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1445. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Adrienne Le Couvreur. » pp. 199-220

Cet ami était parti brusquement sans le lui dire, sans le lui écrire ; elle s’en plaint avec grâce : faut-il donc y tant regarder avant de se mettre à écrire une lettre d’amitié ? […] Ne regardez point mon état ni ma naissance, daignez voir mon âme, qui est sincère et à découvert dans cette lettre… Les choses en étaient là depuis plusieurs mois.

1446. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Œuvres de Barnave, publiées par M. Bérenger (de la Drôme). (4 volumes.) » pp. 22-43

J’ai toujours regardé comme une des premières qualités d’un homme la faculté de conserver sa tête froide au moment du péril, et j’ai même une sorte de mépris pour ceux qui s’abandonnent aux larmes quand il faut agir. […] Ce qu’il dit du parti modéré, du parti constitutionnel d’alors, de cette majorité saine de la nation, de cette bourgeoisie dont il était l’honneur et qu’il connaissait si bien, est digne de remarque : Le parti modéré, qui, soit par le nombre, soit par la composition, pourrait être regardé comme la nation même, est presque nul pour l’influence ; il se jette, à la vérité, pour faire poids, du côté qui cherche à ralentir le mouvement, mais à peine ose-t-il expliquer publiquement son vœu.

1447. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) «  Mémoires et correspondance de Mme d’Épinay .  » pp. 187-207

Diderot est plus juste, et il nous peint à ravir Mme d’Épinay à cet âge de la seconde jeunesse, un jour qu’il était à La Chevrette, pendant qu’elle et lui faisaient faire leur portrait : On peint Mme d’Épinay en regard avec moi, écrit Diderot à Mlle Volland ; elle est appuyée sur une table, les bras croisés mollement l’un sur l’autre, la tête un peu tournée, comme si elle regardait de côté ; ses longs cheveux noirs relevés d’un ruban qui lui ceint le front. […] Voltaire pourtant, qui regardait surtout à l’esprit, à la physionomie, et qui, auprès des femmes, était moins matériel que Rousseau, la trouvait fort à son gré.

1448. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires et correspondance de Mallet du Pan, recueillis et mis en ordre par M. A. Sayous. (2 vol. in-8º, Amyot et Cherbuliez, 1851.) — I. » pp. 471-493

C’est l’abbé de Pradt qui a dit cela en tête d’un de ses écrits (Les Quatre Concordats) ; et, sans regarder toutes les paroles que jetait cet homme d’esprit comme autant d’oracles, il est juste de tenir compte de ses jugements, surtout quand il s’agit du style de pamphlets, de brochures politiques, de ce style qui prend et mord sur le public, même en matière sérieuse : l’abbé de Pradt s’y connaissait. […] Parlant de l’Histoire philosophique de l’abbé Raynal, il en relève, dans ses Annales (15 juin 1781), toutes les déclamations ridicules ou dangereuses : Quelles que soient leurs opinions, demandait-il, que les philosophes regardent les mœurs de notre siècle, et qu’ils nous disent si le moment est arrivé de diminuer les motifs d’être vertueux… Quels remords n’aurait pas M. 

1449. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Ivan Tourguénef »

Nejdanoff se plaça de pied ferme, sur la terre noire qui entourait le pied du pommier et tira de sa poche le petit objet qu’il avait pris dans le tiroir de sa table, puis il regarda attentivement les fenêtres de la maisonnette. […] Alors Nejdanoff, à travers les branches tordues de l’arbre, regarda le ciel gris très bas, mouillé, indifférent, aveugle ; il bâilla, s’étira, se dit : “Après tout, il n’y a que cela à faire ; je ne puis retourner à Pétersbourg, à la prison.”

1450. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre VI. Des Livres qui traitent de la Rhétorique. » pp. 294-329

Ce livre est d’autant plus utile, qu’on peut le regarder en quelque façon, comme un corps de Rhétorique, à cause du grand nombre de regles, de principes & de réfléxions sur cet art, dont il est rempli. […] L’auteur regarde tous les traités des anciens sur la Rhétorique, plûtôt comme des ouvrages propres à occuper agréablement l’esprit, qu’à donner cette sensibilité qui fait l’homme éloquent.

1451. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VII. Mme de Gasparin »

On est plus franc avec les femmes, quand on ne les regarde pas. […] C’est ici que l’auteur des Horizons prochains va gagner en s’élevant une originalité relative ; elle est un Michelet assaini, essuyé, clarifié, brillant d’une pureté que rien ne ternit et qui par ce côté écrase l’écrivain qu’elle rappelle et lui eût fait honte à lui, dont les dons étaient si beaux et qui en a tant abusé, s’il avait pu se regarder tel qu’il aurait pu être, dans ce miroir, tout ensemble faux et fidèle, taillé dans le diamant qu’il n’avait plus !

1452. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Rivarol » pp. 245-272

Je m’imagine que s’il revenait au monde, lui, le superbe de son esprit, il regarderait comme une impertinence envers sa mémoire cette manière d’agir, littéraire ou commerciale, avec ses œuvres, — si on peut appeler de ce nom d’œuvres les improvisations d’un homme qui, en produisant, a si peu travaillé ! […] Dandy audacieux pour un cuistre d’homme de lettres, il osa porter l’habit rouge comme le comte d’Artois, alors dans toute sa magnificence (voir leurs portraits à tous les deux), et vraiment, quand on regarde ces portraits et qu’on les compare, on ne sait trop lequel des deux est le plus prince… Il y a des femmes qui diraient que c’est Rivarol !

1453. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Innocent III et ses contemporains »

Et, en effet, si participante que soit l’Allemagne au mouvement de civilisation qui emporte le monde moderne, il y a pourtant dans ce pays des faits singuliers sur la nature desquels on peut se méprendre quand on ne les regarde pas avec une froide attention. […] Très certainement, nous l’aimons et nous estimons ses lumières, mais nous savons les regarder.

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