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1099. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric-le-Grand Correspondance avec le prince Henri — I » pp. 356-374

Je me trouve à présent la plus heureuse mère du monde, qu’ils me sont tous rendus, et il me semble qu’une pierre du cœur m’est ôtée. » À Potsdam, deux ans après, il se montre plein de sollicitude et d’angoisse pour le prince Henri qui a failli être victime d’un accident, de la chute d’un cadre qui lui est tombé sur la tête. […] La guerre de Sept Ans exposa le prince Guillaume à de pénibles épreuves : mis à la tête d’une armée en juin 1757, dans les circonstances les plus difficiles, il ne sut point s’élever à la hauteur voulue ; il hésita, il manqua de résolution, et n’eut de manœuvres que pour faire retraite sur retraite ; il mérita que Frédéric lui écrivît : « Si vous vous retirez toujours, vous serez acculé à Berlin entre ci et quatre semaines. […] Il a besoin de toute sa rhétorique pour imprimer cette doctrine dans la tête du prince Henri, et, lui rappelant la fable des deux médecins Tant-pis et Tant-mieux : « J’ai, lui disait-il, un malade à traiter, qui a une fièvre violente : dans un cas désespéré, je lui ordonne de l’émétique, et vous voulez lui donner des anodins. » Les défauts du prince Henri, tempérés ou, pour mieux dire, stimulés pendant la guerre de Sept Ans par tant d’aiguillons, par ce qu’il avait de jeunesse et par l’impérieuse nécessité des conjonctures, apparaîtront plus à nu et se prononceront sans réserve lorsqu’il vieillira et durant la campagne de 1778.

1100. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La Margrave de Bareith Sa correspondance avec Frédéric — II » pp. 414-431

Votre volonté est accomplie, lui écrivait-il après la victoire de Lowositz (4 octobre 1756)ak; impatienté par les longueurs des Saxons, je me suis mis à la tête de mon armée de Bohême, et j’ai marché d’Aussig à un nom qui m’a paru de bon augure, étant le vôtre, au village de Welmina. […] Qui sait même si la personne principale qui aurait envoyé la lettre de Mme la margrave au roi, qui l’aurait appuyée, qui l’aurait fait réussir, ne pourrait pas se mettre à la tête du congrès qui réglerait les destinées de l’Europe ? […] Le cardinal de Tencin, dans une note dictée par lui à Tronchin, se prêtait à l’ouverture, tout en repoussant doucement la perspective ambitieuse qu’on lui faisait entrevoir ; il y disait : Le plan est admirable : je l’adopte en entier, à l’exception de l’usage qu’il voudrait faire de moi, en me mettant à la tête de la négociation.

1101. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « La princesse des Ursins. Ses Lettres inédites, recueillies et publiées par M. A Geffrot ; Essai sur sa vie et son caractère politique, par M. François Combes » pp. 260-278

; on observerait les proportions et le ton, les convenances ; on ne commencerait point par donner tête baissée dans l’inédit, avant d’avoir lu ce qui est imprimé depuis deux siècles, ce qui hier encore était en lumière et faisait l’agrément de toutes les mémoires ornées ; on ne débuterait pas avec le xviie  siècle par des découvertes : mais si l’on en faisait, on les exprimerait d’une façon plus simple, mieux assortie aux objets, plus digne de ce xviie  siècle lui-même ; on ne jurerait pas avec lui en venant parler de lui ; on ne parlerait pas un langage à faire dresser les cheveux sur la tête à ce monde poli qu’on met en avant à tout propos ; on ne s’attaquerait pas enfin, de but en blanc, à ces gens de Versailles comme si l’on arrivait de Poissy ou de Pontoise. […] [NdA] Il y a mieux ; on lit dans les Mémoires du duc de Luynes, ce répertoire de la parfaite étiquette (tome ii, p. 4) : « MM. les maréchaux de France sont à la tête de la noblesse lorsqu’un d’eux a l’honneur de commander les armées du roi, mais ce n’est point à ce titre précisément que cet honneur est accordé, c’est à la volonté de Sa Majesté.

1102. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Lammenais » pp. 22-43

Sa tête travaille à l’enfanter, et quand il l’a conçu, il l’impose : il appelle cela la Vérité ; et quoi de plus respectable que la Vérité ? […] Ainsi, à chaque page, c’est un coup de tocsin perpétuel ; il ne vit que d’alarmes ; il ne se supporte pas dans le présent ; le présent lui donne des vertiges, et il se précipite tête baissée dans l’avenir. […] — Je ne saurais mieux comparer Lamennais, pour son empressement à devancer les temps, qu’à un homme qui aurait dans la tête une montre à répétition qui lui sonnerait l’heure à chaque minute.

1103. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Madame de Staël. Coppet et Weimar, par l’auteur des Souvenirs de Mme Récamier (suite et fin.) »

« Si la paix continue, les têtes se calmeront, et il y aura ici liberté et repos. […] Puisque le Prince-Régent ne peut marcher à la tête des Anglais, il ne peut commander aux nations qu’en leur dictant à tous la paix. […] « J’ai encore bien des choses curieuses à vous dire sur notre état, mais ce sera pour demain : aujourd’hui, j’ai mal à la tête. » Qu’en dites-vous ?

1104. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Lettres inédites de Jean Racine et de Louis Racine, (précédées de Notices) » pp. 56-75

Aussi suis-je resté stupéfait, l’autre jour, d’entendre un homme de goût, qui sait pourtant toutes ces choses aussi bien et mieux que nous15, en venir à qualifier Racine de « prince de l’école réaliste. » Fuyons ces vilains mots que tout le monde se jette à la tête et qui sont sujets à malentendu et à contresens ; c’en est un ici. […] Le bon sujet Racine, poète de la Grâce et non des Grâces, reçu à l’Académie des Inscriptions dès 1719, était l’hôte de Frênes, d’où on lui écrivait, après son départ, qu’il avait fait les délices de tous par sa présence ; mais il ne faudrait pas prendre ce compliment pour autre chose qu’une pure politesse, et une lettre du Chancelier à M. de Valincour montre que le jeune Racine, dans son séjour à Frênes, s’était montré doux, facile d’humeur, mais peu inventif, rétif à la réplique, nullement propre aux jeux de société, donnant peu l’idée que de beaux vers pussent sortir de cette tête-là ; et de fait, il était de sa personne sans aucun agrément. […] On y trouve à chaque fois de nouvelles beautés, sur lesquelles l’éloge repasse et renchérit ; on en cause avec quelques amis du même temps que nous, avec quelque camarade de collège resté comme nous fidèle à la tradition ; l’on se fait l’un à l’autre pour la centième fois les mêmes citations de certains beaux passages, les mêmes allusions fines auxquelles on répond par un coup d’œil de satisfaction et d’intelligence, en secouant la tête.

1105. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français, et de la question des anciens et des modernes, (suite et fin.) »

Sarpédon, voulant entraîner son ami Glaucus avec lui, et l’exhortant à faire tête en avant, lui tient un langage aussi naturel qu’élevé : « Nous sommes honorés dans la Lycie, lui dit-il, comme des rois, comme des dieux ; nous y avons, à ce titre, de riches domaines ; nous tenons la première place aux festins et ailleurs. Il est juste que nous soyons aussi au premier rang dans les, combats, afin que chacun des nôtres dise, en nous voyant : S’ils font la meilleure chère et boivent le vin le plus doux, ils ont aussi l’énergie et la force quand ils combattent à notre tête. » — Et il ajoute, dans un sentiment bien conforme à l’héroïsme naïf de ces premiers temps, avant l’invention du point d’honneur chevaleresque : « Ô mon cher, si nous devions, en évitant le combat, vivre toujours jeunes et immortels, ni moi-même je ne combattrais au premier rang, ni je ne t’engagerais, toi aussi, à entrer dans la mêlée glorieuse ; mais maintenant, puisque mille chances de mort sont suspendues sur nos têtes, sans qu’il soit donné à un mortel ni de les fuir ni de les éviter, allons, soit que nous devions fournir à d’autres le triomphe, soit qu’ils nous le donnent ! 

1106. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, par M. Camille Rousset. »

Le roi en personne était prêt, en cas de résistance, à se mettre à la tête de cette soudaine armée. […] Quelques coups de fusil à peine échangés, les Français furent dedans aussitôt et occupèrent la tête du pont. […] Par mesure de prudence, les magistrats avaient eu soin de laisser sans poudre les canons du rempart, afin d’ôter aux mauvaises têtes, s’il y en avait, le moyen de commencer un jeu qui aurait mal fini pour la population tout entière.

1107. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Maurice comte de Saxe et Marie-Josèphe de Saxe, dauphine de France. (Suite) »

Un jour que Bruhl lui a donné de l’Excellence par-dessus la tête, il lui insinue gentiment qu’il lui faut du Monseigneur sans Excellence, car l’Excellence est une pauvre monnaie en Cour de France19 ; mais tout cela d’un ton aisé, d’un air de supériorité naturelle qui laisse chacun à sa place, sans hauteur. […] C’est peut-être pour me flatter qu’elles prétendent être invincibles quand je suis à leur tête, mais au moins les ennemis du roi craignent-ils d’être battus lorsque je commande une armée vis-à-vis d’eux. […] On m’avait déjà donné cette raison avec celle de mes occupations militaires, qui ne sont point des inventions ; car je vous assure entre nous que, s’ils ne m’avaient pas, ils ne sauraient où donner de la tête.

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