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514. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIIe entretien. Vie du Tasse (3e partie) » pp. 129-224

Notre poète traita lui-même ces divers sujets avec une grande supériorité ; mais, lorsqu’il eut parlé en termes sublimes et un peu mystérieux de la création du monde et des mouvements du soleil, il nous raconte que son hôte se mit à l’examiner avec une plus grande attention, et dit, après un moment de silence, qu’il voyait bien qu’il avait donné l’hospitalité à un personnage plus illustre qu’il ne l’avait d’abord supposé, et que peut-être c’était celui dont on s’entretenait vaguement dans le pays, qui, étant tombé dans l’infortune par suite de quelque faiblesse, était aussi digne, par la nature de sa faute, du pardon des hommes, qu’il était digne de leur admiration par son génie. […] La princesse de Mantoue et Scipion de Gonzague son ami vinrent le visiter dans sa prison ; la princesse Marphise d’Este, cousine d’Alphonse, et le prince de Guastallo lui apportèrent des hommages et des présents ; le cardinal Albano, son protecteur à Rome, lui écrivit pour lui conseiller de mériter sa délivrance complète en parlant du duc de Ferrare en termes plus respectueux qu’il n’avait fait jusque-là. […] « En vérité », dit-il, « la vie est un triste pèlerinage, et je suis maintenant au terme du mien ! […] « Un jour que le père Biondo, célèbre prédicateur, confesseur du cardinal, était avec nous dans l’antichambre, en attendant son tour d’être reçu, et que nous parlions du Dante, il le blâma d’avoir parlé de lui-même en termes trop présomptueux. […] Le terme de ma vie approche d’heure en heure ; aucun médicament ne calme le mal qui s’est joint à tous mes autres maux, en sorte que, comme un rapide torrent, je me sens entraîné sans pouvoir opposer ni résistance ni obstacle à son cours.

515. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre X, Prométhée enchaîné »

Elle demande au Titan ce qui lui reste encore à souffrir, quel sera le terme de son vagabondage délirant. […] Sinon, ses jours sont comptés et son terme approche. […] Quand il sera tiré de ce sépulcre écrasant, ce sera pour être livré en curée au « Chien ailé de Zeus », à l’aigle vorace qui fouillera sa chair. — « Convive non invité, il fondra sur toi chaque jour, et il mangera ton foie noir. » — Pour que le tourment du condamné ait un terme, il faudra qu’un dieu consente à le racheter en descendant aux Enfers. […] Il portait en lui, sur le droit et sur la justice, sur la discordance des dieux arbitraires et défectueux de son culte avec la sublimité de sa pensée religieuse, des idées dont le terme n’était pas venu, et il les sentait remuer confusément au fond de son âme. […] Le vieil Atlas, courbé sous son globe, a reculé devant lui, comme le Terme d’un champ immensément agrandi.

516. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Conclusion. Le passé et le présent. » pp. 424-475

I Arrivés au terme de cette longue revue, nous pouvons maintenant embrasser d’un regard l’ensemble de la civilisation anglaise ; tout s’y tient : quelques puissances et quelques circonstances primitives ont produit le reste, et il n’y a qu’à suivre leur action continue pour comprendre la nation et son histoire, son passé et son présent. […] Il n’en est rien, et c’est d’eux seuls que dépendra leur histoire : chacun sera l’ouvrier de sa fortune ; le hasard n’a point de prise sur des événements si vastes, et ce sont les inclinations et les facultés nationales qui, renversant ou suscitant les obstacles, les conduiront fatalement chacun à son terme, les uns jusqu’au fond de la décadence, les autres jusqu’au faîte de la prospérité. […] Sous la rigueur du climat et de la concurrence, parmi les chômages de l’industrie, les faibles, les imprévoyants périssent ou s’avilissent ; le gin arrive alors, et fait son office ; de là ces longues files de misérables femmes qui s’offrent le soir dans le Strand pour payer leur terme ; de là ces quartiers honteux de Londres, de Liverpool, et de toutes les grandes villes, ces spectres déguenillés, mornes ou ivres, qui encombrent les échoppes d’eau-de-vie, qui emplissent les rues de leur triste linge et de leurs haillons pendus aux cordes, qui couchent sur un tas de suie, parmi des troupeaux d’enfants pâles ; horrible bas-fonds où descendent tous ceux que leurs bras blessés, paresseux ou débiles n’ont pu soutenir à la surface du grand courant. […] » Les choses se bornent là ; on raisonne en termes francs, et le raisonnement, s’il est bon, se propage.

517. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre III. La poésie romantique »

Plus de termes généraux, où elle se fond. […] Le dernier terme de cette transformation est la conversion du mot abstrait en évocateur sensible. […] Ce sont comme deux fragments, le terme et le début, d’une immense épopée spiritualiste sur la destinée humaine ; la huitième vision de la Chute d’un ange nous explique la conception du poète : l’homme fait sa destinée, monte ou descend par son propre mérite, supprime le mal en s’élevant à Dieu, raison de l’être, et terme de l’aspiration de toute créature.

518. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre quatrième »

Voilà en quels termes énergiques il se pose ce problème ; voilà l’être pour lequel il songe à chercher quelque chose de meilleur et de plus solide que trois ou quatre vérités de religion naturelle, et quelques inventions physiques au service des besoins du corps. […] Faites, ô Seigneur, que si mon corps a cela de commun avec le vôtre, qu’il souffre pour mes offenses, mon âme ait aussi en commun avec la vôtre qu’elle soit dans la tristesse pour ces mêmes offenses. » Celui qui a demandé à Dieu la maladie, et qui, comme un héroïque médecin s’inoculant la peste, pour l’étudier de plus près, s’est comme inoculé toutes les misères humaines pour les mieux connaître, sera toujours plus populaire que l’habile homme qui étudie l’art de vivre en santé et d’éloigner le terme fatal. […] Pascal le père en écrivit de vifs reproches à ce jésuite, et c’est dans cette lettre qu’il lui dit, en père du futur auteur des Provinciales : « Vous vous êtes exposé à ce qu’un jeune homme provoqué sans sujet se portât à repousser vos invectives en termes capables de vous causer un éternel repentir 48. » Pour les Pascal, comme pour les Arnauld, la guerre avec les jésuites était une affaire de famille. […] « M. de Puget. écrit celui-ci à Brossette, me fait bien de l’honneur de me mettre en regard, pour me servir de vos termes, avec M. 

519. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre V. Des orateurs anciens et Modernes. » pp. 223-293

C’étoit un homme de grand sens plûtôt qu’un homme d’esprit, ou plûtôt qu’un homme d’imagination, à prendre ces termes dans le sens qu’on y attache d’ordinaire. […] Le recueil des discours de l’Abbé Molinier est un excellent fond de Sermons, d’un tour & d’une expression neuve, vive & énergique ; mais son style n’est pas aussi châtié ; il déplait par des termes trop souvent répétés, & par des mots bas & communs. […] de Sacy, ne croyoit pas qu’il lui fût permis de négliger les regles de la langue ; plus les matieres sont séches & peu intéressantes, plus il semble qu’il ait pris à tâche d’en sauver l’ennui par le choix des termes, & l’exactitude de la diction. […] On désireroit seulement que l’auteur entassât moins de comparaisons l’une sur l’autre ; qu’il affectât moins d’user de quelques termes de physique ingénieusement appliqués, mais trop abstraits pour bien des lecteurs, & vicieux par la seule affectation ; qu’enfin il eût moins employé de ces expressions parasites, ou de ces mots à la mode que les petits écrivains ne manquent pas de copier, mais dont se préservent ceux qui sçavent écrire & penser d’après eux-mêmes.

520. (1848) Études sur la littérature française au XIXe siècle. Tome III. Sainte-Beuve, Edgar Quinet, Michelet, etc.

J’ai donc parlé de Madame de Pontivy dans les termes suivants. […] Leçon dans toute la force du terme et dans tous les sens du mot ! […] Une teinte que les termes convenus ne reproduisent pas, il la demande à d’autres termes, aux dépens du bon usage. […] c’est dans ces termes énergiques qu’il s’exprime. […] Tout ce qu’on sait bien, c’est que son dernier terme et sa forme accomplie, c’est le vers.

521. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — I. » pp. 131-146

Févret, dans son dialogue latin sur les orateurs illustres du barreau bourguignon, en regrettant que Jeannin en eût été sitôt enlevé, a caractérisé son genre d’éloquence en des termes magnifiques, trop magnifiques sans doute dans leur ampleur cicéronienne, mais où il n’est pas impossible de noter quelques-uns des mérites particuliers à l’homme : il le loue de son abondance, de sa gravité, de sa véhémence, de son tour pénétrant, mais aussi de sa douceur ; il insiste sur ce dernier trait : Ce qui plaisait dans cet homme d’un souffle élevé, dit-il, c’était une majesté tempérée de physionomie et de visage. […] La statue du président Jeannin et celle de sa femme subsistent sur leur tombeau dans la cathédrale d’Aulun ; l’épitaphe d’Anne Gueniot la loue, en des termes expressifs et qui doivent être vrais, des vertus domestiques, simples et fortes, par lesquelles elle fut une digne compagne de son époux32.

522. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — I » pp. 56-70

Lorsque les Commentaires de Montluc furent imprimés pour la première fois quinze ans après sa mort, en 1592, l’éditeur les fit précéder d’une dédicace « À la noblesse de Gascogne » qui est en des termes dignes de son objet : Messieurs, comme il se voit de certaines contrées qui produisent aucuns fruits en abondance, lesquels viennent rarement ailleurs, il semble aussi que votre Gascogne porte ordinairement un nombre infini de grands et valeureux capitaines, comme un fruit qui lui est propre et naturel ; et que les autres provinces, en comparaison d’elle, en demeurent comme stériles… C’est votre Gascogne, messieurs, qui est un magasin de soldats, la pépinière des armées, la fleur et le choix de la plus belliqueuse noblesse de la terre, et l’essaim de tant de braves guerriers… Sans faire tort aux autres provinces et sans accepter ces injurieuses préférences de l’une à l’autre, il est un caractère constant et qui frappe dans les talents comme dans les courages de cette généreuse contrée, et l’on ne saurait oublier, en lisant Montluc, que cette patrie de Montesquieu et de Montaigne, comme aussi de tant d’orateurs fameux, fut celle encore, en une époque chère à la nôtre, de ces autres miracles de bravoure, Lannes et Murat. […] Il raconte une action particulière ou faction (c’est son terme habituel pour un fait d’armes) où il se distingua et rendit un service signalé à toute l’armée : sa réputation était dès lors établie auprès des chefs qui le voyaient de près.

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