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1550. (1856) La critique et les critiques en France au XIXe siècle pp. 1-54

La profonde et méditative Allemagne devait prendre l’initiative. […] Ce que vous devez y tracer, ce n’est pas la nature elle-même, c’est l’impression vive, profonde, originale, poétique en un mot, que cette nature a dû produire en vous. […] À un sens droit la critique périodique aurait besoin de joindre des études variées et profondes, de savoir universel qu’autrefois Cicéron voulait imposer à l’orateur ne semblerait pas de trop pour ces arbitres universels des œuvres de l’esprit.

1551. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Proudhon » pp. 29-79

Quand un homme se lève de grand matin pour nous annoncer que l’Église éternelle est morte, il est tenu de mettre à la place, dans ce vide profond qu’elle va laisser, quelque chose qui remplisse mieux que cette pancarte : La Déclaration des droits ! […] Il n’est pas irréprochablement superbe, comme ma critique va vous le prouver, mais il l’est d’inspiration vraie, profonde et indignée. […] Le mérite de ce magnifique livre, — inachevé comme tant de choses belles qui gagnent peut-être à être inachevées, — comme cette statue de l’Amour du grand Michel-Ange, déterrée après sa mort, et à laquelle il manquait un bras ; — le mérite de ce livre ne s’arrête qu’aux endroits où Proudhon cesse d’être chrétien — le chrétien qu’il est de nature — et se heurte à sa philosophie… Livre profond et éloquent !

1552. (1856) Mémoires du duc de Saint-Simon pp. 5-63

Élevés dans l’égalité, jamais nous ne comprendrons ces effrayantes distances, le tremblement de cœur, la vénération, l’humilité profonde qui saisissait un homme devant son supérieur, la rage obstinée avec laquelle il s’accrochait à l’intrigue, à la faveur, au mensonge, à l’adulation et jusqu’à l’infamie pour se guinder d’un degré au-dessus de son état. […] Dans ce peuple d’admirateurs il est déplacé ; il n’a point l’enthousiasme profond ni les genoux pliants. […] Balzac, aussi profond et aussi puissant visionnaire que lui, n’était qu’un écrivain lent, constructeur minutieux de bâtisses énormes, sorte d’éléphant littéraire, capable de porter des masses prodigieuses, mais d’un pas lourd.

1553. (1883) Le roman naturaliste

Voulez-vous maintenant faire une chute profonde, et de ces hauteurs de l’art retomber jusqu’à M.  […] mais comme au plus profond de sa mémoire elle en gardait le cher, et vivant, et riant souvenir ! […] La vie est un profond mystère. […] Sous ce rapport, c’est un trésor d’observations psychologiques profondes et subtiles que l’œuvre de George Eliot. […] Il peut y avoir des sentiments si déliés, si profonds, si mystérieusement dissimulés dans les replis de l’inconscience qu’ils échappent aux prises du langage ordinaire.

1554. (1886) Le roman russe pp. -351

Voilà ce que j’appelais la peine historique, le trouble et le découragement profond de ce peuple à qui Dieu n’a jamais dit clairement : « Va là !  […] Voilà les eaux profondes, les eaux mères des perles. […] Le romantisme fut un divertissement à l’usage de ces derniers ; il passa au sommet de la société russe sans jeter des racines profondes dans le sous-sol. […] Du milieu du ciel, la lune regarde ; la voûte incommensurable s’étend et paraît plus profonde encore ; elle s’embrase et respire. […] Or la Russie des vingt dernières années est une énigme inexplicable, si l’on ignore l’œuvre qui a laissé dans ce pays la plus profonde empreinte, les ébranlements les plus intimes.

1555. (1893) Impressions de théâtre. Septième série

Sa franchise et son cynisme même l’ont gardé de vieillir et lui donnent, quelquefois, l’air d’une profonde sagesse. […] Joignez à cette odeur l’obscurité profonde où se joue tout ce deuxième acte. […] Même quand sa foi est profonde et son zèle pur, l’homme de Dieu subit la futilité de son auditoire. […] Cette profonde honnêteté s’accompagne de beaucoup de talent. […] Rien de très profond, pourtant, à ce qu’il semble.

1556. (1890) La bataille littéraire. Troisième série (1883-1886) pp. 1-343

Et cette grande voix s’enflait toujours, se faisait profonde, incessante ; c’était comme une fureur qui s’exaspérait. […] Mais il ne vit plus rien que bien haut au-dessus de lui un ciel immense, profond, où voguaient mollement de légers nuages grisâtres. « Quel calme, quelle paix ! […] Elle croyait qu’elle venait de boire du sang, que toute cette eau profonde, devant elle, était maintenant le sang de cet homme. […] Il faut dire de ce livre, pensé par un esprit réfléchi et profond, conçu avec humour, écrit éloquemment, que la lecture en est douce et bienfaisante. […] C’est une erreur profonde.

1557. (1895) La comédie littéraire. Notes et impressions de littérature pp. 3-379

Il ne hait pas les « bourgeois », il les juge ridicules ; au contraire, les littérateurs lui inspirent une aversion profonde. […] Pierre se contente d’errer dans les forêts et de pousser de profonds soupirs. […] Que Victor Hugo était jusqu’au fond, jusqu’au tréfond de l’âme, poète, au sens primitif et profond du mot. […] La plus profonde fut celle de Stendhal. […] Cela est attachant, cela est ingénieux, cela est, par endroits, profond et subtil.

1558. (1894) Critique de combat

Voulez-vous les réformes profondes que réclame le parti socialiste ? […] Le mage Y…, auteur de cet ouvrage magistral, s’y montre toujours un kabaliste profond doublé d’un merveilleux conteur. […] Mais il est bien permis de chercher là une intention plus profonde de l’auteur. […] L’autre est le métaphysicien, beaucoup plus profond et plus abstrus, le théoricien du monde comme volonté et de la liberté transcendantale. […] Il montre surtout (et c’est aujourd’hui une vérité acquise qui a seulement besoin d’être précisée et appliquée dans le détail) la liaison intime qui unit chaque changement profond dans le domaine artistique à une profonde transformation sociale.

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