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679. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Boileau »

Aux époques vraiment palingénésiques, c’est tout le contraire ; Phidias qu’Homère inspire suppléerait Sophocle avec son ciseau ; Orcagna commente Pétrarque ou Dante avec son crayon ; Chateaubriand comprend Bonaparte. […] Permettez-moi de vous dire que vous avez en cela l’oreille un peu prosaïque, et qu’un homme vraiment poëte ne me fera jamais cette difficulté, parce que de Styx et d’Achéron est beaucoup plus soutenu que du Styx, de l’Achéron.

680. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre V. Des ouvrages d’imagination » pp. 480-512

L’ordre social qui, chez les anciens, créait des esclaves, creusait encore plus avant l’abîme de la misère, élevait encore plus haut la fortune, et donnait à la destinée humaine des proportions vraiment théâtrales. […] Ce qui est vraiment beau, c’est ce qui rend l’homme meilleur ; et sans étudier les régies du goût, si l’on sent qu’une pièce de théâtre agit sur notre propre caractère en le perfectionnant, on est assuré qu’elle contient de véritables traits de génie.

681. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre V. Transition vers la littérature classique — Chapitre I. La littérature sous Henri IV »

Mais il a vraiment un fond d’imagination mélancolique, comme très sincèrement aussi il est Français et chrétien, il est lyrique de tempérament : il a des épanchements d’une douceur lamartinienne. […] Dans ce genre de la satire, qu’il a préféré aux stances, aux odes, aux élégies, aux sonnets, cc poète tout naturel et primesautier inaugure vraiment la littérature impersonnelle ; et dans l’intensité de son impression, ce n’est pas lui-même qu’il cherche à exprimer, c’est tout ce qui n’est pas lui.

682. (1890) L’avenir de la science « XIII »

Vraiment, en quoi tant de recherches érudites, tant de collections faites par des esprits faibles et sans portée, diffèrent-elles de l’œuvre du curieux qui assemble sur ses cartons des papillons de toutes couleurs ? […] L’Allemagne pratique à cet égard plusieurs usages vraiment utiles.

683. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre VIII. La question de gout ce qui reste en dehors de la science » pp. 84-103

Le rôle de l’historien se réduit donc à constater si une œuvre est vraiment supérieure et en quoi elle l’est. […] Telle qu’elle est, la formule provisoire où nous l’avons résumée me paraît assez large pour ne laisser de côté aucune œuvre vraiment supérieure et assez flexible pour ne point mettre à la gêne les créateurs de la beauté future.

684. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Procès de Jeanne d’arc, publiés pour la première fois par M. J. Quicherat. (6 vol. in-8º.) » pp. 399-420

Ce qui est touchant et vraiment sublime, c’est que l’inspiration première de cette humble enfant, la source de son illusion si peu mensongère, ce fut l’immense pitié qu’elle ressentait pour cette terre de France et pour ce Dauphin persécuté qui en était l’image. […] Elle écrivait aux Hussites de Bohême pour les faire rentrer dans le devoir : Moi, la Pucelle Jeanne, pour vous dire vraiment la vérité, je vous aurais depuis longtemps visités avec mon bras vengeur, si la guerre avec les Anglais ne m’avait toujours retenue ici.

685. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur Bazin. » pp. 464-485

Mais, en général, il juge bien les hommes, rend hommage aux avisés et aux vraiment habiles, et donne l’exacte mesure des caractères sans se laisser séduire ni entraîner. […] Le volume qui contient ses notices biographiques et littéraires renferme peut-être ce qu’il a écrit de plus vraiment distingué et de plus parfait.

686. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Les Mémoires de Saint-Simon. » pp. 270-292

L’auteur, en les terminant, a eu vraiment le droit d’en juger comme il l’a fait : « Je crois pouvoir dire qu’il n’y en a point eu jusqu’ici qui aient compris plus de différentes matières, plus approfondies, plus détaillées, ni qui forment un groupe plus instructif ni plus curieux. » Ces vastes mémoires, qui n’ont paru au complet qu’en 1829-1830, étaient dès longtemps connus et consultés par les curieux et les historiens ; Duclos et Marmontel s’en sont perpétuellement servis pour leurs histoires de la Régence. […] Saint-Simon, au premier bruit de la rechute et de l’agonie, court donc chez la duchesse de Bourgogne, et y trouve tout Versailles rassemblé, les dames à demi habillées, les portes ouvertes, un pêle-mêle confus, et une des occasions les plus belles qu’il ait jamais rencontrées de lire à livre ouvert dans les physionomies des acteurs : « Ce spectacle, dit-il, attira toute l’attention que j’y pus donner parmi les divers mouvements de mon âme. » Et il se met à exercer sa faculté de dissection et d’analyse sur chaque visage en particulier, en commençant par les deux fils du moribond, par leurs épouses, et ainsi par degrés sur tous les intéressés : Tous les assistants, dit-il avec une jubilation de curieux qui ne se peut contenir, étaient des personnages vraiment expressifs ; il ne fallait qu’avoir des yeux, sans aucune connaissance de la Cour, pour distinguer les intérêts peints sur les visages, ou le néant de ceux qui n’étaient de rien ; ceux-ci tranquilles à eux-mêmes, les autres pénétrés de douleur, ou de gravité et d’attention sur eux-mêmes pour cacher leur élargissement et leur joie.

687. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Paul-Louis Courier. — II. (Suite et fin.) » pp. 341-361

C’est ainsi qu’ayant lu les Mémoires de Madame, mère du Régent, il dira (1822) : « On voit bien là ce que c’est que la Cour ; il n’y est question que d’empoisonnement, de débauche de toute espèce, de prostitution : ils vivaient vraiment pêle-mêle. » Ce n’est certes pas moi qui défendrai la Cour, mais on a droit de dire à Courier : Élargissez votre vue, voyez l’homme indépendamment des classes, reconnaissez-le partout le même, sous les formes polies ou grossières. […] Et si quelqu’un s’avisait que je n’ai pas donné à Courier assez d’éloges, je m’autoriserais de ce que lui-même, parlant de Béranger, n’a trouvé à dire que ceci : « J’ai encore dîné hier avec le chansonnier, écrivait-il de Sainte-Pélagie (octobre 1821) : il imprime le Recueil de ses chansons qui paraît aujourd’hui… Il y a de ces chansons qui sont vraiment bien faites : il me les donne. » C’est ainsi, j’imagine, qu’en Grèce, avant l’âge des éloges et des panégyriques, et quand on était de l’école de Xénophon, on louait ses amis par un mot juste et léger, dit en passant.

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