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1801. (1903) Légendes du Moyen Âge pp. -291

Les Annales quasi officielles, rédigées peu de temps après, sans doute sous les yeux de Charles, terminent ainsi le récit du triste épisode : « Le souvenir de cette blessure effaça presque entièrement, dans le cœur du roi, la satisfaction des succès qu’il avait obtenus en Espagne. » On peut croire que cette phrase fut dictée à l’annaliste par le roi lui-même : elle tranche, par sa note intime et personnelle, avec la sécheresse habituelle des Annales ; et quel autre que Charles aurait pu révéler ainsi les sentiments de son grand cœur ? […] Sortis de l’église, nous allâmes par la terre voir les antiquités : tout près de l’hospice9, à l’occident, il y a une petite chapelle, que fît faire Charlemagne après la mort de Roland et des autres paladins… Elle est en forme de carré parfait, pas très haute, et elle est située au propre lieu où Roland, après la seconde bataille, se mit à genoux, et, à ce qu’on dit, tourné vers Roncevaux, pleura ses gens et dit entre autres paroles : « Ô triste, ô infortunée vallée, maintenant tu seras toujours ensanglantée10 !  […] vallon triste et sombre ! 

1802. (1929) La société des grands esprits

Ce nid d’aigles est imposant, angoissant même, si l’on veut, mais non pas triste. […] J’affronte à mon tour la plus triste banalité, et j’avoue que c’est aussi mon sentiment. […] C’est vraiment une affaire triste et extraordinaire ; ce qu’il adviendra de nous, je l’ignore et ne veux pas y penser. » Le 4 octobre, le mariage avec Annabella étant décidé : « A… (sa sœur Augusta) n’a jamais mis de bâton dans les roues, au contraire… Elle désirait beaucoup me voir marié, parce que c’était la seule chance qu’avaient deux personnes de trouver leur salut… » On avait déjà les lettres de Byron à sa sœur, assez inquiétantes. […] Ne te fie qu’à la France, non à l’Europe ; en Prusse, en Angleterre, partout la France a des ennemis ; la barrière des nationalités n’est pas près de s’abaisser ; l’étranger nous guette ; n’attendons pas la crise, soyons prêts ; rejetons ce faux humanitarisme qui serait mortel pour la patrie, etc… Voilà du Michelet, et non pas de celui d’après 1870, qu’une triste expérience aurait fait revenir de ses chimères ; non, tout cela se lit tout au long dans son livre du Peuple, qui est de 1846.

1803. (1891) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Quatrième série

Triste métier que le sien ! […] Toujours ample, toujours correcte, et généralement claire, la phrase d’Arnauld est souvent lourde, habituellement triste, et toujours monotone. […] Mais la vérité, moins subtile et plus triste, c’est que Pascal a été vaincu dans la lutte qu’il avait entreprise. […] Quoi que l’on en ait dit, ceux qui ont estimé la volonté au plus haut prix, depuis Bouddha jusqu’à Schopenhauer, sont aussi ceux qui nous ont tracé de l’humaine condition le plus triste tableau, comme si ce qu’elle offre de plus lamentable était la disproportion du vouloir au pouvoir. […] Étant né, comme on l’a dit, naturellement triste, on est presque tenté de croire que son naturalisme eût fini, s’il avait vécu davantage, par aboutir, comme celui de quelques-uns de nos contemporains, à une sorte de pessimisme.

1804. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Eugène Gandar »

Ne croyez pas que le cœur s’endurcisse, mais il se résigne ; il sent profondément ses blessures, mais il ne s’effraye plus de les voir, il trouve à les sonder, à les rouvrir, je ne sais quelle joie triste qui l’anoblit.

1805. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre IV. Addison. »

Il dresse la liste des gens morts ou malades d’amour, et des causes ridicules qui les ont mis dans ce triste état. « William Simple, frappé à l’Opéra par un regard adressé à un autre. —  Sir Christopher Crazy, baronnet, blessé par le frôlement d’un jupon de baleine. —  M. 

1806. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quatorzième. »

Je me trouble, je me sens confondu dans ce mélange d’erreurs et de vérités venues d’un fonds où l’on n’en fait pas toujours la différence ; et ce manque d’autorité, même aux endroits où le ton de l’autorité domine, me laisse ma triste liberté que j’avais si doucement abandonnée à Bossuet.

1807. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre cinquième. Le réalisme. — Le trivialisme et les moyens d’y échapper. »

Il est parfaitement admissible que le chef-d’œuvre d’un salon de peinture soit un singe ; mais il est triste de constater que la grimace empreinte sur le visage de ce singe ait été en quelque sorte le type et l’idéal secret poursuivi dans la plupart des tableaux ou des statues médiocres du même salon : tous ces artistes ont rêvé de singes, et non d’hommes, en composant leurs œuvres ; autrefois il y avait des sourires convenus et figés, aujourd’hui ce sont des contorsions convenues, des grimaces à demeure.

1808. (1880) Goethe et Diderot « Gœthe »

Il se résigna au triste dénoûment de cette aventure avec la facilité et la sagesse d’un homme qui veut bien ornementer sa vie d’un sentiment., mais qui ne veut pas l’en agiter.

1809. (1886) Le naturalisme

La cause de ce succès, il est triste de le dire, était en grande partie due à ce que le roman était émaillé d’indiscrétions, c’est-à-dire de nouvelles anecdotiques relatives à une certaine période du second empire et à des personnages de haut rang qui y firent figure. Il est triste de le dire, — je le répète, — parce que le fait prouve que le public est incapable de s’intéresser à la littérature, pour la seule littérature, et que si un auteur devient célèbre d’un coup et vend éditions sur éditions d’un livre, c’est qu’il a su le saupoudrer avec le sel et le piment de la chronique scandaleuse.

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