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1098. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Observations sur l’orthographe française, par M. Ambroise »

Notre langue française vient en très grande partie du latin. […] Je n’ai point à entrer dans cette discussion, ni à chicaner sur cette préférence ; ce que je voulais seulement remarquer, c’est que sous cette première forme lentement progressive et naturelle tous les mots français qui viennent du latin et par le latin du grec ont été adoucis, préparés, mûris et fondus, façonnés à nos gosiers, par des siècles entiers de prononciation et d’usage : ils sont le contraire de ce qui est calqué et copié artificiellement, directement. […] 60 Ce qui est certain, c’est qu’une extrême irrégularité orthographique, une véritable anarchie s’était introduite dans les imprimeries pour les textes d’auteurs français au xviie  siècle : il était temps que le Dictionnaire de l’Académie, si longtemps promis et attendu, vînt y mettre ordre. […] Je ne puis tout dire et je ne prétends en ce moment que signaler l’estimable et utile travail, depuis longtemps réclamé, que l’Académie vient d’entreprendre, en l’exhortant (sous la réserve du goût) à oser le plus possible ; car ses décisions qui seront suivies et feront loi peuvent abréger bien des difficultés, et, notre génération récalcitrante une fois disparue, les jeunes générations nouvelles n’auront qu’à en profiter couramment. […] De là est venu le mot collectionneur et le verbe collectionner : il sera difficile de les éviter, car ils répondent à un goût nouveau, à un besoin nouveau.

1099. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Recueillements poétiques (1839) »

M. de Lamartine, au contraire, de l’ode à M. de Bonald, en est venu à sa pièce d’Utopie qui couronne ses Recueillements. […] Rien n’est plus triste, sans doute, que cette nécessité où l’on croit être de venir mettre successivement une barre rigoureuse à chacune de ses admirations les plus profondes, et de prononcer ce fatal : Tu n’iras pas plus loin, dans une louange chère au cœur et qu’on ne croyait pas pouvoir épuiser. […] Depuis les Harmonies, on attendait une preuve poétique qui y répondît, quand Jocelyn vint annoncer comme une nouvelle manière : Jocelyn était un début dans l’ordre des compositions ; bien que la fable n’en fût pas bien difficile à inventer, elle était touchante, elle prêtait aux plus riches qualités du poëte, et l’induisait sans violence à des tons rajeunis. Malgré des incorrections de détail et des longueurs, l’essai était charmant ; ce dut paraître un très-heureux commencement pour les poëmes à venir, comme Hernani avait pu paraître, dans ses hasards, un heureux prélude pour des drames futurs.  […] On avait déjà remarqué qu’un autre grand poëte l’enfermait, la pauvre critique, dans un cercle étroit, inflexible, et la sommait d’y demeurer ou d’y venir, avec menace autrement de la rejeter.

1100. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. PROSPER MÉRIMÉE (Essai sur la Guerre sociale. — Colomba.) » pp. 470-492

Or, ces grands ambitieux avaient rencontré sur leur chemin des auxiliaires ou des adversaires dans les alliés latins et italiotes ; la lutte que ceux-ci avaient entreprise contre Rome, la guerre sociale, comme on l’appelle, était venue traverser et compliquer le duel flagrant des deux précurseurs de Pompée et de César. […] Les causes complexes, qui, après les grandes guerres d’Annibal, rendaient la situation de l’Italiote de plus en plus précaire et pénible, à mesure qu’au contraire celle du citoyen romain s’élevait et visait au roi, sont très-bien démêlées et viennent se traduire en un tableau général d’oppression et de dépopulation tout à fait effrayant. […] Les vexations croissantes, tous les genres de griefs sourdement accumulés, les tâtonnements législatifs impuissants, et les tentatives tribunitiennes coupées de tragique, remplissent quarante années préliminaires, durant lesquelles les guerres contre les Cimbres viennent jeter une puissante diversion, mais aussi de nouveaux ferments pour l’avenir. […] Le Romain tua le Samnite, puis tomba expirant sur le cadavre du guerrier qu’il venait d’abattre. […] Est-il bien que Colomba, pour exciter son frère, aille couper de nuit l’oreille au cheval qu’il doit monter le lendemain, lui laissant croire que ce coup vient des Barricini ?

1101. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Réception de M. le Cte Alfred de Vigny à l’Académie française. M. Étienne. »

En devenant plus simples dans leur sujet, les discours sont aussi devenus plus longs ; les hors-d’œuvre, au besoin, n’y ont pas manqué : l’Empire et l’Empereur ont pourvu aux effets oratoires, comme précédemment avait fait Louis XIV ; le plus souvent même, on n’a pu les éviter, et la biographie des hommes politiques ou littéraires est venue, bon gré, mal gré, se mêler à ce cadre immense. Ç’a été tout naturellement le cas aujourd’hui dans cette séance, l’une des plus remplies et des plus neuves qu’ait jusqu’ici offertes l’Académie française à la curiosité d’un public choisi ; M. le comte Molé devait recevoir M. le comte Alfred de Vigny, lequel venait remplacer M. […] Né en 1778 dans la Haute-Marne, venu à Paris sous le Directoire, il était de cette jeunesse qui n’avait déjà plus les flammes premières, et qui, tout en faisant ses gaietés, attendait le mot d’ordre qui ne manqua pas. […] Dans son insouciance d’homme qui savait la vie et qui n’aspirait pas à la gloire, il n’a pas même pris le soin de recueillir ses Œuvres éparses et de dire : Me voilà, à ceux qui viendront après244. […] Molé, parlant au nom de l’Académie, a donné un bel exemple : « Le moment n’est-il pas venu, s’est-il écrié en finissant, de mettre un terme à ces disputes ?

1102. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur Droz. » pp. 165-184

Ses occupations de professeur lui laissaient le temps de faire chaque année un voyage à Paris, et, après la suppression des écoles centrales, il y vint tout à fait habiter (1803). […] Montaigne, en effet, c’est la pure nature, qui se passe toute chose, qui s’accorde tous ses caprices ; et la loi de grâce, le christianisme, n’est pas venue seulement pour régler la nature, mais pour la retourner et la refouler, et, comme on dit, pour la circoncire. […] L’Évangile, selon lui, était venu pour perfectionner et accomplir la loi de nature plutôt que pour la renverser ; il était venu apporter la paix et l’harmonie dans l’homme, plutôt que le glaive ; et ce sage aimable, en cela disciple de Fénelon, évitant les rochers et les précipices où d’autres vont se heurter, trouva moyen encore de passer par une route unie, et comme en continuant les sentiers fleuris de l’humaine sagesse, aux sentiers plus élevés d’où l’on entend avec le peuple et avec les disciples le divin sermon sur la montagne. […] Les brusques révolutions que font éclater les passions des hommes viennent sans doute déranger fréquemment cette marche générale et graduelle des choses ; la digue que les sages essayaient de construire se trouve tout à coup submergée. […] Le moraliste se retrouve en plus d’un endroit sans excès d’optimisme ; l’économiste vient en aide à l’historien pour l’exposé lucide des questions financières.

1103. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Fervaques et Bachaumont(1) » pp. 219-245

Fervaques et Bachaumont, les derniers venus et les plus jeunes de cette génération qui a descendu le Journalisme de ses grands chevaux et qui l’a déboulonné sans cérémonie, ce vieux boutonné jusqu’au menton, cette vieille valise politique ! […] Comment Bachaumont est-il venu à lui ? […] Le livre n’est pas venu, malgré les facultés qu’il prouve. Mais il annonce qu’il en viendra un ! […] Fervaques, ce nouveau venu, avec son demi-masque, n’est pas connu.

1104. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Michelet »

Il mit douze ans à venir, mais enfin il est venu. Et, heureusement, il n’est pas venu sans préface. […] que les femmes, par qui vient tout succès en France, soient, au fond, extrêmement flattées de la définition que fait d’elles Michelet : d’éternelles convalescentes entre deux blessures. […] En ce genre, ils firent des chefs-d’œuvre ; boule épineuse de l’oursin, conque tout à la fois ouverte et fermée de l’haliotide, enfin l’armure du crustacé à pièces articulées, perfection de la défense et terriblement offensive… Ce n’était pas tout, pourtant, — continue Michelet. — Qu’il vienne un être de libre audace qui méprise tous ces gens comme infirmes ou tardigrades, qui considère l’enveloppe comme chose subordonnée et concentre la force en soi » ; et ce malin-là, ce sera le poisson !! « Le crustacé s’entourait d’un squelette extérieur, — reprend Michelet, — le poisson se le fait au centre, sur l’axe où les nerfs, les muscles, tout organe viendra s’attacher. » Fantasque invention au rebours du bon sens, mais qui constitue le poisson, l’animal supérieur, la merveille !

1105. (1901) Figures et caractères

La vieillesse était venue. […] Leur beauté leur vient du style. […] D’où viennent-ils ? […] Elle vint parmi ses nouveaux servants. […] Il est un moule qu’elle vient remplir.

1106. (1897) Aspects pp. -215

» Et tous à l’unisson : « D’où nous viendra le Sauveur ?  […] D’où vient ce revirement ? […] Zola vint à son heure. […] Viennent enfin les ratés. […] Mallarmé a déformé la langue ; son influence fut déplorable, vient à son heure.

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