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329. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre VI » pp. 394-434

On rencontre à la ville, le beau Narcisse qui se lève le matin pour se coucher le soir ; le nouvelliste dont la présence est aussi essentielle au serment des lignes suisses, que celle du Chancelier et des lignes même ; il y a Théramène qui est très riche, et qui a donc un très grand mérite ; Théramène, la terreur des maris. […] Est-ce ma faute à moi, si je ne suis plus jeune, et pourquoi donc comptez-vous ma persévérance, mon courage, et mes luttes de chaque soir ?  […] — L’un qui soutenait mademoiselle Mars d’une main si ferme, l’autre qu’elle-même elle soutenait, en lui prêtant sa blanche épaule ; celui-ci qui survivra à toutes choses, même à une perte irréparable ; celui-là qui se sentait mourir, le soir même où il perdait sa comédienne bien-aimée et qui, à cette heure, est mort sans retour ! […] eut grand peine à se faire entendre ; on n’entendait ce soir-là, ou pour mieux dire, on ne voyait que mademoiselle Mars, attirant à elle toute l’attention, toutes les sympathies. […] Elle appela madame Mélingue sa fille, lui disant que c’étaient là de nobles larmes ; Mélingue, à son tour, essuya ses larmes, et quant au critique : « Voilà, dis-je à mademoiselle Mars, voilà pourtant comment nous étions tous hier soir ! 

330. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Charles Magnin ou un érudit écrivain. »

Combien de fois, en ces années d’ardeur et de zèle, à la veille ou au lendemain de quelque publication de nos amis les poètes, ne suis-je pas allé trouver le soir M.  […] Chaque fois, vers neuf heures du soir, il me laissait un moment pour aller assister au coucher de sa grand-mère, à laquelle il consacra jusqu’à la fin les soins les plus respectueux et les plus tendres. […] Magnin eut l’honneur de rédiger au Globe les feuilletons et les bulletins d’Hernani : c’est de lui (sans compter le grand article qui suivit), c’est de lui que sont les entrefilets des 26 et 28 février 1830, tout haletants, tout fumants, tracés le soir à minuit, sur un coin de table à l’imprimerie, au sortir d’une représentation brûlante. […] Voilà donc à quoi s’exerçait soir et matin, à quoi songeait tout le jour l’ingénieux érudit.

331. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIe entretien. Trois heureuses journées littéraires » pp. 161-221

La mémoire, c’est la lampe du soir de la vie : quand la nuit tombe autour de nous, quand les beaux soleils du printemps et de l’été se sont couchés derrière un horizon chargé de nuages, l’homme rallume en lui cette lampe nocturne de la mémoire ; il la porte d’une main tremblante tout autour des années aujourd’hui sombres qui composèrent son existence ; il en promène pieusement la lueur sur tous les jours, sur tous les lieux, sur tous les objets qui furent les dates de ses félicités du cœur ou de l’esprit dans de meilleurs temps, et il se console de vivre encore par le bonheur d’avoir vécu. […] Quel que soit le plaisir qu’on se promette d’un grand voyage, il y a toujours dans le paysage qu’on va quitter une voix prudente et un peu triste qui semble vous dire par chaque rayon de soleil, par chaque ombre d’arbre, par chaque rayon du soir qui se couche : « Pourquoi me quitter ? […] J’appris des laboureurs et des batteurs de grain Ce rythme indéfini qui dans l’écho s’achève ; Que de soirs, j’ai trouvé, dans ce vague refrain, Enfant, un doux sommeil, jeune homme, un plus doux rêve ! […] Le soir, lorsque je sors de la chambre d’étude, Quand je reviens des bois, rapportant des moissons De rameaux ou de vers cueillis sur les buissons, Devant l’âtre joyeux où le sarment pétille, Près de l’auguste aïeul se groupe la famille ; Non loin de ses genoux chargés de mes enfants, S’assied la jeune mère aux regards triomphants ; Tandis qu’avec les fleurs, butin de la journée, Ma sœur comme un autel orne la cheminée.

332. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIe entretien. La passion désintéressée du beau dans la littérature et dans l’art. Phidias, par Louis de Ronchaud (1re partie) » pp. 177-240

Et ils le regardent longtemps filer dans la foule comme les bergers de nos montagnes en ramenant leurs moutons bien comptés au village, les soirs d’un mois d’été, regardent tout ébahis glisser une étoile filante qui vient du ciel s’éteindre dans un étang, sans savoir ce qu’elle a à faire dans la vallée et quel message elle apporte ou elle remporte parmi eux. […] XV Cet amour amer des lieux abandonnés et des noms toujours chers de ces lieux, autrefois habités par la famille, m’a ramené une fois (il y a longtemps) seul, à pied, un sac de voyage sur le dos, sur ces plateaux et dans ces vallées de la Franche-Comté, pour y voir de mes yeux ces châteaux démantelés, ces usines retentissantes du bruit des marteaux, ces torrents blanchissant de leur écume la roue des moulins qui font tourner les cylindres sous lesquels s’aplatissent les barres de fer ; ces forêts de pins qui gravissent de rocher en rocher les montagnes escarpées de Saint-Claude comme des armées végétales de géants montant à l’assaut des nuages ; ces fromageries, noircies par la fumée des chaudières, bâties en planches dans les clairières de ces forêts, autour desquelles les vaches aux clochettes sonores se groupent le soir pour livrer aux femmes leurs pis gonflés, comme des outres vivantes, de ce lait qui va se convertir en gruyère doré et percé de trous comme un rayon de miel avec ses alvéoles. […] Ces montagnes, comme entassées confusément par la main du Créateur, sont en général arrondies en forme de dômes, les unes noires des forêts de pins qui les tapissent de leurs ombres, les autres vertes des pâturages qui les veloutent ; celles-ci nues et grisâtres parce que leur pente plus rapide en a laissé glisser l’humus, que le soleil du soir en s’y répercutant à nu les fait blanches à l’œil comme des falaises lointaines au bord de la mer ; quelques-unes, derrière les autres, sont tachées au nord de quelques flaques de neige, restes de l’hiver dernier qui attendent un autre hiver ; phares de montagnes que les bergers regardent s’allumer ou s’éteindre selon que le soleil levant les frappe, ou que le soleil couchant leur retire ses derniers rayons en descendant du ciel. […] XXV Saint-Claude, ville aussi toute sacerdotale et toute laborieuse des petites industries du fer et du buis ciselé, est la Zharklé du Jura ; ses cloches retentissent et ses cheminées fument ; ses silences dorment et ses cours d’eau, et ses scieries, et ses enclumes, et ses tours où l’on façonne le buis, bruissent comme une ville fantastique qui apparaît hors de la portée des sens, au fond d’un des cercles du Dante, à travers le brouillard des eaux pulvérisées par leur chute et des rayons du soir répercutés par les parois de ces montagnes.

333. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXV » pp. 299-300

LXXV Ce 6 février 1845, au soir.

334. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lemoyne, André (1822-1907) »

. — Fleurs du soir (1893).

335. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — I. » pp. 413-433

Si vous étiez dans le cas de me faire encore de ces visites de 5 heures du soir que j’aimais tant, vous pourriez, libre au sein de l’amitié, dire sur la politique, la guerre, etc., le mot et la chose : avec des gens qui ne sont point initiés et qui ne méritent pas de l’être, soyons plus réservés. […] Le début est spirituel ; on y voit le Brutus toujours inquiet, et faisant l’Argus, même quand il est couché sur ce lit où chaque soir, comme lui dit le poète, Vous dormez d’un seul œil, tandis que l’autre veille, Et que votre suspect tranquillement sommeille. […] Toi qui, le long du jour, sifflant des ariettes, Ou d’un Homère grec feuilletant les vignettes, Achètes tristement, par sept heures d’ennui, Le brouet qu’à ma muse on apporte à midi ; Et qui, le soir venu, plus vigilant encore, Pour guetter une rime, attends souvent l’aurore !

336. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — IV » pp. 103-122

Il n’a été délivré aujourd’hui que le soir, et encore fort tard. […] La retraite des deux ailes, vers deux ou trois heures de l’après-midi, s’était faite régulièrement et sans être inquiétée. « Notre canon, dit l’un des généraux de l’artillerie, tira toujours sur l’ennemi jusqu’au dernier moment de la retraite, et le contint si bien, que les derniers coups qui se tirèrent en cette journée furent des coups de canon. » Le maréchal de Bouflers eut toute raison d’écrire au roi, de son camp de Ruesne, dès le 11 au soir : « Je puis assurer Votre Majesté que jamais malheur n’a été accompagné de plus de gloire. » On lit dans la relation de la bataille qui fut publiée par les alliés (c’est-à-dire les ennemis) : « On ne peut refuser au maréchal de Villars la gloire d’avoir fait ses dispositions et ménagé ses avantages avec autant d’habileté qu’un général pût jamais le faire. » L’honneur de nos armes dans ces contrées, qui était resté comme accablé et gisant sous le coup des défaites d’Oudenarde et de Ramillies, se releva ; les adversaires, les Anglais surtout, avouaient qu’ils avaient, en ce jour, retrouvé les braves Français, les Français d’autrefois, et qu’on voyait bien qu’ils ne demandaient qu’à être bien menés pour être toujours les mêmes. […] Dès le soir et dans la nuit du 23 juillet, Villars donna ses ordres et mit ses troupes en mouvement.

337. (1894) Propos de littérature « Chapitre II » pp. 23-49

Et Celle de ces mains de deuil, Qui donc pouvait-elle bien être, Pour que la mort fût sur mon seuil, Depuis ce soir de la fenêtre. […] Ce sont tes frères les Désirs Avec leurs faces impérieuses et suppliantes Et leurs guirlandes d’amaranthes Et de soucis et de riantes Lèvres qui pleureraient vite À quelque dur déni d’un destin obstiné, Tu sais où leurs regards jadis t’ont conduite Pauvre Âme en qui le soir, comme une autre âme, est né. […] Vois, tous les soirs sont morts au large de la Tour triste Qui plonge au marais noir ses murs que verdit l’eau ; Ton diadème est lourd d’une antique améthyste Et tes cheveux d’or lisse échappent au bandeau,      Et ta robe s’efface en chimères fanées.

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