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565. (1894) La bataille littéraire. Cinquième série (1889-1890) pp. 1-349

Il tremblait, le vieux marquis, et la foule qui voulait que l’on tombât bien, répétait : « Le lâche ! […] murmura le vieux marquis de Louverchal, se raidissant pour finir dignement, et ayant maintenant peur d’avoir peur. […] Leur amour a attendri jusqu’à un vieux cocher de cabriolet qui apporte au roman sa note comique. […] Ne vous payez pas de vieux mots. […] La vieille tragédienne, en sa maison d’Issy, m’apparaît comme Athalie à Sainte-Périne.

566. (1892) Un Hollandais à Paris en 1891 pp. -305

Byvanck a publié sur François Villon des études critiques dont nos villonistes font grand cas et qui témoignent d’une profonde connaissance de notre vieille langue et de notre vieille littérature. […] Marcel Schwob, qui fait de si beaux contes, qui sait si bien la vieille langue française et qui a tant d’humour et de philosophie. […] Et le faune, devenu vieux, mais toujours le même, devint un sage. […] Il y a beaucoup plus de véritable humanité dans un vieux soldat qu’on ne le croit d’ordinaire. […] Elles cherchent parmi les vieux souvenirs l’image de mon père, incorrigible fumeur.

567. (1896) Essai sur le naturisme pp. 13-150

Je pense aussi qu’il est de vieilles chansons anonymes, de frissonnants et naïfs lieder qui surpassent le meilleur sonnet du Parnasse, et maints poèmes du symbolisme. […] Si prenantes à cause de leurs saveurs de vieilles venaisons et de leurs odeurs fortes d’épices exotiques. […] On lit le Vent Sauvage de Novembre, Une vieille qui brûle, et ces cris, ce tumulte, ces vocables qui s’entrechoquent, nous conquièrent et nous harassent. On oublie les antiques figurines, les vieux radotages sentimentaux. […] Il ne lui plut pas de promener son âme dans des décors de tapisserie, parmi l’ingénieux agencement des vieilles laines fanées.

568. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre I. De l’action »

Il n’y a pas de critique plus instructive, car il n’y en a pas de plus précise ; toutes les esthétiques et toutes les poétiques mises ensemble ne valent pas la lecture d’une pièce de Shakspeare comparée ligne à ligne aux nouvelles italiennes et aux vieilles chroniques que Shakspeare avait en écrivant sous les yeux. […] Ils allèrent tout d’abord par le pays pour dîner ; puis, s’étant approchés du bord du marais, la grenouille entraîna le rat au fond, faisant clapoter l’eau, et coassant brekekex, coax, coax. »158 Ce détail amusant et vrai est une escapade pour le triste compilateur des vieilles fables grecques. […] Il ne s’agit pas ici d’en apporter une raison ; c’est assez que Quintilien l’ait dit. »161 Il est amusant de voir un poëte s’accuser et s’excuser d’être poëte, et demander à son vieux maître de rhétorique la permission d’animer ses personnages. […] Enfin me voilà vieille ; il me laisse en un coin Sans herbe. […] La pauvre vache a eu le malheur de se dire vieille :          Faut-il croire ce qu’elle dit ?

569. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIe entretien. L’Arioste (2e partie) » pp. 81-160

Mélisse porte à Roger l’anneau qui fait disparaître tous les enchantements de la magie ; dès que Roger a passé à son doigt l’anneau, Alcine lui apparaît sous sa forme hideuse d’une vieille magicienne, faisant horreur et dégoût. […] Elle rencontre un vieux pasteur qui doit l’assister dans son pansement. […] Le bruit des tours, de la danse et de la beauté de ce petit animal parvint bientôt jusqu’à la belle Argie : elle fit appeler le pèlerin dans sa cour, et c’est ainsi que commença l’aventure que le destin réservait au vieux sénateur. […] Je partis en pleine nuit, une nuit d’été en Italie, accompagné par un vieux paysan de la ferme ; il portait ma valise et il devait me servir de guide jusqu’à la mer, pour aller m’embarquer sur une felouque d’Ancône qui faisait le cabotage sur le littoral des États romains. […] » Je regardai machinalement autour de moi : je ne vis que le vieux paysan boiteux qui portait ma maigre valise, et la felouque chargée de sacs de maïs et de ballots de soie qui balançait son unique mât sur les lames de la plage en attendant le vent de terre.

570. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Geoffroy de Villehardouin. — I. » pp. 381-397

Après Froissart et après Joinville, j’arrive, en remontant, jusqu’à Villehardouin qui est en date notre premier historien, et dont la chronique est un monument de notre vieille langue. […] Rappelons-nous toutefois, en lisant ces vieux auteurs peu accoutumés aux lettres et à ce mode d’expression par l’écriture, que nous n’avons que des signes incomplets de leur force même d’esprit et de leurs ressources en ce genre. […] Le vieux doge prend la croix ; assistons à la scène fidèlement racontée : Alors il assembla tout le peuple de Venise, un jour de dimanche, qui était une très grande fête de saint Marc ; et y furent la plupart des barons du pays et de nos pèlerins. […] Et tous se précipitèrent, ceux des moindres vaisseaux sautèrent au rivage, et ceux des grands vaisseaux se jetèrent dans les barques, et tous abordaient à l’envi, à qui mieux mieux… La ville impériale ne fut pas prise ce jour-là ; mais l’action du vieux doge subsiste dans toute sa grandeur.

571. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Œuvres de Maurice de Guérin, publiées par M. Trébutien — I » pp. 1-17

Rencontre d’un site assez remarquable pour sa sauvagerie : le chemin descend par une pente subite dans un petit ravin où coule un petit ruisseau sur un fond d’ardoise, qui donne à ses eaux une couleur noirâtre, désagréable d’abord, mais qui cesse de l’être quand on a observé son harmonie avec les troncs noirs des vieux chênes, la sombre verdure des lierres, et son contraste avec les jambes blanches et lisses des bouleaux. […] L’hôte de La Chênaie ne se fait pas illusion sur ces magnificences et ces beautés silvestres, bocagères, qui sont toujours si près, là-bas, de redevenir sèches et revêches ; La Chênaie, la Bretagne tout entière « lui fait l’effet, dit-il, d’une vieille bien ridée, bien chenue, redevenue par la baguette des fées jeune fille de seize ans et des plus gracieuses. » Mais sous la jeune fille gracieuse, la vieille, à de certains jours, reparaît. […] Comme cette Cybèle de l’hymne homérique qui se présenta d’abord à de jeunes filles assises au bord du chemin, sous le déguisement d’une vieille femme stérile, et qui ensuite redevint soudainement la féconde et glorieuse déesse, la nature bretonne finit par livrer à Guérin tout ce qu’elle contient : s’il l’a méconnue un moment, il s’en repent vite, et elle lui pardonne ; elle cesse de paraître ingrate à ses yeux, elle redevient aussi belle qu’elle peut l’être : la lande elle-même s’anime, se revêt pour lui, dans ses moindres accidents, de je ne sais quel charme.

572. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Daphnis et Chloé. Traduction d’Amyot et de courier »

L’ancienne mythologie bucolique, avec tout son charme et son autorité un peu surannée, nous est représentée dans le personnage du bonhomme Philétas, espèce de ménétrier de village, de rhapsode joueur de flûte, tout rempli de vieilles histoires et de légendes populaires qu’il récite à ravir et qu’il fait accroire. […] prenez-le comme vous voudrez ; l’âge, du bonhomme, — un spirituel critique l’a baptisé très-heureusement le Bonhomme Jadis, — qui a tant goûté en son temps aux fruits d’amour et qui n’en est pas encore tout à fait sevré, permet de croire sur ce point à un léger et charmant radotage, à une confusion de souvenir bien excusable, au milieu des conseils pratiques excellents, mais un peu vagues, que ce vieux Nestor anacréontique est venu donner. […] Ce style enfant du vieux traducteur sauve et corrige, sans en avoir l’air, toutes ces nudités, ces indécences innocentes et ignorantes d’elles-mêmes. […] Lycénion, qui donne à Daphnis sa première leçon d’amour, est une voisine et non une « courtisane » ; c’est une jeune femme alerte et fringante, qui vit avec un vieux cultivateur et qui a l’œil aux jeunes gens.

573. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La Grèce en 1863 par M. A. Grenier. »

Aller en Grèce dès 1824, c’était, pour bien des âmes lassées et rassasiées de tout, le réveil moral, la guérison des passions factices, des vagues ennuis ; — pour le vieux soldat des grandes guerres, c’était retrouver un digne emploi de son épée non rouillée encore ; — pour le jeune homme en proie aux lâches oisivetés et aux inoccupations rongeantes, c’était la réalisation inespérée d’un beau rêve, cette fois saisissable et palpable ; c’était le baptême et la consécration pour une grande cause. […] Ce qu’il faut dire à son éternel honneur, c’est qu’il partit prévoyant sa fin, ne se faisant pas plus illusion alors que le premier jour sur le caractère et les défauts de ceux qu’il allait servir, s’étant tout dit sur les lenteurs et les misères de tout genre inhérentes à une telle entreprise : « Je n’ai pas de bourdonnement poétique aux oreilles, je suis trop vieux pour cela ; des idées de ce genre ne sont bonnes que pour rimer. » — « Je ne m’aveugle pas sur les difficultés, les dissensions, les défauts des Grecs eux-mêmes ; mais il y a des excuses pour eux dans l’âme de tout homme sensé. […] il regarda, il vit tout, il pensa de son chef, et dit gaiement, impertinemment et avec une grâce des plus vives et des plus mordantes, tout ce qu’il pensait ; il se passa toutes ses saillies et ses fantaisies à la barbe des vieux murs et des grands ancêtres. […] disait un des vieux soldats de l’insurrection ; elle est comme une famille dont les membres sont dispersés. » Les Grecs ne se considèrent pas comme définitivement constitués.

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