes ?
Malgré tant d’honneurs littéraires & un grand nombre d’Ouvrages, nous doutons que cet Auteur, estimable à quelques égards, jouisse d’une longue vie dans la Postérité.
Le premier offre un tableau fidele de la vie, de la conduite, des usages, du gouvernement des Hébreux : le second, écrit avec une candeur & une onction peu communes, est en même temps une Introduction à l’Histoire Ecclésiastique, & une éloquente apologie de la Religion.
En lisant les Anecdotes de sa vie, on est fâché de lui voir une sensibilité d’amour-propre, dont les grands talens devroient être à l’abri.
Le ciel venge la terre : il est juste, et ma vie Ne peut payer le sang dont ma main s’est rougie.
Plus ces temps étaient éloignés de nous, plus ils nous paraissaient magiques, plus ils nous remplissaient de ces pensées qui finissent toujours par une réflexion sur le néant de l’homme, et la rapidité de la vie.
La négligence avec laquelle la phrase est jetée montre tout le peu de valeur de la vie.
Je serai à vos pieds, tranquille et en sûreté, comme ce chien, compagnon assidu de la vie de son maître et garde fidèle de son troupeau.
Ce principe, que nous avons tous plus ou moins rencontré, plus ou moins coudoyé, plus ou moins senti dans la vie historique, soit du présent, soit du passé, Mancel a eu le mérite de le formuler en une phrase d’une brièveté lapidaire et dont tout son livre est la justification rationnelle : « Le pouvoir se prend et ne se donne pas », nous dit-il avec une simplicité qu’il a l’art de rendre féconde.
. — Retour de l’âge divin D’après les rapports innombrables que nous avons indiqués dans cet ouvrage entre les temps barbares de l’antiquité et ceux du moyen âge, on a pu sans peine en remarquer la merveilleuse correspondance, et saisir les lois qui régissent les sociétés, lorsque sortant de leurs ruines elles recommencent une vie nouvelle.
Ce n’est pas à trente ans qu’il faut commencer à l’apprendre, à moins que ce ne soit pour la simple curiosité ; parce qu’à trente ans l’esprit et le cœur sont ce qu’ils seront pour toute la vie. […] Plutarque dans la vie de Lysandre. […] Il est vrai qu’un écrivain satirique, après avoir outragé les hommes célèbres pendant leur vie, croit réparer ses insultes par les éloges qu’il leur donne après leur mort ; il ne s’aperçoit pas que ses éloges sont un nouvel outrage qu’il fait au mérite, et une nouvelle manière de se déshonorer soi-même. […] Dans ce discours oratoire, on se borne à louer en général les talents, l’esprit, et même, si on le juge à propos, les qualités du cœur de celui à qui l’on succède, sans entrer dans aucun détail sur les circonstances de sa vie. […] Dans ces éloges on détaille toute la vie d’un académicien, depuis sa naissance jusqu’à sa mort ; on doit néanmoins en retrancher les détails bas, puérils, indignes enfin de la majesté d’un éloge philosophique.
La science se trouve décapitée ; mais tout est pour le mieux, car la vie pratique s’améliore, et le dogme reste intact. […] J’apprends une vérité neuve quand je découvre que le prince Albert est mortel, et je la découvre par la vertu du raisonnement, puisque le prince Albert étant encore en vie, je n’ai pu l’apprendre par l’observation directe. […] Le corps de nos vérités n’a point une âme différente de lui-même qui lui communique la vie ; il subsiste par l’harmonie de toutes ses parties prises ensemble et par la vitalité de chacune de ses parties prises à part. […] Ce magnifique monde mouvant, ce chaos tumultueux d’événements entrecroisés, cette vie incessante infiniment variée et multiple, se réduisent à quelques éléments et à leurs rapports. […] Ils ont voulu déduire de leurs théorèmes élémentaires la forme du système planétaire, les diverses lois de la physique et de la chimie, les principaux types de la vie, la succession des civilisations et des pensées humaines.
La science se trouve décapitée ; mais tout est pour le mieux, car la vie pratique s’améliore, et le dogme reste intact. […] J’apprends une vérité neuve quand je découvre que le prince Albert est mortel, et je la découvre par la vertu du raisonnement, puisque le prince Albert étant encore en vie, je n’ai pu l’apprendre par l’observation directe. […] Cent mille expériences me développent par une infinité de détails la série des opérations physiologiques qui font la vie, et l’abstraction isole la direction de cette série, qui est un circuit de déperdition constante et de réparation continue. […] Ce magnifique monde mouvant, ce chaos tumultueux d’événements entrecroisés, cette vie incessante infiniment variée et multiple, se réduisent à quelques éléments et à leurs rapports. […] Ils ont voulu déduire de leurs théorèmes élémentaires la forme du système planétaire, les diverses lois de la physique et de la chimie, les principaux types de la vie, la succession des civilisations et des pensées humaines.
Guizot, mais une résurrection ; il a voulu y apporter la vie, l’étincelle directe, l’amour ; tentative hardie, bien scabreuse, car enfin l’historien n’est pas un dieu ni un thaumaturge pour ressusciter par sa vertu les morts.
Dites que l’art de nos jours est sans but, sans foi en lui-même, sans suite et sans longue haleine en ses entreprises : et l’on vous objectera, parmi nos poëtes, le plus célèbre et le plus opiniâtre exemple, toute une vie donnée à la restauration de l’art.
Vie toute bouleversée.
Mais Aubanel, lui, a suivi jusqu’au bout son inspiration poétique, et il a terminé sa carrière… Son meilleur recueil de vers, les Filles d’Avignon, presque introuvable naguère, a pu être réédité enfin… Sa vie fut très simple.
Les vers, vierges de toute littérature, étaient allés droit à l’âme des simples, et, grâce à ces chants modestes, tous ces braves gens s’étaient sentis soudain liés à la vie de leurs compagnons, à l’avenir de leur régiment, aux destinées de leur pays.
Que ne compté-je dans ma vie la gloire d’en avoir fait une qui vous ressemble !
Je recommande également au lecteur les pièces : Au bal, la Tombe, le Jardin, fusées fébriles de sentiment mondain ou sensations de la vie de tous les jours.
Cette place de dame d’honneur attira à la suite à la duchesse de Montausier des imputations plus graves, qui eurent une fatale influence sur le reste de sa vie, dont elles abrégèrent la durée par mi profond chagrin.
Il n’a pas eu le même succès lorsqu’il a voulu écrire en François ; ses différentes Traductions, ainsi que ses Vies des Poëtes Grecs, sont d’un style pesant, inexact, & trop sec.
Sa vie auroit fourni matiere à un des plus singuliers.
Et tandis qu’au milieu de l’alarme générale, le Philosophe murmuroit peut-être contre la Nature, ou ne songeoit qu’à sa gloire en préparant le froid projet d’un nouvel Edifice, le Peuple, ce Peuple qui ne raisonne pas, mais qui fait toujours agir efficacement pour le bien général, exposoit sa vie, la sacrifioit, afin de retarder, de quelques momens, le trépas de tant d’Infortunés.
La même plume, qui a si bien tracé le parallele d’Homere & de Virgile, de Démosthene & de Cicéron, de Platon & d’Aristote, de Thucydide & de Tite-Live, nous a laissé un Livre très-estimé sur la Vie des Prédestinés.
N’est-il pas entièrement compris sous ce triple aspect de notre vie : Le foyer, le champ, la rue ?
Ne croyons pas toutefois qu’en nous découvrant les bases sur lesquelles reposent les passions, le christianisme ait désenchanté la vie.
c’est un des plus grands éventails que j’aie vus de ma vie ; j’en excepte deux figures qui sont à gauche sur le devant ; c’est une femme qui tient son enfant.
L’homme dont je parle aimera mieux à soixante ans les comédies de Moliere, qui lui remettront si bien devant les yeux le monde qu’il a vû, et qui lui fourniront des occasions si fréquentes de faire des refléxions sur ce qu’il aura observé dans le cours de sa vie, qu’il n’aimera les tragédies de Racine, pour lesquelles il avoit tant de goût, lorsqu’il étoit occupé des passions que ces pieces nous dépeignent.
Nous disions ici même, il y a peu de temps, que la philosophie, accablée sous ses fautes et sous ses excès, n’en pouvait plus, et nous nous demandions si la littérature, qui se débat encore, aurait le destin de la philosophie ; car, chez les peuples intellectuellement en décadence, l’imagination a la vie plus dure que les autres facultés, et elle est la dernière à mourir.
On ne comprendrait pas, en effet, le sens de la vie de M.
Usant d’abord du langage muet, ils montrèrent autant d’épis ou de brins de paille, ou bien encore firent autant de fois le geste de moissonner, qu’ils voulaient indiquer d’années… Dans la chronologie ordinaire, on peut remarquer quatre espèces d’anachronismes. 1º Temps vides de faits, qui devraient en être remplis ; tels que l’âge des dieux, dans lequel nous avons trouvé les origines de tout ce qui touche la société, et que pourtant le savant Varron place dans ce qu’il appelle le temps obscur. 2º Temps remplis de faits, et qui devaient en être vides, tels que l’âge des héros, où l’on place tous les événements de l’âge des dieux, dans la supposition que toutes les fables ont été l’invention des poètes héroïques, et surtout d’Homère. 3º Temps unis, qu’on devait diviser ; pendant la vie du seul Orphée, par exemple, les Grecs, d’abord semblables aux bêtes sauvages, atteignent toute la civilisation qu’on trouve chez eux à l’époque de la guerre de Troie. 4º Temps divisés qui devaient être unis ; ainsi on place ordinairement la fondation des colonies grecques dans la Sicile et dans l’Italie, plus de trois siècles après les courses errantes des héros qui durent en être l’occasion.
C’est ce qui doit ôter toute confiance à la Vie d’Homère qu’a composée Plutarque, et à celle qu’on attribue souvent à Hérodote, et dans laquelle l’auteur a rempli un volume de tant de détails minutieux et de tant de belles aventures. — 9.
Ces trois unités d’espèces avec beaucoup d’autres qui en sont une suite, se rassemblent elles-mêmes dans une unité générale, celle de la religion honorant une Providence ; c’est là l’unité d’esprit qui donne la forme et la vie au monde social.
Notre Europe brille d’une incomparable civilisation ; elle abonde de tous les biens qui composent la félicité de la vie humaine ; on y trouve toutes les jouissances intellectuelles et morales.
On voyait, étendus sur la terre et en nombre plus qu’ordinaire, une quantité d’officiers prussiens qui avaient noblement payé de leur vie leurs folles passions. […] On l’avait pressé plusieurs fois de mettre à l’abri une vie de laquelle dépendait la vie de tous. […] Thiers était éminemment propre, on pourrait dire prédestiné, à ce grand ouvrage de sa vie d’écrivain. […] Thiers de les avoir et de les manifester à un degré si éminent dans son Histoire du Consulat et de l’Empire ; nous comprenons même que l’excès de ces trois vertus gouvernementales dans l’historien l’ait rendu plus indulgent que sévère et juste envers son héros au 18 brumaire, au consulat de dix ans, au consulat à vie, à l’usurpation de l’empire.
Reste à savoir si nous devons compromettre pour cette cause la vie de Paris déjà si troublée par la crise que nous traversons. […] Le wagnérisme n’est qu’une monstruosité engendrée par l’immense orgueil de l’Allemagne victorieuse, orgueil habilement exploité par un maniaque qui fut, dans sa vie publique et privée, un misérable … Paris du 22 ; feuilleton de M. de Lapommeraye : … La postérité n’a ni rancune ni haine ; or, depuis trois ans Wagner est entré dans la postérité … Le Guide Musical : … Au fond de toute cette campagne, une question de protectionnisme … Le 25 février, à l’Alcazar d’hiver, première représentation Lohengrin a l’Alcazar parodie en 3 tableaux, de MM. […] Arthur Léon Carvaille, dit Carvalho (1825-1897) est un personnage incontournable de la vie musicale au XIXe siècle. […] On voit bien ici que les questions soulevées ne sont absolument pas musicales mais uniquement politiques entre l’Allemagne et la France au point de définir le wagnérisme comme « une monstruosité engendrée par l’immense orgueil de l’Allemagne victorieuse, orgueil habilement exploité par un maniaque, qui fut, dans sa vie publique et privée, un misérable… », comme on peut le lire à la fin de l’article.
Au moment où le corps de la Dauphine est exposé dans sa chambre, avant l’autopsie, il s’est commis une irrégularité dont le narrateur ne manque pas de nous avertir : « Mme la Dauphine a été à visage découvert jusqu’à ce qu’on l’ait ouverte, et on a fait une faute : c’est que pendant ce temps-là, les dames qui n’ont pas droit d’être assises devant elle pendant sa vie, n’ont pas laissé d’être assises devant son corps à visage découvert. » Les choses se passent plus correctement en ce qui est des évêques : « Il a été réglé, nous dit Dangeau, que les évêques qui viennent garder le corps de Mme la Dauphine auront des chaises à dos, parce qu’ils en eurent à la reine ; l’ordre avait été donné d’abord qu’ils n’eussent que des tabourets. » L’acte de l’adoration de la croix, le jour du vendredi saint, est avant tout, chez Dangeau, l’occasion d’une querelle de rang, d’un grave problème de préséance : « Ce matin, les ducs ont été à l’adoration de la croix après les princes du sang. […] Ce sont là de rares moments dans sa vie de roi trop asiatique et trop idolâtré : il n’est que plus juste d’en tenir compte.
Aujourd’hui, cependant, qu’il entre dans la vie littéraire plus franchement, et non pas en simple et riche amateur ; aujourd’hui qu’il se fait à la fois critique, historien littéraire et un peu prophète, il nous permettra de compter de plus près avec lui et de peser ses paroles. […] Je suis d’accord avec lui sur un point essentiel, c’est que l’artiste doit être de son temps, doit porter dans son œuvre le cachet de son temps : à ce prix est la vie durable, comme le succès.
On a comparé la vie de l’humanité depuis l’origine à celle d’un seul homme ; tâchons que la vie d’un seul ressemble à son tour à celle de l’humanité.
Mais pendant le bal et dans cette scène si bien amenée, où la jeune femme, qui n’a rien de grave, après tout, à se reprocher, tout émue enfin de tendresse, et transformée par la passion, se déclare au jeune amateur artiste et en vient à lui offrir son cœur, sa vie, sa main, — car elle est veuve, — d’où vient cette austérité subite et non motivée, cette pruderie farouche du jeune homme, déjà touché lui-même, et qui n’a plus aucune raison de la repousser ? […] En fait, les personnages étant ce qu’ils sont et les choses ainsi posées et amenées, que se passerait-il dans le monde, dans la vie réelle et hors du roman ?
« Ô vous, compagne de ma vie, dont l’amitié est mon plus cher trésor, qui avez embelli tous les bons moments de mon existence et partagé toutes mes peines ; vous, dont l’esprit éminent a entretenu l’activité de mon âme, et dont l’imagination riche et brillante a souvent fait éclore mes idées ; à qui je dois enfin la meilleure partie de mon être, recevez l’hommage de ces Souvenirs dont le récit fut entrepris par votre désir. […] Vous ne retrouverez dans ces Mémoires que les principaux événements de notre vie commune : vous y verrez des erreurs que vous m’avez pardonnées, des mécomptes que vous avez prévus, et si votre nom ne s’y rencontre que rarement, vous savez qu’en écrivant les lignes qui suivent, votre pensée n’a pu me quitter un seul instant. » J’avoue que dans les Mémoires qui nous sont donnés, je ne vois pas trace d’erreurs dans le sens où on le pourrait supposer, dans le sens malin et français ; je n’y vois que des mécomptes.
Lui-même, érudit fort distingué, mais encore plus causeur spirituel, il se plaisait à raconter des scènes de la vie de son père, des épisodes dramatiques et comiques du Conseil d’État, des malices sur quelques contemporains du Consulat et de l’Empire, par exemple sur François de Neufchâteau, qui, ayant à faire le récit du 19 brumaire, le soir même, devant des auditeurs avides et impatients, ne parvenait pas à sortir des parenthèses ni des embarras que sa voiture avait rencontrés dans sa route vers Saint-Cloud : on lui demandait les grands résultats, les résolutions prises, et il vous expliquait, à n’en pas finir, comment il avait eu toutes les peines du monde à passer. […] Je trouvai que ces premiers passants étaient tout à fait bons diables. » La taille du comte Beugnot, on le voit, était des plus remarquables, et cette circonstance revient très souvent dans sa vie. « Le grand monsieur, le grand M.
Bérénice peut être dite une charmante et mélodieuse faiblesse dans l’œuvre de Racine, comme la Champmeslé le fut dans sa vie. […] Geoffroy remarque avec raison que Titus serait sifflé, s’il agissait ainsi au théâtre, « et Rousseau, ajoute-t-il, mérite de l’être pour avoir consigné cette opinion dans un livre de philosophie. » Tout se tient en morale : c’est pour n’avoir pas senti cette délicatesse particulière, cette religion de dignité et d’honneur qui enchaîne Titus, que Jean-Jacques a gâté certaines de ses plus belles pages par je ne sais quoi de choquant et de vulgaire qui se retrouve dans sa vie, et que l’amant de madame de Warens, le mari de Thérèse, n’a pas résisté à nous retracer complaisamment des situations dignes d’oubli.
Des milliards de globes, doués de vie comme elle, circulent à travers l’espace, aspirés par une force mystérieuse, plus puissante que celle du Jéhovah de la Bible, confiné à notre seul horizon. […] Pâle, la lèvre sensuelle ombragée d’une fine soie dorée, il ouvrait sur la vie un regard étonné que la lymphe humectait et voilait de mélancolie.
La sélection mentale, au contraire, s’exerce au sein d’un même individu organisé, qui fait une série d’essais, les uns heureux et les autres malheureux, sous l’impulsion de l’appétit inhérent à la vie même. […] On en peut dire tout autant de l’être, de la vie, de la conscience, avec lesquels d’ailleurs l’action ne fait qu’un.
Ils parlent l’un & l’autre purement & correctement ; mais autant l’Italien est plein d’onction, d’ame & de vie, autant l’Anglois est simple & naturel partout, dans ses divisions, dans ses preuves, dans ses réflexions, dans ses passages trop fréquens. […] Avec cette aménité qu’il mettoit dans le commerce de la vie, il passoit chez ses confrères pour être haut & fier.
A la sèche histoire du moyen âge, à la chronique conteuse et naïve de Joinville et de Froissart ont succédé d’abord les grandes imitations de l’antiquité, à savoir les récits oratoires et politiques ; puis on est arrivé à penser que les événements intérieurs de la vie d’un peuple ont un intérêt non moins grand que les événements plus palpables de la politique et de la guerre. […] C’est là, nous le reconnaissons, le travail de toute une vie ; mais maintenant que les sources sont connues, que les grandes écoles ont été approfondies, une multitude de points particuliers éclaircis, le moment serait venu peut-être d’entreprendre une vaste synthèse qui embrasserait l’histoire générale des systèmes non-seulement en eux-mêmes, mais dans leurs rapports avec l’histoire religieuse, politique et scientifique en général.
Les dynasties chrétiennes ne font qu’un avec les peuples chrétiens, et n’ont qu’une vie avec eux : ceci tient au perfectionnement introduit par le christianisme dans les sociétés humaines comme dans tous les ordres d’idées et de sentiments. […] Cette pensée magnanime fut mal interprétée par les uns, ne fut pas comprise par les autres ; et nous eûmes le 20 mars, terrible rechute qui faillit coûter la vie au corps social.
La vente qui a lieu depuis lundi dans les appartements du Palais-Royal, et qui finit aujourd’hui mercredi au profit de la Guadeloupe et sous les auspices de la reine, a mis en circulation dans la haute société un charmant recueil de nouvelles inédites, trois nouvelles, Marie-Madeleine, Une Vie heureuse et Résignation, composées par une jeune femme du monde12 pour elle seule et quelques amis ; mais la reine l’ayant su a désiré que ce fût imprimé à l’Imprimerie royale et vendu pour cette infortune extraordinaire : il a fallu obéir.
Sans parfum une fleur ne vit pas, ce n’est qu’une herbe plus ou moins brillante et colorée ; le parfum seul lui donne l’âme et fait qu’elle respire de la même vie que les essences célestes.
Charles ne commence à se dessiner et à se faire homme que du moment qu’il aime ; encore la monotonie et la généralité de ses transports accusent toujours ce qui lui manque de qualités positives et d’habitude de la vie.
Sur mon front de cinq ans, j’avais toujours des fleurs ; Le temps, comme une plume, emportait les douleurs Et de mon corps et de mon âme ; Une rose en avril me jetait en transports ; De la vie en mes sens abondaient les trésors ; Je voltigeais comme une flamme.
Celui-ci avait eu, il paraît, une vie fort errante et orageuse : après avoir un instant brillé à Paris dans la jeunesse dorée du temps, il s’était engagé, avait fait la guerre et couru le monde, puis s’était marié à Messine ; là, un jour, regrettant la patrie et songeant aux moyens d’y revenir, il lui tomba entre les mains un des volumes des Troubadours, dans la préface duquel M.
… Je laisse de côté les agréments prévus que nous réservent les six mois de la fête : la mêlée meurtrière des voitures et des piétons le long des boulevards — déjà impraticables aujourd’hui de cinq à sept heures ; pas un fiacre libre, plus une place dans les restaurants ni dans les brasseries ; l’enchérissement de toutes les choses nécessaires à la vie ; le Parisien accablé de maux, dépossédé de Paris, outlaw dans sa propre ville envahie par les barbares… Le dehors te fait peur : si tu voyais dedans !
Proudhon Béranger appartient à la Révolution, sans nul doute ; il vit de sa vie ; ses chansons, comme les fables de La Fontaine, les comédies de Molière et les contes de Voltaire, ont conquis, parmi le peuple et les hautes classes, une égale célébrité.
Par la volonté de marbre, il est une statue grecque ; mais la pensée lui donne, avec le mouvement, la polychromie souriante de la vie.
Du feu, de la vie dans les tableaux, de grandes idées dans les images, des mouvemens rapides dans les sentimens, des élans d’imagination qui étonnent, des traits sublimes dans le langage, qui séduisent, sont pour lui des ressorts familiers qui font éprouver à l’ame des secousses qui la maîtrisent, la captivent, l’arrachent à elle-même, & la remplissent de cet enthousiasme que le vrai génie peut seul communiquer.
Les Poésies des Chaulieu, des Voltaire, des Gresset, ne subsisteront jamais que par ces heureux & véritables principes de vie.
Est-il permis d’espérer que ce Journaliste puisse jamais trouver d’autres défenseurs, que M. son fils, après les anathêmes lancés contre lui, durant sa vie & depuis sa mort, par nos Littérateurs les plus célebres ?
Ainsi, à mesure que la société multiplia les besoins de la vie, les poètes apprirent qu’il ne fallait plus, comme par le passé, peindre tout aux yeux, mais voiler certaines parties du tableau.
L’expérience journalière de la vie.
Belle sainte, venez ; entrons dans cette grotte, et là nous nous rappellerons peut-être quelques moments de votre première vie.
Il fallait racheter la légèreté, la transparence et la fluidité de ces figures, par une énergie, une étrangeté, et une vie toute extraordinaire.
Le savant, l’ignorant, les admire sans avoir jamais vu les personnes, c’est que la chair et la vie y sont.
Pour les esprits qui ne passent pas leur vie à couper en quatre des fils de la Vierge avec de microscopiques instruments, il n’y a que trois femmes en nature humaine et en histoire : La femme de l’Antiquité grecque (car la matrone romaine, qui tranche tant sur les mœurs antiques, n’est qu’une préfiguration de la femme chrétienne), la femme de l’Évangile, et la femme de la Renaissance, — pire, selon nous, que la femme de l’Antiquité, pire de toute la liberté chrétienne dont la malheureuse a si indignement abusé.
éperdu de sentiments qui entraînaient l’honneur de son passé et de sa vie, il passa outre, et la thèse qu’il soutint, il ne l’épuisa pas : elle fut continuée.
Quand on l’accuse de faire grimacer, sous un pinceau férocement acharné comme celui d’Hogarth, la bourgeoisie qu’il nous a peinte, on le punit d’avoir un jour de sa vie été un pamphlétaire.
C’étaient de pauvres gens qui gagnaient leur vie à chanter par les villes les poèmes homériques, dont ils étaient auteurs, en ce sens qu’ils faisaient partie des peuples qui y avaient consigné leur histoire. — 3.
Celui-là n’est pas riche, mais il a des goûts de millionnaire, et il s’est fait un système de vie qui participe à la fois des privations que sa position lui impose et de ses désirs qui luttent avec sa position. […] Ce système de vie est à mon avis fort ingénieux. […] Karr, ce n’est ni Sous les Tilleuls, charmante confession d’une vie de souffrances, ni Une Heure trop tard, ouvrage moins vanté que son aîné, ni Fa dièze, que les plaisants ont appelé une fadaise, ni enfin Le Chemin le plus court, qui passe pour le procès-verbal de sa vie d’homme marié, mais c’est Frëychuts. qui Frëychuts ? […] Delavigne est un homme de 44 à 45 ans, d’un extérieur vulgaire, et dont la vie fait peu de bruit ; il demeure en famille, et les personnes qu’il reçoit vantent l’aménité de ses manières et la respectable tenue de sa maison. […] C’est une chose si délicate qu’un grand nom passé aux mains d’une femme auteur, dont la vie est agitée par les continuelles vicissitudes de la fortune.
C’était bien le moins sous un Consul à vie, bientôt Empereur. […] Le secrétaire perpétuel a d’abord cela pour lui qu’il est perpétuel et qu’il dure ; les présidents ou directeurs se succèdent et changent, lui il ne change pas : il est un sous-directeur à vie, autant dire un directeur sous titre modeste. […] Quoiqu’on n’aime aujourd’hui que le saillant et le coloré, je citerai le passage : « En voyant un si grand homme dans le négligé de sa vie domestique, j’admirais encore en lui une simplicité de manières qui encourageait la modestie timide, sans permettre cependant la familiarité ; un entier oubli de sa gloire, mais qui n’excluait pas le goût de la louange ; une habitude de distractions toujours réparées par les retours d’une bonté naïve ; une vivacité de discours qui avait l’air de l’abandon, mais d’où s’échappaient des éclairs de génie. » C’était le goût d’alors, tout en nuances : on ne saurait moins appuyer et mieux dire. — Il y avait une chose que Suard n’eût jamais dite en pleine Académie, mais qu’il aimait à raconter.
Bonaventure des Periers, après avoir décrit, mais bien moins distinctement qu’Ausone, les vicissitudes rapides de chaque âge des rosés, conclut comme lui : …….Vous donc, jeunes fillettes, Cueillez bien tost les roses vermeillettes A la rosée, ains que le temps les vienne A deseicher : et tandis vous souvienne Que ceste vie, à la mort exposée, Se passe ainsi que roses ou rosée. […] A travers les conversations galantes et libres qui étaient le bon ton du temps et où elle tenait le dé, on ne saurait méconnaître désormais en elle ce caractère élevé, religieux, de plus en plus mystique en avançant, cette faculté d’exaltation et de sacrifice pour son frère, qui éclate à tous les instants décisifs et qui fait comme l’étoile de sa vie. […] Il serait donc téméraire et presque ridicule de venir répondre de l’ensemble d’une vie et d’en garantir après coup les accidents.
Bien plus encore qu’aujourd’hui, il a le monopole de tout ce qui est œuvre d’intelligence et de goût, livres, tableaux, estampes, statues, bijoux, parures, toilettes, voitures, ameublements, articles de curiosité et de mode, agréments et décors de la vie élégante et mondaine ; c’est lui qui fournit l’Europe. […] Ils s’engagent dans les tracasseries, dans les glorioles, dans les petitesses de la vie littéraire, bien pis, de la vie théâtrale, puisque, sur cent théâtres de société, ils sont acteurs et jouent avec les vrais acteurs.
Les programmes de 1902, dont il s’agit, ont été conçus dans le but de préparer le petit Français « à la vie moderne ». […] On ignore encore si les jeunes gens soumis à ce nouveau régime seront, en effet, des maîtres de la vie « moderne », mais ce qu’on sait déjà, c’est qu’ils ne seront jamais des maîtres en fait de langage… « La valeur exacte des mots est par eux de plus en plus ignorée : d’où des confusions croissantes entre les mots d’aspect à peu près semblable, confusions qui font écrire : “Il était compatible aux malheurs d’autrui. […] [Conclusion] Le Temps (du 8 avril) a publié, à propos de notre questionnaire, un article, dont nous détachons ce passage : Si l’égalité absolue, géométrique implique la suppression des humanités et de bien d’autres choses encore, cet égalitarisme outrancier n’est pas nécessairement contenu dans l’idée d’une démocratie, parce qu’une démocratie qui veut vivre doit, comme tout autre régime, se plier aux conditions de la vie.
Après cela, nous pourrons réhabiliter le roman épique, sans descriptions inutiles ni puérilités archéologiques, grouillant de vie. […] Pour le moment, il est permis de constater qu’il n’y a rien en eux de bien spécial à notre génération : ce dédain des sentiments qui constituent le fond de la vie morale, ce névrosiaque besoin de s’isoler du reste des hommes, cette façon d’entendre l’art comme un dilettantisme à la portée exclusive de quelques raffinés, ces affectations de corruption et d’horreur, tout cela est en germe dans les Jeune-France de 1835. […] Pourtant Eschyle, Dante, Shakespeare, Byron, Gœthe, Lamartine, Hugo et tous les autres grands poètes, ne semblent pas avoir vu dans la vie une folle kermesse aux joyeuses rondes.
Il chanta la vie champêtre & traça des leçons d’agriculture. […] Villon écrivait sous le regne de Louis XI qui lui sauva la vie. […] Il en coûta la vie, dans le seizieme siecle, au célebre & malheureux Ramus pour avoir osé s’élever contre elle. […] On a dit que ses vers manquaient de vie & de chaleur. […] Cet Auteur estimable fut trop vivement critiqué durant sa vie.
Le même Auteur à la même vie d’Atticus, c. 105. dit, sub occasu solis, vers le coucher du soleil, un peu avant le coucher du soleil. […] Enfin l’e muet, comme dans les monosyllabes me, ne, de, te, se, le, & dans la derniere de donne, ame, vie, &c. […] L’usage de la vie nous fait voir qu’il y a des êtres qui ont des avantages que d’autres n’ont pas : nous trouvons qu’à cet égard ceux-ci valent mieux que ceux-là. […] Aimer est un verbe actif : mais dans ce vers de l’opera d’Atys, J’aime, c’est mon destin d’aimer toute ma vie. […] Les seuls sens ne nous suffisent pas : car quel est l’homme du monde qui puisse examiner par lui-même toutes les choses qui sont nécessaires à la vie ?
C'est une de ces théories fondamentales comme depuis longtemps l’École n’en fait plus, une tentative hardie de réforme de toute la science de la vie et par suite de l’art de guérir, une façon de Contrat social de la physiologie et de la thérapeutique : c’est encore quelque chose à l’allemande plutôt qu’à la française.
Mais, à Dijon, devant un public de petites gens de province, Bossuet rassure et console : il fait éclater en pleine lumière la compensation infinie que les affligés de la vie terrestre recevront dans le ciel.
Tes yeux seulement demeurèrent, ils ne voulurent pas partir ils ne sont jamais partis encore. » Ainsi le poète de la Vie intérieure : Ô morte mal ensevelie, Ils ne t’ont pas fermé les yeux.
Il a cru que l’art possédait une vertu intrinsèque qui consolait de tout, et il semble tout d’abord avoir fait de l’art pour oublier, mais bientôt repris par son démon, — qui était sa vie et sa flamme, — il en a poursuivi l’essence même et il a voulu tâter de ses mains et presser contre son cœur la pomme d’or dont les poètes s’étaient jusqu’à présent contentés de sentir la folle caresse des rayons.
» Eh bien, je vous affirme qu’à l’endroit où elle se trouve, cette petite phrase des faubourgs de la vie est plus conforme à je ne sais quel sourire auguste de notre âme que la page la plus éloquente sur la beauté des soirs… Un poète n’est jugé justement que par ceux qui l’entourent et par ceux qui le suivent.
[V. de Laprade, sa vie, ses œuvres (1886).]
On y voit aussi la princesse de Condé, cette Charlotte de Montmorency, si belle dans sa jeunesse, et pour qui Henri IV fit les plus insignes folies de sa vie et les plus indignes de lui.
Plein de chaleur & d’intérêt, il sait donner la vie à tout ce qu’il peint, & la Nature même devient plus intéressante par les charmes que son pinceau répand sur tous les objets.
Son rôle serait, non pas d’entraver la vie de la langue, mais de la nourrir au contraire, de la fortifier et de la préserver contre tout ce qui tend à diminuer sa forme expansive.
Elle appuyoit sur les principaux traits de la vie de sa rivale, & la mettoit au-dessous des plus célèbres courtisanes, les Laïs, les Phrynès.
Peut-être eût-il été à souhaiter que les savans auteurs n’eussent pas fait entrer dans leur livre les vies de tant d’écrivains inconnus, qui n’ont produit quelquefois qu’un mandement, ou qu’une lettre moins étendue que l’article qu’on leur a donné dans l’histoire littéraire.
Il est inutile de recommander la lecture de l’Histoire sacrée & ecclésiastique & celle de la vie des Saints ; ces livres ont des charmes mêmes pour ceux qui ne se consacrent pas à la piété.
jeune fille agaçant son chien devant un miroir. la tête de la jeune fille et le chien ont de la vie, du dessin, sans couleur.
Mais, comme je l’ai dit, les personnes qu’un sang sans aigreur et des humeurs sans venin ont prédestinées à une vie interieure si douce, sont bien rares.
Que de gens, pourtant, passent leur vie à réfléchir, sans pouvoir rédiger une bonne phrase !
Enfin le cliché véritable, comme je l’ai expliqué antérieurement, se reconnaît à ceci : l’image qu’il détient en est à mi-chemin de l’abstraction au moment où, déjà fanée, cette image n’est pas encore assez nulle pour passer inaperçue et se ranger parmi les signes qui n’ont de vie et de mouvement qu’à la volonté de l’intelligence.
« Ces illusions persistent toujours et conservent la même intensité pendant toute la vie ; on peut s’en convaincre par des questions adressées aux amputés longtemps après qu’ils ont subi l’opération. […] Après la guérison, il leur reste fréquemment pendant toute la vie un sentiment de formication ou même de douleur ayant en apparence son siège dans les parties extérieures qui n’existent plus. […] « Bérard rapporte un cas de broiement des deux lobules antérieurs, avec conservation de la raison, de la sensibilité, des mouvements volontaires. » — « Un officier avait reçu une balle qui, entrée par une tempe, était ressortie par l’autre ; le blessé, qui mourut très rapidement trois mois plus tard, fut observé jusque-là, et, pendant tout ce temps, non seulement il jouissait de l’intégrité de son intelligence, mais encore il apportait dans le commerce de la vie un enjouement et une sérénité peu ordinaires136. » Après la bataille de Landrecies137, « douze blessés avaient au sommet de la tête une plaie large comme la paume de la main, avec perte de substance à la fois aux téguments, aux os, à la dure-mère et au cerveau. […] « L’animal commence à faire de nouveaux mouvements pour frotter la place irritée ; mais il ne peut plus y parvenir, et après quelques mouvements d’agitation, comme s’il cherchait un nouveau moyen d’accomplir son dessein, il fléchit l’autre membre et réussit avec celui-ci. » — Ce sont là les expériences les plus saillantes, et l’on comprend que, pour obtenir des faits aussi frappants, il faut opérer sur des animaux inférieurs, en qui la vie est plus tenace et dont les parties sont moins étroitement liées les unes aux autres. — Mais on en rencontre de pareils chez les mammifères et jusque chez l’homme146. […] Intermittents ou continus, la plupart des mouvements musculaires de la vie animale et de la vie organique ne s’accomplissent que par elle, en sorte que nous sommes obligés de considérer toutes les parties centrales du système nerveux, encéphale, bulbe, moelle épinière, comme perpétuellement mises en action par le jeu des nerfs sensitifs pour provoquer le jeu des nerfs moteurs, avec accompagnement de sensations dont on a ou dont on n’a pas conscience.
Nos vieux trouvères ne sont pas pressés : ils chantent et récitent cela dans les fermes, ou les jours de foire, devant tout un monde rustique dont c’est la vie et qui est flatté de retrouver dans des rimes grossières, mais parfois vives et piquantes, les scènes et accidents de chaque jour. […] Les poètes ont fait à ce sujet des pièces de vers en divers sens, et l’on a de Simonide cette épitaphe triomphante des Spartiates : Nous les trois cents, qui avons, ô Sparte notre mère, combattu pour Thyrée contre un pareil nombre d’Argiens, — sans tourner la tête, — là où nous avions marqué le pied, là même nous avons laissé la vie.
Pour le surplus de sa vie, c’est lui-même, dans le cours de son Histoire, qui va nous informer, ne parlant jamais de lui qu’à l’occasion, sans se mettre en avant, sans affecter de se citer ni de s’omettre. […] Avant que l’on commençât à chanter la grand-messe, le duc de Venise monta au lutrin pour parler au peuple et leur dit : « Seigneurs, il est certain que nous sommes unis, pour la plus haute chose qui soit, à ce qu’il y a de plus haut dans le monde parmi ce qui est en vie aujourd’hui dans la chrétienté.
Il y a quelque chose qui, dans une étude sur Bailly, dominera toujours sa vie et ses ouvrages : c’est sa mort, son courage calme et céleste 66, sa patience, ce mot simple et sublime, le seul tressaillement suprême qui échappa à sa conscience de juste et d’homme de bien. […] C’est l’objet des vœux et des regrets du monde : des regrets supposent nécessairement une perte un changement, un ancien état détruit. » Il analyse ce qui pour chacun en particulier, à mesure qu’on avance dans la vie, peut s’appeler l’âge d’or : Qui ne regrette pas, s’écrie-t-il, le temps de sa jeunesse ?
Ramond, c’est le Saussure des Pyrénées, aussi fidèle observateur, aussi rigoureux que l’illustre Genevois, moins simple dans l’exposé des grands spectacles, mais plus ému, plus coloré, animé d’une sensibilité plus poétique et doué d’une imagination qui, loin de l’égarer comme tant d’autres, ne fait que rendre le vrai avec plus de vie. […] [NdA] Je retrouve dans ses Voyages au Mont-Perdu, publiés en 1801, un sentiment tout pareil, à l’occasion d’une chapelle de la Vierge qui se rencontre dans la partie la plus désolée de la vallée de Héas et qui y a créé un peu de civilisation et de vie.
Sayous a rendu au personnage sa vie et sa réalité. […] Malheureusement il y a trop peu de ces passages dans le recueil de ses œuvres trop sèches et trop ternes20 ; il se réservait pour la conversation ou la correspondance. — Être plutôt que paraître, savoir plutôt qu’enseigner, préférer une vie égale et tranquille avec l’estime des siens à une réputation lointaine, renoncer aux chimères, aux grands desseins, pour cultiver cette sorte de mérite « qui a sa récompense en soi-même et se suffit » ; faire tout cela et par choix, et aussi parce qu’on n’a pas en soi de démon qui vous pousse ailleurs : tel était, avec ses trente louis de rente, et même un peu plus, dit-on, Abauzit, le type du studieux et du sage non professant, mais consultant.
Une peinture plus vive que touchante des premières émotions, des premiers sentiments de deux jeunes amants élevés dans la simplicité d’une vie champêtre et protégés contre eux-mêmes par la soûle ignorance. […] « Il y a aussi, reprenait d’Eckermann faisant écho et tout vibrant de la parole du maître, il y a tous les degrés de la vie humaine, de la naissance à la vieillesse ; et les différents tableaux d’intérieur que les saisons différentes amènent avec elles passent tour à tour devant nos yeux. » — « Et le paysage, s’écriait Goethe, revenant sur sa première idée, le paysage !
L’avantage d’une telle éducation, pour ceux qui ne se destinent pas à desservir en lévites fidèles les autels de l’Antiquité, c’est qu’elle laisse de la liberté aux aptitudes, qu’elle ne prolonge pas sans raison les années scolaires, qu’elle donne pourtant le moyen de suivre plus tard, si le besoin s’en fait sentir, telle ou telle branche d’érudition confinant à l’Antiquité, et que, vers seize ou dix-sept ans, le jeune homme peut s’appliquer sans retard à ce qui va être l’emploi principal de toute sa vie. […] C’est en parlant du Parthénon et des autres monuments de cette date, que Plutarque dans sa Vie de Périclès nous dit : « Pendant que ces ouvrages s’élevaient fiers de grandeur autant qu’inimitables par la beauté et la grâce, les artistes s’efforçant à l’envi de surpasser leur création par la délicatesse du détail, ce qu’il y avait de plus admirable encore, c’était la rapidité.
(Au surplus, des traits que nous jugeons grossiers et ridicules pouvaient fort bien toucher un bourgeois qui, sans doute, comme beaucoup de ses contemporains, lisait encore régulièrement la Vie des Saints. […] et combien j’ai peur que, tout au contraire, cette inaptitude à considérer les aspects divers des choses n’entraîne l’incapacité de se connaître soi-même et de voir sa pauvre vie comme elle est, et toutes les tristes suites de l’aveuglement sur soi !
Chez tous les philosophes qui nous occupent ici, le phénomène de l’association est considéré comme l’une des lois les plus générales de la psychologie, et même comme le fait fondamental, auquel ils s’efforcent de tout ramener dans notre vie mentale. […] L’association est un fait si général que notre vie entière consiste en une suite de sentiments (train of feelings).
Le Transformisme a posé en loi la lutte pour la vie : ce qui implique, plus essentiellement, la loi de l’Amour procréateur, procréateur du Mieux. […] Mais la vie intellectuelle, il me semble, s’activera demain, et les années plus vite se rempliront, et ce n’est pas en vain que mon rêve prend forme en la science… Et qu’importe : j’ai le temps, et mon temps viendra.
Corneille, ancien Romain parmi les Français, a établi une école de grandeur d’âme ; et Molière a fondé celle de la vie civile. […] La fable de la comédie consiste dans l’exposition d’une action prise de la vie ordinaire, dans le choix des caractères, dans l’intrigue, les incidents, etc., au moyen desquels on parvient à faire sortir le ridicule d’un vice quelconque, si le sujet est vraiment comique, ou à développer, divers sentiments du cœur, si le sujet n’est pas véritablement comique.
Votre vie a commencé ; donc vous n’avez remarqué qu’un nombre limité de cas ; donc le total de votre addition ne comprendra qu’un nombre limité de cas. […] Votre vie a commencé ; donc vous n’avez pu en observer qu’un nombre fini ; donc en les joignant bout à bout, vous n’avez encore qu’une quantité finie.
Biot n’a eu, pour le tracer, qu’à se souvenir de sa propre vie, et à proposer pour idéal un exemplaire dont tous ceux qui le connaissent savaient déjà bien des traits.
C'est ainsi que tout passe et que tout change, et qu’après soixante ans d’une vie honorable et constante, ce pauvre Athénée, tombé en enfance, s’en va avant peu de mois mourir.
[La Vie littéraire (1889-1890).]
A vrai dire, l’historien d’une langue et d’une littérature devrait être universel au profit de l’histoire spéciale qu’il construit ; il devrait connaître les relations sans nombre que l’une et, l’autre soutiennent, les actions et réactions sans nombre que l’une et l’autre exercent et subissent dans leur contact perpétuel avec la science, l’art, la religion, en un mot avec toutes les manifestations diverses de la vie nationale.
Mecenas , dit-il, étoit homme de bien, de ces gens de bien néanmoins doux, tendres, plus sensibles aux agrémens de la vie, que touchés de ces fortes vertus qu'on estimoit dans la République.
Darmesteter a analysé dans sa Vie des Mots douze significations du mot timbre, qui vient de tympanum ; il y en a d’autres12, mais quel qu’en soit le nombre, nous ne les confondons jamais, pas plus que nous ne sommes troublés par la distance qu’il y a entre calmar, au sens de plumier, et calmar, au sens de seiche monstrueuse : quel travail s’il nous fallait retrouver dans les douze ou quinze significations de timbre l’idée de tambour et dans calmar l’idée de roseau.
Tous les arts, transportés de Grèce dans cette terre heureuse, y prenoient une vie nouvelle.
III, 10, 3) dit, sur le témoignage de différents auteurs, qu’il rendit la vie à Capanée, à Lycurgue, à Tyndare, à Hyménéus, à Glaucus.
Tes éloges, tes panégyriques sont nos champs cultivés, nos villes heureuses, la prière secrète du père de famille aux pieds des autels, le vieillard qui lève ses mains au ciel pour remercier les dieux d’avoir prolongé ta vie.
Son âge même était gravé dans toutes les mémoires, et la date, lorsque l’on s’interrogeait ces jours derniers, revenait voltiger en chanson : Dans ce Paris plein d’or et de misère, En l’an du Christ mil sept cent quatre-vingts, Chez un tailleur, mon pauvre et vieux grand-père, Moi nouveau-né, sachez ce qui m’advint… Sa vie fut simple ; par son bon sens, par sa probité, par la modération de ses mœurs et de ses goûts, il sut la rendre constante et digne.
— vie de l’abbé de francé. — inauguration de la statue de molière. — discours d’arago. — enterrement de charles nodier. — odes et poemes, par victor de laprade. — les jésuites, d’après une brochure du père ravignan. — procès de janin contre pyat.
Il est indispensable, en lisant la pièce qui suit, d’avoir présente à la mémoire l’Épître VI de Boileau à M. de Lamoignon, dans laquelle il parle de Bâville et de la vie qu’on y mène.
Vinet ont été remplies de peines sensibles, et il est à croire que sa vie en a été abrégée.
Un avancement lent n’était pourtant pas interdit encore au mérite obscur : un officier de fortune pouvait, à force de valeur, et sur la fia de sa vie, aspirer à la place de major ou de lieutenant colonel, et devenir le mentor en titre du colonel étourdi, non moins impatient de conseil qu’incapable de commandement.
La dernière lettre de Camille Desmoulins écrite à sa femme, avant de marcher à la mort, est un mémorable et touchant exemple de cette exaltation qui ne devait s’éteindre qu’avec la vie : mais ici il n’y a rien qui doive étonner ; pour une telle affection, dans un tel moment, nulle expression ne suffit ; l’énergie de l’amour est incalculable, et, comme dit Bacon, c’est la seule passion qui ne fasse pas mentir l’hyperbole.
Il paraît décidément que l’Allemagne, ne se bornant plus au domaine métaphysique et spéculatif où Kant et ses successeurs l’avaient si longtemps renfermée, descend aujourd’hui à la pratique réelle, à la vie politique, à la lutte journalière et infatigable pour les améliorations positives.
Alors il dit tout cette vie surnaturelle et toute l’autre, celle des heures où il forme les yeux ; et la nature et le rêve s’enlacent si discrètement, dans une ombre si bleue et avec des gestes si harmoniques, que les deux natures ne font qu’une seule ligne, une seule grâce… [Le Livre des masques, 2e série (1898).]
S’agit-il de vie politique ?
Les principes du Christianisme, bien gravés dans le cœur, seroient infiniment plus forts que ce faux honneur des Monarchies, ces vertus humaines des Républiques, & cette crainte servile des Etats despotiques… Chose admirable, dit-il ailleurs, la Religion Chretienne, qui ne semble avoir d’objet que la félicité de l’autre vie, fait encore notre bonheur dans celle-ci ».
À propos de vieilles conversations de 1870, rapportées dans mon Journal : voici la lettre, que le Petit Lannionnais publiait de l’auteur de la Vie de Jésus-Christ.
La fin des deux plus beaux ornemens de la scène Grecque fut aussi malheureuse que le cours de leur vie fut brillant.
Mais, puisqu’il n’en soutient pas la dignité par une vie règlée, il ne mérite aucun égard.
Soit que l’on commence à s’accoutumer à l’idée de ces tourments, soit qu’ils n’aient rien en eux-mêmes qui produise le terrible, parce qu’ils se mesurent sur des fatigues connues dans la vie, il est certain qu’ils font peu d’impression sur l’esprit.
Je demande s’il est permis au peintre de l’avoir fait aussi droit, aussi ferme sur ses genoux ; je demande si malgré la pâleur de son visage, on ne lui accorde pas plusieurs années de vie ; je demande s’il n’eût pas été mieux que ses membres se fussent dérobés sous lui ; qu’il eût été soutenu par deux ou trois religieux ; qu’il eût eu les bras un peu étendus, la tête renversée en arrière, avec la mort sur les lèvres et l’extase sur le visage avec un rayon de sa joie.
Gregoire de Nazianze rapporte l’histoire d’une courtisane qui, dans un lieu où elle n’étoit pas venuë pour faire des reflexions serieuses, jetta les yeux par hazard sur le portrait d’un Polémon philosophe fameux pour son changement de vie, lequel tenoit du miracle, et qui rentra en elle-même à la vûë de ce portrait.
Préface Voici le premier volume d’un ouvrage qui doit en avoir beaucoup d’autres si la vie, avec ses ironies et ses trahisons ordinaires, permet à l’auteur de réaliser, au moins en partie, l’idée qu’il a en lui depuis longtemps.
Par là il redouble la vie dans ceux qui le lisent, et il la créerait en eux si elle n’y existait pas !
Les premiers hommes, fixés sur les hauteurs, près des sources vives, perdirent par une vie plus douce la taille des géants.
En 1724, un édit déclare que tous ceux qui assisteront à une assemblée et tous ceux qui auront quelque commerce direct ou indirect avec les ministres prédicants, seront condamnés à la confiscation des biens, les femmes rasées et enfermées pour la vie, les hommes aux galères perpétuelles. […] L’autre, n’ayant que des devoirs à remplir sans espoir et presque sans revenu…, ne peut se recruter que dans les derniers rangs de la société civile, et les parasites qui dépouillent les travailleurs affectent de les subjuguer et de les avilir de plus en plus » « Je plains, disait Voltaire, le sort d’un curé de campagne obligé de disputer une gerbe de blé à son malheureux paroissien, de plaider contre lui, d’exiger la dîme des pois et des lentilles, de consumer sa misérable vie en querelles continuelles… Je plains encore davantage le curé à portion congrue à qui des moines, nommés gros décimateurs, osent donner un salaire de quarante ducats pour aller faire, pendant toute l’année, à deux ou trois milles de sa maison, le jour, la nuit, au soleil, à la pluie, dans les neiges, au milieu des glaces, les fonctions les plus pénibles et les plus désagréables. » — Depuis trente ans, on a tâché d’assurer et de relever un peu leur salaire ; en cas d’insuffisance, le bénéficier, collateur ou décimateur de la paroisse, doit y ajouter jusqu’à ce que le curé ait 500 livres (1768), puis 700 livres (1785), le vicaire 200 livres (1768), puis 250 (1778), et à la fin 350 (1785). […] Que dirait-on d’un particulier qui aurait 477 000 livres de rente, et qui, une fois dans sa vie, donnerait à sa femme pour 7 000 ou 8 000 livres de diamants ?
D’un acte à l’autre, un an s’est passé ; la toile se relève sur la maison de maître Guérin, un tableau digne des Scènes de la Vie de province, de Balzac. […] Pour son fils Lucien, un gandin à la nouvelle mode, pour sa fille, la marquise Galeotti, jeune veuve lancée à toutes crinolines dans le brouhaha de la vie mondaine, ce père de soixante ans tourne déjà au burgrave. […] Les changements à vue de la politique, la hausse des besoins, la baisse de l’argent, le crescendo du luxe, le train à la fois positif et effréné, moitié américain et moitié Régence, qu’ont pris les mœurs et la vie sociale, tout cela, en vingt-cinq ans, a fait l’œuvre d’un siècle entre les pères et les fils, entre les hommes de 1840 et les jeunes gens de 1866.
Nous avons brillé un moment comme des flammes passagères, mais nous avons quitté la vie comblés de gloire. […] la vie d’Ossian touche à son terme. […] Triste et solitaire, il passe sa vie dans la vallée de Lora ; mais je l’aperçois : il s’élance de la colline comme le coursier vigoureux qui, averti par les vents, sent de loin ses compagnons dans la plaine, et secoue dans les airs sa brillante crinière. […] Ma vie s’évanouit comme un songe.
Cette offrande n’est pas commune ; aussi, pour la dédier d’une façon extraordinaire, j’ai fait une inscription à l’antique… Et après s’être étendu sur les louanges de Louis XIII, il ajoutait : Certes, monseigneur, toute sa vie n’est qu’une suite continuelle de miracles. […] Je me trompe pourtant d’appeler cela un règne, ce fut une anarchie continuelle : d’autant qu’il vint à la couronne à treize ans ; il fut sous des régents plusieurs années, et puis, étant venu en âge, tomba sous la captivité de ses favoris, et à vingt-six ans en cette longue maladie qui mit presque cette monarchie au tombeau… Si bien que toute sa vie n’a été qu’une folie ou de cerveau ou de jeunesse, et, ni sain ni malade, il n’a jamais eu une once de bon conseil et de forte résolution, mais a toujours été hors de lui-même, ayant été en tout temps possédé par ceux qui l’obsédaient, et ferme seulement en un point, qui était de se changer à l’appétit de tous ceux qui se saisissaient de lui.
Pour lui, le plus grand des malheurs de la vie serait « d’avoir une femme laide, mauvaise et despote. Que si l’on obtenait des femmes par souhait, afin de ne me repentir point d’un si hasardeux marché, ajoute-t-il, j’en aurais une, laquelle aurait, entre autres bonnes parties, sept conditions principales, à savoir : beauté en la personne, pudicité en la vie, complaisance en l’humeur, habileté en esprit, fécondité en génération, éminence en extraction, et grands États en possession.
Cette idée bizarre du père Hardouin allait bien avec tout ce qu’on savait de lui, et quand on lui représentait qu’il aimait trop à s’écarter en tout des opinions communes : « Croyez-vous donc, répondait-il, que je me serais levé toute ma vie à trois heures du matin pour ne penser que comme les autres ? […] « On eût dit, remarque Voltaire, que l’ouvrage de M. de La Motte était d’une femme d’esprit, et celui de Mme Dacier d’un homme savant… La Motte traduisit fort mal l’Iliade, mais il l’attaqua fort bien. » La Motte avait orné sa défense de toutes sortes de jolis mots et de maximes de bonne compagnie : Une douce dispute est l’âme de la conversation. — La diversité de sentiment est l’âme de la vie, et l’assaisonnement même de l’amitié. — Quand tout s’est dit de part et d’autre, la raison fait insensiblement son effet ; le goût se perfectionne, et il s’affermit alors, parce qu’il est fondé en principe. — Il faut que les disputes des gens de lettres ressemblent à ces conversations animées, où, après des avis différents et soutenus de part et d’autre avec toute la vivacité qui en fait le charme, on se sépare en s’embrassant, et souvent plus amis que si l’on avait été froidement d’accord.
Bergeret, secrétaire du cabinet, à célébrer Louis XIV, ses guerres, ses conquêtes, le triomphe de sa diplomatie impérieuse : Heureux, disait en terminant Racine (et cette péroraison n’est pas la plus délicate partie de son discours), heureux ceux qui, comme vous, Monsieur, ont l’honneur d’approcher de près ce grand prince, et qui, après l’avoir contemplé, avec le reste du monde, dans ces importantes occasions où il fait le destin de toute la terre, peuvent encore le contempler dans son particulier, et l’étudier dans les moindres actions de sa vie, non moins grand, non moins héros, non moins admirable, que plein d’équité, plein d’humanité, toujours tranquille, toujours maître de lui, sans inégalité, sans faiblesse, et enfin le plus sage et le plus parfait de tous les hommes ! […] Louis XIV, à cette époque, et dût sa santé ensuite se rétablir, est donc entré décidément dans cette seconde et dernière moitié de la vie, et il ne serait pas juste de prétendre juger uniquement par là de ce qu’il a pu être dans la première.
Ses premières œuvres, ses Odes (1550) sont remplies d’un feu de tête qui se ressent de la vie renfermée et de l’espèce de serre chaude où il s’était nourri. […] Le poète dans ces sonnets imite habituellement Pétrarque, et par endroits avec fraîcheur et sentiment ; il y a des expressions heureuses, de ces images qui enrichissent la langue poétique : Sur le métier d’un si vague penser Amour ourdit les trames de ma vie.
La reine mère lui répond : « J’ai à bénir le ciel de m’avoir conservé tout ce que j’ai de plus cher au monde, votre personne, mon cher fils, m’étant plus chère que ma vie. […] Quand mes frères donnent le bon exemple aux autres, ce m’est la plus sensible joie du monde, et quand cela n’est pas, j’oublie en ce moment toute parenté pour faire mon devoir, qui est d’entretenir tout en ordre pendant ma vie.
C’est une noble tâche qu’il s’est donnée là, en avançant dans la vie, que de lutter avec la beauté antique. […] Léon Halévy a le même honneur et fait preuve du même dévouement ; il embrasse dans ses traductions élégantes, harmonieuses, les plus belles pièces du Théâtre grec, et il ne manque à son succès que la consécration d’une soirée et cette représentation émue qui refait d’une traduction même une œuvre actuelle, et qui lui confère le baptême de vie.
Vivra-t-elle de cette vie personnelle et perpétuelle qui réside et se fixe dans les écrits, et se transmet de la main à la main comme un flambeau ? […] Je prendrai, par exemple, la plus célèbre de ses phrases s’il fallait en choisir une, celle dans laquelle on a résumé sa vie : « J’ai toujours été la même, vive et triste ; j’ai aimé Dieu, mon père et la liberté. » C’est ému, cela fait rêver, mais c’est elliptique.
» Peut-être un jour reviendrai-je sur la tragédie considérée dans son : ensemble, dans sa vie complète et sa carrière tant de fois recommencé et signalée par tant d’exploits, de grandes journées et de monuments. […] A cette messe catholique, complète au moyen âge et d’une si magnifique solennité, se surajoutaient, aux jours de grandes fêtes ; toutes les sévères et intéressantes variétés de la vie chrétienne.
Ce pays-ci en effet, dans sa vie publique, va tellement par sauts et par bonds, les vainqueurs du jour y sont tellement vainqueurs, et les vaincus y sont tellement vaincus et battus, qu’au lendemain de la seconde rentrée il n’y avait eu d’action, d’influence et de zèle que de la part de l’opinion triomphante ; elle avait eu partout le champ libre, et personne ne lui avait disputé le haut ni le bas du pavé ; les opposants étaient comme rentrés sous terre et avaient disparu. […] Il y avait des niais et quelques sots panachés dont je ne parle pas, ils vivent peut-être encore ; puis, à côté, les malins : — et ce Vitrolles, hardi, osé, peu scrupuleux, qui avait un pied dans les camps les plus opposés, qui visait à un premier rôle, qui jouait son va-tout sur une seule carte, la confiance intime de Monsieur ; qui perdit et qui se fera beaucoup pardonner un jour en jugeant dans ses Mémoires avec esprit les gens qui l’ont mal payé de son zèle ; — et Michaud ; engagé parmi les violents du parti, on ne sait trop pourquoi, si ce n’est parce qu’il s’en était mis de bonne heure et de tout temps ; raisonnable et même assez philosophe dans ses écrits historiques et dans ses livres, incorrigible dans ses feuilles ; de qui Napoléon avait dit que c’était « un mauvais sujet » ; avec cela homme d’esprit et les aimant, indulgent même pour la jeunesse ; journaliste avant tout et connaissant son arme, muet dans les assemblées et pour cause, avec un filet de voix très-mince, un rire voltairien, et qui passa sa vie à se rendre compte des sottises qu’il favorisait, qu’il provoquait même, et qu’il voyait faire41.
Néanmoins, d’après tout ce que m’avait dit Mercy, et les réflexions que je ne puis m’empêcher de faire à chaque instant sur l’affaire la plus importante de ma vie, je les ai tant pressés qu’ils ont été obligés de changer un peu de ton. […] Voulant sauver mes États de la plus cruelle dévastation, je dois, coûte que coûte, chercher à me tirer de cette guerre, et, comme mère, j’ai trois fils qui ne courent pas seulement les plus grands dangers, mais doivent succomber par les terribles fatigues, n’étant pas accoutumés à ce genre de vie.
Une radicale impuissance d’imaginer, qui avait concouru à faire prendre en gré le réalisme des classiques, la sécheresse de sentiment où glissent facilement les natures trop intellectuelles, l’impuissance de penser en dehors de certaines conditions générales, l’anéantissement de la spontanéité et le culte de la forme convenue, trois conséquences d’une vie enfermée dans les bienséances du monde, qui défendent à l’homme de se faire remarquer sous peine de ridicule et de mauvais ton, voilà les traits de cette société qui fera la littérature à son image. […] La pensée jouit d’une liberté illimitée dans l’abstrait et dans le général, toutes les intempérances, toutes les aventures lui sont permises : dès qu’elle touche au réel, au concret, à la vie, elle reçoit forme et couleur des préjugés impérieux du siècle.
Lettres inédites de la duchesse de Bourgogne, précédées d’une notice sur sa vie. […] La duchesse de Bourgogne y jouait un rôle : Cet amusement, dit l’auteur de la Notice, se renouvela souvent et avec succès… La vie de la duchesse de Bourgogne, jusqu’en 1705, fut donc une suite non interrompue de plaisirs choisis et d’instructions exquises.
Ne répondit-il pas, avec toute la confiance qu’on pourrait presque prendre en Dieu même, qu’il ne voulait (ce furent ses propres termes) ni protection, ni support, ni bien, ni honneur, ni vie, qu’en la bonté de Votre Majesté, et n’employa-t-il pas sur l’heure même pour votre service tout ce qu’il avait reçu du prix de sa charge ? […] Maintenant, je le sais, tout le monde est plus ou moins homme de lettres ; ce n’est plus une classe proprement dite ; on les traite avec la rudesse et le positif qui règnent dans les relations ordinaires de la vie, et eux-mêmes ils semblent s’être dès longtemps appliqué ce régime universel.
Personne n’admire plus que moi la beauté des fresques évocatrices de Leconte de Lisle, personne autant que moi n’admire chez Banville un magnifique poète et un conteur presque unique dans toute littérature, car je ne connais qu’Edgar Poe dans une couleur d’images différente, pour avoir fait tenir dans quelques volumes de contes brefs autant de vie et autant d’idées. […] Le grand maître de prosodie c’est la vie, ses enseignements se trouvent dans la pensée et dans la passion.
Si l’on parle d’Anacréon, même aux gens les moins lettrés, tout le monde le connaît : c’est un vieillard à barbe longue et blanche, qui passe sa vie sous des platanes, la tête couronnée de roses, la coupe en main, et au milieu de jeunes esclaves d’Ionie.
Le Dauphin du Corsaire, sorti du même chantier que l’Ariel du Pilote, semble avoir reçu la vie dès l’instant qu’il a senti les flots sous sa quille et les marins à son bord.
Sa phrase a la musique et la couleur de cette vie étrange qui l’anime.
Un bonhomme de la Vie de Bohème, afin de s’épargner l’achat des gazettes, demandait chaque matin à son portier informé les nouvelles de la santé du roi, de la pluie et du beau temps ; c’est à peu près ce que chacun se contentera d’apprendre, surtout lorsqu’il n’en coûtera rien.
Or, en sautant d’un grand homme à un autre, on risque de laisser des abîmes énormes entre deux d’entre eux, de faire croire qu’il y a des déserts dans la durée comme il y en a dans l’espace, de détruire le sentiment de cette continuité qui est la condition même de la vie.
Il est impossible que je soutienne longtemps la vie que je mène.
Il est faux que ce Prince des Poëtes de son temps ait fait présent à du Bartas d’une plume d’or, en lui disant, qu’il avoit plus fait en une semaine que lui, tout Ronsard qu’il étoit, en toute sa vie.
L’imitation la plus parfaite n’a qu’un être artificiel, elle n’a qu’une vie empruntée, au lieu que la force et l’activité de la nature se trouve dans l’objet imité.
major è longinquo reverentia, dit Tacite ; il est plus facile de nous inspirer de la veneration pour des hommes qui ne nous sont connus que par ce qu’on lit d’eux dans l’histoire, que pour ceux qui ont vêcu dans des tems si peu éloignez du nôtre, qu’une tradition encore recente nous instruit exactement des particularitez de leur vie.
Les hommes mêmes qui veulent établir les unes, lorsqu’elles n’ont pas en elles la raison de leur existence, ou qui veulent propager encore les autres lorsqu’elles ont perdu ce principe de vie qui est dans l’assentiment général, témoignent, par l’expression indécise de leurs discours, qu’ils ne les comprennent point.
Taine, sa vie et sa correspondance (p. 35I-358).
Mais dans les sciences qui s’occupent de la vie, les éléments de la matière et ceux des phénomènes sont si complexes, que souvent nous pouvons être trompés par l’apparence ou bien arrêtés par l’imperfection de nos moyens d’observation. […] En observant les différentes phases de la vie fœtale, il m’a semblé que, dans l’état embryonnaire, il y avait deux pancréas qui se fondaient l’un avec l’autre par suite des progrès de l’âge. […] Il resterait à décider si cette sécrétion, qui après la naissance agit spécialement sur des matières alimentaires déterminées, a d’autres usages à remplir pendant la vie intra-utérine. […] Un homme de quarante ans avait vu ses forces diminuer par des hémorragies intestinales dans les treize dernières années de sa vie. […] Un commis, âgé de quarante-neuf ans, sobre et d’une vie régulière, fut pris en mars 1827 de symptômes de diabète (je passe tout ce qui ne se rapporte pas au symptôme qui nous occupe).
Quoi qu’il en soit, il y a tant d’esprit dans cet ouvrage et une si grande pénétration pour connaître le véritable état de l’homme, à ne regarder que sa nature, que toutes les personnes de bon sens y trouveront une infinité de choses qu’ils (sic) auraient peut-être ignorées toute leur vie, si cet auteur ne les avait tirées du chaos du cœur de l’homme pour les mettre dans un jour où quasi tout le monde peut les voir et les comprendre sans peine. » En envoyant ce projet d’article à M. de La Rochefoucauld, Mme de Sablé y joignait le petit billet suivant, daté du 18 février 1665 : Je vous envoie ce que j’ai pu tirer de ma tête pour mettre dans le Journal des savants.
« C’est drôle, dit un ami à son ami dans une des plus joyeuses comédie de Labiche, c’est drôle, quand on ne s’est pas vu pendant vingt-sept ans et demi, comme on n’a presque rien à se dire. » Les cœurs sont restés unis ; mais la vie a séparé les esprits : ils n’ont plus d’idées communes, partant plus de conversation.
Habitant les patois ; quelques-uns aux galères Dans l’argot ; dévoués à tous les genres bas ; Déchirés en haillons dans les halles ; sans bas, Sans perruque ; créés pour la prose et la farce ; Populace du style au fond de l’ombre éparse ; … N’exprimant que la vie abjecte et familière, Vils, dégradés, flétris, bourgeois, bons pour Molière.
Aucun ouvrier n’en a jamais voulu à tel écrivain démagogue d’être riche, de mener une vie élégante et de mépriser au fond le peuple, tout en l’aimant peut-être comme on aime l’instrument de sa réputation et de sa fortune.
Ces mots, et une quantité d’autres, appartiennent moins à la langue française qu’à des langues particulières qui ne se haussent que fort rarement jusqu’à la littérature, et si on ne peut traiter certaines questions sans leur secours, on peut se passer de la plupart d’entre eux dans l’art essentiel, qui est la peinture idéale de la vie.
Il existe certaines eaux qui, si vous y plongez une fleur, un fruit, un oiseau, ne vous les rendent, au bout de quelque temps, que revêtus d’une épaisse croûte de pierre, sous laquelle on devine encore, il est vrai, leur forme primitive, mais le parfum, la saveur, la vie, ont disparu.
Deux pivots sur qui roule aujourd’hui notre vie.
Sans cesse occupé du tombeau, et comme penché sur les gouffres d’une autre vie, Bossuet aime à laisser tomber de sa bouche ces grands mots de temps et de mort, qui retentissent dans les abîmes silencieux de l’éternité.
Il se soumet à la force, reine de la vie universelle.
On a là un fort bel et fort distinct épisode de la vie féodale dans les premiers siècles : une scène de famille d’abord, dans le grand salon du château ; un départ pour un lointain voyage, d’après un vague désir, sur une idée brute et simple de chasseur en quête d’un merveilleux exploit, d’un monstrueux sanglier ; — une chasse en pleine forêt ; une grande et noble figure de gentilhomme, de franc homme, séparé de sa suite, debout sous un arbre, le pied sur sa bête tuée, son cheval à ses côtés, ses chiens couchés devant lui, son cor d’ivoire au col, et là se défendant contre une bande de gens de rien enhardis par l’espoir du butin et d’une riche proie. […] Pour mesurer toute l’étendue de la chute depuis le haut moyen âge jusqu’au dernier tiers du xve siècle, on n’a qu’à se rappeler le point de départ, cette noble figure du Lohérain Bégon le balafré, debout, adossé à son arbre et le pied sur son sanglier tué, entouré de ses chiens, défendant sa vie contre de misérables forestiers ; et, comme pendant, cet autre Lorrain manqué, le bon René, se promenant à Aix dans sa cheminée pour se réchauffer au soleil, — dans sa cheminée, c’est-à-dire sur un étroit parapet exposé au midi et abrité de tous les autres côtés (aprici senes). — Voilà le contraste, et il ne saurait être plus frappant, entre la force adulte et virile de ce puissant régime féodal et son extrême caducité et sénilité. […] Voici le début : Heureux qui dans son champ, demeurant à l’écart, Sans crainte, sans désirs, sans éclat, sans envie, Dans l’uniformité passa toute sa vie, Et que le même toit vit enfant et vieillard.
Le Lyrique, l’Élégiaque et l’Épique étant les parties faibles de notre ancienne poésie, comme nous l’avons déjà observé, c’est donc de ce côté que devait se porter la vie de la poésie actuelle. […] Les brillantes qualités de leur esprit, la vivacité prodigieuse de leur conversation, la coquetterie de leurs mœurs, sont en opposition directe avec le sentiment poétique, qui ne se développe que dans une vie recueillie ou passionnée. […] Il proclamerait sans doute hautement, que les rayons presqu’éteints du dernier siècle ne peuvent pas être la lumière d’un nouvel âge ; il n’hésiterait pas, dans l’intérêt de l’art et de sa propre gloire, à se séparer de la mort pour s’attacher à la vie, et tout en éclairant les poètes de cette nouvelle école sur leurs défauts et leurs dangers, il les vengerait, par l’autorité de sa parole, des outrages de l’ignorance ou du pédantisme scholastique.
L’Huillier, que ce ne serait qu’un emportement de jeunesse, que vous laisseriez cette vie qui déplaisait tant à vos amis, et que vous retourneriez enfin à l’étude avec plus de vigueur que jamais. […] Chapelle disparaît et semble s’éteindre dans les dernières années de sa vie.
Charitable et glorieux, il exposait sa vie en administrant les sacrements à des pestiférés, et il exigeait de ses curés, quand il les visitait, des honneurs plus que pontificaux. […] III, p. 206) : « Les sous-gouverneurs eurent des métiers différents, aux yeux du duc de Beauvilliers qui les choisit », mais il a dit « des mérites différents. » Il n’a pas dû dire, malgré ses gaietés de style, parlant de la vie débauchée que menait le chevalier de Bouillon (t.
M. d’Argenson porta très peu d’idéal dans cette liaison ou intrigue amoureuse qui ne mérite pas le nom de passion, et qui dura une année ; tout en parlant convenablement de la dame devenue veuve après la rupture, et remariée depuis, il ajoute en terminant cet article : « Je lui souhaite longue vie et bonheur : pour moi, j’ai à présent de toutes façons bien mieux qu’elle. » — Dans ce genre de relations que j’abrège et qui revient en plus d’un endroit sous sa plume, M. d’Argenson n’est point fat, mais il est très peu chevaleresque ; on ne saurait même l’être moins, il est honnête homme en tout ; mais, comme les honnêtes gens parmi les Latins ou parmi les Gaulois, il ne craint pas de braver l’honnêteté dans les mots : ou plutôt il ne prend pas garde, et il ne paraît pas même soupçonner ce genre de scrupule. […] À cela et à ses vues encore vagues sur lui, mais qui allaient à le faire un jour ou ministre, ou ambassadeur, ou même premier président du Parlement, d’Argenson, sans trop résister, répondait toutefois en rappelant ce qui lui manquait : qu’il était honteux et timide au premier abord ; qu’il avait été mal élevé sur un point ; que son père, en portant ses préférences trop longtemps sur son cadet et en le méconnaissant hormis dans les deux dernières années de sa vie, l’avait découragé ou trop habitué à se renfermer en lui, et « avait par là engourdi son entrée dans le monde » ; qu’il était balourd au jeu, qu’il s’y ennuyait et ne savait qu’y perdre son argent, etc., etc.
Chacun a sa position à faire… La vie n’est plus une fête dont on jouit, mais un concours où l’on rivalise. […] En religion, en philosophie, en politique, dans l’art, dans la morale, chacun de nous doit s’inventer ou se choisir un système : invention laborieuse, choix douloureux… La vie n’est plus un salon où l’on cause, mais un laboratoire où l’on pense.
Il faut l’entendre, avant tout, parler de la chose sur laquelle il a le plus droit d’être écouté, de celle qu’il a le mieux sue et qu’il avait le plus à cœur de posséder et de faire dignement, l’office et la fonction de la royauté ; soit qu’il songe à son fils dans ses instructions, soit que plus tard il s’adresse à son petit-fils partant pour régner en Espagne, il excelle à définir dans toutes ses parties ce personnage qu’il a su le mieux être, qu’il a été le plus naturellement et comme par une vocation spéciale, le personnage de souverain et de roi. il faut l’entendre encore dans cette Conversation devant Lille (qui se lit dans les Œuvres de Pellisson), parlant dans l’intimité, mais non sans quelque solennité selon sa noble habitude, de son amour pour la gloire, du sentiment généreux qui l’a poussé à s’exposer et à paraître à la tranchée et à l’attaque comme un simple mortel, comme un soldat : « Il n’y a point de roi, pour peu qu’il ait le cœur bien fait, disait-il, qui voie tant de braves gens faire litière de leur vie pour son service, et qui puisse demeurer les bras croisés. » On retrouve là à l’avance, dans la bouche du monarque, quelques-unes des belles pensées de Vauvenargues sur la gloire, avec un peu plus d’emphase, mais non moins de sincérité. […] Un Récit authentique de ses derniers instants, écrit par un témoin et assez récemment publié, nous le montre procédant et agissant sur son lit de mort « avec une manière naturelle et simple, comme dans les actions, est-il dit, qu’il avait le plus accoutumé de faire ; ne parlant à chacun que des choses dont il convenait de lui parler, et avec une éloquence juste et précise qu’il a eue toute sa vie et qui semble s’être encore augmentée dans ses derniers moments.
J’ai commencé l’histoire de France, mais je ne m’en suis servi que comme d’un canevas sur lequel je pouvais broder tous les objets dont la connaissance est nécessaire dans le cours ordinaire de la vie. […] Il fait allusion à la jalousie et aux tracasseries dont il est l’objet et dont on peut prendre idée par les accusations grossies de Mme Campan : « Je ne parlerai pas à Votre Excellence, dit-il, de mille petites peines que j’ai souffertes presque continuellement : ce ne sont que des piqûres d’épingle, mais leur nombre creuse des plaies et rend la vie amère. » Le dauphin, le futur Louis XVI, n’aimait pas l’abbé et le lui marquait rudement.
. — On a fait une première famille avec celles qui dénotent les divers états du corps sain ou malade, et qui sont moins des éléments de connaissance que des stimulants d’action ; on les a nommées sensations de la vie organique, et, d’après l’appareil ou la fonction qui les provoque, on les a divisées en genres et en espèces : ici l’effort, la fatigue, et diverses douleurs déterminées par l’état des muscles, des os et des tendons ; un peu plus loin, l’épuisement nerveux et les souffrances nerveuses déterminées par l’état propre des nerfs ; ailleurs les angoisses de la soif et de la faim déterminées par l’état de la circulation et de la nutrition ; là-bas, la suffocation et un certain état tout opposé de bien-être déterminés par l’état de la respiration ; ailleurs encore, les sensations de froid et de chaud, déterminées par un état général de tous les organes ; ailleurs enfin, d’autres, comme les sensations digestives, déterminées par l’état du canal alimentaire. — À côté de cette famille, on en a formé une seconde dont les premiers genres touchent aux derniers de la précédente ; elle comprend les sensations qui ne nous renseignent point sur la santé ou sur la maladie de notre corps, et qui sont moins des stimulants d’action que des éléments de connaissance. On les nomme sensations de la vie intellectuelle, et, d’après les organes spéciaux qui les éveillent, on les divise en sensations de l’odorat, du goût, du toucher, de l’ouïe et de la vue.
Je m’informe curieusement de tout le détail de sa vie ; s’il a fait des fautes, je les excuse, parce que je sais qu’il est difficile à la nature de tenir toujours le cœur des hommes au-dessus de leur condition. […] Pourtant on trouvait, dans les Pensées et Paradoxes qui venaient aussitôt après ces deux morceaux, plus d’un trait en désaccord avec la doctrine chrétienne rigoureuse ; la seule manière dont Vauvenargues y parle de la mort qui ne doit pas être, selon lui, le but final et la perspective de l’action humaine, et qui lui paraît en elle-même la plus fausse des règles pour juger d’une vie, cette façon d’envisager l’une des quatre fins de l’homme est trop opposée au point de vue de l’orthodoxie et en même temps trop essentielle chez Vauvenargues pour laisser aucun doute sur la direction véritable de ses pensées.
Et, par exemple, je ne vois pas, dans les histoires qu’il a écrites, un mot qu’il n’ait justifié dans sa conduite et dans sa vie : Un prince, disait-il et pensait-il, est le premier serviteur et le premier magistrat de l’État ; il lui doit compte de l’usage qu’il fait des impôts ; il les lève, afin de pouvoir défendre l’État par le moyen des troupes qu’il entretient ; afin de soutenir la dignité dont il est revêtu, de récompenser les services et le mérite, d’établir en quelque sorte un équilibre entre les riches et les obérés, de soulager les malheureux en tout genre et de toute espèce ; afin de mettre de la magnificence en tout ce qui intéresse le corps de l’État en général. […] Ce premier roi de Prusse, par toute sa vie de vaine pompe et d’apparat, disait, sans le savoir, à sa postérité : « J’ai acquis le titre, et j’en suis fier ; c’est à vous de vous en rendre dignes. » Le père de Frédéric, dont son fils, si maltraité par lui, a si admirablement parlé, et dans un sentiment non pas filial, mais vraiment royal et magnanime, ce père grossier, économe, avare, bourreau des siens et idolâtre de la discipline, cet homme de mérite pourtant, qui « avait une âme laborieuse dans un corps robuste », avait rendu à l’État prussien la solidité que l’enflure et la vanité du premier roi lui avaient fait perdre.
Il nous a rendu compte lui-même, dans des Mémoires agréables et très naturels, de ses premières années et d’une grande partie de sa vie. […] Virgile avait représenté dans ses Champs Élysées les héros conservant les mêmes inclinations et les mêmes habitudes qu’ils avaient eues pendant leur vie ; ce qui fit dire aux frères Perrault qu’on y voyait l’« ombre d’un cocher » : Qui, tenant l’ombre d’une brosse, Nettoyait l’ombre d’un carrosse.
En avançant dans la vie, il a pu ressentir de plus en plus les douleurs et goûter les affections légitimes : le fils qui pleure une mère, l’époux qui va s’attendrir sur le berceau d’un enfant, c’est là de quoi animer raisonnablement le platonicien, et de quoi achever l’homme dans le poète65. […] Jeune, et déjà fait aux épreuves de la vie, il prend l’homme avec tous ses sentiments de père, de fils, d’époux, d’ami, et il le place dans le cadre éblouissant des Tropiques.
D’ailleurs, la personne du monde la plus propre à l’intrigue, et qui y avait passé sa vie à Rome par son goût ; beaucoup d’ambition, mais de ces ambitions vastes, fort au-dessus de son sexe et de l’ambition ordinaire des hommes, et un désir pareil d’être et de gouverner. […] Mme de Coulanges, en apprenant cette nouvelle, et tout en estimant Mme des Ursins très digne de son emploi, trouvait qu’à cet âge il n’y avait plus rien à imaginer d’agréable dans la vie : c’est qu’elle n’était que femme, et ne concevait de son sexe que les passions aimables et tendres.
Mme de Maintenon est inaccessible ; elle garde dans sa grandeur des habitudes de vie étroite et particulière : c’est comme un reste de prude dans une personne de si parfait agrément. […] Ils sont résolus de perdre plutôt la vie que de rien faire d’indigne de ce qu’ils sont », c’est-à-dire qu’ils sont résolus à défendre leur couronne les armes à la main jusqu’à la mort, et elle est incapable de leur donner un autre conseil.
Qui sait (et pour mon compte je le voudrais) si cette Histoire de la Comédie, une des idées de sa jeunesse, quand il n’était pas le philologue qu’il est devenu, ne date pas un retour tardif vers les choses de la pensée et de la vie de la part de cet esprit qui était certainement né pour elles, autant et plus qu’aucun de nous ? […] D’ailleurs, excepté les plaisirs incroyables de la mystérieuse cohabitation qu’il goûte avec elle, je ne vois pas comment la philologie a payé à du Méril le dévouement de toute sa vie et le prix de ses facultés !
Écrites au courant de la plume, sous l’impression soudaine et spontanée qui leur a donné à la fois vie et forme, ces Chroniques étaient envoyées, à l’état de brouillons de la plus fine écriture et tout couverts de surcharges, à M.
Enfin dans ce petit homme qui jette dans le goufre de Décius sa personne autant qu’il peut, du moins sa vie, son passé, sa considération, ses amitiés, tout ce qui lie et enchaîne les hommes, — qui retrousse ses manches et descend bras nus pour faire l’athlète comme au premier soleil du combat, — on peut voir un insulteur, mais un insulteur héroïque, un Spartacus qui a un peu trop la fièvre, mais à qui ses airs de moine et sa vieille soutane n’ont pas ôté toute verdeur, je n’ose dire grandeur. » Voilà ce que dirait un bon Génie, un Amschaspand.