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1298. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XII. Des panégyriques ou éloges des princes vivants. »

Peut-être il eût été à souhaiter qu’au moment où le premier orateur se présenta pour prononcer le premier panégyrique devant un prince, même vertueux, un citoyen plein de courage se mît tout à coup entre le prince et l’orateur, et élevant sa voix avec force, s’écriât : « Prince, qu’oses-tu permettre, et que vas-tu entendre ?

1299. (1907) Propos littéraires. Quatrième série

Un monde organique plein de défauts ne devrait pas se rencontrer. » D’accord. […] Des milliers de germes pleins d’espérance doivent inutilement périr à chaque minute. […] Je n’en ai pas moins été très captivé par cet écrit très intelligent, très inspirateur, tout plein d’idées et souvent d’idées originales. […] Réduit aux grandes passions, en leurs moments de pleine expansion et de pleine clarté, il est donc très borné et condamné aux répétitions et à une certaine monotonie. […] Tarde et de sa hâte à écrire et à publier un livre qui lui paraît utile et qui l’est en effet, je n’ai qu’à admirer cet ouvrage si plein d’informations, si plein d’idées et si inspirateur.

1300. (1923) Au service de la déesse

Oui ; et elle est toute pleine de joie patriotique. […] La vie de l’abbé Prévost, quel roman, tout plein de désordre ! […] Et leurs rêves sont tout pleins de vieille barbarie méconnue. […] On les a pris pour des bâtisseurs pleins d’entrain : surtout, ils ont été de frivoles démolisseurs. […] Et moi aussi je suis plein d’un dieu, je suis plein d’ignorance et de génie !

1301. (1863) Histoire de la vie et des ouvrages de Molière pp. -252

Notre auteur, charmé d’abord de l’aisance pleine de grâce du jeune aspirant, fut plus étonné encore du talent avec lequel il débitait. […] Il était plein de ce sombre projet quand Fouquet sollicita la faveur de lui donner à Vaux la fête dont nous avons énuméré les merveilles. […] Ce poète si pédantesque, ce Lysidas si plein de lui-même, selon la clef, c’était le jeune Boursault. […] Plein de ses justes griefs, plus plein encore de sa passion, il avait donné à Célimène toute la coquetterie d’Armande, en même temps qu’il l’avait ornée de tous ses charmes, de tout son art séducteur. […] Quelques commentateurs, entre autres Bret, ont prétendu que Molière, plein de l’ouvrage qu’il méditait, se trouvait un jour chez le nonce du pape avec plusieurs saintes personnes.

1302. (1859) Moralistes des seizième et dix-septième siècles

Sur le pouvoir de la coutume et de l’opinion, on le sait plein de remarques saisissantes de justesse et de pénétration, et souvent on en a appelé à son témoignage. […] Il n’y aurait pas de raison bien pressante d’introduire Dieu dans la vie, si la vie durait toujours ; mais elle a une fin, une fin mystérieuse, pleine de pressentiments, pleine de terreurs. […] Ce n’est pas une entiere liberté ; nous tournons encores la veue vers ce que nous avons laissé ; nous en avons la fantasie pleine. […] Espérez-vous bien d’expliquer par l’amour-propre tant de belles notions dont l’histoire est pleine ? […] Toujours plein d’une pensée, chaque sujet le ramène à son sujet ; que dis-je, l’y ramène ?

1303. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins » pp. 185-304

La vie n’est pas semblable à ces fontaines d’Auvergne, pleines de sédiments impurs, qui pétrifient ce qu’on leur jette, et qui, au lieu d’une fleur ou d’un fruit, vous rendent une pierre. […] Thiers n’était pas encore ce qu’il est ; l’âge et la vie publique pleine de bon sens, de fautes expiées, de leçons terribles, n’avaient pas donné encore à son esprit ce sens de la moralité ou de l’immoralité des événements et des caractères qui est la vertu de l’histoire. […] « Quand j’aurai chanté en moi-même et pour quelques âmes musicales comme la mienne, qui évaporent ainsi le trop-plein de leur calice avant l’heure des grands soleils, je passerai ma plume rêveuse à d’autres plus jeunes et plus véritablement doués que moi ; je chercherai dans les événements passés ou contemporains un sujet d’histoire, le plus vaste, le plus philosophique, le plus dramatique, le plus tragique de tous les sujets que je pourrai trouver dans le temps, et j’écrirai en prose, plus solide et plus usuelle, cette histoire, dans le style qui se rapprochera le plus, selon mes forces, du style métallique, nerveux, profond, pittoresque, palpitant de sensibilité, plein de sens, éclatant d’images, palpable de relief, sobre mais chaud de couleurs, jamais déclamatoire et toujours pensé ; autant dire, si je le peux, dans le style de Tacite ; de Tacite, ce philosophe, ce poète, ce sculpteur, ce peintre, cet homme d’État des historiens, homme plus grand que l’homme, toujours au niveau de ce qu’il raconte, toujours supérieur à ce qu’il juge, porte-voix de la Providence qui n’affaiblit pas l’accent de la conscience dont il est l’organe, qui ne laisse aucune vertu au-dessus de son admiration, aucun forfait au-dessous de sa colère ; Tacite, le grand justicier du monde romain, qui supplée seul la vengeance des dieux, quand cette justice dort ! […] Je croyais de plus, dans mon ignorance des assemblées, qu’il suffisait de monter plein de pensées, de passions et de raison à la tribune, pour y trouver, dans l’inspiration du marbre et du bois, des paroles capables de dominer ou d’enthousiasmer l’auditoire ; je voulais en faire l’épreuve le plus tôt possible, prendre la tribune d’assaut, et fixer mon rang dans l’éloquence, puisque je ne pouvais pas encore fixer ma politique dans les partis. […] Chacun se leva et se retira plein de doutes.

1304. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLIXe Entretien. L’histoire, ou Hérodote »

Son livre est plein de critique ; c’est un homme d’esprit sans parti pris, qui vous mène promener à travers le monde et qui vous dit : « Regardez et concluez. » Il a aussi beaucoup d’analogie avec Voltaire dans ses Mœurs des nations. […] » Crésus, frappé de cette réflexion, et se laissant aisément persuader par ce discours plein de sens, renonça aux préparatifs maritimes qu’il avait commencés ; il fit même un traité d’hospitalité réciproque avec les Ioniens des îles. […] Ils nourrissent leurs chevaux et les autres bêtes de somme avec du poisson, qui abonde tellement, qu’il suffit pour le pêcher d’ouvrir la trappe sur le lac et de descendre dans l’eau une corbeille de jonc vide, que l’on retire un moment après entièrement pleine. […] « Cependant, au lever du soleil, Xerxès, ayant fait des libations, attendit l’heure du marché plein pour se mettre en mouvement : c’était celle qui avait été convenue avec Épialte, et calculée sur la descente de la montagne, qui demandait moins de temps que la montée. […] L’âge de la critique était venu : son livre en est plein.

1305. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1893 » pp. 97-181

Une triste impression que de se retrouver ici, où mon frère était déjà si malade, d’avoir en face de soi cette maison de Callou, autrefois si bruyante, si joyeusement sonore, maintenant silencieuse, de marcher solitaire, sous ces arceaux de pâles platanes, qui font ressembler le vieux parc, plein de jaunes figures, à de mélancoliques Limbes. […] Alors ma voisine me dit : « Quand une femme est arrivée au moment, où l’essai de ses robes ne lui prend plus tout son temps, où l’amour ne l’amuse plus, où la religion ne s’en est pas emparée, elle a besoin de s’occuper d’une maladie, et d’occuper un médecin de sa personne. » Mardi 4 juillet Là, en ce centre de Paris, au milieu de ces habitations, toutes vivantes à l’intérieur, là, en ce plein éclairage a giorno de la ville, sur cette Maison Tortoni ; 22, cette maison avec ses lanternes non allumées, avec ses volets blancs fermés, son petit perron aux trois marches, où dans mon enfance, se tenaient appuyés, un moment, sur les deux rampes, de vieux beaux mâchonnant un cure-dent, aujourd’hui vide, il me semble lire une bande de papier, écrite à la main : « Fermé pour cause de décès du Boulevard Italien. » Samedi 8 juillet Enterrement de Maupassant, dans cette église de Chaillot, où j’ai assisté au mariage de Louise L… que j’ai eu, un moment, l’idée d’épouser. […] Dimanche 9 juillet Des nuits pleines de cauchemars, et qui me font avant de me coucher, peur du lit ; des journées pleines de prévisions pessimistes pour le restant de ma vie. […] Puis, Sarah vient s’asseoir à côté de moi, me dit que la pièce est pleine de passion, que le dernier tableau lui paraît superbe, et me demande de lui laisser, pour lire le quatrième et le cinquième tableau, qui n’ont pas été lus.

1306. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre III. Variétés vives de la parole intérieure »

Si la passion entre en jeu, la parole intérieure devient plus forte ; l’articulation en est plus précise et plus ferme, l’intonation plus variée ; la parole intérieure est devenue vivante, accentuée, véhémente, émue, un peu plus lente aussi, chaque mot ayant alors un sens plus plein, et l’âme se plaisant, pour ainsi dire, à savourer un court instant chacune de ses idées. […] 5° Enfin il est vraisemblable que ces pressentiments fâcheux, que ces répulsions obscures, plus ou moins confusément exprimées dans la succession de ses états internes, n’étaient pas sans rapports avec la sagesse profonde dont il avait, dans toute autre circonstance, pleine coscience ; souvent, la voix démonique ne fut pour Socrate que l’intuition synthétique d’une vérité qui lui apparaissait ensuite sous forme dialectique et développée, et qu’un peu plus tard il eût trouvée tout d’abord sous cette forme si le brusque signal n’eût devancé la marche régulière de la pensée214. […] Témoignages du sens commun sur les variétés vives de la parole intérieure La littérature est pleine d’allusions aux variétés vives de la parole intérieure. […] Les paroles que le comédien prononce en aparté sont toujours faites pour être dites intérieurement ou murmurées à l’oreille d’un ami sur, et non pour être lancées à pleine voix, au risque de tomber dans des oreilles malveillantes ou indiscrètes. […] Ainsi, dans la Bible, la prière d’Anne, la femme stérile, qui, « le cœur plein d’amertume », demande un fils à Dieu, scandalise tout d’abord le sacrificateur Héli : « Il observait le mouvement de ses lèvres ; elle parlait en son cœur ; elle ne faisait que remuer ses lèvres, et l’on n’entendait point sa voix.

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