Le sentiment que Du Rier prête à Scevola, dans la tragedie qui porte ce nom, quand il lui fait dire en parlant du peuple romain que Porsenna, auquel il parle, vouloit affamer : se nourrira d’un bras et combattra de l’autre.
Pour les esprits qui ne passent pas leur vie à couper en quatre des fils de la Vierge avec de microscopiques instruments, il n’y a que trois femmes en nature humaine et en histoire : La femme de l’Antiquité grecque (car la matrone romaine, qui tranche tant sur les mœurs antiques, n’est qu’une préfiguration de la femme chrétienne), la femme de l’Évangile, et la femme de la Renaissance, — pire, selon nous, que la femme de l’Antiquité, pire de toute la liberté chrétienne dont la malheureuse a si indignement abusé.
Comme on s’obstina bien longtemps dans la comparaison fatale entre la Restauration des Bourbons et la Restauration des Stuarts, et, plus tard, comme on voulut voir de mystérieuses identités entre la Révolution de 1830 et la Révolution de 1688, de même aujourd’hui la fin d’une République, l’ascendant dynastique d’un homme qui semble avoir absorbé si profondément dans sa gloire le nom de César que, quand on le prononce, c’est à Napoléon qu’on pense, aux qualités impériales retrouvées dans le neveu du César moderne de manière à rappeler involontairement le neveu du César ancien, toutes ces diverses circonstances ont introduit dans les esprits la préoccupation de la grande époque romaine et fait regarder beaucoup la nôtre à travers… Le titre du livre de l’abbé Cadoret semble tout d’abord rappeler cette préoccupation contemporaine.
Gardez donc de donner, ainsi que dans Clélie, L’air ni l’esprit français à l’antique Italie, Et sous des noms romains faisant notre portrait Peindre Caton galant et Brutus dameret. Tout le Dialogue des héros de roman n’est aussi qu’une parodie, qui fait ressortir le contraste perpétuel des mœurs et de la Fable dans un certain nombre de romans et de tragédies du temps : Boileau n’admet pas qu’on représente la cour et la ville sous le costume romain ou persan. […] Il faut lui montrer son idée du Romain et son idée du Français, si on veut qu’il reconnaisse des Romains et des Français, et de plus des hommessous ces deux apparences.
Polybe, dans son Histoire générale de la république romaine, aux quatre derniers chapitres du premier livre, raconte avec sa précision accoutumée la guerre des mercenaires contre les Carthaginois. […] Et ce n’est pas seulement sur la bataille des défilés de la Hache qu’il a des informations si complètes ; cette Carthage dont les historiens romains parlent trop peu, ce sénat de marchands praticiens, cette religion monstrueuse et subtile, ces temples hideux, ces divinités infâmes, les mœurs publiques, les mœurs privées, tout enfin lui a été révélé avec la plus minutieuse exactitude. […] « En Afrique, dit Tertullien, on immolait publiquement des enfants à Saturne jusqu’au proconsulat de Tibère. » Tertullien ajoute que le magistrat romain fit crucifier les sacrificateurs sur les arbres qui protégeaient ce culte infâme, et il s’écrie : « J’en prends à témoins les soldats de mon pays qui exécutèrent les ordres du proconsul.
Il n’a plus eu à placer debout de grandes figures ratatinées en petites vignettes, comme le poète Benserade, avant lui, avait pensé à mettre toute l’histoire romaine en sonnets. […] Renan s’est si ridiculement épris, et qui, avec ses courtes idées de romain et de philosophe, ne comprit rien à ce bouillonnement religieux puisqu’il voulait l’éteindre brutalement dans le sang de la plus inepte et de la plus cruelle des persécutions… Et, pourtant, si les idées de civilisation et de progrès, que l’esprit moderne proclame comme la gloire du genre humain et son ascendante destinée, ne sont pas des mots vides de sens et de certitude, Marc-Aurèle, pour peu qu’il eût été ce que son historien prétend qu’il fut, aurait tenu pour les chrétiens contre le monde antique ; car les chrétiens, c’était alors la civilisation et le progrès tels que nous les entendons aujourd’hui. […] Mais c’est justement parce qu’il était empereur qu’il pouvait le faire sans danger… parce que l’opinion de l’empereur — de ce détenteur absolu du pouvoir suprême — pouvait tout sur un peuple sénile, corrompu et dégénéré, usé au frottement des tyrannies, comme était le peuple romain même quand ce détenteur du pouvoir suprême était un monstre, à plus forte raison quand il s’avisait d’être un sage !
La rencontre la plus frappante, c’est d’y voir, au moment où décline le génie grec, croître et s’élever les Romains que, d’après d’anciens oracles déjà répandus dans la Grèce italique, le poëte nomme les maîtres futurs du monde et les vengeurs de Troie. […] Que si maintenant on relit, au sombre crépuscule du poëte d’Alexandrie, cette prophétie de la grandeur romaine, à côté des chants de l’Iliade, des strophes guerrières d’Eschyle, du chœur héroïque d’Aristophane dans les Guêpes, des digressions triomphales de Pindare sur la Sicile et la Grèce délivrées, et enfin des vers de Virgile et d’Horace célébrant la durée des grandeurs romaines, comment ne pas reconnaître quelle place les arts d’imagination avaient dans l’antiquité, et quelle puissance ils ont exercée sur ses destinées ?
Ils faisaient des vers à tiroir avec le Gradus, ou plaquaient le style des orateurs romains retenus par cœur. […] Grandeur et décadence des Romains est du style d’idées. […] (Saint-Evremond, Les Romains.) […] (Saint-Evremond, Les Romains.) […] Camille est le plus grand des Romains avant son exil ; et après son exil il est supérieur à lui-même.
» M. de Saint-Félix est un poëte peu connu qui a essayé de l’André Chénier romain. « C'est étonnant, dit Théophile Gautier, je ne me suis pas trop ennuyé à Lucrèce, et j’avais dormi à la Bérénice de la Rachel et à la Judith de ma bourgeoise.