/ 2008
573. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Th. Carlyle » pp. 243-258

Au milieu de celles qui luttent dans son livre et qui s’y déchirent : cause royaliste, cause jacobine, cause religieuse ou cause athée, il ne choisit point ; il ne se range point ; il ne combat pas. […] Pas plus qu’il n’épouse de cause politique ou de cause religieuse, il n’épouse aucune métaphysique.

574. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame de Créqui »

Eh bien, ce que le philosophe furibond ne manqua pas certainement d’appeler une capucinade, n’a-t-il pas influé sur l’esprit de Sainte-Beuve, trop détaché des choses religieuses pour bien comprendre, dans ses sévérités comme dans ses indulgences, dans ses ombres comme dans ses lueurs, cette capucine de bonne volonté, qui abaissa de bonne heure sur ses yeux restés pénétrants la pointe de son bonnet de dévote et qui le garda, jusqu’à sa mort, comme le capuchon de sa vieillesse, sans que pour cela ses anciens yeux d’escarboucle brillassent moins fort et vissent moins clair ? […] Si cette femme d’aperçu, et qui savait si nettement styler sa pensée, avait cru jamais que juger les hommes c’était donner le sacre de la confiance à ces grands enfants qui se permettent la fatuité ou se prendre pour eux de compassion intellectuelle, nous n’aurions jamais retrouvé ce volume de lettres, savoureux et sain, où la rigueur de la raison et la brusquerie de la vérité se mêlent délicieusement la svelte légèreté du tour et au charme calmant d’une religieuse tristesse.

575. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VII. Vera »

Il se dit religieux pourtant, — et M.  […] Quand on absout l’humanité, parce que, dit-on, on la comprend, quand la meilleure justification des choses est… qu’elles sont ou qu’elles furent, il faut bien accepter la religion avec tout le reste, car il y en a eu assez, de religions, sur la terre de ce globe, et assez de sentiment religieux dans les cœurs qui battent encore à sa surface ou qui dorment glacés dessous.

576. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Matter. Swedenborg » pp. 265-280

Swedenborg nous dit qu’il a connu la femme et que dans sa jeunesse il avait eu une maîtresse… Philosophe et naturaliste avant tout, n’admettant, comme les plus religieux de son temps, qu’une espèce de morale évangélique, Swedenborg (voici où commence l’extraordinaire et l’inconséquent) n’en avait pas moins l’habitude de méditer sur les choses spirituelles. […] … Je ne vois plus qu’un pantin religieux dont les ficelles seraient tirées par des Jocrisses très profanes.

577. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « A. P. Floquet »

Issu d’une famille profondément religieuse, qui l’avait destiné, dès son plus bas âge, au sacerdoce, il n’eut pas besoin pour aller à Dieu de passer, comme saint Colomban, par-dessus le corps de sa mère. […] Bossuet est son sujet et non pas le xviie  siècle, et voilà pourquoi on trouvera dans son livre tant de détails purement religieux et sacerdotaux, que les historiens à idées générales et à intentions pittoresques trouveront peut-être petits et inutiles.

578. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Maynard »

Çà et là, il est vrai, saint Vincent de Paul avait eu parmi les écrivains religieux, plus ou moins touchés de ses vertus, les panégyristes de l’admiration et de l’amour. […] En dehors des questions religieuses, il savait aussi ce qu’il y avait de prudence, même à sa manière, à lui, Richelieu, dans cet esprit éclairé d’en haut, dans ce bon sens net, absolu, perçant, qui méprisait les disputes et allait à l’action par la voie la plus courte, parce qu’elle était la plus droite.

579. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Laurent Pichat »

Dans ce livre-là, car ses autres livres me sont inconnus, il est bien, nonobstant, de la race des derniers venus de ce temps ; il doit être compté parmi ceux-là qui ont succédé à ce religieux et incomparable Lamartine, que, dans leur impiété, ils n’ont jamais égalé en génie. […] Laurent Pichat vient, parmi eux, de gagner sa place,· — mais, il faut en convenir, Baudelaire, la mâle Ackermann, et, plus près de nous, Jean Richepin, l’auteur de La Chanson des Gueux, — qui couvait son volume des Blasphèmes, — Richepin le toréador, qui prétend traiter Dieu comme le vil taureau auquel on passe une épée à travers le ventre, Richepin qui rirait bien de Pichat avec sa religion du progrès, qui n’est que du Christianisme déplacé, sont des blasphémateurs d’un autre poing montré au ciel et d’un autre calibre de passion impie que Pichat, l’égorgeur de songes, comme il s’appelle, et le pleureur sur les légendes religieuses auxquelles il a cru, et que, du fond de sa stérile et vide raison, il a l’air de regretter encore.

580. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Gogol. » pp. 367-380

Pour nous, le Tchitchikoff des Ames mortes n’est qu’un prétexte, un vieux moyen pour faire tourner sous notre regard le panorama social, religieux, politique, administratif, de la Russie tout entière. […] Il voulait faire de son voyage à Jérusalem quelque chose comme un bouclier contre le ressentiment des popes, car à Saint-Pétersbourg, dans cette société mi-partie de mode et de religiosité mystique, un homme qui revient de Jérusalem a un charme… Le charme n’agit point sur la mort : frais de voyage, de précaution, de coquetterie religieuse, tout fut inutile.

581. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre iv »

Un témoin m’écrit que ce fut pour Nîmes, et vous savez que les luttes religieuses y sont vives, un jour, non pas d’union, mais de communion sous les espèces de l’espérance et de la souffrance5.‌ […] Geste touchant d’une religieuse qui a reconnu des accents pleins de la charité à laquelle ses vœux la consacrent.

/ 2008