/ 4089
659. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, par M. Camille Rousset, professeur d’histoire au lycée Bonaparte. »

Pourquoi Louis XIV, dans sa campagne de Hollande, en 1672, n’a-t-il pas su que c’était à Muyden, petite ville à sa portée, qu’était la clef de sa conquête, le nœud de toutes les écluses qu’il suffisait de lâcher pour inonder le pays ? Il ne le sut qu’après coup et trop tard. […] M. de Louvois dit l’autre jour tout haut à M. de Nogaret : « Monsieur, votre compagnie est en fort mauvais état. — Monsieur, dit-il, je ne le savais pas. — Il faut le savoir, dit M. de Louvois ; l’avez-vous vue ? […] Je ne sais si M.  […] Vauban lui en sut un gré proportionné au bon office ; et Colbert, revenu de ses préventions, eut beau faire ensuite des avances à l’homme de génie qui restait malgré tout l’honnête homme offensé, il ne put jamais le gagner et le reconquérir sur son grand rival.

660. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les fondateurs de l’astronomie moderne, par M. Joseph Bertrand de l’académie des sciences. »

Il a lu, —  ce qui s’appelle lu, — les savants ouvrages des La Place et des La Grange, les mémoires des Clairaut, des d’Alembert, des Poinsot ; il y a ajouté peut-être sur quelques points, et il sait par cœur Voltaire et Alfred de Musset. […] Savoir le latin est bien : savoir la géométrie est pour le moins une marque aussi élevée de culture. […] Pezzani sait, de science certaine, tout cela. […] il ne peut se résigner à savoir à demi et à ignorer. […] Ne sauras-tu consentir à rester à ta place ?

661. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Idées et sensations : par MM. Edmond et Jules de Goncourt. »

Ces Suard, ces Morellet, tout académiciens qu’ils sont devenus, n’étaient ni plats ni serviles ; ils savaient au besoin se faire mettre, comme d’autres, à la Bastille ou dans un château fort. […] Il faut savoir valser sans s’éblouir pour suivre jusqu’au bout un tel cortège affolé et tournoyant. […] On ne peut pourtant pas s’inquiéter à tout jamais des anciens, je le sais, et les avoir sans cesse interposés entre son objet et soi. […] Il ne saurait y avoir rien d’exclusif chez ceux qui n’ont pour peindre que des mots et des syllabes. […] Ils sont loin d’ailleurs d’être toujours des réalistes purs ; ils ont de la fantaisie, et ils savent y mêler du sentiment.

662. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre X. Les sociales »

Il donne à qui sait lire la joie du plus merveilleux des spectacles : l’allure libre d’une de ces âmes philosophiques qui — dit à peu près Platon — savent porter avec grâce leur manteau de lumière. […] Savez-vous pourquoi, à cet instant, la métaphore titube un peu ? […] Le Tailhade actuel, dans sa précipitation, oublie quelquefois qu’il sait le latin et même le français. […] Il ne sait même pas mépriser d’une façon qui ne soit pas méprisable. […] Mais je sais le sens complexe de ton sourire.

663. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Balzac. » pp. 443-463

Mais que de choses aussi il savait voir et dévorer d’un seul coup d’œil ! Il venait, il causait avec vous ; lui, si enivré de son œuvre, et, en apparence, si plein de lui-même, il savait interroger à son profit, il savait écouter ; mais, même quand il n’avait pas écouté, quand il semblait n’avoir vu que lui et son idée, il sortait ayant emporté de là, ayant absorbé tout ce qu’il voulait savoir, et il vous étonnait plus tard à le décrire. […] Les Marneffe, les Bixiou, les Birotteau, les Crevel, etc., sont ainsi nommés chez lui en vertu de je ne sais quelle onomatopée confuse qui fait que l’homme et le nom se ressemblent. […] Eugène Sue ne sait pas autant écrire que Balzac, ni aussi bien, ni même aussi mal, et aussi subtilement dans le mal. […] Dumas, tout le monde sait sa verve prodigieuse, son entrain facile, son bonheur de mise en scène, son dialogue spirituel et toujours en mouvement, ce récit léger qui court sans cesse et qui sait enlever l’obstacle et l’espace sans jamais faiblir.

664. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Histoire du chancelier d’Aguesseau, par M. Boullée. (1848.) » pp. 407-427

Dès son enfance, le jeune d’Aguesseau apprit toute chose, il continua d’apprendre toute sa vie, et l’on serait assez embarrassé de dire quelle science, quelle langue et quelle littérature il ne savait pas. Une mère demandait un jour à Fontenelle de lui indiquer un précepteur pour son fils, mais elle exigeait que ce précepteur fût savant, érudit en toute matière, antiquaire, physicien, métaphysicien, enfin qu’il sut tout, et quelque chose encore au-delà. […] En même temps, la netteté et la justesse des méthodes introduisait avec facilité et disposait avec ordre tout ce savoir dans ce jeune, dans ce bel et à la fois solide esprit. […] On ne saurait mieux penser ni plus modérément ; c’est spirituel et fin, avec une légère réminiscence socratique. […] Nous savons les défauts et nous avons pu apprécier aussi les qualités de d’Aguesseau écrivain et homme.

665. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Nouveaux documents sur Montaigne, recueillis et publiés par M. le docteur Payen. (1850.) » pp. 76-96

Je sais tel autre savant qui a placé sa dévotion et son culte en tout autre lieu, en Bossuet, et qui nous prépare une Histoire complète, exacte, minutieuse, de la vie et des ouvrages du grand évêque. […] Sachons les traverser, mais ne nous écrions pas tous les jours, comme nous sommes disposés à le faire, qu’il ne s’est jamais trouvé sous le soleil d’orages pareils à ceux que nous traversons. […] Je ne sais pourtant s’il voudrait changer de méthode et de procédé, même sur un plus vaste théâtre. […] Aux Gibelins, j’étois Guelfe ; aux Guelfes, Gibelin. » Au milieu de ses griefs personnels, il sait assez détacher et élever sa pensée pour réfléchir avant tout sur les malheurs publics et sur la dégradation des caractères. […] Avec Montaigne pourtant, de la nature dont nous le savons, cette pensée d’observation stoïque ne laissait pas d’introduire quelque consolation jusque dans les maux réels.

666. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Édelestand du Méril »

Depuis plus de trente ans, il faut bien qu’on le sache ! […] Il les a toujours, je le sais, et même son livre en fait foi. […] Je n’ignore pas, sans doute, qu’il y a eu l’art en sus, l’art qui s’est développé dans les derniers temps et qui, plus tard, a fait ces chefs-d’œuvre dont quelques-uns nous ont rendus si fiers. […] Il sait que la science a le temps d’attendre son temps et qu’il vient toujours, pendant que les générations jouent à leurs fossettes ou califourchonnent leurs vélocipèdes. […] Il en est, qui sait ?

667. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXVI. Des oraisons funèbres et des éloges dans les premiers temps de la littérature française, depuis François Ier jusqu’à la fin du règne de Henri IV. »

Nous avons été longtemps des barbares pleins d’imagination et de gaieté, qui savions danser et combattre, mais qui ne savions pas écrire. […] Il fut, comme on sait, le plus grand homme de son siècle. […] Tout le monde sait comment ces espérances et ces éloges furent démentis. […] On sait qu’à tous les agréments de la figure, elle joignit tous ceux de l’esprit. […] Il n’y a personne qui ne sache, et les motifs et les circonstances de ce meurtre.

/ 4089