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1195. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre III »

Cet homme heureux a une fille, une fille à marier, qui se présente à ses prétendants avec un demi-million dans chaque main. […] Son dialogue abonde en mots gais, en traits bien lancés, en reparties heureuses, fines, piquantes, renvoyées au vol.  […] Elle est heureuse. […] Vous souvient-il de cette dame galante de Brantôme qui, au récit des licences et des saturnales de Venise, s’écrie, avec une mélancolie hystérique : « Hélas, si nous eussions fait porter tout nostre vaillant en ce lieu-là par lettre de banque, et que nous y fussions pour faire cette vie courtisanesque, plaisante et heureuse à laquelle toute autre ne saurait approcher, combien nous serions emperières de tout le monde ! 

1196. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1876 » pp. 252-303

L’homme sort de sa petite voiture, se met sur ses jambes artificielles, embrasse les mains de Lachaud, s’écrie qu’il lui doit sa fortune, que sa femme après lui aura de quoi vivre, que ses enfants seront heureux : un vrai discours, prononcé moitié pleurant. […] Aujourd’hui, j’entendais l’heureux Daudet s’écrier sur une modulation désespérée : « Oh ! […] 3 juillet J’étais, ces jours-ci, avec Sophie Arnould et la Saint-Huberty ; j’étais avec la famille des jolis dessinateurs qui s’appellent les Saint-Aubin ; je travaillais dans les archives et le papier galant de l’ancienne Académie de musique ; je tournais et retournais dans mes cartons et ceux de Destailleurs ; ces dessins de grâce qu’on a plus refaits ; je me sentais heureux, et je me trouvais dans le temps et avec les gens que j’aime… mais je me suis juré de reprendre mon roman en juillet. […] je suis heureuse dans le moment, j’ai un vieux très riche… figure-toi que c’est un ancien ébéniste… il vient tous les lundis chez moi… me fait déshabiller toute nue, et se met à vernir mes meubles… Moi, je le suis en le tapotant, et en lui disant : « Comme tu vernis bien ! 

1197. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « M. MIGNET. » pp. 225-256

L’exemple remarquable qu’il a donné en mettant au jour les Négociations relatives à la Succession d’Espagne sous Louis XIV 78 est une innovation des plus démonstratives et des plus heureuses. […] Les corps littéraires sont heureux de rencontrer de telles natures de talent, auxquels se puisse conférer l’office de les représenter, aux jours de publicité, par leurs plus larges aspects, et de les faire valoir dans la personne de leurs plus illustres membres. […] Et puisque nous sommes en train d’oser, il ne serait pas juste, en quittant l’un des écrivains les plus respectés et les plus considérables de notre temps, de ne pas toucher à l’homme, et de ne pas au moins nommer en lui quelques-uns de ces traits si rares et qui accompagnent si bien le talent, sa simplicité, un caractère aimable, resté fidèle à ses goûts et à ses affections, quelque chose de gracieux qui, ainsi que nous l’avons noté chez son ami M.Thiers, se rattache à la patrie du Midi et aux dons premiers de cette nature heureuse.

1198. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre neuvième »

De toutes les inspirations de Voltaire, la plus heureuse est le Siècle de Louis XIV. […] Il ne paraît pas soupçonner qu’on ait pu être heureux aux quatorzième et quinzième siècles, étant si grossièrement logé et vêtu, et « sans connaître l’art des Sophocle », comme il le dit avec l’accent du regret. […] La vérité y a l’air d’une saillie heureuse, et l’erreur n’y mérite pas toujours qu’on la réfute.

1199. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre X. La littérature et la vie de famille » pp. 251-271

Si de la tragédie nous passons à la comédie, la tradition lui impose un dénouement heureux et elle finit régulièrement par un mariage, le mariage étant toujours un dénouement heureux au théâtre. […] Cette transformation, heureuse par un côté, est souvent fâcheuse par d’autres.

1200. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Discours préliminaire, au lecteur citoyen. » pp. 55-106

Un autre Prophete qui auroit ajouté : « Et alors, les mots signifieront chose contraire à ce qu’ils avoient signifié auparavant ; les actions produiront un effet opposé à celui qu’elles doivent produire ; quand on prêchera la licence, on croira qu’il s’agit de subordination ; quand on armera le fort contre le foible, le fripon contre l’honnête homme, le valet contre son maître, on criera vive la justice ; quand on bouleversera tout, qu’on encouragera tous les vices, qu’on brisera tous les liens de la Société, chacun s’écriera, voilà le rétablissement de l’ordre, tous les hommes vont être heureux ». […] Quels prodiges ne devons-nous pas attendre encore de cette puissance magique qui mystifie, pétrifie, vivifie, glorifie, sans que rien puisse résister aux effets de son talisman, toujours heureux ou malheureux, selon ses desseins ? […] L’Analyse de Bayle, où ce qu’il y a de plus licencieux dans cet Ecrivain se trouve réuni ; l’Histoire des Querelles Littéraires, où l’on avance sans preuve, que Bossuet & Fénélon avoient, sur la Religion, des sentimens bien différens de ceux qu’ils ont professés ; l’Histoire Politique & Philosophique des établissemens des Européens dans les deux Indes, où l’on prétend que les Peuples seront plus heureux, lorsqu’ils n’auront ni Prêtres, ni Maîtres : ces trois Ouvrages, & beaucoup d’autres non moins licencieux, sont universellement attribués à des Ecclésiastiques de nos jours, qui ne les ont pas désavoués.

1201. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre Premier »

Rappelez-vous encore ce trait touchant, raconté par Hérodote : « Arrivé à Abydos, Xerxès, voyant, du haut d’une colline, défiler son immense armée, se déclara heureux ; puis il se prit à pleurer. […] Le plus heureux, je le dis, ô Parménon ! […] On ne sort pas de la vie par une porte heureuse quand on y reste trop longtemps ».

1202. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre VI. Le Bovarysme essentiel de l’humanité »

Il y a des automates heureux : l’hérédité les a façonnés de telle sorte, les circonstances extérieures leur sont à ce point favorables, que toutes choses leur sont prospères. […] Le sentiment du mérite, avec la satisfaction intérieure qu’il apporte à ceux que le sort favorisa d’un équilibre profitable et de facultés en harmonie avec les nécessités du milieu, telle est en effet la face heureuse de cette conception bovaryque en vertu de laquelle l’homme se croit libre de se modifier et de créer sa destinée. […] Dans les cas heureux, les amants réussissent à substituer à l’amour un sentiment différent et complexe, fondé sur des rapports de convenance réciproque plus durables ; ils se donnent le change, prennent l’amitié, t’intérêt personnel ou l’habitude pour l’amour, et ce nouveau mensonge, cette nouvelle et fausse conception d’eux-mêmes et de ce qu’ils ressentent, prolonge d’une façon acceptable pour l’individu une liaison que noua le seul intérêt de l’espèce.

1203. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1859 » pp. 265-300

Clermont-Tonnerre, où avait lieu une fête d’enfants, une représentation de la Barbe-Bleue ; sur un théâtre admirablement machiné par un répétiteur de l’École centrale, et dont il avait peint la toile : fête, où il avait tous les succès pour sa gaieté, pour sa camaraderie avec les moutards, pour ses imaginations drolatiques ; fête, où il s’était trouvé heureux, heureux comme tout, jusqu’au moment où M.  […] Il est banal, putain, mais si délicat, si rebelle aux emprunts et si peu susceptible, au milieu de sa noire misère, d’un sentiment envieux, haineux pour les heureux de ce monde.

1204. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des romans — Préface des « Derniers Jours d’un condamné » (1832) »

Heureux si, sans autre outil que sa pensée, il a fouillé assez avant pour faire saigner un cœur sous l’ æs triplex du magistrat ! heureux s’il a rendu pitoyables ceux qui se croient justes ! heureux si, à force de creuser dans le juge, il a réussi quelquefois à y retrouver un homme !

1205. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre III : Examen de la doctrine de Tocqueville »

Il a examiné quelles sont historiquement les conséquences bonnes ou mauvaises, heureuses ou malheureuses, de la démocratie. […] Ce qui est bien autrement redoutable, c’est le mal que voici. — Supposez une société démocratique née d’une révolution qui a aboli tous les privilèges de l’aristocratie, supposez que dans cette société il y ait encore, comme dans toutes les sociétés du monde, des heureux et des misérables, des riches et des pauvres : croit-on qu’il serait difficile de persuader à ceux-ci que la pauvreté des uns et la richesse des autres sont le résultat de certains privilèges des classes supérieures, et viennent de l’oppression des pauvres par les riches ? […] Guizot au Père Lacordaire, les preuves vivantes et les heureux témoins du sublime progrès qui s’est accompli parmi nous dans l’intelligence et le respect de la justice, de la conscience, des droits, des lois divines, si longtemps méconnues, qui règlent les devoirs mutuels des hommes, quand il s’agit de Dieu et de la foi en Dieu.

1206. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre x »

Ils retrouvent là une mère qu’à leur âge, dans une vie heureuse, ils n’auraient pas reconnue. […] Et de même les souvenirs de la vie de famille, les lettres quotidiennes d’où s’exhale le parfum de bonheur et de tendresse qui circule dans une maison heureuse, loin d’alanguir ce jeune cœur, l’affermissent. […] Il me reste cependant assez de temps pour te dire que je vais très bien, que je t’aime, et que je suis très heureux.

1207. (1868) Curiosités esthétiques « IV. Exposition universelle 1855 — Beaux-arts » pp. 211-244

Il croit que la nature doit être corrigée, amendée ; que la tricherie heureuse, agréable, faite en vue du plaisir des yeux, est non seulement un droit, mais un devoir. […] Mille circonstances, heureuses d’ailleurs, ont concouru à la solidification de cette puissante renommée. […] D’abord il faut remarquer, et c’est très-important, que, vu à une distance trop grande pour analyser ou même comprendre le sujet, un tableau de Delacroix a déjà produit sur l’âme une impression riche, heureuse ou mélancolique.

1208. (1899) Le roman populaire pp. 77-112

Et il ajoute, pour que nous continuions d’observer Cosette et d’être heureux avec elle, ce couplet demeuré célèbre : « La poupée est un des plus impérieux besoins et en même temps un des plus charmants instincts de l’enfance féminine. […] Heureux écrivains ! […] Tandis que nous écrivons, par une sorte d’instinct théâtral et de tradition, des chapitres qui gravitent tous autour d’une scène principale, un peu comme les actes d’une pièce dramatique ; tandis que nous faisons un livre très un et très serré, destiné à être lu sans arrêt, eux, ils écrivent une sorte de journal intime ; ils superposent les détails, sagement, posément, avec l’amour de l’heure présente qui ne connaît pas l’avenir, sans la même hâte vers le but, et ils songent aux misses qui parcourront vingt pages avant une course à cheval, au chasseur de renard qui revient au logis et qui a besoin d’une petite dose de lecture pour calmer la fièvre de ses veines, au commerçant de la Cité, à l’ouvrier anglais, libres avant le coucher du soleil, et qui prendront le livre et le poseront bientôt sur le coin du dressoir, heureux d’avoir trouvé l’occasion d’une larme ou d’un sourire qui n’étaient pas permis dans le travail du jour.

1209. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Bossuet. Œuvres complètes publiées d’après les imprimés et les manuscrits originaux, par M. Lachat »

Chacun a son idéal de vie heureuse, sa maison d’Horace en perspective : pour le profond et grand chrétien, jeune ou vieillissant, il n’y avait d’autre maison que celle de mon Père. […] L’auteur de Jocelyn, dans ce Cours familier de littérature qui contient tant de parties supérieures et toujours aimables, a tenté autrefois ce portrait ; idée heureuse !

1210. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

Il y en a qui rétrécissent et diminuent tous les sujets qu’ils traitent, il y en a qui les dessèchent ; lui, il les élève et les ennoblit, il les transforme sans les dénaturer ; il les revêt d’un mélange heureux de gravité et d’élégance ; il les fixe surtout et les situe en leur lieu et à leur point précis, dans leurs rapports avec les autres régions, sur la carte du monde intellectuel. […] Renan avait reçu notamment une très vile impression des idées et des vues de Herder ; cette espèce de christianisme ou de fonds religieux supérieur, qui admet toutes les recherches, toutes les conséquences de la critique et de l’examen, et qui, avec cela, laisse subsister le respect, même l’enthousiasme ; qui le conserve et le sauve en le transférant en quelque sorte du dogme à l’histoire, à la production complexe et vivante, le rasséréna et le tranquillisa beaucoup ; il sentait que, s’il eût vécu en Allemagne, il eût pu trouver des stations propices à une étude indépendante et respectueuse, sans devoir rompre absolument avec des choses ou des noms vénérables, et à l’aide d’une sorte de confusion heureuse de la poésie avec la religion du passé.

1211. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « La Réforme sociale en France déduite de l’observation comparée des peuples européens, par M. Le Play, Conseiller d’État. »

C’est le même langage uni et simple que dans son livre, avec l’abondance de plus, avec la particularité et un certain accent qui grave Il y a lieu de croire que la Révolution de 1848, les graves problèmes qu’elle souleva et les sombres pensées qu’elle fit naître, introduisirent un degré d’examen de plus dans quelques parties du livre, et tinrent plus constamment en éveil l’attention de l’observateur sur le principe moral qui maintient dans l’ordre certaines populations d’ouvriers, moins avancées et plus heureuses pourtant que d’autres. […] On vit au jour le jour ; l’or coule par flots, puis il tarit ; mais aussi, comme l’ouvrier parisien, on a l’heureuse faculté de l’imprévoyance : on a sa guinguette, on a ses soirées ; on a le théâtre ; on rencontre, on échange de prompts et faciles sourires ; on nargue la famille ; on est en dehors des gouvernements ; même si on les sert, on sent qu’on n’en est pas.

1212. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LA REVUE EN 1845. » pp. 257-274

Dans une de ces réunions dont nous avons gardé souvenir, le noble et regrettable Jouffroy prenait l’idée d écrire le portrait de George Sand, idée piquante et heureuse, projet aimable, longtemps caressé par lui, et que tant d’autres soins, avant la mort, l’ont empêché d’exécuter. […] L’essentiel, le seul point que nous tenions à constater, et que le public peut-être voudra bien reconnaître avec nous, est celui-ci : Somme toute, et à travers les nombreux incidents d’une course déjà longue, la Revue a fait de constants et d’heureux efforts pour se fortifier, pour s’améliorer, et, depuis bien des années déjà, pour réparer par l’importance des travaux en haute politique, en critique philosophique et littéraire, en relations de voyages, en études et informations sérieuses de toutes sortes, ce qu’elle perdait peu à peu en caprice et en fantaisie, ce qu’elle ne perdait pas seule et ce que les premiers talents eux-mêmes, le plus souvent fatigués en même temps que renchéris, ne produisaient plus qu’assez imparfaitement.

1213. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre VIII. De l’éloquence » pp. 563-585

Quels moyens reste-t-il alors à l’éloquence pour frapper les esprits par des pensées ou des expressions heureuses, par le contraste du vice et de la vertu, par la louange ou par le blâme distribués avec justice ? […] La morale est inépuisable en sentiments, en idées heureuses pour l’homme de génie qui sait s’en pénétrer ; c’est avec cet appui qu’il se sent fort, et s’abandonne sans crainte à son inspiration.

1214. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre II. Diderot »

Bonhomme au reste, obligeant, généreux, tout plein de bons sentiments, bon fils, bon frère, bon père, bon mari même, à la fidélité près, bon ami, chaud de cœur, enthousiaste, toujours prêt à se donner et se dévouer : à condition seulement qu’il puisse s’épancher librement, toujours heureux de se mettre en avant, d’être d’une négociation, d’une affaire où il y ait à brûler de l’activité, à évaporer de la pensée en paroles. […] Le Neveu de Rameau est un heureux accident : ailleurs le subjectif se mêle à l’objectif ; aux impressions de la nature extérieure se superposent, s’enchevêtrent, s’accrochent, les élans, les enthousiasmes, les indignations de Denis Diderot, toute une individualité effrénée, bruyante, encombrante.

1215. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Joséphin Soulary »

I À première vue, il est heureux pour un poète d’avoir fait un jour un sonnet, une pièce d’anthologie, que tout le monde connaît et récite. […] Soulary est plutôt celui d’un écrivain très laborieux et très inégalement heureux dans ses rencontres ; il ne cisèle pas, il complique et entortille, ce qui est bien différent.

1216. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gautier, Théophile (1811-1872) »

Gautier quelques heureuses innovations métriques, par exemple, l’importation de la terza rima, de ce rythme de La Divine Comédie qui n’avait pas reparu dans notre poésie depuis le xvie  siècle, et qui a droit d’y figurer par son caractère gravement approprié, surtout quand il s’agit de sujets toscans. — Tout à côté, on peut admirer à la loupe une fine miniature chinoise sur porcelaine du Japon. […] Il professe, pour la forme, un culte extraordinaire, fort heureux en somme, puisque ?

1217. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lamartine, Alphonse de (1790-1869) »

Philarète Chasles C’était la plus étonnante créature de Dieu, la plus instinctive, la moins apte à conduire les affaires ou à juger les hommes, la mieux douée pour s’élever, planer, ne pas même savoir qu’il planait, tomber dans un abîme et un gouffre de fautes, sans avoir conscience d’être tombé ; sans vanité, car il se croyait et se voyait au-dessus de tout ; sans orgueil, car il ne doutait nullement de sa divinité et y nageait librement, naturellement ; sans principes, car, étant Dieu, il renfermait tous les principes en lui-même ; sans le moindre sentiment ridicule, car il pardonnait à tout le monde et sc pardonnait à lui-même ; un vrai miracle, une essence plutôt qu’un homme ; une étoile plutôt qu’un drapeau ; un arome plutôt qu’un poète, né pour faire couler en beaux discours, en beaux vers, même en actes charitables, en hardis essors, en spontanées tentatives, les trésors les plus faciles, les plus abondants d’éloquence, d’intelligence, de lyrisme, de formes heureuses, quoique trop fluides ; de grâces inépuisables, non pas efféminées, mais manquant de concentration, de sol et de virilité réfléchie. […] À tous ces présents de la nature, il a joint d’heureux accidents de fortune ; de bonne heure, il a attiré sur lui l’attention des hommes et conquis une place élevée dans le mouvement des lettres et de la politique ; mais rien de parfaitement solide et de complètement initiateur n’est résulté de son action et de ses travaux.

1218. (1890) L’avenir de la science « XXI »

Ce sont des gens qui ont la bêtise d’être heureux. » Cela n’est pas bien exact : être heureux n’est pas chose vulgaire ; il n’y a que les belles âmes qui sachent l’être.

1219. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXV » pp. 259-278

Il est, ce me semble, curieux de savoir comment l’autorité de la société polie, la considération qu’elle donnait aux personnes qu’elle distinguait, celle qu’elle en recevait, celle qu’y sut acquérir madame de Maintenon, parvinrent, à l’aide des agréments personnels et par la conversation de cette femme célèbre, à opérer un changement total dans les mœurs de la cour ; changement qui eut été trop heureux si l’ambition des ministres n’eut jeté l’esprit du roi dans une extrémité opposée ; je veux dire dans l’aveugle dévotion. […] Il ne suffisait pas encore d’y être aimable, il fallait l’être pour la société entière, et ne l’être pour personne en particulier ; il fallait aimer tout le monde, pour être aimée de tout le monde ; ne pas avoir d’amant, pour n’avoir pas d’ennemis ; ne pas faire un heureux, pour ne pas faire vingt jaloux et mille détracteurs.

1220. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Bossuet, et Fénélon. » pp. 265-289

Il se chargea de diriger madame Guyon : Cette femme, déjà célèbre, pouvoit ajouter à la gloire de ce grand homme, s’il étoit assez heureux pour qu’on la vît ramenée. […] Les peuples trouvent, dans cet ouvrage, un ami zèlé qui ne cherche qu’à les rendre heureux ; & les rois un ennemi implacable de la flatterie.

1221. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre premier : M. Laromiguière »

Je serais heureux de vous avoir causé une telle surprise. […] On y aime avant tout la facilité abondante et le naturel heureux.

1222. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « APPENDICE. — M. SCRIBE, page 118. » pp. 494-496

L’observation de la société se retrouve dans des traits spirituels et dans des détails heureux bien plutôt que dans l’ensemble de l’action et dans les caractères des personnages.

1223. (1874) Premiers lundis. Tome II « Le poète Fontaney »

Fontaney était un homme parfaitement distingué, dans le sens propre du mot, un de ces hommes auxquels il n’a manqué qu’une situation plus heureuse et plus élevée qui fît valoir en eux tous les mérites de l’esprit et du caractère.

1224. (1861) La Fontaine et ses fables « Conclusion »

En cela, les poëtes sont plus heureux que les autres grands hommes.

1225. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — T — Tailhède (Raymond de la) = La Tailhède, Raymond de (1867-1938) »

Moréas et subit, avec une faiblesse heureuse, sa tyrannie.

1226. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XVI. Consultation pour un apprenti romancier » pp. 196-200

Sans doute il serait heureux que vous possédassiez un tempérament artiste, c’est-à-dire amateur de la vie, amateur de ce qui est.

1227. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 521-526

Il a d’ailleurs d’heureux germes de talens pour la poésie & la versification.

1228. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 303-308

On ne doit pas négliger de parler de son Traité du choix & de la méthode des Etudes, où il décrit la marche convenable à chaque Science en particulier ; ni de son Livre des Devoirs des Maîtres & des Domestiques, où une philosophie chrétienne prescrit aux un des regles de conduite conformes à l’ordre & à l’humanité, & aux autres des leçons propres à régler leur dépendance & à rendre leur sort plus heureux.

1229. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 309-314

Les Vers, pour être aisés & naturels, n'en sont pas moins heureux, ni quelquefois moins sublimes ; je les relirai plus d'une fois encore.

1230. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Homère, et le grammairien Thestorides. » pp. 2-6

Le poëte, réduit à la dernière indigence, se croit trop heureux.

1231. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Horace, et les mauvais écrivains du siècle d’Auguste. » pp. 63-68

Il se fit connoître à Rome, dans cet âge heureux des plaisirs, de l’audace & de la fortune.

1232. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre VII. Le Fils. — Gusman. »

Le poète a voulu faire reparaître ici la nature et le caractère orgueilleux de Gusman : l’intention dramatique est heureuse ; mais prise comme beauté absolue, le sentiment exprimé dans ce vers est bien petit, au milieu des hauts sentiments dont il est environné !

1233. (1858) Du vrai, du beau et du bien (7e éd.) pp. -492

Heureux l’orateur s’il fait dire : Cela est bien beau ! […] Il faut bien de l’art pour être heureux. […] Il y a mille manières d’être heureux. […] Or, je vous prie, suis-je obligé d’être heureux ? […] Mon désir est certainement d’être le plus heureux possible.

1234. (1863) Histoire de la vie et des ouvrages de Molière pp. -252

Molière n’y fut pas heureux ; très suivi d’abord, il eut à subir la concurrence redoutable d’un Vénitien, nommé Segalle, qui montrait des marionnettes. […] L’année 1659 fut heureuse pour la troupe et pour la gloire de Molière. […] L’innovation réussit ; la pièce ne fut pas moins heureuse. […] Quand on porte ses regards sur l’intérieur du ménage de Molière, on doute qu’il ait vécu un seul instant heureux. […] Cette production charmante a été regardée par tous les littérateurs comme l’essai heureux d’un genre frais et animé.

1235. (1891) Impressions de théâtre. Cinquième série

» Je vous assure que vous pouvez encore vivre assez heureuse sans être comprise. […] Jourdain, qui était trop heureuse, étant petite, de jouer à la madame avec nous. […] Et de cette façon, lorsque la postérité voudra classer l’énorme amas de nos œuvres dramatiques, elle fera comme pour les chansons de gestes et distinguera divers cycles, qu’elle pourra étiqueter ainsi : cycle du « plus heureux des trois » (prototype : le vaudeville de Labiche qui porte ce titre) ; cycle du « plus heureux des quatre » (prototype : la Parisienne de Becque) ; cycle du du « plus heureux des cinq » (la pièce est encore à faire, mais se fera). […] Le sourire de Fiammette, attendant, avec une ironie heureuse et fière, le coup de poignard de son amant, m’a rappelé (c’est bien singulier !  […] Elle a des mots délicieux, celui-ci par exemple : « Tu n’es pas heureuse ?

1236. (1902) Symbolistes et décadents pp. 7-402

Il demandait notre concours avec une face rayonnante, et il eût été criminel d’adresser des objections à un ami aussi heureux. […] de gros garçons qui vivent heureux en s’en tenant aux nomenclatures ; ceux qui l’ont aimé ? […] Les minutes heureuses de Baudelaire sont les mêmes que les minutes de tremblement, devant la divinité ou l’amour, de Paul Verlaine. […] Il n’est pas impossible que, grâce à son activité, des manuscrits soient retrouvés, et de quelle curiosité heureuse nous les accueillerions ! […] Que faudrait-il pour que ce jeune homme du xixe  siècle fût heureux ?

1237. (1880) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Première série pp. 1-336

Molinier soient toujours très heureuses ? […] À coup sûr, c’était un triste sire que d’Assoucy ; pourtant il est heureux que son récit nous soit parvenu. […] et si, plus heureux, dans un ménage plus calme, il eût enfoncé dans certains caractères aussi avant qu’il l’a fait ? […] Voltaire était certainement dans une passe heureuse. […] C’est ici le dédommagement, c’est l’heureuse revanche que M. 

1238. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome I pp. 1-402

Ce goût, je le sais bien, fût demeuré impuissant, s’il n’eût trouvé pour se développer, pour se fortifier, un ensemble de facultés heureuses. […] Ces dons heureux, qu’on ne s’y trompe pas, il ne les a pas reçus en naissant, tels que nous les voyons dans ses œuvres. […] Le retour du moine qui vient réchauffer la colère de Toussaint à l’heure du dernier combat ne me paraît pas une heureuse invention. […] C’est plutôt une rencontre heureuse qu’une obéissance préconçue aux principes posés par ces deux écrivains illustres. […] Il est trop facile de relever des erreurs si manifestes, pour que la clairvoyance devienne un sujet d’orgueil ; je serais heureux de n’avoir pas à les relever.

1239. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre sixième »

Quelques vers heureux peuvent être tirés de ce fatras, et cités, comme circonstances atténuantes, à la décharge de quelques-uns des coupables ; ils ne changent rien au jugement qu’on doit porter de tous. […] Dans ces pièces à Iris, dans ces épigrammes, dans ces saletés même, où il faut bien aller fouiller pour suivre les traces de l’histoire de notre poésie, il y a plus d’un vers heureux, et la langue des successeurs de Ronsard a senti la discipline de Malherbe. […] Peut-être serai-je assez heureux pour reprendre bientôt le langage de la cour d’Amalthée ; et c’est en celui de l’amitié, que l’on y parle mieux qu’en lieu du monde, ou plutôt que l’on ne parle que là, que je vous assure que nul Triton n’est si inviolablement acquis que moi à toutes les Nymphes et à tous les Tritons de la Brévone. […] Beaucoup de vers heureux, et qu’on peut dire faits de génie, ne rachètent pas son tort d’être moraliste sans morale. […] Mais pour bien exprimer ces caprices heureux, C’est peu d’être poète, il faut être amoureux.

1240. (1888) Impressions de théâtre. Première série

Ils ne sont ni meilleurs, ni plus heureux que nous. […] Heureux aussi ceux qui pèsent du sucre ou qui vendent des étoffes ! […] Heureux même les ouvriers des arts plastiques, peintres ou sculpteurs ! […] si je n’étais pas heureuse !  […] vous devez maintenant le voir ; heureux les simples ! 

1241. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Jean-Jacques Ampère »

J’ai été heureux de voir quelques-unes de mes convictions intimes, et renfermées dans mon être intime, exposées et commentées suffisamment… Un article (de M.  […] Ampère, dans sa manière rapide et son heureux instinct, se contente de toucher sans appuyer ; il indique l’harmonie entre le moral et le physique, sans aller jusqu’à une complète identification ; il laisse place à un certain jeu des facultés. […] Il écrivait à Ampère le 1er janvier 1858 : « … Je désire du fond de mon âme que vous soyez heureux, quand même ce serait loin de nous. […] Arrivé dans son sujet à des époques en vue, à la période classique de son histoire, il aurait dû y séjourner longuement et tourner beaucoup, pour les renouveler, autour de choses connues et de chefs-d’œuvre tout domestiques, lui qui n’était jamais plus heureux que hors de chez soi. […] » Ce mot d’heureux augure ne se vérifia point : ue suite de petits contre-temps et je ne sais quelle intrigue de coulisses déjouèrent le succès et fixèrent la destinée de la pièce.

1242. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre III. La critique et l’histoire. Macaulay. »

. —  Ce sera une belle vie à raconter, honorée et heureuse, dévouée à de nobles idées et occupée par des entreprises viriles, littéraire par excellence, mais assez remplie d’action et assez mêlée aux affaires pour fournir la substance et la solidité à l’éloquence et au style, pour former l’observateur à côté de l’artiste, et le penseur à côté de l’écrivain. […] L’objet des mathématiques n’est pas la satisfaction d’une curiosité oisive, mais l’invention de machines propres à alléger le travail de l’homme, à augmenter sa puissance à dompter la nature, à rendre la vie plus sûre, plus commode et plus heureuse. […] Quand il serait assez heureux pour gagner le lot de trente mille guinées, nous n’admettrions pas que notre conseil fût pour cela mauvais, et nous croirions certainement que ce serait à lui le comble de l’injustice de nous accuser d’avoir agi par méchanceté. […] Nous ne pouvons en ce moment nous rappeler un seul exemple où cette règle ait été transgressée avec un heureux effet, excepté l’exemple de la Boucle de cheveux. […] Et heureux les hommes, qui, ayant osé la recevoir sous sa forme effrayante et dégradée, seront enfin récompensés par elle au temps de sa beauté et de sa gloire1378 !

1243. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1863 » pp. 77-169

Sainte-Beuve est tout heureux, tout joyeusement débordant d’une partie de famille faite la veille. […] Proposition contre laquelle s’élève avec une grande vivacité Sainte-Beuve, s’écriant : « Vous êtes payé par la fumée, par le bruit… Mais un homme qui écrit devrait dire : Prenez, prenez… On est vraiment trop heureux qu’on vous prenne !  […] Et l’on apporte des plats d’une cuisine étrangement cosmopolite : des épinards dans lesquels on a pilé des noyaux d’abricots, un zabayon, — et Gautier, heureux, réjoui, mangeant, plaisantant, interpellant les bonnes avec une solennité drolatique, comiquement débonnaire, s’épanouit comme un Rabelais en famille. […] Je me sens du soleil sous la peau, et dans le verger, à l’abri des pommiers, couché sur la paille des boîtes de laveuses, il se fait en mon être un hébétement doux et heureux ainsi que par un bruit d’eau qu’on entend en barque, à côté de soi, roulant d’une écluse. […] Drouyn de l’Huys n’a pas été plus heureux avec les Russes que les ministres de Louis-Philippe.

1244. (1892) Les idées morales du temps présent (3e éd.)

Il y a même une statistique : « dix cas contre deux » ; et l’observation « clinique » de l’hystérie en corrobore la théorie avec une heureuse netteté. […] Dans son ensemble, malgré quelques tentatives plus ou moins heureuses d’opposition ou de réaction, elle a été naturaliste et positiviste. […] C’est là une disposition très heureuse pour un moraliste, et, j’ose dire, une disposition sans laquelle ses leçons seraient inefficaces. […] Et il se tiendrait pour très heureux s’il parvenait à ranimer parmi nous les discussions de morale et de cas de conscience, au risque de retomber parfois dans le Sanchez et le Caramuel. […] L’heureuse invention que d’Alembert a trouvée là !

1245. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXVI » pp. 301-305

Une allusion heureuse de M.

1246. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXXIII » pp. 332-336

On sait mon nom, ma vie est heureuse et facile ; J'ai plusieurs ennemis et quelques envieux ; Mais l’amitié chez moi toujours trouve un asile, Et le bonheur d’autrui n’offense pas mes yeux.

1247. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « de la littérature de ce temps-ci, a propos du « népenthès » de m. loève-veimars (1833). » pp. 506-509

Je crois pouvoir affirmer que tout écrivain qui a ce qu’on appelle du succès, c’est-à-dire qui réunit des lecteurs autour de son œuvre ; que tout homme qui est assez heureux, assez malheureux veux-je dire, pour être en butte à l’admiration, aux éloges, à la haine et aux critiques, n’a pas un moment laissé reposer sa plume sur ses compositions… Dans mon enfance on m’a montré, comme un glorieux témoignage du génie de Bernardin de Saint-Pierre, la première page de Paul et Virginie, écrite quatorze fois de sa main.

1248. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Pailleron, Édouard (1834-1899) »

Et cet amant bourru du naturel, Alceste, aurait peut-être donné tous les sonnets d’Oronte pour cette petite chanson que je vais vous dire : C’était en avril, un dimanche,         Oui, un dimanche,         J’étais heureux.

1249. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — T — Theuriet, André (1833-1907) »

André Lemoyne Ce qui ressort surtout des poèmes d’André Theuriet, c’est l’amour de la nature forestière, l’intime souvenir de la vie campagnarde et, en même temps, une pitié profonde pour les souffrants, les déshérités de ce monde qui vont courbes sur la glèbe ou errants sur les routes, à l’heure où le soir tombe et quand s’illumine dans la nuit la fenêtre des heureux.

1250. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — J. — article » pp. 519-526

Sa main redoutable & chérie, Loin de sa paisible Patrie, Ecartoit les troubles affreux, Et son autorité tranquille Sur un peuple à lui seul docile Faisoit luire des jours heureux ».

1251. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 223-229

Mais sa Muse n’a pas été heureuse à seconder les transports de sa générosité.

1252. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 381-387

Il n’a pas été aussi heureux dans ses Fables ; aussi est-il bien éloigné de la simplicité d’Esope, de l’élégance de Phédre, & de la naïveté de Lafontaine.

1253. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 51-56

Les heureuses dispositions de l’esprit, jointes à une étude constante, ne sont-elles pas capables de vivifier une Langue qui n’est morte que pour ceux qui la négligent ?

1254. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre IV. Suite des précédents. — Julie d’Étange. Clémentine. »

Mon ami, je suis trop heureuse, le bonheur m’ennuie… ……………………………………………………………………………………………… Ne trouvant donc rien ici-bas qui lui suffise, mon âme avide cherche ailleurs de quoi la remplir ; en s’élevant à la source du sentiment et de l’être, elle y perd sa sécheresse et sa langueur : elle y renaît, elle s’y ranime, elle y trouve un nouveau ressort, elle y puise une nouvelle vie ; elle y prend une autre existence, qui ne tient point aux passions du corps, ou plutôt elle n’est plus en moi-même, elle est toute dans l’être immense qu’elle contemple ; et, dégagée un moment de ses entraves, elle se console d’y rentrer, par cet essai d’un état plus sublime qu’elle espère être un jour le sien… ……………………………………………………………………………………………… En songeant à tous les bienfaits de la Providence, j’ai honte d’être sensible à de si faibles chagrins, et d’oublier de si grandes grâces… ……………………………………………………………………………………………… Quand la tristesse m’y suit malgré moi (dans son oratoire), quelques pleurs versés devant celui qui console, soulagent mon cœur à l’instant.

1255. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre IX. Application des principes établis dans les chapitres précédents. Caractère de Satan. »

je serais encore heureux, mon ambition n’eût point été nourrie par une espérance illimitée… Misérable !

1256. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 39, en quel sens on peut dire que la nature se soit enrichie depuis Raphaël » pp. 387-392

Il faudroit connoître le monde presqu’aussi-bien que l’intelligence qui l’a créé, et qui a décidé de son arrangement, pour imaginer la perfection où la nature est capable d’arriver à la faveur d’une combinaison de hazards favorables à ses productions, et de circonstances heureuses dans leur nutrition.

1257. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « L’abbé Noirot »

Eh bien, ce mot dit par nous sur la philosophie, nous serions heureux de l’effacer !

1258. (1845) Simples lettres sur l’art dramatique pp. 3-132

Heureux quand il ne se croit pas obligé d’être hostile. […] Il avait compris que Mlle de La Vallière pouvait le faire heureux, mais que Molière et Racine le feraient grand. […] Buloz se trouvait donc dans l’heureuse position d’un homme qui, chargé de chasser la littérature moderne du Théâtre-Français, a reçu, comme nous l’avons dit, des mains de son prédécesseur, le moyen de neutraliser l’influence de la tragédie contemporaine et du drame actuel, en faisant revivre, grâce à un talent inattendu et inespéré, la littérature des maîtres morts. […] Heureux ceux que ces gens-là cessent d’appeler leur ami ! […] Que voulez-vous, ce sont de ces petits sacrifices qu’en bonne administration il faut faire à la vanité des auteurs. » Nous sommes heureux que le prétendu démenti de M. 

1259. (1894) La bataille littéraire. Septième série (1893) pp. -307

C’est ce qu’est heureux de constater celui qui fut un de ses plus modestes collaborateurs, et à qui il fit le grand honneur de le traiter en ami. […] L’union n’en fut pas moins belle, féconde et heureuse. […] ils sont bien plus heureux dans la terre des âmes !  […] Elles vivent comme des vapeurs légères dans la région de Saturne, heureuses, sans souci, et ne sachant pas leur bonheur. […] Sois heureux !

1260. (1925) Comment on devient écrivain

A-t-il été vaincu par le préjugé des dénouements heureux ? […] Jules Janin a eu l’heureuse idée de réduire l’ouvrage en deux volumes parfaitement lisibles.‌ […] Une famille vivant heureuse dans un lointain pays, tant qu’elle demeure hors des atteintes de la civilisation. […] Je le disais, mais je n’en étais pas très sûr, et, n’en étant pas très sûr, je suis heureux d’avoir lu le livre de M.  […] D’Alembert dit qu’il n’hésitait pas à prendre dans les vieux sermonnaires toutes les pensées heureuses qu’il y trouvait et dont il ornait ses discours.

1261. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome I

Luce avait absolument besoin de Pâris dans sa tragédie, dit Geoffroy, il fallait du moins qu’il ne lui donnât qu’un rôle fort court ; il ne devait pas chercher à faire briller celui qu’il était trop heureux de faire supporter. […] On ne cesse de répéter qu’Octave fut heureux : disons plutôt qu’il fut habile, et voyons dans son bonheur la suite naturelle de sa conduite. […] Ce qui peut arriver de plus heureux, et même de plus honorable pour un mari, c’est d’être aimé de sa femme par estime et par devoir : l’amour s’éteint, l’inclination passe ; l’estime et le devoir restent. […] Heureux si mon esprit gagne tant sur le vôtre, Qu’il en estime l’un, et me permette l’autre ! […] On est étonné de trouver dans une pièce jouée en 1642 une foule de traits délicats et de mots heureux, des tirades même du meilleur ton.

1262. (1887) Études littéraires : dix-neuvième siècle

Du reste, il ne s’obstina point, étant aussi incapable de persistance, que prompt et heureux à surprendre brusquement la fortune. […] Epanchement large abondant, souvent magnifique d’une imagination facile et d’une âme heureuse. […] Et cependant, Seigneur, je ne suis pas heureux. […] Le pur artiste, l’ouvrier qui se joue à son art, est peu fécond en lui et peu heureux. […] Ceci est d’un art très savant, et, le plus souvent, très heureux.

1263. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIIe entretien. Vie du Tasse (3e partie) » pp. 129-224

Je me regarderais maintenant comme trop heureux si je pouvais seulement, sans crainte du poison, étancher à satiété la soif qui me consume, et, comme l’homme de la condition la plus vulgaire, passer mes jours en paix, mais libre, dans quelque pauvre chaumière de paysan ! […] « Peut-être vous en dis-je trop dans une lettre, écrit-il à Mori, un de ses confidents ; mais jamais je n’ai été plus humilié de n’être plus un heureux poète qu’en ce moment ; je passe un délicieux carnaval au milieu d’un cercle nombreux de belles et gracieuses femmes. […] « À la vue soudaine d’armes inconnues, ils se troublent et s’effrayent ; mais Herminie les salue, les rassure, découvre ses beaux yeux et sa blonde chevelure : Heureux bergers, leur dit-elle, continuez vos jeux et vos ouvrages ; ces armes ne sont point destinées à troubler vos travaux ni vos chants. […] « Ô mortel trop heureux d’avoir connu la disgrâce, si le ciel ne t’envie point la douce destinée dont tu jouis, aie pitié de mes malheurs ! […] Il dit adieu à ses hôtes du monastère de Monte Oliveto, où il avait passé des jours si heureux.

1264. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CIVe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (2e partie) » pp. 97-191

Il est fort heureux qu’Homère n’ait point pensé à se rendre compte de son génie ; car probablement, détourné par ce soin, il ne nous eût point donné l’Iliade ; mais il est fort heureux aussi que d’autres nous apprennent pourquoi l’Iliade est si parfaite et si belle ; et cette découverte des principes n’appartient qu’à la philosophie, qui fonde et dirige la critique. […] Herder remarque avec raison que « la philosophie des arts devait naître dans la Grèce, parce qu’en suivant le mouvement libre de la nature et les inspirations d’un goût infaillible, les poètes et les artistes de cet heureux pays réalisaient la théorie du beau, avant que personne n’en eût encore tracé les lois. […] Ne jugeons donc pas Aristote par Descartes ; et puisqu’un heureux hasard nous permet de comparer les théories du disciple à celles de son maître, jugeons Aristote par Platon ; Aristote a vingt ans étudié à cette école. […] Certes, je serais heureux de m’être trompé ; mais j’ai fait tout ce qu’il a dépendu de moi pour me défendre de toute prévention et de toute erreur ; et je crois pouvoir affirmer, en résumant cette longue et pénible discussion, que si, dans la question de l’âme, Aristote s’est éloigné beaucoup de son maître, il ne s’éloigne pas moins de la vérité.

1265. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVe entretien. Ossian fils de Fingal »

Elle n’est pas facile, la conquête de la beauté qui a déjà refusé tant de guerriers d’Erin ; mais sois heureux, ô toi, fils de Fingal : heureuse est la belle qui t’est réservée ! […] Suivaient Daïro, heureux dans les combats, et Dala, le boulevard des guerriers dans leur retraite. […] « Mais vois le roi de Morven, il s’avance, et l’incendie, les torrents, les tempêtes sont l’image de sa force. — Heureux ton peuple ! […] Heureux est ton peuple, ô Fingal !

1266. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1890 » pp. 115-193

Eh bien, ça devrait être le contraire dans le mariage, pour que le mariage soit heureux, il faudrait que la femme eût dix ans plus que le mari… et à ce sujet remarquez que le bonheur tranquille de certains ménages d’hommes encore jeunes, qui ont épousé des touffiasses plus vieilles qu’eux, ça tient à ce qu’elles ont dépensé leur vitalité, et qu’elles se trouvent au même degré d’assouvissement et d’éteignement de la chair, que leurs maris. […] Elle avait été assez heureuse pour arrêter son saignement de nez, mais Mlle Aimée qui était très jalouse d’elle, lui avait repris l’enfant d’entre les mains, n’avait pas su arrêter le saignement de nez, quand il était revenu, et le pauvre enfant était mort d’anémie, à la suite de la perte de tout son sang. […] Mardi 20 mai Je pense à l’injustice du sort heureux ou malheureux des chevaux, des chiens, des chats, et je trouve que c’est la même chose chez les bêtes que chez les hommes. […] On s’était grisé, on avait lutté, et dans la lutte, il s’était foulé un pied, mais il se faisait porter en bateau par deux marins, et quittait tout heureux, un soir de mardi-gras, la plage pleine de lumière et de cris de carnaval, pour aller à une mauvaise mer, au danger, à l’inconnu. […] Eh bien, sous ces attaques, et plus tard dans le silence un peu voulu qui a suivi, renfonçant en lui l’amertume de sa carrière, et n’en faisant rejaillir rien sur les autres, Flaubert est resté bon, sans fiel contre les heureux de la littérature, ayant gardé son gros rire affectueux d’enfant, et cherchant toujours chez les confrères ce qui était à louer, et apportant à nos heures de découragement littéraire, la parole qui remonte, qui soulève, qui relève, cette parole d’une intelligence amie dont nous avons si souvent besoin, dans les hauts et les bas de notre métier.

1267. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Shakespeare »

En effet, qu’un jeune homme, doué de facultés ardentes, enivré de Shakespeare et ayant entrepris de le traduire, ait la main plus ou moins heureuse dans l’interprétation de chefs-d’œuvre devenus, à force d’être des chefs-d’œuvre, des lieux communs sublimes pour l’universelle intelligence, comme Hamlet, Othello, Macbeth, Richard III, ce n’est pas merveille. […] Roméo, a dit encore bien superficiellement Hazlitt, Hazlitt dont Shakespeare semble avoir parfois troublé la vue, Roméo, c’est Hamlet amoureux , comme si ce qui fait cette étincelante et exquise création de Roméo, cette incarnation de toutes les sensations poétiques et heureuses de l’existence, était une affaire de soleil ! […] d’une indigence dans sa nature, mais de la plus parfaite harmonie de toutes les parties de son être moral, pris de tête à cœur… « En la peignant dans sa foi, dans sa patience, dans sa fidélité, dans sa fortitude, avec son intuition heureuse et son tact fin, qui n’a besoin de l’intervention d’aucune faculté discursive, en la peignant dans la lumière de ses affections à travers laquelle elle voit tout, en la peignant enfin dans la seule erreur qui soit la sienne, l’exagération de l’amour, Shakespeare a peint toutes les femmes dans la même femme ; car lorsqu’il y a individualité chez la femme, c’est toujours les circonstances qui la font. […] Nous ne l’avons que trop répété déjà, nous ne trouvons pas heureuse cette nomenclature, toute d’invention, d’une exécution très arbitraire toujours et d’une justesse souvent très vague, pour ne pas dire pis ; mais il faut l’avouer, le titre collectif sous lequel François Hugo a placé ces deux drames de Shakespeare, qu’il a mis en un volume, dit bien la pensée de Shakespeare. […] mais excusable de la part d’un homme qui a été élevé de manière à croire que la première représentation d’Hernani fut un événement supérieur à la bataille de Tolbiac, la préface du Coriolan et du Roi Lear est un morceau très intéressant de renseignement, d’analogies heureuses, quelquefois même d’aperçu ; et entre tous les travaux critiques qu’a inspirés Shakespeare, ce n’est pas, à coup sûr, le moins distingué.

1268. (1910) Variations sur la vie et les livres pp. 5-314

Et par exemple, si Dante dépasse tellement les autres poètes du moyen âge, c’est qu’il a une sublime élocution et la plus heureuse cadence. […] Voici quelques corrections heureuses. […] — Heureux Saint-Antoninois ! […] Certes l’imagination travaille devant la menace, mais la mort ne fait pas tant trembler : il y a, même chez les plus heureux, une lassitude de la vie. […] La traduction d’Othello, où l’accent, à vrai dire, tombe trop souvent, offre toutefois d’heureuses trouvailles.

1269. (1902) Le critique mort jeune

On sent que, sous prétexte de philologie, M. de Gourmont est heureux de se trouver parmi de riches chasubles, des ciboires précieux et des reliquaires. […] Le résultat des opérations de ce cœur prodige lui parut si parfait, qu’il se confessa l’heureux inventeur de la première des méthodes. […] Il y a une thèse et un roman dans le « Pays natal » : l’un et l’autre se pénètrent de la plus heureuse façon. […] C’est Geneviève pourtant qui, pendant des années, lui a suggéré ses pensées, ses paroles, ses démarches les plus heureuses. […] Elle devra se contenter de voir heureux, mais fugitif et presque lointain, celui dont elle eût voulu régler même le bonheur.

1270. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLVIIIe Entretien. Montesquieu »

« Si je pouvais faire en sorte que tout le monde eût de nouvelles raisons pour aimer ses devoirs, son prince, sa patrie, ses lois, qu’on pût mieux sentir son bonheur dans chaque pays et dans chaque gouvernement, dans chaque poste où l’on se trouve, je me croirais le plus heureux des mortels. « Si je pouvais faire en sorte que ceux qui commandent augmentassent leurs connaissances sur ce qu’ils doivent prescrire, et que ceux qui obéissent trouvassent un nouveau plaisir à obéir, je me croirais le plus heureux des mortels. « Je me croirais le plus heureux des mortels, si je pouvais faire que les hommes pussent se guérir de leurs préjugés. […] Il ne sentira point, comme nos princes, que s’il se gouverne mal, il sera moins heureux dans l’autre vie, moins puissant et moins riche dans celle-ci.

1271. (1870) La science et la conscience « Chapitre III : L’histoire »

Dans son livre des Idées sur l’histoire de l’humanité, Herder a des définitions fécondes et des images heureuses qui ont inspiré bien des écoles de philosophie historique. […] Cette crise intellectuelle et morale fait comprendre l’heureuse opportunité des livres qui, comme ceux de MM.  […] Quand la fatalité historique poursuit une fin heureuse et bonne, c’est en aveugle, comme la nature elle-même, dont elle fait partie. […] On peut admirer le génie triomphant par la force ; heureuse ou malheureuse, la vertu au service de la justice a toujours droit à la même estime.

1272. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — II. (Suite.) » pp. 463-478

Tableau doux et champêtre dont la simple nature a fait les frais, il doit réunir comme elle la vénérable empreinte de l’antiquité aux charmes d’une immortelle jeunesse, et se renouveler au retour de chaque année comme la feuille des arbres et comme l’herbe des prés… Cette rencontre était un heureux hasard pour la troupe dont je faisais partie, et de pareils objets lui présentaient un bien nouveau spectacle ; mais nul ne leur pouvait trouver comme moi ce charme dû à la comparaison et au souvenir, et depuis longtemps ami des troupeaux, seul je les abordais en ami, jouissant de leur curiosité, de leurs craintes et de leur farouche étonnement. […] Mais en même temps et en attendant que cette épopée encore à naître fut venue, Ramond, vers 1807, savait fort bien déterminer le caractère littéraire d’un siècle qui était le sien et qui a aussi sa force et son originalité : On le dépréciera tant qu’on voudra ce siècle, disait-il, mais il faut le suivre ; et, après tout, il a bien aussi ses titres de gloire : il présentera moins souvent peut-être l’application des bonnes études à des ouvrages de pure imagination, mais on verra plus souvent des travaux importants, enrichis du mérite littéraire… Nos plus savants hommes marchent au rang de nos meilleurs écrivains, et si le caractère de ce siècle tant calomnié est d’avoir consacré plus particulièrement aux sciences d’observation la force et l’agrément que l’expression de la pensée reçoit d’un bon style, on conviendra sans peine qu’une alliance aussi heureuse de l’agréable et de l’utile nous assure une place assez distinguée dans les fastes de la bonne littérature.

1273. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Les Chants modernes, par M. Maxime du Camp. Paris, Michel Lévy, in-8°, avec cette épigraphe. « Ni regret du passé, ni peur de l’avenir. » » pp. 3-19

Les choses communes, pour qu’elles plaisent, il faut les relever par quelque endroit, par l’accent, la marche du vers, le tour, quelquefois un concours heureux de syllabes. […] À la fin d’une tournée en Écosse, et après en avoir noté en vers les principales circonstances pittoresques, le poète des lacs, revenant au monde du dedans et maintenant à l’esprit sa prédominance vivifiante, disait pour conclusion : Il n’y a rien de doux comme, avec les yeux à demi baissés, de marcher à travers le pays, qu’il y ait un sentier tracé ou non, tandis qu’une belle contrée s’étend autour du voyageur sans qu’il s’inquiète de la regarder de nouveau, ravi qu’il est plutôt de quelque douce scène idéale, œuvre de la fantaisie, ou de quelque heureux motif de méditation qui vient se glisser entre les belles choses qu’il a vues et celles qu’il verra.

1274. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Souvenirs et correspondance tirés des papiers de Mme Récamier » pp. 303-319

Enfin ces Mémoires de Mme Récamier (comme diraient les Anglais, qui excellent à ces sortes de livres) sont aussi fidèlement et habilement construits qu’on le peut désirer, et ce n’est pas être indiscret que d’en nommer ici l’auteur et rédacteur, la nièce de Mme Récamier et sa fille adoptive, Mme Lenormant : on doit la remercier d’avoir su tirer un aussi heureux et aussi ingénieux parti de tout ce qu’elle avait entre les mains. […] Un prédicateur disert n’est pas plus attentif à ménager la fin et la chute heureuse de son sermon, — un grand lyrique moderne n’est pas plus préoccupé de clore brusquement chacune de ses pièces par un coup de tonnerre ou par un coup de fouet éclatant, — Mme des Ursins, dans sa correspondance récemment publiée, n’est pas plus ingénieuse à introduire, à varier le compliment obligé et la noble révérence qui termine chacune de ses lettres à la maréchale de Noailles, — le général Bernadotte, dans les billets même qu’il adresse à Mme Récamier, n’est pas plus jaloux d’amener de bonne grâce et de tourner galamment son salut final chevaleresque, — que lui, M. de Montmorency, ne se montre attentif et ingénieux, dans chaque lettre, à insérer et à glisser son petit bout d’homélie.

1275. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mélanges religieux, historiques, politiques et littéraires. par M. Louis Veuillot. » pp. 44-63

Le lendemain de la victoire, une femme de la haute société et de beaucoup d’esprit disait à M. de Molènes : « C’est fort heureux, monsieur, que vos petits monstres n’aient pas tourné. » Cela tint à peu de chose, en effet. […] Veuillot distingue deux veines et deux courants dans la littérature française, le courant gaulois, naturel, et ce qu’il appelle l’influence sacrée, religieuse, épiscopale : il fait à celle-ci, pour la gravité et l’élévation, une part bien légitime ; il est ingrat pourl’autre, pour le vrai et naïf génie national qu’il sent sibien, qu’il définit par ses heureux caractères, et que tout à coup il appelle détestable, se souvenant que ce libre génie ne cadre pas tous les jours avec le Symbole.

1276. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite et fin.) »

Je compare l’état actuel de la littérature à une forte fièvre qui en elle-même n’est ni bonne ni désirable, mais qui a pour heureuse conséquence une meilleure santé. […] Il n’était pas de ceux dont il s’est moqué quelque part, et qui, lorsqu’un génie trébuche ou qu’un grand homme tombe, se sentent tout enchantés et allégés, « comme si leur supérieur était mort et s’ils avaient reçu de l’avancement. » Une statue, érigée à Weimar, et due au talent de Reitschel, nous le montre rayonnant et heureux, imposant et doux, décernant la couronne à Schiller qui, debout à côté de lui, la reçoit de sa main presque sans y penser, le front inspiré et rêveur.

1277. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

Au moment où le docteur allait se prendre et sortir de son rôle en y entrant trop bien ; où la femme surtout, la tête en feu, se croyait déjà perdue sans retour, tout est sauvé par un effort heureux et un tour de clé habile du romancier. […] Feuillet a prouvé dans plus d’une de ses compositions, notamment dans Dalila, et par la bouche de sa Leonora, de son Carnioli (une de ses plus heureuses créations), qu’il savait comprendre la passion, l’art à outrance, la frénésie de la sensation et du plaisir, et qu’il n’était nullement inférieur et insuffisant à les mettre en scène par d’émouvants personnages ; mais il est vrai aussi que, cette excursion faite, cette aventure épuisée et accomplie, il a son chez-lui préféré, sa ligne naturelle et sa voie dans laquelle il aime à rentrer, son inclination tracée et bien distincte.

1278. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Térence. Son théâtre complet traduit par M. le marquis de Belloy »

Delille, en traduisant le Paradis perdu, avait également ouvert la voie et donné le signal du côté des modernes ; Baour-Lormian, assez heureux avec Ossian et les poésies galliques, s’attaquait imprudemment à la Jérusalem délivrée. […] se disait-il parlant à lui-même, c’est là, après tout, un cas bien rare ; résister ainsi à l’exemple, à l’entraînement de compagnons de plaisir, c’est ce qui s’appelle être maître de soi, c’est déjà tenir le gouvernail de sa vie. — Joignez à cela que le jeune homme si cher à son père était en même temps agréable à tous ; chacun chantait ses louanges et félicitait l’heureux Simon d’avoir un tel fils.

1279. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Lettres d’Eugénie de Guérin, publiées par M. Trébutien. »

mais Eugénie surtout l’a séduit, l’a enlevé, pauvre savant solitaire, comme ces nobles figures idéales, ces apparitions de vierges et de saintes qui se révélaient dans une vision manifeste à leurs fervents serviteurs ; il l’a aimée, il l’a adorée, il a poursuivi avec une passion obstinée et persévérante les moindres vestiges, les moindres reliques qu’elle avait laissées d’elle : il les a arrachées aux jaloux, aux indifférents, aux timides ; il a copié et recopié de sa main religieusement, comme si c’étaient d’antiques manuscrits, ces pages rapides, décousues, envolées au hasard, parfois illisibles, et qui n’étaient pas faites pour l’impression, il les a rendues nettes et claires pour tous : le jour l’a souvent surpris près de sa lampe, appliqué qu’il était à cette tâche de dévouement et de tendresse pour une personne qu’il n’a jamais vue ; et si l’on oublie aujourd’hui son nom, si quand on couronne publiquement sa sainte44, il n’est pas même remercié ni mentionné, il ne s’en étonne pas, il ne s’en plaint pas, car il est de ceux qui croient à l’invisible, et il sait que les meilleurs de cet âge de foi dont il a pénétré les grandeurs mystiques et les ravissements n’ont pas légué leur nom et ont enterré leur peine : heureux d’espérer habiter un jour dans la gloire immense et d’être un des innombrables yeux de cet aigle mystique dont Dante a parlé ! […] Si je vous ennuie, dites-le moi, mais je vous aime trop pour ne pas vous dire ce qui vous manque pour être heureuse : c’est la piété.

1280. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « La civilisation et la démocratie française. Deux conférences par M. Ch. Duveyrier »

Napoléon s’y suppose en idée maître et roi durant dix ans, et il en ressuscite toutes les merveilles, étendues, agrandies, multipliées, selon les données incomparables du génie moderne ; je ne me refuserai pas à rappeler les principaux traits du tableau : « Mais à quel degré de prospérité, s’écrie tout à coup l’historien conquérant, pourrait arriver ce beau pays, s’il était assez heureux pour jouir, pendant dix ans de paix, des bienfaits de l’administration française ! […] Que les heureux et les favorisés le sentent, afin d’en savoir gré du moins à la partie laborieuse et qui peine !

1281. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les cinq derniers mois de la vie de Racine »

L’apparence de sa guérison ne laissait pas de tromper les amis ; ils espéraient ce qu’ils désiraient : « Sa convalescence, après une assez longue maladie qui nous a fort alarmés, se confirme de jour en jour (18 décembre), et elle doit augmenter notablement par la grande joie que lui donne l’heureux retour de son fils avec M. de Bonrepaux, qui l’avait mené à La Haye et qui l’a ramené, pour le remener en Hollande après un peu de séjour qu’il est venu faire à la. […] Voici donc sa réponse : « Je félicite l’illustre voisin de l’heureuse alliance dont vous êtes l’entremetteur ou plutôt le médiateur, médiateur entre Dieu et vos amis, car un bon mariage ne peut venir que de Dieu : Domus et divitiæ dantur a pcirentibus : a Domino autem proprie uxor prudens.

1282. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Gaston Paris et la poésie française au moyen âge »

L’érudit patient est comme le bon artisan du moyen âge qui s’appliquait à bien tailler sa pierre pour la cathédrale future sans savoir où cette pierre serait posée ni si elle serait vue des fidèles, heureux pourtant de collaborer pour son humble part au monument élevé à la gloire de Dieu. […] Je ne connais pas de plus belle définition de cet esprit que celle qu’il en donne dans une leçon sur la Chanson de Roland, faite au Collège de France le 8 décembre 1870 : «… Je professe absolument et sans réserve cette doctrine, que la science n’a d’autre objet que la vérité, et la vérité pour elle-même, sans aucun souci des conséquences bonnes ou mauvaises, regrettables ou heureuses, que cette vérité pourrait avoir dans la pratique.

1283. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre III. Grands poètes : Verlaine et Mallarmé, Heredia et Leconte de Lisle » pp. 27-48

Le charme est bien secondaire que donne l’incontestable maîtrise, l’audace heureuse, l’instrument parfait et charmant de l’écrivain. […] On n’écrit pas. » III Sans doute, entre la critique de la postérité, soit des esprits assez distants pour rentoiler leurs souvenirs de lecture sur une trame historique adventice, et la critique non même du lendemain mais du matin ou de la veille, dont l’exactitude chaleureuse vaut d’abord en tant que d’intéressante information : citations heureuses presque encore inédites, découpées des « bonnes feuilles », anecdotes sur l’auteur, première impression non refroidie, adresse du libraire… sans doute entre ces deux critiques n’y a-t-il point une place nécessaire pour une tierce et intermédiaire, la nôtre, très contemporaine encore, et point toute fraîche cependant, advenant après, ai-je entendu dire, cent soixante-treize articles imprimés sur les Trophées de José-Maria de Heredia.

1284. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre VIII. Les écrivains qu’on ne comprend pas » pp. 90-110

De confiance, le mot est assez heureux. […] Les jeunes gens, disait-il, sont heureux : « ils peuvent admirer sans comprendre ».

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