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260. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — I. » pp. 131-146

Reçu avocat en 1569, il s’établit à Dijon où il eut des débuts brillants. […] À la requête des états de Bourgogne, Jeannin fut pourvu d’un office de conseiller au parlement de Dijon, office créé tout exprès en juin 1579, « et il y fut reçu à condition de ne pouvoir résigner son office qu’après cinq aimées d’exercice, tant la Cour de parlement appréhendait de perdre un si rare esprit ». Henri III, qui avait appris à l’estimer, créa bientôt pour Jeannin une charge de président au même parlement, et il y fut reçu sans aucune finance le 14 mars 158135. […] Le duc l’engagea à coucher le tout par écrit et envoya le mémoire à son frère M. de Guise, qui le reçut ayant le pied déjà à l’étrier, et qui n’eut que le temps d’écrire au bas, après l’avoir lu : « Ces raisons sont bonnes, mais elles sont venues à tard ; il est plus périlleux de se retirer qu’il n’est de passer outre. » Le président Jeannin sent toutefois à un certain moment qu’il s’engage, lui aussi, dans une voie périlleuse ; obligé par devoir et par reconnaissance envers Henri III, il est amené par les circonstances à demeurer auprès du duc de Mayenne, même quand celui-ci est devenu le chef de la Ligue et le maître de Paris, sous le titre ambitieux et ambigu de lieutenant général de l’État royal et Couronne de France.

261. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte. »

Cervantes, quoique malade de la fièvre, insista pour combattre et fut placé au poste le plus périlleux avec douze soldats d’élite ; il y déploya un grand courage dont il porta les marques jusqu’à la mort ; car, sans compter deux coups d’arquebuse dans la poitrine, il en reçut un autre qui l’estropia et le priva de l’usage de la main gauche pour le reste de sa vie. […] Il ne serait pas exact de dire « qu’il ne reçut aucune récompense de sa bravoure. » On a la preuve que, retenu pendant des mois à l’hôpital de Messine, il lui fut accordé des secours pécuniaires que le généralissime lui fit donner par l’intendance de la flotte. […] Si mes blessures ne brillent pas glorieusement aux yeux de ceux qui les regardent, elles sont appréciées du moins dans l’estime de ceux qui savent où elles furent reçues, car il sied mieux au soldat d’être mort dans la bataille que libre dans la fuite. […] au milieu de ces mets exquis et de ces boissons glacées, il me semblait que j’avais à souffrir les misères de la faim, parce que je n’en jouissais pas avec la même liberté que s’ils m’eussent appartenu ; car l’obligation de reconnaître les bienfaits et les grâces qu’on reçoit sont comme des entraves qui ne laissent pas l’esprit s’exercer librement.

262. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. »

« Ô vous, compagne de ma vie, dont l’amitié est mon plus cher trésor, qui avez embelli tous les bons moments de mon existence et partagé toutes mes peines ; vous, dont l’esprit éminent a entretenu l’activité de mon âme, et dont l’imagination riche et brillante a souvent fait éclore mes idées ; à qui je dois enfin la meilleure partie de mon être, recevez l’hommage de ces Souvenirs dont le récit fut entrepris par votre désir. […] Le premier accueil qu’il reçut de notre ministre des Affaires étrangères, M. de Talleyrand, fut assez peu engageant. Ce ministre, si maître dans l’art de la société, « et qui en a su si bien user, tantôt pour imposer à ceux qu’on voulait détruire, et pour les déconcerter, tantôt pour attirer à lui ceux dont on voulait se servir », le reçut assez froidement. […] « Monsieur Fouché, je reçois votre lettre du 9 juillet.

263. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre VII. L’antinomie pédagogique » pp. 135-157

Loin que tout puisse être avec fruit enseigné à tous, il semble bien qu’une intelligence donnée ne peut recevoir sans danger pour sa contexture même, que les genres de notions qui y pénètrent sans effort69. » L’instruction n’a pas une valeur universelle ; elle n’est bonne que si elle répond à la physiologie de l’individu qui la reçoit. […] Draghicesco ; elle reçoit seulement et transmet les croyances et les préjugés d’hier et d’aujourd’hui que demain renversera peut-être. […] Un autre individualisme pédagogique est celui dont le desideratum serait d’individualiser le plus possible l’éducation, de l’adapter au tempérament intellectuel et moral de celui qui le reçoit, de faire violence le moins possible à l’individualité qu’il s’agit de former.

264. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVIII et dernier. Du genre actuel des éloges parmi nous ; si l’éloquence leur convient, et quel genre d’éloquence. »

Hors de là, c’est presque un ridicule égal de les faire ou de les recevoir. […] Méditez donc sur l’âme et le génie de celui que vous voulez louer ; saisissez les idées qui lui sont propres ; trouvez la chaîne qui lie ensemble ou ses actions ou ses pensées ; distinguez le point d’où il est parti, et celui où il est arrivé ; voyez ce qu’il a reçu de son siècle, et ce qu’il y a ajouté ; marquez ou les obstacles ou les causes de ses progrès, et devinez l’éducation de son génie. Ce n’est pas tout ; observez l’influence de son caractère sur ses talents, ou de ses talents sur son caractère ; en quoi il a été original, et n’a reçu la loi de personne ; en quoi il a été subjugué ou par l’habitude la plus invincible des tyrannies, ou par la crainte de choquer son siècle, crainte qui a corrompu tant de talents ; ou par l’ignorance de ses forces, genre de modestie qui est quelquefois le vice d’un grand homme ; mais surtout démêlez, s’il est possible, quelle est l’idée unique et primitive qui a servi de base à toutes ses idées ; car presque tous les hommes extraordinaires dans la législation, dans la guerre, dans les arts, imitent la marche de la nature, et se font un principe unique et général dont toutes leurs idées ne sont que le développement. […] En général, l’être vertueux et moral s’affectera bien plus que celui qui est sans principes ; le malheureux, plus que celui qui jouit de tout ; le solitaire, plus que l’homme du grand monde ; l’habitant des provinces, plus que celui des capitales ; l’homme mélancolique, plus que l’homme gai ; enfin, ceux qui ont reçu de la nature une imagination ardente qui modifie leur être à chaque instant, et les met à la place de tous ceux qu’ils voient ou qu’ils entendent, bien plus que ceux qui, toujours froids et calmes, n’ont jamais su se transporter un moment hors de ce qui n’était pas eux.

265. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXIV » pp. 294-298

Villemain a quitté l’hôtel du ministère de l’instruction publique, et il s’est logé dans une petite maison à Chaillot, espèce de village à l’intérieur de Paris ; il se promène tous les jours en voiture et reçoit avec plaisir les nombreuses visites qui ne cessent pas et auxquelles il suffit avec sa grâce accoutumée. […] Hugo avait reçu du critique plus d’une épigramme : on voulait voir comment le poëte, directeur de l’Académie, répondrait dans un sujet si délicat où il se trouvait juge et partie.

266. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Appendice. »

Voici la lettre que j’ai reçue de l’un des anciens élèves de l’École normale, contemporain de MM.  […] » Il fut ou parut être la dupe de cette espièglerie, reprocha à Vignon d’avoir omis ce texte important, reçut ses excuses et mit le manuscrit dans sa poche… » En prenant sur moi de citer cette jolie lettre qui vaut mieux que tous les commentaires et qui en dispense, je ne puis m’empêcher de nommer et de remercier M. 

267. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIe entretien. Vie du Tasse (1re partie) » pp. 5-63

Désespérant de l’expédition française contre Naples, il se réfugia à Rome, où il reçut l’hospitalité dans le palais du cardinal Hippolyte d’Este. […] À l’exception du duc d’Urbin, qui continua à combler l’auteur de sa faveur et de ses bienfaits, Bernardo Tasso ne reçut des autres princes de France et d’Italie, auxquels il adressa son œuvre, que des louanges et des remercîments. […] Alphonse était, selon l’historien le mieux informé, Muratori, brave, juste, magnifique, religieux, passionné pour la gloire des lettres et des arts ; ces qualités, dit-il, étaient obscurcies dans ce noble caractère par un mélange d’orgueil, de caprice, de susceptibilité, de ressentiment implacable contre ceux dont il croyait avoir reçu quelques offenses. […] L’une et l’autre avaient reçu dans le palais lettré de Ferrare l’éducation presque virile des maîtres, des philosophes et des poètes les plus éminents de ce siècle. […] Torquato était arrivé à temps à Ostie pour recevoir les adieux et les bénédictions de ce tendre père.

268. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIIe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

Une lettre qu’il reçut d’Europe, par le bureau des Missions étrangères, redoubla tellement sa tristesse, qu’il fuyait jusqu’à ses vieux amis. […] Je reçus donc Amélie dans une sorte d’extase de cour. […] Les chambres étaient à peine éclairées par la faible lumière qui pénétrait entre les volets fermés ; je visitai celle où ma mère avait perdu la vie en me mettant au monde, celle où se retirait mon père, celle où j’avais dormi dans mon berceau, celle enfin où l’amitié avait reçu mes premiers vœux dans le sein d’une sœur. […] On me dit qu’elle ne recevait personne. […] Quiconque a reçu des forces, doit les consacrer au service de ses semblables ; s’il les laisse inutiles, il est d’abord puni par une secrète misère, et tôt ou tard le ciel lui envoie un châtiment effroyable. » Troublé par ces paroles, René releva du sein de Chactas sa tête humiliée.

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