/ 1635
24. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVIII et dernier. Du genre actuel des éloges parmi nous ; si l’éloquence leur convient, et quel genre d’éloquence. »

Hors de là, c’est presque un ridicule égal de les faire ou de les recevoir. […] Rien de si ridicule qu’un homme passionné dans un cercle d’hommes froids. […] Si on se passionne pour ce qui ne le mérite pas, on est froid ; si on passe le but, on est ridicule. […] Plus une telle éloquence est noble, quand elle est appliquée à de grands objets, et qu’elle naît d’un sentiment vrai et profond, plus un faux enthousiasme et une fausse chaleur sont ridicules aux yeux de tout homme sensé. Il en est des ouvrages d’éloquence comme d’une pièce de théâtre ; si l’illusion ne gagne, le ridicule perce, et l’on rit.

25. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » p. 528

On a répandu du ridicule sur sa personne & sur ses Ouvrages, mais il pouvoit être un homme simple & crédule, sans être un Auteur médiocre. […] Poinsinet a été véritablement l’Auteur de la petite Comédie du Cercle, on peut dire que, tout ridicule qu’il pouvoit être, il savoit assez bien saisir & peindre le ridicule de la plupart de nos Sociétés.

26. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 493-499

On peut bien nous présenter un Acteur ayant un pied dans le Cothurne, & l’autre dans le Brodequin ; mais tandis qu’on s’applaudira de cet accord bizarre, ce personnage n’en sera que plus ridicule aux yeux du goût & de la raison. […] Depuis Aristophane jusqu’à nous, le pinceau de Thalie n’a jamais été que le fléau du ridicule, & quiconque voudra lui donner un autre caractere, sera également proscrit & par Thalie & par ses vrais partisans. […] C’est pour cette raison que César, aussi bon juge en fait de talens, qu’il étoit bon connoisseur en hommes, reprochoit à Térence de manquer de ce qui s’appeloit vis comica, c’est-à-dire, de cette vivacité de plaisanterie, de cette vigueur de ridicule, de ce ton pittoresque qui fait l’essence de la Comédie. […] Les deux Corneille, Moliere, Racine, Despréaux, Rapin, Regnard, Destouches, Boissy, l’Abbé Desfontaines, Piron, Palissot, & mille autres, n’ont reconnu qu’un seul genre de Comédie, qui consiste dans l’exposition des vices & des ridicules à dessein de les corriger ; & ces noms respectables, en fait de législation littéraire, valent bien ceux des Diderot, des Marmontel, des Beaumarchais, des Merciers, & des Sedaine.

27. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 394

Brun, [Pierre le] Oratorien, né à Brignolles, mort en 1629, a écrit contre les Sorciers, & croyoit aux Sorciers : cependant son Histoire critique des pratiques superstitieuses est pleine d’érudition, & assez pourvue de jugement, excepté quand il en est à l’article des sortiléges, dont il combat le ridicule en admettant souvent des faits que la raison auroit dû rejeter. […] Il y a apparence que si elles eussent été connues avant les deux volumes qu’on a faits pour enseigner la maniere de se servir de cette baguette, elles auroient épargné au Public un ridicule Ouvrage, & à certains Lecteurs le ridicule d’y ajouter foi.

28. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 21, du choix des sujets des comedies, où il en faut mettre la scene, des comedies romaines » pp. 157-170

Elle veut, en nous faisant rire aux dépens des personnages ridicules, nous corriger des défauts qu’elle jouë, afin que nous devenions meilleurs pour la societé. La comedie ne sçauroit donc rendre le ridicule de ses personnages trop sensible aux spectateurs. Les spectateurs, en demêlant sans peine le ridicule des personnages, auront encore assez de peine à y reconnoître le ridicule qui peut être en eux. […] Les bienséances d’Espagne, par exemple, ne nous étant pas aussi connuës que celles de France, nous ne sommes pas choquez du ridicule de celui qui les blesse, comme nous le serions si ce personnage blessoit les bienséances en usage dans notre patrie et dans notre tems.

29. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre IV. Précieuses et pédantes »

Son infamie est d’autant plus grande qu’il n’a ni la pauvre excuse de la faim, ni même l’excuse ridicule de la gêne. […] Un éditeur peut prendre tout Balzac et le livrer au plus ridicule des illustrateurs : pourquoi M.  […] Henry Bordeaux et que sa réduction de la grande statue est un petit bibelot aussi joli et aussi ridicule que le petit Barrès lui-même. […] toute chargée de bagues prétentieuses, elle trace, dans un salon précieux et ridicule, des sinuosités mièvres. […] Ici on peut s’arrêter quelques instants sans trop d’ennui : Boissière cesse d’être ridicule et reste presque aussi drôle.

30. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » pp. 60-61

Combien de Cotins aujourd’hui sont les premiers à applaudir au ridicule lancé contre lui ! […] Ce fut donc parce que Cotin se prévaloit un peu trop d’une réputation usurpée, qu’il cabaloit dans les petites Sociétés de son temps, qu’il s’étoit érigé en Président de quelques Bureaux d’esprit, qu’au milieu de ces Sénats ridicules, où il étoit écouté comme un Oracle, il insultoit au vrai mérite, en faveur du sien & de celui de ses amis ; ce fut enfin l’admiration indiscrete de l’Hôtel de Rambouillet, qui fit pleuvoir sur lui les anathêmes de l’Auteur du Lutrin, & de celui des Femmes Savantes. […] Il étoit déjà un Cotin ridicule, il seroit devenu un Cotin odieux.

31. (1788) Les entretiens du Jardin des Thuileries de Paris pp. 2-212

Plutôt falloit-il ne pas les amener, mais on étoit ridicule. […] Les ridicules se croisent de la maniere la plus comique. […] Il n’y a pas jusqu’aux titres de livres, qui sont singuliérement ridicules. […] Les trois quarts de nos ridicules lui sont dus. […] Le ridicule des ridicules ; regardez donc cette femme au teint olivâtre qui s’avise de vouloir être Athée, c’est son dernier mot.

32. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 15, observations concernant la maniere dont les pieces dramatiques étoient représentées sur le théatre des anciens. De la passion que les grecs et les romains avoient pour le théatre, et de l’étude que les acteurs faisoient de leur art et des récompenses qui leur étoient données » pp. 248-264

J’ai déja dit pourquoi l’on n’y sentoit pas le ridicule que nous y concevons d’abord. […] Plusieurs sçavans du nord, qui sur la foi d’une exposition avoient décidé que nos opera ne pouvoient être qu’un spectacle ridicule et propre seulement pour amuser des enfans, ont changé d’avis après en avoir vû quelques représentations. […] Il ne faut pas dire que ce spectacle puérile nous divertit, parce que le ridicule de l’execution s’y trouve parfaitement bien assorti avec le ridicule du sujet. […] J’ai vû en Italie des opera représentez de cette maniere, et personne ne les trouvoit un spectacle ridicule.

/ 1635