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1378. (1903) La vie et les livres. Sixième série pp. 1-297

Le policier crut ou voulut entendre Dumouriez. […] Tout à coup, on entend des claquements de fouet, des sonnailles, des galops de chevaux. […] J’aurais voulu entendre la voix de ces solitudes. […] Avec vous, on peut toujours s’entendre. […] On entend des crépitements de fusillade, des salves d’artillerie.

1379. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIIe entretien. Littérature cosmopolite. Les voyageurs »

Leur pente est grande et naturelle à la volupté, au luxe, à la dépense, à la prodigalité, et c’est ce qui fait qu’ils n’entendent ni l’économie, ni le commerce ; en un mot, ils apportent au monde des talents naturels aussi bons qu’aucun autre peuple ; mais il n’y en a guère qui pervertissent ces talents autant qu’ils le font. […] On ne l’entend jamais outrager. […] Leurs paroles sales sont toutes prises des parties du corps que la pudeur ne veut pas qu’on nomme ; et quand ils se veulent injurier, c’est en se disant des ordures de leurs femmes, quoiqu’ils ne les aient jamais ni vues ni entendu nommer, ou en leur souhaitant qu’elles commettent des infamies. […] C’est parmi les gens de toute sorte de conditions, comme je l’ai observé, qu’on entend dire de telles saletés ; mais ce n’est pas aussi communément, et avec le même excès: car il faut avouer que le commun peuple en est comme infecté tout entier. […] Sabatar fit la réponse qu’il reconnaissait le pacha pour son seigneur, et que de cœur il était Turc et non Mingrélien ; qu’il avait résolu d’aller trouver le pacha dès qu’il avait appris qu’il devait venir ; qu’à présent qu’il entendait que son lieutenant était à Ruchs, il irait le lendemain matin recevoir ses ordres.

1380. (1895) La science et la religion. Réponse à quelques objections

Et je l’entends bien ainsi. […] J’entends maintenant ce qu’on voulait dire autrefois quand on réduisait toute la querelle entre protestants et catholiques à la « matière de l’Église ». […] Il est permis de trouver là-dessus qu’avant de les célébrer, encore faut-il savoir si l’on entend les célébrer « en bloc » ; et voilà pour M.  […] et, comme dit le proverbe, il n’y a pire sourd que celui qui ne veut pas entendre ! […] Si l’on a tiré du « darwinisme mal entendu » d’odieuses conséquences, on en peut tirer d’autres du darwinisme mieux interprété.

1381. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Benjamin Constant et madame de Charrière »

Je ne sais si je fais du galimatias ; vous en jugerez, mais je crois m’entendre. […] Je vous écris comme si vous m’entendiez ; je ne pense pas du tout, à la nécessité ni au moment d’envoyer ma lettre. […] Avoir entendu causer Benjamin Constant, maintenant qu’il ne vit plus, n’est pas une chose indifférente. […] ici, portes closes, nous l’entendons causer. […] Qu’on ne demande pas au témoin qui parle d’elle d’être tout à fait impartial, car on n’était plus impartial dès qu’on l’avait beaucoup vue et entendue.

1382. (1898) La poésie lyrique en France au XIXe siècle

Voilà ce que j’entends par l’optimisme foncier de Lamartine. […] C’est pourquoi, après l’avoir prié de l’attendre dans la grande salle, elle sort, et Rosemberg, avec étonnement d’abord, puis avec effroi, entend verrouiller la porte par l’extérieur. […] Dans l’époque classique, il était entendu que l’écrivain ne doit pas parler de lui-même. […] Vous avez quelquefois entendu dire de certaines gens : « C’est une belle âme. » Eh bien, peu d’hommes ont mérité cette définition aussi bien que Sully Prudhomme. […] C’est surtout aux États-Unis que j’ai entendu faire grand éloge de Paul Verlaine.

1383. (1868) Rapport sur le progrès des lettres pp. 1-184

Quand on parle de progrès, il faut s’entendre. […] Il est bien entendu qu’il ne s’agit ici que de détails purement littéraires. […] Parmi les branches que le vent froisse et remue avec un sourd murmure, vous entendez le gazouillement d’un oiseau invisible. […] C’est une note qu’on n’est plus habitué à entendre et qui vous cause une surprise pleine de charme. […] Mlle Rachel entendait mieux sa situation.

1384. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIIe entretien » pp. 223-287

Avez-vous entendu un oiseau chanteur à peine emplumé, sur le barreau de sa cage, dans votre chambre, à l’aube de son premier printemps ? L’avez-vous entendu à son réveil, ou plutôt dans son rêve d’oiseau, avant d’être tout à fait réveillé, essayer son instinct musical dans de courtes notes à demi-voix, si imperceptibles à l’oreille qu’il faut se pencher vers son nid pour les entendre ? […] Il me semble encore entendre sa voix de poitrine, résonnante comme une vague d’Ionie dans un creux de rocher des Phocéens, la première fois qu’il adressa, comme un vrai Horace à un faux Virgile, les adieux du poète sédentaire au poète errant ! […] J’étais confondu d’entendre une voix plus virile que celle de Talma, plus tragique que celle de Rachel.

1385. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXIXe entretien. Tacite (2e partie) » pp. 105-184

« Jamais on n’avait rien contemplé, jamais rien entendu de comparable. […] On n’entendit de lui qu’un seul mot, qui attestait encore un reste de fierté dans son âme, lorsqu’aux insultes du tribun militaire il répondit : — Et cependant j’ai été ton empereur ! […] On voit la mêlée des orateurs dans les assemblées, on entend les apostrophes et les insultes. […] « Les portes du temple s’ouvrirent d’elles-mêmes, raconte Tacite, et on entendit une voix, plus forte que toute voix humaine, dire : Les Dieux s’en vont. […] « Quant à lui, par une dissimulation contraire, triste et comme affligé de son propre salut, il affectait de verser des larmes sur la mort de sa mère ; mais, comme la physionomie des lieux ne change pas à volonté comme la physionomie des hommes, que l’aspect pénible de cette mer et de ce rivage importunait ses regards, et qu’on entendait de plus, disait-on, sous les collines de Baïes le son d’une trompette et des gémissements de deuil autour du tombeau de sa mère, il se réfugia à Naples, et il adressa de là des lettres au sénat. » LII « Ces lettres disaient qu’Agérinus, affranchi et confident intime d’Agrippine, avait été surpris le fer à la main pour l’assassiner ; qu’Agrippine s’était fait justice à elle-même en se punissant de la même mort qu’elle avait tramée contre lui.

1386. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXIIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (3e partie) » pp. 369-430

Le récit vivifié par l’imagination, réfléchi et jugé par la sagesse, voilà l’histoire telle que les anciens l’entendaient, et telle que je voudrais moi-même, si Dieu daignait guider ma plume, en laisser un fragment à mon pays. » VII « Mirabeau venait de mourir. […] Elle avait entendu les premiers bouillonnements de la tempête sans croire au danger ; elle s’était fiée à l’amour qu’elle inspirait et qu’elle se sentait dans le cœur. […] On eût dit qu’un génie intime et prophétique lui révélait d’avance la vanité de tous ces talents, la toute-puissance de la volonté et de la patience, et qu’une voix entendue de lui seul lui disait : “Ces hommes qui te méprisent t’appartiennent ; tous les détours de cette Révolution qui ne veut pas te voir viendront aboutir à toi, car tu t’es placé sur sa route comme l’inévitable excès auquel aboutit toute impulsion ! […] Entendons-nous : « La géographie n’est d’aucun parti : Rome et Carthage n’avaient point de frontières, Gênes et Venise n’avaient point de territoires. […] Nous entendons ici ces deux mots de repos et d’action dans leur acception la plus absolue ; car il y a aussi repos dans les républiques et action sous les monarchies.

1387. (1914) Enquête : Les prix littéraires (Les Marges)

Au cours de cette bousculade, on entendit vraiment un peu trop parler d’argent : « Il vit avec 137 francs par mois — Oui, mais il a une tante millionnaire. — Regardez un peu ses bottines ! […] Car il y a toute chance pour qu’il devienne alors une nourriture empoisonnée et que nous en crevions — en tant qu’artiste véritable, j’entends. […] Que ceux-ci enfin organisent, mon Dieu oui, syndicalement, corporativement, la défense de leurs intérêts, et j’entends par là aussi bien la mise en rapports avec leurs clients naturels, les éditeurs., directeurs de périodiques ou de théâtres, etc… (n’est-ce pas ce que tente l’Entr’aide littéraire ?) […] Tranquilles du côté matériel, distraits, par un travail manuel intéressant, de leur travail intellectuel, placés dans un site où les promenades et les sports les solliciteraient, nos jeunes écrivains, réunis ensemble, mais chacun parfaitement libre, bien entendu, pourraient aller passer là deux ou trois mois par an ou plus, et je crois que ce serait un des meilleurs moyens de leur venir réellement en aide. […] Si on connaissait, comme moi (qui entend les cris et les réclamations des jeunes gens dupés) le fond vaseux que remue la trombe des prix littéraires, on serait absolument épouvanté du résultat obtenu.

1388. (1856) Cours familier de littérature. II « IXe entretien. Suite de l’aperçu préliminaire sur la prétendue décadence de la littérature française » pp. 161-216

Rousseau dans la polémique, dans le Vicaire savoyard, dans quelques pages des Confessions, on entend la voix, on voit le geste de l’orateur platonique ou cicéronien derrière la période accentuée de l’orateur invisible. […] Il donne trop à entendre que la révolution française n’était point une révolution morale, intellectuelle, mais un simple redressement d’abus, redressement d’abus entraîné hors de sa voie et au-delà de son but par une force d’impulsion égarée et par les passions soulevées en chemin dans le tumulte d’une réforme. […] Le monde s’était fait tout écho pour l’entendre. […] Ces deux hommes morts, on n’entendit et on n’écouta plus rien. […] C’était une corde nouvelle, corde trempée de sang et de larmes, que la mort avait ajoutée à la lyre moderne : cela ressemblait aux voix des pleureuses qu’on entend de loin en Orient suivre en chantant les cercueils au bord de la mer derrière les oliviers ou les cyprès des champs des morts.

1389. (1913) La Fontaine « VI. Ses petits poèmes  son théâtre. »

Par « petits poèmes » de La Fontaine nous entendons des poèmes qui, en vérité, sont plus longs que les Fables et que les Contes, mais qui, étant des poèmes didactiques et des poèmes épiques, sont moins longs que les poèmes épiques et que les poèmes didactiques que nous avons coutume de considérer dans l’histoire de la littérature ; c’est pour cela qu’on les a appelés « les petits poèmes de La Fontaine », ce qui ne répond pas à une idée très précise, mais vous comprenez ce que l’on a voulu entendre parla. […] J’ai tenu à vous indiquer ce détail avec ce petit rapprochement parce que cela montre au moins que Gœthe s’est intéressé à Philémon et Baucis, dont il est probable qu’il a trouvé l’histoire plutôt dans La Fontaine que dans Ovide, encore que, bien entendu, je n’en sache rien. […] Il y a quelques vers, quelques vers d’opéra, bien entendu, quelques vers qui, quoique vers d’opéra, sont tout à fait distingués et gracieux, dont je ne veux pas vous priver. […] Il avait donc un véritable goût que je ne lui reproche pas du tout pour le burlesque entendu comme l’entendent les honnêtes gens, et il a tiré du roman de Scarron, avec Champmeslé (mais c’est à peine si je dis avec Champmeslé, car on sait bien que les choses signées La Fontaine et Champmeslé étaient de La Fontaine tout seul ou à peu près ; la part de Champmeslé consistait à faire jouer et répéter les comédiens ; cela est absolument certain), donc, avec Champmeslé, si vous voulez, il a tiré de Scarron une comédie intitulée Ragotin.

1390. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « VII. M. Ferrari » pp. 157-193

Ferrari, soit-il doublé d’Hegel, est de n’en avoir aucune, même en acceptant le dogme de la fatalité que devait lui donner la science, c’est-à-dire (entendons-nous) celle du daguerréotype, qui réfléchit tous les corps existants au soleil, sauf leur couleur, leur mouvement, leur bruit, en d’autres termes, leur son, leur parfum, leur lumière ! […] À quoi bon et pourquoi cette marionnette moraliste dont j’entends les rires insolents ou les sanglots funèbres, à propos d’autres marionnettes innocentes et sans moralité, qui ne sont pas responsables de ce qu’elles font et dont l’imbécile se dit orgueilleusement : « Je suis leur conscience ?  […] Elle ne fait entendre ses lugubres révélations qu’à travers de longues rangées de tombeaux. […] Des révolutionnaires qui ne s’entendent plus, qui se battent entre eux sur des questions de révolution, bonne chance ! […] … Lui, lui qui entend si merveilleusement la castramétation historique des nations, démontre-t-il suffisamment que cet ordre, dans lequel il les pose et les oppose, soit une stratégie nécessaire ?

1391. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre vii »

Il me faut relever, au centre des champs égaux et par dessus les toits rustiques trop semblables, la « Tour du Meilleur », ce toit pointu qui veut pour lui seul la foudre des orages, afin d’en sauver les autres ; ce haut mur qui porte le faible lierre agrippé à ses pierres ; ce signe permanent de la hiérarchie désirable, qui rappelle aux fous qui l’oublient que nul homme ne s’élève sans degrés inégaux ; ce pignon, qui est détestable s’il n’est que celui de l’orgueil, mais divin dans sa mission, s’il ouvre ainsi qu’un grenier ou chacun peut puiser, suivant ses besoins, l’exemple, le conseil, le refuge ou l’aumône…‌ … Il ne faut pas aller au peuple en descendant, mais faire monter le peuple jusqu’à soi, et se mettre haut, sans morgue et simplement…‌ … Ma race est arrivée jusqu’à moi, sans tache et sans vulgarité ; ainsi dois-je la transmettre à l’avenir, dans la même intégrité, vêtue de même noblesse, dirigée dans le même sens de perfection…‌ Voilà des pensées, n’est-ce pas, qu’il n’était pas possible de laisser en dehors du concert des familles spirituelles, que des catholiques aux socialistes, nous avons entendues.‌ […] Comment faut-il entendre cette joie, dont le simple écho pour nous est déchirant ? […] Quelquefois, quand on ne s’entend plus, tant ça tombe, j’ouvre ma musette, je relis tes lettres et je n’ai plus peur.‌ […]   Dans cet enfant excellent, c’est la race même que vous entendez. […] Jules Véran me raconte qu’un soir, au Mort-Homme, quand l’heure de l’attaque approchait pour un régiment provençal et que les chefs inquiets d’un bombardement effroyable se demandaient si leur signal serait entendu, une voix entonna la Coupo santo de Mistral… C’est un hymne religieux, vous savez de quelle beauté, à la gloire de la terre et des traditions, et qui réunit dans l’enthousiasme tous les fils du génie provençal… Une voix entonna, tous s’y joignirent et, la minute sonnée, c’est aux accents de cette Marseillaise de Maillane que les soldais du 15e corps conquirent la citation dont ils sont aujourd’hui si fiers…

1392. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Appendices de, la deuxième édition »

Si maintenant, allant me promener, je pense à Pierre comme à un homme de taille normale et à Paul comme à un nain, si je laisse Paul à l’état de nain quand je me le figure revenu auprès de Pierre et reprenant sa conversation avec Pierre, nécessairement j’aboutirai à des absurdités ou à des paradoxes : je n’ai pas le droit de mettre en rapport Pierre demeuré normal et Paul devenu nain, de supposer que celui-ci puisse causer avec celui-là, le voir, l’entendre, accomplir n’importe quel acte, car Paul, en tant que nain, n’est qu’une représentation, une image, un fantôme. […] Je suppose, bien entendu, que le boulet atteint instantanément sa vitesse. […] Paul constate donc que l’horloge du système Terre devant laquelle il passe est en avance d’une heure sur la sienne ; bien entendu, il n’a pas à donner de coup de pouce à son horloge ; il enregistre le désaccord. […] Tout ce que la physique nous dira des constatations de Paul en voyage devra s’entendre des constatations que le physicien Pierre attribue à Paul lorsqu’il se fait lui-même référant et ne considère plus Paul que comme référé, — constatations que Pierre est obligé d’attribuer à Paul du moment qu’il cherche une représentation du monde qui soit indépendante de tout système de référence. […] Nous entendons par là, naturellement, qu’il ne veut plus y siéger.

1393. (1925) Promenades philosophiques. Troisième série

Il est une pierre, nommée pierre d’aigle, qui en renferme une autre que l’on entend sonner quand on l’agite. […] Reinach a une valeur que je n’entends certes pas abolir en lui opposant quelques objections. […] On a observé, on a réfléchi, et l’on est arrivé à cette conclusion que la plupart des hommes racontent beaucoup moins ce qu’ils ont vu que ce qu’ils ont cru voir, lis répètent beaucoup moins ce qu’ils ont entendu que ce qu’ils ont cru entendre. […] Nous voyons jouer presque tous les animaux, j’entends le jeu qui se termine par la victoire ou la défaite. […] Espérons que l’homme, un jour, lui fera entendre raison.

1394. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1894 » pp. 185-293

Un moment, on entend Coppée, dont le ricanement de la voix prend quelque chose de la pratique de Polichinelle : « Oh les jeunes ! […] Aussi, ai-je entendu la bombe, qui a fait le bruit d’un coup de canon, tiré à la cantonade. […] On n’y entend que du français passant par le rauque gosier juif d’un Francfortois, et cette exposition prend le caractère d’une exposition israélite. […] — Oui, répondait celui-là… mais, n’est-ce pas, on ne peut pas toujours entendre des cochonneries. […] J’entends la voix de Zola en bas.

1395. (1889) Derniers essais de critique et d’histoire

Il y a pourtant dans l’Ecole plusieurs endroits bien entendus et agréables. […] Que ne donnerait-on pas pour les entendre ! […] — On les entend ici aussi bien que chez les anciens tragiques. […] Il entendait les divers dialectes espagnols et déchiffrait les vieilles chartes catalanes. […] De quelle façon entend-il l’amour, le mariage, la paternité ?

1396. (1905) Études et portraits. Portraits d’écrivains‌ et notes d’esthétique‌. Tome I.

quand j’ai entendu ou lu quelques pages. […] Le dilettante a loué une loge pour entendre la Favorite. On lui fait entendre la Favorite, mais légèrement modifiée pour les besoins de la scène. […] C’est le début d’une mazurka de Chopin… Je chante faux… » ajouta-t-il, en voyant mon nouveau sourire. « Qu’importe, si je m’entends juste ? […] D’esprit dialogué, — car notre homme est exercé a dire et à entendre des « mots ».

1397. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Les Mémoires de Saint-Simon » pp. 423-461

On ne fait souvent que répéter ce qu’on a entendu ; on ne peut aller vérifier chez les notaires. […] L’idée des conseils à substituer aux secrétaires d’État pour l’administration des affaires, était de lui ; mais elle ne fut pas exécutée et appliquée comme il l’entendait. […] L’évêque de Fréjus, dans une visite à Mme de Saint-Simon, lui fit entendre qu’on saurait son mari avec plus de plaisir à Paris qu’à Versailles. […] Ici encore il est besoin de s’entendre. […] Il faut bien s’entendre sur le style de Saint-Simon ; il n’est pas le même en tous endroits et à toute heure.

1398. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « PARNY. » pp. 423-470

Ce fut à qui suivrait ce bon ton prétendu : En écrivant, chacun trembla d’être entendu ; Nos rimeurs à l’envi parlaient en logogriphes, Nos Saphos se pâmaient à ces hiéroglyphes, Nos plats journaux disaient : C’est le ton de la Cour ! […] Je noterai aussi le joli tableau intitulé le Réveil d’une mère ; on s’est étonné que ces jouissances pures d’une épouse vertueuse, ces chastes sourires d’un intérieur de famille aient trouvé, cette fois, dans Parny un témoin qui sût aussi bien les traduire et les exprimer ; mais c’est que les torts de Parny, s’il n’en avait eu que contre la pudeur et s’il ne s’était attaqué directement aux endroits les plus sacrés de la conscience humaine, ne seraient guère que ceux de l’époque qu’il avait traversée dès sa jeunesse. « Il ne faudrait pas trop nous juger sur certaines de nos œuvres, me disait un jour un vieillard survivant, avec un accent que j’entends encore : Monsieur, nous avons été trompés par les mœurs de notre temps. […] C’est assez dire d’ailleurs combien il n’eût rien entendu, selon toute probabilité, aux mérites sérieux, aux qualités d’élévation et de haute harmonie qui sont l’honneur de cette lyre moderne. […] C’est un souvenir des Mémoires que j’ose placer là ; quoiqu’il y ait des années que j’ai entendu ce passage, je ne crois pas citer trop inexactement. — Voici d’autres particularités que je tire de notes inédites de Chateaubriand écrites à Londres, en 1798, en marge d’un exemplaire de son Essai sur les Révolutions : « Le chevalier de Parny est grand, mince, le teint brun, les yeux noirs enfoncés, et fort vifs. […] On n’en a pas besoin, en attendant, pour conclure que Parny entendait le primitif un peu comme Macpherson, et pas du tout comme Fauriel.

1399. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIe entretien. Phidias, par Louis de Ronchaud (2e partie) » pp. 241-331

Il te fallut entendre combien les vaches avaient vêlé, et combien de fromages dorés étaient sortis des chaudières de la haute montagne où ils attendaient l’acheteur ambulant ; combien de meules de foin ou de seigle avaient embarrassé la cour et les granges ; combien de pigeons avaient doublé de nids dans le colombier ; combien de poires saines et savoureuses des vieux arbres étaient tombées au vent du midi et s’étalaient sur les rayons du fruitier pour l’hiver. […] Démosthène parlait là, et soulevait ou calmait cette mer populaire plus orageuse que la mer Égée, qu’il pouvait entendre aussi mugir derrière lui. […] Le poète, au contraire, et j’entends par poète tout homme qui crée des idées, en bronze, en pierre, en prose, en paroles ou en rythmes ; le poète remue ce qui est impérissable dans la nature et dans le cœur humain. […] Cela se fait, se voit, s’entend ; puis cela ne se fait plus, ne se voit plus, ne s’entend plus, jusqu’à la consommation des âges. […] J’entends les rumeurs qui s’en élèvent, les coups de marteau des tireurs de pierre dans les carrières de marbre du mont Pentélique, le roulement des blocs qui tombent le long des pentes de ses précipices, et toutes ces rumeurs qui remplissent de vie et de bruit les abords d’une grande capitale.

1400. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — I » pp. 146-160

Il faut entendre le cri d’enthousiasme de Joubert, à l’annonce de cette campagne ; il a secoué tous ses ennuis ; il écrit à son père, le 28 octobre (1795) : Ce n’est plus de repos qu’il faut que je vous parle, mais bien d’une nouvelle campagne que nous allons commencer dans quatre ou cinq jours avant l’hiver. 40000 hommes s’ébranlent pour attaquer l’armée austro-sarde, retranchée jusqu’aux dents ; 12000 grenadiers et chasseurs, commandés par le général Laharpe, commenceront la trouée ; je figurerai avec cette brave division. […] À l’entendre, ne dirait-on pas vraiment qu’il n’est soldat que comme Nicole prétendait être controversiste ? […] Entendez tout cela comme il convient, c’est-à-dire sobrement, et dans la juste application à notre sujet.

1401. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — III » pp. 174-189

À peine fûmes-nous, Joubert et moi, en relations et en conférences, que nous nous entendîmes. […] Je ne pus lire autre chose dans son regard oblique. » Sieyès avait déjà sans doute son arrière-penséeq, qui se trahit par ce mot fameux : « Il nous faut une tête et une épée. » Il entendait la tête d’un côté, — c’était lui, — l’épée de l’autre, un général quelconque : combinaison abstraite et de cabinet ! […] Aux premières balles qu’il entendit, il courut leur demander le secret du sort ; il voulut se dédommager par son intrépidité de grenadier de son irrésolution comme général.

1402. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mélanges religieux, historiques, politiques et littéraires. par M. Louis Veuillot. » pp. 44-63

Il éprouva tout d’abord pour ce guerrier, alors très-impopulaire, un sentiment qu’il ne prodiguait pas, lerespect ; et, dans la suite, engagé au plus fort des luttes, on l’a entendu dire : « Il y a deux hommes dont je ne dirai jamais de mal, le maréchal Bugeaud et M.  […] est-ce chrétien au sens où le monde l’entend ? […] C’est ce qui fait que je me pose cette question : Un journaliste catholique, comme l’entend M. 

1403. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Biot. Mélanges scientifiques et littéraires, (suite et fin.) »

Combien de fois n’avons-nous pas entendu M.  […] Cuvier, non encore partagé par la politique ou par l’administration et tout entier à la science, à la vie intellectuelle, prolongeait bien avant dans la nuit avec quelques amis dignes de l’entendre, sous les grands arbres du Jardin des Plantes, des entretiens « dignes de Platon !  […] J’ai entendu appeler cet article de M. 

1404. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Chateaubriand, jugé par un ami intime en 1803, (suite et fin) » pp. 16-34

Je suppose donc quelqu’un qui ait ce genre de talent et de facilité pour entendre les groupes, les familles littéraires (puisqu’il s’agit dans ce moment de littérature) ; qui les distingue presque à première vue ; qui en saisisse l’esprit et la vie ; dont ce soit véritablement la vocation ; quelqu’un de propre à être un bon naturaliste dans ce champ si vaste des esprits. […] Entendons-nous bien sur ce mot de groupe qu’il m’arrive d’employer volontiers. […] Ils ont des talents royaux, j’en conviens ; mais là-dessous, au lieu de ces âmes pleines et entières comme les voudrait Montaigne, est-ce ma faute si j’entends raisonner des âmes vaines ?

1405. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite et fin.) »

Ces folies qui maintenant remplissent tout un poëme n’entreront dans les œuvres de l’avenir que comme assaisonnement utile, et même la noblesse, la pureté qui sont maintenant bannies, seront bientôt rappelées avec d’autant plus d’enthousiasme. » Et cela ainsi entendu, et toutes réserves faites, il revenait avec plaisir sur Mérimée de qui il disait : « C’est vraiment un rude gaillard » ; et sur Béranger qu’il ne sépare jamais de lui54, et dont il saisit, dont il analyse tout, jusqu’aux moindres finesses, sans en rien perdre. […] — Et revenant sur ce chapitre des chants de guerre qu’on lui aurait voulu voir composer dans sa chambre et au coin de son feu en 1813, il souriait de pitié : « Écrire au bivouac, où la nuit l’on entend hennir les chevaux des avant-postes ennemis, à la bonne heure ! […] Il ressemble en cela à l’aigle dont le regard plane librement au-dessus des diverses contrées, et à qui il est indifférent que le lièvre sur lequel il se précipite coure en Prusse ou en Saxe. » C’est ainsi que Gœthe entendait le patriotisme sublime, le patriotisme du poëte.

1406. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. » pp. 31-51

Les officiers sont impuissants à maintenir l’ordre ; plusieurs y périssent : dans ces cohues d’étrangers de toute nation, il n’y avait, nous dit Polybe, que le mot frappe qui fût entendu de tous indistinctement et qui semblât de toute langue, parce qu’il était sans cesse en usage et pratiqué. […] Elle menace, si le désordre continue, d’emporter avec elle le Génie de la maison, le serpent noir qui dort là-haut sur des feuilles de lotus : « Je sifflerai, il me suivra, et, si je monte en galère, il courra dans le sillage de mon navire, sur l’écume des flots. » Tout ce qu’elle chante est harmonieux ; elle s’exprime dans un vieil idiome chananéen que n’entendent pas les Barbares ; ils n’en sont que plus étonnés. […] On entendait dans le bois de Tanit le tambourin des courtisanes sacrées ; et, à la pointe des Mappales, les fourneaux pour cuire les cercueils d’argile commençaient à fumer. » J’admire la conscience et le pinceau du paysagiste : mais de même que Salammbô m’a rappelé Velléda, je me rappelle inévitablement ici tant de belles descriptions de l’Itinéraire, et particulièrement Athènes contemplée du haut de la citadelle au lever du soleil : « J’ai vu du haut de l’Acropolis le soleil se lever entre les deux cimes du mont Hymette… » Le panorama de Carthage vue de la terrasse d’Hamilcar est un paysage historique de la même école, et qui accuse le même procédé ; ce qui ne veut pas dire qu’il ne soit pris également sur nature, du moins en ce qui est des lignes principales.

1407. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. (Suite et fin.) »

Bignon vit, en passant à Dresde, M. de Senfft, s’entendit avec lui sur l’état des affaires dans le grand-duché, et en reçut des informations utiles. […] Bignon, a donné les plus curieux détails, et les plus circonstanciés, sur les ladreries, mesquineries et lésineries avérées de cet archevêque ambassadeur qui ne savait faire que de belles phrases, s’endormir au Conseil et dans toutes les cérémonies, et qui ne voulut jamais qu’on prît la peine d’approprier sa chapelle pour y entendre une seule fois la messe42. Singulier mélange, en effet, que cet abbé de Pradt, instruit de tant de choses et qui croyait s’entendre à toutes ; homme d’Église qui l’était si peu, qui savait à fond la théologie, et qui avait à apprendre son catéchisme ; publiciste fécond, fertile en idées, en vues politiques d’avenir, ayant par moments des airs de prophète ; écrivain né des circonstances, romantique et pittoresque s’il en fut ; le roi des brochuriers, toujours le nez au vent, à l’affût de l’à-propos dans les deux mondes, le premier à fulminer contre tout congrès de la vieille Europe ou à préconiser les jeunes républiques à la Bolivar ; alliant bien des feux follets à de vraies lumières ; d’un talent qui n’allait jamais jusqu’au livre, mais qui avait partout des pages ; habile à rendre le jeu des scènes dans les tragi-comédies historiques où il avait assisté, à reproduire l’accent et la physionomie des acteurs, les entretiens rapides, originaux, à saisir au vol les paroles animées sans les amortir, à en trouver lui-même, à créer des alliances de mots qui couraient désormais le monde et qui ne se perdaient plus ; et avec cela oublieux, inconséquent, disparate, et semblant par moments sans mémoire ; sans tact certainement et sans goût ; orateur de salon, jaseur infatigable, abusant de sa verve jusqu’à l’ennui ; s’emparant des gens et ne les lâchant plus, les endoctrinant sur ce qu’ils savaient le mieux ; homme à entreprendre Ouvrard sur les finances, Jomini sur la stratégie, tenant tout un soir, chez Mme de Staël, le duc de Wellington sur la tactique militaire et la lui enseignant ; dérogeant à tout instant à sa dignité, à son caractère ecclésiastique, avec lequel la plupart de ses défauts ou, si l’on aime mieux, de ses qualités se trouvaient dans un désaccord criant ; un vrai Mirabeau-Scapin, pour parler comme lui, un archevêque Turpin et Turlupin.

1408. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, par M. J. Zeller. Et, à ce propos, du discours sur l’histoire universelle. (suite.) »

On n’a jamais mieux fait entendre depuis Pascal que c’est là une nouvelle conduite, un nouvel ordre moral qui commence. […] On n’entend plus de blasphème ; l’impiété tremble devant lui. […] A l’entendre nous développer le secret de ce peuple-roi dans sa discipline, dans son ordre et sa tactique, dans son courage exempt du faux point d’honneur, comparer ensemble la phalange macédonienne et la légion romaine, puis pénétrer dans les conseils de son Sénat, dans cette conduite si forte au dehors, si ferme au dedans, Bossuet se montre historien philosophe, comme auparavant il était historien prophète.

1409. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires du comte Beugnot »

Il s’étonne presque de trouver Rœderer plus lettré, plus entendu aux choses de goût, moins étranger à la culture des arts, qu’il ne l’avait cru. […] Louis XVIII n’en voulut pas même entendre de sa bouche la lecture avant la séance royale ; l’heure pressait : « Nous avons confiance en vous, lui dit le roi, et je sais que vous êtes passé maître en ce point. » Cet auguste préambule de la Charte fut encore un des succès anonymes ou pseudonymes de celui qui en eut plus d’un de cette nature en 1814. […] Beugnot s’entend à draper les hommes de sa connaissance aussi finement qu’Hamilton médisait des femmes.

1410. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — Note »

Les sources se réunissent en un torrent qu’au milieu même de l’hiver nous pouvons entendre durant la nuit et qui, pendant la saison où le soleil pénètre jusque dans les ravins des glaciers, se précipite avec violence et agite au loin, malgré le calme de l’air, le vaste bassin où il s’engloutit. […] « Dans ces siècles d’affectation et d’apparence, il aurait pu arriver que je fusse le seul qui entendît, qui voulût entendre ces regrets profonds que l’étude des choses inspire, seule voie sans doute qui puisse ramener les hommes au bonheur.

1411. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « GLANES, PÖESIES PAR MADEMOISELLE LOUISE BERTIN. » pp. 307-327

En ce bel hymne, à propos des filles de Délos si gracieuses à charmer, on lit ce ravissant passage : « … Elles savent imiter les chants et les sons de voix de tous les hommes, et chacun, à les écouter, se croirait entendre lui-même, tant leur voix s’adapte mélodieusement ! […] De même de Chloé lorsqu’on entend la voix, En mille questions tous parlent à la fois : On dirait une ruche où chaque travailleuse A la tâche du jour mêle sa voix joyeuse. […] J’entends surtout parler en ceci des poëtes lyriqués ou du moins non dramatiques ; je laisse le théâtre à part ; on verra tout à l’heure pourquoi.

1412. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mémoires de madame de Staal-Delaunay publiés par M. Barrière »

On reviendra, si je ne me trompe, à ces femmes du xvie  siècle, à ces contemporaines des trois Marguerite, et qui savaient si bien mener de front les affaires, la conversation et les plaisirs : « J’ai souvent entendu des femmes du premier rang parler, disserter avec aisance, avec élégance, des matières les plus graves, de morale, de politique, de physique. » C’est là le témoignage que déjà rendait aux femmes françaises un Allemand tout émerveillé, qui a écrit son itinéraire en latin, et à une date (1616) où l’hôtel Rambouillet ne pouvait avoir encore produit ses résultats253. […] Le séjour au château de Silly chez une amie d’enfance, l’arrivée du jeune marquis, son indifférence naturelle, la scène de la charmille entre les deux jeunes filles qu’il entend sans être vu, sa curiosité qui s’éveille bien plus que son désir, l’émotion de celle qui s’en croit l’objet, son empire toutefois sur elle-même, la promenade en tête à tête où l’astronomie vient si à propos, et cette jeune âme qui goûte l’austère douceur de se maîtriser, cette suite légère compose tout un roman touchant et simple, un de ces souvenirs qui ne se rencontrent qu’une fois dans la vie, et où le cœur lassé se repose toujours avec une nouvelle fraîcheur. […] Je ne daignois parler, puisqu’il ne m’entendoit pas ; il me semble même que je ne pensois plus. » Notons ce dernier trait ; il rappelle le vers de Lamartine s’adressant à la Nature : Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé.

1413. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXIV. Arrestation et procès de Jésus. »

Quand un homme est accusé de « séduction », on aposte deux témoins, que l’on cache derrière une cloison ; on s’arrange pour attirer le prévenu dans une chambre contiguë, où il puisse être entendu des deux témoins sans que lui-même les aperçoive. […] S’il persiste, les témoins qui l’ont entendu l’amènent au tribunal, et on le lapide. […] Il pensait que Jésus ne pouvait l’entendre, et il ne songeait pas que cette lâcheté dissimulée renfermait une grande indélicatesse.

1414. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIX. Cause et loi essentielles des variations du gout littéraire » pp. 484-497

J’entends que dans une littérature, au moment même où décroît la tendance régnante, d’autres tendances coexistantes croissent en vigueur, montent de l’ombre à la lumière, se préparent à devenir à leur tour dominantes. J’entends que les écrivains continuent leurs prédécesseurs en même temps qu’ils les contredisent. J’entends qu’ils sont leurs héritiers autant que leurs adversaires.

1415. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXII » pp. 355-377

Vous entendrez dire que je vis hier le roi. […] Les choses ne devaient pas tourner comme l’évêque de Condom, madame de Maintenon, madame de Sévigné, et leurs nobles amies l’avaient entendu. […] Je crois que vous m’entendez. » Pendant cette comédie, madame de Maintenon donnait ses soins au duc du Maine à Barèges.

1416. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Marie-Antoinette. (Notice du comte de La Marck.) » pp. 330-346

Nous avons entendu Lauzun l’autre jour expliquer son aventure à sa manière : le fait est que, d’une manière ou d’une autre, il échoua. […] Au reste, lorsqu’il s’agit de ces particularités intimes et secrètes sur lesquelles il est si aisé d’avoir maint propos et si difficile d’acquérir une certitude, je crois qu’il est bon de rappeler le mot si sensé que disait un jour Mme de Lassay (fille naturelle d’un Condé) à son mari qu’elle entendait discuter à fond et trancher sur la vertu de Mme de Maintenon : elle le regarda avec étonnement et lui dit, d’un sang-froid admirable : « Comment faites-vous, monsieur, pour être si sûr de ces choses-là ?  […] Nous ne sommes pas ici des puristes constitutionnels : ce qu’elle voulait, ce n’était pas la Constitution de 91 assurément, c’était le salut du trône, celui de la France comme elle l’entendait, l’honneur du roi et le sien, et celui de sa noblesse, l’intégrité de l’héritage à léguer à ses enfants ; ne lui demandez pas autre chose.

1417. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Despréaux, avec le plus grand nombre des écrivains de son temps. » pp. 307-333

Toutes les fois que ce misantrope, si honnête homme, entendoit prononcer le nom de ce poëte, « Il faudroit, disoit-il, l’envoyer en galère, couronné de lauriers, ou bien le mener, lui & tous les satyriques du monde, rimer dans la rivière ». […] Linière mourut ferme dans ses principes, aussi bien que Saint-Pavin, quoiqu’on ait publié qu’il s’étoit converti au bruit d’une voix effrayante qu’il avoit cru entendre à la mort de Théophile. […] Il craignit de trouver les courtisans plus disposés à rire qu’à l’entendre.

1418. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Seconde Partie. De l’Éloquence. — Éloquence de la chaire. » pp. 205-232

Après avoir prêché son premier avent à Versailles, il reçut cet éloge de la bouche même de Louis XIV : Mon père, quand j’ai entendu les autres prédicateurs, je suis content d’eux ; pour vous, toutes les fois que je vous ai entendu, j’ai été mécontent de moi-même. […] Ils prêchoient tous les trois à différentes heures, un vendredi saint, & voulurent s’aller entendre alternativement.

1419. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XIV. »

On lisait celle d’un certain Marcius, que Tite-Live appelle un devin illustre ; et, dans la citation rajeunie qu’il en fait, on peut reconnaître cette ancienne voix du sanctuaire que nous avons entendue de la bouche de Pindare. […] On vit à côté de la vie. » On croirait entendre une réprimande du vieux Caton à des oisifs, un de ces axiomes martelés pesamment pour être mieux retenus. […] » Il avait entendu ces vers, mêlés sans doute à la terreur de la prédiction qui tout à coup éclatait dans le palais de Priam : HÉCUBE.

1420. (1915) Les idées et les hommes. Deuxième série pp. -341

Mais il entend réaliser ensemble toutes choses et lui. […] Ils inventèrent, dans ce désordre, une harmonie qu’on n’avait pas encore entendue et que, du reste, plusieurs personnes continuèrent de ne pas entendre. […] Avec Homère, il s’entend à merveille. […] Il entendra la messe. […] … » On l’entend.

1421. (1912) Pages de critique et de doctrine. Vol I, « I. Notes de rhétorique contemporaine », « II. Notes de critique psychologique »

Le jugement est l’écho de celui que j’ai entendu moi-même M.  […] Je n’ai jamais entendu de conversation comparable à celle de Barbey d’Aurevilly. […] Le petit livre que Barbey a consacré au Dandysme, en 1844, fait comprendre ce qu’il entendait par ce mot. […] Je prends ce terme, bien entendu, dans sa légitime acception. […] Jeune homme, entendez bien : un demi-volume.

1422. (1911) Études pp. 9-261

Il est parmi le bruit qu’il entend et il en note avec subtilité la saveur propre. […] Je ne voudrais pas être de ceux qui bientôt l’entendront avec seulement de l’admiration. […] comme j’entends sa plainte ! […] On n’entend que sa parole plaintive, qui va, distincte, sans le soutien d’aucun accord étouffe, d’aucun assourdissement harmonique. […] entre ceux de La Porte Étroite, sinon qu’ils s’entendent tous pour rendre de plus en plus sensible le renoncement d’Alissa ?

1423. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre IV. Addison. »

Il songe à la vie future, mais il n’oublie pas la vie présente ; il appuie la vertu sur l’intérêt bien entendu. […] Elle humanise Dieu : n’est-ce pas la seule voie de le faire entendre ? […] Mais s’il entendait Addison lui-même prononcer ce que je viens de traduire, il ne rirait plus. […] D’abord l’art de se faire entendre, du premier coup, toujours, jusqu’au fond, sans peine pour le lecteur, sans réflexion, sans attention ! […] Le son était infiniment doux et modulé en une variété de tons d’une mélodie inexprimable, tout à fait différente de ce que j’avais jamais entendu.

1424. (1896) Écrivains étrangers. Première série

Il me sembla entendre l’hymne de joie des anges accompagnant le retour au ciel de Notre-Seigneur. […] Et tandis qu’ils parlaient, nous entendions des voix, plus profondes, qui n’étaient à personne. […] Balfour sur d’autres termes mal employés ; après quoi il lui reproche de ne rien entendre aux sciences naturelles. […] C’est un homme doux et respectueux, que jamais personne n’a entendu émettre un mot de blâme sur qui ou quoi que ce soit. […] C’est ce que son chancelier ne lui dit pas ; mais on devine que tous deux l’entendent bien ainsi.

1425. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « M. Denne-Baron. » pp. 380-388

Cela se vit vers 1811, lorsque Millevoye chantait et qu’on entendait le prélude encore éloigné, mais déjà sensible, de ce monde élégiaque nouveau, qui n’aura sa puissance de génie qu’avec Lamartine. […] Semblable au vent qui roule une feuille d’automne, On entend le Temps seul, d’une aile monotone,         Balayer la cendre des rois !

1426. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XIV. Moralistes à succès : Dumas, Bourget, Prévost » pp. 170-180

« Rien ne peut faire que je n’aie pas aimé, cherché et dit la vérité. » Vous entendez : la vérité. […] J’entends Prévost me répondre : — Vous me cherchez une mauvaise querelle.

1427. (1898) Le vers libre (préface de L’Archipel en fleurs) pp. 7-20

Vous trouverez peut-être que ce sonnet amalgame bien des motifs de différentes catégories ; peut-être le qualifierez-vous de rastaquouère sur le Parnasse — j’entends celui d’Apollon ; peut-être le trouverez-vous parfait et bien à sa place dans le livre. […] Quant à savoir son métier, oui, il faut le savoir et à fond, mais pas comme ils l’entendent.

1428. (1865) Du sentiment de l’admiration

C’est qu’un tel élève a compris le secret des hautes études, ce secret que nous cherchons à vous faire entendre et qu’il vous est trop facile d’oublier. […] J’entends déjà vos réclamations « prolonger pendant les vacances les soucis de l’année scolaire, c’était pure folie. » J’accepte ce mot comme un éloge à l’adresse des écoliers d’autrefois, « dulce est desipere in loco », a dit Horace. « La folie est charmante à son heure. » Je dirai plus.

1429. (1765) Essais sur la peinture pour faire suite au salon de 1765 « Mes pensées bizarres sur le dessin » pp. 11-18

Je n’ai jamais entendu accuser une figure d’être mal dessinée, lorsqu’elle montrait bien [dans] son organisation extérieure, l’âge et l’habitude ou la facilité de remplir ses fonctions journalières. […] Le contraste mal entendu est une des plus funestes causes du maniéré.

1430. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Casanove » pp. 192-197

Ossian, chef, guerrier, poëte et musicien, entend frémir pendant la nuit les arbres qui environnent sa demeure, il se lève, il s’écrie : " âmes de mes amis, je vous entends ; vous me reprochez mon silence. " il prend sa lyre, il chante, et lorsqu’il a chanté, il dit : " âmes de mes amis, vous voilà immortelles, soyez donc satisfaites, et laissez-moi reposer. " dans sa vieillesse, un barde aveugle se fait conduire entre les tombeaux de ses enfans ; il s’assied, il pose ses deux mains sur la pierre froide qui couvre leurs cendres, il les chante.

1431. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 15, observations concernant la maniere dont les pieces dramatiques étoient représentées sur le théatre des anciens. De la passion que les grecs et les romains avoient pour le théatre, et de l’étude que les acteurs faisoient de leur art et des récompenses qui leur étoient données » pp. 248-264

On n’y entend plus que chanter et jouer des instrumens. […] Il les faisoit appeller par ce domestique que les romains tenoient auprès de leurs personnes pour parler pour eux dans les occasions où il falloit parler haut afin de se faire entendre.

1432. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 18, reflexions sur les avantages et sur les inconveniens qui resultoient de la déclamation composée des anciens » pp. 309-323

Premierement l’usage des anciens épargnoit aux comediens tous les contre-sens que les plus intelligents donnent quelquefois aux vers qu’ils recitent sans les bien entendre. […] Voilà ce qui arrive tous les jours sur les théatres modernes, où des comediens dont quelques-uns n’ont jamais étudié même leur métier, composent à leur fantaisie la déclamation d’un rolle dont souvent ils n’entendent pas plusieurs vers.

1433. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XVI. Mme de Saman »

Sans le bas-bleuisme, le fléau du temps qui vient de plus en plus sur nous, nulle femme, pas même les bergères, étendues sur l’herbe tendre, … Ne conterait ses amours À qui les voudrait entendre ! […] Sainte-Beuve, qui aimait à conduire ces eaux corrompues dans les détours sinueux des coteaux modérés de sa littérature, en avait filtré quelques gouttes dans son livre sur Chateaubriand, écrit — pour déshonorer l’auteur des Martyrs — après sa mort, bien entendu.

1434. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Henri Rochefort » pp. 269-279

Il avait essayé du rire, du rire à large fente, et il s’en est fait un comme à la scène on se fait une tête ; car naturellement, si j’en crois le livre que j’ai sous les yeux, il n’est pas un esprit gai ; il n’a pas la promptitude, et la sveltesse, et le pétillement et la couleur rose qui font ce qu’on appelle la gaîté, du moins comme on l’entend en France, le seul pays où on la comprenne. […] … Eh bien, cette plaisanterie, qui est, en fin de compte, tout le livre, cette plaisanterie qui pourrait être originale et appartenir au tour d’esprit de l’écrivain, cette plaisanterie qui n’est pas française, puisqu’elle n’est pas gaie, il me semble que j’en connais l’accent, et qu’ailleurs je l’ai entendue !

1435. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Les honnêtes gens du Journal des Débats » pp. 91-101

Qu’entendent-ils par honnêteté, ces moralistes semés par nous dans les plates-bandes du Journal des Débats, et qui sont venus en une nuit, comme des champignons ; qu’entendent-ils par l’honnêteté, qu’ils invoquent et dont ils se réclament ?

1436. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Dupont-White »

Dupont-White, qui, avec son nom mêlé de français et d’anglais, est, dit-on, un Suisse, entend probablement, quand il dit l’État, la constitution politique d’une patrie, et, puisqu’il écrit en français et ne parle pas expressément de Genève, il entend par l’État la France.

1437. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XIV. Panégyrique de Trajan, par Pline le jeune. »

On a dit que pour le mériter, il n’avait manqué à Trajan que de ne pas l’entendre. […] Alors ils goûteront le plaisir d’entendre ce que l’orateur ne dit pas, et de lui surprendre, pour ainsi dire son secret.

1438. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre V. Du gouvernement de la famille, ou économie, dans les âges poétiques » pp. 174-185

Ce que Tacite dit des Germains peut s’entendre de tous les premiers peuples barbares ; et nous savons que chez les anciens Romains le père de famille avait droit de vie et de mort sur ses fils, et la propriété absolue de tout ce qu’ils pouvaient acquérir, au point que jusqu’aux Empereurs les fils et les esclaves ne différaient en rien sous le rapport du pécule. […] Ainsi, dans les temps héroïques on put dire avec vérité, comme Homère le dit d’Ajax, le rempart des Grecs (πύργος Αχαιών), que seul il combattait contre l’armée entière des Troyens68 : on put dire qu’Horace soutint seul sur un pont le choc d’une armée d’Étrusques ; par quoi l’on doit entendre Ajax, Horace, avec leurs compagnons ou serviteurs.

1439. (1824) Épître aux muses sur les romantiques

Quand on sait l’esclavon, l’on comprend leur système , Et s’ils étaient d’accord je l’entendrais moi-même ; Mais un adepte enfin m’ayant endoctriné, Je vais dire à peu près ce que j’ai deviné. […] De l’office au boudoir, je veux me faire lire ; J’entends que mon libraire élève mes écrits À treize éditions, dussé-je en payer dix.

1440. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XVII. »

« Heureuse et trop fortunée région, qui vois à la surface de l’Océan les derniers pas du soleil incliné, et entends frémir la roue de son char abaissé dans les flots, toi, Bétique ! […] « Ô toi, dit-il, soit que, porté à travers les cieux sur le char de la gloire, à la hauteur où montent les grandes âmes, tu dédaignes la terre et te ries des tombeaux, soit que tu habites, aux bords élyséens, le bocage de paix où s’assemblent les guerriers de Pharsale, et que les Pompée et les Caton accompagnent ton noble chant ; soit que, fière et sacrée, ton ombre ignore le Tartare, et que tu entendes de loin les supplices des méchants, et n’aperçoives que derrière toi Néron, pâle sous le regard irrité de sa mère, apparais-nous dans ton éclat !

1441. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre V. Swift. » pp. 2-82

Ces gens-là n’auront pas assez d’esprit pour suivre une belle déduction ou pour entendre un principe abstrait. […] John Partridge, éminent praticien en cuirs, médecine et astrologie. » Vous entendez d’avance les réclamations du pauvre Partridge. […] L’esprit positif ne peut ni l’aimer ni l’entendre ; il n’y voit qu’une machine ou une mode et ne l’emploie que par vanité ou convention. […] Les filles en faute entendraient souvent les louanges de Vanessa sonner à leurs oreilles. […] Je l’ai entendu moi-même donner ordre de fouetter un de ses pages, qui avait été chargé pour cette fois de faire laver le parquet, et qui malicieusement n’avait point rempli cet office.

1442. (1864) Physiologie des écrivains et des artistes ou Essai de critique naturelle

Mme de Thianges en demande copie, pour le faire entendre au roi. […] Voilà le sous-entendu, qui s’entend fort bien. […] Comme je suis distrait, on met tout sur le compte de la distraction, et cependant j’entends à peine celui qui parle doucement ; j’entends les sons, mais pas les mots. […] « De quel chagrin j’étais saisi, écrit-il, quand à côté de moi un de mes amis entendait de loin une flûte, et que, moi, je n’entendais rien ! quand il entendait chanter un pâtre, et que, moi, je n’entendais rien !

1443. (1905) Études et portraits. Sociologie et littérature. Tome 3.

Il n’entend point parler de supériorités viagères. […] Mais que faut-il entendre par là ? […] Vous croyez qu’à vous entendre, vous avez vaincu un préjugé. […] Il ne s’agit pas, on l’entend bien, du doute, inséparable de la jalousie. […] malheureusement plus sentimentale que pieuse — d’entendre la messe de minuit sous les voûtes de l’église Saint-Malo de Valognes.

1444. (1876) Romanciers contemporains

Dans les heures d’angoisse, il invoque leur affection, il croit les entendre, les revoir ; il les entend, il les revoit, il leur tend les bras, il s’entretient avec eux. […] Et le mari qui les voit sans les entendre, car là il suffit de ne pas entendre (ailleurs ni il ne verra, ni il n’entendra), le mari admire sa femme et son associé : — Comme elle est jolie ! […] Le poète parle et entend une langue ignorée du vulgaire. […] On n’entendait rien que le grincement des plumes sur le papier. […] Mais elle se retrouve, et l’on entend les cris de la chair qui proteste.

1445. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome IV pp. 5-

En effet tout esprit un peu logicien reconnaîtra que de l’énonciation claire du sujet qu’il va traiter résultent l’idée générale qu’on en conçoit, et la curiosité qu’il fait naître d’en entendre le développement. […] Ainsi nous entendons Virgile dire, avant de commencer : « Musa, mihi causas memora. […] « Répands sur mes écrits ta force et ta clarté : « Que l’oreille des rois s’accoutume à t’entendre. […] Dans la seconde version vous croirez entendre le trot de cet escadron même, tant l’harmonie imitative en est frappante. […] Écoutons la voix des temps moins reculés, nous entendons les muses latines célébrer Homère sur la lyre du docte Horace : ouvrons l’oreille aux maîtres qui ont illustré nos jours, nous entendons encore renouveler ses hommages par Delille, par Lebrun, et par Ducis.

1446. (1912) Réflexions sur quelques poètes pp. 6-302

Alors Vénus se plaint de Folie, et Jupiter consent à entendre leur différend. […] Lisez maintenant ces quatrains, qui sont du dernier féminisme, ou je n’y entends rien. […] Dans un décor de toile et de carton-pâte, au milieu des concetti et des pointes, il trouve moyen de faire entendre parfois la voix naturelle des choses. […] Il est entendu que nous ne nous y arrêterons pas longtemps : il n’y a que de rares fleurs à cueillir. […] m’entends-tu ?

1447. (1891) Esquisses contemporaines

Entendez sa réponse : « Nul ne sait exactement ce qui lui est réservé. […] Nous n’entendons point dire par là qu’il y ait deux vérités éternellement incompatibles. […] C’est évidemment ainsi que l’entendait, Scherer ; c’est encore ainsi que paraît l’entendre M.  […] Là nous entendons le disciple qui avait vu de ses yeux, qui de ses mains avait touché le Maître. […] Par où il faut entendre l’inspiration plénière.

1448. (1902) Le problème du style. Questions d’art, de littérature et de grammaire

Albalat ne spécifie jamais ce qu’il entend par imitation, on ne sait que dire. […] Voyez sa désinvolture à railler Buffon, sans le nommer, mais en laissant entendre qu’il n’est pas, lui, M.  […] Albalat entend le style sans rhétorique ; à cette idée, il songe à Voltaire . […] On entend but traité comme butte ; las devient lasse. […] J’ai entendu, pour moudre, « mouler le café ».

1449. (1889) Les artistes littéraires : études sur le XIXe siècle

Qu’est-ce précisément qu’une plus-value humaine et que faut-il entendre par là ? […] Quant à la chose elle-même, selon la manière dont elle est entendue, nous ne croyons pas qu’elle soit à tel point méprisable et qu’elle doive entraîner des résultats néfastes. […] Ses amis lui ont entendu faire à ce propos les plus extraordinaires professions de foi : « L’histoire, l’aventure d’un roman, ça m’est bien égal. […] Personne n’a la satisfaction de l’entendre geindre. […] Conception critiquable, et cependant de l’idéalisme le plus quintessencié, dès qu’on l’entend comme l’entendait Baudelaire.

1450. (1880) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Première série pp. 1-336

Je sais un peu ce que c’est et combien de gens l’entendent. […] Et nous ne connaissons guère Pascal, j’entends le Pascal des Pensées. […] Havet, tout le monde, en 1670, entendait les jésuites. […] « Je crois que nous ne nous entendons pas sur l’article du peuple, que vous croyez digne d’être instruit. J’entends par peuple la populace qui n’a que ses bras pour vivre.

1451. (1913) Les livres du Temps. Première série pp. -406

S’il n’y a pas de Pitié Suprême, le monde est odieux : c’est entendu. […] se me sabien entendre ! […] Il est entendu que pour le chrétien tout ce qui arrive dans le monde est providentiel. […] Tout était plein de fleurs et d’oiseaux ; on entendait chanter les rossignols. […] Entendons-nous : il est, pratiquement, dans la vie, le libéralisme et la tolérance mêmes.

1452. (1913) Les idées et les hommes. Première série pp. -368

On entend un piano ; un peu plus loin, une clarinette. […] S’il y a des apôtres parmi nous, qu’on les entende ! […] Ce n’est pas tout : de la sentir, de la goûter, de l’entendre. […] Que n’entendais-je pas ? […] Qu’est-ce qu’on entend par là ?

1453. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre II. Le théâtre. » pp. 2-96

Nous entendons à travers les drames comme à travers l’histoire du temps ce grondement farouche : le seizième siècle ressemble à une caverne de lions. […] Au-delà de tout « est la tombe muette, où l’on n’entend plus rien, ni le pas joyeux de son ami, ni la voix de son amant, ni le conseil affectueux de son père, où il n’y a plus rien, où tout est oubli, poussière, obscurité éternelle. » Encore s’il n’y avait rien ! […] En premier lieu, ils voient l’événement, quel qu’il soit et tel qu’il est ; j’entends par là qu’ils l’ont présent intérieurement avec les personnages et les détails, beaux et laids, même plats et grotesques. […] seigneur. —  Avez-vous bien le courage, pour une pauvre stérile louange que vous n’entendrez jamais, de renoncer à ces chères espérances ? […] Elle chante — les plus tristes choses que jamais une oreille ait entendues, —  puis soupire et chante encore.

1454. (1899) La parade littéraire (articles de La Plume, 1898-1899) pp. 300-117

Vous vous habituerez aux visages, aux maintiens et aux voix ; je n’hésiterai pas à vous faire part des papotages qu’on y entend, des intrigues qui se nouent, des ambitions cyniques ou ingénues qui s’y dissimulent. […] Mais les suaves chants d’amour n’embellissent pas seulement les hommes qui les entendent, ils embellissent aussi le poète qui les chante. […] Je voudrais les voir tirés à des milliers d’exemplaires, je voudrais les entendre bercer l’âme enfantine et puissante du peuple. […] Dans ses œuvres de prose, vous ne l’entendez discuter que sur la versification, les affinités de la musique et des lettres, et même sur la typographie. […] , les trois jeunes écrivains belges » ; cette phrase semblerait indiquer que mes interlocuteurs ne m’auraient pas entendu.

1455. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Conduite de l’action dramatique. » pp. 110-232

On entend par son exposition, l’état où se trouvent les personnages et sur lequel ils délibèrent ; on entend par son nœud, les intérêts ou les sentiments qu’un des personnages oppose aux désirs des autres ; et enfin par son dénouement, l’état de fortune ou de passion où la scène doit les laisser : après quoi, l’auteur ne doit plus perdre de temps en discours qui, tout beaux qu’ils seraient, auraient du moins la froideur de l’inutilité. […] On n’entend pas ici ces délibérations tranquilles où se balancent de grands intérêts, de sang-froid, et avec toute la liberté de l’esprit et de la raison : mais on entend plus particulièrement ces chocs violents de passions qui se combattent réciproquement, ces cruelles irrésolutions du cœur placées entre deux partis également douloureux pour lui. […] En étudiant les hommes dans différentes situations, il les entendit chanter réellement dans toutes les occasions importantes de la vie ; il vit encore que chaque passion, chaque affection de l’âme avait son accent, ses réflexions, sa mélodie et son chant propre. […] je vous entends ! […] Celui-ci est une déclamation notée, soutenue et conduite par une simple basse, qui se faisant entendre à chaque changement de modulation, empêche l’acteur de détonner.

1456. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Shakespeare »

Pour peu qu’on ne soit pas un cuistre, on entend aisément et on peut traduire toujours bien ce qui est de pur génie ; car le génie, comme le feu, brille malgré tout, et, comme le feu, dévore tout obstacle, même celui d’une langue opaque, mal maniée par un traducteur. […] Il y a cette nourrice de Juliette, la sœur des Joyeuses Commères de Windsor, vraie comme l’Antique dans Homère, comique comme le Moderne dans Rabelais, et qui montre comment les grands poètes de l’idéal, quand ils s’en mêlent, entendent la réalité ! […] Je ne veux pas enfin d’un Shakespeare que Carlyle, enivré de ce froid vin du Rhin du Panthéisme allemand, a panthéisé, et dont il a dit, pour le louer, après Novalis, qu’il était une des voix de la Nature , laquelle ne se sait point chanter et ne s’entend pas, quand elle chante. Shakespeare, l’ancien Shakespeare, était seulement la voix de Shakespeare, mais il se savait et s’entendait chanter comme un homme, comme un de ces roseaux pensants que Pascal, qui vaut bien Novalis, trouvait plus grands que l’univers, quand même l’univers les tuerait ! […] ce n’est point le tranchant de la conversion qui coupe tout, et fait deux parts de l’homme, séparant la moitié qui doit vivre de la moitié qui doit mourir, ce n’est pas le coup foudroyant de cette conversion comme l’entendent les hommes religieux, qu’a voulu exprimer Shakespeare.

1457. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre I. De l’action »

,     Lassé d’entendre un tel lutin,     Vous le renvoie à la campagne     Chez ses parents…157 Esope rencontre parfois le trait original : « Un rat de terre, par un mauvais destin, devint l’ami d’une grenouille. […] C’est sa cognée, et, la cherchant en vain, Ce fut pitié là-dessus de l’entendre. […] Et là-dessus l’imagination travaille ; le poëte entend déjà cette voix qui va gronder.) […] « … Je ne sais pas, Romains, si vous m’entendez, mais afin de me faire mieux entendre, je dis que je suis étonné comment un homme qui retient un bien qui n’est pas à lui peut dormir en repos ; puisqu’il voit tout à la fois qu’il a offensé les dieux, scandalisé les voisins, perdu ses amis, fait ce que ses ennemis souhaitaient, porté préjudice à ceux qu’il a pillés ; et enfin j’y trouve qu’il a mis sa personne en très-grand danger, puisque enfin le même jour qu’il a proposé de m’ôter mon bien je songe à lui ôter la vie… » (Rhétorique et bavardage plat. […] Il ne se traîne pas dans la prose plate comme Cassandre, il atteint à chaque pas les audaces de la poésie, et vous entendez la parole solennelle et véhémente de la juste indignation contenue.

1458. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIVe entretien. Cicéron (3e partie) » pp. 257-336

La France, comme à l’ordinaire, n’entend plus rien que le bronze, quand ce bronze sonne de la gloire. […] « Car qui peut nier que la sagesse n’ait été connue anciennement, et déjà nommée de ce beau nom par où l’on entend la connaissance des choses, soit divines, soit humaines, de leur origine, de leur nature ?  […] « Nous sommes les seuls animaux qui entendons la navigation, et qui, par là, nous soumettons ce que la nature a fait de plus violent, la mer et les vents. […] Mais, celles-là, nous les voyons, entendons, goûtons, sentons, touchons. […] Par république il entendait, non seulement la chose publique, mais la politique tout entière, c’est-à-dire l’étude de cet admirable et divin mécanisme moral par lequel les hommes s’organisent en société, se maintiennent en ordre, grandissent en prospérité, se perpétuent en durée, en influence et en gloire.

1459. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Robert » pp. 222-249

Je cherchais à me distraire de ton reproche, et c’est ici que je t’entends plus fortement. […] Très-bon petit tableau, mais exemple de la difficulté de décrire et d’entendre une description. […] C’est le cas de la musique vocale et de la musique instrumentale : nous entendons ce que dit celle-là, nous fesons dire à celle-ci ce que nous voulons. […] Je n’y entends rien ; et il faut convenir que si la chose n’était pas faite, on la jugerait impossible. […] Dans les transports violens de la passion, l’homme supprime les liaisons, commence une phrase sans la finir, laisse échapper un mot, pousse un cri et se tait ; cependant j’ai tout entendu ; c’est l’esquisse d’un discours.

1460. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « III. M. Michelet » pp. 47-96

Si beaucoup d’historiens d’un talent, sinon égal au sien, mais au moins plus attesté et plus compté que celui des quelques grimauds qui l’imitent, entendaient et abordaient l’histoire comme M. Michelet l’entend et l’aborde, quel désastre ! […] Michelet a les caprices d’un homme, poète jusqu’à l’insanité, et les passions (de tête, bien entendu) d’un révolutionnaire jusqu’au crime. […] En tenant compte, bien entendu, de la différence de nature qu’il y a entre Proudhon et M.  […] … Moins terriblement enivré sans doute que ceux qui avaient bu à cette cervoise, mêlée de sang, de l’applaudissement des Tricoteuses, et qui croyaient entendre retentir au fond de leurs hurlements d’enthousiasme la colossale et lointaine approbation de la France, M. 

1461. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « M. DE LA ROCHEFOUCAULD » pp. 288-321

L’homme de La Rochefoucauld est exactement l’homme déchu, sinon comme l’entendent François de Sales et Fénelon, du moins comme l’estiment Pascal, Du Guet et Saint-Cyran. […] » On leur reprochait aussi de l’obscurité ; Mme de Schomberg ne leur en trouvait pas, et se plaignait plutôt de trop les comprendre ; Mme de Sévigné écrivait à sa fille en lui envoyant l’édition de 1672 : « Il y en a de divines ; et, à ma honte, il y en a que je n’entends pas. » Corbinelli les commentait. Mme de Maintenon, à qui elles allaient tout d’abord, écrivait en mars 1666 à Mlle de Lenclos, à qui elles allaient encore mieux : « Faites, je vous prie, mes compliments à M. de La Rochefoucauld, et dites-lui que le livre de Job et le livre des Maximes sont mes seules lectures148. » Le succès, les contradictions et les éloges ne se continrent pas dans les entretiens de société et dans les correspondances ; les journaux s’en mêlèrent ; quand je dis journaux, il faut entendre le Journal des Savants, le seul alors fondé, et qui ne l’était que depuis quelques mois. […] M. de la Rochefoucauld ne nous a point paru pouvoir se séparer des deux femmes qui ont tenu une si grande place dans sa vie ; en le mettant, par exception, dans ce volume tout consacré à des gloires plus douces, nous ne sommes pas pour cela de l’avis que son succès a été un succès de femmes, comme il nous revient de temps en temps qu’on le murmure autour de nous : nous entendons simplement lui faire une faveur dont il est digne et dont, certes, il ne se plaindrait pas. […] Le duc de La Rochefoucauld fut depuis victime des journées de septembre 1792, et massacré à Gisors par le peuple, derrière la voiture de sa mère et de sa femme qui entendaient ses cris.

1462. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Figurines (Deuxième Série) » pp. 103-153

L’horreur de l’universel cloaque de lâcheté, de sottise et d’impudicité qui est le monde ne lui laissait de refuges que ces étroits et secrets paradis d’entier renoncement et de pureté parfaite qui sont les couvents ; entendez les couvents intransigeants des carmélites ou des trappistes. […] Ce discours, j’ai eu la bonne fortune de l’entendre. Et j’avais entendu auparavant une des trois parties de celui de M.  […] * * * C’était la première fois que j’entendais M.  […] Non ; car, le soir même de l’apparition de la Vierge, par une imagination digne de Victor Hugo, il entend converser entre eux les pics pyrénéens.

1463. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — CHAPITRE IX »

Il faut entendre les saillies en feu, les ironies électriques, les moqueries phosphorescentes qui se jouent sur l’écume du flot parisien, en, l’éclairant de mille lueurs mobiles. […] Bref, l’artiste congédie Taupin envoie coucher mademoiselle Aurore, remonte dans sa chambre, et, bientôt, on entend le murmure d’une robe, le craquement d’un pied furtif ; la porte de l’atelier désert s’entrouvre, et la comtesse Diane de Lys, suivie de son amie Marceline, fait son entrée. […] Cependant on entend une voiture rouler dans la cour. […] Il ne s’est pas fait aimer de sa femme, c’est vrai, peut-être est-ce sa faute à lui ; mais qu’elle se rappelle ses froideurs, ses antipathies, ses disgrâces, et peut-être comprendra-t-elle qu’il ait fait preuve de discrétion en lui épargnant son amour ; cependant, il en est temps encore, et peut-être, en se connaissant mieux, finiront-ils par s’entendre. […] Puis voilà qu’on entend un bruit sinistre, celui d’une clef qui crochette une serrure, et cette clef tinte, comme un glas, dans le silence étouffant qui remplit la chambre ; la serrure grince, éclate et se brise ; la porte s’ouvre.

1464. (1857) Articles justificatifs pour Charles Baudelaire, auteur des « Fleurs du mal » pp. 1-33

La Revue de Paris, la Revue des Deux Mondes, l’Artiste, la Revue française, ont publié avant l’apparition du livre quelques-uns des morceaux qui le composent, et aussitôt quelques clameurs discrètes mais concertées se sont fait entendre. […] Baudelaire étaient depuis longtemps attendues du public, j’entends de ce public qui s’intéresse encore à l’art et pour qui c’est encore quelque chose que l’avènement d’un poète. […] Oui, si par bien peindre et être bon poète, on peut entendre ne manquer ostensiblement à aucune règle convenue, s’exprimer couramment dans le langage de tout le monde et savoir relier habilement par des procédés connus des phrases apprises et des poncis. […] Voici ce qu’écrivait en 1822, dans le Journal des Débats, Hoffmann, — non pas le fantastique, mais l’auteur des Rendez-vous bourgeois, — à propos d’une édition nouvelle de Régnier : « Dans plusieurs cantons de la Normandie, j’ai entendu désigner une jeune fille très honnête par un mot qui ferait dresser les cheveux, s’il était prononcé devant le public plein de pudeur de la capitale. […] Je n’entends pas la correction prosodique, ni même la rectitude des pensées, mais une sorte de régularité conforme aux modèles.

1465. (1913) La Fontaine « I. sa vie. »

Louis Roche, dont je vous recommande le livre, qui n’a pas paru, qui va paraître  seulement comme il va paraître la semaine prochaine, je l’ai déjà lu, bien entendu  M.  […] Ai-je besoin de vous citer des textes que vous avez certainement dans le souvenir, seulement, bien entendu, à l’état confus ? […] D’autre part, avaient-ils de commun l’inconduite, comme Tallemant des Réaux, non seulement nous le donne à entendre, mais nous l’assure presque, et Mlle de La Fontaine  comme on disait alors ; les bourgeoises n’ayant pas droit au titre de madame — et Mlle de La Fontaine, en un mot, se conduisit-elle mal ? […] j’entends, dit Poignant. […] Il y avait là Pellisson  bien entendu ; c’était le grand ami de Fouquet ; — il y avait le spirituel et bouffon Bois-Robert, il y avait Brébeuf, le très grand poète Brébeuf, le plus grand poète élégiaque, à mon avis, du dix-septième siècle, et le plus grand poète lyrique du dix-septième siècle après Malherbe ; il y avait Corneille, qui, précisément, à cette époque-là, après avoir boudé le théâtre pendant une très longue période de sa vie, y revenait, appelé par Fouquet lui-même, et écrivait l’Œdipe, qui eut un très grand succès.

1466. (1913) La Fontaine « VIII. Ses fables — conclusions. »

Parmi ce que de gens sur la terre nous sommes Il en est peu qui fort souvent Ne se plaisent d’entendre dire Qu’au livre du Destin les mortels peuvent lire. […] La Fontaine insiste avec une précision laborieuse et un peu ennuyeuse sur tout le mécanisme, tel qu’il l’entendait, du remède et de ses effets. […] Il me semble vous entendre me demander tout d’abord : Quelle est la place de La Fontaine, dans l’école dont il faisait partie ? […] Il est revenu au naturel comme eux, et j’ai deux ou trois fois insisté là-dessus ; il a considéré l’homme, il l’a peint, il l’a décrit, avec précision, avec netteté, avec malice ; enfin, il a été comme eux, bien entendu, il a été un réaliste psychologue, un peu ; mais il a été d’un réalisme beaucoup plus large et beaucoup plus étendu. […] Victor Hugo, peignant la cour de Versailles, et la peignant sous un jour odieux, bien entendu  vous connaissez ses habitudes littéraires et historiques surtout  Victor Hugo songe à La Fontaine et dit : La Fontaine offrait ses fables, Et soudain, autour de lui, Les courtisans presque affables, Les ducs au sinistre ennui, Les Louvois nés pour proscrire, Les vils Chamillard rampants, Gais, tournaient leur noir sourire Vers ce charmeur de serpents.

1467. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Gustave Flaubert »

Flaubert n’entend pas ainsi le roman. […] Flaubert est — littérairement, bien entendu, — un décrépit et un Chinois. […] C’est là, en effet, toute l’explication qu’on puisse donner d’une œuvre à laquelle personne n’entendrait rien si on ne la donnait pas, et après laquelle on n’a plus qu’une ressource, c’est de renvoyer l’auteur, avec son paquet de cure-dents, à l’Académie des Inscriptions, qui a peut-être des dents encore, et, avec son paquet de vignettes, à l’imagerie d’Épinal. […] Et quand je dis nous, c’est quelques-uns qu’il faut entendre, quelques-uns qui tiennent encore pour la faculté innée du talent ! […] Je l’ai vu et entendu mugir contre eux en suivant un cercueil, et il n’a dû se taire contre eux que quand il a été dans le sien.

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