Il avait les gens du métier à édifier, à convaincre ; et ils sont difficiles, ils sont en armes, on le sait, contre tout nouveau-venu, surtout quand celui-ci se présente avec des titres brillants, acquis ailleurs. […] Nous n’avons rien de tel à faire à propos de Colomba, si récente ou plutôt si présente, et que tout le monde a lue. […] Lorsqu’une œuvre puissante, marquée de beautés fortes, poétiques, chargée aussi de bizarrerie et d’excès, se pose devant lui, il peut la méconnaître ; mais dès qu’une production parfaite se présente, il dit du premier coup : C’est cela !
Il publia, en 1654, une traduction en vers de l’Eunuque de Térence ; et l’un des parents de sa femme, Jannart, ami et substitut de Fouquet, emmena le poëte à Paris pour le présenter au surintendant. […] Ses manuscrits présentent beaucoup de ratures et de changements ; les mêmes morceaux y sont recopiés plusieurs fois, et souvent avec des corrections heureuses. […] Quant à l’article sur madame de Sévigné, il appartient de droit à celui de nos volumes qui, dans la présente collection, est particulièrement consacré aux femmes ; il en fait le début.
Partant, de que nous appelons une idée générale, une vue d’ensemble, n’est qu’un nom, non pas le simple son qui vibre dans l’air et ébranle notre oreille, ou l’assemblage de lettres qui noircissent le papier et frappent nos yeux, non pas même ces lettres aperçues mentalement, ou ce son mentalement prononcé, mais ce son ou ces lettres doués, lorsque nous les apercevons ou imaginons, d’une propriété double, la propriété d’éveiller en nous les images des individus qui appartiennent à une certaine classe et de ces individus seulement, et la propriété de renaître toutes les fois qu’un individu de cette même classe et seulement quand un individu de cette même classe se présente à notre mémoire ou à notre expérience. — La seule différence qu’il y ait pour nous entre le mot bara, qui ne signifie rien, et le mot arbre, qui signifie quelque chose, c’est qu’en entendant le premier nous n’imaginons aucun objet ou série d’objets appartenant à une classe distincte et qu’aucun objet ou série d’objets appartenant à une classe distincte ne réveille en nous le mot bara, tandis qu’en entendant le second nous nous figurons involontairement un chêne, un peuplier, un poirier ou tel autre arbre, et qu’en voyant un arbre quelconque nous prononçons involontairement le mot arbre. […] À ce titre, il correspond à la qualité commune et distinctive qui constitue la classe et qui la sépare des autres, et il correspond seulement à cette qualité ; toutes les fois qu’elle est présente, il est présent ; toutes les fois qu’elle est absente, il est absent ; il est éveillé par elle et n’est éveillé que par elle. — De cette façon, il est son représentant mental et se trouve le substitut d’une expérience qui nous est interdite. […] Ce langage est mouvant, incessamment transformé, autre que le nôtre ; non seulement les mots y sont défigurés ou inventés, mais encore le sens des mots n’y est pas le même que dans le nôtre ; jamais un enfant, qui pour la première fois prononce un nom, ne le prend au sens exact que nous lui donnons ; ce sens est pour lui plus étendu ou moins étendu que pour nous, proportionné à son expérience présente, chaque jour élargi ou réduit par ses expériences nouvelles, et très lentement amené aux dimensions précises qu’il a pour nous6. — Une petite fille de dix-huit mois rit de tout son cœur quand sa mère et sa bonne jouent à se cacher derrière un fauteuil ou une porte et disent : « Coucou. » En même temps, quand sa soupe est trop chaude, quand elle s’approche du feu, quand elle avance ses mains vers la bougie, quand on lui met son chapeau dans le jardin parce que le soleil est brûlant, on lui dit : « Ça brûle. » Voilà deux mots notables et qui pour elle désignent des choses du premier ordre, la plus forte de ses sensations douloureuses, la plus forte de ses sensations agréables.
Toute secte se présente à nous avec des limites ; or, une limite quelconque est ce qu’il y a de plus antipathique à notre étendue d’esprit. […] Le bon sens a fait justice de cette singulière école esthétique de l’ironie, mise en vogue par Schlegel, où l’artiste, se drapant fièrement dans sa virtuosité et sa génialité, faisait exprès de ne présenter que des choses fades et insignifiantes, puis haussait les épaules sur le sens obtus du public, qui ne pouvait goûter ces platitudes. […] Voir d’admirables pages de Spiridion, présentées cependant sous des formes trop substantielles.
La poésie elle-même présente une marche analogue. […] Voilà ce qui a succédé au développement littéraire le plus idéaliste que présente l’histoire de l’esprit humain, et cela non par une déduction logique ou une conséquence nécessaire, mais par contradiction réfléchie et en vertu de cette vue prédécidée : la grande école a été idéaliste ; nous allons réagir vers le réel. […] Les langues présentent un développement analogue.
Cette armée de Bourgogne dont il est alors, et qui se présente avec tant de faste, ne lui paraît, de près, se composer que de gens mal armés, maladroits, rouillés par une longue paix de trente ans. […] Rien n’est plus largement présenté, plus clair, plus circonstancié que cette bataille de Froissart, mieux suivi dans les moindres épisodes en même temps que nettement posé dans l’ensemble, et couronné par une scène tout héroïque. […] Le nom de Tacite se présente ici naturellement avec l’image de Tibère s’enfermant dans l’île de Caprée ; mais le récit de Tacite est d’un caractère à la fois plus atroce et plus grand.
Le grand art est de les ménager, de ne point prétendre leur dicter à l’avance les impressions qui doivent résulter simplement de ce qu’on leur présente. […] D’autres extraits dans lesquels il présenta successivement les batailles d’Azincourt, de Poitiers et de Crécy, d’après les anciens historiens et chroniqueurs, parurent un moment choquer le patriotisme de l’auditoire, et il lui en vint des plaintes dans une lettre, d’ailleurs respectueuse. […] Elles n’ont eu jusqu’ici aucun inconvénient, et elles présentent déjà de bons résultats, qui ne sont qu’une promesse de ce qu’on pourrait en attendre.
Il chercha comment il pourrait le dérober à ce danger ; bientôt ce moyen se présenta à sa pensée ou plutôt à son cœur. […] Corvisart dans sa jeunesse est informé qu’une place de médecin est vacante à l’hôpital Necker : il se présente chez la respectable fondatrice, Mme de Necker ; mais il ne porte point perruque, nonobstant l’usage. […] Il y a des coins de vérité qu’on présentera plus agréablement sous un léger voile.
La première fois qu’il le présenta à la reine après cette affaire de Casal : « Madame, lui dit-il, vous l’aimerez bien, il a l’air de Buckingham. » S’il se permit, en effet, une telle parole, il ne savait pas prédire si juste. […] Il était nu dans sa robe de chambre de camelot fourrée de petit-gris, et avait son bonnet de nuit sur la tête ; il me dit : « Donnez-moi la main : je suis bien faible ; je n’en puis plus. — Votre Éminence ferait bien de s’asseoir. » Et je voulus lui porter une chaise. « Non, dit-il, non ; je suis bien aise de me promener, et j’ai affaire dans ma bibliothèque. » Je lui présentai le bras, et il s’appuya dessus. […] M. de Laborde a réussi dans son apologie de Mazarin, en ce sens qu’après l’avoir lu on emporte de l’esprit du ministre, de ses qualités aimables et puissantes, une idée fort présente et fort vive, égale à tout ce qu’on en pouvait penser déjà.