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166. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIII. La littérature et la morale » pp. 314-335

Mais aussi la combinaison de ces éléments éternels varie incessamment ; vices et vertus changent suivant les temps et de forme et d’intensité ; la moralité dans l’humanité et même dans une seule nation a son va-et-vient, sa hausse et sa baisse, autrement dit son évolution. […] Faut-il faire rentrer l’assistance des pauvres dans les devoirs de pure charité, qu’on remplit ou ne remplit pas suivant le caprice individuel ou parmi les devoirs de stricte justice auxquels on ne saurait se dérober sans forfaire et qui peuvent être imposés par le pouvoir civil ? […] Louis XIV se partage entre ses favorites et son confesseur ; on remarque en lui, à certains moments, le combat de l’amour et du jubilé, suivant l’expression d’une malicieuse contemporaine ; mais c’est l’amour qui triomphe, sans préjudice de brusques accès de dévotion, jusqu’au jour où le grand roi vieilli fera décidément pénitence avec Mme de Maintenon. […] Suivant que l’une ou l’autre prédomine, les caractères de la littérature sont bien différents. […] Tant il est vrai que deux groupes de lecteurs, suivant la prédisposition de chacun d’eux, peuvent être affectés par la même œuvre de façon diverse et même contraire !

167. (1913) La Fontaine « IV. Les contes »

Ainsi est allé devant lui La Fontaine, suivant sa fantaisie et ne suivant qu’elle en tout. […] Cent Tritons, la suivant jusqu’au port de Cythère, Parleurs divers emplois s’efforcent de lui plaire. […] Psyché écrit (comme un personnage de l’Astrée), écrit, au milieu de ses épreuves, les vers suivants sur les rochers d’un désert affreux qu’elle est forcée de traverser : Que nos plaisirs passés augmentent nos supplices ! […] Simone et Sylvia sont des contes charmants où Musset imite la manière de La Fontaine, et de la façon suivante, qui est bien la manière de Musset.

168. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre I »

Nous allons étudier maintenant les grandes voies d’observation qui s’ouvraient à leurs enquêtes et dans lesquelles, suivant leur tempérament, ils durent s’engager. […] Qui parfois même lui reste insoupçonné, comme nous le verrons au chapitre suivant (observation ignorante).

169. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre cinquième. »

Cette fable, et les quatre suivantes, sont du ton le plus simple. […] Nous serons plus heureux dans le livre suivant.

170. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — S’il est plus aisé, de faire une belle action, qu’une belle page. » pp. 539-539

Que faire d’un homme qui vous assure l’existence de Dieu et qui vous nie, le moment suivant, la certitude des sens et de la raison ? […] IV des Odes d’Horace, v. 25 et suivants.

171. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « L’abbé Fléchier » pp. 383-416

Telle Fléchier nous dépeint et nous montre à l’avance la seconde Mme de Caumartin avec laquelle il fera l’année suivante le voyage d’Auvergne, et pour qui il rédigera le récit des Grands Jours. […] Lorsque Louis XIV prit en main le gouvernement après la mort de Mazarin, l’Auvergne était un des pays les plus signalés par le nombre comme par l’impunité audacieuse des crimes ; dès 1661 et dans les années suivantes, les intendants ne cessaient d’y dénoncer à Colbert toutes sortes d’abus de pouvoir et d’excès de la part des nobles, protégés et couverts qu’ils étaient par les officiers mêmes de justice : ce fut aussi l’Auvergne que l’on jugea à propos de choisir pour commencer la réparation dans le royaume. […] Durant quatre mois pleins, depuis le 25 septembre 1665, jour d’arrivée à Clermont, jusqu’au 4 février suivant, jour du départ, la maison de M. de Caumartin fut un centre de réunion et pour MM. des Grands Jours, et pour les principaux de la ville, et même pour ceux de la noblesse qui se rassurèrent à la fin jusqu’à venir affronter la vue des terribles juges. […] Talon dans son zèle, visitant avant tout les prisons « pour voir si elles étaient sûres et capables de contenir autant de criminels qu’il espérait en faire arrêter ; et, suivant les chambres et les cachots, il minutait déjà les conclusions qu’il devait donner. » Ainsi débute et va procéder cette douce ironie sans trop avoir l’air d’y toucher ; et un peu plus loin il nous donnera de la magnifique harangue d’ouverture de M.  […] Ce récit, en style de procès-verbal, vient contrôler utilement l’élégante chronique de Fléchier, et il la confirme de tout point. « Il en prouve, suivant moi, l’authenticité de la manière la plus évidente. » C’est la conclusion d’un magistrat exact et consciencieux, M. 

172. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « MÉLEAGRE. » pp. 407-444

On en sait peu de chose, sinon ce que lui-même nous apprend dans l’épigramme suivante, qu’il avait composée pour son tombeau : « Ma nourrice est l’île de Tyr ; pour patrie attique j’ai eu la Syrienne Gadare ; fils d’Eucratès, moi, Méléagre, j’ai poussé avec les Muses, et ma première course s’est faite en compagnie des Grâces Ménippées. […] je ne sais qu’une chose, c’est qu’Amour a brisé Jupiter lui-même et son vouloir. » Dans l’épigramme suivante, il s’échappera avec la même vivacité, avec la même incohérence passionnée et de façon à moins choquer nos mœurs, qui ne veulent, en fait d’amour, qu’une seule ivresse. C’est à une suivante qu’il est en train de parler pour qu’elle porte à sa maîtresse un message : il la presse, il la rappelle, il court après ; le mouvement est celui de l’entraînement même et de la naïve impatience : « Dis-lui cela, Dorcas, dis-lui et redis-lui, ô Dorcas, deux et trois fois toutes choses. […] » Et quelle fraîcheur matinale et pure dans le couplet suivant, que tant de poëtes latins modernes ont travaillé à imiter sans l’atteindre : « Déjà la blanche violette fleurit, et fleurit le narcisse ami des pluies, et les lis fleurissent sur les montagnes ; mais la plus aimable de toutes, la fleur la plus éclose entre les fleurs, Zénophila, est comme la rose qui exhale le charme. […] » — Une autre fois, s’adressant suivant l’usage à la lampe, il la suppliait de s’éteindre plutôt que de favoriser de sa clarté les plaisirs d’un autre, et il souhaitait de plus que cet autre tombât tout d’un coup accablé de sommeil, comme ce beau dormeur Endymion, lequel, on le sait, ne sentait pas son bonheur.

173. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre premier. Des principes — Chapitre II. Axiomes » pp. 24-74

Cet axiome (avec la définition suivante) nous ouvrira une critique nouvelle relative aux auteurs des peuples, qui ont dû précéder de plus de mille ans les auteurs de livres, dont la critique s’est occupée jusqu’ici exclusivement. […] Étendez à tous les Gentils, le passage suivant où Eusèbe parle des seuls Égyptiens, il devient précieux : Originairement la théologie des Égyptiens ne fut autre chose qu’une histoire mêlée de fables ; les âges suivants qui rougissaient de ces fables, leur supposèrent peu à peu une signification mystique. […] Qu’on nous accorde la proposition suivante (la chose ne répugne point en elle-même, et plus tard elle se trouve vérifiée par les faits) : du premier état sans loi et sans religion sortirent d’abord un petit nombre d’hommes supérieurs par la force, lesquels fondèrent les familles, et à l’aide de ces mêmes familles commencèrent à cultiver les champs ; la foule des autres hommes en sortit longtemps après en se réfugiant sur les terres cultivées par les premiers pères de famille. […] Ce droit monarchique fut conservé par la loi des douze tables dans tous les âges de l’ancienne Rome : Patri familias jus vitæ et necis in liberos esto , le père de famille a sur ses enfants droit de vie et de mort ; principe d’où résulte le suivant, quidquid filius acquirit, patri acquirit , tout ce que le fils acquiert, il l’acquiert à son père. […] Cet axiome termine par le fait la grande dispute à laquelle a donné lieu la question suivante : le droit est-il dans la nature, ou seulement dans l’opinion des hommes ?

174. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — II. (Fin.) » pp. 322-341

Une fois sur le chapitre du pittoresque, songeant surtout aux jardins anglais, Beyle le fait venir d’Angleterre comme les bonnes diligences et les bateaux à vapeur : le pittoresque littéraire, il l’oublie, nous est surtout venu de Suisse et de Rousseau ; mais ce qui est joli et fin littérairement, c’est la remarque qui suit : « La première trace d’attention aux choses de la nature que j’aie trouvée dans les livres qu’on lit, c’est cette rangée de saules sous laquelle se réfugie le duc de Nemours, réduit au désespoir par la belle défense de la princesse de Clèves. » Même en rectifiant et en contredisant ces manières de dire trop exclusives, on arrive à des idées qu’on n’aurait pas eues autrement et en suivant le grand chemin battu des écrivains ordinaires. […] Sur les bords de l’Isère, apercevant les ruines du château Bayard : « Ici naquit Pierre Du Terrail, cet homme si simple, dit Beyle, qui, comme le marquis de Posa de Schiller, semble appartenir par l’élévation et la sérénité de l’âme à un siècle plus avancé que celui où il vécut. » Mais pourquoi, à la page suivante, en visitant le château de Tencin, Beyle, venant à nommer le cardinal Dubois, tente-t-il en deux mots une réhabilitation qui crie : « La France l’admirerait, dit-il de ce cardinal, s’il fût né grand seigneur ?  […] Le Rouge et le noir, intitulé ainsi on ne sait trop pourquoi, et par un emblème qu’il faut deviner, devait paraître en 1830, et ne fut publié que l’année suivante ; c’est du moins un roman qui a de l’action. […] Quand je serai de nouveau pauvre diable, vivant au quatrième étage, je traduirai cela fidèlement ; la fidélité, suivant moi, en fait tout le mérite.

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