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236. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre II. De la reconnaissance des images. La mémoire et le cerveau »

De la réponse qu’on fera à cette question dépend la nature des rapports qu’on établira entre le cerveau et la mémoire. […] Mais, avant d’en chercher la vérification, disons brièvement comment nous nous représentons les rapports généraux de la perception, de l’attention et de la mémoire. […] Que deviennent ces diverses parties du discours dont le rôle est justement d’établir entre les images des rapports et des nuances de tout genre ? […] Qu’on songe alors à la multitude de rapports différents que le même mot peut exprimer selon la place qu’il occupe et les termes qu’il unit ! […] Je l’accorde sans peine ; mais plus la langue que vous me parlerez sera primitive et dépourvue de termes exprimant des rapports, plus vous devrez faire de place à l’activité de mon esprit, puisque vous le forcez à rétablir les rapports que vous n’exprimez pas : c’est dire que vous abandonnerez de plus en plus l’hypothèse d’après laquelle chaque image irait décrocher son idée.

237. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre X. De la simplicité du style »

Elle exige un sens délicat des convenances, qui sache estimer la valeur des mots, non plus dans leur rapport avec les choses, mais dans leur rapport avec mille circonstances variables de temps et de lieu.

238. (1904) En méthode à l’œuvre

Hors que, se transportant en rapport du Cercle virtuellement éternel et illimité, à la suprême équivalence de l’elliptique périphérie en une Droite d’immuance, l’Ellipse n’ira pas : et de la virtuelle Fatalité ne pouvant avoir la Fin, éternellement en déviation excentrique, elle meut. […] Et, montant des plus rares et sourds aux multiples et hauts harmoniques : les « voix », ou timbres-vocaux, — ainsi qu’il suit se sérient, selon qu’en elles sont présents tels ou tels harmoniques de la suite de sons respectivement dans les rapports de : 1, 2, 3, 4, etc. […] L’on ne peut mieux exprimer que toute origine de langages a été, sous l’empire des sentiments, phonétique : tandis que les langues et les musiques d’Extrême-Orient apportent l’exemple tout pur à sa dernière et précieuse remarque, — et, dirons-nous pour les avoir pratiqués, particulièrement la musique et les idiomes où si sensitivement demeurent unis le sens et les sons, malaïo-Javanais…   Mais le principe entendu, n’est-il point d’intuitions partielles, médiatrices des déductions que nous en tirons pour tout à l’heure nouer les solides et naturels rapports de la Pensée et de la Parole-instrumentale ? […] Tenant pour simpliste et illogique, le voir naître d’une égalité numérique de pieds groupés et du retour équidistant d’accents avertisseurs de l’ouïe, — nous l’exprimerons, en généralité : le mouvement de la Pensée consciente et représentative des naturelles et harmonieuses Forces…   Nous le verrons, en le vers apporté par l’instrumentation-Verbale, produit des mouvements de l’Idée créant soi-même son expression en mots dont le sens idéographique et le sens phonétique sont en rapport intime : sens phonétique relevant de la valeur des timbres-vocaux, auxquels s’approprient complémentairement les lettres-consonnes. […] Encore, dans l’intérieur du vers les sons des rimes environnantes seront rappelés, leurs mêmes sons ou atténués en Assonnances, en rapports d’idées.

239. (1707) Discours sur la poésie pp. 13-60

J’entens par ce beau désordre, une suite de pensées liées entr’elles par un rapport commun à la même matiére, mais affranchies des liaisons grammaticales, et de ces transitions scrupuleuses qui énervent la poësie lyrique, et lui font perdre même toute sa grace. […] Un poëte n’auroit plus qu’à exprimer avec force toutes les pensées qui lui viendroient successivement et au hazard : il se tiendroit dispensé d’en examiner le rapport, et de se faire un plan dont toutes les parties se prêtassent mutuellement des beautés. […] Pour moi je crois indépendamment des exemples, qu’il faut de la méthode dans toutes sortes d’ouvrages ; et l’art doit régler le désordre même de l’ode, de maniére que les pensées ne tendent toutes qu’à une même fin ; et que malgré la variété et la hardiesse des figures qui donnent l’ame et le mouvement, les choses se tiennent toujours par un sens voisin dont l’esprit puisse saisir le rapport sans trop d’étude et de contention. […] Chacune de mes odes a un rapport particulier à quelqu’une de celles d’Anacréon. […] L’obscurité de ses pensées s’est accrüe à mesure que les circonstances qui y avoient rapport, se sont effacées, ou que sa langue est devenuë moins familiére.

240. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Division dramatique. » pp. 64-109

On regarde cependant comme les meilleurs prologues ceux qui ont du rapport à la pièce qu’ils précèdent, quoiqu’ils n’aient pas le même sujet : tel est celui d’Amadis des Gaules. Il y a des prologues qui, sans avoir de rapport à la pièce, ont cependant un mérite particulier pour la convenance qu’ils ont au temps où elle a été représentée : tel est le prologue d’Hésione, opéra qui fut donné en 1700. […] Sans cette exposition, qui consiste quelquefois dans un récit, et quelquefois se développe peu à peu dans le dialogue des premières scènes, il serait comme impossible aux spectateurs d’entendre une tragédie dans laquelle les divers intérêts et les principales actions des personnages ont un rapport essentiel à quelque autre grand événement qui influe sur l’action théâtrale, qui détermine les incidents, et qui prépare, ou comme cause, ou comme occasion, les choses qui doivent ensuite arriver. […] Ces ouvrages sont composés d’un certain nombre de scènes détachées, qui ont un rapport à un certain but général. […] Mais ces deux choses étaient en effet aussi différentes que l’étaient nos grandes et nos petites pièces ; l’exode étant (comme on l’a dit ci-devant) une des parties de la tragédie, c’est-à-dire, la quatrième et dernière, qui renfermait la catastrophe ou le dénouement de l’intrigue, et répondait à notre cinquième acte : au lieu que l’épilogue était hors d’œuvre, et n’avait tout au plus que des rapports arbitraires et fort éloignés avec la tragédie.

241. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre III. De l’émulation » pp. 443-462

Si l’on comparait le sort des hommes éclairés sous Louis XIV, avec celui que leur préparait la violence révolutionnaire, tout serait à l’avantage de la monarchie ; mais quel rapport pourrait-il exister entre la protection d’un roi et l’émulation républicaine, lorsqu’elle prendrait enfin son véritable caractère ? […] Sans doute il faut de grands talents pour bien administrer ; mais c’est pour écarter le talent qu’on s’attachait à persuader que les pensées qui servent à former le philosophe profond, le grand écrivain, l’orateur éloquent, n’ont aucun rapport avec les principes qui doivent diriger les chefs des nations. […] Le mélange des qualités supérieures, bien que plaçant plus haut celui qui les possède, établit cependant plus de rapports entre l’homme extraordinaire et les autres hommes.

242. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre III. Association des mots entre eux et des mots avec les idées »

Alors les idées n’ont qu’un rapport partiel et lointain : c’est par les mots que la liaison se fait. […] Enfin l’analogie des sons détermine dans les mots une tendance à s’évoquer réciproquement, sans qu’aucun rapport de sens intervienne. […] Il faut proscrire sans indulgence tout ce cliquetis qui amuse l’oreille sans passer outre : ces analogies de sens, qui obligent à donner aux mots une articulation plus nette, un accent plus fort, doivent faire jaillir des rapports de sens ; il faut qu’elles enfoncent ou qu’elles illuminent la pensée.

243. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Grèce antique »

Entre les manières de penser et de sentir d’un peuple mort, mais qui laissa sur le front du peuple vivant comme les dernières haleines de son génie, entre la civilisation de l’un et de l’autre, il y a un lien, un rapport, une espèce de communauté qui tient à bien des causes, visibles ou mystérieuses, mais qui est. Ce lien, ce rapport existe-t-il entre la Grèce et nous comme il existe, par exemple, entre nous et Rome ? […] Manquant, comme les démocrates grecs, du véritable instinct politique, méconnaissant la réalité de leur temps comme les Grecs méconnaissaient la réalité du leur, ils établissent entre les gouvernements et les nations modernes, et les gouvernements et les nations de l’antiquité, un rapport qui n’a jamais existé que d’eux seuls à cette partie de l’antiquité, morte !

244. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre deuxième. La connaissance des corps — Chapitre premier. La perception extérieure et les idées dont se compose l’idée de corps » pp. 69-122

C’est un rapport constant entre deux termes, et tel que l’un précède toujours et que l’autre suive toujours. Mais d’ordinaire ce rapport ne se rencontre pas entre une sensation actuelle et une autre. […] Sitôt que nous avons constaté un rapport entre quelqu’une de nos sensations et quelque chose qui est autre qu’elle, nous pouvons, sans difficulté, concevoir le même rapport entre la somme de toutes nos sensations et quelque chose qui soit autre qu’elles. […] La géométrie analytique est fondée tout entière sur cette remarque ; elle traduit la forme par le rapport de deux ou trois coordonnées qui sont des distances. […] Mais la théorie, aidée de cette addition, nous conduit beaucoup plus loin et nous permet de compléter les vues que nous avons présentées sur les rapports du physique et du moral.

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