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705. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Deshays » pp. 208-217

Il y a sans doute de la sublimité dans une tête de Jupiter ; il a fallu du génie pour trouver le caractère d’une Euménide, telle que les Anciens nous l’ont laissée ; mais qu’est-ce que ces figures isolées en comparaison de ces scènes où il s’agit de montrer l’aliénation d’esprit ou la fermeté religieuse, l’atrocité de l’intolérance, un autel fumant d’encens devant une idole ; un prêtre aiguisant froidement ses couteaux, un préteur faisant déchirer de sang-froid son semblable à coups de fouet, un fou s’offrant avec joie à tous les tourments qu’on lui montre et défiant ses bourreaux ; un peuple effrayé, des enfants qui détournent la vue et se renversent sur le sein de leurs mères, des licteurs écartant la foule, en un mot, tous les accidents de ces sortes de spectacles ? […] Qu’on m’amène incessamment un grand maître, et s’il répond à ce que je sens, je vous offre une Résurrection plus vraie, plus miraculeuse, plus pathétique et plus forte qu’aucune de celles que vous ayez encore vues.

706. (1860) Ceci n’est pas un livre « Le maître au lapin » pp. 5-30

Le lapin engraissait à vue d’œil. […] C’est la gloire de l’artiste de ne pas reproduire seulement, mais d’interpréter. — L’interprétation peut varier à l’infini, elle restera toujours vraie : celui-ci reçoit de la vue d’un paysage une impression mélancolique ; cet autre, devant le même paysage, sent palpiter en lui une émotion joyeuse.

707. (1860) Ceci n’est pas un livre « Mosaïque » pp. 147-175

* *  * Je termine par une petite observation de mœurs dramatiques que me communiquait hier mon ami — et vaudevilliste Ma… Nous venions de relâcher en vue du Gymnase. […] Ces idées — Alidor est là qui rôde, tout prêt à les amener à lui du bout de sa plume ; et, comme il n’est pas fier, il se chargera de propager vos vues personnelles — sous sa signature.

708. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre III. Besoin d’institutions nouvelles » pp. 67-85

Au sein du désert que nous traversons péniblement, nous perdons quelquefois de vue le côté lumineux de cette nuée miraculeuse qui est notre guide ; mais enfin nous voyons toujours la nuée, et de temps en temps des rayons de lumière en sortent pour nous éclairer. […] Cette vue de Rome jetait ma pensée dans la contemplation de quelques-unes des vérités qui font le sujet du chapitre précédent.

709. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « La Chine »

Au lieu de ce tombereau de faits insignifiants et qu’on a balayés partout, vidé dans le barathre obscur de ces deux volumes, nous aurions voulu une Chine clarifiée et comprise, une Chine vue à travers le cristal de la critique, essuyé, purifié, éclairci. […] Sera-ce le Chinois, le Chinois, le plus faible de tous les peuples, qui se multiplie par la polygamie et se consomme par l’infanticide ; dont les troupes innombrables n’ont pu résister, même avec de l’artillerie, à quelques hordes armées de flèches ; qui, même avec l’imprimerie et quatre-vingt mille caractères, n’a pas su encore se faire une langue que l’étranger puisse apprendre ; qui, avec quelques connaissances de nos arts et la vue habituelle de notre industrie, n’a pas fait un pas hors du cercle étroit d’une routine de plusieurs mille ans… peuple endormi dans l’ombre de la mort, cupide, vil, corrompu, et d’un esprit si tardif qu’un célèbre missionnaire écrivait qu’un Chinois n’était pas capable de suivre dans un mois ce qu’un Français pourrait lui dire dans une heure.

710. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « L’Angleterre depuis l’avènement de Jacques II »

Il semble même s’être attendu pour l’écrire, mais, tout en s’attendant, il a montré dans une grande quantité d’écrits de ces qualités de vue, de groupement et de style, qui pouvaient faire tout espère ? […] N’est-ce pas lui, Macaulay, qui, dans un de ses plus beaux travaux de critique historique, en nous parlant de Machiavel11, le vieux calomnié de Florence, ce vieux bronze oxydé par les crachats de toutes les générations, lança ce mot, qui est une vue, sur les décimés de l’Histoire, sur ces grands Sacrifiés à qui la renommée fait payer les vices de leur siècle.

711. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Histoire des Pyrénées »

Esprit différent, horizon changé, vues nouvelles, c’était ce grand ouvrage qu’il fallait reprendre dans sa distribution harmonieuse ; cette histoire qui, partant des faits, cherche au moins à s’élever à des considérations supérieures ; qui conclut mal, mais qui conclut ! […] Il faut, du moins, que sa vie, ses combats, ses souffrances, lui aient frappé une effigie profonde et ineffaçable, lui aient donné une de ces physionomies qu’une fois vues on ne peut plus jamais oublier.

712. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Femme et l’Enfant » pp. 11-26

Pour celle-là, nous l’avons vue à l’œuvre ; nous avons vu ses plus illustres têtes poser les problèmes et s’efforcer de les résoudre. […] Seulement, nous le demandons à Alphonse Jobez, pourquoi, si cette philosophie est sienne, s’il l’a acceptée après examen, ne l’a-t-il pas hardiment posée au front de son livre, pour qu’elle pût donner à ce livre l’autorité d’un ensemble de vues sans lequel l’Économie politique ne sera jamais rien ?

713. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXX. Saint Anselme de Cantorbéry »

Ni les efforts de Mœhler, le théologien catholique qui s’est occupé, dans un autre but, de la métaphysique de l’illustre archevêque, ni les petites chicanes d’une revue estimable (la Revue de Louvain), qui prétendait et montrait plaisamment un jour que M. de Rémusat n’entendait pas même le latin du texte qu’il traduisait, ne nous feront perdre de vue la vérité dans cette question de la métaphysique de saint Anselme. […] M. de Rémusat a trop d’esprit pour insulter à cette surhumaine humilité, que Voltaire aurait traitée… nous savons comment ; mais sous le sérieux indulgent qu’il garde, M. de Rémusat ne cache pas autre chose que la vue mesquine et erronée d’un philosophe qui comprend tous les préjugés d’un siècle et d’un grand homme et qui ne les leur reproche pas.

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