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944. (1913) Le bovarysme « Quatrième partie : Le Réel — V »

C’est que les instincts naturels, — sentiment de la famille, amour de la liberté individuelle, attachement aux biens immédiats et à la vie présente, — formes de l’égoïsme élémentaire, représentants d’une réalité antérieure à la genèse des sociétés humaines et contemporaine des premiers stades de la biologie, c’est que ces instincts réagissent maintenant contre la contrainte que leur imposa la croyance. […] Une réalité est d’autant plus modifiable, elle peut accepter indifféremment un nombre d’autant plus grand de vérités nouvelles qu’elle a subi moins longtemps le joug d’une vérité spéciale ; car, dans ce et », elle est encore indéterminée, elle est encore, dans une certaine mesure, une matière première. À cette réalité informe s’applique le mot de Nietzsche : « Mieux vaut n’importe quelle règle que point de règle du tout. » La première condition de sa formation sera l’autorité sur elle de la vérité qui la contraindra : par là elle acquerra cet élément premier de toute réalité : la durée.

945. (1894) Notules. Joies grises pp. 173-184

En ce quatrain, on peut noter comment le son final du premier vers trouve dans les assonances des derniers un écho progressivement affaibli. […] III Car ayant parlé des phénomènes d’assonance, je ne dois pas laisser de côté ceux d’allitération, — intimement liés aux premiers. — Les mots étant composés de consonnes et de voyelles, il s’avère que par un habile usage des consonnes on accroîtra le plaisir musical des vers comme on fait avec l’assonance. […] Comme la phrase s’alanguit dans ces deux vers, jusqu’à en mourir, et chante l’ondulation des vagues d’étang qui déferlent silencieusement vers les berges (redoublement des l) ; comme se balancent et palpitent les ramées frôlées d’ailes d’oiseaux (les trois v du premier vers), et soudain dans le lointain éclate la fanfare sombre des cors (dort, mort) et se prolonge la plainte altière et virginale d’une qui se meurt d’avoir été chaste.

946. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre VII. Des ouvrages périodiques. » pp. 229-243

Son premier ouvrage en ce genre parut sous le titre de Nouvelliste du Parnasse. […] La liberté qu’a l’auteur de dire naturellement ce qu’il pense des ouvrages nouveaux, la critique piquante qui caractérise ses écrits, lui ont conservé la réputation que ses premiers essais en ce genre lui avoient acquise. […] Les deux premiers volumes qui paroissent annoncent que les auteurs ne sont point au-dessous de leur entreprise.

947. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Philippe II »

Cet historien de Philippe II n’a tenu aucun compte des desiderata que j’avais posés quand il publia les deux premiers volumes de son histoire. […] Rien, en ces deux derniers volumes, n’a modifié le jugement que j’ai déjà porté sur l’auteur des deux premiers et sur sa manière de considérer les choses historiques59. […] Avant l’histoire de Forneron, on savait déjà beaucoup sur ce temps terrible, mais, après cette histoire, je ne crois pas qu’on ait beaucoup à apprendre encore… et même le Forneron des deux derniers volumes surpasse, en renseignements, le Forneron des deux premiers.

948. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Avellaneda »

Soit cette admiration naïve comme en ont souvent les esprits qui vivent sur les idées d’un grand homme, car la moyenne de l’humanité n’est guère plus qu’une plèbe servile de rabâcheurs, soit la spéculation qui déchiquète à son profit toute célébrité nouvelle, les imitateurs de Cervantes se levèrent de toutes parts au premier coup de cloche de sa gloire. Il n’avait publié que les cinq premiers livres de son Don Quichotte ; presque immédiatement les suites pullulèrent. […] si les types créés par le génie pouvaient s’animer et se mouvoir sous la main du premier venu qui les aurait dérobés, comme un sac de marionnettes ?

949. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Taine »

Je vois bien que le métaphysicien de ce livre de métaphysique est un physicien de premier ordre, que le psychologue est un fameux physiologiste et aussi un algébriste et un géomètre, et je crois jusqu’au crocodile ! […] Mais, philosophiquement, je n’ai qu’à examiner le principe premier de Taine, qui est la sensation, quoi qu’elle devienne. […] Toutes ces constructions de sensations, toutes ces reviviscences d’images, toutes ces études d’hallucination, toutes ces dentelles d’analyses physiologiques faites au microscope, tous ces fils de la Vierge qu’on nous montre entre l’index et le pouce, toutes ces bluettes, en fin, qu’on veut nous donner et qu’on nous donne, c’est pour que nous ne puissions apercevoir du premier regard le but où l’on veut nous conduire, et ce but, c’est de réduire les plus grandes et les plus vivantes choses qu’il y ait dans le cœur et la tête de l’homme : Dieu, l’âme et le devoir, à n’être qu’une vile sensation, un ridicule bruit de sonnette dont on tire le cordon, en attendant qu’avec ce cordon on puisse les étrangler.

950. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Camille Jordan, et Madame de Staël »

Il aimait certes la liberté, ce fut son aspiration première, et il ne l’abjura jamais. […] J’ai sous les yeux un seul de ces premiers écrits volants, devenus bien rares et presque introuvables, qu’il lançait sous divers noms. […] Mon père a dit en parlant de cette traduction : « Elle met le traducteur sur la première ligne des écrivains. » Croyez-moi, c’est ainsi que tous les hommes dignes de vous vous jugeront. — À présent, parlons des moyens de faire connaître en Allemagne cette belle imitation de leur premier poète. […] Je vous enverrai Johnson 131 au premier jour. […] Il lui avait présenté son ami Ballanche, qui, du premier jour, se voua à elle comme à une Béatrix.

951. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre V. La philosophie. Stuart Mill. »

Comte au premier rang, ensuite Hume et Newton. —  Est-ce un systématique, un réformateur spéculatif ? […] Car regardez d’abord votre premier argument. […] Le premier conséquent est-il joint au premier antécédent, ou bien au troisième, ou bien au sixième ? […] Nous en concluons que le second fait est l’antécédent du premier. […] Voyez les seconds analytiques, si supérieurs aux premiers : δί αἰτίων χαὶ προτέρων.

952. (1895) Nouveaux essais sur la littérature contemporaine

Aimé Martin, son premier biographe, le nie avec indignation, et se porte garant de la vertu de Bernardin de Saint-Pierre. […] Biré, par hasard, a-t-il craint que nous n’eussions pas entendu sa première insinuation ? […] Mettons en deux ou trois à part, dont Sainte-Beuve au premier rang. […] Renan pour ne reconnaître dans le passé de l’humanité que trois histoires de « premier intérêt ». […] Gumplowicz, essayer de prouver que « l’homme depuis sa première apparition a toujours été homme ».

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