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216. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Figurines »

Lui, le saint, il cite Sénèque le philosophe ; il cite Ovide, lui, le mortifié. […] Nous avons un faible pour les saints plébéiens qui maltraitent les riches, les puissants, les heureux de la terre. […] » Je me demandais ce qu’il y a de commun entre ce saint et nous. […] » Son enfance est d’un Éliacin élevé dans l’ombre du sanctuaire par de saints hommes très graves et très naïfs. […] Mme de Sévigné a passé sa vie à adorer une Ombre — comme sa grand’mère sainte Chantal.

217. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Jocelyn (1836) »

L’orage grondant vient battre les murs de la sainte maison dans laquelle il prolongeait sa vie de prière, et parfois de rêverie. […] Il s’échappe donc une nuit, pendant le sommeil de Laurence, de la vallée périlleuse et troublée ; il accourt à Grenoble, il se glisse dans le cachot, et là, aux pieds du saint évêque qu’il trouve implorant tour à tour, menaçant et ordonnant, s’agite en lui la lutte pathétique dans laquelle il ne se relève que prêtre et à jamais consacré. […] Là vit l’homme de Dieu dont le saint ministère  Du peuple réuni présente au ciel les vœux, Ouvre sur le hameau tous les trésors des cieux, Soulage le malheur, consacre l’hyménée, etc.  […] Ces antiques et éternelles géorgiques (ascræum carmen), reprises par une voix chrétienne, ont une douceur nouvelle et plus pénétrante ; la sainte sueur humaine, mêlée à la sueur fumante de la terre, est bénie ; le respect, la religion du travail vous gagne, et, à l’heure de midi, quand la famille épuisée s’arrête et va boire un moment à la source, on s’écrie humainement avec le poëte :   Oh ! […] C’est ainsi que le Temps, par Dieu même conduit, Passe, pour avancer, sur ce qu’il a détruit ; Esprit saint !

218. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Anatole France, le Lys rouge »

Ou peut-être imaginent-ils une parenté sacrilège entre les désirs inapaisés des âmes saintes d’autrefois et l’inassouvissement de leurs propres corps. […] Thaïs est l’histoire d’une sainte ; la Rôtisserie est l’histoire d’un prêtre bohème, de conscience originale ; et l’amour de Thérèse et de Jacques est grand visiteur d’églises… Rien de surprenant dans ces prédilections. Un bon nihiliste aime naturellement les saints ; car la foi religieuse implique une part de révolte contre la société terrestre, contre ses injustices et ses atroces ou ridicules conventions, et elle peut agréer par là aux plus audacieux esprits.

219. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Madame de Montmorency » pp. 199-214

Italienne et Romaine, c’est-à-dire exclusivement faite pour l’amour et sans les vanités françaises, elle se contenta d’être une vraie femme d’abord, et ensuite une sainte femme, et à aucune époque de sa noble vie elle n’eut le souci ni le goût du célèbre salon bleu d’Artémise, dans lequel le grand Condé lui-même se rapetissait. […] été une heureuse, cette sainte de l’amour, comme dit Renée, eut le courage de devenir une sainte tout à fait.

220. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Madame de Sévigné » pp. 243-257

… Madame de Sévigné et ses amoureux, ces patiti qu’elle régalait de petites faveurs innocemment perverses, n’a donc rien à faire avec les femmes vertueuses pour de bon du xviie  siècle, avec ces saintes dont l’abbé Maynard, l’éminent auteur du Saint Vincent de Paul, nous écrit en ce moment la vie ; et si Hippolyte Babou, de cette main légère qui est la sienne, nous les môle à madame de Sévigné et à ses amoureux, dans son volume, comme des cartes à jouer qu’on fait se retrouver dans le même paquet, c’est que Babou, qui sait bien ce qu’il fait et qui ne fait que ce qu’il veut, ne veut être aujourd’hui qu’un faiseur de tours de cartes avec l’Histoire. […] Or, parmi ces femmes vertueuses dont Babou nous a donné les images, il y en a une qui fut une sainte, et qui n’est un sujet d’histoire que dans le livre des Anges, si, comme je le crois, ils suivent du ciel les mouvements de nos âmes et sont, là-haut, nos historiens ! […] Lui, l’auteur des Païens innocents, et d’une notice sur le président de Brosses qui est du paganisme coupable, voilà qu’il nous écrit avec le sentiment le plus catholique la vie d’une sainte, et avec la même aisance qu’il eût écrit celle de Ninon !

221. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « IV. M. Henri Martin. Histoire de France » pp. 97-110

Martin, de vouloir bien lui faire la preuve de cette incroyable théorie qui fait la Gaule plus belle et meilleure que la France d’après César, Clovis, et nos saints et glorieux évêques ! […] C’est enfin qu’elle n’est pas à Dieu parce que la femme ne doit pas s’élever seule à Dieu. » Que si avec tout cela Héloïse n’est pas druidesse, elle est du moins la grande sainte de l’amour ! […] Martin, dès qu’il s’agit de théologie, d’église, de saint père, de conciles.

222. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Crétineau-Joly » pp. 247-262

Mais la vie de Crétineau n’est pas la vie d’un saint. Il aimait les saints, il les honorait, il se serait battu en duel pour eux, comme d’Orsay, le beau d’Orsay, se battit un jour pour la sainte Vierge ; mais ce diable de Crétineau n’en était pas un.

223. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Hector de Saint-Maur »

Il est trop vivant et trop équilibré dans ses facultés, il est trop harmonieux en toutes choses, pour tomber dans cette mélancolie que Saint-Chrysostôme — gai lui-même comme un Saint et qui s’en moquait — appelait si joliment : « le bain du diable ». […] La côte est difficile et raide, — c’est très haut ; Sur le sommet du mont, dans la mousse et dans l’herbe, Sainte Cécile est là, devant vous : — regardez L’humble chapelle avec ses vieux murs lézardés. […] L’homme alors que tourmente un éternel souci S’interroge : — Est-ce là l’asile salutaire Où la pensée est sainte, où la joie est austère ? 

224. (1949) La vie littéraire. Cinquième série

Une sainte même n’y serait pas insensible. […] Voilà la puissance de la femme sur un saint. […] Le saint homme promit de la satisfaire et partit. […] Vilate avait raison : Robespierre eut ses saintes. […] On a, de ce temps-là, des assiettes en faïence de Nevers représentant de saintes femmes avec cette légende : sainte Catherine, sainte Madeleine, bonnes citoyennes.

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