On garde son sang-froid même dans l’observation la plus appliquée ou dans l’émotion la plus forte, et malgré soi on porte partout cette arrière-pensée que tout est vanité. […] Jeanne est serrée dans son châle noir et Henri porte un crêpe à son chapeau de paille ; mais ils sont tous deux brillants de jeunesse et ils se sourient doucement l’un à l’autre, ils sourient à la terre qui les porte, à l’air qui les baigne, à la lumière que chacun d’eux voit briller dans les yeux de l’autre.
Lorsque tous les deux l’ont assuré que Virginia est venue ouvrir la porte à Fabio qui est entré et qui est resté trois heures avec elle et en est sorti après, conduit par elle-même, Flaminio leur dit qu’ils en ont menti tous les deux, qu’il a passé la nuit tout entière en conversation avec Virginia, qui est venue lui parlera la fenêtre grillée à côté de la grande porte de la maison ; qu’elle ne l’a pas quitté un moment, toujours déclamant contre Fabio qui la déshonore si indignement. […] Mais pour les contemporains, la distance qui le séparait des autres ne paraissait pas aussi grande qu’elle nous le paraît, à nous ; témoin ce curieux tableau que possède le Théâtre-Français et qui porte pour inscription, écrite en lettres d’or : Farceurs Français et Italiens, depuis soixante ans.
C’est donc le plaisir que nous donne un objet qui nous porte vers un autre ; c’est pour cela que l’ame cherche toûjours des choses nouvelles, & ne se repose jamais. […] Cette disposition de l’ame qui la porte toûjours vers différens objets, fait qu’elle goûte tous les plaisirs qui viennent de la surprise ; sentiment qui plaît à l’ame par le spectacle & par la promptitude de l’action, car elle apperçoit ou sent une chose qu’elle n’attend pas, ou d’une maniere qu’elle n’attendoit pas. […] nous ont été formidables, Satrique & Cornicule étoient des provinces : nous rougissons des Boriliens & des Véruliens ; mais nous en avons triomphé : enfin Tibur notre fauxbourg, Preneste où sont nos maisons de plaisance, étoient le sujet des voeux que nous allions faire au capitole » ; cet auteur, dis-je, nous montre en même tems la grandeur de Rome & la petitesse de ses commencemens, & l’étonnement porte sur ces deux choses.
Quoique le plan du livre le divise par chapitres dont chacun porte un titre distinct, La Bruyère ne s’y astreint pas si étroitement qu’un certain nombre d’observations ne trouvent à s’appliquer hors de ce cercle et ne soient plus générales que le titre. […] Pour que l’avertissement du moraliste porte coup, pour que les portraits du peintre respirent, ni l’expression ne peut être trop forte, ni les couleurs trop vraies. […] Certains portraits de La Bruyère sont excessifs, moins encore par l’exagération que par le trop grand nombre de traits ; chaque original en porte plus que sa charge : ce sont les Hercules du ridicule.
La raison en est qu’il porte son sens en lui, non pas d’une façon apparente, mais d’une manière secrète, de même que l’arbre porte en sa graine le fruit qui en naîtra. […] J’ai gardé à cette conférence, faite à la Société des Conférences, le 6 février 1900, le même titre que porte l’excellent recueil de Morceaux choisis que MM.
Il semble que, Dieu ayant donné la raison aux hommes, cette raison doive les avertir de ne pas s’avilir à imiter les animaux, surtout quand la nature ne leur a donné ni armes pour tuer leurs semblables ni instinct qui les porte à sucer leur sang. » Ces mêmes obstinés, trouvant étrange qu’on offrît pour modèles à l’humanité les loups et les ours, ont dit encore : Quand même l’histoire prouverait que de grands empires d’autrefois se sont formés par ce vol à main armée qu’on appelle la conquête, quand même de grands empires d’aujourd’hui ne seraient qu’une agglomération de provinces ou de colonies soudées de force ensemble, s’ensuit-il que le passé puisse servir de règle à l’avenir et qu’il soit permis de confondre ce qui a été ou ce qui est avec ce qui doit être ? […] § 3. — Il est dans nos codes une partie qui se lie plus intimement encore à la littérature : c’est celle qui porte sur la publication de la pensée et sur les profits que l’auteur peut en tirer. […] Est-ce parce que la pensée indépendante, volontiers novatrice et aventureuse, se heurte au passé cristallisé dans les formules rigides des codes, se sent en désaccord avec l’esprit d’un corps qui, par la langue qu’il parle, le costume qu’il porte, les usages qu’il pratique et maintient, est régulièrement en retard sur les idées et les mœurs de son temps ?
Esprit méthodique, son improvisation elle-même porte ce cachet de méthode et n’a rien du laisser-aller ni de l’abandon. […] Dans l’un comme dans l’autre cas, la chance est bonne, et la meilleure pour vous serait une sortie par la grande porte. » M. de Broglie avait pratiqué à l’avance ce conseil ; il sentait qu’il ne gouvernait plus son ministère ni la Chambre ; il avait fait sa tâche pour le moment, et il sortit par la grande porte : c’est la seule par où il sorte toujours.
C’est cette même haine rationnelle qui porte Condorcet à insulter du même coup Colbert, dont M. […] Cette terrasse, qui peut donner accès à l’insurrection populaire et à l’invasion des Tuileries, lui est très chère, et il applaudit au décret de l’Assemblée qui porte que l’accès en sera ouvert au peuple (29 juillet 1792). […] Il ne s’est commis aucun désordre dans le château, car une ou deux portes forcées, quelques vitres cassées, ne peuvent être comptées, lorsque vingt ou trente mille hommes pénètrent à la fois dans une habitation dont ils ne connaissent pas les issues.
Il ne se dissimulait pas que ce talent brillant qu’il portait avec lui, qu’il déployait avec complaisance dans les cercles, et dont jouissait le monde, lui attirait aussi bien des envies et des inimitiés : « L’homme qui porte son talent avec lui, pensait-il, afflige sans cesse les amours propres : on aimerait encore mieux le lire, quand même son style serait inférieur à sa conversation. » Mais Rivarol, en causant, obéissait à un instinct méridional irrésistible. […] L’esprit de critique est un esprit d’ordre ; il connaît des délits contre le goût et les porte au tribunal du ridicule ; car le rire est souvent l’expression de la colère, et ceux qui le blâment ne songent pas assez que l’homme de goût a reçu vingt blessures avant d’en faire une. […] Il les montre possédés d’une manie d’analyse qui ne s’arrête et ne recule devant rien, qui porte en toute matière sociale les dissolvants et la décomposition : Dans la physique, ils n’ont trouvé que des objections contre l’Auteur de la nature ; dans la métaphysique, que doute et subtilités ; la morale et la logique ne leur ont fourni que des déclamations contre l’ordre politique, contre les idées religieuses et contre les lois de la propriété ; ils n’ont pas aspiré à moins qu’à la reconstruction du tout, par la révolte contre tout ; et, sans songer qu’ils étaient eux-mêmes dans le monde, ils ont renversé les colonnes du monde… Que dire d’un architecte qui, chargé d’élever un édifice, briserait les pierres, pour y trouver des sels, de l’air et une base terreuse, et qui nous offrirait ainsi une analyse au lieu d’une maison ?