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640. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre VIII. La mécanique cérébrale »

Ce n’est pas au moment même où le cerveau est encore ébranlé par une impression vive, que les souvenirs se déroulent avec précision. […] Quelle différence y a-t-il physiologiquement entre un souvenir et une métaphore, entre l’espérance et le désir, entre l’amour et la haine, l’égoïsme et le désintéressement ?

641. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Charles Monselet »

Quelques vers, tout le passé d’un homme… tout le passé dont il veuille se souvenir. […] Ou encore (dans Muezzin) : Vous pensiez aux jours de courte durée, Qui laissent en nous si longs souvenirs ; À l’espoir qui passe en robe dorée.

642. (1887) Études littéraires : dix-neuvième siècle

Mais il faut s’en souvenir. […] Il s’en est toujours souvenu, et toujours a eu un fond de rêverie arcadienne ou sicilienne. « comme un vase imprégné d’une première odeur » en garde toujours un vague parfum. […] Il faut se souvenir que jamais avant 1820, sauf dans quelques vers, égarés çà et là, de Ronsard, et un peu frustes de forme, les délicatesses et les ardeurs du sentiment le plus difficile à rendre, et peut être à ressentir, ne s’étaient exprimées ainsi. […] Le monde extérieur, spectacles, impressions, souvenirs, lectures, dépose dans l’âme du poète des matériaux qui y prennent une forme, un relief et un éclat particulier. […] Dans A celle qui est restée en France, par exemple, quand le père s’approche des lieux où dort la morte, ce cri sublime : Ô souvenirs !

643. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Benjamin Constant et madame de Charrière »

Cette lettre, le regret sourd de la quitter, le dépit d’avoir manqué cette affaire, le souvenir de quelques conversations attendrissantes que nous avions eues ensemble, me jetèrent dans une mélancolie sombre. […] Enfin vous serez toujours le plus cher et le plus étrange de mes souvenirs. […] Ce Riouffe est extrêmement aimable… Benjamin est logé dans la rue du Colombier ; j’ai cru voir dans ce choix un souvenir sentimental. » « 23 messidor. […] « J’avais perdu toute espérance, ma chère grand’mère ; je croyais que vous ne vous souveniez plus de moi, et que vous ne m’aimiez plus. […] Je disais : « Ce sont mes cousins qui sont auprès de ma grand’mère qui m’effacent de son souvenir ; il est vrai qu’ils sont aimables, qu’ils sont colonels, capitaines, etc., et moi je ne suis rien encore : cependant je l’aime et la chéris autant qu’eux.

644. (1888) Portraits de maîtres

Il ne sied pas de confondre ainsi les visions et les souvenirs. […] La vieille Égypte les contemple et les trouve aussi grands que ses souvenirs. […] Est-ce dans cette grande poésie grecque pleine d’allusions, de souvenirs, de légendes, de mythes ? […] Il emporta donc en Grèce cette image, inséparable désormais du souvenir de sa mère. […] Souvenirs, p. 44, Charpentier.

645. (1911) Visages d’hier et d’aujourd’hui

On oubliait, précisément, les âmes : il se souvint d’elles et il les défendit. […] Et je me souviens de Tolstoï à qui on offrait de connaître Cesare Lombroso… « Jamais de la vie ! […] Le proche souvenir de son père l’incitait et le protégeait contre l’erreur. […] Certes, il est un sculpteur très moderne, épris de son indépendance et qui a secoué le souvenir des écoles. […] Mais arrivent les souvenirs de la bien-aimée qui était là : et ils ajoutent leur gaieté, leur charme à la mélancolie où tu es.

646. (1883) Le roman naturaliste

pour pouvoir incorporer à l’histoire du présent le souvenir du passé ? […] « Te souviens-tu qu’un jour ?.. […] Tel fut, s’en souvient-on ? […] ou « du souvenir dans de l’imagination mêlée à du rêve ?  […] Le souvenir !

647. (1848) Études sur la littérature française au XIXe siècle. Tome III. Sainte-Beuve, Edgar Quinet, Michelet, etc.

Il est tout entier dans la complaisance avec laquelle sont retracés des souvenirs plus purs et plus chers. […] Des larmes assez pures, assez saintes, mouillent-elles ce tendre souvenir ? […] Je me laisse rentraîner à l’enchantement volage des souvenirs. […] Au moment de poser la plume, mille souvenirs de cette riche lecture me demandent une mention, un mot. […] Pour à présent, je n’ai pas le souvenir d’une œuvre d’art, mais d’une visite que, sous la conduite de M. 

648. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIe entretien. Trois heureuses journées littéraires » pp. 161-221

On se réfugie dans ses souvenirs pour échapper à ses angoisses. […] Tant qu’un homme se souvient, il revit. […] III Vous souvient-il de ces délicieuses pages de Boccace, un des esprits les plus optimistes, les plus souriants, les plus causeurs, de toutes les littératures, pages dans lesquelles il raconte comment d’un désastre universel naquit le Décaméron, qui amusera le monde tant qu’il restera un sourire sur les lèvres de l’humanité ? […] Et suis-je bien sage en effet d’aller chercher si loin ce que j’ai sous mes pas, et ce que j’ai avec ce bien inestimable que je n’aurai pas ailleurs : la douce habitude, l’ombre du toit paternel sur ma tête, les tendres souvenirs de l’enfance et de la famille autour de moi ? […] Si l’artiste ami regarde de là-haut ceux qui souffrent de leur génie, avec la compassion d’un homme qui a tant souffert du sien, qu’il jette un de ses regards sur cette demeure muette de Saint-Point, vide aujourd’hui de ceux qu’il aima tant, et qui ne cesseront de l’aimer eux-mêmes qu’en cessant de se souvenir.

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