C’est presque s’attribuer la sagacité souveraine et usurper sur la puissance universelle que de dire d’un être semblable à nous : « Il est cela ; et, tel point de départ étant donné, telles circonstances s’y joignant, il devait être cela, ni plus ni moins, il ne pouvait être autre chose. » Notez que je ne parle ainsi que parce que j’ai devant moi une ambition scientifique impérieuse et précise ; car, littérairement, et sans y attacher tant de rigueur, on peut se permettre de ces résumés vifs, de ces termes brefs qui peignent et qui fixent un personnage, de ces aperçus qui animent une analyse et qui ne tirent pas à conséquence. […] Taine nomme Stendhal ; il le citera surtout dans son livre des Philosophes, et le qualifiera dans les termes du plus magnifique éloge (grand romancier, le plus grand psychologue du siècle). […] Si l’on ôte quelques passages où la simplicité est affectée et la sagacité raffinée, on croit entendre un des anciens jurisconsultes ; Montesquieu a leur calme solennel et leur brièveté grandiose ; et du même ton dont ils donnaient des lois aux peuples, il donne des lois aux événements… Suivant moi, pour que le livre sur Tite-Live fût entièrement vrai (car il l’est sur presque tous les points, et pleine justice est rendue d’ailleurs à l’historien), il eût suffi de laisser au sens du génie oratoire, du génie de l’éloquence déclaré dominant chez lui, la valeur d’un aperçu littéraire, sans lui attribuer la valeur d’une formule scientifique ; il eût suffi enfin de ne pas inscrire à la première ligne de cette étude, de n’y pas faire peser le nom et la méthode de Spinosa, de ne pas rapprocher des termes aussi étonnés d’être ensemble que Spinosa et Tite-Live.
Voici une autre anecdote que j’ai recueillie de sa bouche ; je demande à la répéter ici dans les mêmes termes que je lui ai soumis et que je lui ai fait en quelque sorte adopter, un jour que je m’étais appliqué à reproduire son récit aussi fidèlement que possible : « M. […] Les procédés employés pour le purifier demandaient beaucoup de temps ; le seule construction des moulins à poudre eût exigé plusieurs mois : avant ce terme, la France était subjuguée. […] J’aurai pourtant à faire remarquer plus tard que, dans ses articles des dernières années au Journal des Savants, sa manière était arrivée à une sorte de perfection et d’excellence ; sa diction proprement dite était accomplie, d’un choix très-pur dans les termes et d’une délicatesse extrême ; il avait fini par y porter comme un instrument de précision.
Ainsi, dans ces termes, tout est dit entre M. le ministre d’État et lui. […] Sainte-Beuve, dès le premier jour, de défendre sur ce terrain comme il l’entendait une mesure d’un ministre de l’Empereur en toute liberté et vivacité, ce qui ne lui aurait guère été possible ailleurs dans les mêmes termes. […] Orléaniste était encore, à l’heure dont je parle, un de ces termes vagues à l’usage des esprits politiques qui ne trouvent pas mieux dans le moment.
Mais, quoiqu’on soit plus d’à moitié chemin, on ne touche pas encore à ce terme désirable. […] L’auteur n’y perd jamais de vue cette maxime : « La théorie est le pied droit, et l’expérience est le pied gauche. » Les guerres de la Révolution lui fournissaient aussi des termes naturels de comparaison et des exemples ; il les empruntait le plus volontiers à la campagne d’Italie de 1796-1797 et à celle de 1800. […] Ayant eu moi-même l’honneur de connaître dans les dernières années le général Jomini, j’ai plus d’une fois entendu de sa bouche le récit des principaux événements qu’il avait à cœur d’éclaircir, et il le faisait presque dans les mêmes termes qu’on retrouve sous la plume du colonel Lecomte.
Les vérités d’un certain ordre sont à la fois conseillées par la raison et inspirées par le cœur ; il est presque toujours de la politique d’écouter la pitié ; il n’y a pas de milieu entre elle et le dernier terme de la cruauté, et Machiavel, dans le code même de la tyrannie, a dit : qu’il fallait savoir s’attacher ceux qu’on ne pouvait faire périr . […] Enfin, la pitié est encore nécessaire pour trouver un terme à la guerre intérieure ; il n’y a point de fin aux ressources du désespoir, et les discussions les plus habiles, et les victoires les plus sanglantes ne font qu’augmenter la haine ; une sorte d’élan de l’âme, tout composé d’enthousiasme et de pitié, arrête seul les guerres intestines, et rappelle également le mot de patrie à tous les partis qui la déchirent. […] heureuse aussi, si j’avais diminué de son activité, en présentant aux hommes une analyse exacte de ce que vaut la vie, une analyse qui démontrât que les destinées diffèrent entre elles bien plus par les caractères que par les situations, que les plaisirs que l’on peut éprouver, dans quelques circonstances que ce soit, sont soumis à des chances certaines, qui, à la longue, réduisent tout au même terme, et que ce bonheur qu’on croit toujours trouver dans les objets extérieurs, n’est qu’un fantôme créé par l’imagination, qu’elle poursuit après l’avoir fait naître, et qu’elle veut atteindre au-dehors, tandis qu’il n’a d’existence qu’en elle.
Transposons ces termes violents en langage impartial : il est très vrai que l’Encyclopédie fit des philosophes un parti, et des idées individuelles un corps de doctrine. […] Il nous fait suivre la genèse naturelle des idées, le développement parallèle des signes, et nous montre dans le langage « un merveilleux instrument d’analyse », qui, par ses termes abstraits où se rassemblent des collections d’idées, par son mécanisme où s’expriment des séries de rapports, facilite de plus en plus la tâche de l’esprit536. […] Les jugements sont des équations, et les termes qu’on assemble sont des objets abstraits, idéaux : nulle part on n’aperçoit mieux que chez Condillac pourquoi l’esprit français au xviiie siècle élimine de sa pensée toute réalité concrète, les formes par conséquent de la vie et la matière de l’art, et pourquoi la poésie ne peut plus être qu’un jeu intellectuel, réglé par des conventions arbitraires.
James Mill traite de mystérieuse, mais qu’il est difficile de changer contre des termes plus intelligibles), il faut qu’un ou plusieurs éléments d’une idée complexe soient séparés du reste : ce qui a reçu le nom d’Abstraction. » Ce dernier procédé, considéré comme subsidiaire par l’auteur, est défini par lui, comme par tout le monde : l’acte de séparer une partie de ce qui est contenu dans une idée complexe, pour en faire un objet qu’on considère en lui-même35, Réduite presque entièrement à un procédé de notation au moyen des mots, l’abstraction ne nous paraît pas traitée selon son importance. […] Il est difficile de traiter séparément de la mémoire, de la croyance, et du jugement ; car une partie de la mémoire est contenue dans le terme croyance, tout comme une partie du jugement. […] « L’anticipation du futur par le moyen du passé, bien loin d’être un phénomène sui generis, est renfermée dans une des lois les plus générales de l’esprit humain. » Quand donc Dugald Stewart et d’autres l’érigent en objet d’admiration, en prodige, en chose qui ne rentre sous aucune loi générale et qu’ils nous disent qu’ils ne peuvent la rapporter qu’à un instinct ; ce qui équivaut à dire, à rien du tout — le terme instinct dans tous les cas ne signifiant que notre ignorance — ils ne montrent que leur impuissance à ramener les phénomènes de l’esprit à la grande loi compréhensive de l’association.
Ce fut, à vrai dire, ce seul honneur auquel je fus le plus sensible. » Il était dans ces termes d’amitié et de correspondance étroite avec la noble princesse ; il venait de recevoir d’elle toutes sortes de nouveaux témoignages d’intérêt et d’affection sur sa fâcheuse mésaventure de Paris, au commencement de 1670. […] C’est dans ces termes modérés et circonspects que Mme de La Fayette justifie Monsieur. […] Une autre lettre écrite à la veille du voyage d’Angleterre, le 28 avril 1670, exprimait les craintes de Madame et ses tristes présages en des termes bien énergiques et bien précis : « Monsieur est toujours trop aigri sur mon sujet, et je dois m’attendre à bien des chagrins au retour de ce voyage… Monsieur veut que je fasse revenir le chevalier, ou bien me traiter comme la dernière des créatures. » Notez qu’elle morte, le chevalier reparut presque aussitôt à la Cour.
Taine, seul, s’est à peu près dispensé de cette tâche secondaire et s’est appliqué dans ses études, soit par la biographie de ses auteurs, soit par des indications induites de leurs écrits, à définir leur organisation mentale, en des termes encore bien vagues. […] La volonté, la mémoire, le sentiment, le langage, une perception, une image, une idée, un raisonnement, sont des termes possédant un sens précis, représentant des faits notoires. […] Une fois tous les indices esthétiques recueillis, triés et précisés, une fois ces signes traduits en leur sens, c’est-à-dire en une série de faits mentaux, et ces derniers exprimés en termes définis de psychologie, il s’agit de rassembler tous ces points épars, de les unir et de les coordonner, au moyen d’une reconstruction hypothétique de l’intelligence dont ils donnent pour ainsi dire le tracé.