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386. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XII. Mme la Princesse de Belgiojoso »

Grand sujet de curiosité pour les utopistes de tous les genres, — et, dans ce temps-là, le catholicisme n’en manquait pas, — une révolution à Rome, une révolution qui allait, croyait-elle, jeter la barque de saint Pierre dans les aventures, fit lever et rallia, comme le coup de trompette du Josaphat des vivants, tous les fous superbes de l’univers, tous les bohèmes de la fortune, de l’esprit et de la beauté pour les rasseoir, il est vrai, un peu rudement, quand la machine chargée par Lamennais, Gioberti et tant d’autres, éclata, mais montrant, à travers ses débris, Rossi poignardé, le Pape en fuite et Mazzini régnant dans Rome assiégée. […] L’esprit et la science peuvent n’en pas tenir un grand compte, mais toute âme vivante et mourante encore plus, comprendra qu’il y a ici un charme secret, une intime originalité.

387. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Pélisson et d’Olivet »

— et plût à Dieu que je pusse parler des vivants avec la même liberté ! […] Il a la petite camisole de force de son habit, il la sent sur lui, et il en est gêné… Lorsque les notices qu’il s’est permises sur ses confrères morts doivent être suivies de notices sur ses confrères vivants, quand il a épuisé la liste des extraits mortuaires, il s’arrête… Il voudrait peut-être aussi, lui, comme Pélisson, pour continuer, des arbres et des fontaines, et peut-être va-t-il les chercher ; car il termine brusquement son histoire, si l’on peut nommer du nom d’histoire ces anecdotes et ces commérages, choses trop petites pour n’avoir pas passé à travers les trous de ce crible qu’on appelle la mémoire des hommes, et qu’il était si peu nécessaire de ramasser !

388. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Crétineau-Joly » pp. 367-380

Quel est l’être vivant, en effet, qui puisse croire avoir en lui la lumière sans nuage de l’impartialité, et, en Histoire, soit tenu, comme en tout, à autre chose que de la conscience ? […] Quant à la valeur littéraire du livre de Crétineau-Joly, disons que c’est essentiellement un livre vivant.

389. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Sismondi, Bonstetten, Mme de Staël et Mme de Souza »

Elle se tenait fort tranquille (comme de son vivant !) dans le fond d’une bibliothèque (toujours comme de son vivant !)

390. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre V. Des Grecs, et de leurs éloges funèbres en l’honneur des guerriers morts dans les combats. »

« Non, votre maison n’est pas solitaire : vos enfants ne sont plus, mais leur gloire y habite avec vous, elle répandra son éclat sur vos derniers jours. » Ensuite adressant la parole aux frères et aux enfants des morts : « Une grande carrière vous est ouverte, dit-il : vous avez l’exemple de vos pères et de vos frères, mais ne vous flattez pas d’atteindre à leur renommée ; car tant que l’homme est vivant, il a des rivaux, et la haine qui le poursuit cherche sans cesse à lui arracher sa gloire : mais on rend justice à celui qui n’est plus. […] L’orateur, après avoir loué les morts, s’adresse aux vivants, comme c’était l’usage, et surtout aux enfants de ceux qu’il vient de célébrer.

391. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — T — Turquety, Édouard (1807-1867) »

[Galerie des poètes vivants (1847).]

392. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rességuier, Jules de (1788-1862) »

[Galerie des poètes vivants (1847).]

393. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Littré. »

Littré, qui invoque ce passage, répéter les paroles de la femme de l’Écriture au sujet de l’apparition de l’homme sur la terre, des races animales, du plus humble des insectes, du moindre des végétaux, de la plus petite chose vivante. […] J’aurais aimé à trouver dans son Introduction d’Hippocrate quelque page vivante, animée, se détachant aisément, flottante et immortelle, une page décidément de grand écrivain et à la Buffon, comme il était certes capable de l’écrire, où fut restauré, sans un trait faux, mais éclairé de toutes les lumières probables, ce personnage d’Hippocrate, du vieillard divin, dans sa ligne idéale, tenant en main le sceptre de son art, ce sceptre enroulé du mystérieux serpent d’Épidaure ; un Hippocrate environné de disciples, au lit du malade, le front grave, au tact divinateur, au pronostic sûr et presque infaillible ; juge unique de l’ensemble des phénomènes, en saisissant le lien, embrassant d’un coup d’œil la marche du mal, l’équilibre instable de la vie, prédisant les crises ; maître dans tous les dehors de l’observation médicale, qu’il possédait comme pas un ne l’a fait depuis. […] J’ai voulu inscrire son nom sur la première page de ce livre, auquel du fond de la tombe il a eu tant de part, afin que le travail du père ne fût pas oublié dans le travail du fils, et qu’une pieuse et juste reconnaissance rattachât l’œuvre du vivant à l’héritage du mort… » C’est ainsi que ce juste et ce sage à la manière de Confucius entend la reconnaissance filiale, et qu’il en motive le témoignage en le consacrant. […] En supprimant, comme font volontiers les modernes, et comme ils sont portés à le faire de plus en plus, les anciens miracles et l’ordre surnaturel, il essaye de substituer et d’inaugurer un autre idéal, celui de l’Humanité ; et ce qui n’était chez lui d’abord qu’un sentiment de justice et de reconnaissance individuelle devenant un dogme social avec les années, il se range à cette parole d’un maître : « L’Humanité est composée de plus de morts que de vivants, et l’empire des morts sur les vivants croît de siècle en siècle : sainte et touchante influence qui se fait sentir de plus en plus au cœur à mesure qu’elle subjugue l’esprit. […] La ville prise, elle et sa mère se hâtaient sur la route de Lyon, quand elles rencontrèrent quelqu’un de leur connaissance qui leur annonça que Johannot était mort dans les prisons : cette nouvelle leur perce le cœur ; la mère refuse de faire un pas de plus, la fille veut aller chercher le corps de son père ; elle chemine pleurant ; puis au loin, sur la route, elle aperçoit… son père lui-même vivant et délivré ; qu’on juge des émotions de ces tragédies !

394. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Théocrite »

Les poésies de Théocrite, qui avaient couru de son vivant, furent réunies pour la première fois, quelque temps après lui, par un grammairien du nom d’Artémidore, qui lui rendit, toute proportion gardée, le même service qu’Aristarque rendit à Homère. […] Plus on porte vivant au dedans de soi le sentiment de poétique immortalité, plus on est prêt à se révolter contre cette insensibilité de la nature, et contre cette immortalité suprême qui la laisse indifférente à notre départ, et aussi belle, aussi jeune après nous que devant. […] Son maître, dont ce n’était pas le compte, l’enferma vivant dans un coffre pour l’y faire mourir : « Nous allons « voir pour le coup, disait-il, à quoi te serviront tes « Muses maintenant. » Mais quand il rouvrit le coffre, au bout d’une année, il le trouva tout rempli de rayons de miel ; c’était l’œuvre des abeilles, messagères des Muses, qui étaient venues de leur part nourrir le prisonnier. […] Que n’étais-tu de mon temps parmi les vivants ? […] Voilà le douzième jour depuis que le malheureux n’est plus venu, ni qu’il ne s’est informé si nous sommes morte ou vivante, ni qu’il n’a frappé à la porte, l’indigne !

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