Nous ne lui refuserons cependant pas, comme tant d’autres, de l’esprit, des connoissances, & même un certain talent ; mais nous remarquerons que, par une triste fatalité, ces trois qualités littéraires ne s’annoncent dans lui, qu’avec un défaut de consistance & de maintien, si l’on peut se servir de ce terme, qui leur ôte tout le prix. Cet esprit, malgré l’appareil de réflexion & de dignité qu’il s’efforce de se donner, n’a jamais pu se débarrasser d’un je ne sais quel air de petitesse qui en décrédite les créations ; ces connoissances, pour être annoncées d’une maniere affectée & présomptueuse, tombent inévitablement dans les disgraces attachées â l’ignorance & au pédantisme ; ce talent, pour n’avoir pas été sagement cultivé, pour afficher trop de confiance, décele continuellement sa foiblesse, & révolte plus qu’il n’attache ; en deux mots, on peut, d’après l’expression de son premier Maître, M. de Voltaire, comparer l’esprit de M. de la Harpe, à un four qui ne cuit point. […] Ce n’est pas qu’ils soient tout-à-fait dépourvus de mérite : ils annoncent des connoissances, des lumieres, un esprit cultivé, & sont écrits avec assez de correction ; mais ils manquent tous de cette chaleur qui anime & passionne le Lecteur, qui le fait entrer dans les sentimens du Panégyriste, & sans laquelle il n’existe pas de vrai talent.
« Si le besoin d’argent fait travailler pour vivre, il me semble que le triste spectacle du talent aux prises avec la faim doit tirer des larmes des yeux les plus secs. […] Oter aux jeunes gens la permission de s’inspirer, c’est refuser au génie la plus belle feuille de sa couronne, l’enthousiasme ; c’est ôter à la chanson du pâtre des montagnes le plus doux charme de son refrain, l’écho de la vallée… « Il m’a toujours semblé qu’il y avait autant de noblesse à encourager un jeune homme, qu’il y a quelquefois de lâcheté et de bassesse à étouffer l’herbe qui pousse, surtout quand les attaques partent de gens à qui la conscience de leur talent devrait, du moins, inspirer quelque dignité et le mépris de la jalousie. » Nous avons tenu à donner ces fragments dont la finesse et la vérité sont aujourd’hui trop oubliés des critiques et des auteurs. […] Les véritables gens de lettres gémissent envoyant cette nuée de jeunes auteurs qui auraient peut-être du talent s’ils avaient quelques études.
Quand on ne crut plus rien à Athènes et à Rome, les talents disparurent avec les Dieux ; et les Muses livrèrent à la barbarie ceux qui n’avaient plus de foi en elles. […] Il est possible que la somme de talents départie aux auteurs du dix-huitième siècle, soit égale à celle qu’avaient reçue les écrivains du dix-septième201. […] Il y a eu dans notre âge, à quelques exceptions près, une sorte d’avortement général des talents.
Mais le jeune poëte ne tarda pas rencontrer ailleurs la vraie direction de son talent. […] Nous n’avons jamais été très enthousiaste du talent de M. […] Leconte de Lisle n’en a pas moins un très grand talent. […] Il était presque riche, quoique poëte ; sans un ennemi, quoique rempli de talent. […] Albert de Broglie, et nul n’y a mis plus de vigueur, de résolution et de talent.
Est-il permis de voir en lui un poète d’un talent très pur ? […] Le talent de Giusti ne va pas au-delà d’une improvisation ingénieuse. […] Bientôt Alice tire parti de ses talents, et donne des leçons de musique. […] Guizot possède un talent oratoire de premier ordre. […] Le récit du règne de Charles VII révèle dans le talent de M.
Sainte-Beuve n’a pu vouloir, au reste, dans ce parallèle, que poser la limite du talent de Béranger ; il l’a apprécié et loué ailleurs, et il ne prétend rien retrancher sans doute de ses premiers jugements ; mais, cette fois, il aura tenu à faire sa restriction sur ce seul point où Béranger prête le flanc. […] Sainte-Beuve n’a pas craint, en un endroit, d’appliquer au talent de Béranger l’expression de sublime ; un tel mot entraîne bien des réparations et bien du respect.
Jules Barbey d’Aurevilly Nous aimons à louer, avec ferveur et sympathie, un talent très réel, très ému, très naturel et aussi très cultivé, mais il faut bien reconnaître que M. de Châtillon, triple artiste, peintre, sculpteur et poète, qui n’est pas un jeune homme sans expérience, et dont le début pour le public n’est pas un début pour la muse, n’a pas su préserver un talent d’une inexprimable délicatesse, des épaisseurs et des grossièretés de l’art de son temps.
Platon n’a rien à envier aux Muses… La haine a respecté sa conduite, comme l’envie a respecté son talent. […] Il a le génie de la chanson quand Béranger n’en a que le talent.
Et l’on sent à travers tout le volume, malgré, certaines fois, de la monotonie et trop peu de liberté, une imagination délicate, un goût très sûr, un talent souple, qui vous font aimer le poète discret et tendre qu’est M. […] Pierre Quillard Dans le présent recueil, la partie la plus récente et qui donne le mieux l’idée de son talent délicat et grave, le Parc enchanté, est composée sur le plan d’une allégorie mentale à qui s’appliquerait fort exactement la parole ancienne de Stanislas de Guaita.