De là pour les vraies supériorités humaines, poétiques, philosophiques, politiques et religieuses, cet acharnement de leurs ennemis qui ne pardonnent qu’à la mort. […] L’épopée s’anime et devient le drame le plus miraculeux, le plus naturel et le plus surnaturel de tous les drames conçus par le génie religieux de l’humanité. […] Puis elle se relève dans un autre âge, et le drame devenu métaphysique et religieux se reprend avec Faust, Marguerite, Méphistophélès et d’autres personnages, et la providence justifie tout et pardonne à tous, même à Satan ! […] Sa profession religieuse de la constance de Dieu dans ses volontés y est admirable : c’est la même pensée qui me tomba de la main en écrivant à vingt ans à Byron : Celui qui peut créer dédaigne de détruire ! […] Cette conception est en harmonie parfaite avec nos idées religieuses, d’après lesquelles nous sommes sauvés non seulement par notre propre force, mais aussi par le secours de la grâce divine.
Il ne faisait pas partie d’un ordre rigoureusement cloîtré. « C’est une chose louable pour un religieux, dit-il, de sortir rarement. » Donc il pouvait sortir. « N’ayez de familiarité avec aucune femme, mais recommandez à Dieu, en général, toutes les femmes de vertu. » Donc il connaissait des femmes. […] Et les saints eux-mêmes ne sont pas fâchés sans doute de pouvoir mépriser en sûreté de conscience, par une pensée religieuse, ce que le vulgaire déteste par un mouvement naturel. […] Or, tandis qu’il offrait aux hommes assemblés des spectacles d’une volupté noble, mais pénétrante, toutes les religieuses et les saintes femmes de sa famille (il y en avait beaucoup), et le grand Arnauld, et le bon M. […] De bonne heure il s’abstint, par scrupule religieux, lorsqu’il était à la cour, d’aller à l’Opéra et à la Comédie… Seulement, voilà ! […] Personne, enfin, n’a mieux vu la vanité du décor politique, social et religieux de son temps, et n’a entendu plus de craquements dans le vieil édifice.
La religion vraie, la morale pure, la paix nécessaire entre les hommes sont au prix de cette franchise religieuse et tolérante qui laisse à chacun sa foi, sans prêter à personne des armes pour opprimer la foi d’autrui. […] C’est de cette date, en effet, que la foi volontaire et imaginaire de M. de Chateaubriand prit sur lui un ascendant auquel il céda sans résistance, et qui, si elle ne gêna nullement sa vie, ne lui permit plus de vaciller dans ses théories religieuses. « J’ai pleuré et j’ai cru », avait-il dit dans la première phase du Génie du Christianisme. […] Le sérieux, et par conséquent le religieux, manque à son génie. […] C’est son caractère, il est grand, parce qu’il est religieux ; il est grand, parce qu’il est éloquent ; il est grand, parce qu’il est triste ; il est grand, parce qu’il est poëte !
Ouvrages de philosophie politique et de polémique religieuse […] Philosophie politique. — Polémique religieuse. — Madame de Staël. — De Bonald […] La chimère de l’infaillibilité du témoignage humain, comme principe unique de la vérité religieuse, a rejoint la chimère de l’infaillibilité du peuple, comme fondement unique des gouvernements. […] Est-il vrai que plus d’un auditeur de la Sorbonne, sous le charme de tant de belles paroles sur Dieu, l’homme, le monde et leurs rapports, s’achemina vers Notre-Dame plus qu’à demi conquis aux vérités religieuses, qu’enseignaient, du haut de la chaire chrétienne, des prédicateurs plus loin des voies des grands sermonnaires que le philosophe ne l’était des voies de Descartes ?
Saint Ambroise, après lui saint Grégoire sont les derniers protecteurs de cette vénérable musique ; ils instituent une précieuse mélodie expressive, le plain-chant, traduction simple et profonde des premières émotions religieuses. […] Au Moyen Age, la loi des différences croissantes amène déjà la formation de deux musiques entièrement distinctes : l’une populaire, donc toute de rythme et de mélodie : l’autre savante, la musique religieuse et scolastique, destinée seulement aux âmes plus complexes. […] C’est, dans la Passion suivant Saint-Mathieu, limitant des récitatifs qui recréent, comme des mots, l’émotion religieuse, c’est le chœur initial et le chœur final : l’emportement raisonnable et sincère d’un peuple, l’hymne de la foi nouvelle, nullement luxurieuse ou mystique : une ferveur discrète, infinie. […] Je les retrouve telles en les Jeux séduisants du Bossu d’Arras ; Robin Et Marion, la Feuillée, où s’allient par un naïf déchant, tes vives chansons populaires et les musiques religieuses.
Il y a deux Eddas, ou plutôt deux recueils de fragments religieux et héroïques, attribués, l’un, à Sœmund-le-Sage, prêtre chrétien islandais, qui vivait à la fin du xie siècle ; l’autre, à Snorre Sturleson (xiiie siècle). […] Eschyle s’est aidé des symboles religieux de son temps, des mythes souvent obscurs, et monstrueux parfois, que révérait le peuple Grec : a-t-il cessé d’être le créateur de Prométhée, de Prométhée tel que nous continuons de le comprendre et de l’aimer ? […] En revanche, signalons cette appréciation de la scène religieuse du premier acte : « Il est impossible de rendre l’impression qui se dégage de cette merveilleuse scène : l’âme est emportée bien au-delà de la terre ; on voudrait s’agenouiller à côté de ces pieux chevaliers et rester en contemplation devant la manifestation du divin mystère… Une joie ineffable, une paix mystique, un ravissement digne des élus s’exhalent de cette scène merveilleuse …. […] Assez souvent on peut constater des essais de drame populaire en dehors de nos théâtres ordinaires ; les processions historiques, partout tant appréciées, sont un symptôme ; les mystères d’Oberammergau ont eu un retentissement énorme, c’est là le berceau de notre drame moderne, et on serait bien tenté de le vérifier en retournant à cette source ; le drame religieux que M.Friedrich Schœn fit exécuter par le peuple dans la cathédrale de Worms, tout récemment, à l’occasion du quatrième centenaire de Luther, a produit un effet immense, 2° J. van Santen Kolfk : Considérations historiques et esthétiques sur le motif de Réminiscence.
La Captivité de saint Malc est un poème religieux. […] Voyez-vous, le sujet est religieux, et quand il s’agit d’un sujet religieux, La Fontaine n’est pas en possession absolue de tous ses moyens. […] L’exemple, le conseil et le travail des mains Me pouvaient rendre utile à des troupes de saints… La réflexion à faire, semble-t-il, sur ce petit épisode, c’est que ce n’est donc pas par simple obéissance aux lois du genre que La Fontaine, dans ses fables, met toujours une moralité, car ici, quand il n’est pas forcé d’en mettre une, puisque ce n’est pas une fable qu’il écrit, même quand c’est un épisode d’un poème épique religieux, il y met une moralité.
Il y a dans cette levée de boucliers contre la philosophie de Cousin autre chose encore que des opinions et des croyances religieuses et cléricales ; il y a des rancunes philosophiques de la part des dissidents, sensualistes, sceptiques, etc., que l’éclectisme a toujours mal menés et méprisés avec hauteur.
Un pareil verdict répond donc à un état de sensibilité, réel chez certains êtres, et qui parvient d’ailleurs à se complaire à lui-même en des attitudes de détachement religieux ou esthétique : des hommes qui ressentent la vie comme une souffrance trouvent en ces postures une méthode et un moyen anticipé pour se soustraire à la vie.